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Centre Meir Amit d'Information sur les Renseignements et le Terrorisme 12 juin 2011 L'organisation d'Ahmed Jibril (FPLP-CG) a condamné l'AP, le Fatah et l'Arabie Saoudite pour les heurts violents survenus dans le camp de réfugiés d'al-Yarmuk. 1 L'AP et le Fatah ont vivement condamné les "crimes" de Jibril, tandis que les médias de l'AP ont désapprouvé le régime syrien pour l'incident. Le Hamas, reconnaissant sa dépendance à la Syrie, a essayé de ne pas prendre parti. Ahmed Jibril à conférence de presse organisée par les organisations terroristes à Damas le 8 juin. Il a condamné l'Autorité Palestinienne, le Fatah et l'Arabie Saoudite pour les heurts violents dans le camp de réfugiés d'al-Yarmuk, et a nié que les membres de son organisation avaient ouvert le feu sur les manifestants. A sa droite se trouve Moussa Abu Marzouq, le chef adjoint du bureau politique du Hamas (aljazeera.net, 9 juin 2011) 1 Suite de notre article du 7 juin 2011 intitulé : “Suite aux événements de la Journée de la Naksa, l'organisation d'Ahmed Jibril (FPLP-CG), affiliée au régime syrien, et d'autres organisations pro-syriennes ont été critiquées sur la scène interne palestinienne”, à l'adresse http://www.terrorism-info.org.il/malam_multimedia/fr_n/pdf/ipc_f200.pdf 133-11 קל 2 Aperçu général 1. Un conflit palestinien interne majeur a suivi la mort d'environ cinq personnes et les blessures de 20 autres dans les heurts violents qui ont éclaté dans le camp de réfugiés d'al-Yarmuk après la Journée de la Naksa. 2. Le conflit oppose d'un côté l'AP et le Fatah, qui se placent en protecteurs des intérêts nationaux palestiniens et le FPLP-CG ainsi que d'autres organisations terroristes pro-syriennes, mandataires du régime d'Assad. Ces organisations sont perçues comme aidant le régime syrien à profiter des Palestiniens, dans le but de détourner l'attention du public de la crise interne syrienne. 3. Les deux côtés ont échangé de sérieuses accusations : a. La direction de l'AP et le Fatah ont vivement condamné les coups de feu tirés sur les manifestants palestiniens dans le camp d'al-Yarmuk par des membres armés du FPLP-CG. L'AP a qualifié l'incident de "massacre collectif et aveugle", tandis que des porte-parole du Fatah ont déclaré que le FPLP-CG devrait être banni de l'OLP. Al-Hayat Al-Jadeeda, un journal affilié à l'AP, a accusé le régime syrien, qui "vit ses derniers moment", de tenter de détourner l'attention publique loin de la crise domestique à la frontière israélo-syrienne. b. Des porte-parole du FPLP-CG et d'autres organisations pro-syriennes ont organisé une conférence de presse à Damas pendant laquelle ils ont lancé de fausses allégations contre Abu Mazen et Mohammed Dahlan, aussi bien que contre des "éléments saoudiens", disant qu'ils étaient derrière les heurts violents dans le camp de réfugiés. Leur objectif avancé s'inscrirait dans le cadre d'un "plan" pour porter atteinte à la Syrie ainsi qu’à la "résistance", et de promouvoir les intérêts des Etats-Unis et d'Israël. Ahmed Jibril a promis que "ceux qui ont été arrêtés" feraient bientôt une apparition médiatique pour présenter des aveux publics. 4. De son côté, le Hamas a adopté une attitude discrète quant à l'incident. Tandis que Moussa Abu Marzouq a assisté à la conférence de presse lors de laquelle Ahmed Jibril a condamné l'AP et le Fatah,2 ses commentaires de l'incident étaient beaucoup plus modérés que ceux d'Ahmed Jibril. D'autre part, Felesteen, un journal publié par le Hamas dans la bande de Gaza, a exigé qu'une enquête soit ouverte pour faire le jour sur l'identité des responsables des tirs contre les "jeunes d'al-Yarmuk"; cependant, il a aussi évité de pointer un doigt accusateur sur le FPLP-CG. De plus, le journal a appelé à adopter une position 2 On peut le voir assis à droite d'Ahmed Jibril à la conférence de presse organisée par les organisations palestiniennes à Damas, dos aux microphones (voir la photographie sur la couverture du Bulletin d'information). 3 neutre envers l'incident en Syrie et a averti contre le risque de tomber dans le "piège d'une guerre civile". 