Construire une mémoire du développement en Haïti : l`importance

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Construire une mémoire du développement en Haïti : l`importance
Séminaire “Mémoire du développement”
Paris – 19 septembre 2014
Construire une mémoire du développement en Haïti :
l'importance de la capitalisation
Comment capitaliser les expériences menées par les acteurs de terrain, afin d'impulser
durablement une dynamique et de construire une mémoire du développement en Haïti ? C'est sur
cette question que la Fondation de France et l'Institut Veolia se sont penchés. Aux côtés des ONG
partenaires, ils ont mené un travail de capitalisation d'une vingtaine d'innovations locales dans
divers domaines, de la santé à l’agriculture en passant par les services urbains. À l'occasion de la
publication d'un numéro spécial de la revue FACTS report, qui compile ces initiatives, un séminaire
intitulé « Mémoire du développement » avait lieu à Paris le 19 septembre 2014.
Repère
L'action de la Fondation de France en Haïti
À la suite du séisme du 12 janvier 2010, la Fondation de France collecte
35 millions d'euros et prend une part active à l'effort de solidarité
internationale en Haïti. 25 % des fonds sont dédiés à l'aide d'urgence,
50% à des partenariats entre ONG françaises et ONG haïtiennes pour la
réhabilitation et 25% à des projets portés par la société civile locale à
travers 4 fonds d’initiatives locales gérés en Haïti (FIL). 360 projets sont
soutenus dont 200 à travers les FIL qui bénéficient à 900 000 Haïtiens.
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Compte-rendu des échanges
Contexte : L'enjeu de la mémoire du développement ........................................................................ 3
Les outils............................................................................................................................................... 4
La documentation ............................................................................................................................ 4
L'importance de la validation scientifique ................................................................................... 4
Quand les innovations locales deviennent des sujets de recherche ........................................... 6
Le poids de l'oral .............................................................................................................................. 7
Évaluer les impacts et les erreurs ..................................................................................................... 8
Les pratiques ........................................................................................................................................ 9
Valoriser les savoirs et les pratiques de terrain................................................................................ 9
Identifier et extraire les savoirs locaux ........................................................................................ 9
Faire des acteurs locaux des agents du développement ............................................................. 9
La formation ................................................................................................................................... 10
La mise en commun des acteurs .................................................................................................... 10
Une évidence pour les ONG partenaires de la Fondation de France ......................................... 10
Les échanges Sud/Sud ................................................................................................................ 11
Perspectives : du décloisonnement à l'évolution des mentalités ...................................................... 12
Allier urgence et développement .................................................................................................. 12
L'acceptation des financements privés .......................................................................................... 13
L'enjeu du changement d'échelle .................................................................................................. 13
De l'innovation locale au changement global ............................................................................ 13
L'importance du contexte .......................................................................................................... 14
Conclusions ........................................................................................................................................ 14
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Contexte : L'enjeu de la mémoire du développement
Le 12 janvier 2010, un séisme de magnitude 7 sur l'échelle de Richter frappe l'île d'Haïti. Le
bilan : 220 000 morts et un tiers de la capitale, Port-au-Prince, est détruit. La solidarité
internationale s'enclenche et des milliers d'humanitaires internationaux interviennent dans le
pays. L'urgence de la situation bouleverse les équilibres nationaux et masque la question centrale
du développement de l'île, dans un contexte où les défaillances de l'État et de la société sont mises
à nu par le séisme. Ce « zapping permanent de l'humanitaire », d'après les mots d'Henri Rouillé
d'Orfeuil, membre du comité Solidarités internationales de la Fondation de France, est à l'origine
d'actions discontinues et incohérentes, où rien n'incite à tirer les leçons des expériences
précédentes. Il a amené la Fondation de France à s'interroger quant à la nécessité de construire
une mémoire du développement et de la reconstruction en Haïti. Alors que les outils de la
mémoire ont été rasés par le séisme, il s'agit de repérer, soutenir et valoriser des innovations
locales à travers l'action d'ONG présentes sur le terrain. « Moteurs majeurs du développement
économique et social » et « meilleures armes dont peuvent disposer les pauvres pour résoudre des
problèmes aigus qui se dressent devant eux », selon Henri Rouillé d'Orfeuil, ces initiatives de
terrain sont peu prises en considération. Elles constituent pourtant les maillons de la chaîne du
développement et doivent être étudiées, analysées, décortiquées afin d'en garder une trace et
d’en exploiter plus largement le potentiel. Quels outils, quelles pratiques et quelles capacités
mobiliser pour capitaliser ces innovations locales, pour vérifier leur validité et leur potentiel ?
Quelles perspectives offrent ces expériences, en termes de changement d'échelle et de transfert
vers d'autres territoires ?
Repère
FACTS Reports, concept phare de l'Institut Veolia
Think-tank de prospective sur les thèmes environnement et société, l'Institut Veolia
mène notamment un travail de capitalisation et de diffusion des connaissances.
