VOILES ET DÉVOILEMENTS. OU "L`ENTRE DEUX" DANS LES
Transcription
VOILES ET DÉVOILEMENTS. OU "L`ENTRE DEUX" DANS LES
VOILES ET DÉVOILEMENTS. OU "L'ENTRE DEUX" DANS LES CARNETS DE SHÉRAZADE DE LEÏLA SEBBAR E~Iy"e M. Bo,."ier t.- fillll. _ "'*'-h du amiao, I.~ _ viAp va'1I œllai de Gill. <pli fIlaIIa "Pt..... ct lui dit lJIC. ni ~ de n.M:.pr ~ _ c:mUon, pu I ~ il ne le pu.. EUe lui l"ICOII&I:nit _ ....... ~ fOiII <pI'il .'cnaUrnil ou P'J'oII" l'tlIrIpl!dw de .'cabmir. 0 wnv.. fi ne pœn.n p.... 1Ie ~ d'1!Il.I1I'. C ... hl.i .... r6daImni1 IalUilc dwo:pl foia epI'ellt ~ de pWior. fi -a...(C'lnllltI19) Partagée entre deux cultw'es. ne se senlant ni véritablement 8C!lbe ni Sbérsz.ade. lajcune héroIne de LeIIa Sebbcr parcourt les routes de France li. le. quête de son identité qu'elle 8 bien des difficultés à cerner. Divisée entre lm éventuel retour El. 1. terre algérienne de lJe9 ancêtres cl un séjOW" prolon~ sur sa I.erre d'accueil française, Shérazade se retrouve prise au piège de ce qu'eUe nomme c1le-même un ~EN1RE·DEUX" culturel. Dans notre propos. nou.!Iexaminerms ocmment, confrontée aux réalités de sa silUation d'immigrée qu'eUe lIS.'I.IrDC mal.l'hérolnc fait face en dévelcypllf1t \Ile panoplie de stratégies comportementales fort ingénieuses. La structure du roman de Lef1a Sebbac, UJ cameU de SlrJrazade, rappelle ccUe du célèbre recueil persan desMille et &me nuJu. Le rec:it fSI: basé sur un enchevêtrement de cycles où présent ct pll3!Jé s'entremèlent. Carnet/journal, dans lequel tout !lCmble parfois venîc en vrac. historiettes,. vignettes. anecdotes: l'oeuvre de Sebbllf mût de l'entrecroisement de réci~ divers qui confinent ri l'énigme. Et le personnage principal du roman est toutlWSSi complexe. Laissant souvent le lecteur "déroulé" ct ~Iexe. S~azade semble, en effet, tout droit sortie d'Wl conte. D'emblée. dans le récit., son idemlité est entow:œ d'un halo de mystère. Qui est cette jeune fenune. carnet en main, affichant Wl certain goQt pour le dégui:!IIDent et dœt les papiers d'idmtilé sont faux? Personnage inquiétant, son comportement échappe psrfois 9. son entoWll8e. Ainsi, Gilles, le chauffeuNoutier qui la transporte. songe-t-îl ; 11 ne savail rien d'elle. Ce prénom bizarre. il ne cmnaissait pas de fille qui s'appelait canme çà ; il avait vagement entendu un prénom semblable véritablement frllllÇllise,. Il compliqUl! à propœ de oontes très lIllCiens, mais d'cil, de quel pays, de quelle langue? Il ne se souvenait pll't. La fille pllrlait le français aussi bien que lui, elle était peut-être française après tout. il existait des Français qui n'ml pll't l'air de FrllOÇai!l... (Camet.J 47) Peu à peu. l'histoire et le pl.'l'Jé de ShérllZllde nous sont révèlé:s., dé\ooiJés par strates successives. Ainsi. on apprend incidemment qu'elle est en fuite, recherchée, 8I1Dl!e el prêle à se faire meurtrière si besoin est : •... [sil quelqu'un m'attaque,je pourrais le tuer". déclare-I-el1e à Gilles, le routic:r qui la transporte, exhibant un revolver (Carnet.J 64). Le cOLé SlIIJVoge qu'elle affiche frappe: "Vous plaisez mais vous faites peur. Vous êtes à la fois ange el diablesse. D'ailleurs. vos yeux vous trahissent"• lui di1-on (Carnets 118). Personnage "caméléon". la jeune hémIne semble pouvoir chsnBc:r d'identilé à loisir: "Matie la blonde, ClIIIlille la brune - ShérBZBde lIVait dit qu'elle s'appelait Sbérazade nu Camille" (Carnets 169). Ayant