Les effets surprenants du crystal meth

Transcription

Les effets surprenants du crystal meth
Nouvelles-CATIE
Des bulletins de nouvelles concis en matière de VIH et d’hépatite C de CATIE.
Les effets surprenants du crystal meth
12 janvier 2009
Étant donné la forte dépendance qu’elle crée chez les personnes qui en consomment, la drogue crystal meth
(également appelée méthamphétamine, « ice » ou « tina ») est devenue un danger pour la santé de certaines PVVIH
et d’autres personnes à risque. Avant d’examiner les recherches sur le traitement de la dépendance au crystal
meth, il est important d’offrir quelques renseignements de base au sujet de cette drogue, certains desquels risquent
de surprendre plus d’un lecteur.
D’où vient le problème?
Fumer, sniffer ou s’injecter du crystal meth peut créer une sensation d’euphorie intense et prolongée. Plusieurs
consommateurs se disent plus énergiques et plus alertes sous l’effet de cette drogue, et nombre d’entre eux
éprouvent une perte d’appétit et une augmentation de leur plaisir sexuel. Tous ces effets font du crystal meth une
option alléchante pour les personnes qui cherchent dans l’automédication une solution aux problèmes suivants :
manque d’énergie
faible confiance en soi
anxiété
difficulté à dormir
problèmes de concentration
sentiment de ne rien valoir
dépression
surplus de poids
Des chercheurs de San Diego ont mené une série de recherches chez des consommateurs de crystal meth. Dans le
cadre d’une de leurs premières études, 25 hommes séropositifs ont donné les raisons suivantes pour expliquer leur
consommation de crystal meth :
oubli temporaire de la séropositivité
amélioration de la perception de soi et de l’aptitude à surmonter le rejet social associé à la séropositivité
facilitation de la rencontre de partenaires sexuels anonymes multiples
moyen de faire face au spectre de la mort
Effets en cascade
La consommation de crystal meth est associée à la multiplication des rapports sexuels et des partenaires, ainsi qu’à
une augmentation des rapports sexuels non protégés entre personnes « gelées ». Ces trois facteurs augmentent le
risque de transmission du VIH.
Surmonter la dépendance : un défi de taille
Il n’existe aucun remède simple pour surmonter une dépendance au crystal meth. Pire, les gens qui consomment
compulsivement cette drogue ne semblent pas reconnaître que celle-ci est devenue l’élément central de leur vie.
Le crystal et le cœur
Le cœur est une pompe musculaire qui fait circuler le sang dans toutes les régions du corps. Le crystal meth
accélère l’activité du cœur et augmente la pression artérielle, ce qui a pour effet de fatiguer le cœur et d’abîmer
tranquillement les vaisseaux sanguins.
Pour être en mesure de battre plus fort pendant des périodes prolongées sous l’effet du crystal meth, le cœur a
besoin de plus d’oxygène. Toutefois, cette drogue peut causer le rétrécissement des artères, soit les vaisseaux
sanguins qui transportent du sang oxygéné vers le cœur. Si le cœur est forcé de pomper plus rapidement sans un
apport accru d’oxygène, il peut subir des dommages. Le crystal meth augmente également le risque de caillots
sanguins spontanés. Si un nombre suffisant de caillots apparaissent et se collent les uns aux autres, les vaisseaux
sanguins risquent d’être bloqués. À cause de tous ces effets cardiovasculaires délétères, certains consommateurs
de crystal meth souffrent de douleurs à la poitrine, de battements de cœur accélérés et, dans certains cas, de crises
cardiaques et d’accidents vasculaires cérébraux. Bien que de tels événements extrêmes ne soient pas fréquents à
court terme, la consommation répétée de crystal meth ouvre la voie à une maladie cardiovasculaire à l’avenir.
Crystal meth et le cerveau
Outre le stress cardiovasculaire causé par le crystal meth, cette drogue peut entraîner des changements de
comportement et une perturbation de la capacité à penser et à raisonner clairement, comme nous l’expliquons cidessous.