Publication internationale, électronique et gratuite, sa revue FACTS Reports vise à
repérer, capitaliser, diffuser et valoriser les connaissances innovantes et les bonnes
pratiques qui naissent des actions de terrain, en s'appuyant sur un processus de
validation scientifique. Les contributions des praticiens de terrain sont d’abord
soumises au comité éditorial puis évaluées par des pairs, des experts extérieurs acteurs
de terrain eux-mêmes, qui suggèrent des modifications pour que les critères de
publication soient respectés. L'objectif de cet exercice: élaborer des références fiables
permettant à d'autres acteurs de terrain ou à des décideurs publics de tirer parti des
expériences passées et ainsi faciliter la transposition de chaque projet ailleurs et
éventuellement, leur changement d'échelle. Aujourd'hui, la revue FACTS Reports
compte près de 20 numéros qui compilent 200 articles écrits par et pour des acteurs
du développement. Des séminaires de restitution et de valorisation sont régulièrement
organisés par l'Institut Veolia dans le cadre de ce travail de capitalisation.
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Accompagner, capitaliser, valoriser
Après 5 ans d'intervention en Haïti, la Fondation de France est aujourd'hui dans une phase
de retrait, mais le contexte haïtien est toujours fragile. Conscients que la juxtaposition de projets
n'impactent pas durablement la dynamique de développement d'un pays, la Fondation de France
et l'Institut Veolia se sont engagés dans un travail de capitalisation des innovations de terrain, dont
le point d'orgue est la publication d'un numéro spécial de la revue FACTS Reports, « Haïti :
innovations locales, clés pour un développement local et inclusif ». Une vingtaine de projets ont
été identifiés et évalués. Les acteurs locaux et les développeurs des ONG ont participé à ce travail
en racontant dans des articles leurs expériences de terrain et en tentant de caractériser les
innovations mises en place et leurs effets selon une analyse rigoureuse.
Le séminaire du 19 septembre visait à dresser le bilan de cette méthode FACTS. Il s'est
organisé en trois temps forts. En introduction, l'ancien ministre haïtien de la santé et fondateur du
GRET Haïti, Daniel Henrys, et Henri Rouillé d'Orfeuil ont rappelé les éléments de contexte qui font
de la construction d'une mémoire du développement un enjeu majeur pour Haïti. Le deuxième
temps du séminaire s'articulait autour de la présentation de six innovations locales haïtiennes.
Après une première partie centrée sur des initiatives liées à l'agriculture et à la reconstruction
d'habitats après le séisme, une seconde partie s'est intéressée aux projets relevant de l'accès à
l'éducation, à l'eau et à la santé. Enfin, la journée s'est achevée sur une table ronde sur « la place
de l'innovation et de la capitalisation pour les acteurs du développement et de la coopération ».
Animée par Henri Rouillé d'Orfeuil, elle a permis de confronter les points de vue de plusieurs
acteurs : Patrick Caron, directeur général du CIRAD, Francis Charhon, directeur général de la
Fondation de France, Bertrand Charrier, chargé de mission Innovations technologiques et Procédés
innovants pour le développement à l'Agence française du développement (AFD), François Enten,
chargé de l'animation scientifique au GRET, Christine King, responsable à l'Agence nationale pour
la recherche (ANR) et Georges Valentis, délégué général de l'Institut Veolia.
Les outils
La capitalisation des innovations locales sélectionnées par la Fondation de France passe
tout d'abord par l'utilisation d'outils pour documenter, référencer et évaluer ces expériences.
L'objectif : fournir des supports qui sécurisent la diffusion des connaissances acquises sur le
terrain.
La documentation
L'importance de la validation scientifique
Selon François Enten, « la valorisation du savoir traditionnel passe par sa validation
scientifique ». Il s'agit de construire une collection de références fiables pour les acteurs et les
décideurs afin qu'ils tirent parti des projets menés par les ONG et les acteurs locaux. La démarche
de la revue FACTS Reports en est un exemple éloquent : rédigés par les porteurs de projets, les
articles sont soumis à un processus de validation scientifique. Compilés en un seul support de
diffusion, ils permettent de garder une trace écrite de ces expériences et donnent aux acteurs un
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« statut d'expert », aux yeux d'Henri Rouillé d'Orfeuil. Des connaissances innovantes, mais le plus
souvent mal considérées (car elles sont de l'ordre du savoir-faire, qu'elles relèvent de la culture
traditionnelle et/ou qu'elles sont portées par des acteurs locaux dont les actions sont peu ou pas
prises en considération) sont ainsi transmises et valorisées au même titre que des savoirs
scientifiques. Publication électronique et gratuite, le numéro spécial Haïti de FACTS Reports,
participe ainsi à l'effort de mémoire visant à combler le déficit de capitalisation. D'autres
organisations se sont également inscrites dans cette démarche. Daniel Henrys rappelle qu'à la suite
de la catastrophe naturelle, l'Organisation mondiale de la santé (OMS), le Centre régional
d'information sur les catastrophes (CRID) et la National library of medicine (États-Unis) ont
entrepris de recueillir des documents parus avant le séisme. Les archives ainsi récupérées ont été
publiées sur un site internet basé aux États-Unis et ensuite rapatrié en Haïti
(http://haiti.cridlac.org/).
