ANALYSE DE LA SITUATION DES BLOCS OPERATOIRES DE L
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ANALYSE DE LA SITUATION DES BLOCS OPERATOIRES DE L
ANALYSE DE LA SITUATION DES BLOCS OPERATOIRES DE L’HOPITAL NEUCHATELOIS RAPPORT FINAL FEVRIER 2016 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch TABLE DES MATIERES 1. Introduction : ......................................................................................................... 3 2. Objectifs du mandat : ............................................................................................. 3 3. Méthodologie ........................................................................................................ 4 4. 5. Situation générale au bloc opératoire de l’HNE....................................................... 4 4.1. 4.2. Le ressenti global .......................................................................................................4 Les données objectives ...............................................................................................5 Analyse de la crise................................................................................................ 14 5.1. 5.2. 5.3. 5.4. 5.5. 5.6. 5.7. 5.8. Le secteur de l’instrumentation ................................................................................ 15 L’organisation du bloc opératoire ............................................................................. 17 La stérilisation : ........................................................................................................ 20 Les problèmes de la fusion PRT-CDF .......................................................................... 21 Le département d’anesthésie ................................................................................... 23 Le département et les services de chirurgie ............................................................... 26 La direction .............................................................................................................. 28 Synthèse ..................................................................................................................29 6. Ce qui va bien malgré la crise ............................................................................... 30 7. Des opportunités : ............................................................................................... 30 8. Ce qu’il faut changer ............................................................................................ 30 9. 8.1. 8.2. 8.3. 8.4. 8.5. 8.6. L’instrumentation :................................................................................................... 31 La stérilisation.......................................................................................................... 31 La gouvernance des blocs : ....................................................................................... 31 Développer l’activité chirurgicale ambulatoire .......................................................... 35 L’ambiance et la collaboration .................................................................................. 36 La direction de l’HNE ................................................................................................ 37 Conclusion ........................................................................................................... 37 2 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch 1. Introduction : L’hôpital neuchâtelois (HNE) depuis sa création, en 2006, connaît de multiples crises au niveau de son secteur chirurgical. L’enjeu pour le canton est de disposer d’un hôpital public de qualité capable de prendre en charge les principales pathologies chirurgicales à des coûts compatibles avec les finances du canton et des communes. Comme dans la plupart des cantons, des regroupements des activités les plus lourdes et coûteuses s’impose, soulevant des craintes légitimes pour la population de perdre la proximité dont elle disposait avec « leur » hôpital. Dans un tel contexte difficile, le secteur des blocs opératoires de l’HNE fait l’objet, de la part du personnel médical et infirmier, d’un mécontentement qui existe depuis plusieurs années. Certains indicateurs financiers font état de coûts de fonctionnement élevés. De multiples audits ou analyses ciblés ont déjà été réalisés, sans pour autant apporter de solutions face à des problèmes qui perdurent. La présente expertise est réalisée à la demande du conseil d’administration de l’HNE. Les rapporteurs sont les Professeurs F. Clergue, P. Ravussin et B. Bachy, qui ont tous trois dirigé des départements d’anesthésie ou de chirurgie de grande taille dans des hôpitaux suisses et français. 2. Objectifs du mandat : Les missions confiées aux rapporteurs sont les suivantes : - Analyser le fonctionnement actuel des blocs opératoires des sites de Pourtalès (PRT) et de Chaux-de-Fonds (CDF), notamment les fonctionnements et dynamiques d'équipes - Evaluer le fonctionnement infirmier et médical du bloc opératoire, son organisation, dans la perspective d'une meilleure adéquation de l'attribution des ressources - Proposer des modifications de la planification et l'organisation permettant de rendre l'activité des blocs opératoires plus efficiente. Consolider les indicateurs existants et proposer de nouveaux indicateurs de suivi d'activité et de pilotage des blocs opératoires. - Analyser et proposer une démarche opérationnelle pour développer la chirurgie ambulatoire - Sur la base de l'audit des 2 services de stérilisation de CDF et PRT réalisé en octobre 2014, proposer des pistes de réflexion concernant la collaboration entre la stérilisation et les blocs opératoires - Accompagner la direction de l'HNE dans l'élaboration d'un projet d'optimisation du fonctionnement des blocs opératoires afin de 3 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch les rendre plus efficients, tout en maintenant un climat de confiance et des relations harmonieuses entre les collaborateurs. 3. Méthodologie Au cours des mois de juin à novembre 2015, les auteurs de ce rapport, après une séance de présentation de leur mission à l’ensemble du personnel des blocs opératoires (17 juin 2015), se sont immergés pendant 28 journées au sein de l’hôpital neuchâtelois. Cette immersion s’est effectuée par une présence dans les blocs opératoires des sites de PRT et de CDF, par des entretiens informels au bloc opératoire autour d’un café ou au restaurant de l’hôpital, et surtout par des entretiens formels. Ces entretiens ont eu lieu avec le personnel soignant du bloc opératoire et du service d’anesthésie, avec les chirurgiens et les médecins anesthésistes, avec le responsable de la stérilisation, ainsi qu’avec les principaux membres de la direction de l’HNE. Pour le personnel du bloc opératoire, des entretiens ont été proposés à tous ceux qui le souhaitaient. Près d’une centaine de collaborateurs ont été auditionnés. 4. Situation générale au bloc opératoire de l’HNE 4.1. Le ressenti global De ces différents entretiens, la première impression est que si la « crise » actuelle au sein des blocs opératoires n’est pas aigüe, certains collaborateurs récusant même le terme de « crise », celle-ci n’en est pas moins réelle. L’ensemble du personnel, des collaborateurs terrain aux responsables des services et des départements, semble s’être installé chroniquement dans un quotidien pathologique, dans lequel l’ambiance avec certains collaborateurs de leur service, des autres services et de la direction est « lourde ». Les discours sur l’hôpital et son organisation actuelle sont très souvent cyniques, notamment sur les multiples projets ayant si souvent changé au cours des dernières années. Face aux incertitudes sur les perspectives de leur hôpital, la plupart des acteurs exprime un certain désarroi, renforcé par les conflits rapportés dans les media. Dans ce contexte, les dysfonctionnements observés dans les blocs opératoires ne sont ressentis que comme un phénomène supplémentaire, pour lesquels on exprime le peu d’espoir qu’on a de pouvoir les corriger. Le présent travail d’expertise s’est donc heurté à une totale désillusion de la part d’un grand nombre d’interlocuteurs : - de nombreux audits ont déjà été réalisés, et n’ont été suivis d’aucun changement - les problèmes du bloc sont connus de tous, mais aucune décision n’est venue de la hiérarchie, dont on ne comprend pas l’attentisme. 4 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch De façon générale, ce qui a d’emblée frappé les rapporteurs est l’aspect multiforme de cette crise. On n’est pas ici dans une crise « classique », avec un dysfonctionnement de fond et quelques facteurs déclenchants, reconnus par tous. Ici, la crise est décrite de façon différente selon les interlocuteurs et la position qu’ils occupent. Toutefois, certains éléments généraux sont exprimés par l’ensemble des collaborateurs : - Tous se plaignent de l’absence de visibilité du projet institutionnel. - Tous se plaignent d’un fonctionnement non optimal et d’une insatisfaction au travail dans le bloc opératoire, mais surtout manifeste à PRT. En revanche, il n’y a aucun accord sur l’origine du problème, si ce n’est qu’il est généralement la conséquence des agissements de « l’autre ». Certains expriment même leur étonnement qu’on parle de crise, mais conviennent qu’on pourrait fonctionner mieux. - Beaucoup expriment et déplorent un manque de décision, à de multiples niveaux de leur hiérarchie. - Enfin, mais ce point est rarement évoqué spontanément, les rapporteurs ont été frappés par la mauvaise communication entre tous les acteurs. 4.2. Les données objectives De façon globale, l’HNE est un hôpital à tendance chirurgicale : le nombre de patients opérés représente 52% de l’ensemble des patients hospitalisés. La part chirurgicale de l’hôpital est plus forte à CDF (54%) qu’à PRT (51%). 2014 Nombre d’hospitalisations Nombre d’opérés % opérés / hospitalisés CDF 4’461 2’390 54% PRT 11’335 5’840 51% HNE 15’796 8’230 52% Yverdon (Daisy inclus) 7’635 3’494 (6’252) 46% (82%) CHVR total (Sierre) 26’985 (3’288) 12’100 (3’724) 45% (113%) L’évolution de l’activité chirurgicale, calculée en nombre d’opérés ou en heures de chirurgie, est légèrement à la baisse depuis 5 ans, l’activité ayant chuté d’environ 1% par année. 