Diabète

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Diabète
36
1. Introduction | Pathogenèse 1-4
Introduction
——La prévalence du diabète de type 2 augmente depuis plusieurs
décennies en suivant l’épidémiologie de l’obésité. La prévalence
mondiale en 2011 est estimée à 8,3 %, jusqu’à 25 % dans certains
pays à faibles revenus du Moyen-Orient et des Caraïbes.
——En Suisse, la prévalence du diabète est de 7,4 %. La morbidité
cardiovasculaire est deux fois plus importante chez les patients
diabétiques que non-diabétiques.
Pathogenèse
——Le diabète de type 1 est une maladie auto-immune qui se développe sur un terrain immunogénétique favorable – système
HLA – suite à un facteur déclencheur environnemental, entraînant une destruction des cellules bêta du pancréas. Fréquemment,
des auto-anticorps peuvent être mis en évidence : anti-GAD (les
plus fréquents), anti-îlots, anti-IA-2 ou anti-insuline, par exemple.
——Le diabète de type 2 est une combinaison de dysfonctionnements
du métabolisme : résistance tissulaire à l’insuline et épuisement
des cellules bêta du pancréas. Cette maladie a une forte composante génétique, avec probablement plus d’une centaine de polymorphismes.
Endocrinologie et métabolisme 485
——Le diabète gestationnel est un état d’intolérance au glucose,
apparu au cours de la grossesse (1-5 % des grossesses), chez une
femme sans diabète sucré connu antérieurement. Il expose à des
complications maternelles et fœtales potentiellement sévères. Le
diabète gestationnel est dépisté entre la 24e et la 28e semaine de
gestation, soit la période durant laquelle intervient la sécrétion
de l’hormone lactogène placentaire (HPL), responsable d’insulino-résistance chez la mère. Le dépistage se réalise par un test
d’intolérance au glucose (valeurs diagnostiques différentes que
celles du diabète commun).
——Il existe d’autres types de diabète plus rares : défaut génétique
des cellules bêta (MODY), origine médicamenteuse (corticoïdes,
thiazides) ou endocrinologique, maladie du pancréas exocrine,
diabètes secondaires, etc.
2. Définition | Classification 5-8
Définition du diabète
(American Diabetes Association 2012)
——HbA1C ≥ 6.5 % ou
——Glycémie plasmatique à jeun ≥ 7,0 mmol/l (à jeun = 8 heures
après la dernière absorption de calories) ou
——Glycémie plasmatique ≥ 11,1 mmol/l, 2 heures après une charge
de 75 g de glucose anhydre dilué dans 250 ml d’eau ou
——Symptômes d’hyperglycémie associés à une glycémie plasmatique ≥ 11,1 mmol/l à n’importe quel moment de la journée
Le test doit être répété 1 fois pour confirmer le diagnostic, sauf
pour le 4e critère. Il est préférable de réitérer le même test. En cas de
tests divergents, le test supérieur à la norme doit être répété.
N.B. Le dosage de l’HbA1c doit être effectué selon une méthode
certifiée par le National Glycohemoglobin Standardization Program
(NGSP).
486
36. Diabète
Pré-diabète Facteur de risque de développer un diabète et/ou une maladie
cardiovasculaire :
——Glycémie plasmatique à jeun pathologique :
entre 5,6 et 6,9 mmol/l ou
——Intolérance au glucose : glycémie plasmatique entre 7,8 et
11,0 mmol/l 2 heures après une charge de 75 g de glucose anhydre
dilué dans 250 ml d’eau ou
——Hémoglobine glyquée entre 5,7 % et 6,4 %
3. Drapeaux rouges9
Critères d’urgence
——Glycémie plasmatique > 30 mmol/l
——Osmolarité plasmatique > 320 mOsm/kg
——pH artériel < 7,3
——Trou anionique : ([Na+]) – ([Cl–] + [HCO3–]) > 12 mmol/l
——Corps cétoniques positifs (++) dans les urines
——Trouble de la vigilance
——Comorbidités : trouble cognitif, pneumonie, infarctus, isolement,
etc.