Psychose
Certains consommateurs de crystal meth éprouvent des délires et des hallucinations temporaires (qui durent de
quelques heures à quelques jours), ainsi que des problèmes d’incohérence de la parole, quoique moins
fréquemment. Les délires incluent souvent le sentiment d’être persécuté. Par conséquent, les personnes souffrant
de psychose liée au crystal meth sont souvent agitées, instables sur le plan affectif et même hostiles.
Les consommateurs de crystal meth qui sont déjà atteintes de schizophrénie, de manie ou de psychose courent un
risque très élevé de voir un de ces troubles mentaux s’activer. Cependant, la plupart des consommateurs de crystal
meth qui ont vécu des épisodes de psychose ne semblaient pas avoir d’antécédents de cette dernière ou d’autres
maladies reliées.
Dépression
Les symptômes de la dépression et de l’anxiété semblent être plus fréquents chez les consommateurs de crystal
meth et ce, tant avant qu’après l’usage. Chez les consommateurs de crystal meth, la dépression peut avoir des
conséquences fatales. Dans le cadre d’une étude australienne, les chercheurs ont trouvé qu’environ 50 % des
consommateurs de crystal meth disaient se sentir anxieux avant de consommer cette drogue. Plus tard, lorsque les
effets de la drogue s’étaient estompés, de graves symptômes d’anxiété étaient présents chez 75 % des
consommateurs.
Également en Australie, des chercheurs ont constaté qu’environ 33 % des consommateurs de crystal meth avaient
fait l’objet d’un diagnostic de dépression avant ou après avoir été exposés à cette drogue. De plus, en Australie,
quelque 25 % des consommateurs de stimulants (crystal meth, cocaïne et substances semblables) ont fait une
tentative de suicide à un moment donné de leur vie, comparativement à 5 % des non-consommateurs de stimulants
dans ce pays. Ces résultats soulignent le besoin de services de santé mentale destinés aux consommateurs de
crystal meth.
Violence
Le lien entre le crystal meth et la violence est controversé, et le débat se poursuit entre les chercheurs. Il n’empêche
que les facteurs suivants semblent indiquer l’existence d’un tel lien :
L’exposition répétée au crystal meth semble accroître les comportements agressifs.
Certains consommateurs de crystal meth deviennent agressifs s’ils se croient menacés.
Le crystal meth peut causer des épisodes de psychose, laquelle peut donner lieu à des comportements
agressifs. Des chercheurs australiens ont trouvé que certains consommateurs de crystal meth avaient déjà de
nombreux problèmes comportementaux que la drogue était susceptible d’aggraver. Il semble donc possible
que le crystal meth ne fasse que démasquer des tendances violentes inhérentes chez certaines personnes,
plutôt que de les inciter directement à la violence. Les recherches sur le lien entre la violence et le crystal meth
se poursuivent.
Lésions cérébrales
Des études sur des souris et des singes ont révélé que le crystal meth privait le cerveau de certains de ces animaux
de ses neurotransmetteurs, soit des composés dont les cellules cérébrales se servent pour communiquer entre
elles. Un faible taux de neurotransmetteurs peut rendre les cellules cérébrales dysfonctionnelles et contribuer à la
dépression, à l’anxiété et à d’autres troubles.
Dans le cadre d’expériences de laboratoire sur des cellules, l’exposition au crystal meth semble renforcer le VIH, de
sorte qu’il endommage davantage les cellules cérébrales. Il semble aussi que cette drogue déclenche de
l’inflammation dans le cerveau des singes. Une telle inflammation peut avoir des conséquences nuisibles à long
terme.
Les chercheurs sont moins certains en ce qui a trait aux lésions cérébrales physiques que le crystal meth serait
susceptible de causer chez les humains. Il est toutefois très clair que la consommation de cette drogue est associée
à de nombreux méfaits.
