le professeur de percussions traditionnelles à l`intérieur et
Transcription
le professeur de percussions traditionnelles à l`intérieur et
Rencontre métier Synthèse LE PROFESSEUR DE PERCUSSIONS TRADITIONNELLES À L’INTÉRIEUR ET HORS STRUCTURE D’ENSEIGNEMENT Cette synthèse est un compte-rendu des témoignages des personnes présentes à la rencontre du 24 novembre 2015 à l’Ariam Ile-de-France (Paris) Intervenant : Julien André, conseiller artistique, ethnomusicologue, professeur de percussions Rédacteur de la synthèse : Jean-Claire vançon L’enseignement des musiques traditionnelles en Ile-de-France est majoritairement représenté par des cours de percussions. Qu’il s’agisse des traditions africaines, caribéennes ou latines, les ensembles de percussions offrent la possibilité d’un travail collectif permettant d’acquérir certains fondamentaux tels que : l’écoute polyphonique, la sensibilisation aux timbres, la stabilité de la pulsation et la perception du rythme par le corps. De plus, la transmission orale s’avère être très efficace pour développer la mémoire musicale et s’initier à l’improvisation. Les question suivantes seront posées : - De quelle manière ces compétences peuvent-elles bénéficier aux autres classes à l’intérieur d’une structure d’enseignement ? - Quel rôle le professeur de percussions traditionnelles peut-il jouer pour favoriser des pratiques transversales ? - Comment son action « hors les murs » peut-elle contribuer au rayonnement de l’établissement ? Les participants : 8 professeurs ont, en plus de Julien André, participé à cette matinée, avec des profils de spécialisation différents : percussions africaines et brésiliennes (1), percussions brésiliennes (2), percussions d’Afrique de l’Ouest (1), percussions arabes et cubaines (1), percussions antillaises et caribéennes (1), percussions africaines et actuelles (1), percussions classiques (1). Tous enseignent dans plusieurs contextes et/ou cherchent à développer leur emploi : les professeurs présents représentent 6 postes en CRC ou en CRI (plusieurs postes pouvant être occupés par une même personne), 2 postes en CRD, 1 poste dans le service animation d’une ville, 1 poste dans un établissement de placement éducatif, 5 postes en école associative (dont 1 spécialisée dans les spectacles, ateliers et cours de percussions sud-américaines et 1 école spécialisée dans les MAA). 3 personnes interviennent à la Philharmonie de Paris. Ces postes se répartissent à Paris (5, dont les 3 de la Philharmonie), dans l’Essonne (8), dans le Val-de-Marne (1), dans le Val-d’Oise (1) et dans la Loire (1). www.ariam-idf.com LE PROFESSEUR DE PERCUSSIONS TRADITIONNELLE « HORS LES MURS » DU CONSERVATOIRE… … pour promouvoir une pratique « artistique » ? Dans les deux situations précédemment décrites, il est parfois difficile d’envisager de faire réellement progresser les élèves sur un terme moyen ou long et de nourrir avec eux une ambition proprement « musicale ». La percussion-loisir (au prétexte que les PT seraient facile d’accès) et la percussion-sociale (au prétexte que la pratique des répertoires traditionnels favoriserait le « vivre ensemble ») sont-elles appelées à se développer au détriment d’une exigence artistique ? Une quête d’ « excellence » artistique suppose de dépasser la seule exigence d’ « être en place rythmiquement » et d’insister notamment sur : - L’exploration de toute la richesse de timbres qu’offre les instruments à percussion ; - La recherche d’un son personnel (recherche nécessitant de travailler sur de bons instruments qui sonnent, « pas sur des jouets » et d’être attentif à la technique de jeu propre à chaque type de percussion) ; - L’implication du corps et l’obtention d’un geste fluide ; - Le soin porté aux nuances et au contrôle du son ; - le groove ; - le travail des repères rythmiques, des cycles ; - l’engagement sensible et la curiosité artistique (même en TAP, même sur un trimestre, il s’agit d’écouter plein de musiques). Selon quelles modalités et pour satisfaire quels objectifs le professeur de percussions traditionnelles (PT) d’un conservatoire interviendrait-il en dehors des murs de son établissement ? ... pour permettre une pratique de « loisir » ? Si la batucada rencontre un public dans les structures associatives, c’est parce que sa pratique apparaît comme facile et sympa : au bout de deux cours, on arrive à un résultat ! C’est bien sûr un atout qu’ainsi pouvoir rapidement faire entrer les amateurs dans la musique. Mais, selon un participant, les élèves se contentent peut-être trop souvent de cette gratification facile et se satisfont de ce que le cours soit essentiellement l’occasion de se retrouver « entre copains » ; la batucada est pour eux plus une activité de loisir qu’une pratique artistique. Or un professeur de conservatoire, intervenant hors les murs, risque de se retrouver face à ce type d’attentes. Pour mettre en avant cette exigence musicale, des cursus de percussions traditionnelles se structurent peu à peu au sein des conservatoires, même si la logique d’évaluation de fin de cycle, propre à la notion de cursus, n’est pas celle qui organise le répertoire et les pratiques des PT : qu’est-ce que pourrait donc être un mor- Ainsi les nouveaux ateliers périscolaires (NAP) – aussi appelés temps d’activités périscolaires (TAP) ou aménagement des rythmes éducatifs (ARE, à Paris) – sont-ils des temps eux aussi pensés comme des temps de loisir – ou à tout le moins, des temps qui, parce qu’ils ne sont pas sur le temps scolaire, ne sont pas intrinsèquement consacrés à construire des apprentissages. Ce sont des temps de loisir à visée éducative, durant lesquels les professeurs de conservatoire peuvent être invités à intervenir. Et les percussions traditionnelles