remarqué sa peau mate, Gilles lente de proV(Xjuer une réaction en lui diWl.t qu'elle "8 vraiment l'sir d'une Arabe" (Carnets 59). Typée, elle prnte à même 90Il corps la marque de ses origines qu'eUe Unte de rendre rmins évidentes en oa:ultant sm véritable mIn HBbüe myslifical:riœ Shl!ra:zade abuse de la al!:dulilé de SCIl enloUrage el se joue (par le biais d'une grande capacité à changer d'idenlîlé) de l'"ENTRE-DEUX~culturel dans lequel eUe flone afin de lenter d'y écllapper_ DBnS "Exilew Winif'n:d Woodhull OO\l8 nffil: une image similaire en celle de l'immigré canme "invenleur de !Chrtions", expliquant que : ~[l]be solutions are found by means of 'systems of lrBnSlatioos' (between langtl88f:s, between cultursls practices) that enable people living in exile both 10 adapl 10 their surrolmdings fU)j to re9hape the enviraunent.foc their own purposes" (CarnetJ II). Ainsi, Sebbar souligne-l-elle à plusieurs reprises la prédilection de SOlI hérotne pour le lravestissemenl : [EUeI s'envel~pe dans la nappe canme dans un voile de femne Brahe. Elle a vu si souvent sa mère et ses amies mettre le halk. En France, elle sortent sam voile dans la cité el le quartier, mais lcnqu'ellc:s vœt au pays, eUC'J se vmlelll. Shérazade n'hésile pas, les sesces reviennent, d'instiŒl, elle se drape dam les plis trop blaœ de la nappe en coton français. Elle s'amuse. Elle cache un œil é. la manière ocanWse, puis elle fabrique une voiletù: pour le bas du visage lIVec la serviette en poinle : onl voit les yeux mais la voilette est opaque. (Camets 58) De pl\l8, en concommilance avec le earactère équivoque de l'identité du per.lOl1l1ag:e il existe, dans le roman de Sebbar, un motifrteum:nt: celui de 12 l'odalisque, motif qui s'impose II noire regard avec tant de fCl"Ce. qu'il devient un élément capital du récil DlIILS Tite Art ofBibl/col Lileralllre, Robert Aller, trailanlla questiŒl de la répé:tition d'un même mot daœ 1Ul texte cxpIique que le terme uilwontiJ fui invc:utl! par Martin Buber et Franz Roseozweig et appliqué lIIl domaine de l'étude des lcx1cs bibliques (exégèse biblique). Alter explique que le lerme désigne un effet de style p&rticulia-, eœsistant en une répétitiœ volœtaire de mols clé dan! un texte litténin: dœné. Le uitworl. 00 -mot vedette-, exprime généralcmc:nt un motif ou un thème important dans une pièce littéraire. La répétition parcimonieuse et pondérée de ce uUworl contribue II attirer fort habilemc:nl: l'attention du lecteur sur un poinl bien précis du récit. Martin Buber nous offre sa propre dtfinition du lerme Leilworl: A Le/Iworl is a ward or a word-root that n:ctII"9 significanlJy in ft tcxt:, in a continuum of texts. or in a configuratiDll of œxts : by follO\lr'În8 tbc:ic rcpetitions., one is able la decipher or grasp a meaoing orthe texl [ ... ]. The l'q)dition [... ] need net bemerely of the wm:l it3elf but also of the WŒd-root ; in fact, tbc very diJfm::nee ofwards c.an often intensify the dynamic oclion of the repetition. 