carte blanche . Arno - Philharmonie de Paris
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carte blanche . Arno - Philharmonie de Paris
André Larquié président Brigitte Marger directeur général Immédiatement identifiable à sa voix rocailleuse et son accent faussement britannique, Arno excelle dans la maîtrise de l’équilibre titubant. Subtil dosage de noirceur et de dérision, l’univers european cowboy de ce chanteur flamand n’est pas sans évoquer l’ambiance des meilleurs films de Jarmush. Ses chansons peuvent avoir le ton grinçant de la fête foraine qui bascule dans le dégoût du quotidien, entre spleen rageur et comptine anglaise, errance urbaine et culture rurale, musique des Flandres et harmonica du « nouveau monde » rock bastringue et blues. Pas de poésie ostentatoire, ni de phrases au sens caché. Les mots sont simples, directs, répétés parfois, comme des leitmotivs d’une pensée vaguement alcoolisés, à moins qu’Arno ne reprenne un titre de Brel (« Le Bon dieu »), Léo Ferré (« Comme à Ostende »), Nougaro (« Sous ton balcon ») ou Adamo (« Les filles du bord de mer »). Celui qu’on appelle le « fou d’Ostende » s’exprime indifféremment en français, en anglais ou en flamand. Il a enregistré ses premiers disques en 1972. D’abord avec le groupe TC Matic puis seul, à partir de 1986, date de sortie d’un premier album éponyme chez Virgin. Passé chez Delabel depuis 1993, Arno continue de surprendre un public grandissant, album après album. Le dernier-né A poil commercial toujours hautement nourri de rock, de rhythm’n’blues et d’écho de musiques de kermesse, ajoute au trio gagnant piano-accordéon-harmonica, de splendides volutes de violons et les interventions subtiles d’une clarinette à l’accent tsigane. Reste qu’Arno est avant tout un homme de scène. C’est en concert que cet artiste inattendu prend toute sa dimension. D’où l’intérêt de cette carte blanche qui a engagé Arno dans un nouveau défi : celui de concevoir un programme spécialement adapté à cette salle pour permettre à sa musique de « jouer » avec l’espace. carte blanche à Arno vendredi 6 et samedi 7 octobre - 20h dimanche 8 octobre - 16h30 Arno Hintjens, chant, harmonica salle des concerts Mirko Banovic, basse, contrebasse, claviers Geoffrey Burton, guitare, mandoline Serge Feys, claviers, accordéon Rudy Cloet, batterie Gwen Cresens, accordéon durée du concert : environ 1 heure 30 partenaire de la cité de la musique carte blanche à Arno l’héritage du Delta carte blanche à Arno « Ça va être des nouvelles chansons et des vieilles chansons que je vais adapter à la salle même. C’est une salle qu’on ne peut pas faire qu’est-ce qu’on veut, hein ? (rires). On est obligé de jouer semi-acoustique. Cette salle semble vraiment différente des autres. Les techniciens viennent me voir à Bruxelles pour discuter du son. Je n’ai jamais eu ça dans ma vie. Je fais cent soixante concerts par an, si les techniciens de chaque salle venaient me voir à Bruxelles pour parler du son, je deviendrais fou… Je trouve ça très bizarre. Est-ce qu’ils ont peur qu’on fasse beaucoup de bruit ? Mais ça m’intéresse. Autrement, je ne le fais pas. Moi je suis prêt pour jouer à la cité de la musique. J’ai un bon feel. Ça va être vraiment Arno. Une larme et un sourire. Ce sont mes racines, mon héritage du Delta du Mississippi avec un truc européen. Pour moi, c’est très difficile de choisir des chansons parce ce que j’ai fait plus de vingt disques. J’ai décidé de faire un mélange de tout. Quand je suis sur une scène, que ce soit face à vingt mille personnes dans un festival, deux mille ou deux cents personnes dans une salle, j’oublie tout ça. Je joue de la musique. Quand les gens sont dans la salle, ils écoutent la musique et ils oublient tout le bazar autour d’eux. On me demande avant chaque concert ce que je vais donner et je réponds toujours la même chose : « Je vais faire du mieux que j’ai, sans différence ». Sinon c’est de la discrimination