5 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch Evolution du nombre d'opérés 2009-2014 Evolution des durées opératoires (TROS) 2009-2014 20'000 10'000 HNE Nombre d'opérés / an 8'000 7'000 6'000 PRT 18'000 -5% +12% 5'000 4'000 3'000 2'000 CDF -31% Durée opératoire / an 9'000 HNE 16'000 14'000 12'000 PRT -6% +15% 10'000 8'000 6'000 4'000 1'000 2'000 0 0 CDF -34% Au sein de l’HNE, la répartition des activités chirurgicales entre PRT et CDF a évolué de façon opposée au cours des 5 dernières années suite aux décisions prises. A PRT, l’activité chirurgicale a augmenté de 2-3% par année, alors qu’à CDF une réduction de 6% par année a été observée. Au cours des 10 dernières années, une croissance de 2 à 4 % de l’activité chirurgicale est observée dans les hôpitaux universitaires. De même, les hôpitaux non universitaires connaissent généralement une croissance variant entre 2 et 6% par année. La figure ci-dessous compare les évolutions d’activité chirurgicale 2009-2014 de l’HNE avec celles de l’hôpital d’Yverdon et du Centre Hospitalier du Valais Romand (CHVR). - Les activités : par discipline Cinq disciplines chirurgicales représentent, comme dans la plupart des hôpitaux, plus de 85% de l’activité chirurgicale : la chirurgie générale, la gynéco-obstétrique, l’ortho-traumatologie, l’urologie et l’ORL. La 6 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch particularité de l’HNE est la réduction de l’activité de l’orthotraumatologie, qui représente habituellement l’activité chirurgicale la plus importante. A l’HNE, à la suite du transfert d’une partie de cette activité élective vers l’hôpital de la Providence, celle-ci a vu son activité réduite de 20% au cours des 5 dernières années. Les autres disciplines sont dans une situation plus proche de celle observée dans les autres hôpitaux, en croissance modérée (urologie, chirurgie générale) ou à l’équilibre (gynéco-obstétrique, ORL). - L’activité chirurgicale ambulatoire : La part de l’activité ambulatoire dans l’activité opératoire de l’HNE est visible, atteignant une part de 27% de l’ensemble de l’activité chirurgicale, avec un développement plus important à PRT (28%) qu’à CDF (23%). Mais cette activité ambulatoire reste encore modeste en comparaison avec les hôpitaux qui ont mis en œuvre des projets de développement de la chirurgie ambulatoire. Cette activité ne dispose pas de véritable organisation spécifique, avec un circuit d’admission séparé et une salle d’opération spécifiquement dédiée. L’expérience des autres hôpitaux, dans lesquels l’activité chirurgicale ambulatoire a véritablement décollé, montre que ces organisations spécifiques sont essentielles (bloc Daisy à Yverdon ; bloc opératoire de Sierre). Nombre d'opérés / an 14'000 Part ambulatoire de l'activité chirurgicale (données 2014) 12'000 10'000 8'000 6'000 4'000 2'000 0 28% 27% 44% 31% Total opérés Amb 23% PRT CDF HNE Yverdon CHVR (VS) 7 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch • Les activités opératoires électives et les urgences Les interventions chirurgicales réalisées en urgence à l’HNE représentent globalement 29% de l’activité opératoire (30% à PRT et 27% à CDF). Au cours des 5 dernières années, du fait des décisions prises au niveau de l’HNE, le nombre des urgences opératoires a augmenté d’environ 2% par année à PRT, alors qu’il a diminué de 4.7% par année à CDF. Lorsque l’on analyse la répartition au cours des 24h des urgences chirurgicales, on observe que 80% d’entre elles sont prises en charge entre 7h et 22h, respectivement 79 % à PRT et 85% à CDF. A CDF, avec la baisse progressive de l’activité d’urgences, le nombre des interventions urgentes réalisées entre 22h et 7h du matin était de 35 interventions sur l’ensemble de l’année 2014, soit moins d’une intervention toutes les 10 nuits. A PRT, le nombre d’urgences opérées entre 22h et 7h atteignait en 2014 224 interventions, soit une intervention 6 nuits sur 10. A PRT, sur les 6 salles d’opération, une salle (salle 3) est réservée aux urgences, en plus de la salle d’urgence 0. Les données 2014 montrent qu’entre 7h et 17h 4935 interventions ont été réalisées à PRT (839 urgences + 4106 actes électifs). 8 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch Si l’on admet qu’en moyenne, sur une activité de jour de 8h, il est habituel de prévoir environ 800 interventions par salle, cette activité moyenne est encore compatible avec l’ouverture de 6 salles d’opération. On peut cependant imaginer qu’avec la variabilité observée habituellement, il puisse y avoir certaines semaines des difficultés de programmation imposant de repousser certains actes électifs, de décaler vers la soirée certaines urgences ou de demander au personnel d’effectuer des heures supplémentaires. A CDF, aucune des 3 salles n’est réservée pour les urgences, celles-ci étant intégrées dans le programme opératoire électif. En 2014, entre 7h et 17h, 2’153 interventions y ont été réalisées (399 urgences + 1754 actes électifs). Cette activité est donc largement compatible avec l’ouverture de 3 salles d’opération. 4.2.1.Organisation du bloc opératoire : • Taux d’occupation des salles L’évolution au cours des 5 dernières années des taux d’occupation des 5 salles d’activité chirurgicale élective de PRT et des 3 salles de CDF montre que les taux d’occupation sont très élevés à PRT, alors que ces taux sont en décroissance à CDF. La méthode de calcul des taux d’occupation utilisée à l’HNE pour les chevauchements entre deux patients (le patient suivant endormi dans la salle attenante avant la fin de l’intervention du patient précédent) et pour les débordements (intervention se terminant au-delà de l’heure prévue d’ouverture d’une salle) ne sont pas identiques à ce qui se pratique dans d’autres centres et surévalue les taux mesurés. Ces mesures suggèrent pour autant qu’il n’y a aucune réserve d’accueil d’activité supplémentaire à PRT, à moins d’augmenter les durées d’ouverture des salles, alors qu’à CDF on dispose encore d’une capacité d’accueil notable. • Démarrage de l’activité le matin Les données sur les heures d’ouverture des salles d’opération ont également été analysées. Sur les 5 salles d’opération réservées au 9 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch programme électif de PRT et sur les 3 salles d’opération de CDF, le démarrage de l’activité anesthésique (T1) et le moment de « remise au chirurgien » (T2) correspondent globalement à ce qui est attendu : démarrage de l’anesthésie à 7h30 et « remise au chirurgien » à 8h. Il est intéressant de noter que le temps de « remise au chirurgien » est quasiment identique entre les blocs de PRT et de CDF, alors que le personnel d’instrumentation débute son travail 30 minutes plus tôt à PRT. Toutefois, l’analyse sur plus de 3000 cas à PRT et de 1000 cas à CDF montre des délais globaux de démarrage de la chirurgie qui sont parfois longs. Le délai médian entre le début de l’anesthésie et le coup de bistouri (somme de T1-T2 et de T2-T3) est de 35 à 40 min (PRT et CDF). Dans un cas sur 5, il dépasse une heure, comme indiqué dans le tableau suivant. Données 2014 Actes électifs PRT Médiane (percentile 80) CDF Médiane (percentile 80) Délai T1-T2 Délai T2-T3 (anesthésie) (installation chir) 20 min (29 min) 15 min (30 min) 15 min (25 min) 25 min (40 min) 10 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch Un autre élément notable est le démarrage très tardif de la salle d’urgence (salle 3). Comme indiqué dans ce tableau ci-dessous, le coup de bistouri de la salle 3 survient généralement vers 10h, et une fois par semaine à 11h. Enchaînements entre deux cas Ce point faisant l’objet de plaintes exprimées par les chirurgiens, nous avons repris les données disponibles des enchaînements entre deux cas électifs sur plus de 1200 cas de 2014, à PRT et à CDF. La médiane du délai entre la sortie du patient du bloc opératoire et la « remise au chirurgien » du patient suivant (T5-T2 suivant) était à PRT de 25 min (percentile 80 : 35 min), et à CDF de 15 min (percentile 80 : 30 min). A noter que ces écarts ne comprennent pas le temps de fermeture de la paroi, qui n’est pas mesuré. L’analyse par discipline des délais d’enchaînements entre deux interventions montre que les écarts, notamment sur les percentiles 80, varient de façon importante entre les différentes disciplines, comme indiqué sur le graphique ci-dessous : la chirurgie pédiatrique, l’ORL et l’urologie ont des enchaînements un peu plus courts, avec une plus faible variabilité. Il est peu probable que ces écarts ne soient expliqués que par la nature des actes réalisés et des types d’installation. Du fait des importants écarts entre les disciplines, et sur la suggestion des instrumentistes nous ayant alerté sur la vraisemblable influence individuelle des opérateurs dans ces écarts, nous avons repris les données des délais pour chacun des opérateurs principaux. On retrouve 11 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch effectivement un effet opérateur-dépendant, correspondant à l’analyse effectuée par discipline. L’effet individuel est surtout important pour le percentile 80 sur les délais entre la fin de la chirurgie et la sortie du patient de la salle d’opération, comme indiqué dans le graphique ci-dessous, dans lequel chaque ligne représente un opérateur bien défini. Comme l’avaient suggéré les instrumentistes, ces données confirment que les délais les plus longs correspondent aux opérateurs qui quittent le bloc opératoire, voire se font remplacer pour la fermeture de la paroi. En revanche, les chirurgiens ayant les délais de fin d’intervention les plus courts sont ceux qui sont toujours présents, voire actifs, dans les enchaînements des patients. 4.2.2.Les effectifs Au total, 131 équivalents-plein temps (EPT) sont employés pour faire fonctionner les deux blocs opératoires de PRT et CDF. Ils incluent les instrumentistes (infirmiers-instrumentistes et TSO : 37.1 EPT), les aides 12 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch de salles d’opération (29.9 EPT), les infirmiers-anesthésistes (46.1 EPT) et les médecins anesthésistes (18.0 EPT, internes inclus). A ces chiffres, il faut adjoindre les effectifs chirurgicaux. Rapportés aux chiffres précédemment évoqués de l’activité chirurgicale, on obtient des densités globales de chaque catégorie de personnel (nombre d’EPT par opéré ou par heure d’ouverture du bloc opératoire), comme indiqué dans les figures ci-dessous. La comparaison des effectifs attribués aux deux sites de PRT et de CDF montre que l’activité par équivalent plein-temps est supérieure d’environ 20% à PRT par rapport à CDF. Ceci concerne les infirmiersanesthésistes, les instrumentistes, mais ne concerne pas les aides de salles d’opération. Nous n’avons malheureusement pas pu récupérer de façon spécifique et compréhensible les données d’absentéisme pour chacune des catégories de personnel des deux blocs opératoires de PRT et CDF. Comparés à deux autres hôpitaux de Suisse Romande, on voit que les effectifs de personnel soignant pour l’instrumentation ou pour l’anesthésie sont très voisins. Il faut tenir compte, dans cette comparaison, de la contrainte supplémentaire pour l’HNE de travailler sur deux sites. 