1 call il "dynamîc" becsuse between combinations of sounds related 10 one aIrther in lhis manner 8 kind of movemcnt tal:es place : roc imagines: the entire text deployed before hint one can sense wa~ moving bd m:l forth betwcen lhe wards. (Alter, 92) Dans son récent ouvrage, Harem : TM Worid ~hind the Veil, Alev L. Croutier nous offre une définition très préciK du terme "odalisque" donl est p8l'3emé le texte des Ca"f"'fleQ de Shérazade : The word odalisque cornes !rom oda (nxm) m:l IIJearullilera1ly -woman of the room-, by implying a general servant sWus. Odalisques with ext:raocdinary beallty and talent were trained ID become COI'ICllbines,leamingID dance, recile poetry, play musical instruments, and master the erotic arts. Twelve of the mas!. attractive m:l gifled odalisques wcre selected as gedildy (maids-in. wailing) ID the suJtan. responsible for dressing and bBlhing him, doing bis laundery. m:l::aving bis food m:l coffee [...]. !fhe \Vere pleased, the sultan kept lhem foc himself or ultimately gave them a.<I gift.s [... ]. Other odalisques were placed in the service oflhe valid sultana, the kadiIU (wi~), the sultan's dallgthers, or tb: chiefblac.k and wbite eunuchs (32 - 33). Voilmlll.~ 13 Ainsi, plus qU'Wle ser'o'MW esclave 0. laquelle échouent des tjcbcs ménll.8èJes multiples. l'odalisque est uœ monnaie d'échange, un objet sexuel, un jouet, dont la destinée est entre les mains de !lOrI. maître le sultan. "Embastillée", au cœur du harem, l'odaliiKIue mCne une existence de recluse. Au C(&(e linûlé par les hawrrwrs d'cnocinle du hon:m, S'Cflpose œlui de Shérazade, qui porte lm regacd ab90lu sur le monde. L 'héro1ne de Sebbar est. l'lIDtithèsc du penIOIlIlage de l'odalisque, libre de toute contrainw, elle rompt avec ses ori~. Ainsi, lors de son long périple en camion sur les routes de Frllnœ, ehacune de ses halles est ponctuée par la visite des musées où ge trouvent e~s des loiles de grands maîtres représentant des odalisques. Chacun de ces brefs momenls lui permet de s'interroger SIB" sa prqm: identité : "l'hiSloire de Sbérazade COUlWlt voir les odalisques montre 0. quel point la visioo. de l'auteur peut être utile dan.clla recherche de soi" écrit. 0enige Brahimî (35). C'est justement 0. travers cette "vision", cette observation de l'autre, et p8lfois même en adoptant son identilé, que Sbérazade tenw de délemliner la sienne. Dans l'un des psssages clés du roman, l'héroine se représente la reIIlOI"que du clllTlion de OiUes, chatgée de meubles div~, comme un harem miniature el \ln éventuel abri : ... Si elle se dispute avec le routier, elle fera semblant de partir et elle montera par l'arrière dans le salon rrwhile [... ]. Une maison... Un sofa en soie rooge, des coussins chaloymts, elle pense 0. une cbambre orientale [... J. Lorsqu'elle ge séquestrera., elle regardera Ioot. Mais e'est si noir dedans [... ]. n fait noir, c'est sI1c ~ Pas Wle Ollvt21ure saufles portes arritres. Une belle chambre qui roule, une sieste sur un sofa... (Carneu 52). Cepmdant, si le camion el l'atmosphère qui s'en dés88C rappellent fort la vie dans un harem, Shérazade est libre de ses mouvement.'l. A l'opposé de la vérilahle odalisque, elle "sc séquestre" elle~même, le camion devenant alors oon pas un lieu d'enferment forcé, mais un refuge. Ainsi, volontairement cloi'trée, Shérazade peut entrer et sortir 0. loisir de sa retraite, la porte du camion n'étant jamais fermée à clef quand elle s'y trouve: "[Oilles] n'a pas fermé la portière 0. clé, elle aurait pensé qu'il la séquestre" (CarneLJ 197). Dans le camion de Gilles, la jeune fenme retrouve l'almosphère des échoppes orientales : "Shérazade lui dit que son camiœ étail une..,.me caverne d'Ali Baba; on trouvait Ioot comme dans \ln bazar [ l, du café chaud, des espadrilles noires, des tasses en poroelaine de Chine " (Caf'MLs 