ÄUne
Ä
hospitalisation est probablement nécessaire.
Endocrinologie et métabolisme 487
4. Diagnostic | Dépistage 1
——Le dépistage du diabète est recommandé dès 35 ans en cas de présence d’un autre facteur de risque cardiovasculaire ou dès 40 ans
dans le cas contraire, selon les recommandations du Groupe
Suisse de travail Lipides et Athérosclérose (GSLA).
——Les critères de l’Association Américaine de Diabétologie (ADA)
sont un peu différents :
Tableau 1. Critères de dépistage du diabète de l’Association
Américaine de Diabétologie (ADA)
1. Dès l’âge de 45 ans
2. A tout âge en cas d’obésité ou de surcharge pondérale (IMC > 25 kg/m2)
associant au moins un facteur de risque :
––sédentarité
––histoire familiale de diabète chez un parent de 1er degré
––groupe ethnique à risque (p. ex. Sri Lanka en particulier, autres pays d’Asie)
––antécédent de diabète gestationnel ou enfant > 4,5 kg à la naissance
––hypertension artérielle (TA ≥ 140/90 mmHg)
––HDL < 0,9 mmol/l ou triglycérides > 2,8 mmol/l
––syndrome des ovaires polykystiques
––antécédent de maladie vasculaire
––pré-diabète
——Ce dépistage sera répété tous les 3 ans, délai qui sera réduit en
fonction du résultat initial ou de l’apparition d’un ou plusieurs
facteurs de risque, 1 ×/an en cas de pré-diabète.
5. Prise en charge | Traitement1,10-22
Généralités
——Le traitement du diabète ne vise pas uniquement le contrôle glycémique. La prise en charge de tous les facteurs de risque cardiovasculaires est déterminante pour le pronostic, de même que la
prise en compte précoce des atteintes des organes cibles.
——Classiquement, le contrôle glycémique comporte trois paliers : le
traitement non médicamenteux, les antidiabétiques oraux (ADO)
et les insulines.
488
36. Diabète
Objectifs thérapeutiques
Type de mesure
Cible
HBA1c (hémoglobine glyquée)
Unité
< 7,0 (6,5-8,0)
%
Glycémie capillaire à jeun
3,9-7,2
mmol/l
Glycémie capillaire 2 h postprandiale
< 10,0
mmol/l
N.B. Cibles moins strictes chez les patients : âgés, hypoglycémiques, présentant d’importantes comorbidités ou des complications
cardiovasculaires
——Les dernières recommandations conjointes américaines et européennes reprises par les experts suisses recommandent de viser
une HbA1c < 7 % d’une manière générale et < 6,5 % chez certains
patients à faible risque d’hypoglycémie.
——Une stratégie agressive sur l’HbA1c ne montre pas de gain sur la
mortalité selon les résultats des trois plus grandes études récentes
(ACCORD, ADVANCE et VADT).
Figure 1. Objectifs thérapeutiques de l’HbA1c
en fonction des situations cliniques
« Acceptable »
« Insuffisant»
Optimal
5
Intolérance
au glucose
6
7
Diabète chez
le patient jeune,
en bonne santé
8
9
10
HbA1c (%)
Diabète avec
labilité glycémique/
complications ++,
patient gériatrique
Endocrinologie et métabolisme 489
L’autocontrôle des glycémies
——Indications :
‒‒insulinothérapie en vigueur ou en préparation,
‒‒diabète mal contrôlé sous traitement hypoglycémiant oral,
‒‒risque d’hypoglycémie sous traitement hypoglycémiant oral.
——En dehors de ces situations, la place des autocontrôles chez le
diabétique traité par hypoglycémiants oraux est actuellement
débattue. Parmi les avantages les plus souvent cités figure la
tenue d’une relation médecin-patient autour d’objectifs motivationnels et éducationnels, dont les avantages et inconvénients
doivent être évalués dans chaque cas.