et ça devient dangereux. Je ne veux pas dire quelles chansons je vais chanter, parce que ce ne serait plus une surprise. Pour eux, mais pour moi aussi… Je vais faire tout un truc de mon répertoire. Quand je suis à Paris, je ne prends plus le métro à cause des affiches de ma carte blanche. J’ai vu ma tronche dans tout le métro et ça 4 | cité de la musique m’emmerde. Je suis un peu gêné, c’est bizarre. Donc je prends le taxi… Je joue avec Rudy Cloet (batterie) depuis vingt-cinq ans. Serge Feys (claviers) vient de T.C. Matic. Je joue également depuis dix ans avec Geoffrey Burton (guitare, mandoline). Mirko Bonovic (basse, contrebasse, claviers) m’accompagne depuis un an, il est originaire du Monténégro et Gwen, d’Anvers, est un virtuose de l’accordéon qui joue avec un Leslie. On continue de tourner jusqu’en novembre, la dernière date est à Prague. Je suis aussi en train de faire un nouvel album. Parallèlement, il y a une compilation de T.C. Matic qui va sortir avec des inédits, un Best Of d’Arno avec tous les singles et un coffret plein d’inédits. Ce sont mes projets. J’ai aussi des propositions pour tourner des films, mais je ne sais pas si je vais le faire. Mes enfants, c’est le plus important et tout le reste vient après. Je suis très content d’avoir des enfants parce que j’ai trouvé un amour que j’ai jamais eu avec une femme. » Durant les répétitions de sa carte blanche à la cité de la musique, Arno nous livre à chaud ses impressions, ses intentions et ses humeurs. Un précieux témoignage pour mieux comprendre le défi que représente un exercice de style de haute voltige. Arno propos recueillis en septembre 2000 par Frédéric Lecomte la guêpe et le ballon rond « J’ai fait la musique pour pas travailler. C’est une passion. Je vis depuis trente-cinq ans avec ça. Quand je me lève, je pense à la musique, quand je vais dormir, je pense à la musique. La musique, c’est vingtquatre heures dans ma tête. Mais je vois pas le travail. Pour moi, travailler, c’est travailler avec les mains. Moi, j’ai jamais fait ça. Parce que j’ai deux mains gauches comme j’ai déjà dit. C’est très bizarre, mon père m’a téléphoné il y a cinq ans pour me dire “ Dis Arno, quand est-ce que tu vas faire un vrai métier ? ” J’ai répondu : “ C’est trop tard pour changer. ” Je suis encore très étonné que les gens achètent mes disques et qu’ils vont voir un mec en concert. Quand j’ai commencé, j’étais en adoration des gens qui faisaient des concerts et que des gens allaient voir. notes de programme | 5 carte blanche à Arno carte blanche à Arno Quand j’étais petit et que j’ai vu des groupes comme The Kinks, ça m’a donné un kick. Je me suis dit : “ Ça doit être formidable que les gens viennent te voir. ” J’ai toujours ça. Peut-être c’est pour ça que j’ai des doutes avec moi-même aussi. Peut-être j’ai fait de la musique aussi contre un système. Rock’n’roll, ça veut dire “ baiser ” et “ funk ”, ça vient de “ fuck ”. On parle toujours des années soixante, mais à l’époque, c’était très marginal. Pour écouter du rock à la radio, il fallait attendre onze heures le soir. On achetait les disques dans les magasins d’électroménager. Pour moi, la rock music c’est une des plus grandes formes d’art de notre siècle. Bob Dylan, les Rolling Stones et Jimi Hendrix sont les Bach du XXe siècle. Plein de chansons de rock sont plus importantes qu’un bouquin. C’est dit en trois minutes quand les écrivains ont besoin de quatre cents pages pour expliquer un truc. Il y a des émotions, une larme et un sourire en trois minutes. C’est incroyable. Et ça peut communiquer dans le monde entier. J’ai fait de la musique pour être moi-même. J’ai acheté ma liberté avec ça. Je suis le patron de moi. Un bon patron, mais je ne crois pas à la démocratie dans un groupe de rock. Il faut être un leader. On peut pas oublier que ce sont les nazis qui ont inventé les sonos et les light shows. Hitler, c’était une pop star. Mais un con. Il y a plein de