63). Et au " cœur de ce Jod im&gin&ire, l'hémIne nous offi"e une image typique de la femme orientale sensuelle : ~Nous en France 011 B pas de femmes connne ça, si excitantes". s'exclame JelllOOt à Gilles (Carnetr 35). Elle évoque alors en noos,. lecteIJr.J. tes odalisques des tableaux d'Ingres et de Matisse. Elle nous rappelle l'art de Delacroix, pcignBllt ses odalisques. "nous les rend à la foi9 prégentes. lointaines., énigmatiqucs au plus haut point", selon les te:rmeg d'Assia Djebar (I?O). ", .. Sbérs:zade serappdaitLo Femme au Petroquet.1es fc:mmes crientales de la peinOJre française, les esclaves blanc.bei des harems., oIsives et belles, dans le luxe des parfums et de la soie, languides et comme endormies... On les simllit" (Cameb 152). C'est lorsque l'Orient et l'Occident sont mi'J CÔle à CÔle, que les particularités des deux cultures !IOnt les plus m..-quantes. Notant la juxtaposiûoo de deux loiles chez une amie de Sbénzllde. l'une représenlanl \.Ille scène de la vie campagnarde (les Crlb/e'MUJ de BU de G\Wve Courbet), l'aulre, une scène de h&n::m (L'bclaw BlartChe), Sebbllll'" rorce i nos yeux les cœ.traste9 eolre ces deux œuvre9. daM \.Ill pas!I88C symbolique de la situation de son hémine: "L'odalisque et les paysannes" (CanlelJ 128). En effet. loin de s'assimiler totalement .. l'une ou .. l'aulre culture, Shérazade se situe "ENTRE~DEUX· se1m ses propres tames ; entre la France et l'Algérie. PlIr1.agée eIdre SOlI. désir de retollvcr ta terre de ses 8JlOêtres et celui de trouver et solidifier un point d'llJ1CI'll8C en. France, la jeune femme décide (à la dernière minute) de rallier Psris, ville-refuge à ses yeux: "P1Uis, elle y est allée [... ]. Elle a Iout de SUÎle aimé cette ville. Elle y retourne. Elle ira en Algérie plU!J tard- (Carnels 56)'. Lectrice avide, elle poursuit sa quête identitaire à traVln les nombreux livres qu'elle déoouvre et qui pour certains semblent presque raconter son hUtoire : [L]es rayons portaient, serrés, les livres qu'elle lisait avec la passion d'une folle, parce qu'ils racontaient tme vieille histoire, l'histoire de SIl mémoire en miettes, et une histoire nouvelle, moderne où se croisent les continents et les eivilisations, une histoÎn: qui serait la sienne (Carnels 129). On sent exprimée ici Ioule la force avec laquelle l'htrotne -se clx:n::be-, tentant de retrouver une identité que les déI'llcincmenls :rucces9ifJ de son existence ont fragmentée. La relation d'inter-dépendance que ShéranJde souhaiterait établir entre eUe-même et Gilles est, en fait, plœJ qu'un "marché", basé sur un "éclumge de services". C'est un moyen détourné pour ShéranJde de se faire entendre, eac l'écriture l'excentre et la recentre da.ns un mouvement " !Ùnultarll!:. Shérazade Il besoin de lire ses carnets, de se livrer, de !le racooter" et d'être écoutée : Shérazade at1md l'ocase. Elle voudrait un OWlIgsn. Du bruil, les arbres qui craque:nl, les brIOChes qui se lorde:nl.., la poussière de la terre qui aveugle, la pluie qui frappe. Gilles stopperait sm clllIlion à cause de la tCJUflnfJl.le. Au bord des champs, à l'abri, elle lirait les PBBeS sur Nanles, ce qu'elle li. écrit. .. (Carnet.! 