5. Selon nous, l'attitude discrète adoptée par le Hamas et ses réactions incertaines (et parfois contradictoires) indiquent que le mouvement fait face à un dilemme sérieux : d'une part, le Hamas est idéologiquement affilié aux Frères Musulmans, qui luttent à renverser le régime de Bashar Al-Assad, et désire éviter d'être associé de trop près au régime syrien ; de l'autre, le Hamas dépend du régime syrien et de ses infrastructures militaires politiques et médiatiques situées à Damas. En conséquence, le Hamas doit faire attention. 6. Selon nous, le dilemme du Hamas est d'autant plus accru par l'incident du camp de réfugiés d'al-Yarmuk, dans lequel les efforts du régime syrien pour détourner l'attention publique de la crise interne (et pour lesquels il se sert des organisations palestiniennes pro-syriennes) sont directement confrontés aux intérêts nationaux palestiniens que l'AP et le Fatah déclarent représenter.3 Les heurts violents au camp de réfugiés d'alYarmuk – Etat des lieux 7. Selon un rapport de la chaîne Al-Jazeera, cinq personnes ont été tuées lors des violents affrontements dans le camp de réfugiés d'al-Yarmuk, dont trois membres du FPLP-CG. Parmi les victimes figure Nasser Moubarak, membre du comité central du FPLP-CG.4 Selon un précédent rapport d'Al-Jazeera, environ 20 personnes auraient été blessées à cette occasion (selon nous, le nombre de morts annoncé par Al-Jazeera est plus plausible que celui de 14 annoncé par le Fatah ; voir ci-après). 8. Selon un article du New-York Times, des témoins ont déclaré que des Palestiniens en colère ont attaqué le siège du FPLP-CG après les obsèques des sept personnes tuées pendant la Journée de la Naksa. Mohamed Rashdan, témoin oculaire âgé de 25 ans qui réside près du bureau, a déclaré que les assaillants ont commencé à lancer des pierres sur le siège. Puis, "les gardes du bâtiment ont commencé à nous tirer dessus". Il a ajouté que tous les tireurs étaient des Palestiniens et qu'il n'y avait aucun agent de sécurité syrien parmi eux.5 3 Voir notre article du 11 avril 2011 intitulé : "Le Hamas se retrouve dans une situation fâcheuse face au conflit entre sa solidarité envers des éléments des Frères Musulmans en Syrie intéressés à renverser le régime et l'attaque du cheik al-Qaradawi sur Bashar al-Assad et sa dépendance à l'aide fournie par le régime Assad à son infrastructure et son activité terroriste". 4 aljazeera.net, 9 juin 2011, Damas. 5 Isabel Kershner, “Fighters Shoot Protesters at a Palestinian Camp in Syria”, The New York Times, 7 juin 2011. 4 9. Selon Mohamed Rashdan, la manifestation palestinienne à la frontière israélo-syrienne (durant la Journée de la Naksa) a été organisée dans l'intérêt du Président Assad et la manifestation (à la frontière) n'avait rien à voir avec une demande de justice pour les réfugiés palestiniens et les résidents syriens du Plateau du Golan. De nombreux résidents du camp de réfugiés d'al-Yarmuk ont accusé le Front Populaire d'avoir organisé la protestation à la frontière pour "aider la Syrie à s'éloigner de sa crise locale". Mohamed Rashdan a ajouté qu'ils "[le FPLP-CG] nous ont impliqués dans la crise locale de la Syrie… et c'est pourquoi nous étions si fâchés de la mort de nos frères et fils."6 Réactions du FPLP-CG et d'autres organisations pro-syriennes 10. Des porte-parole du FPLP-CG ont tenu des propos inventés de toutes pièces contre l'AP et l'Arabie Saoudite, les accusant d'être responsables des heurts violents dans le camp de réfugiés d'al-Yarmuk : 7 a. Ahmed Jibril a accusé Abu Mazen et Mohammed Dahlan du Fatah d'être responsables de l'incident, leur reprochant de collaborer avec les Etats-Unis et Israël. Jibril a aussi accusé des "éléments saoudiens" de financer le groupe responsable des heurts violents d'al-Yarmuk. Il a affirmé que les "factions" (cf., les organisations terroristes pro-syriennes) inviteraient bientôt les médias à une conférence de presse pour présenter "ceux qui ont été arrêtés pour avouer [et décrire] comment ils ont reçu de l'argent de l'Arabie