De même, plusieurs acteurs présents lors du séminaire du 19 septembre ont expliqué leur
volonté de produire des documents écrits à même de répertorier leurs retours d'expérience.
Conseiller de l'association SOS Enfants sans frontières, Michel Brochet a expliqué comment le
projet de « Madian-Salagnac » a donné naissance à un manuel d'agronomie en milieu tropical, à
un ouvrage en trois tomes « Paysans, système et crise », qui est une somme de savoir unique sur
l’histoire de l’agriculture haïtienne, un ensemble de quelques milliers d’heures d’enregistrements
vidéos, aujourd’hui, déposés à la Bibliothèque Nationale de France dont quelques séquences ont
donné lieu à un coffret intitulé « Paysans, silence à voix basse ». A ces documents de références, il
convient d’ajouter des référentiels techniques servant de support pour des actions de formation
ou de recherche.
Le projet Madian-Salagnac
Présenté par le conseiller bénévole de SOS Enfants sans Frontières, Michel Brochet, et
par l'ingénieur général du GREF, Charles Lillin, le projet de Madian-Salagnac avait pour
objectif de vulgariser les techniques agricoles à travers la formation de paysans et
d'agronomes haïtiens. Lancé en 1974, il s'est dès le départ inscrit dans une démarche
de recherche, de formation et de développement avec l'implantation d'un centre dédié
sur le plateau des Rochelois. Peu à peu, les acteurs se sont rapprochés d'étudiants en
agronomie de la faculté de Port-au-Prince et l'ONG SOS Enfants sans Frontières est
devenue un prestataire de service pour les formations de l'université. L'un des
programmes emblématiques du projet de Madian-Salagnac est la construction de
citernes familiales afin de recueillir l'eau de pluie, sur le plateau des Rochelois. De
nombreux paysans ont été formés à la maçonnerie et un financement européen a
permis la construction de 200 citernes. Aujourd'hui, on en compte plus d'un millier sur
la zone. L'approvisionnement en eau a également permis le développement d'un projet
maraîcher et vivrier. Depuis 2005, des programmes similaires sont menés à Gros
Mornes et sur la chaîne des Matheux. Ils s'appuient sur l'expérience du plateau des
Rochelois à travers l'organisation de stages et de rencontres entre les paysans des trois
régions.
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Quand les innovations locales deviennent des sujets de recherche
L'utilisation de procédés propres à la recherche scientifique ne va pas de soi pour
évaluer les projets menés par des ONG sur le terrain. À la question d'Henri Rouillé d'Orfeuil, « estce un abus de parler de validation scientifique ? », Patrick Caron, directeur général du Cirad, a
insisté sur « la posture d'une recherche qui n'est pas dans une tour d'ivoire, qui se saisit et qui
participe sans aucune position surplombante aux questions de société ». Depuis les années 1980,
les innovations locales sont en effet devenues de véritables sujets de recherche scientifique,
notamment avec le recrutement de chercheurs travaillant dans le domaine des sciences humaines
et sociales. « On est sur une recherche qui a vocation et enjeu à produire de la connaissance, y
compris en analysant des processus d'innovation à partir desquels des savoirs très légitimes ont été
produits de manière légitime et avec des processus éprouvés. »
Les projets menés par les partenaires de la Fondation de France n'ont pas échappé à ce
processus. Plusieurs d'entre eux font l'objet de thèses réalisées par des étudiants-chercheurs. Le
programme de Madian-Salagnac sera prochainement soumis à l'analyse de deux étudiantes en
agronomie, Adeline Bouvard et Arianne De Groot, tandis que le projet ReparH a initié deux thèses
de recherche : l'une en sciences de l'ingénieur et pilotée par Florent Vieux-Champagne, l'autre en
architecture et menée par Annalisa Caimi afin d'établir une méthode d'enquête et d'extraction des
pratiques constructives locales, pour capitaliser l'information et tester les méthodes des ONG sur le
terrain. ReparH fait également l'objet de colloques, de séminaires, d'articles de recherche et
d'expositions.
Le projet ReparH
Philippe Garnier, architecte de l'association CRAterre – ENSAG, et Yannick Sieffert,
ingénieur et enseignant chercheur à l'UJF, sont intervenus pour expliquer le projet
ReparH qui concerne la reconstruction d'habitats para sinistres au lendemain du
séisme de janvier 2010 en Haïti. Il s'agissait d'identifier les bonnes pratiques de
construction et de les croiser avec les connaissances en architecture para sinistre, afin
de définir des solutions d'habitats en phase avec les impératifs techniques, mais aussi
avec les contraintes sociales. Ingénieurs et architectes ont mené une enquête sur les
cultures constructives locales et ont imaginé, en concertation avec les populations, un
modèle de construction para sinistre capable de résister à un séisme dont la puissance
équivaut à trois fois celle du séisme de janvier 2010. En trois ans, 867 maisons ont été
construites. L'objectif : en édifier 1 020 d'ici la fin de l'année 2014. Grâce à leur coût
réduit – 3 000 euros en moyenne par maison – et à leur capacité à répondre aux
besoins des régions rurales et péri-urbaines d'Haïti, ces habitats se développent. Le
ministère haïtien des Travaux publics, Transport et Communication a certifié le système
en ossature bois contreventé en croix de saint-André, utilisé pour la construction de
ces habitats para sinistres.