——Le choix de l’appareil se portera sur un dispositif simple à utiliser, de préférence avec un affichage à gros chiffres. Le médecin a
intérêt à prescrire un dispositif qu’il connaît. Matériel disponible
en Suisse : www.diabetesgesellschaft.ch/fr/le-diabete/appareilsdautocontrole
——Les appareils les plus récents sont souvent donnés gratuitement au
médecin. Ce sont les consommables qui font le prix du dispositif.
Traitement non médicamenteux
——Alimentation équilibrée, de type méditerranéen en favorisant un
apport d’hydrates de carbone (HC) à chaque repas (environ 60 %) :
‒‒prévoir une consultation diététique en début de prise en charge,
même si un traitement d’insuline n’est pas prévu initialement,
pour sensibiliser le patient à la notion de teneur en HC des aliments ainsi qu’à la gestion des hypoglycémies ;
‒‒en cas d’insulinothérapie lente ou de traitement par sulfonylurées : ne pas sauter de repas, prévoir des collations (15 g d’HC) au
milieu de la matinée, en milieu d’après-midi et avant le coucher.
——Activité physique régulière : > 30 min d’activité physique modérée
≥ 5 ×/sem ou 20 min d’activité physique intense 3 ×/sem. Si
maladie coronarienne et projet de pratiquer une activité physique
intense : établir un programme sur la base d’une épreuve d’effort.
——Poids : idéalement viser un IMC < 25 kg/m2, pratiquement viser
une stabilisation.
——Permet de diminuer l’HbA1c de ~1-2 %
490
36. Diabète
Stratégie de prise en charge
(voir pages suivantes)
Le traitement d’insuline
Indications au traitement par insuline :
——Hyperglycémie importante (> 15 mmol/l) ou symptômes cardinaux : polyurie, polydipsie, perte pondérale, fatigue
——Contre-indication aux ADO
——Objectif glycémique et HbA1c pas atteints sous ADO ou HbA1c
≥ 8,5 %
——Infection intercurrente
——Avant et après une intervention chirurgicale (notamment chirurgie
cardiovasculaire)
——Glycémie > 15 mmol/l et traitement corticoïde
——Infarctus aigu du myocarde et jusqu’à 3 mois après l’épisode aigu
——Grossesse
Les sites d’injection
——Insuline ultrarapide : ventre, en tournant autour de l’ombilic
——Insuline basale : cuisses et fesses
Endocrinologie et métabolisme 491
492
sulfonylurée
non
Risque
sulfonylurée* ?
autre ADO
oui
oui
HbA1c
, 8,5%
metformine
non
– bilan des organes cibles
– prise en charge diététique
– conseils sur l’activité physique
Prise en charge du diabète
insuline basale
6
préprandiale
oui
bithérapie
déjà en vigueur
oui
ajout d’insuline
basale le soir
intensification
du traitement
avec
insuline basale
6
préprandiale
non
HbA1c /3 mois
+ autocontrôles
 cible
* Insuffisance rénale, risque important d’hypoglycémie, insulinorésistance sévère, etc.
non
adaptation de la dose
ou
ajout d’un ADO d’une autre classe
non
HbA1c /3 mois
 cible
oui
36. Diabète
Endocrinologie et métabolisme 493
494
Stimule la
↓ HbA1c de
sécrétion pan- ~1-2 %
créatique de
l’insuline
N.B. présence
de métabolites actifs
Stimule la
↓ HbA1c de
sécrétion pan- ~1(-2) %
créatique de
l’insuline
Sulfonylurées
Gliclazide
à libération lente
30-120 mg 1 ×/j
Glimépiride
1-4 mg/j 1 ×/j
Glibenclamide
1-4 mg/j
Glibonuride
avant le 1er repas
(gén. matin)
Glinides*
Natéglinide
60-120 mg 3 ×/j
Répaglinide
0,5 mg max 4 mg 3 ×/j
dans les 30 min
avant le repas
––Courte durée d’action
––Pas de donnée disponible sur le long
terme
Patients avec ––Bon marché
risque d’hypo- ––↓ Complications
glycémie
µvasculaires
(patients
âgés), IR (créat.
