L`orthopédiste pédiatre et la justice

Transcription

L`orthopédiste pédiatre et la justice
Société Français e d’Orthopédie Pédiatrique (S.o.f.o.p.)
L’orthopédiste pédiatre
et la justice
Sous la direction de
Loic Geffroy,
Sophie Guillard,
Antoine Hamel,
Emmanuelle Mayrargue,
Jean-Michel Rogez
11, boulevard Henri IV
34000 Montpellier
www.saurampsmedical.com
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Liste des auteurs
ABELIN GÉNÉVOIS K - Service d’Orthopédie pédiatrique - Hôpital Femme
Mère Enfant - 59 Bd Pinel - 69677 Bron
Cedex
CALLU MF - Faculté de droit – Institut
de formation et de recherche sur les
organisations sanitaires et sociales
(IFROSS) – Université Lyon 3.
ABIB A - Unité d’orthopédie pédiatrique – Hôpital des enfants – CHU de
Toulouse – 31000 Toulouse.
CHOTEL F - Service d’Orthopédie pédiatrique - Hôpital Femme Mère Enfant 59 Bd Pinel - 69677 Bron Cedex
ADAM A - Service de chirurgie pédiatrique et orthopédique - CHU de
Besançon.
COTTALORDA J - Service d’orthopédie
infantile, Hôpital Lapeyronie– CHU de
Montpellier - 34295 Montpellier cedex
05.
ACCADBLED F - Unité d’orthopédie
pédiatrique – Hôpital des enfants –
CHU de Toulouse – 31000 Toulouse.
DARODES P - Unité d’orthopédie pédiatrique – Hôpital des enfants – CHU de
Toulouse – 31000 Toulouse.
BÉRARD J - Service d’Orthopédie pédiatrique - Hôpital Femme Mère Enfant 59 Bd Pinel - 69677 Bron Cedex
DE BILLY B - Service de chirurgie
pédiatrique et orthopédique- CHU de
Besançon.
BRESSON C - Clinique chirurgicale
orthopédique et traumatologique –
Médecine légale - CHU Nantes – 44000
Nantes.
DOHIN B – Service de chirurgie pédiatrique – Université Jean Monnet – CHU
Nord – 42055 Saint Etienne.
BOLLINI G - Service d’orthopédie infantile- Hôpital d’enfants de la TimoneCHU de Marseille -13385 Marseille
cedex 5.
FLEURY J - Clinique médicale pédiatrique et unité d’accueil des enfants en
danger (UAED)- Hôpital d’enfants – CHU
de Nantes- 44093 Nantes cedex 1.
GLORION C - Service d’orthopédie et
traumatologie pédiatrique – Hôpital
Liste des auteurs
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des Enfants malades- 149 rue de
Sèvres- 75015 Paris.
GUILLARD S - Consultante - Service
de chirurgie infantile et unité d’accueil
des enfants en danger (UAED)- Hôpital
d’enfants – CHU de Nantes - 44093
Nantes cedex 1.
Houselstein T - Médecin coordonnateur Département médical SHAM - 18
rue E Rochet - 69372 Lyon cedex08
JOUVE JL – Service d’orthopédie infantile - Hôpital d’enfants de la Timone
- CHU de Marseille - 13385 Marseille
cedex 5.
KNORR G – Unité d’orthopédie pédiatrique – Hôpital des enfants – CHU de
Toulouse – 31000 Toulouse.
KOHLER R - Service d’orthopédie infantile – Hospices civils de Lyon - Hôpital
Femme Mère Enfants – Université Lyon
1.
LANGLAIS J - Service de chirurgie
pédiatrique et orthopédique - CHU de
Besançon.
MARY P – Service d’orthopédie et de
chirurgie réparatrice de l’enfant- Hôpital
d’Enfants A Trousseau – 26 avenue du
Dr A Netter – 75571 Paris cedex 12MOREL E – Service de chirurgie pédiatrique – Université Jean Monnet – CHU
Nord – 42055 Saint Etienne.
MORET L – Service d’évaluations médicales et d’éducation thérapeutique –
CHU Nantes – 44000 Nantes.
6
PAILLE C - Service d’évaluations médicales et d’éducation thérapeutique –
CHU Nantes – 44000 Nantes.
PILLIARD D - Hôpital national de Saint
Maurice. 14 rue de val d’Osne. 94415
Saint-Maurice cedex.
PHILBOIS O – Service d’urgences
médico-chirurgicales pédiatriques –
CHU Nord- 42055 Saint Etienne.