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Le poids de l'oral
Mais ces outils de diffusion et de transfert des connaissances passent tous, sans exception,
par une tradition écrite propre à nos sociétés occidentales. « Quid de l'oral, alors que la tradition
est extrêmement forte parmi les populations concernées ? », s'interroge François Enten. Afin de
toucher plus largement les populations locales, qui sont les premières à initier les innovations et
qui sont directement concernées par les problématiques de développement, il est primordial de
développer des modes de capitalisation orale. C'est pourquoi les technologies de l'information et
de la communication (TIC), comme le téléphone, la caméra ou internet, sont des outils à privilégier.
Le projet Madian(-Salagnac a été suivi par les vidéastes Gérarld et Paule Belkin, qui ont mis leurs
micros et leurs caméras au service des paysans haïtiens. Ces derniers ont livré leur regard et leur
perception des techniques et pratiques agricoles, et leur ont confié leurs projets de vie. Ces
documents ont été transmis à la Bibliothèque nationale de France (BNF) et seront accessibles par
internet.
Autre initiative relevant de la capitalisation orale, celle de l'ONG Haïti Futur. Après avoir
participé à la revue FACTS reports, les porteurs du projet ont réalisés un film de 29 minutes, qui
raconte leur expérience. Sous-titré en Créole, en Anglais et en Espagnol, le court-métrage sera
bientôt présenté au Bénin, à Madagascar, au Togo et aux États-Unis. 2 500 DVD ont en outre été
produits et seront diffusés par le ministère haïtien de l'Éducation nationale afin d'associer les
pouvoirs publics.
Le projet Haïti Futur
Présenté par la présidente d'Haïti Futur, Josette Bruffaerts-Thomas, le projet de cette
ONG ambitionne d'installer des tableaux numériques interactifs (TNI) dans les salles de
classe d'Haïti, afin d'améliorer les méthodes pédagogiques. Dans un pays où seulement
2,5 % du budget de l'État est alloué à l'éducation et où la moitié des écoles ont été
détruites par le séisme de janvier 2010, l'idée est de transformer les approches
d'apprentissage des enfants, essentiellement fondées sur le par cœur. Composé d'un
vidéo-projecteur projetant des contenus pédagogiques sur un tableau interactif
fonctionnant avec un stylet, le TNI permet de concrétiser ce que les élèves apprennent
tout en les incitant à observer, critiquer et commenter ce qu'ils ont sous les yeux.
Depuis le lancement du projet en 2010, l'ONG a installé 150 TNI dans les salles de
classe et 300 enseignants ont été formés à leur utilisation. Haïti futur a comme objectif
d'équiper 500 écoles dans les différentes régions du pays. Enfin, ce programme est en
passe de devenir un véritable programme ministériel : le ministère de l'Éducation a
certifié les contenus pédagogiques diffusés via le TNI et a fait de cet outil un élément
majeur de « politique nationale de l'éducation ». Haïti futur demande désormais aux
pouvoirs publics de consacrer 20 % du budget étatique à l'éducation.
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Évaluer les impacts et les erreurs
Ce travail de documentation écrite et orale ne serait pourtant pas aussi efficace s'il n'était
pas accompagné d'une « culture du résultat », mise en avant durant le séminaire par Henri Rouillé
d'Orfeuil. Évaluer les impacts des innovations de terrain, identifier les erreurs et extraire les
facteurs de réussite sont les enjeux du travail de capitalisation. Présidente d'Haïti Futur, Josette
Bruffaerts-Thomas a reconnu que le projet porté par l'ONG dans les écoles haïtiennes pâtit d'un
manque de validation scientifique. Si une étude comparative a été menée au sein de quatorze
établissements scolaires (démontrant que les élèves ayant appris grâce au tableau numérique
obtiennent deux points supplémentaires aux examens par rapport aux enfants apprenant encore
selon les méthodes pédagogiques traditionnelles), son impact n'a pas été scientifiquement prouvé
sur le long terme, selon les exigences propres au monde de la recherche.
Au contraire, le projet d'accès à la santé porté par ATD Quart Monde dans le quartier de
Martissant, à Port-au-Prince, a fait l'objet de plusieurs évaluations, dont la première date de 1999.
En 2011, les acteurs ont pu attester que le fait de fixer des tarifs réduits, selon un système de
forfait, pour les populations défavorisées du Centre de santé Saint-Michel (CSSM) garantissait un
meilleur accès aux soins. Malgré la présence de structures d'urgence prodiguant des soins gratuits,
plus d'un an après le séisme, les patients revenaient au CSSM pour se faire soigner.