13 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch 4.2.3.En résumé Six points ressortent de ces données : • L’activité chirurgicale stagne, voire est à la baisse, notamment en ortho-traumatologie. • L’activité chirurgicale ambulatoire représente 27% de l’ensemble de l’activité chirurgicale. Elle pourrait être développée. • Les urgences opératoires, représentant 27-30% de l’activité, sont réparties très inégalement entre les deux sites. Le maintien d’équipes de garde d’instrumentation et d’anesthésie au-delà de 22h doit être questionné compte-tenu de la très faible activité. • L’organisation des blocs opératoires pourrait être améliorée : o en utilisant la salle d’urgence dès 7h30 chaque matin, o en accélérant les phases de démarrage précédant le coup de bistouri. o Les enchaînements sont parfois longs, les écarts les plus importants étant observés dans certaines disciplines ou avec certains opérateurs. • Effectifs : il n’y a pas, dans cette crise, de problème de souseffectifs, pour ce qui concerne le personnel du bloc opératoire. Compte-tenu de la dispersion sur 2 sites, il n’y a pas non plus de problème de sur-effectifs. • Capacité opératoire : La capacité globale des blocs opératoires, comprenant 6 salles à PRT (+ une salle d’urgence 0) et 3 salles à CDF, est, dans l’organisation actuelle, « confortable » à CDF, mais « limite » à PRT. Les tensions observées au bloc de PRT sont très vraisemblablement en partie liées aux limites des capacités d’accueil des salles de PRT. Cependant, avant d’envisager d’ouvrir des plages opératoires supplémentaires à PRT, il conviendrait d’identifier quelle(s) activité(s) pourraient être transférée(s) à CDF, qui offre encore des disponibilités opératoires. Cette réflexion est importante à mettre en place rapidement, car la tendance des dernières années a été une augmentation annuelle de 2-3% à PRT et une réduction d’activité de 6% à CDF. 5. Analyse de la crise L’analyse plus en profondeur de la crise actuelle nécessite d’envisager séparément les différentes structures hospitalières participant au fonctionnement des blocs opératoires. Deux domaines rassemblent un grand nombre de mécontentements : le secteur de l’instrumentation et l’organisation globale des blocs opératoires. 14 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch 5.1. Le secteur de l’instrumentation C’est assurément ce secteur qui focalise le malaise le plus important, comme en a témoigné la forte participation aux entretiens avec les rapporteurs, au cours desquels plus de 30 instrumentistes (infirmièresinstrumentistes et TSO), sur un effectif de 37.1 EPT, et une dizaine d’aides de bloc ont souhaité s’exprimer. 5.1.1.Les instrumentistes Le malaise de ce groupe concerne de façon plus marquée les collaboratrices de PRT. Bon nombre d’entre elles évoque une ambiance de travail pesante, leur peine à venir travailler alors qu’elles aiment leur travail. Cette situation pousse certaines des plus jeunes à envisager de quitter l’institution. Les éléments d’insatisfaction ressortant des entretiens concernent surtout : Une insatisfaction dans l’organisation du travail : • Un grand nombre de collaboratrices de l’équipe d’instrumentation se plaint de l’organisation du travail. Au cours de la journée, les collaboratrices « gardiennes », porteuses du bip « soleil » sont chargées de s’occuper de la distribution du travail dans les différentes salles, de prévoir les remplacements durant les heures de repas et de répondre aux appels téléphoniques concernant le matériel en prêt pour les interventions des jours à venir. Si ce travail est apprécié par certaines, de nombreuses autres estiment que ce travail devrait être fait par leur cheffe et souhaiteraient durant la journée se consacrer exclusivement aux problèmes d’instrumentation des interventions de la journée. Elles se sentent mal à l’aise dans ces tâches d’organisation. Un autre point d’insatisfaction concerne pour beaucoup la demande d’effectuer la nuit le travail de stérilisation. Nous reviendrons sur ces difficultés dans le chapitre consacré à la stérilisation. • Un métier devenu de plus en plus complexe Le nombre et la spécificité croissante des équipements et des consommables utilisés pour la chirurgie rendent le métier d’instrumentation de plus en plus complexe. Ce point est observé dans tous les blocs opératoires. Pour certaines interventions, le matériel stérile ou à stériliser est commandé, et ce qui n’est pas utilisé doit être renvoyé après chaque intervention, induisant toute une logistique dont s’occupent les instrumentistes. Du fait de cette complexité, beaucoup d’entre elles se sentent mal à l’aise dans certaines spécialités dans lesquelles elles instrumentent moins souvent. A l’HNE, la mise en place de « référentes » pour chacune des spécialités est saluée par l’équipe, car ceci est censé aider les autres et offre aux chirurgiens une interface spécialisée. Toutefois, certaines de ces disciplines sont devenues la « chasse gardée » de 15 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch certaines, qui utilisent ce rôle comme un pouvoir et leur permet d’être moins confrontés aux difficultés de la polyvalence. L’introduction récente d'un poste chargé de prendre en charge toute la logistique liée aux équipements et ancillaires du bloc, notamment pour l’orthopédie, est unanimement saluée comme une aide majeure dans cette tâche que beaucoup avaient le sentiment de mal faire. • Un sentiment de manque de soutien de la hiérarchie Toutes les instrumentistes notent la très grande qualité humaine de leur cheffe, sa gentillesse et son écoute. Toutes apprécient ses efforts pour les plannings, répondant généralement au mieux aux attentes de tous. Certaines s’inquiètent de son départ prochain. La grande majorité estime aussi qu’elle « manque d’autorité ou qu’elle a les mains liées dans le dos par sa propre hiérarchie ». Un grand nombre d’instrumentistes souhaiterait la mise en place d’un cadre de travail plus rigoureux et plus rassurant. Le sentiment global de l’équipe d’instrumentation, englobant instrumentistes et aides de bloc, vis-à-vis de la direction des soins est celui d’un éloignement ou d’un abandon, un management de l’indifférence. • Des points positifs Certaines instrumentistes nous ont aussi dit être très satisfaites de leur travail. Toutes reconnaissent qu’il n’y a pas de problèmes de manque d’effectifs, mais seulement un problème d’absentéisme, induit par l’ambiance de travail. Si un nombre limité de chirurgiens a des relations plus difficiles avec certaines instrumentistes, il n’y a pas (ou plus) de manque de respect de la part des chirurgiens ou des anesthésistes. Le groupe d’instrumentistes est constitué pour moitié environ d’infirmières-instrumentistes, et pour moitié de techniciennes de salles d’opération (TSO). Si certains relèvent une différence entre les compétences des unes et des autres, il semble que globalement ces deux groupes ont plutôt bien fusionné. Les éléments constitutifs de la crise ne sont en aucune manière liés à ces différences. Ceci est à souligner. A CDF, au contraire de PRT, l’équipe est soudée. L’équipe d’instrumentation a le sentiment que les problèmes, lorsqu’ils surviennent, sont gérés simplement, sur un mode « familial », car la communication au sein du groupe et du bloc opératoire y est bonne. Le mécontentement des collaborateurs de CDF se situe dans les relations difficiles avec leur hiérarchie de l’HNE et dans l’accueil qui leur est fait par les différents collaborateurs qu’ils côtoient à PRT. Leur sentiment est que leur façon de travailler est a priori mauvaise pour les collaborateurs de PRT, les procédures de travail devant systématiquement être calquées sur celles de PRT. Ils ne comprennent pas la demande récente de modifier leurs horaires de travail, qui leur 16 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch impose de débuter à 7h, alors que jusqu’alors, avec des horaires commençant à 7h30, le « coup de bistouri » s’effectuait en moyenne en même temps qu’à PRT, débutant pourtant 30 min plus tôt. 5.1.2.Les aides de bloc Les aides de bloc constituent un groupe moins structuré que les instrumentistes. Leur rôle est important à l’HNE, notamment en raison du modèle de travail adopté en salle d’opération à PRT. En effet, le modèle est celui de disposer dans chaque salle d’une instrumentiste (habillée en stérile) et d’un aide de salle. Ce rôle dans de très nombreux hôpitaux est occupé par une deuxième instrumentiste « tournante ». Dans ce rôle, il est donc demandé aux aides de bloc de bien connaître toutes les spécificités de chaque type de chirurgie pour pouvoir anticiper les besoins de l’instrumentiste et du chirurgien au cours d’une intervention. Cette connaissance est pour certains difficile à acquérir, et est source d’un stress important. Pour un certain nombre d’entre eux, c’est cette difficulté qui génère de l’absentéisme dans ce groupe. Leur première insatisfaction est avant tout liée à l’insuffisance de la formation qui leur est donnée à leur arrivée. Ils estiment être trop formés « sur le tas » et certains se plaignent d’être trop rapidement lâchés seuls. L’absence d’uniformisation des pratiques pour chaque chirurgie, plutôt que pour chaque chirurgien, rend leur travail plus complexe et leur pose problème. Dans ce cadre, certains souhaiteraient avoir un référent auprès de leur hiérarchie pour que soient abordés leurs problèmes spécifiques. Par ailleurs, l’ambiance au sein de leur groupe est parfois difficile, notamment en raison de la présence de quelques fortes personnalités. L’absentéisme important accentue également les tensions de la part des collaborateurs présents qui doivent remplacer les absents. Vis-à-vis de leur hiérarchie, tous expriment que leur cheffe est très à l’écoute de leurs problèmes, mais qu’elle manque d’autorité et qu’elle ne manifeste pour leurs difficultés qu’un très faible soutien, notamment lorsqu’un problème se pose avec un chirurgien ou qu’une parole méprisante est exprimée. Cette absence de soutien est ressentie par ces collaborateurs vis-à-vis de la direction des soins infirmiers. 5.2. L’organisation du bloc opératoire L’organisation actuelle du bloc opératoire repose sur deux structures : une structure de planification et de programmation d’une part, et une structure d’organisation, incluant la commission des blocs et le comité des blocs. 17 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch 5.2.1.Une structure de planification et de programmation Cette structure, placée sous la responsabilité du Dr Ch Meuli, avec l’aide de Mme C Scheidegger, effectue avant tout la planification des interventions (remplissage des vacations attribuées aux différents opérateurs), à l’exception de la chirurgie générale qui conserve cette organisation. A moins de 10 jours de l’intervention, cette structure a l’autorité de redistribuer les vacations non occupées vers d’autres opérateurs ou vers des urgences. Cette structure doit travailler en étroite collaboration avec les équipes travaillant dans les blocs opératoires, mais aussi avec la gestion des lits d’hospitalisation. Une fois les programmes opératoires établis, Ch Meuli ne s’occupe plus du suivi du bon déroulement du programme opératoire et des éventuelles adaptations nécessaires en cours de journée. Ceci est réalisé par les 3 médecins-chefs du service d’anesthésie. Enfin, la structure de planification et de programmation effectue les calculs d’évaluation du bon fonctionnement du bloc opératoire, en entrant et en corrigeant manuellement dans les bases de données les données recueillies sur les feuilles d’activité remplies au bloc opératoire. Le recueil des données chiffrées est très orienté vers l’évaluation de la bonne utilisation des vacations offertes à chaque opérateur ou chaque discipline. L’absence d’informatisation des données de l’activité opératoire impose un travail long et fastidieux pour la saisie et la correction des données, travail actuellement fait par Mme C Scheidegger et le Dr Meuli. 