PICHEROT G – Clinique médicale pédiatrique et unité d’accueil des enfants en
danger (UAED)- Hôpital d’enfants – CHU
de Nantes- 44093 Nantes cedex 1.
RODAT O - Médecine légale – Service
soins de suite gériatriques- Hôpital
Saint jacques – CHU Nantes. 44000
Nantes.
ROBIN SANCHEZ N - Directrice des
usagers, des risques et de la qualité au
CHU de Nantes
SALES DE GAUZY J – Unité d’orthopédie
pédiatrique – Hôpital des enfants – CHU
de Toulouse – 31000 Toulouse.
URSEI M – Unité d’orthopédie pédiatrique – Hôpital des enfants – CHU de
Toulouse – 31000 Toulouse.
VABRES N – Clinique médicale pédiatrique et unité d’accueil des enfants en
danger (UAED)- Hôpital d’enfants – CHU
de Nantes - 44093 Nantes cedex 1.
VILANOVA J - Juriste à La Médicale chargé d’enseignement à l’université
de Lille.
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Sommaire
Préface.................................................................................................. 9
C BONNARD
Avant-propos...................................................................................... 11
S GUILLARD
LA RESPONSABILITE
Les principes de la responsabilité médicale....................................... 13
O RODAT
La responsabilité partagée................................................................. 23
J COTTALORDA, MF CALLU, R KOHLER, JL JOUVE
LES DROITS
Information, consentement éclairé pour un enfant,
«permis d’opérer», notion d’urgence, refus d’opérer........................ 45
J SALES de GAUZY, A ABID, G KNORR, F ACCADBLED, P DARODES, M URSEI
Les droits du chirurgien...................................................................... 61
Ch GLORION
L’EXPERTISE
Le principe de réparation................................................................... 71
Ch BRESSON
Transmission du dossier médical........................................................ 77
Ch BRESSON
Sommaire
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La CRCI ou la réparation des accidents médicaux non fautifs............ 83
O RODAT
Comment se préparer à une expertise............................................... 91
JL JOUVE
Vécu d’une préparation à un interrogatoire policier.......................... 99
P MARY
Expériences des expertises............................................................... 105
D PILLIARD
L’ERREUR MÉDICALE
L’erreur médicale. Comment l’annoncer ?
Que faire ? Quand ?......................................................................... 111
J Bérard, k Abelin Génévois, T Houselstein, F Chotel
GESTION DES PLAINTES
Gestion des plaintes et des réclamations......................................... 123
N ROBIN SANCHEZ
LA PREVENTION
De l’importance pour chaque praticien
quel que soit son statut de souscrire
une assurance responsabilité professionnelle - défense pénale...... 127
J VILANOVA, B de BILLY, J LANGLAIS, A ADAM
S’engager dans une démarche d’amélioration de ses pratiques...... 141
L MORET, c Paille
Certificats médicaux......................................................................... 145
B DOHIN, E MOREL, O PHILBOIS
LA MALTRAITANCE........................................................................... 157
G PICHEROT, N VABRES, J FLEURY, S GUILLARD
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Préface
Christian Bonnard
C’est un privilège et un grand honneur pour le Président de la SOFOP de
préfacer cet ouvrage consacré à l’aspect juridique de notre profession.
Le sujet de ce livre peut paraître ardu et rébarbatif mais si l’on considère
l’augmentation régulière du nombre de mise en cause des chirurgiens, sa
lecture est essentielle à un exercice serein de notre profession. Les principes de responsabilité médicale et les droits du patient ont considérablement évolué ces dix dernières années et notre exercice s’en est trouvé
extrêmement encadré.
Cet ouvrage est le premier du genre dans les monographies de la SOFOP,
entièrement consacré à l’étude du cadre juridique dans lequel évolue le
chirurgien orthopédiste de l’enfant. Le sujet est difficile sur un terrain
qui ne nous est pas familier mais notre environnement a changé et nous
devons nous adapter avec dignité. Notre responsabilité médicale est particulière car nous prenons en charge des mineurs dans un contexte hautement affectif, et, si la doctrine ainsi que la jurisprudence semblent assez
clairement établies pour les malades majeurs, cela ne me semble pas tout
a fait le cas pour les mineurs.