Le Centre de Santé Saint-Michel (CSSM)
Ancien ministre haïtien de la Santé et fondateur du GRET-Haïti, Daniel Henrys est
intervenu sur le financement de la santé des plus pauvres en Haïti, en présentant le
projet mené par ATD Quart Monde dans le quartier de Martissant, à Port-au-Prince.
C'est à l'occasion d'une réflexion sur le système de santé initiée en 1990 qu'ATD Quart
Monde a décidé d'ouvrir le Centre de Santé Saint-Michel (CSSM) dans cette zone
touchée par le séisme de janvier 2010. L'idée : mettre sur pied un système
d'abonnement au forfait afin de permettre l'accès aux soins des familles les plus
démunies. Évalué pour la première fois en 1999, le projet a fait l'objet d'un nouveau
diagnostic en 2012. Au 1er août, 616 familles étaient intégrées au programme soit
2 544 individus dont 451 enfants de moins de 5 ans, bénéficiant d'un accès gratuit aux
soins. ATD Quart Monde constatait en outre que les patients revenaient au CSSM où la
continuité du suivi sanitaire était garantie, au lieu de se diriger vers les centres de soins
entièrement gratuits. S'il ne concerne que 6 % des habitants du quartier de Martissant,
le programme d'ATD Quart Monde a toutefois enclenché une réflexion sur le
financement de la santé en Haïti, à la fois entre les organisations concernées et au
niveau gouvernemental. Le ministère haïtien des Affaires sociales réfléchit de son côté
au lancement d'un système de mutuelle.
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Les pratiques
La capitalisation des innovations locales passe également par l'identification des bonnes
pratiques. Car s'il est primordial de se doter d'outils capables de documenter, de vérifier et de
compiler les expériences, il s'agit aussi de développer les actions de terrain qui participent à la
construction d'une mémoire du développement.
Valoriser les savoirs et les pratiques de terrain
Identifier et extraire les savoirs locaux
Tous les participants au séminaire du 19 septembre ont déploré le peu d'importance
accordée aux actions des citoyens haïtiens sur le terrain. Dépositaires de savoirs, les populations
sont à l'origine de bonnes pratiques qu'il faut repérer et développer. Le projet ReparH a respecté
cette approche. En plus de développer un programme de construction d'habitats para-sismiques,
l'ENSAG et le Laboratoire 3SR ont mené une enquête sur les cultures constructives locales afin
d'extraire les savoirs traditionnels locaux en matière d'architecture. Ainsi, est apparue la nécessité
d'imaginer des bâtisses où la circulation était facilitée, permettant aux habitants de passer
directement d'une pièce à l'autre. Une telle démarche s'est traduite par l'accompagnement des
acteurs locaux dans les choix des techniques et des méthodes, ainsi que par l'articulation des
approches scientifiques et des savoirs traditionnels. À l'arrivée, les populations concernées se sont
plus facilement appropriées les habitats et ont bénéficié d'un renforcement de leurs capacités.
Identifier et extraire les savoirs de terrain constituent donc un enjeu, dans un contexte où la
crise de la mémoire du développement en Haïti se traduit par une absence de capitalisation et de
valorisation des capacités locales, et où les savoirs incorporés peinent à être extraits et diffusés.
Faire des acteurs locaux des agents du développement
Reconnaître la valeur de ces savoirs traditionnels implique également de considérer les
populations locales comme des agents du développement. À contre-courant d'une « coopération
internationale qui considère qu'elle arrive dans une société désorganisée, peuplée d'Haïtiens
inertes et anéantis », selon Henri Rouillé d'Orfeuil, il s'agit de « penser que les Haïtiens sont
capables », explique Josette Bruffaerts-Thomas. Dans le cadre du projet d'Haïti Futur, elle détaille
comment les enfants sont devenus des acteurs du développement. Enthousiasmés par les tableaux
numériques, ils ont raconté à leurs parents leur nouvelle expérience interactive une fois revenus
chez eux. Curieux, les parents ont ensuite manifesté leur désir de découvrir cette nouvelle
méthode pédagogique et se sont rendus dans les salles de classe. Pour la plupart d'entre eux,
c'était la première fois qu'ils mettaient les pieds à l'école.
De manière générale, il existe plusieurs méthodes pour extraire les savoirs traditionnels
tout en faisant des populations locales des agents du développement. Déléguée générale adjointe
d'ATD Quart Monde, Jacqueline Plaisir a mis en avant celle du « croisement des savoirs », qui
consiste à reconnaître les savoirs des populations, au même titre que celui des universitaires,
techniciens, ingénieurs et autres professionnels. L'enjeu est de créer des conditions de dialogue et
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des rapports de force équilibrés entre ces familles d'acteurs afin de croiser les savoirs
académiques, les savoirs d'expérience et les savoirs d'engagement. Ainsi, les personnes en
situation de pauvreté sont reconnues comme des acteurs de la connaissance dont les savoirs sont
capitalisés et valorisés. Elles deviennent alors des agents du développement à part entière.
La formation
La formation est une pratique incontournable de capitalisation. D'une part, elle empêche la
perte des connaissances acquises une fois que les ONG ont quitté le terrain. D'autre part, elle
permet une transmission des techniques et des savoirs, même après plusieurs années de pratique.