cons chez les pop stars. Des flop stars. Le moment où on est sur scène, on est un exhibitionniste. Autrement, on ne le fait pas. Quand je n’étais pas bègue… J’ai trouvé un truc pour expliquer aux autres ce que j’ai du mal à dire en parlant. C’est la musique. Je pense que tous les gens qui sont sur une scène ont eu un problème dans leur enfance. Ils ont été seuls ou coincés. Autrement, on ne s’exprime pas comme ça. Quand on est sur une scène, on détruit la timidité grâce à la musique. C’est une arme. C’est possible que la violence soit la tendresse des timides. Quand j’ai fait un bon concert, je peux dire que j’ai pensé à rien. Que mon corps et mon esprit étaient un. Si je suis malade avant de monter sur scène, après le 6 | cité de la musique concert, je suis guéri. C’est une thérapie. J’étais coincé en dehors de la maison et j’ai sauvé mon cul avec le football. J’en ai fait très longtemps. Quand j’étais footballeur, j’étais déjà en retraite. J’ai arrêté à seize ans à cause d’une guêpe. J’allais jouer un match pour les internationaux de Belgique des Fifa juniors. J’ai pris mon vélo et avant d’arriver au stade, une guêpe est entrée dans ma bouche et m’a piqué la langue. Donc j’ai pas fait le match parce que j’étais presque mort. Quelque centimètres de plus et j’étais une merde. Après, j’ai plus jamais fait le foot. Sans cette guêpe, je serais sûrement devenu footballeur professionnel et je n’aurais peut-être jamais de musique. Je suis très content qu’elle m’a piqué. » Arno propos recueillis en juin 2000 par Frédéric Lecomte notes de programme | 7 carte blanche à Arno biographies 8 | cité de la musique carte blanche à Arno Arno Hintjens Né le 21 mai 1949 à Ostende (Belgique), Arno Hintjens quitte le lycée à 18 ans et voyage à travers l’Europe. Il commence à chanter en s’accompagnant à la guitare. Il revient ensuite à Ostende où il monte son premier groupe (197072). De 1972 à 1974, Arno chante avec un autre groupe, Freckle Face, qui ne sort qu’un album, devenu aujourd’hui « collector ». Entre 1975 et 1979, il travaille avec le guitariste Paul Decoutere avec qui il forme le duo Tjens Couter. Le groupe signe un hit avec le single Honey B. Le duo tourne en Angleterre, en Belgique, en Allemagne, en France et en Hollande. Un de leurs albums sort même en Angleterre. En Allemagne, ils passent à la fameuse émission TV Rockpalast et un de leurs titres est resté plusieurs années dans le juke-box du CBGB’s de New York. Le groupe sort quatre albums chez IBC/EMI. En 1978 a lieu la première rencontre entre Arno et le cinéma ; il écrit la musique d’un film belge : Le concert d’un homme seul. En 1980, il monte le groupe TC Matic composé de JeanMarie Aerts (guitare), Rudy Cloet (batterie), Serge Fets (claviers), Ferre Baelen (basse) (remplacé par la suite par Michael Peet). Le groupe signe chez EMI, sort quatre albums, fait des tournées et festivals à travers l’Europe et en Angleterre. TC Matic se produit également à New York. Le premier album du groupe sortira dans le monde entier. Quelquesuns de leurs singles deviennent des classiques : Putain Putain, Elle adore le noir, Oh la la... En 1985, TC Matic effectue une tournée européenne de deux mois en première partie du groupe Simple Minds. Durant cette année, Arno chante à l’Opéra de Paris pendant un mois, pour des représentations de Faust. En 1986, le groupe se sépare et Arno commence sa carrière solo. Il signe chez Virgin et sort trois albums. Dans la même année, il joue le rôle principal dans un film belge : Skin, dont il écrit la musique ainsi que celle du film Les Enfants de la plage. Il effectue plusieurs tournées en Europe, notamment en Belgique, en Suisse, en France et en Hollande. Sur son premier album, Arno enregistre un duo avec la chanteuse de Technotronic. D’ailleurs, le single Whoop That Thing sera remixé par Technotronic. Arno monte alors le groupe Lala et sort le single Do The Kangourou. En 1988, la sortie de l’album