< 40ml/min), IH
––Stabilise/réduit le
IR (créat.
poids, pas d’hypogly<50ml/min),
cémies, bon marché
toute pathologie indui––↓ Complications
sant un risque
micro- et macrovasd’acidose lacculaires, prévient la
tique (IC, IR,
progression vers un
IH), éthylisme
diabète chez l’intoléchronique
rant au glucose
Avantages, effets sur
Contreindications (CI) les complications à
long terme
IR ou IH
Horaires de
sévères
repas irréguliers, hyperglycémie modérée
à prédominance
postprandiale
En association ou en cas
d’intolérance à
metformine
↓ HbA1c de Tout patient
~1-2 %
diabétique
type 2 dès le
diagnostic
Augmente la
sensibilité à
l’insuline
Impact
Indications
­glycémique typiques
potentiel
Biguanides
Metformine
500-1000 mg
1-3 ×/j
max 2-3 g/j,
à augmenter
progressivement,
pendant un repas
Mécanisme
d’action
Tableau 2. Les antidiabétiques oraux (ADO)
Hypoglycémies,
prise pondérale
(moins qu’avec
Sulfonylurées),
prix élevé, multiples prises/jour
nécessaires
Hypoglycémies,
prise pondérale
Intolérance digestive (5 %, évitable
par dosage progressif), acidose
lactique (très rare
si CI respectées),
carence en vitamine B12, doit
être pris 2 ×/jour
Effets secondaires,
Inconvénients
Stimule la
sécrétion
pancréatique
d’insuline
et inhibe la
sécrétion du
glucagon
Maladie
––Pas d’hypoglycémies
gastro-intesti- ––Pas de donnée disnale chronique, ponible sur le long
intolérance
terme
digestive à la
metformine
Prise pondérale, œdèmes, IC,
risque de fracture
chez la femme,
prix élevé
Taux élevé d’intolérance digestive, multiples
prises par jour
nécessaires
––Neutralité pondérale, Prix élevé
pas d’hypoglycémies
––Pas de donnée disponible sur le long
terme
Insulino-résisIH, IC
––Améliore le profil
tance marquée, symptomatique lipidique, pas
effet insuffisant
d’hypoglycémies,
ou intolérance à
––données limitées sur
la metformine
le long terme
Hyperglycémie
modérée à
prédominance
postprandiale
↓ HbA1c de Alternative aux Hypersensibilité
~0.5-1.0 % sulfonylurées,
particulièrement
si évitement
strict des hypoglycémies visé
Augmente la ↓ HbA1c de
sensibilité à
~0.5-1.5 %
l’insuline
N.B. délai de
2-3 mois avant
plein effet
Ralentit
↓ HbA1c de
l’absorption
~0.5-1.0 %
intestinale des
hydrates de
carbone
IR : insuffisance rénale, IH : insuffisance hépatique, IC : insuffisance cardiaque – * A titrer en fonction de l’HbA1c – ** Traitement de réserve,
en raison d’un manque de données sur la sécurité à long terme. Fait l’objet d’une limitation au remboursement par les caisses-maladie.
Inhibiteurs
de la DPP-4**
Sitagliptine
100 mg 1 ×/j
Vildagliptine
50 mg 1 ×/j
Saxagliptine
2,5-5 mg 1 ×/j
Linagliptine
5 mg 1 ×/j
indépendamment
des repas
Glitazones**
Pioglitazone
15-30 mg 1 ×/j, max.
45 mg 1 ×/j
indépendamment
des repas
Inhibiteurs de
l’alpha-glucosidase
Acarbose
50 mg 3 ×/j, max 200
mg 3 ×/j
avec les repas
Miglitol
36. Diabète
Endocrinologie et métabolisme 495
Le traitement d’insuline (suite)
22 h 00
19h 00
12 h 00
07 h 00
A. Schéma insuline basale le soir en plus des ADO
Dose de 0,2 UI/kg en dose unique le soir puis augmenter en titrant
2 U/3 j en fonction de la glycémie à jeun sous la forme de :
insuline NPH type ( ) ou
insuline détémir ( ) ou
insuline glargine ( ).