57). Cette "dislocation psychologique- de l'être, pour rqm:ndre les termes de Mildred Morùnler, semble être le résultat d'wte marginalisation culturelle volootaire. "Penonne m'a chassée. Je suis pBrtie", explique Sbérazade (Camet.r 72). C'est sur des débris, ruines de son exi3tence nomade pl.Dée et présente, que Shtnzsde posera les foD:I.8tions de sa nouvelle idenlité et poorrll alor.I s'épllJlOUÎr, trouver W1 équilibre et cesser de fuir. de se fuir. C'en jUBtemenll'image de la fugueuse que Shé:razaŒ nous offre dès le début du roman de Sebbar. A Maneille" où elle II pris le bllleaU pour Alger, mais en est descendue avant qu'il ne largue le, marre:s. elle se retrouve seule, après "des mois vagabonds, d'abord le 1008 de la toile, vers l'Atlantique, puis [...] entre la Dordogne et la Garonne jll.'lqu'll. la couleur ocre roUBC de Toulou:Je et vers la Méditerranée" (Came" 26). "Exile is the W1beaJ.able rift force between a human heing and Il native place, between the self and its true home", écrit Edward Sald (195). Le cas de Shérazade semble plU.'! complexe, car elle fuit non seulement ses crigines et le "moule" dans lequel elle a grandi. mais également certains aspecls d'une "terre d'accueil", à laquelle elle ne parvient pas à s·llS8imiler. Avide de découvertes, elle cherche à échapper à l'im~ d'immigrés/ouvriers des banlieues que lui projettent ses parents et llia réalité de leur quotidien 2. Chez eUe. l'exil est perçu cmune un besoin: "[j]e leur disais qœ je 1e:s aimais, mais je devais partir. C'est ce que je dis chaque fois que j'écris à ma mère et à ma sœur" (Cameta 136).3 Cependanl, l'exil de Shénzade est un exil productifen ce qu~llui pennet de s'épanouir el de poser un regard critique et extérieur sur sa culture d'crisine et sur la culture françai!ie. Dérobant au regard de l'Autre ses yeux, synonymes de beauté chez les Musulm8ll!J. Shérazade se dissimule derrière un voile symbolique.4 S'installe alors une nouvelle dynamique de la conqu!te de l'espace. Derrière ses verres fwnés. Shérazade peul promener son regard alentour, observer sans être vœ. EUe devient alors rlNisseuse d'tm espace que sa culture d'origine lui aurait sans doule refusé. Comme l'explique Mildrr.d Mortimer : 16 By studying Orien1aIist paintings in Il FreŒh mUge'lm, Sbl!ra:z.lde becomes aD observer of the world sbe had once known. Appropriating the observers gaze (criginalJy the exclusive danain of the Eun::pem painter). sbe distanœs hl:::rgelfCrcm the Odalisques and draW! clœer lo Ibe artist. who Îs empowered md free. (198) Mortimer poursuit : Hllving appropri81c:d the observer's gaze which situales ber 'oe)ood the Orientalist C8IlV88, Shérazade ddines bcnclf 8part from the Odalisques. While acknowledging links with the sequesteJ"ed wanm ofher ancestral psst:, sbe follows Il trajectay thsl: lead!l lJWfl'j from MaghrebiBll patrilll'Chy and European exoticism. (199) D8œI la postfBCC de Femmes d'Alger doIU kilT appartemenJ. Assis Djebar explique que le voile "permet à celle qui le revet et qui circule au· dehors SOU!I son couvert, d'être à son lour voleuse possible dans l'espace mllSCU.1in" (174). Djebar conçoit le regard libéré comme le "signe d'lme conquête vers la lumière des 8UIres, hors du confinement" (174). C'est ce processus même que Sherazade expérimente, et tout comme Delacroix, dont elle ne cesse d'admirer les 3CÙles de han:IruJ, elle pourrait proc1aml:r que "[Iles hommes et les choses m'apparaissent sous un jour nouveau depuis mon vOY8.BC" (Cité dans Djebar 168). Comme l'observe Mortimer: "[f]1ight from home intriduccs the mlellectua11y curious SbénJ:zadc 10 llIl tmeXPanded universe" (197). Ainsi, la (re)conquêle d'une identité passe-t-elle par une ouverture sur le monde extérieur. n s'agit d'une ouverture par le biais de l'ob3lCl'Vatiœ de l'Autre. Mws elle passe également par un processus de "ra.