5.2.2.La commission du bloc et le comité du bloc La structure faitière mise en place est un système à double chambre. La commission des blocs opératoires, d’une part, conçue comme l’organe législatif, réunit les différents chefs de département et le Dr Meuli. Elle prend les principales décisions concernant le fonctionnement du bloc opératoire. Elle est présidée par le directeur médical. Le comité du bloc opératoire, d’autre part, conçu comme l’organe exécutif, met en application les décisions prises et prend en compte les difficultés pratiques se rencontrant au bloc opératoire. 5.2.3.En pratique Le système d’organisation mis en place dans les blocs opératoires de l’HNE va devoir à court terme être revu, en raison du départ prochain du Dr Ch Meuli. On peut en faire les commentaires suivants : • le regroupement de la planification et de la programmation doit impérativement être maintenu. La question qui se posera est celle de mettre ou non un médecin pour cette fonction. Dans la situation actuelle de l’organisation, la faible implication des chirurgiens dans l’organisation plaiderait pour le maintien d’un médecin. • L’absence d’informatisation, qui permettrait la saisie automatique 18 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch des temps opératoires réels, est à regretter, car le système actuel repose trop fortement sur la bonne volonté du Dr Meuli et de Mme Scheidegger. La direction doit impérativement se doter d’un système de mesure de l’activité pour s’assurer du bon fonctionnement du site le plus coûteux de l’institution. • On peut en effet regretter que la structure du Dr Meuli n’ait pas aussi en charge le suivi per-opératoire du programme établi, et son adaptation aux aléas du quotidien, avec une éventuelle participation d’anesthésistes, de chirurgiens et d’instrumentistes. • La fonction d’évaluation de l’activité des blocs opératoires est une fonction essentielle qu’il faut maintenir. C’est à ce niveau que doivent se créer les liens entre la direction de l’HNE et la commission des blocs. Le suivi actuel semble trop concentré sur la bonne utilisation des vacations attribuées à chaque chirurgie. La question qui doit être soulevée à l’occasion du départ du Dr Meuli est de savoir si les indicateurs et la structure d’évaluation du bloc opératoire devraient aussi s’étendre aux recettes (exhaustivité de la facturation des actes opératoires) et aux dépenses (personnel et équipements-consommables) liées aux activités du bloc opératoire. Le bloc opératoire peut être vu comme un lieu de dépenses mais aussi comme un lieu de recettes. • L’organisation actuelle, incluant la commission et le comité des blocs opératoires, n’a pas de lisibilité pour les collaborateurs de terrain. Cette organisation ne nous semble pas optimale, parce qu’elle disperse les responsabilités sur le bon fonctionnement du bloc dans une période où la priorité est de construire une structure fonctionnelle. En dehors du Dr Meuli faisant partie des deux structures, on risque fort d’avoir des aller-retour entre la commission chargée de décider des changements et le comité chargé de les exécuter, pour finalement avoir des structures inefficaces. • En outre, la présidence confiée au directeur médical, si elle a certainement permis d’apporter l’autorité du directeur médical pour le démarrage probablement difficile de la structure organisationnelle, ne permet pas aux différents métiers du bloc opératoires d’être confrontés aux difficultés d’organisation. La direction médicale devrait plutôt être dans une position d’interface avec la commission du bloc et de discussion avec le président de la commission sur l’opportunité d’octroyer ou non des ressources supplémentaires. • Les structures actuelles n’offrent pas à l’ensemble des acteurs une structure d’information adéquate. L’ensemble des professionnels du bloc opératoire doit bénéficier d’une structure les informant régulièrement du fonctionnement du bloc, des décisions prises et des nouveautés à prévoir. Mais, cette structure doit aussi permettre aux différents professionnels de s’exprimer sur leurs besoins, d’échanger sur les procédures en cours ou à mettre en place, et de faire remonter les éventuels dysfonctionnements. 19 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch • Enfin, un élément nous a semblé particulièrement préoccupant. Il n’existe pas actuellement de réelle procédure de contrôle des commandes pour les instruments ou les dispositifs médicaux, incluant une validation des dépenses engagées par les responsables des départements. De même, il n’existe pas de suivi des stocks et de l’utilisation des équipements, instruments et ancillaires, qui représentent des masses financières importantes. Ces points doivent impérativement être corrigés et sécurisés, car les flux financiers liés à ces matériels coûteux sont probablement importants. Le travail mis en place depuis peu sur ces points par l’ingénieure responsable de la logistique doit être soutenu. 5.3. La stérilisation : Comme évoqué précédemment par les instrumentistes, la collaboration entre le personnel d’instrumentation et de stérilisation de PRT est défaillante. Ceci n’est pas le cas à CDF, où le fonctionnement et la communication sont beaucoup plus harmonieux entre ces deux secteurs, pourtant plus éloignés l’un de l’autre qu’à PRT. Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette mauvaise communication. Le premier est d’ordre humain. Les deux responsables de l’instrumentation et de la stérilisation ne se parlent pas, et comme il est habituel, les collaborateurs adoptent volontiers les conflits des chefs. Le deuxième facteur, se surajoutant au premier, est lié au fait que ces deux structures ont des hiérarchies différentes. Le responsable de l’instrumentation répond à Mr Bastin, responsable des soins pour les blocs opératoires, les soins intensifs et les urgences. En revanche, le responsable de la stérilisation répond à Mr Schmitt. En dehors de ces problèmes relationnels, c’est le modèle organisationnel de la stérilisation qui est questionné. Deux modèles s’opposent et on est à PRT au milieu du gué. Dans le modèle classique, la stérilisation du bloc opératoire fait intégralement partie du secteur de l’instrumentation. Les instrumentistes sont donc chargés d’assurer le fonctionnement de la stérilisation, de faire les plateaux, de s’occuper du lavage et des cycles des autoclaves. Dans ce modèle, les personnels de la stérilisation et de l’instrumentation fonctionnent avec une responsabilité commune. Dans un deuxième modèle, plus récent, le métier de stérilisation s’est autonomisé par rapport au secteur de l’instrumentation. Dans ce modèle, les personnels de la stérilisation sont chargés de prendre les instruments au décours de l’intervention et de les remettre à disposition pour être réutilisés une fois le cycle de lavage et de stérilisation accompli. Il faut alors clarifier les points de séparation entre les domaines des uns et des autres. Dans la situation actuelle du bloc de PRT, il y a selon les heures de la journée ou selon les types d’activités un mélange entre ces deux modèles. De jour, le personnel de la stérilisation fonctionne de façon 20 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch indépendante du personnel du bloc opératoire. Lors des périodes de « surchauffe », les instrumentistes ou les aides du bloc ne comprennent pas que du personnel ponctuellement inoccupé en stérilisation ne viennent pas les aider. En revanche la nuit, les instrumentistes ont pour tâche de préparer dans le secteur de la stérilisation les plateaux, voire parfois de mettre en route les appareils de lavage et les autoclaves, comme dans le modèle classique. De nombreux instrumentistes ne comprennent pas que le personnel de la stérilisation soit alors exempté du travail nocturne auquel ils sont astreints. Un autre exemple, mal compris par les instrumentistes : les plateaux d’orthopédie ont atteint une telle complexité qu’il leur est demandé de préparer les plateaux d’orthopédie dans le secteur de la stérilisation. Ceux-ci comprennent mal pourquoi avoir séparé ce secteur si les personnels ne sont pas aptes à s’occuper du matériel qu’ils sont censés prendre en charge, et pourquoi ils doivent assumer ce travail. Enfin, pourquoi le personnel de la stérilisation ne prendrait pas en charge le matériel sale dès la sortie des salles d’opération, ce qui éviterait aux instrumentistes de faire des aller-retour vers le couloir « sale » ? 5.4. Les problèmes de la fusion PRT-CDF Si le malaise des instrumentistes est l’élément le plus aigu dans la crise actuelle, les difficultés liées à la fusion PRT-CDF constituent une forte inquiétude, partagée par la totalité du personnel médical et soignant de l’HNE. Si ce point sort quelque peu du mandat de cette analyse, il est difficile de le passer sous silence, tant une partie majeure des dysfonctionnements actuels des blocs opératoires trouve une explication dans les conséquences de cette fusion, et tant ces éléments devront impérativement être pris en compte pour sortir de cette crise. - PRT – CDF : deux positionnements différents Lors des entretiens avec les collaborateurs de l’HNE, rares ont été ceux qui se sont positionnés comme pouvant travailler indifféremment et avec le même plaisir sur l’un ou l’autre site, PRT ou CDF. L’impression actuelle est que, dans cette fusion, chacun semble avoir choisi son camp, par appartenance historique ou par intérêt personnel. De façon un peu caricaturale, soit on s’identifie à PRT, avec le groupe dont on sait qu’il va gagner et qui va récupérer le plus gros des activités et imposer son modèle de travail à l’autre. Soit on s’identifie à CDF, et tout en sachant qu’on se bat contre l’histoire, on entre dans la résistance, en réfutant les arguments économiques. On s’évertue alors à montrer les erreurs et les incohérences du modèle intégratif de l’HNE. Ceci témoigne à l’évidence de la force des émotions ressenties lors de cette fusion. Les collaborateurs de PRT et de CDF se sont sentis blessés et écartés du projet de regroupement de l’HNE. La question est à ce point encore sensible qu’aucun des interlocuteurs entendus ne semble tenir un discours apaisant. Chacun est sur un positionnement du type « ça passe ou ça casse ». Nous avons eu le sentiment que les 21 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch arguments que nous avons soulevés en évoquant les probables erreurs commises dans l’accueil à PRT des collaborateurs de CDF et le souhait que soient intégrée dans la fusion une partie des procédures de travail provenant de CDF, n’étaient actuellement tout simplement pas recevables par les principaux responsables actuels des départements de l’HNE. - Les ressentis et blessures des collaborateurs du bloc de CDF : Beaucoup de choses se sont passées dans cette fusion et les blessures sont encore très vives. Il nous semble important de les rapporter. En effet, même si celles-ci sont connues de tous, même si certaines ont possiblement un rapport éloigné avec la réalité des faits, il nous semble qu’il sera difficile d’aller de l’avant et de sortir de cette crise sans