L’évolution de notre société conduit à une augmentation de la sinistralité
et à un accroissement du nombre de demandes de réparation à laquelle
nous n’échappons pas. Notre responsabilité peut être mise en cause sur le
plan pénal, civil ou disciplinaire et le cadre juridique s’est trouvé fortement
modifié depuis 1997 par un arrêt de la cour de Cassation (arrêt Hédreul)
qui a renversé la charge de la preuve à laquelle les médecins faisaient
exception jusqu’alors. La publication de la loi dite Loi Kouchner de 2002,
relative aux droits du malade et à la qualité du système de santé a encadré
précisément le devoir d’information aux malades et a leur famille et, a
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créé l’Office National d’Indemnisation des Accidents Médicaux (ONIAM),
destiné à indemniser les aléas thérapeutiques, comportant une IPP
minimum de 24 %. La loi HPST dite loi Bachelot a permis que les médecins
hospitaliers puissent être mis en cause par les juridictions disciplinaires
de l’ordre des médecins. Les rigueurs de la loi exposent à un risque de
déshumanisation de notre pratique en semant un certain désespoir et
en augmentant considérablement l’anxiété pré opératoire de nos jeunes
patients et de leur famille.
La chirurgie en général, mais plus particulièrement la chirurgie fonctionnelle de l’individu mineur n’est pas une prestation de service comme les
autres et nul doute que cet ouvrage nous aidera à supporter cet environnement extrêmement difficile et anxiogène. Il nous apportera non pas un
courage passif d’endurance, mais un courage actif, nous permettant d’affronter des situations difficiles avec plus de sérénité, dans un contexte où
les débordements affectifs peuvent être nombreux et entraîner de multiples dérapages tant il est vrai que le rapport de confiance peut se rompre
très brutalement, le patient et sa famille devenant soudainement amnésiques de toutes les informations qu’ils ont pu recevoir, à la vue d’une
possible indemnisation. Nous devons connaître ces risques, nous préparer
au débat contradictoire d’une expertise et savoir justifier notre bonne
pratique.
Cet ouvrage se veut très didactique, destiné aux jeunes et moins jeunes,
afin qu’ils puissent repérer et déjouer toutes les embûches secrétées par
l’environnement de l’orthopédiste de l’enfant. Nous méconnaissons bien
souvent le cadre juridique dans lequel nous travaillons: cadre administratif, judiciaire, pénal ou civil, ainsi que les nouvelles obligations professionnelles de formation et de prévention des risques.
Ce livre accompagne le 35ème séminaire annuel d’enseignement de la SOFOP
et contribue au développement et à la reconnaissance de l’excellence de
l’orthopédie pédiatrique de notre pays. Au nom de la SOFOP, je remercie
Le Dr. Sophie Guillard, le Dr Antoine Hamel et toute l’équipe Nantaise,
dont chacun connaît l’excellence, d’avoir proposé ce sujet et coordonné la
réalisation de cet ouvrage.
Pr. Christian Bonnard
Président de la SOFOP
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Avant-propos
19 ans après le Croisic, c’est de nouveau à Nantes que revient l’honneur
d’organiser le 35ème séminaire d’enseignement de la SOFOP.
Je remercie le président de la SOFOP, les membres du bureau et le secrétaire général JL Jouve de nous avoir fait confiance pour traiter ce thème
« l’orthopédiste pédiatre et la justice » thème peu chirurgical et peu orthopédique, mais ne dit on pas droit comme la justice?
Il me semblait nécessaire d’aborder ce sujet qui nous concerne et nous
concernera davantage à l’avenir.
En effet, nous travaillons avec la Justice tous les jours : lorsque nous rédigeons nos certificats, lorsque nous prenons en charge un enfant maltraité,
lorsque nous opérons (coups et blessures volontaires !..)….
Nous sommes et serons probablement de plus en plus confrontés à des
problèmes juridiques soit par erreur diagnostique ou thérapeutique, soit
à cause d’une complication, sans faute c’est l’aléa thérapeutique, soit par
insatisfaction de la famille de l’enfant…
Le but de ce séminaire n’est pas d’alarmer ni d’inquiéter les plus jeunes, ni
de stigmatiser les rapports du chirurgien avec la justice, mais au contraire
de rassurer, d’expliquer, de conseiller.
Le livre du séminaire rapporte les principes de la responsabilité, les droits,
l’expertise, l’erreur, la prévention, et surtout le vécu et l’expérience, des
réflexions et des conseils.
Sophie Guillard,
Et merci à l’artiste
Avant-propos
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De la sorte, tout accès au corps est conditionné par des contraintes qui
sont la compétence du professionnel, la finalité médicale de l’acte, l’information au patient et le consentement du patient, sauf état de nécessité.