peuvent y être sollicitées, au prétexte que l’on peut y atteindre rapidement un résultat satisfaisant les enfants. ceau imposé ? D’autres objections à la consolidation de ces cursus ont été soulevées – et notamment, le risque de figer des musiques brillant par leur nomadisme via l’oralité (« Dans un établissement où on écrit de la musique, quelle place pour la musique de l’oralité ? »). La question de savoir s’il y a lieu de différencier l’enseignement des percussions traditionnelles en MJC et en conservatoire (et si oui, sur quels points) a été posée sans qu’il y soit réellement répondu. … pour servir une action « sociale » ? Un professeur de PT peut également être appelé à intervenir dans certains quartiers pour créer du lien social, établir des passerelles entre les habitants, les cultures et les générations – éventuellement au gré d’un travail conduit avec les acteurs sociaux locaux (maisons de quartiers, centres sociaux, associations de proximité). Les objectifs poursuivis peuvent parfois relever du développement de la citoyenneté, de l’accompagnement à la réussite éducative et de la construction d’un « vivre ensemble ». Il n’en reste pas moins que les actions conduites en dehors de la classe de PT restent essentielles, y compris avec cette visée d’abord artistique : car ce sont bien les concerts, restitutions de projets et autres auditions qui permettent de faire découvrir les PT à de nouveaux publics et de remplir les classes. La visibilité de ces actions est renforcée si elles sont intégrées à la saison culturelle du conservatoire. 2 LES TRANSVERSALITÉS PERMISES PAR LE PROFESSEUR DE PERCUSSIONS TRADITIONNELLES De manière générale, tout le monde s’est accordé sur l’intérêt de proposer des auditions ou des concerts mêlant toutes les classes de percussions, afin que tous les élèves connaissent toutes les disciplines. Des projets construits à partir des percussions traditionnelles et de leur identité Pour éviter l’écueil de la percussion-thérapie et de la ø, il convient de penser des projets transversaux à partir de l’identité propre des PT et de leur répertoire – plutôt que de dissoudre ceux-ci dans des projets structurés en vertu d’autres priorités. Plusieurs exemples ont été cités : - Celui d’un travail avec les classes d’écriture et d’arrangement. - Celui d’un atelier périscolaire en percussions brésiliennes, conduit en lien avec l’atelier chorale (même répertoire) : lors de la restitution, l’atelier PT accompagnait la chorale. L’intérêt artistique et pédagogique du dispositif a été souligné : quand on accompagne un chœur, on est obligé d’écouter, d’être dans le son et de maîtriser les dynamiques (le tout sans ralentir). - Celui de projets musique et danse – à condition que la ou le professeur de danse dispose pour cela d’heures disponibles. Le professeur et les élèves de PT du conservatoire peuvent également être initiateur(s) et/ou acteur(s) de projets transversaux conduits à l’intérieur de l’établissement. À quelles conditions et à quel titre ? Une thérapie contre les pathologies rythmiques ? Il arrive que le cours de PT soit considéré par la direction et/ou les collègues de l’établissement comme un lieu où les élèves, quels que soient leur instrument, peuvent efficacement « soigner » leurs éventuelles « pathologies rythmiques ». Le cas d’un « cours de rythme » en CRC a été évoqué, destiné : - à tous les élèves du conservatoire, qui viennent à ce cours avec leur instrument ; - aux élèves du conservatoire qui n’ont pas de pratiques collectives (pianistes, harpistes, etc.) Le cours de PT peut à cet égard être compris parfois comme une alternative au cours de FM – au risque d’un hiatus entre une « commande institutionnelle » et une approche du rythme, sensible et corporelle, portée par le professeur de percussions traditionnelles. Si le cours de PT peut être suivi comme un cours de FM renouvelé, c’est en ce qu’il peut permettre de déconstruire (et de reconstruire autrement) les rubriques usuelles de la formation musicale (cas du « chant rythmique », pratique de la transmission orale, etc.) CONCLUSION ET PERSPECTIVES Qu’il s’agisse de conduire des projets transversaux et/ ou hors les murs, il convient de ne pas les mener au détriment de l’excellence propre aux répertoires des PT, définie avec ses propres critères (et non pas avec ceux des « musiques savantes écrites » autour desquelles se sont structurés les systèmes de valeur portés par les conservatoires). La transversalité doit en outre être pensée pour ce qu’elle est : un outil, pas un but. Ont été mis au jour certains obstacles à ce genre d’action : celui du parc instrumental disponible et celui du lieu de répétition et d’enseignement (qui doit être suffisamment grand et suffisamment insonorisé). Il semble qu’un accompagnement ou une formation sur des questions de formalisation de projet ou bien de montage de dossier pourraient être des perspectives concrètes, susceptibles d’intéresser certains. Une offre pédagogique complémentaire aux cours de percussions classiques, jazz ou MAA Des cursus complémentaires percussions classiques / traditionnelles / jazz / MAA (batterie) peuvent également être imaginés : - Une année de l’élève peut alors se concevoir ainsi : un trimestre de batterie, un trimestre de percussions classiques, un trimestre de percussions traditionnelles. Après plusieurs années passées ainsi à « voyager » d’une discipline à l’autre, l’élève peut choisir celle qui lui plaît le plus. Pendant ce temps, il suit des cours de FM : quel que soit son choix ultérieur, il aura ainsi des fondamentaux techniques. - Autre dispositif évoqué : la classe de PT est la classe de « pratiques collectives » de la classe de percussions classiques, sous un format d’atelier. 3