L’insuline lente glargine peut être administrée n’importe quand
dans le nycthémère. Dans ce cas, la titration des doses se fera au
moyen des glycémies en fin de dosage.
B. Schéma insuline « basal-bolus »
Insuline NPH ou analogue lente comme en A., associée à une insuline ultrarapide au moment de commencer le repas. Commencer par
4 U d’ultrarapide à titrer par paliers de 2 U en fonction des glycémies postprandiales (2 heures après le début du repas). Par exemple :
insuline lisprum ( ) ou
insuline aspartum ( ) ou
insuline glulisinum ( )
Un schéma type « basal-bolus » est typiquement choisi après échec
à maintenir une HbA1c dans la cible avec un schéma type insuline
basale le soir.
496
36. Diabète
19h 00
22 h 00
19h 00
22 h 00
12 h 00
07 h 00
Schéma insuline « basal-bolus »
12 h 00
07 h 00
C. Schéma insuline combinée
Combinaison entre insuline de type analogue intermédiaire ou
insuline NPH et insuline ultrarapide, préparation « prémélangée »
en deux injections aux repas. Par exemple :
avec insuline lisprum ( ) ou
avec insuline aspartum ( )
Endocrinologie et métabolisme 497
Démarche générale
——Commencer par un schéma simplifié de type « basal-bolus » avec
deux injections soit d’insuline NPH, soit d’un analogue lent type
insuline détémir, dose 0,3 U/kg, ⅔ matin, ⅓ soir. Augmenter en
titrant 2 U/3j la dose du soir en fonction des glycémies du matin
et 2 U/3j en fonction des glycémies avant le repas du soir.
——Ajouter une insuline ultrarapide 2 U au début du repas le matin
et le soir à titrer en fonction de la glycémie postprandiale.
——Dès que les doses correspondent, passer à une insuline « prémélangée ».
Autres antidiabétiques par voie parentérale
Analogues du GLP-1
exénatide 2 mg en SC 1 ×/semaine
liraglutide 0,6 mg en SC 1 ×/j, à augmenter progressivement
max 1,8 mg/j
——Mécanisme d’action : stimule la sécrétion d’insuline et inhibe la
sécrétion du glucagon
——Impact glycémique potentiel : diminue l’HbA1c de ~0,5-1,5 %
——Indications typiques : IMC > 28 kg/m 2, en association avec un
traitement oral (p. ex. metformine, glitazone) si perte pondérale
visée
——Contre-indications : hypersensibilité
——Avantages et effets sur les complications à long terme : réduction pondérale, pas d’effets gastro-intestinaux et centraux, pas
d’hypoglycémies. Pas de données disponibles sur le long terme.
Peuvent être pris indépendamment des repas.
——Effets secondaires et inconvénients : nausées surtout en début de
traitement, pancréatite (rares cas), doit s’injecter, prix élevé.
498
36. Diabète
6. Suivi | Complications | Pronostic 1,20-30
« Pré-diabète »
——Le pré-diabète défini par une HbA1C entre 6,0-6,5 % permet non
seulement d’identifier les personnes à risque de développer un
diabète, mais aussi celles avec une élévation du risque cardiovasculaire et une mortalité augmentée.
——Certaines interventions permettent une diminution significative
de l’incidence du diabète dans cette population à risque :
‒‒mesures hygiéno-diététiques ciblant une perte pondérale de 7 %
et une activité physique modérée (type marche) de 150 minutes
par semaine ;
‒‒suivi et conseils sur les modifications du mode de vie ;
‒‒introduction de metformine à discuter en présence d’autres
facteurs de risque de diabète en particulier si IMC > 35 kg/m2,
< 60 ans et chez les femmes avec antécédent de diabète gestationnel.