Charlatan comprenant la reprise d’un titre de Jacques Brel (« Le bon Dieu »), est suivie d’une tournée en Belgique, en France, en Suisse et en Hollande. De plus en plus de gens du cinéma s’intéressent à Arno : Jacques Doillon intègre la chanson « Trouble In Mind » dans un de ses films ; de même, on peut entendre sa chanson « Jive To The Beat » dans le film Fréquence meurtre d’Elisabeth Rappeneau avec Catherine Deneuve. En 1990 sort l’album Ratata, coproduit par Jean-Marie Aerts (le com- plice de TC Matic) et en 1991, Arno signe la musique du film Merci la vie de Bertrand Blier avec Charlotte Gainsbourg, Anouk Grinberg, Gérard Depardieu, Jean Carmet, Michel Blanc... (quelques titres de ce film seront également composés par Philip Glass). Mirko Banovic Le bassiste Mirko Banovic, après ses études au Conservatoire de Gand, rencontre Nicolas Thys et Michel Hatzigeoglou. Il a travaillé, à l’occasion de concerts et de tournées, avec Arno, Erwin Vann, Dre Pallemaerts, le Magick Ballet Ensemble, Pieter van Desmet, Raymond Vanhetgroenenwoud, Kaat Dewindt, Kloot per W, Isnel Daslivera, Krewcial, Peter Vermeersch, Pierre Vervloelem et Kenny Wheeler. Il a enregistré avec Arno, Olla Volaga, Wicona Airbag, le Magick Ballet Ensemble, Kloot per W, White Wine Dark Grapes, Cinerex, Mitsu, Ash Howe (produit par Brian Ferry), Steve Lyon (produit par The Cure) et Feso Trombone (Fela Kuti). Geoffrey Burton Le guitariste Geoffrey Burton a travaillé, à l’occasion de concerts et de tournées, avec Arno, Tom Wolf, Pieter van Desmet, Rumble Fish, Buadee, Feso Trombone et JeanLouis Daulne. Il a participé aux enregistrements discographiques de ces artistes, et en particulier aux albums Water, A la française, Live, Charles And The White Trash European Blues Connection, Le European Cowboy d’Arno. Serge Feys est né en 1959 à Bonn et vit actuellement à Ostende (Belgique). Il a effectué ses études à Ostende, Gand et Bruxelles, avant de jouer avec TC Matic, Arno, Noordwaap, Rufus Thomas, Atlantic Soul Machine, Fred Wesley (avec au trombone James Brown…). Durant les dix dernières années, il a été à la fois musicien, ingénieur du son et producteur de disques en notes de programme | 9 carte blanche à Arno Belgique, Pays-Bas, Allemagne, GrandeBretagne et France. Rudy Cloet Le percussionniste Rudy Cloet a joué avec TC Matic, Hans Dulfer, Elisa Wout, Pieter Jan de Smet, Arno, Rufus Thomas, Fred Wesley, Yacha, Zéro, Atlantic Soul Machine… Gwen Cresens a terminé ses études en 1998 au Conservatoire royal d’Anvers dans les classe d’accordéon, de pédagogie et de musique de chambre. Il s’est produit dans plusieurs émissions de radio et de télévision, et a tourné en France, Espagne, au Portugal, en Italie, Suisse, Australie, Suède et aux Etats-Unis. Gwen a travaillé avec l’Orchestre philharmonique de Flandre et avec plusieurs ensembles de musique de chambre. Il a ensuite intégré l’ensemble Tanguedia qui joue la musique du compositeurbandonéoniste argentin Astor Piazzolla. Gwen Cresens a enregistré la musique de plusieurs 10 | cité de la musique documentaires de télévision (VRT, Arte), et de productions de télévision (Terug naar Oosterdonk de Frank Van Passel), des films de cinéma (S de Guido Hendricks). Il a aussi accompagné plusieurs chanteurs belges, comme Wannes Van de Velde, Patrick Riguelle, Luk De Vos, Tom Barman... Gwen Cresens joue occasionnellement avec Les P’tits Belges de Koen De Cauter, et fait partie des groupes Klezmic NoiZ (CD Davkha), Trio Dor (CD Trio Dor Live, Trio Dor/Radio 3). Gwen a fait une tournée mondiale avec La Tristeza Complice du chorégraphe Alain Platel avec la compagnie Les Ballets C. de la B. Actuellement, Gwen Cresens termine Une Vie, un programme de chansons d’Edith Piaf, interprété par Jo Lemaire. technique scénographie et création lumières Claude Bourdaleix régie générale Olivier Fioravanti régie plateau Jean-Marc Letang régie lumières Joël Boscher régie son François Gouverneur