Toutefois, selon la façon dont elle est menée, la formation ne sert pas forcément la capitalisation.
Dans un premier temps, les sessions de formation proposées dans le cadre du projet « MadianSalagnac » s'adressaient à des animateurs ou des formateurs qui étaient chargés, à leur tour, de
former les paysans. Mais ils retournaient très peu dans leurs communautés pour restituer ce qu'ils
avaient appris. C'est pourquoi les responsables du projet ont décidé de s'adresser directement aux
agriculteurs en modifiant leur pédagogie : l'observation des pratiques agricoles locales et la
discussion avec les populations concernées sont devenues les axes principaux de l'apprentissage.
Parallèlement, des sessions de formation étaient également destinées aux étudiants en agronomie
de la faculté de Port-au-Prince. Dès lors, s'est produit un effet domino : sur le Plateau des
Rochelois, les populations locales ont contribué à la construction de 200 citernes, acquérant par là
même des compétences en maçonnerie ensuite mises à profit pour la construction d'habitats.
Plus tard, lors de la mise en place d'un autre projet de gestion de l'eau à Gros Morne, le
Centre de Madian-Salagnac s'est révélé être une référence. Les agriculteurs s'y sont rendus pour
assister à des sessions de formation, valorisant de fait l'héritage du Plateau des Rochelois. On
comprend, ici, comment la formation n'est pas qu'un moyen de renforcer les capacités des
populations locales. C'est aussi un vecteur de capitalisation, à partir du moment où les parcours
pédagogiques sont conçus comme des supports de transmission des connaissances et des
pratiques.
La mise en commun des acteurs
Une évidence pour les ONG partenaires de la Fondation de France
Les participants au séminaire du 19 septembre sont unanimes : la capitalisation et le travail
de mémoire en appellent à la complémentarité des métiers, des institutions et des connaissances.
L'idée : mutualiser les savoirs et les pratiques de chacun – y compris des populations et des
institutions locales – afin de créer des espaces communs à tous les acteurs. François Enten propose
même d'aller plus loin, en mobilisant des historiens – qui ne sont, à l'origine, pas considérés
comme des acteurs du développement – afin de décortiquer les projets d'ONG menés depuis
plusieurs décennies et de comprendre les processus d'innovation qui s'inscrivent dans un temps
très long. Ainsi, le travail en synergie et la démarche interdisciplinaire servent à créer une base de
références partagée et durable, nécessaire pour construire une mémoire du développement
commune à tous les acteurs. Cette mise en commun rencontre plusieurs difficultés et notamment
celle de la confrontation avec les populations locales, qui peuvent voir d'un mauvais œil les
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interventions des ONG sur le terrain. Ce rapport de force n'est toutefois pas un obstacle, mais
plutôt une chance : il démontre l'intérêt des populations pour les projets des ONG, permet
d'engager un dialogue frontal et de construire, avec elles, les stratégies de développement. De
plus, cette confrontation incite les porteurs de projets à se remettre en question et à questionner
leurs initiatives, servant de fait la capitalisation.
Les échanges Sud/Sud
Le projet mené par Agronomes et vétérinaires sans frontières (AVSF) démontre comment
les échanges Sud/Sud peuvent participer à la capitalisation des expériences. Dans l'optique
d'améliorer la fermentation du cacao en Haïti, AVSF a initié des échanges avec plusieurs pays
d'Amérique latine, bassin performant de plantations de cacaoyers. Cette mise en relation des
acteurs du Sud, et notamment l'appui de la coopérative péruvienne CEPICAFE, a permis à la
coopérative haïtienne FECCANO de réaliser un saut technique en matière de fermentation des
fèves. Aujourd'hui, une petite partie de la production haïtienne de cacao est référencée, ce qui
permet aux producteurs concernés d’atteindre des marchés de niche qui privilégient des denrées
de qualité. Très vite, est apparue la nécessité de constituer une base de références documentées
pour imaginer des modèles agricoles nouveaux, qui incluent la responsabilité technique des
producteurs. D'où l'intérêt d'imaginer et de consolider une interprofession de la filière du cacao en
Haïti (ce qui existe déjà en Équateur, au Pérou et en Colombie) pour mutualiser les connaissances
et les techniques, et permettre une gouvernance locale de la filière.