Surmonter la dépendance
Un des défis posés par le traitement de la dépendance au crystal meth réside dans le fait que la drogue semble
compromettre l’aptitude des consommateurs accros à reconnaître leur problème. De plus, les symptômes du
sevrage sont désagréables et comprennent les suivants :
manque d’énergie considérable
difficulté à s’endormir
irritabilité
changements d’appétit
perte d’intérêt pour ses activités quotidiennes régulières
anxiété
dépression
envie intense de consommer du crystal meth
Un autre défi se reflète dans les suspicions de certains scientifiques selon lesquels « la mémoire de la dépendance
pourrait être intégrée dans des modifications structurales [des cellules] du cerveau qui rendraient la dépendance
résistante au traitement. »
Un mot au sujet de la terminologie
L’amphétamine et la méthamphétamine sont deux substances chimiques étroitement apparentées qui ont des effets
semblables, bien que ceux de l’amphétamine soient moins intenses. Une fois dans le corps, la méthamphétamine est
convertie partiellement en amphétamine. Nous parlons davantage de cette dernière dans le prochain bulletin de
Nouvelles-CATIE .
La bonne nouvelle
On ne comprend toujours pas parfaitement l’interaction complexe entre la méthamphétamine et le cerveau, mais
cela n’a pas empêché les chercheurs de vouloir trouver un moyen d’aider les consommateurs de crystal meth à
surmonter définitivement leur dépendance. Grâce à des expériences sur des animaux et à des autopies de cerveaux
humains de consommateurs de crystal meth, les chercheurs commencent à mieux comprendre l’interaction entre le
cerveau et cette drogue. Entre autres, ces recherches ont permis de découvrir que le naltrexone, un médicament
utilisé pour le traitement de la dépendance à l’héroïne, réduit partiellement l’envie de consommer de l’amphétamine
et de la méthamphétamine chez les personnes souffrant d’une dépendance à ces dernières. Cela laisse croire que le
fait d’exposer le cerveau à de l’amphétamine (et à des composés étroitement apparentés comme le crystal meth)
incite cet organe à produire un opiacé naturel.
Succès suédois
Des chercheurs suédois ont connu un certain succès lorsqu’ils ont mis le médicament naltrexone à l’épreuve chez
des personnes souffrant d’une dépendance à l’amphétamine ou à la méthamphétamine. Le prochain bulletin de
Nouvelles-CATIE examinera cette recherche en plus de raconter l’expérience vécue par deux personnes qui ont
surmonté leur dépendance à ces drogues grâce au naltrexone.
—Sean R. Hosein
RÉFÉRENCES :
1. Urbina A, Jones K. Crystal methamphetamine, its analogues, and HIV infection: medical and psychiatric aspects
of a new epidemic. Clinical Infectious Diseases . 2004 Mar 15;38(6):890-4.
2. Koblin BA, Husnik MJ, Colfax G, et al. Risk factors for HIV infection among men who have sex with men. AIDS .
2006 Mar 21;20(5):731-9.
3. Day JJ, Carelli RM. Methamphetamine induces chronic corticostriatal depression: too much of a bad thing.
Neuron. 2008. 2008 Apr 10;58(1):6-7.
4. Bamford NS, Zhang H, Joyce JA, et al. Repeated exposure to methamphetamine causes long-lasting
presynaptic corticostriatal depression that is renormalized with drug readministration. Neuron . 2008 Apr
10;58(1):89-103.
5. Kaye S, McKetin R, Duflou J, et al. Methamphetamine-related fatalities in Australia: demographics,
circumstances, toxicology and major organ pathology. Addiction . 2008 Aug;103(8):1353-60.
6. Darke S, Kaye S, McKetin R, et al. Major physical and psychological harms of methamphetamine use. Drug and
Alcohol Review . 2008 May;27(3):253-62.
7. Kaye S, McKetin R, Duflou J, et al. Methamphetamine and cardiovascular pathology: a review of the evidence.
Addiction . 2007 Aug;102(8):1204-11.