Check-list des examens de suivi du diabète
——Tableau récapitulatif (voir tableau 2)
——Visite 1 ×/j en cas d’instauration d’un traitement d’insuline
——Visite 1 ×/sem en cas d’instauration d’un traitement antidiabétique oral
——Feuille de suivi du diabète (cf. Annexe web 3c 1* : Suivi du diabète)
* A télécharger sur www.revmed.ch/compas
Endocrinologie et métabolisme 499
500
Fond d’œil
7
Cible HbA1c 6,5-8 %
––HbA1c (hémoglobine glyquée)
Profil lipidique complet
5
6
Selon les glycémies
cible : à jeun 4-7,2 mmol/l,
postprandial < 10 mmol/l
Equilibre glycémique :
––autocontrôles
4
Par un ophtalmologue
Discuter d’une statine si LDL > 2,6 mmol/l
1 ×/an
1 ×/an ou plus selon
traitement
4 ×/an
En fonction
du traitement
2 ×/an (4 ×/an si objectif
pas atteint)
Contrôle tensionnel
3
Cible 130-140/80-85 mmHg
1 x/an
a) discuter un ttt de 100 mg d’acide acétylsalicylique en prévention secondaire et en prévention primaire si le risque CV à 10 ans > 10 % a, b
b) vaccins : grippe et pneumocoque
à discuter
Visite annuelle :
––examen physique complet
––recherche d’une atteinte vasculaire
––calcul du risque CV
––bilan des vaccins
2
Fréquence
2 ×/an (4 ×/an si objectifs pas atteints)
Prise en charge/ Commentaire
a) conseils
b) entretien motivationnel
c) prise en charge paramédicale (infirmière,
diététicienne)
Examen de routine
––anamnèse tabac – alcool
––anamnèse habitudes de vie
––activité physique
1
Examens de suivi
Tableau 3. Examens de suivi du patient diabétique
Prise en charge/ Commentaire
Chez le patient asymptomatique, l’utilité de ce
test est très controversée. Il devrait être réservé
aux patients avec angor ou avec ECG pathologique
IECA (Inhibiteur de l’enzyme de conversion de
l’angiotensine) en cas de microalbuminurie et de
TA supérieure à 135/75 mmHg
a) prévention : autocontrôles, pédicure, ­chaussures
adaptées
b) prise en charge spécifique
A discuter avec le
cardiologue
1 x/an si normal 2 x/an
si pathologique
1 ×/an (sauf si constatation pathologique : à
chaque visite)
Fréquence
L’acide acétylsalicylique chez le diabétique avec faible risque cardiovasculaire (< 5 %) n’est plus recommandé en prévention primaire.
Tester les points d’appui et noter dans le dossier la présence « + » ou l’absence « – » de sensibilité lors de l’application du filament sur les
différents points testés
c
b
Le calcul du risque cardiovasculaire chez le patient diabétique peut se baser sur l’étude UKPDS à l’aide d’un programme à télécharger
(Risk Engine) : www.dtu.ox.ac.uk/ (consulté le 23.10.2012).
a
Test d’effort
Microalbuminurie (« spot urinaire » :
créatininurie et microalbuminurie)
9
10
Examen des pieds
––recherche d’atteinte cutanée
––sensibilité (test au filament c)
––status artériel
Examens de suivi
8
36. Diabète
Endocrinologie et métabolisme 501
Hypoglycémie
——Définition : glycémie capillaire < 4 mmol/l
——Symptômes : faim, vertiges, tremblements, palpitations, vue
trouble, manque de concentration, maux de tête, nervosité,
imprécision des gestes, fourmillements autour de la bouche.
——Signes : sueur, pâleur, trouble du caractère, regard fixe, perte de
connaissance, gêne pour articuler, comportement bizarre, état
semblable à l’ivresse, crise d’épilepsie.
——Correction : si la personne est consciente et peut avaler :
‒‒stopper toute activité ;
‒‒donner 15 g de sucre soit : 4 morceaux de sucre ou 1,5 dl de
« coca » normal ou de jus de fruit ;
‒‒contrôler la glycémie 10 min après.
