Histoire de la grande guerre - Le - Charleville
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Histoire de la grande guerre - Le - Charleville
MAG nov 2014_sans brève gauche 31/10/14 11:16 Page27 HISTOIRE HISTOIRE DE LA GRANDE GUERRE Le bombardement de 1918 Les 9, 10 et 11 novembre 1918, les Allemands dynamitent des installations et bombardent certains quartiers de Charleville, Mézières, du Theux et de Mohon. À quelques heures du cessez-le-feu général, quel était l’intérêt stratégique d’un tel déferlement de feu ? Retour sur un épisode tragique de la Grande Guerre. Le 6 novembre à partir de 7 h 00, sur ordre de la « Mobile EtappenKommandantur n°61 » de Charleville, les habitants ne peuvent plus quitter leurs maisons. Le 7 novembre, à partir de 17 h 00, tous les lieux publics sont fermés. Le 8 novembre, dans un rayon de 300 mètres autour du réseau ferroviaire, les habitants sont évacués. La gare de Mohon saute. 9 novembre : destructions ciblées par des explosifs La place de la Préfecture est bombardée. L’hôtel de Béthune de Jaubert s’effondre en partie. CAROLO Mag n° 184 - novembre 2014 - p. 26 Le 9 novembre, le 4e Corps d’armée, sous les ordres du général FerdinandAuguste Pont (1865-1926), a atteint Prixlès-Mézières et poussé des éléments dans Charleville. Ce même jour, vers 7 h 00, arrive une note du haut commandement annonçant que « le gouvernement allemand avait informé par télégraphie sans fil le gouvernement français que l’armée allemande s’abstiendrait de tirer sur les villes de Mézières et Charleville pendant la durée de quarante-huit heures, à condition que les troupes françaises n’entrassent pas dans les deux villes. Cette suspension devant commencer le 9 novembre à 10 heures. » Dès 8 heures, les ponts et la cita- MAG nov 2014_sans brève gauche 31/10/14 11:16 Page28 delle de Mézières, le canal et l’écluse du Theux explosent. À 8 h 30, c’est au tour des turbines Clément et du pont Saint-Julien sur le canal de la Macérienne. À 9 h 00, les passerelles provisoires du Pont-de-Pierre et du Pont-d’Arches sont également réduites en miettes. Au pied de Berthaucourt, le tunnel et le pont de chemin de fer sautent respectivement à 8 heures et 9 heures. De midi à treize heures, la gare, le pont de l’ancien passage à niveau au bas des Allées (Cours Briand), le tunnel menant aux chantiers Périn et Spire, le pont séparant les rues du Petit-Bois et de l’Abreuvoir, le pont de chemin de fer de la ligne de Givet, le pont conduisant de Charleville à Montcy… disparaissent aussi, détruits par les Allemands. Politique de la terre brûlée, anéantissement gratuit, volonté délibérée de tout détruire, ces frappes barbares ont fait plus de dégâts en quelques heures que les quatre années passées… 10 novembre : des bombardements meurtriers Le 10 novembre à 11 h 30, l’artillerie allemande stationnée à Aiglemont et sur le plateau de Berthaucourt et à Saint-Laurent ouvre le feu. « Les obus sifflaient au-dessus de la ville quand à midi les projectiles éclatèrent en différents endroits de la ville, Cours d’Orléans (Briand) ; au 46 rue du Moulin, tuant un habitant, Ernest Valentin, cordonnier ; au 28 rue du Petit-Bois, tuant un autre civil, Eugène Pierrard, et en blessant un troisième rue d’Aubilly, endommageant la prison civile, rue de l’église, avenue de Mézières, route natio- nale. » L’hôpital de Charleville a reçu 9 bombes, il n’y pas eu de victimes. Durant l’après-midi, des bombes tombent sur le faubourg d’Arches, le centre