les prendre en compte. Le premier élément qui interpelle est qu’un grand nombre de collaborateurs sont convaincus que le bloc opératoire de CDF, après sa fermeture le week-end, va fermer complètement et que la totalité des interventions sera réalisée à PRT. Ceci crée chez eux un sentiment d’abandon et d’inutilité. On est dans l’irrationnel le plus total, car on voit mal comment le bloc déjà bien plein de PRT pourrait encore intégrer les 2400 interventions de CDF. De très nombreux collaborateurs témoignent du mauvais accueil qui leur a été et leur est encore réservé lorsqu’ils « descendent » travailler à PRT. Ceci va des réflexions, sous forme de blagues récurrentes, sur la moindre charge de travail à CDF, sur les conditions climatiques qui leur ont tout de même permis de descendre. Mais ceci peut aller jusqu’à leur interdire certains postes de travail comme en anesthésie (« toi, tu ne peux faire que la salle de réveil, mais pas le bloc »). Si la plupart des collaborateurs conçoit bien qu’il faut regrouper les activités chirurgicales très spécialisées et « lourdes » à PRT, tous ont néanmoins le sentiment que le départ de la chirurgie digestive lourde ou thoracique n’est pas compensé par des interventions plus simples qui pourraient être réalisées à CDF. Certains reconnaissent sur ce point un réel effort récent du chef du département de chirurgie. Mais les transferts de patients entre PRT et CDF n’ont pas été de simples regroupements d’activités, logiques car permettant de concentrer et de renforcer les expertises. Ces regroupements ont aussi réduit le revenu des médecins de CDF, notamment pour la prise en charge des patients privés. On comprend mieux, en prenant en compte cet élément financier, la sensibilité suscitée par ces transferts et les positionnements des uns et des autres. Le départ de certains anesthésistes et de certains chirurgiens doit aussi être compris avec ces éléments. Derrière cette fusion, existait aussi un partage à sens unique des revenus. Ce point doit être intégré dans la sortie de crise. 22 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch 5.5. Le département d’anesthésie Dans l’environnement actuel de l’HNE, dans lequel le manque de gouvernance apparaît comme un élément important de la crise, le département d’anesthésie apparaît comme un contre-exemple. Ce service est probablement celui qui a la structure et l’organisation la plus solide, et celui qui, du fait de règles rigides, garantissant certes la sécurité, génère un grand nombre d’irritations. Ce département est géré par un chef reconnu et autoritaire, qui défend son service, protège son personnel et a mis en place une organisation structurée. L’avantage manifeste de cette gestion est que le département « tourne ». Tous reconnaissent la compétence professionnelle du personnel médical et infirmier et la qualité des soins prodigués. Ils sont administrés avec de bons équipements, entretenus et renouvelés régulièrement. Tous apprécient l’effort et la priorité mise sur les règles sécuritaires prônées par le chef du département, même si certains ont conscience de la rigidité, jugée parfois excessive, qui s’associe à une telle organisation. 5.5.1.Une organisation efficace mais rigide - Une organisation très pyramidale Au sein du département d’anesthésie, l’objectif est que chaque salle d’opération soit dotée d’un médecin et d’un infirmier-anesthésiste. Chacun de ces deux groupes est chargé de s’organiser pour répondre à cette exigence et garantir ainsi le bon fonctionnement des salles ouvertes. Cette organisation sépare de façon très formelle ses composantes médicales et infirmières. Pas question donc qu’au moment des repas, comme dans de nombreux centres, le médecin et l’infirmier s’organisent pour aller manger alternativement, ici chacun devant se faire remplacer par l’un des siens. Au niveau médical, la structure du département est pyramidale, avec 6 niveaux : le chef de département, les médecins-chefs, les médecins adjoints, les médecins hospitaliers, les chefs de clinique et les internes. Dans l’organisation mise en place, tous les médecins-chefs et médecins adjoints participent à une garde sur place. Ce point mérite d’être souligné car il constitue un élément important pour garantir la qualité des soins des opérés. De plus, cette disponibilité sur place des médecins anesthésistes tranche par rapport aux autres disciplines pour lesquelles les médecins senior ne sont pas présents à PRT 24h/24, mais sont « de piquet » à 30 minutes, voire 2h. Parmi les 6 différentes catégories de médecins du département d’anesthésie, certaines tâches sont spécifiquement du ressort des uns ou des autres. Par exemple à PRT, le bip d’organisation du bloc et des urgences est uniquement porté, de 7h30 jusqu’au milieu de l’aprèsmidi, par le chef de département ou l’un des deux autres médecins23 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch chefs de PRT. Ceux-ci sont chargés, en collaboration avec l’instrumentiste portant le bip « soleil 1 », de l’organisation des interventions dans les différentes salles et de l’intégration des urgences. Par ailleurs, les médecins-chefs s’étant chacun spécialisés dans certains domaines (chirurgie pédiatrique, thoracique…), il est demandé que ces cas soient pris en charge par eux. Ces deux points font l’objet de critiques, sur lesquelles nous reviendrons. - Un département impliqué dans l’organisation quotidienne du bloc Comme évoqué précédemment, le département d’anesthésie participe très activement à l’organisation de la programmation au quotidien à l’adaptation du programme établi au déroulement de la chirurgie et à l’intégration des urgences. Ce rôle exercé par les anesthésistes a, semble-t-il, été contesté par les chirurgiens il y a quelques années. Mais devant l’absence de proposition d’autres corps professionnels pour se charger de cette tâche difficile, la direction serait revenue vers le département d’anesthésie pour lui demander de conserver ce rôle. Dans l’organisation mise en place, validée par la direction, certains points doivent être rappelés, car ils donnent lieu à des plaintes récurrentes de certains chirurgiens. - Une salle d’opération est en permanence spécifiquement réservée pour les urgences 0 (urgence immédiate). - Lorsque plusieurs urgences surviennent simultanément et qu’il faut prioriser l’ordre de leur passage au bloc opératoire, si la proposition du médecin-chef d’anesthésie est contestée par l’un des chirurgiens, ceuxci sont alors chargés de s’entendre entre eux pour décider de l’ordre des priorités. - Durant l’activité de garde, au-delà de 22h, l’effectif de l’équipe d’anesthésie étant alors restreint pour permettre l’ouverture d’une seule salle d’opération, seules les urgences 0 et 1 sont opérées, les autres urgences étant reportées au lendemain, voire plus loin. Une telle organisation a le grand avantage de sa clarté. Ce système fonctionne depuis des années, sans qu’aucun drame ni aucune plainte ne soient survenus. Cette organisation privilégie les urgences obstétricales et les grandes urgences chirurgicales, pour lesquelles une équipe d’anesthésie et une salle d’opération est toujours disponible. Toutefois, en matière de gestion de risques, le « prix à payer » d’un tel système est le rallongement des délais opératoires pour les urgences de moindre gravité, telles que par exemple les fractures du col fémoral. Le contre-argument avancé par l’équipe d’anesthésie est la faible disponibilité de certaines équipes chirurgicales. Les services de chirurgie disposent d’un faible nombre d’opérateurs, d’autant moins disponibles pour ces « petites » urgences qu’ils sont généralement aussi prévus sur le programme opératoire du lendemain matin. 24 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch Comment est vécue par le personnel médical et infirmier cette organisation du département d’anesthésie ? 5.5.2.Les infirmiers-anesthésistes Au niveau du personnel infirmier, deux positionnements différents existent. Le personnel infirmier de PRT est globalement satisfait, voire fier de travailler dans ce département, dont ils apprécient la bonne ambiance. Ils estiment que l’encadrement médical est sans reproche et se sentent toujours respectés par les médecins. Les seules critiques émises concernent la rigidité de l’organisation, séparant de façon très tranchée médecins et infirmiers, avec les difficultés inhérentes aux remplacements pour les repas. D’autres regrettent la faible implication du département en dehors des blocs opératoires ou ne comprennent pas qu’au-delà de 22h ils vont pouvoir rester toute la nuit inoccupés dans l’attente d’une éventuelle urgence 0, alors que des patients avec des patients avec des fractures du col fémoral vont devoir attendre jusqu’au lendemain après-midi, voire plus. A l’inverse de leurs collègues de PRT, les infirmiers-anesthésistes de CDF sont insatisfaits. Ils se sentent exclus de la gestion du département, mal aimés parce que considérés comme rebelles au projet de regroupement, et jugés a priori comme incompétents. Certains ne restent que par défaut de ne pas trouver d’autres postes, et quitteraient l’HNE si on leur impose de « descendre » à PRT. Tous ou presque regrettent la période du service d’anesthésie de CDF, tel qu’il était, avant que certains médecins ne démissionnent. 5.5.3.Les médecins anesthésistes Au niveau médical, tous les médecins entendus reconnaissent le bon fonctionnement du département. Les critiques se situent à deux niveaux. - l’organisation excessivement pyramidale du département est fortement décriée par les médecins autres que les médecins-chefs. Le port du bip d’organisation du bloc, tel qu’évoqué plus haut et qui leur est interdit, assumé par les médecins-chefs ne relève, pour eux, en aucun cas de compétences spécifiques, d’autant plus qu’après 15h30 et toute la nuit cette compétence leur sera reconnue. En outre, tous ont assuré cette même tâche pour des activités plus complexes, à Genève ou Lausanne lorsqu’ils étaient chefs de clinique. Cette organisation n’est pour eux qu’un subterfuge pour justifier l’important écart salarial existant entre les salaires de médecin-chef et de médecin-adjoint. Pour les activités spécialisées dont ils se sentent écartés, s’ils peuvent comprendre le besoin de garantir une forte exposition aux cas rares afin de maintenir des compétences spécialisées, ils comprennent moins d’en être écartés et de perdre leur expertise, d’autant plus qu’après certaines heures ils doivent prendre en charge ces cas spécialisés lorsqu’ils sont de garde, ou les transférer vers un hôpital universitaire, 25 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch ce qui ternit l’image de l’HNE. - Le dernier point concerne les médecins anesthésistes de CDF, qui, comme les infirmiers-anesthésistes, se sentent les mal aimés et exclus de la vie du département d’anesthésie de l’HNE, car toutes les décisions sont prises avec la vision de PRT. Le départ de certains d’entre eux a certainement appauvri le département. 