8. Kish SJ. Pharmacologic mechanism of crystal meth. Canadian Medical Association Journal . 2008 Jun
17;178(13):1679-82.
9. Kish SJ, Fitzmaurice PS, Boileau I, et al. Brain serotonin transporter in human methamphetamine users.
Psychopharmacology (Berl) . 2009; in press .
10. Coutinho A, Flynn C, Burdo TH. Chronic methamphetamine induces structural changes in frontal cortex
neurons and upregulates type I interferons. Journal of Neuroimmune Pharmacology . 2008 Dec;3(4):241-5.
11. Frankel PS, Alburges ME, Bush L, et al. Brain levels of neuropeptides in human chronic methamphetamine
users. Neuropharmacology . 2007 Sep;53(3):447-54.
Produit par:
555, rue Richmond Ouest, Bureau 505, boîte 1104
Toronto (Ontario) M5V 3B1 Canada
téléphone : 416.203.7122
sans frais : 1.800.263.1638
télécopieur : 416.203.8284
site Web : www.catie.ca
numéro d’organisme de bienfaisance : 13225 8740 RR
Déni de responsabilité
Toute décision concernant un traitement médical particulier devrait toujours se prendre en consultation avec un
professionnel ou une professionnelle de la santé qualifié(e) qui a une expérience des maladies liées au VIH et à
l’hépatite C et des traitements en question.
CATIE fournit des ressources d’information aux personnes vivant avec le VIH et/ou l’hépatite C qui, en collaboration
avec leurs prestataires de soins, désirent prendre en mains leurs soins de santé. Les renseignements produits ou
diffusés par CATIE ou auxquels CATIE permet l’accès ne doivent toutefois pas être considérés comme des conseils
médicaux. Nous ne recommandons ni n’appuyons aucun traitement en particulier et nous encourageons nos
utilisateurs à consulter autant de ressources que possible. Nous encourageons vivement nos utilisateurs à consulter
un professionnel ou une professionnelle de la santé qualifié(e) avant de prendre toute décision d’ordre médical ou
d’utiliser un traitement, quel qu’il soit.
CATIE s’efforce d’offrir l’information la plus à jour et la plus précise au moment de mettre sous presse. Cependant,
l’information change et nous encourageons les utilisateurs à s’assurer qu’ils ont l’information la plus récente. Toute
personne mettant en application seulement ces renseignements le fait à ses propres risques. Ni CATIE ni aucun de
ses partenaires ou bailleurs de fonds, ni leurs personnels, directeurs, agents ou bénévoles n’assument aucune
responsabilité des dommages susceptibles de résulter de l’usage de ces renseignements. Les opinions exprimées
dans le présent document ou dans tout document publié ou diffusé par CATIE ou auquel CATIE permet l’accès ne
reflètent pas nécessairement les politiques ou les opinions de CATIE ni de ses partenaires ou bailleurs de fonds.
L’information sur l’usage plus sécuritaire de drogues est offerte comme service de santé publique pour aider les
personnes à prendre de meilleures décisions de santé et ainsi réduire la propagation du VIH, de l’hépatite virale et de
toute autre infection. Cette information n’a pas pour but d’encourager ni de promouvoir l’utilisation ou la possession
de drogues illégales.
La permission de reproduire
Ce document est protégé par le droit d’auteur. Il peut être réimprimé et distribué dans son intégralité à des fins non
commerciales sans permission, mais toute modification de son contenu doit être autorisée. Le message suivant doit
apparaître sur toute réimpression de ce document : Ces renseignements ont été fournis par CATIE (le Réseau
canadien d’info-traitements sida). Pour plus d’information, veuillez communiquer avec CATIE par téléphone au
1.800.263.1638 ou par courriel à [email protected].
© CATIE
La production de cette revue a été rendue possible grâce à une contribution financière de l’Agence de la santé
publique du Canada.
Disponible en ligne à
http://www.catie.ca/fr/nouvellescatie/2009-01-12/les-effets-surprenants-crystal-meth

Documents pareils