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POSITIF
Revue mensuelle de cinéma
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CPPAP en cours d’attribution - ISSN 0048-4911
N°629-630 juillet-août 2013
Photo de couverture :
Silvana Mangano dans Riz amer
de Giuseppe De Santis
ÉDITORIAL
Culture et mise en condition
Le lancement médiatique de Gatsby le magnifique, réalisé de main de maître, est un
cas d’école et ses retombées correspondent aux attentes : 800 000 spectateurs en une
semaine. Nous n’avons pas la naïveté de croire qu’il n’y a pas eu de précédent, mais
la précision de la démarche, l’absence de faux pas, les retombées attendues en font
un exemple parfait du rapport instauré entre les grands distributeurs et les agents de
la presse cinématographique. Premier temps : un accord avec le festival de Cannes
pour l’ouverture de la manifestation, la présence d’une star de renommée mondiale,
Leonardo DiCaprio, et celle d’un réalisateur dans le vent, Baz Luhrmann, qui avait
inauguré naguère le festival avec Moulin Rouge !, le prestige d’un auteur canonique,
Francis Scott Fitzgerald, le luxe de la production, tout concourait pour ce choix.
Deuxième temps : pour éviter l’impact qu’aurait une critique négative sur la sortie du
film aux États-Unis, les distributeurs décident de le programmer une semaine avant sa
présentation sur la Croisette. Troisième temps : comment pour Warner Bros. France
écarter les quelques tribunes qui exercent encore un regard critique, si minime que soit
leur influence réelle sur les entrées des blockbusters (Télérama, Les Inrocks, Libération,
les Cahiers du cinéma, Positif) ? Pour ce qui nous concerne, la Warner (avec laquelle
nous entretenons d’ordinaire les meilleures relations, surtout pour notre vigoureux
soutien à certains de leurs réalisateurs comme Tim Burton ou Clint Eastwood) nous
annonce « dans le blanc des yeux » une dizaine de jours avant la présentation cannoise
que le film est invisible, que Baz Luhrmann travaille encore sur le mixage et que la
branche française de la compagnie elle-même ne l’a pas vu. Cet écran de fumée se
dissipe très vite quand on découvre dans nombre de supports des entretiens avec
le réalisateur et sa vedette réalisés après de projections du film à New York, où ont
été acheminés quelques journalistes triés sur le volet. La crise de la presse aidant, il
n’est pas négligeable d’attirer les lecteurs par une affiche aussi spectaculaire même si,
dans certains cas, le film n’a pas été vu (il existe des bandes-annonces et des dossiers
de presse). Pour ces spectateurs privilégiés, il est aisé de se convaincre sincèrement
(vertu de l’autosuggestion !) d’être en face d’une œuvre majeure qui justifie des articles
dithyrambiques et un espace imposant. Quelle ne fut pas leur surprise de découvrir
quelques jours plus tard, après les deux séances de presse cannoises, l’accueil plutôt
sceptique de l’écrasante majorité de leurs confrères. Pour nous en particulier, après le
refus de nous montrer Only God Forgives de Nicolas Winding Refn (un cinéaste que
nous avons toujours défendu), cette pratique est extrêmement dommageable puisque,
pour les films qui sont projetés simultanément en France pendant le festival, nos
lecteurs ne sont informés de notre opinion que six semaines après leur sortie en salle.
Sous le titre « Malaise général », notre confrère Alex Masson a donné un entretien
à l’Annuel du cinéma (Fiches du cinéma éditeur) qui est un vrai pavé dans la mare et
n’a pas manqué de faire des vagues dans le landernau de la critique cinématographique. Il y fait écho au livre blanc qu’a entrepris le Syndicat français de la critique
sur l’évolution de notre profession, la presse étant devenue davantage un instrument
de marketing qu’un élément critique. Il révèle que Sony, par exemple, invite tous les
ans des journalistes à Cancun (Mexique) pour leur montrer des bandes-annonces
de films non encore terminés afin qu’ils réalisent des entretiens avec les artistes qui
seront mis en boîte pour être publiés dans les douze mois à venir, quelle que soit la
qualité de l’œuvre.
Cette sur-médiatisation de certains films se fait au détriment de la masse des sorties,
entre 600 et 650 par an. L’euphorie cannoise passée, combien d’œuvres présentées
par le festival ne sortiront que dans quelques salles, jamais évoquées à la télévision,
ignorées de la presse en général hormis quelques supports. Ainsi Post tenebras lux de
Carlos Reygadas, malgré son prix de la mise en scène cannois en 2012 (mais assez mal
accueilli par la presse il est vrai), n’a rassemblé à Paris que 1 830 spectateurs en cinq
semaines dans deux salles ! Cette uniformisation de l’information bien sûr ne contribue pas à stimuler la curiosité des spectateurs et Alex Masson n’a pas tort de voir,
dans la décision de MK2 (qui a tant fait pour le cinéma d’auteur) de réduire considérablement sa production et de confier à Diaphana la distribution de ses films, un
geste symbolique. Les puissants sont de plus en plus puissants et les faibles de plus en
plus faibles, à l’image de notre société. Les premiers, semblables à nos hommes politiques, considèrent les représentants de la presse indépendante comme des gêneurs ;
les seconds, petits producteurs, distributeurs, festivals, comme des soutiens plus que
jamais nécessaires.
Ce numéro confirme notre politique de toujours en accordant une place de choix à
un deuxième film français, Grand Central de Rebecca Zlotowski, en rendant compte
de la quasi-totalité des films présentés à Cannes et, pour notre dossier spécial, en liant
le passé et le présent à travers le prisme du néoréalisme. L’héritage de ce mouvement
s’est retrouvé de nombreuses fois sur les écrans de Cannes avec, entre autres, des films
comme Tel père, tel fils, La jaula de oro, Grigris, Le Géant égoïste et… Grand Central.
Michel Ciment

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