<J9CmblcmenlM et d'inventaire des données d'un vécu, ceci, malgré un d61ir de fuite, de détachement face à certaines réalités sociales ou historiques qui poussent la jeune Shél"llzade à entrepreOOl'e 90Il périple SIB" les routes de FrlllllX:. Evoquant cette dynamique et ses dualités, Honù Bhabha él,'1'i1 dans ce sens; MIo my place myself al the hear1, in the center of fictive fiction, is ta place myselfin a unitaly place. ta reassemble divisiorul, murderous schisms, explœions: of memœy and of History, alWIlj'S with the temptation ta flee, ta nm away in solilary adventure M , (291) Lou;:,;ana SJate UnJwnity, Baton Rouge " NOTES lA la fin de son périple, son arri Yée à \8 Pate d1la1ie devient symbolique de son ouverture sur autre chose. sur un ailleurs nouveau. 2 son père [... ] tnlvaillait en U3ÏDe, ici en France et p851 daM !IOn psys [... ] il vivait dans ce! blocs, chez les pauvres... ~ (CS. 224). ~ Shérazade lente, en fait déchapper à la "réalité beur". Suc ce point, H ••• l'llllIl1yse de Mildred Mortimer nous semble réfutable. car cmmne elle l'explique: "[b]y retrscing the p8l:h of the Beur Marclt ralherthanretuming 10 Algeria, Shénlzade reaffinns her conncetion to 8 present Beur reality raber th8n to a past Algerian heritage, but ber voyage plIJ1woxically places ber in contact with the Othee, with !he pecple of the French heart1and", écrit-elle (199-200). A notre sens., la "réolité Beur" est justemenl ce à quoi Shéraz.ade tenle d'échapper en quittanJ: sa banlieue et ses parents. De plus, !Ii comme elle le mentionne elle suille même itinéraire que celui de la Marche des Beurs. jomai.s elle ne s'lISSimile à ces derniers. On observe la mbne distancistioo. chez Sebhar elle-même qui, lors dime interview déclare: "1 Ccel deprived of the complicity, the :lOlidarity, alllhe force lbat is trlU1SlJl.itted in belonging 10 8 group, 8 network, Il movemenl" (Cité dans Woodhull i 7 • 18). 4 Nous songeons ici à la scèIle où, renconlnlnt le réalisateur Jean-Luc Godard, Shérazade refuse d'accéder à sa requête et de retirer ses lunettes de soleil. Godard, lenlant alors de les lui macher, se (ait traiter de violeur par Shénlzade (C.S. 132). Il est clair que derrière cette seme se dissimule toute la symbolique du voile. OEUVRES crrtEs Alter, Robert, The Art ofBiblical NafTQlive, New York: Basic~, 1981. Bbabba, Homi, ~DissemiN8tion : Time, Nmative, and !he Margins o( the Modern Nation", dans Nation and NafTQlion, London : Rou1ledge, 19~. Brohimi, Ocnise, "Orientalisme et e:on.gciOlce de soi", dans Wtéral1lre maghrébine d'expressionfrançaiu : de J'écrit à l'image. Guy Dugas. Meknès: Université Sidi Mohamed Ben Abdellllh, 1987,29-36. Croutier, Alev Lytle, Harem : The World Behind the Veil, New York: Abbeville Press, 1989. Djebar, Assia, Femmes d'Alger dans leur appal1ement. Paris: éditions des femmes. 1985. 18 EwIyae M. DcmicI' Mortimer. Mildn:d, ~On the R.oed: LeI1a Sebbar's Herolns", dIIOs/ùHarch ln A/rlcan LJlerohlre, 23. 2 Bloomingtm. : University of Indiana Press. (l992} 195-20\. SBId. Edward. Oriental;~., New York: Vintqe Bocb. 1978. Scbbar, LeIla. UI came" tk Shérazatk. Paris: Stock, 1985. Woodhull, Winifred, "Exile". Yak French Sll4die,. 82.1. 1993.