Épreuve écrite de RÉSUMÉ DE TEXTE

Transcription

Épreuve écrite de RÉSUMÉ DE TEXTE
Banque Agro Veto. Session 2012
Rapport sur le concours B ENV
Épreuve écrite de RÉSUMÉ DE TEXTE
Concours
B ENV
Nombre de
candidats
328
Moyenne
Ecart-type
9,32
3,84
Note la plus
basse
1
Note la plus
haute
19
Le texte choisi cette année était tiré de l’ouvrage du sociologue allemand Norbert
Elias, La Société des individus. D’une lecture relativement aisée, il ne posait pas de problème
majeur dans sa formulation ni dans les notions mises en œuvre. La principale difficulté
résidait dans la construction subtile d’un texte qui peut, à première vue, paraître répétitif, alors
qu’il propose un raisonnement à la fois progressif et admirablement articulé. Faute
d’apercevoir cette construction, les candidats risquaient de s’écarter du sens général du
passage et de commettre des contresens.
Règles d’or de l’exercice
Depuis plusieurs années, le jury a noté que les candidats apparemment non avertis des
attentes techniques de l’exercice sont de moins en moins nombreux. Il n’est cependant pas
rare de trouver une copie qui ne les met en place que partiellement. Il faut donc rappeler ces
règles d’or :
 Ne rien ajouter ou retrancher au sens du texte (et donc, par extension, résumer le texte
dans son entier). Les candidats ont tendance à simplement omettre les étapes du
raisonnement qu’ils ont du mal à saisir ou à lier à l’ensemble. Ce travers est, bien sûr,
sanctionné dans la note.
 Suivre l’ordre du texte.
 Conserver la situation d’énonciation : il faut donc écrire à la place de l’auteur. Les
copies qui ne respectent pas cette règle (où l’on trouve, par exemple : « l’auteur dit
que… »), sont très sévèrement notées.
 Conserver le ton du texte (lorsqu’il présente une spécificité : ironie, ton polémique…).
 Conserver les proportions du texte. Bien des copies peu réussies ont présenté un
résumé déséquilibré. Sur ce point, le travail au brouillon est essentiel : respecter le
ratio du résumé ne suffit pas, et il convient, si le premier jet est trop long, d’opérer des
coupes ou des reformulations qui permettront de rétablir l’équilibre de l’ensemble. Les
résumés dont la fin est « sacrifiée », font donc montre d’un travail de formulation
insuffisant.
 Reprendre le moins possible les expressions du texte (cf. infra).
 Respecter scrupuleusement le nombre de mots imposé. Les copies excédant le ratio de
l’exercice sont moins fréquentes. Rappelons cependant que l’importance de la sanction
dans la note dépend de la proportion du dépassement et que la manifeste intention de
tromper le correcteur est une circonstance aggravante.
Compréhension et analyse
La plupart des candidats ont eu des difficultés à comprendre que le texte s’articule
autour du passage d’un rapport à un autre : de la relation entre le moyen et la fin à celle entre
la partie et le tout. Le but de l’auteur est de souligner la stérilité de l’affrontement entre les
partisans d’une détermination des individus par la société et ceux qui, au contraire, affirment
que la société a pour « fin » la place de l’individu. Il propose, plutôt que de prendre part à ce
conflit, de partir de simples constats sur lesquels un accord sera envisageable. C’est cette
simplicité même qui a pu troubler les candidats : bien peu ont compris que, pour dépasser la
querelle qu’il décrit dans les trois premiers paragraphes, Norbert Elias commence par affirmer
que les individus et la société sont d’abord et avant tout des faits. C’est en cela qu’ils sont
« également sans but » : une finalité implique une prédétermination dont Elias nie qu’il soit en
notre pouvoir de la démontrer. La relation finale (moyen/fin), selon lui, ne se déduit pas du
rapport entre individu et société, elle s’assigne (en fonction des époques et des lieux,
notamment). Or la démarche du sociologue n’est pas politique (« ce qui devrait être ») mais
étiologique (« comment se peut-il »), ce qui explique la métaphore médicale (§6), qui a
souvent été mal comprise.
L’analyse a également parfois posé problème à la fin du passage, notamment au
paragraphe 9, lorsque l’auteur remet en cause la radicalité de la thèse selon laquelle « ce que
l’on appelle société n’existe pas ». L’antithèse « plus d’importance » / « moins
d’importance » a pour fonction de distinguer ce qui ressortit d’un système de valeurs
individuel, assumé comme tel et par définition acceptable, d’une assertion qui nie l’évidence
de ce qui est (« dire qu’en " réalité " la société n’existe pas ») et qui, du coup, peut s’avérer
dangereuse.