Ces contraintes rendent licites l’acte médical, sinon il est qualifié de coups
et blessures. Il est donc légitime de considérer que le professionnel de
santé doit rendre compte de ces actes, puisqu’il est dépositaire d’un
pouvoir particulier.
Il va rendre compte de ses actes devant la société qui lui a conféré des
pouvoirs, devant les malades et devant son groupe professionnel. De la
sorte, cette responsabilité qui est l’honneur du médecin, comporte deux
aspects :
• Soit c’est une responsabilité sanction, parce qu’il a manqué à des règles,
• Soit c’est une responsabilité réparation du dommage causé.
Lorsque l’on parle de responsabilité, il faut toujours garder à l’esprit que
trois acteurs sont indispensables :
• La faute du professionnel de santé,
• Le dommage ressenti par le patient qui est différent de l’évolution
naturelle de la maladie et qui est vécu comme une déviation par
rapport à ce qui était attendu et enfin,
Les principes de la responsabilité médicale
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RESPONSABILITé
DROITS
EXPERTISE
L’ERREUR
MÉDICALE
En effet, le soignant travaille « sur le corps des patients » alors que la loi
pose le principe que le corps humain est inviolable, indisponible et que
son intégrité doit être respectée.
GESTION DES
PLAINTES
Le professionnel de santé exerce une activité de monopole car la société lui
donne l’autorisation de pratiquer des actes qu’elle interdit à quiconque.
PRÉVENTION
Olivier Rodat
MALTRAITANCE
Les principes
de la responsabilité médicale
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• Un lien de causalité entre la faute et le dommage. Il s’agit‐là
d’une articulation juridique extrêmement importante et qui est
indispensable.
En matière de responsabilité sanction, le moteur de l’action en responsabilité est la faute quelles qu’en soient les conséquences, même s’il n’y en
a pas.
En revanche, en matière de responsabilité d’indemnisation et de réparation, faute, dommage et lien de causalité sont indispensables.
La responsabilité sanction
La responsabilité sanction a deux aspects :
Elle concerne le professionnel de santé, mais qui est un citoyen soumis
aux règles fixées par la loi et dont il s’est affranchi. C’est la responsabilité
pénale. Elle concerne aussi le professionnel de santé en tant que membre
d’un groupe professionnel, groupe qui s’est fixé des règles d’exercice
partagées par tous, c’est la responsabilité disciplinaire.
La responsabilité pénale repose sur un certain nombre de principes :
Tout d’abord le fait qu’il n’y a pas de crime, ni de délit, si l’infraction n’est
pas prévue par un texte ; c’est le principe de la légalité des peines, car un
texte de loi prévoit l’infraction et doit prévoir sa sanction qui n’est pas
laissée à l’appréciation libre d’un juge.
Cette responsabilité pénale n’est pas assurable et elle sanctionne un individu quel que soit son statut, au sein d’une institution hospitalo‐universitaire, être chirurgien d’orthopédie infantile voire même Doyen en plus,
n’atténue en rien la responsabilité pénale.
Celle‐ci est mobilisée par la plainte d’un tiers. Sans plainte, il n’y a pas de
mobilisation du Ministère public qui déclenche l’action publique. C’est le
Procureur de la République qui dispose de ce pouvoir limité par la prescription, celle‐ci est de 10 ans pour les crimes, 3 ans pour les délits et 1 an
pour les contraventions.
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Cette responsabilité pénale n’a bien sûr aucune vocation indemnitaire vis‐
àvis du patient.
Lorsque l’on fait l’inventaire des fautes qui peuvent être reprochées à un
professionnel de santé, on retrouve de multiples rubriques dans le code
pénal, mais aussi dans le code de la santé publique.
Des exemples sont classiques comme la violation du secret professionnel
prévue à l’article 226‐13 du code pénal qui précise que la révélation d’une
information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire,
soit par état, soit par profession, soit en raison d’une fonction d’une
mission temporaire est punie de un an d’emprisonnement et de 15 000
Euros d’amende.
Le texte de loi prévoit ainsi un plafond de sanction que le Juge ne peut
pas dépasser. En revanche, il peut se situer largement en dessous.
L’incrimination de violation du secret professionnel est très classique,
mais ce n’est pas la plus fréquente.
La plus fréquente est la non assistance à personne en péril prévue par l’article 223‐6 du code pénal qui prévoit que quiconque pouvant empêcher
par son action immédiate sans risque pour lui ou pour des tiers, soit un
crime, soit un délit contre l’intégrité corporelle de la personne, s’abstienne
volontairement de le faire, est puni de 5 ans de prison et de 75 000 Euros
d’amende.