——Si les symptômes persistent ou si la glycémie reste inférieure à
4 mmol/l :
‒‒redonner 15 g de sucre et recontrôler la glycémie après 10 minutes
et ainsi de suite ;
‒‒prendre une collation : 1 petite tranche de pain ou 2 biscottes +
du fromage ou 1 fruit en plus de la ration journalière.
——Si la personne ne peut avaler ou si elle est inconsciente :
‒‒injecter 30 ml de glucose 50 % IV ou 40 ml de glucose 40 % IV
et si une veine n’est pas facilement accessible :
glucagon 1 mg SC uniquement si correction IV impossible
Néphropathie diabétique
——Se définit par la présence persistante d’une macro-albuminurie
(excrétion urinaire d’albumine 300 mg/24 h) associée à une altération de la clairance à la créatinine en présence d’un diabète.
——La bandelette urinaire permet de mettre en évidence une protéinurie. Si c’est le cas, la recherche d’une microalbuminurie est
superflue. Il faut alors quantifier la protéinurie. Certaines bandelettes urinaires spéciales permettent également de mettre directement en évidence une microalbuminurie.
——Dépistage précoce par la microalbuminurie : > 2,5 mg/mmol chez
la femme et > 3,5 mg/mmol chez l’homme. Prélever un spot urinaire à toute heure et doser « microalbumine » et « créatinine » ;
faire le rapport :
502
36. Diabète
Microalbuminurie [mg/mmol] =
« microalbumine » [mg/l] × 1000
« créatinine » [mmol/l]
N.B. Le dépistage doit se dérouler en dehors de conditions pouvant
augmenter l’excrétion urinaire d’albumine, telles qu’une infection,
un état fébrile, un exercice physique intense, une hématurie, une
hypertension mal contrôlée et une décompensation diabétique ou
cardiaque. Tout résultat anormal doit être confirmé par au moins
deux dosages supplémentaires sur trois échantillons prélevés, sur
une période de trois à six mois.
——En cas de rapport pathologique :
‒‒objectif tensionnel : viser une TA < 130/80 mmHg ;
‒‒traitement : IECA (ou antagonistes des récepteurs de l’AT II si
le patient présente une toux comme complication du traitement
d’IECA) ;
‒‒avis néphrologique précoce dès que le débit de filtration glomérulaire est inférieur à 60 ml/min (selon MDRD) ou s’il existe
une protéinurie.
Neuropathie périphérique
Un patient diabétique sur deux présente à long terme une neuropathie périphérique :
——la polyneuropathie distale symétrique – engourdissements, sensation de froid, douleurs profondes, crampes, fourmillements,
brûlures, prédominance nocturne :
‒‒grosses fibres : trouble de la sensibilité profonde, évolution vers
une ataxie ;
‒‒petites fibres : déficit de la sensibilité thermique et douloureuse.
——Atteinte autonome : hypotension orthostatique, impuissance,
troubles mictionnels, troubles digestifs.
——Des troubles trophiques peuvent donner lieu à un mal perforant
plantaire.
——Le meilleur moyen de prévenir l’atteinte neuropathique est le
contrôle glycémique.
——Le traitement des douleurs consiste en antidépresseurs, gabapentine, tramadol, carbamazépine, anesthésiques topiques.
Endocrinologie et métabolisme 503
Le pied diabétique
Dépistage – classification
Grade
Examen clinique
Fréquence
des examens
1
Absence de trouble sensitif
1 ×/an
2
Trouble sensitif
1 ×/6 mois
3
Atteinte vasculaire ± déformation orthopédique 1 ×/3 mois
4
Antécédent d’ulcères perforants
1 ×/mois
——La mise en évidence d’une neuropathie se fait par :
‒‒le test au monofilament à appliquer à 3 endroits de la plante du
pied : le gros orteil, les articulations métacarpophalangiennes
du 1er et du 5e rayon ;
‒‒la pallesthésie sur l’articulation métacarpophalangienne
1er rayon : positif si < 4/8.