de Mézières et l’Hôtel-de-Ville, ainsi que sur l’église. Les obus mettent le feu à l’Hôtel-Dieu de Mézières. Les malades et vieillards sont transportés dans les caves. Le bombardement continua durant la nuit du 10 au 11 novembre, puis après 8 h 00, ralentit considérablement. Toutefois, selon plusieurs témoignages, dont celui du docteur Edmond Mignon, Mézières est encore bombardé le 11 novembre vers 11 heures, au moment du cessez-le-feu. Des pillages de maisons éventrées, par des civils, sont à déplorer. Le 12, au matin, le général Marie-Louis Guillaumat (1863-1940), commandant de la Ve Armée, ancien gouverneur militaire de Paris, fait son entrée à Charleville et s’installe dans la résidence que le Kronprinz a quitté deux jours auparavant. En juin 1919, il est dénombré à Mézières 52 maisons rasées entièrement et 242 en partie, sur un total de 1 035 immeubles. Le pourcentage de destruction est donc de 23,40 % (Le Petit Ardennais, 29.VI.1919). Par la suite, la proportion est revue la hausse : en 1923, le coefficient de dévastation est estimé à 47,5 % (Le Petit Ardennais, 30.XII.1923). Gérald Dardart Sources : Général Robert Normand, Destructions et dévastations, au cours des guerres – Réparations, éditions BergerLevrault, Paris, 314 p., 1927 (Coll. GD). HISTOIRE DE NOS RUES Rue émile-Beaucourt Fils de cheminot, Émile-Alphonse Beaucourt voit le jour à Étain dans la Meuse le 8 mars 1897. Marié avec MarieVitaline Davillé à Moineville en Meurtheet-Moselle, deux enfants, il réside dans le quartier Saint-Louis de Mézières et travaille en qualité de sous-chef de bureau en gare de Charleville. En mai 1944, probablement à cause des terribles bombardements, la famille Beaucourt trouve à se loger à Fagnon, à quelques kilomètres de Mézières. Figure de la Résistance-Fer Il entre en Résistance et devient membre du réseau Mithridate et du mouvement Résistance-Fer. Il est arrêté par la Gestapo à Fagnon, le 8 juin 1944, à 5 h 30. Il est interné dans les prisons de Charleville (jusqu’au 23 juin 1944), de Saint-Quentin (jusqu’au 16 août) et au camp de Compiègne-Royallieu. Le 18 août 1944, il est déporté, comme 1 248 camarades résistants, vers le camp de concentration de Buchenwald (21 août 1944), puis vers le petit Kommando de construction de Königstein dépendant du camp de Flossenbürg (28 novembre 1944), dans lesquels il reçoit respectivement les numéros de matricule 81 102 et 39 011. Très souffrant, il est renvoyé sur Flossenbürg, le 27 février 1945. Il y décède le 1er mars 1945. Flossenbürg, ouvert en mai 1938, est un des plus durs camps de concentration, avec un taux de mortalité de 61 %. 4 371 Françaises et Français sur environ 7 100 y ont trouvé la mort. Il est déclaré « mort pour la France » le 10 août 1948. Son nom est gravé dans la pierre du mémorial de Berthaucourt. Gérald Dardart Remerciements : Centre d’Archives multirégional de la SNCF, à Béziers ; Association des Déportés et Familles des Disparus du Camp de Concentration de Flossenbürg et Kommandos ; Association française Buchenwald-Dora et Kommandos ; Les services d’état civil des Villes d’Étain et de Charleville-Mézières. Source : Mémorial des Français à Flossenbürg, 89 p., 1994. Le théâtre de Mézières L’église de Mézières Les 9 et 10 novembre, l’on dénombre dix civils tués appartenant aux familles Bailly, Bohain, Charlier, Froussart, Hossely, Pêtre, Pierrard et Valentin. Rue Emile Beaucourt, dans le quartier du Theux CAROLO Mag n° 184 - novembre 2014 - p. 27