Le projet FECCANO
Mené par Agronome et vétérinaires sans frontières (AVSF) et par l'entreprise sociale
Ayitica, le projet d'amélioration de la qualité du cacao produit en Haïti a été présenté
par Jean Chesnel Jean, agroéconomiste et membre fondateur d'Ayitica. En 2008, AVSF
constate que malgré les variétés de cacao présentes sur l'île, les fèves haïtiennes ne
sont pas particulièrement prisées sur le marché international. L'ONG entreprend alors
de transmettre les techniques de fermentation, nécessaires à l'obtention d'un cacao
aromatique, en mettant en lien les producteurs de la coopérative FECCANO avec ceux
de la coopérative péruvienne CEPICAFE. L'introduction de la fermentation a entraîné
une amélioration du cacao produit et a permis d'atteindre les marchés de niches aux
prix plus intéressants pour les producteurs. Le premier partenaire de la FECCANO a été
la SCOP française Ethiquable, qui a commercialisé des tablettes de chocolat équitable
issues du cacao haïtien fermenté dès 2010. Les producteurs de la FECCANO ont vu leurs
prix augmenter de 120 %. Le succès de FECCANO à l'exportation a contraint les
acheteurs locaux à mieux rémunérer l'ensemble des producteurs de cacao de l'île. Les
prix payés aux producteurs ont été multipliés par cinq. L'apparition des techniques de
fermentation a également relancé l'intérêt pour la culture du cacao et la gouvernance
de la filière s'est améliorée. La FECCANO, quant à elle, affiche un chiffre d'affaires
cumulé d'environ 500 000 dollars (soit un peu plus de 396 000 euros).
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Perspectives : du décloisonnement à l'évolution des mentalités
Les outils et les pratiques présentés plus haut ouvrent des perspectives de développement.
Ils supposent une remise en question des façons de faire des ONG et mettent en avant des lignes
directrices pertinentes qui serviront, à l'avenir, la construction d'une mémoire du développement
en Haïti.
Allier urgence et développement
Les projets présentés le 19 septembre questionnent, pour la plupart, la fracture entre
action humanitaire d'urgence et développement. « Il faut que les institutions porteuses du
développement invitent les urgentistes à travailler ensemble », résume François Enten, pour qui
« la tendance à séparer les deux est incohérente aux yeux des populations locales et concernées par
les projets ». Parmi les initiatives innovantes en la matière, on peut citer celle de la Croix rouge
française qui était déjà sur place lors du séisme de janvier 2010. Renforcée, l'équipe a assuré une
aide répondant à la situation d'urgence, mais s'est également inscrite dans une démarche de
développement afin de renforcer la capacité de la société civile à répondre aux prochaines
catastrophes. Daniel Henrys a également rappelé l'innovation du GRET dans les quartiers précaires
de Port-au-Prince : l'ONG est parvenue à « passer de l'urgence au culturel », en reliant, tout
d'abord, un mini-réseau de quartier de distribution d'eau au réseau public. En plus de raccorder
plus de 50 zones défavorisées de la capitale haïtienne, le projet a permis aux comités qui géraient
ces mini-réseaux de prendre de l'ampleur, au point de devenir les principaux interlocuteurs de
l'État et du réseau d'eau public dans les quartiers dits de « non-droit ».
La Croix rouge française en Haïti
Directeur adjoint de la Direction des relations et opérations internationales de la Croix
rouge française, Antoine Petibon a présenté l'action de l'ONG en Haïti. Déjà sur place
lors du séisme de janvier 2010, elle s'est positionnée comme un acteur important dans
la réponse à la catastrophe. Tout d'abord en menant des actions d'urgence, mais aussi
en initiant des programmes de développement afin de renforcer la capacité de la
société civile à répondre aux prochains épisodes climatiques. Dans les camps d'accueil
des réfugiés, l'innovation de l'ONG réside dans le décloisonnement des compétences
des acteurs. A contre-courant d'une prise en charge sectorielle des populations par des
ONG hyper spécialisées, la Croix rouge française mise sur un regroupement des
compétences (social, accès à l'eau, santé, accompagnement psychologique etc.) afin
d'établir un lien plus fort entre les opérateurs du développement et les populations.
Elle a repris ce mode d'organisation pour piloter son action dans les quartiers au
lendemain du séisme. Appuyée par la Fondation Veolia, la Croix rouge française a mené
des projets de réhabilitation des réseaux d'approvisionnement en eau en situation
d'urgence, ainsi qu'un programme de lutte contre le choléra. À Petit-Goâve, ville
côtière située à 68 km à l'ouest de Port-au-Prince, 56 000 Haïtiens ont bénéficié d'un
accès à l'eau amélioré.
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Ces approches de l'aide au développement sont révélatrices d'une « vraie révolution »,
ajoute Francis Charhon, directeur général de la Fondation de France. « Ces organisations se
regroupent maintenant dans un même mode de pensée. (...) Des gens qui pensaient différemment
se rapprochent. ». Dès lors, ce décloisonnement urgence/développement pose le défi de la
temporalité qui n'est pas la même entre ces deux familles d'acteurs. L'urgence doit répondre à des
besoins immédiats, alors que certains pans de l'aide au développement, comme la recherche ou
l'étude d'impacts, demandent plus de temps et de recul.
L'acceptation des financements privés
Autre innovation mise en avant par Francis Charhon, l'acceptation progressive des
financements privés. « Avant, il n’était pas possible d’imaginer un financement privé, mais
nécessité faisant loi et les générations changeant, tout cela devient plus normal. On tire de cela
quelque chose de très intéressant c'est la notion de partenariats assez extensifs où chacun doit
apporter sa pierre. ». Cette évolution des mentalités s'explique notamment par le fait que les
innovations sont de plus en plus portées par les individus, et non par des institutions, sur le
modèle du « social business », qui consiste à créer de la richesse en fixant des objectifs
d'entreprise pour financer des projets de développement.