De la même façon, sera puni des mêmes peines, celui qui s’abstient volontairement de porter, à une personne en péril, l’assistance que sans risque
pour lui ou pour les tiers, il pouvait lui prêter, soit par son action personnelle, soit en provoquant des secours.
C’est le motif qui donne lieu à beaucoup de condamnations, en particulier
pour les médecins qui ne sont pas vigilants devant les enfants maltraités.
La gravité de la situation n’est pas un motif pour ne rien tenter, le plus
grand danger du médecin, c’est le téléphone, car si vous décrochez, vous
devez y aller et si vous êtes de garde, vous devez veiller à être accessible.
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Autre motif qui alimente largement les rubriques judiciaires ce sont les
faux certificats ; ainsi, il est absolument indispensable de ne pas se mêler,
dans les procédures de divorce, en faisant des attestations « bidon » pour
que l’un des parents récupère les enfants.
Dans cette rubrique, il faut rappeler que la peine en matière de faux certificats est portée à 5 ans de prison et 75 000 Euros d’amende, lorsque la
personne visée à ce titre exerce une profession médicale ou de santé et
que l’attestation, faisant état de faits inexacts, dissimule ou certifie faussement l’existence d’une maladie, d’une infirmité ou d’un état de grossesse ou fournit des indications mensongères sur l’origine d’une maladie
ou d’une infirmité ou sur la cause d’un décès.
Il y a plein d’autres motifs d’incrimination pénale du médecin, ce peut
être des coups et blessures involontaires par imprudence, négligence, non
respect des règlements, mise en danger d’autrui, coups et blessures volontaires en cas d’euthanasie, d’intervention sans but médical, de mutilation,
d’interruption volontaire de grossesse en dehors des délais. De lourdes
sanctions aussi sont prévues pour les médecins qui procéderaient à des
recherches biomédicales sans passer par les arcanes administratives et les
contraintes de protection des personnes.
De la même façon, pour un médecin libéral, ne pas être titulaire d’une
assurance en responsabilité, est pénalement sanctionnable.
Enfin, pour alimenter cette rubrique sanction, rappelons que le fait pour
un médecin de ne pas se soumettre à une réquisition est punissable d’une
amende de 3850 Euros, à moins que la personne pour laquelle on vous
requière, soit votre malade.
Deuxième aspect de la responsabilité sanction, c’est la responsabilité
disciplinaire. Elle sanctionne un membre d’un groupe professionnel qui a
manqué aux règles écrites et non écrites qui régissent le fonctionnement
de la profession ; ces règles se réfèrent au code de déontologie qui est
inclus maintenant dans le code de la santé publique. La règle non écrite
est l’usage.
Tous les médecins sont soumis aux exigences du code de déontologie et
sont susceptibles de poursuites devant le Conseil de l’Ordre. De la même
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façon, au sein de l’institution Hospitalo‐Universitaire, le médecin peut être
poursuivi pour manquement aux règles morales que sont l’exercice quotidien de la pratique médicale qui constitue un manquement à l’honneur
du médecin. Les motifs sont en général le fait de venir, pour un chirurgien,
opérer en état d’ivresse ou de ne pas se déranger alors que le chirurgien
est de garde et appelé à plusieurs reprises pour un accouchement difficile
ou une victime de plaie par balle.
Très curieusement, en matière de responsabilité disciplinaire, il n’y a pas
de prescription. Ce sont des poursuites qui sont imprescriptibles, tout
comme les crimes contre l’humanité. En matière de déontologie les sanctions possibles ne sont pas minces, puisqu’il s’agit de l’avertissement, du
blâme, de l’interdiction temporaire d’exercer avec ou sans sursis, une ou
plusieurs fonctions médicales, interdiction permanente d’exercer une ou
plusieurs fonctions médicales, interdiction temporaire d’exercer la profession avec ou sans sursis jusqu’à 3 ans, ou pire, la radiation.
La structure disciplinaire déontologique n’appartient pas au Conseil
Départemental qui a un rôle simplement de conciliation. C’est au niveau
régional que la chambre disciplinaire de première instance exerce son
action et un appel est possible devant la chambre disciplinaire nationale
par un pourvoi devant le Conseil d’Etat ou la Cour de Cassation. Les chambres disciplinaires régionales sont présidées par un Magistrat.