5.6. Le département et les services de chirurgie 5.6.1.Le malaise parmi les chirurgiens : Les services des différentes spécialités chirurgicales de l’HNE sont regroupés dans un département de chirurgie, à l’exception du service de gynécologie-obstétrique qui constitue à lui seul un autre département. Au cours des dernières années, les différents projets concernant la distribution des différentes activités entre les blocs de PRT et CDF ont profondément bouleversé l’ensemble des chirurgiens et déstabilisé leurs perspectives à court terme. Parmi eux, de nombreux positionnements se sont exprimés, parmi les différentes disciplines chirurgicales ou au sein même des disciplines. Les éléments partagés par l’ensemble des chirurgiens pourraient être les suivants : - Construire un seul hôpital cantonal à mi-chemin entre Neuchâtel et CDF serait un projet auquel tous adhéreraient. - Travailler sur deux sites est une contrainte extrêmement handicapante. Imaginer opérer sur un site en se sentant éloigné des patients opérés la veille ou devant être opérés le lendemain est une véritable difficulté, les mettant dans un grand inconfort par rapport à leurs patients. - Réduire le nombre des gardes d’urgences chirurgicales et les regrouper sur un seul site a été souhaité par les chirurgiens au cours des dernières années. Le rapport « Eckert » en 2014 ne concluait pas formellement en faveur d’un site unique de garde, puisqu’il maintenait la possibilité d’opérer en garde à CDF. Cependant, l’orientation était prise dans ce sens, ce qui a probablement facilité la décision prise en 2015 de fermer le bloc opératoire de CDF durant le week-end. Au-delà de ces quelques points de convergence, on ne trouve aucune position commune sur la répartition des activités entre les sites de PRT et de CDF, mais seulement quelques positionnements individuels très affirmés : « Pas de question de monter à CDF… » ou « Pas question de quitter CDF… ». On crée alors un monde sans compromis, dans lequel chacun ou chacune des disciplines cherche à trouver les arguments les plus appropriés qui lui permettraient d’échapper à la contrainte des deux sites. L’HNE souffre cruellement d’un manque de vision collective des chirurgiens, à court ou moyen terme, et de l’absence de projets fédérateurs. 26 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch 5.6.2.La chirurgie ambulatoire Tous les chirurgiens ont conscience de l’importance de développer les activités chirurgicales ambulatoires dans les années à venir. Le projet actuel de les développer au bloc de CDF est évoqué par beaucoup, car il offrirait de multiples avantages. Toutefois, on retrouve sur un tel projet les mêmes réticences que précédemment. Ce projet est bon, mais pour les autres, et chacun met en avant les obstacles qui ne lui permettent pas de s’y associer. Certains font valoir les obstacles structurels. Le site actuel de CDF est très vétuste et nécessiterait un investissement important pour changer l’image mauvaise des structures d’hospitalisation actuelles. La rénovation des blocs opératoires et de la salle de réveil a pourtant été faite avec succès… D’autres mettent en avant des arguments de nature médicale. Ils concernent par exemple les disciplines s’adressant aux enfants, pour lesquelles l’absence de structures d’hospitalisation pédiatrique à CDF est avancée. Ils concernent aussi la gynécologie, pour lesquelles les femmes bénéficiant de curetages doivent retrouver en postopératoire un environnement infirmier spécialisé rompu à ces moments chargés de fortes émotions. Ceci semble bien naturel et des solutions devraient être trouvées. D’autres avancent la réticence des patients. Pourtant, des discussions avec les chirurgiens acquis à cette idée, il ressort que les réticences des patients habitant autour de Neuchâtel d’être opérés à CDF sont rares lorsque le chirurgien s’engage dans ce sens. D’autres touchent à l’organisation de leur équipe. Certains actes sont par exemple réalisés par des internes, un chirurgien plus senior étant toujours à proximité à PRT. Transférer ces actes à CDF impliquerait alors d’y envoyer une équipe plus nombreuse. D’autres font valoir le faible nombre de cas pour ce qui les concerne, et ne peuvent imaginer ne « monter » à CDF que pour un ou deux patients. D’autres enfin font valoir avec beaucoup de franchise un argument financier. Transférer des actes en ambulatoire leur fait perdre des revenus. Ils n’envisagent donc pas ce type de développement sans une contrepartie financière. Ce point nous semble une piste à aborder, car une solution à ce niveau pourrait peut-être aplanir une bonne part des réticences évoquées. 5.6.3.Les points d’insatisfaction des chirurgiens Sur les dysfonctionnements du bloc opératoire de PRT, en revanche, les chirurgiens partagent un certain nombre de plaintes : - l’accès au bloc opératoire pour les urgences est insuffisant, notamment durant la journée car le bloc est « plein ». Bon nombre de 27 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch chirurgiens, à l’exception des obstétriciens, juge excessif la réservation d’une équipe uniquement pour les urgences 0 ou expriment un agacement face à une équipe d’anesthésie ayant construit une organisation avec des barrières trop rigides. Beaucoup expriment le besoin de disposer d’une deuxième salle d’urgences au moins au cours de la journée pour les « petites » urgences, afin d’éviter des délais de prise en charge trop longs. - Un autre dysfonctionnement exprimé par beaucoup de chirurgiens est la mise en place au cours des années précédentes de couches « bureaucratiques » inutiles et excessives au sein de l’équipe d’instrumentation, produisant un personnel de plus en plus nombreux derrière les ordinateurs, alors qu’on en manque en salle d’opération. - Tous évoquent des enchaînements trop longs entre les interventions. - Tous se plaignent de l’organisation et de la gestion par les 3 médecins-chefs d’anesthésie, mais aucun d’entre eux n’est prêt à les remplacer dans cette tâche. L’impression globale est que les chirurgiens soulèvent avec beaucoup de bon sens de réels problèmes de dysfonctionnements des blocs, mais en ne s’impliquant pas suffisamment dans les propositions de réorganisation, leurs plaintes ne trouvent pas de solutions. Mais, l’impression est surtout que les causes des dysfonctionnements n’étant pas abordés, les équipes chirurgicales sont en même temps les acteurs et les victimes des dysfonctionnements. L’exemple de la surcharge d’activité sur PRT est flagrant. Le bloc opératoire de PRT est saturé ou presque, à moins d’ouvrir de nouvelles plages horaires, la seule solution est de transférer une partie des activités à CDF. En refusant le transfert d’une partie de leur activité vers le bloc de CDF, les chirurgiens participent à la mise en tension du bloc de PRT. Un autre exemple est celui des durées des enchaînements : la longueur des enchaînements incite certains à quitter le bloc entre deux interventions. Les chiffres précédents montraient bien que ce sont les chirurgiens qui restent au bloc entre deux interventions qui ont les enchaînements les plus courts, et inversement, ce que savent bien toutes les instrumentistes. 5.7. La direction Dans la crise actuelle des blocs opératoires, il apparaît bien difficile d’émettre des critiques vis-à-vis de la direction de l’HNE tant les décisions d’ordre politique ont changé. Quel discours tenir avec le personnel et quelles orientations fortes prendre lorsque l’on ignore dans quelle direction il faut aller ? On peut en revanche s’étonner de la très faible réactivité de l’équipe de direction face aux dysfonctionnements récurrents survenant dans les services, comme au niveau de l’équipe d’instrumentation. Le sentiment 28 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch est que les cadres de proximité peuvent certes manquer d’autorité, mais on peut aussi s’interroger sur le réel soutien qu’ils ont obtenu de leur hiérarchie. Un autre sentiment concernant la direction de l’HNE est celui d’un isolement par rapport au terrain. Face aux grandes incertitudes dans les orientations hospitalières, la tentation de la direction a probablement consisté à se replier sur elle en attendant d’avoir des orientations claires. On peut aussi imaginer qu’au cours de cette période chaque groupe professionnel a essayé de peser de toutes ses influences auprès des acteurs politiques ou des media. Toute décision forte de la direction risquait donc de faire l’objet de contestations, relayées à l’extérieur. On peut donc comprendre la prudence, de mise dans une telle période. Mieux vaut attendre et rester entre soi, dans un environnement limité de cadres, d’autant plus que la période n’est pas propice pour attirer de nouveaux talents. 5.8. Synthèse Au terme de cette analyse détaillée, on peut schématiser cette crise par les points suivants : il existe une crise bien réelle. Elle s’exprime sous deux formes : - une souffrance chez les instrumentistes et aides de bloc de PRT. Son origine est de nature managériale. Elle n’a pas de véritable lien avec la fusion PRT-CDF. - un profond malaise dans le milieu chirurgical C’est en réalité là que se situe le cœur de cette crise. Il est avant tout lié à l’embourbement existant depuis plus de 10 ans sur la répartition des activités chirurgicales entre les deux sites ayant fusionné. Aucune réelle orientation n’étant prise, les acteurs développent leurs activités en les concentrant surtout sur le site de PRT. Le bloc de PRT a certainement des points à améliorer, notamment dans son organisation et dans la communication entre les acteurs. Cette dernière est surtout mauvaise au sein des équipes de PRT, bien pire qu’à CDF. On se complait dans des postures et non dans l’entraide. Mais le cœur de la crise actuelle ne se situe pas dans les dysfonctionnements du bloc de PRT, qui fonctionne comme bien d’autres blocs. La crise actuelle se situe dans la distribution des activités opératoires entre les deux sites. Le bloc de PRT est actuellement proche de sa capacité d’accueil maximale, dans l’enveloppe des postes alloués. Les tensions actuelles vont se réduire si on organise la distribution des interventions entre les deux sites. L’amélioration des tensions à PRT concomitante de la baisse d’activité de PRT depuis l’été semble d’ailleurs le confirmer. On est donc dans une crise où la conjonction d’une gouvernance défaillante et d’un positionnement d’opposition d’une bonne partie des acteurs met l’organisation actuelle en échec. Chacun 29 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch développe ses activités sans véritable plan directeur, ce qui aboutit au fait que chacun est en partie responsable des dysfonctionnements dont il se plaint. 6. Ce qui va bien malgré la crise La crise actuelle du bloc de l’HNE ne doit pas pour autant méconnaître les éléments positifs qui ont été identifiés au cours des entretiens. Si on est dans des turbulences quant aux changements structurels entre les hôpitaux de PRT et de CDF, tous reconnaissent que ces deux établissements disposent de professionnels de talent. Chacun convient qu’il ne faudrait pas les perdre. Personne n’évoque des problèmes de défauts de compétences au niveau des différents corps professionnels, de mises en danger des patients ou de perte de confiance dans l’institution quant à la qualité des soins délivrés. Tous y maintiennent leur confiance pour s’y faire soi-même traiter. Ce qui frappe dans la très forte appartenance à ces deux hôpitaux, et notamment à CDF, c’est l’attachement très fort de certains à « leur » hôpital. 