——Inciter le patient à examiner ses pieds quotidiennement.
——Décourager l’usage de « pierre ponce » et préférer un soin ciblé
par un professionnel.
——Pédicure : en Suisse, le coût d’une séance est d’environ CHF 85 et
n’est pas couvert par l’assurance-maladie de base.
——Il existe tous types de chaussures pour diabétiques en fonction
de la présence de neuropathie, d’angiopathie ou de déformation.
Une ordonnance sera rédigée à l’attention d’un bottier orthopédiste en précisant le type d’atteinte.
——En cas de déformation du pied, une chaussure sur mesure peut
être nécessaire. Dans ce cas, une contribution au remboursement
peut être demandée à l’AI ou à l’AVS selon l’âge.
——En cas de mal perforant, introduire une aiguille boutonnée dans
l’orifice. Si celle-ci arrive au contact de l’os, on admet qu’on a
affaire à une ostéomyélite. Dans ce cas, un avis chirurgical est
nécessaire pour répondre à la question du débridement. Dans le
cas contraire, la prise en charge ambulatoire est possible. Il s’agit
de faire une radiographie de départ. La nécessité de pratiquer un
frottis bactérien est débattue ; il peut être effectué avant la première cure antibiotique.
504
36. Diabète
Conduite automobile
Conditions usuelles pour la conduite automobile des patients diabétiques à risque d’hypoglycémie
1
Mesurer sa glycémie avant de prendre le volant, et ne pas conduire si
la glycémie est inférieure à 5 mmol/l. Dans ce cas, la glycémie doit être
­corrigée par un apport de 20 grammes de sucre à absorption rapide
(p. ex. 4 morceaux de sucre) et contrôlée après 20 minutes.
2
Ne pas conduire dans les 30 minutes qui suivent une correction
d’hypoglycémie.
3
Ne pas s’injecter d’insuline rapide avant la prise de volant,
même en cas de glycémie élevée (délai à discuter).
4
Avoir toujours 20 grammes de sucre à absorption rapide à portée
de main.
5
S’arrêter en cas de sensation d’hypoglycémie et ingérer aussitôt
20 grammes de sucre à absorption rapide.
6
Lors de longs trajets, faire une pause toutes les 60 à 90 minutes et
contrôler la glycémie.
——En cas de traitements avec possible risque d’hypoglycémie (insuline, sulfonylurée, glinides) et conduite professionnelle, demander
un avis au médecin-conseil de l’autorité compétente en matière
de délivrance, retrait et restitution du permis de conduire.
——Pas de conduite en cas de mauvaise compliance et de risque d’hypoglycémie.
Adaptation en cas d’examen ou d’opération
——Patient sous ADO devant rester à jeun : ne pas administrer la
dose du matin
——Patient sous insuline devant rester à jeun : administrer une demidose de l’insuline lente matinale habituelle et ne pas administrer
l’insuline rapide.
——En cas d’examen avec produit de contraste, il existe un risque
d’insuffisance rénale aiguë (IRA). Stopper la metformine 24 h
avant et assurer une bonne hydratation.
Endocrinologie et métabolisme 505
7. Message
›› La prise en charge du « pré-diabète » et du diabète chez les
personnes en excès pondéral repose en premier lieu sur une
modification du style de vie, portant sur l’alimentation et
l’exercice physique.
›› La place et surtout l’intensité du traitement hypoglycémiant
sont sujettes à polémique. La cible thérapeutique de même
que l’approche thérapeutique doivent être choisies en fonction du contexte du patient et notamment en fonction du
risque d’hypoglycémie.
›› Le traitement de l’hypertension artérielle et des dyslipidémies est une priorité chez le patient diabétique.
›› Un traitement par acide acétylsalicylique est introduit sur la
base d’une estimation individuelle de la balance risque/bénéfice,
en particulier si le risque cardiovasculaire dépasse 10 % à 10 ans.
8. Références bibliographiques | Liens
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