De manière plus générale, la plupart des difficultés d’analyse que les candidats ont
connues s’expliquent par l’absence de définition du projet global du texte : préciser dès
l’abord la thèse en présence, c’est-à-dire ce dont l’auteur veut précisément convaincre le
lecteur dans l’ensemble du passage, reste le point de départ incontournable du travail.
Formulation et reformulation
La plupart des candidats ont pris la peine de reformuler l’argumentation du texte, et,
de ce point de vue également, de grands efforts ont été faits. Rappelons, cependant, que si
toute reprise lexicale n’est pas à proscrire, il faut s’interdire la reproduction à l’identique
d’expressions entières ou de morceaux de phrases : ce défaut reste sévèrement sanctionné par
le jury. Ainsi, dans notre passage, il semblait tout à fait acceptable, voire préférable, de
conserver les deux notions centrales, difficilement reformulables (« société » et « individu ») :
les candidats qui se sont essayés à la synonymie ont souvent proposé des solutions peu
adéquates, qui ont pu mener à des contresens (cependant, les termes « personne » ou
« particulier », pour « individu », et le mot « communauté », pour « société », ont semblé
convenir).
Le texte posait une autre difficulté pour la formulation : la reprise d’éléments entre
guillemets. La méthode permet, en effet, de restituer en l’état certaines expressions qui sont
déjà, dans le passage d’origine, des citations. Deux remarques s’imposent, à ce propos. Tout
d’abord, l’économie lexicale qu’impose l’exercice du résumé implique que ce type de reprise
se limite aux citations dont l’extrême importance justifie cette licence. Ensuite, il ne peut
s’agir que d’une reprise de mots qui ne sont effectivement pas de l’auteur du texte : or, dans
notre passage, les phrases et expressions entre guillemets n’étaient pas des citations réelles
mais des énoncés synthétisant une position ou une assertion dont Nobert Elias se détachait
grâce à l’usage de la ponctuation. Il semblait donc nécessaire de les reformuler (car les mots
sont bien de la main de l’auteur), mais il était possible de placer entre guillemets ces
reformulations, afin d’en faire, à l’imitation du texte-support, des objets d’étude.
Il faut enfin rappeler que, si le résumé est un exercice économe en mots, il reste
obligatoire de marquer la structure du raisonnement mis en place. Trop rares sont les copies
où l’usage de connecteurs logiques permet de suivre clairement l’articulation globale. C’est au
moment de l’analyse préalable que se met en place cette dimension nécessaire de la rédaction
du résumé.
Proposition de résumé
Voici un exemple de résumé réussi et bien noté, proposé par un des candidats ayant
composé cette année. Il ne s’agit pas d’un modèle absolu (car il n’existe pas de copie sans
erreurs ni de résumé parfait), mais il peut donner une idée de ce que le jury attend d’une
excellente production ainsi que du niveau global de l’épreuve.
« Deux points de vue radicalement opposés s’affrontent concernant le rapport entre
l’individu et la société : les uns considèrent que la société est l’objectif et l’individu le moyen
pour y parvenir, les autres pensent exactement le contraire, et cette opposition occupe toutes
nos pensées sur le sujet. Les partisans de ces deux thèses s’expriment comme s’ils détenaient
une vérité naturelle incontestable et intemporelle.
En réalité, si l’on parvient à dépasser cette opposition, on constate que la société est
aussi parfaitement inutile que l’individu, et que ce sont les hommes qui se créent leurs
propres objectifs. Chacun cherche à imposer sa vision idéale de l’individu dans la société,
mais il faut cesser de raisonner ainsi pour se poser enfin la bonne question : comment
l’association de plusieurs individus conduit spontanément à l’ensemble d’individus en
interaction qu’est la société ? Nous devons examiner notre société pour en comprendre les
rouages ; ainsi nous pourrons réparer le mécanisme.
L’individu est l’unité d’un ensemble : la société, mais cela n’implique pas qu’il lui soit
inférieur. Il en est cependant qui en arrivent à nier que l’individu fasse partie d’un tout,
considérant qu’il n’y a pas de société, mais rien que des êtres indépendants. Cela revient à
nier que les individus sont en interaction, que la société est organisée, ce qui est aussi
absurde que de dire d’une maison qu’elle est un tas de cailloux.
Cependant, si une maison achevée a une forme définitive, la société, elle, n’est pas un
ensemble figé. Au contraire, elle est sans cesse remaniée, car elle se heurte au fil du temps à
de nombreux problèmes. Ainsi, loin d’être un système clos, la société est en évolution
constante. »
Pour conclure, le jury tient à vivement remercier les candidats et leurs préparateurs
pour le sérieux avec lequel ils ont abordé cette épreuve.
Correcteurs: Mme BONNET, Mme CHESSÉ, M. MEYRIGNAC (R).