Jusqu’à la loi du 22 juillet 2009, les médecins des structures hospitalières
et hospitalo‐universitaires avaient une certaine indifférence vis‐à‐vis des
sanctions possibles par le Conseil de l’Ordre puisque les médecins exerçant
un service public ne pouvaient être poursuivi devant le Conseil Régional
de l’Ordre que par le Préfet, le Procureur de la République, le Ministre de
la Santé, le Direction de l’ARH.
Madame Roselyne BACHELOT, dans la loi HSPT du 29 juillet 2009, a changé
les donnes en indiquant que les médecins chargés d’une mission de
service public ne peuvent être traduits devant la commission disciplinaire
de première instance que par le Ministre de la Santé, un représentant de
l’état, le Conseil National ou le Conseil Départemental auquel le praticien
est inscrit ainsi que le Procureur de la République, voire le Directeur de
l’ARH.
Les principes de la responsabilité médicale
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De la sorte, si un malade porte plainte auprès d’un praticien du service
public devant le Conseil de l’Ordre, le Conseil départemental de l’Ordre
peut se mobiliser et demander à ce que le médecin soit traduit devant la
chambre disciplinaire de première instance.
La responsabilité réparation
La responsabilité réparation ou responsabilité civile est fondée sur des
principes qui datent de 1804, en particulier l’article 1382 du code civil qui
précise : « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause un dommage à
autrui, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer ».
Ceci définit la responsabilité délictuelle pour faute.
L’article 1147 définit la responsabilité contractuelle en indiquant que le
débiteur est condamné s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts,
soit en raison de l’inexécution de l’obligation toutes les fois qu’il ne justifie
pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être
imputée.
Néanmoins, la responsabilité civile indemnitaire n’a été mise en route en
1804. D’ailleurs, pour la petite histoire, en 1829, le Président du Tribunal
de DOMFRONT interrogeait l’académie de Médecine et de Chirurgie sur la
possibilité de mettre en cause la responsabilité d’un médecin. Ces hauts
dignitaires de l’académie, outrés, ont répondu :
« Le médecin ne reconnaît pour juge après Dieu que ses pères et n’accepte
point d’autre responsabilité que celle toute morale de sa conscience ».
Il est vrai que la première décision qui a condamné un médecin date du 18
juin 1835 en instaurant la responsabilité civile pour faute crasse, dite délictuelle, traduisant l’incompétence totale et désastreuse du praticien, c’est
le Docteur THOURET NOROY qui inaugura la longue liste des praticiens.
En fait, en 1936, le Procureur Général MATER, dans un arrêt de principe,
va poser le fondement du contrat médical en indiquant :
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« Il se forme entre le médecin et son client, un véritable contrat comportant, pour le praticien, l’engagement sinon bien évidemment de guérir
son malade, du moins de lui donner des soins, non pas quelconques, mais
consciencieux et attentifs et, réserve faite, de circonstances exceptionnelles, conformes aux données de la science ».
Autrement dit, avant 1835, le médecin n’était responsable de rien. Entre
1835 et 1936, il pouvait être amené à voir sa responsabilité mise en jeu
sur le plan délictuel, c’est à dire de la faute crasse et depuis 1936, le droit
de la responsabilité repose sur le manquement à l’obligation, c’est‐à‐dire
la responsabilité contractuelle.
Dans ce domaine de la responsabilité très complexe, il y a un partenaire
qui va surgir et participer au débat, c’est l’assureur. Il convient donc d’examiner deux situations :
• Soit le malade est soigné à l’hôpital public,
• Soit le malade est soigné en ambulatoire dans un établissement
privé.
‐ Si le patient est soigné à l’hôpital public : Les règles de fonctionnement
actuelles depuis la loi de mars 2002 précisent que c’est le Directeur de
l’établissement qui est juridiquement responsable des dommages subis
par les usagers, même s’il n’y a pas formellement de liens contractuels.
Le Directeur est d’ailleurs tenu de contracter une assurance de responsabilité et l’assureur intervient. En matière de compétence judiciaire, c’est
le juge administratif qui est compétent, mais le patient doit apporter la
preuve de la faute. Il a néanmoins, bien entendu, accès à son dossier
médical.
Cette notion de faute, en matière de champ administratif, n’est pas définie
car la pratique médicale est évolutive et les multiples intervenants rendent
difficile sa preuve.
On parle, en matière de responsabilité à l’Hôpital, de faute d’organisation
du service ou de faute médicale sans la qualifier plus avant et c’est cette
notion de faute qui avait fait évoluer la jurisprudence administrative, obligeant le législateur à intervenir dans la loi de mars 2002.
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