7. Des opportunités : Deux points méritent d’être mentionnés, car ils ont été souvent mentionnés lors des entretiens. Beaucoup ont exprimé un mieux dans le fonctionnement du bloc PRT depuis le mois de juin, identifié par une meilleure accessibilité du bloc aux demandes des chirurgiens, par une plus grande flexibilité dans l’insertion des urgences dans le programme, dans de meilleures dispositions des instrumentistes posant problème. La plupart attribuent ce mieux aux programmes moins chargés qu’au cours de l’hiver dernier, d’autres aux efforts du département de chirurgie pour transférer certaines activités à CDF, d’autres enfin aux effets de l’audit sur les comportements. Ces points sont encourageants, car ils démontrent que les solutions existent et sont proches, pour autant qu’on veuille bien s’y atteler. Le deuxième point est l’espoir suscité chez une partie du personnel par le discours plus clair de la direction et du CA avec l'adoption du plan stratégique 2015-2022. L’impression est qu’il y a une telle lassitude face à cette situation qu’une solution permettant de tourner cette page des hôpitaux du canton est la bienvenue, pour autant qu’elle soit crédible et pérenne. 8. Ce qu’il faut changer La sortie de cette crise passe avant tout par une reprise en main de la 30 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch gouvernance. 8.1. L’instrumentation : Il faut rapidement remettre une autorité dans le secteur de l’instrumentation. La direction doit s’y impliquer plus fortement et plus directement. La réflexion sur ce secteur doit prendre en compte la forte évolution de ce métier et notamment la complexité liée à la gestion des implants et ancillaires. L’adjonction d’un poste d’adjoint à l’ICUS, responsable de la gestion des équipements et ancillaires, va dans le bon sens et doit être maintenu. La gestion de la traçabilité des implants en fin d’intervention doit être améliorée et sécurisée. Demander aux instrumentistes à la fois des enchaînements rapides, de remplir 3 voire 4 formulaires différents pour les implants et d’amener la matériel à la stérilisation est contradictoire. Il faut revoir ce processus. Les mesures déjà entamées pour réduire la grande variabilité des boîtes d’instruments vont dans le bon sens et doivent être soutenues Le modèle adopté à l’HNE associant une instrumentiste et un aide dans chaque salle d’opération est efficace, mais il est essentiel que le plan de formation des aides soit optimisé et suivi. Les aides de bloc ou leurs représentants doivent être associés dans la commission des blocs opératoires. Les rares situations de manque de respect à leur égard doivent être signalées et traitées. 8.2. La stérilisation Pour rétablir plus de sérénité entre les personnels d’instrumentation et de stérilisation, il faut impérativement qu’un modèle organisationnel soit choisi. Si c’est le modèle d’une stérilisation, nouveau métier que l’on veut autonomiser et séparer de l’instrumentation, il faut établir un plan de mise en œuvre et communiquer avec le personnel sur ce projet, car la situation intermédiaire actuelle donne effectivement aux instrumentistes un sentiment d’être « bouche-trou ». Le deuxième problème est d’ordre managérial. Il n’est pas acceptable que les deux responsables ne se parlent pas. Le plus simple est de les remettre sous une même hiérarchie, de gérer ensemble les difficultés d’interface et, le cas échéant, de prendre les mesures appropriées. 8.3. La gouvernance des blocs : Les dysfonctionnements des blocs, et notamment de PRT, sont avant tout de nature organisationnelle. Il faut donc, pour rétablir rapidement plus de sérénité, réduire l’activité dans les salles de PRT en transférant certaines activités à CDF. Si rien n’est fait, la tendance actuelle de réduction de l’activité de CDF au profit de PRT s’accentuera, ce qui aggravera les tensions au sein du bloc de PRT et aboutira à court terme à des demandes de construction d’une salle supplémentaire à PRT, dès 31 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch qu’on se rendra compte que les salles 7 et 8 sont de trop petite taille. Les travaux de rénovation récents dans le bloc de CDF auront alors été inutiles. 8.3.1.La répartition des activités chirurgicales entre PRT et CDF Il est indispensable, pour gérer les dysfonctionnements actuels, de décider d’une ligne directrice pour la répartition des activités entre PRT et CDF. Si la solution la plus opportune à moyen terme serait de construire un hôpital cantonal à mi-chemin de Neuchâtel et de CDF, cette orientation, même si elle faisait l’objet d’une décision formelle, impliquerait pour autant : - d’une part d’organiser l’activité chirurgicale au cours des 5 à 10 années nécessaires pour la construction de cet hôpital. - et d’autre part que les médecins et soignants démontrent dans l’intervalle qu’ils sont capables de s’entendre entre les deux sites pour travailler harmonieusement ensemble et mener un projet commun. Au cours des dernières années, de très nombreuses propositions ont été faites sur les répartitions d’activité entre PRT et CDF. Il nous semble important de rappeler les points clés devant être pris en compte dans ces déplacements d’activité : - L’activité la plus onéreuse dans le fonctionnement d’un bloc opératoire est le maintien d’une activité 24h/24. Compte-tenu de l’activité chirurgicale globale en diminution au niveau de l’HNE, il est impossible de maintenir deux sites fonctionnant 24h/24. Le site sur lequel doit être rassemblé l’activité 24h/24 doit être le même que celui où seront aussi regroupés les soins intensifs. Outre les urgences chirurgicales, ce même site doit rassembler toute l’activité chirurgicale « lourde », et notamment la chirurgie digestive « lourde », la traumatologie, la chirurgie thoracique, l’urologie « lourde » et l’obstétrique. - L’activité ambulatoire est en revanche insuffisamment développée à l’HNE. Cette activité doit être organisée de façon spécifique. Mélanger l’activité stationnaire et ambulatoire, comme c’est le cas actuellement à PRT et à CDF n’est pas optimal. Débuter les cas ambulatoires après la « grosse » chirurgie n’est pas adéquat. L’inverse n’est pas non plus souhaité, à juste titre par les chirurgiens. Dès lors, compte-tenu des infrastructures de l’HNE, le site sur lequel se développe l’activité 24h/24 ne doit donc pas être celui où peut se développer harmonieusement l’activité ambulatoire. Le choix de rassembler à PRT l’activité d’urgences chirurgicales 24h/24 et les soins intensifs a été fait, il semble logique de concentrer à CDF l’activité ambulatoire et la chirurgie simple ne nécessitant pas la proximité des soins intensifs ou pour laquelle le risque de resaignement est infime. La contrainte est qu’un tel centre soit une 32 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch véritable structure ambulatoire, adaptée aux spécificités de chacune des disciplines chirurgicales. L’analyse chiffrée montre qu’une telle solution est compatible avec les activités actuelles. En 2014, 2198 cas ambulatoires étaient opérés à l’HNE (550 à CDF et 1648 à PRT). En y ajoutant les interventions de « petite » chirurgie, pour lesquelles le risque de reprise est quasi nul, on occupe ainsi les 3 salles de CDF sur un projet d’avenir. Une telle solution aurait l’avantage de sortir du « jeu » actuel des chaises musicales, où chaque discipline espère que c’est une autre qui aura la contrainte d’aller travailler sur les deux sites. Dans cette option, la contrainte du travail sur deux sites est partagée par tous, mais elle s’effectue pour l’activité induisant les désagréments les plus faibles. Ceci implique pour les opérateurs de regrouper les cas ambulatoires pour occuper une journée (ou une demi-journée) opératoire entière. C’est le développement dans lequel s’est lancé depuis peu le département de chirurgie. Il doit être soutenu et étendu aux autres départements. Dans une telle option, le maintien de l’activité opératoire la nuit à CDF, alors qu’on y opère moins d’un patient toutes les 10 nuits n’a pas de sens. Face aux opposants qui ne manqueront pas d’alerter sur le risque encouru par les patients qui devront descendre pour être opérés la nuit à PRT, il faut mettre en regard le bénéfice médical potentiel. Ne serait-il pas plus judicieux d’occuper le personnel inoccupé la nuit à CDF par manque d’activité en ouvrant en échange de jour une salle d’opération à PRT pour les « petites » urgences, ce qui est fortement souhaité par les chirurgiens ? 8.3.2.Modifier la commission des blocs opératoires Une autre nécessité pour améliorer l’organisation du bloc opératoire consiste à passer du mode de fonctionnement actuel, de type « self service », à un mode plus « coopératif », dans lequel tous les acteurs, chirurgiens, anesthésistes et instrumentistes, s’impliquent et se sentent ensemble co-responsables du bon fonctionnement du bloc. Ceci passe par un remodelage de la commission du bloc et par une amélioration de la communication entre les acteurs. La commission des blocs ne doit comprendre qu’une seule structure, décisionnelle (sous la forme d’un bureau) et informative. Elle doit être présidée par un médecin. De nombreux centres font le choix d’une gouvernance tournante, tous les 2 ans, avec alternativement un chirurgien et un anesthésiste. Le bureau de cette commission doit inclure au minimum un chirurgien, un anesthésiste et une instrumentiste. C’est le bureau qui prend collégialement les décisions en matière organisationnelle. En cas de désaccord, le président tranche. Tous les membres du bureau soutiennent ensuite les décisions prises auprès de ses collègues. 33 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch Le bureau est aidé par une cellule d’analyse, telle que celle dirigée actuellement par le Dr Meuli, chargée du suivi des activités opératoires, et de la production d’indicateurs de la bonne utilisation des salles d’opération, globalement et pour chacune des disciplines. C’est le président ou le bureau qui présente régulièrement au comité de direction le bilan du fonctionnement des blocs opératoires et qui défend les ressources pour les développements en cours. Il est chargé de faire un rapport annuel sur l’activité des blocs. La commission doit être ouverte à l’ensemble des représentants des disciplines médicales utilisatrices des blocs, et des métiers travaillant dans le bloc opératoire ou en lien direct avec l’activité des blocs (instrumentation, salle de réveil, gestion des lits, stérilisation, informatique, contrôle de l’infection…). Les séances de la commission du bloc sont avant tout informatives, et permettent des échanges entre les différents acteurs sur ce qui va bien et moins bien dans les blocs. C’est lors de ces séances que le président et le bureau informent des décisions prises. Deux autres structures sont nécessaires pour renforcer le rôle de la commission des blocs. - Une structure chargée de décider au quotidien, en délégation du président de la commission du bloc. Cette structure peut être soit un trinôme (un chirurgien, un anesthésiste et une instrumentiste), soit un représentant désigné par le président de la commission du bloc (le chirurgien ou l’anesthésiste de garde). Les décisions concernent par exemple la décision en urgence de fermer le bloc ou une salle d’opération, l’exemple récent étant celui de l’inondation, ou la décision de trancher dans un conflit entre deux opérateurs qui ne s’accordent pas sur l’intervention à réaliser en priorité. - L’autre structure concerne le « daily running » du bloc opératoire, l’équipe chargée, avec l’aval de la commission des blocs, de décider des adaptations dans les enchaînements pour optimiser en cours de journée le déroulement du programme opératoire (telle urgence sera faite à la suite de telle intervention…). 