Saoudite et d'autres pays".8 Jibril a nié que les gardes du bureau du FPLP-CG dans le camp de réfugiés d'al-Yarmuk (le bâtiment Al-Khalisa) ont tiré sur les manifestants. Un autre responsable du FPLP-CG, Anwar Raja, a également blâmé des éléments de l'AP de Ramallah pour les violences occasionnées dans le camp de réfugiés, affirmant qu'ils allaient payer pour les crimes commis contre le peuple palestinien.9 b. Pendant la conférence de presse organisée au siège du FPLP-CG incendié le 8 juin, les organisations terroristes pro-syriennes à Damas ("les factions") ont condamné "l'agression". Elles ont déclaré que l'incident faisait partie d'un plan qui met en péril la Syrie ainsi que "la résistance" et promeut les intérêts d'Israël et des Etats-Unis. Un communiqué lu par Khalid Abd al-Majid, le président des organisations palestiniennes à Damas et chef d'une organisation mineure appelée le Front de Lutte Populaire, a qualifié l'incident de "tentative de nuire à la voie de la résistance et à l'unité des Palestiniens". Le texte a accusé des "éléments de l'AP à Ramallah" 6 7 8 9 Ibid. aljazeera.net, 9 juin 2011, Damas. Ibid. Palestine-info (citant Quds Press), 7 juin 2011. 5 d'être responsables du "plan" prévoyant de frapper la Syrie et la "résistance" ainsi que de l'incident dans le camp de réfugiés d'al-Yarmuk.10 Réactions de l'AP et du Fatah 11. Le 7 juin, la direction de l'AP a publié un communiqué condamnant les coups de feu tirés sur les manifestants palestiniens dans le camp d'al-Yarmuk par des membres armés du FPLPCG pendant les obsèques des "chahids" tués durant la Journée de la Naksa. La direction de l'AP a qualifié l'incident de "massacre collectif et aveugle" et a exprimé son opposition à "cet acte criminel et lâche, qui contredit les traditions nationales palestiniennes fondamentales". Selon le texte du communiqué, l'AP devrait enquêter sur l'incident et présenter les résultats au public en tenant les auteurs, organisations et individus, pour responsables.11 12. Un correspondant du journal Al-Quds Al-Arabi a annoncé que le Bureau central des affaires des prisonniers du Fatah à Ramallah avait publié un communiqué exigeant que l'OLP bannisse le FPLP-CG, parce que ses membres avaient tiré sur des réfugiés palestiniens pendant une manifestation organisée devant le siège de l'organisation dans le camp de réfugiés d'al-Yarmuk le 6 juin. Selon le texte, "les mercenaires d'Ahmed Jibril se sont précipités pour tuer nos frères de sang-froid, au service du diable", et ont causé la mort de 14 Palestiniens [Note : Nombre exagéré selon nous]. Azzam Abu Bakr, le président de Bureau central des prisonniers du Fatah, a affirmé que ce "crime sérieux ne restera pas impuni et le sang pur ne sera pas perdu [...]" Il a exigé qu'Ahmed Jibril ("ce criminel meurtrier") soit banni de l'OLP et a appelé à "la mise en place d'un comité d'enquête contre lui et sa mafia."12 13. Des articles publiés dans Al-Hayat Al-Jadeeda, quotidien affilié à l'AP, ont vivement condamné le FPLP-CG et le régime syrien. Ainsi : a. Yahya Rabah (Al-Hayat Al-Jadeeda, 9 juin 2011) a écrit qu'après près de 40 ans de discipline stricte sur le front du Golan, le régime syrien, qui vit actuellement ses dernières heures, a donné l'ordre de préparer une "arène de sang" à l'occasion de la Journée de la Naksa pour "détourner l'attention publique de la crise interne à la frontière syro-israélienne". Après le carnage sur le Golan, une grande colère s’est installée contre les organisations palestiniennes impliquées dans l'organisation de l'incident. Les masses populaires qui se sont réunies dans le camp de réfugiés d'Al-Yarmuk "ont été appelées à organiser des défilés de deuil non violents au siège du FPLP-CG, mais ont été prises pour cibles par des douzaines 10 11 12 aljazeera.net, 9 juin 2011, Damas. WAFA, 7 juin 2011, Ramallah. Al-Quds al-Arabi, 9 juin 2011, Ramallah. 