Cette perspective demande de dépasser certains obstacles, comme l'a rappelé Bertrand
Charrier, selon lequel les initiatives les plus prometteuses en termes de changement d'échelle sont
financées par les institutions publiques. Autre mise en garde, celle du président du Comité français
pour la solidarité internationale (CFSI), Yves le Bars, selon lequel les acteurs privés ne sont pas
suffisamment engagés dans les premières phases d'incubation et de maturation des projets des
ONG. Les étapes de développement et de changement d'échelle restent celles qui attirent le plus
de financements.
L'enjeu reste donc de convaincre les bailleurs privés, parfois réticents à soutenir un projet
dès ses premiers pas et dont l'évolution est dépendante d'une réalité incertaine et changeante,
celle de l'expérience et du terrain.
L'enjeu du changement d'échelle
De l'innovation locale au changement global
Le changement d'échelle est l'un des enjeux des innovations locales pour le
développement, qui ambitionnent de toucher un public le plus large possible. Il est donc
primordial de s'en donner les moyens, qu'ils soient financiers, matériels, humains ou techniques. Si
le projet mené par AVSF dans les plantations de cacao a bénéficié d'un changement d'échelle
rendu possible par des investissements d'ordre privé, en saisissant l'opportunité de la
commercialisation et de la labellisation équitable pour optimiser le potentiel du cacao haïtien sur
le marché mondial, d'autres, comme celui d'Haïti Futur ou le projet ReparH, se sont vus attribuer
des certifications ministérielles. De son côté, l'innovation que représente le système de tarifs
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réduits au forfait pour l'accès aux soins des populations défavorisées du CSSM a entraîné une
réflexion globale du financement de la santé en Haïti. Le projet tend à se développer à une échelle
plus large, tandis que le ministère haïtien de la santé a manifesté l'intention de lancer un système
de mutuelle. Enfin, citons encore une fois le programme Haïti futur dont le tableau numérique et
interactif installé dans les écoles sert désormais à la formation agricole et à d'autres activités.
On voit bien comment le changement d'échelle permet aux innovations locales d'irriguer
plusieurs couches de la société haïtienne, bien au-delà des domaines pour lesquels elles ont été
conçues et pensées au départ. Il sert aussi la construction d'une mémoire du développement
puisque les innovations laissent plus de traces et bénéficient d'une capitalisation améliorée,
notamment car la reconnaissance et la labellisation offrent une grille de lecture aux études
d'impact, pour une meilleure « culture du résultat ».
L'importance du contexte
Le caractère reproductible des innovations locales est un autre enjeu dans l'optique de
toucher plus largement les populations. Lors du séminaire, le projet ReparH a été questionné sur
sa capacité à être exporté en Palestine, qui, comme Haïti, est situé sur deux failles sismiques. Car
répliquer une initiative sur d'autres territoires ne relève pas de l'évidence. Le programme d'accès
aux soins du CSSM, par exemple, peut difficilement être exporté dans d'autres régions, puisqu'il a
avant tout tiré parti de la présence du personnel d'ATD Quart Monde sur place et de sa bonne
connaissance du terrain. Le contexte dans lequel naissent et se développent les innovations locales
est donc primordial. Il faut produire des références, des connaissances et des techniques sur les
impacts de ces initiatives en fonction de leur contexte, et les compiler afin d'être mieux armé en
cas d'exportation sur d'autres territoires.
Conclusions
Plusieurs axes de travail se dégagent du séminaire du 19 septembre. Parmi eux, citons
l'importance de la valorisation de ces initiatives, à travers le travail de documentation, de
validation scientifique, d'association et de reconnaissance des acteurs de terrain, de leurs
connaissances et de leurs pratiques. Car s'il s'agit de capitaliser « ici », c'est-à-dire au niveau des
ONG partenaires dans l'optique de tirer parti des expériences précédentes en vue de projets
futurs, il importe surtout de capitaliser « là-bas », avec et pour les populations locales concernées
par ces projets. D'où l'intérêt de documenter, de former et d'évaluer les impacts de façon
scientifique et technique.
La Fondation de France continuera ce travail de capitalisation pour la construction d'une
mémoire du développement lors d'une session bilan sur la solidarité en Haïti en octobre 2014, puis
lors d'un séminaire de capitalisation, mené conjointement avec l'Agence nationale de la recherche
(ANR), en décembre 2014 à Port-au-Prince. De son côté, l'Institut Veolia continuera ce travail de
capitalisation des actions pour le développement à travers sa publication FACTS Reports et d’autres
numéros spéciaux en 2014 sur « La distribution au dernier kilomètre » ou « Les innovations
démocratiques locales ».
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Pour télécharger l’ouvrage « Innovations locales et développement durable en Haïti » :
http://www.fondationdefrance.org/Nos-Actions/Aider-les-personnes-vulnerables/En-urgence-etpost-urgence/Solidarite-Haiti
Pour accéder aux articles du numéro spécial FACTS Reports :
http://factsreports.revues.org/2749
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