8.3.3.Les indicateurs Le bloc opératoire étant le centre d’activité le plus coûteux d’un hôpital, il doit disposer d’un suivi de son activité et de sa bonne utilisation. Dans ce sens, il serait fortement souhaitable que l’HNE dispose d’un outil informatisé pour faciliter la saisie des indicateurs. Les indicateurs utilisés et mis en place par le Dr Meuli sont adéquats et doivent être renforcés par la mesure globale de l’utilisation de chaque salle d’opération, en prenant mieux en compte pour les taux d’occupation le personnel prévu (et non la salle qu’on décide ou non de fermer par défaut de patients). Le modèle de mesures utilisé (MEAH) 34 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch est adéquat. Renforcer ces mesures en y adjoignant quelques indicateurs cliniques, ne serait-ce que par sondages épisodiques, serait également souhaitable (par exemple : délai entre l’admission d’une fracture du col fémoral et le coup de bistouri). Comme discuté précédemment, on peut aussi discuter la possibilité d’étendre la structure de suivi de l’activité du bloc opératoire à la gestion des recettes et de la bonne facturation des activités réalisées et des équipements utilisés au bloc. De même, on peut également étendre cette structure à la gestion du personnel du bloc opératoire. On peut ainsi imaginer construire un département du bloc opératoire qui inclurait le personnel du bloc, avec différentes configurations possibles. 8.3.4.Blocs plus efficients : équipements, saisie des activités Au cours de cette analyse, il nous a été difficile d’identifier si les blocs opératoires de l’HNE ont des coûts de fonctionnement anormalement élevés. L’analyse de son fonctionnement et des effectifs ne montre aucune dérive grave. Les points qui nous ont semblé à risque sont les suivants : - le processus de commande des petits équipements, instruments et implants n’est pas sécurisé. On valide l’arrivée du matériel, mais pas sa nécessité, ni son utilisation. De plus, il n’y a pas de suivi systématique des stocks. Pour éviter tout risque de vol, il serait hautement souhaitable de sécuriser ce processus. - le processus de saisie des matériels utilisés et de l’activité nous semble devoir être amélioré. Des liens plus solides devraient être créés entre l’activité et la facturation. C’est peut-être à ce niveau que se situent des pertes importantes dans les recettes relevant des blocs opératoires. - le matériel actuellement stocké et immobilisé est très important et représente des volumes financiers importants. - les plateaux actuels sont trop complexes, ils devraient être tous simplifiés. 8.4. Développer l’activité chirurgicale ambulatoire Le développement de l’activité chirurgicale ambulatoire sur le site de CDF, en l’associant à la chirurgie nécessitant de courtes hospitalisations postopératoires et sans risque de ré-intervention constitue un projet intéressant et crédible susceptible de redonner espoir au personnel du bloc opératoire de CDF. Le développement important, dans tous les centres modernes, de l’activité chirurgicale ambulatoire pourrait être accueilli favorablement sur le site de CDF. Un tel projet suivantes : implique pourtant que soient résolus les phases 35 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch - le recensement des possibilités de développement, discipline par discipline. - pour chaque discipline, il sera important pour monter le projet de bien identifier les obstacles et les contraintes. Certains exigeront notamment qu’en post-interventionnel les patients puissent bénéficier du même environnement infirmier spécialisé que celui dont ils bénéficieraient dans des services stationnaires spécialisés. - il semble indispensable de s’assurer que les aspects financiers d’un tel projet soient préalablement discutés et aplanis avec les chirurgiens, chez lesquels on peut comprendre la réticence à développer une activité qui leur fait perdre des revenus. - Enfin, il faut un véritable projet sur le plan architectural, innovant et rassurant pour le corps médical et infirmier, différent de la structure d’hospitalisation actuelle très vieillotte de CDF. Si ces conditions sont remplies, un tel projet a toutes les chances d’être bien accepté et de créer par lui-même une attractivité. 8.5. L’ambiance et la collaboration Mais au-delà de ces changements organisationnels et structurels, il est indispensable que l’ambiance et la communication entre les acteurs change. On s’est installé depuis des années dans une communication d’affrontement et de positionnement, probablement pour mieux résister aux décisions qui étaient prises loin de l’hôpital. Une bonne partie des dysfonctionnements du quotidien au bloc opératoire est liée à la vision très catégorielle que bon nombre d’acteurs ont de leur activité. Ceci concerne beaucoup plus PRT que CDF, qui a gardé une vision beaucoup plus « familiale » d’une activité commune. A titre d’exemple, à PRT, on ne partage pas l’objectif commun que le coup de bistouri soit donné à 8h ou 8h30, grâce à la bonne volonté de tous. Actuellement, l’anesthésiste veut s’assurer que le patient est bien « livré au chirurgien » en temps voulu. De même, le chirurgien ou l’instrumentiste veulent s’assurer qu’il ou qu’elle soit bien là à temps, pour que l’installation et la suite s’enchainent. On travaille bien, mais c’est l’un après l’autre sans anticipation, et on échange le moins possible. La vision actuelle est que le regard de l’autre ne peut être que critique et non une aide pour aller plus vite et faire au mieux, ensemble. Une telle atmosphère est probablement la maladie la plus grave que nous avons observée à l’HNE. Ce phénomène est d’autant plus surprenant que tous sont venus dans les métiers du bloc opératoire, en partie au moins, pour le plaisir de travailler en équipe. Le changement à opérer est de casser cette vision catégorielle de l’activité, de s’assurer que certains n’entretiennent pas ce climat délétère et de redonner à tous une vision saine du travail en équipe et de la responsabilité commune sur l’ensemble du travail réalisé. La notion d’équipe englobe tous les métiers du bloc et tous les acteurs des deux sites. 36 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch La décision de redistribuer une partie de l’activité chirurgicale à CDF doit aller de pair avec une politique de communication, d’ouverture et de dialogue avec le personnel, et notamment avec le personnel de CDF car c’est lui qui vit mal le fait de perdre toute l’activité la plus « lourde ». C’est bien compréhensible. Les dirigeants des départements médicaux et infirmiers doivent prendre la dimension managériale de ce défi et se comporter différemment vis-à-vis des personnels de CDF. Ils doivent avoir conscience qu’en matière d’ambiance et de communication au sein de leurs équipes, il y a beaucoup à prendre dans le mode de communication existant actuellement à CDF, et modifier celui de PRT. Si les procédures de travail de PRT sont celles qu’il faut adopter sur tout l’HNE, ceci peut et doit être expliqué au personnel avec l’argumentaire attenant. Au niveau médical, cette politique d’ouverture vers les collègues de CDF doit prendre en compte aussi les aspects financiers. En anesthésie, le système pyramidal actuel devrait être revu, car il comporte un trop grand nombre de couches, avec des écarts salariaux excessifs, non justifiés par les responsabilités associées. 8.6. La direction de l’HNE La direction de l’HNE n’a pas eu et n’a pas une tâche facile. Elle doit maintenant reprendre une gouvernance forte, dans une concertation avec les départements médicaux, avec peut-être des nécessités de négociations sur les sujets sensibles. La qualité des équipes médicales et soignantes des deux sites donne un grand espoir à un tel projet. Cette reprise en main et le projet qu’elle choisira de mettre en place induiront peut-être des oppositions au sein des équipes médicales et soignantes, qui depuis le début de cette crise se sont organisées soit pour résister à tout changement, soit pour fonctionner en auto-gestion. Elle aura besoin pour cette tâche difficile de l’aide du conseil d’administration. Mais en interne la direction devra aussi prendre en compte les critiques qui lui sont faites. Elle devra à la fois prendre de la hauteur, pour voir où elle va, en modifiant notamment l’image de « l’entre-soi » qui lui est attribuée, et retrouver un contact plus direct avec les collaborateurs du bloc opératoires. Le bloc opératoire et le plateau technique sont désormais le cœur des hôpitaux. 9. Conclusion Au terme de cette analyse, la crise des blocs opératoires de l’HNE est bien réelle. En dehors du malaise très sérieux existant dans le secteur de l’instrumentation, qu’il faut reprendre en main, la crise est avant tout la conséquence des délais mis à décider de l’organisation de l’activité chirurgicale sur l’HNE. Le bloc opératoire de PRT souffre d’être parfois saturé. 37 2, Rue du Vieux-Billard CH – 1205 Genève www.hopconseils.ch Des dysfonctionnements existent et ils doivent être corrigés. Une organisation plus fonctionnelle de la commission des blocs doit être mise en place. Un travail interne doit être engagé pour améliorer le démarrage à l’heure des blocs opératoires et réduire les temps d’enchaînements. Le bloc opératoire de CDF doit être fermé la nuit en contrepartie de l’ouverture à PRT d’une salle pour les « petites » urgences. Un travail important doit aussi être fait pour changer l’ambiance, pour améliorer la communication entre les acteurs et pour décloisonner les métiers qui ont perdu les notions d’équipe et de coresponsabilité du travail commun. Mais le traitement de la crise consiste avant tout à élaborer un plan directeur pour répartir les activités chirurgicales entre PRT et CDF. L’ouverture d’un centre de chirurgie ambulatoire à CDF est un projet cohérent et porteur. L’enjeu de cette sortie de crise est, à terme, la reconstruction d’un hôpital cantonal unique. Mais la crédibilité d’un tel projet passe avant tout par l’étape intermédiaire qui commence maintenant, dans laquelle les équipes de chirurgie, d’anesthésie et d’instrumentation montrent qu’elles ont la capacité de s’engager dans un tel projet dans une collaboration sereine et harmonieuse. Genève, le 3 février 2016 Prof. F. Clergue Prof. P. Ravussin Prof. B.Bachy 38