6 de membres du FPLP-CG qui ont transformé la scène en un carnage. Les leaders des organisations à Damas, a ajouté Yahya Rabah, sont actuellement en conflit non seulement avec leurs propres populations, mais aussi avec la révolution contre le régime qui balaie la Syrie. b. Adel Abdel Rahman (Al-Hayat Al-Jadeeda, 8 juin 2011) a accusé les partisans du régime syrien d'avoir œuvré pour une conspiration avec le régime de Bashar Assad afin de faire venir les Palestiniens sur le front du Golan et les présenter en "proies pour les Israéliens". Leur but était de dissimuler le massacre du peuple syrien par le régime syrien et de détourner l'attention des crimes du régime d'Assad junior contre les masses de la révolution syrienne. Adel Abdel Rahman a ajouté que le crime de Jibril a dévoilé le laid visage des "mercenaires" qui ont collaboré avec le régime syrien et le Hezbollah dans le massacre du peuple héroïque de la Syrie. c. Selon Adli Sadeq (Al-Hayat Al-Jadeeda, 7 juin 2011), il n'est "guère étonnant qu'Ahmed Jibril se place aux côtés de ceux qui supportent le régime tyrannique et corrompu, et s'impose sur la scène palestinienne en s’identifiant au régime d'Assad, "qui tient les Syriens par le cou". L'auteur de l'article a appelé l'OLP à filmer les crimes sur la scène interne du mouvement national de même qu'il filme les "crimes de l'occupation [israélienne]", et à identifier les "chefs du crime et de la trahison" afin qu'il soit clair qu'ils ne servent aucun but, ni la réconciliation ni la participation dans le dialogue national. Adli Sadeq a conclu en disant que les "grands tyrans de la Syrie", avec de telles "marionnettes naines" comme Jibril, "finiront à la poubelle de l'histoire palestinienne et syrienne". Hamas 14. Jusqu'ici, le Hamas a adopté un profil médiatique modéré au sujet des événements récents qui se sont déroulés dans le camp de réfugiés d'al-Yarmuk, afin de tenter d'éviter de devenir excessivement impliqué dans le trouble médiatique qui a éclaté après les heurts entre l'AP et le Fatah d'une part et les organisations pro-syriennes comme le FPLP-CG de l'autre. 15. Moussa Abu Marzouq, le vice-président du bureau politique du Hamas, a participé à la conférence de presse organisée par les organisations pro-syriennes dans lesquelles elles ont vilipendé l'AP et le Fatah. Tout en rejoignant les organisations syriennes qui ont condamné l'AP et le Fatah, il a gardé un ton modéré, exprimant ses "regrets" suite au communiqué de l'OLP faisant référence aux "factions" (cf., les organisations pro-syriennes) et ignorant le "peuple palestinien". Il a prudemment tenté de parler pour les organisations 7 pro-syriennes, déclarant que ces "factions" se battent au nom des Palestiniens et ne les ont pas abandonnés. Il a affirmé que les "factions" n'avaient lancé aucun appel à participer aux manifestations du 5 juin en coordination avec les autorités syriennes. Il a également appelé l'OLP à soigneusement examiner le nombre de personnes tuées dans le conflit dans le camp de réfugiés d'al-Yarmuk avant de se prononcer sur la question.13 16. D'autre part, l'auteur d'un article publié le 9 juin dans Felesteen, un journal affilié au Hamas, a adopté une approche légèrement différente face à l'incident. Le "sang des 12 chahids du camp de réfugiés d'al-Yarmuk", selon l'article, "pourrait ne pas avoir été versé pour rien". L'auteur, Issam Shawer, proche du Hamas, a exigé une réponse urgente à la question de savoir qui a ouvert le feu sur les jeunes du camp de réfugiés d'al-Yarmuk, pour quelle raison ils ont commis ce "crime" et qui en est responsable (bien que les criminels soient clairement membres du FPLP-CG). Il a ajouté que les appels contre les factions palestiniennes allaient à l'encontre de l'unité nationale, mais ne justifient pas "l'horrible massacre", quels qu'en soient les responsables. 17. Issam Shawer a conclu l'article en déclarant que les événements tragiques dans le camp de réfugiés d'al-Yarmuk sont un "signe de mauvais augure et un complot d'ampleur contre la présence palestinienne en Syrie." Il a appelé à une "politique de contrainte" sous laquelle une "position neutre" devrait être adoptée sur l'incident en Syrie et a averti de ne pas tomber dans le piège d'une guerre civile. 13 aljazeera.net, 9 juin 2011, Damas.