maguy marin - Comédie de Clermont

Transcription

maguy marin - Comédie de Clermont
MAY B
MAGUY MARIN
mercredi 1er et jeudi 2 avril à 20:30
maison de la culture salle Jean Cocteau
durée 1 heure 30
CONTACT PRESSE : Émilie Fernandez – Tél. 0473.170.183 – [email protected]
1
Coproduction Compagnie
Maguy Marin, Maison des arts
et de la culture de Créteil.
La compagnie Maguy Marin
est subventionnée par le
ministère de la Culture et
de la Communication, la
Ville de Toulouse, la région
Midi-Pyrénées et reçoit l’aide
de l’Institut français pour ses
projets à l’étranger.
Chorégraphie Maguy Marin
Avec Ulises Alvarez, Kaïs
Chouibi, Laura Frigato,
Florence Girardon/Johanna
Moaligou/Cathy Polo,
Daphné Koutsafti, Françoise
Leick, Cécile Laloy, Pierre
Pontvianne/Rolando Rindo
Rocha, Ennio Sammarco,
Marcelo Sepulveda Rossel
Crédits
Illustration de couverture
Antoine+Manuel
Photographies du spectacle
Claude Bricage
Spectacle créé en
novembre 1981 au
Théâtre Municipal
d’Angers
Musiques originales
Franz Schubert,
Gilles de Binche,
Gavin Bryars
Direction technique et
lumière Alexandre Béneteaud
Costumes Louise Marin
ÉMISSION BOUCHE À OREILLE # 4
Spéciale May B avec Maguy Marin
Nouveau rendez-vous média de la Comédie,
Bouche à oreille est la webradio dédiée à la programmation.
Enregistrement en public
jeudi 2 avril de 18:00 à 19:00
à la librairie Les Volcans, en partenairiat.
Venez nombreux réagir au micro d’Olivier Perrot !
En écoute et en podcast sur www.lacomediedeclermont.com
Pour rejoindre la page de l’émission, flashez ce code :
2
Un monument de danse, intemporel et saisissant.
—
Clodos célestes ou fées embourbées, dix corps aux visages
blafards dansent. Ils racontent la drôlerie de l’impossibilité
d’être ensemble. Ils se meuvent dans l’incapacité tragique à
rester seul. Référence de la danse contemporaine créée en 1981,
May B est imprégné par l’univers beckettien et les tentatives
désespérées de ses personnages à tisser des liens.
Toujours aussi saisissant, ce ballet tragique pour 10 danseurs
chorégraphié d’après les textes de Samuel Beckett par Maguy
Marin enchante depuis plus de 30 ans en abolissant l’habituelle
distinction entre danse et théâtre et n’a rien perdu de sa
force. May B est en passe de devenir une pièce d’anthologie
incontournable. Dix clowns aux visages enfarinés et aux
épaules voûtées forment une masse mouvante qui tente de
cohabiter tant bien que mal dans l’absurdité de la vie.
Ce joyau du répertoire est à (re)voir à la Comédie de Clermont.
leur visage crayeux, leur mesquinerie, leur
cruelle vulgarité, leurs risibles essoufflements, leurs obsessions. Et encore moins
peut-être, la mort qu’ils croyaient fuir
alors qu’ils pataugeaient dans son giron. La
danse n’était pas faite pour montrer ça ni
pour le dire. Et puis tout a changé. May
B s’est peu à peu imposé à des publics de
plus en plus nombreux, qui apprenaient
de leur côté à regarder une danse contemporaine devenue effervescente. Et tandis
qu’ils apprenaient à regarder, ces publics
ont appris à comparer, à critiquer. Ainsi se
fabrique en temps réel l’histoire d’un art.
Quelque trente-cinq ans plus tard, il n’est
pas exagéré de dire que May B appartient
au public pour toujours.
Il n’y a guère de spectacles dont on puisse
dire sans risquer le ridicule qu’ils sont
devenus légendaires. Créé en 1981, May B
est du nombre. Avec lui, Maguy Marin a
donné à une danse contemporaine française
encore hésitante, un propos, un horizon
possibles. À l’égal du comédien, le danseur
allait pouvoir exprimer, esthétiquement,
politiquement, avec ses propres ressources,
sa technique, son corps en mouvement
dans l’espace et le temps, la crudité de la
condition humaine. Il allait pouvoir ici en
réinventer le tragique. Ce pourrait être
l’une des tâches de la danse. En Allemagne,
quelques années plus tôt, Pina Bausch
n’avait pas fait autre chose en créant le
Tanztheater. Inspiré par l’écriture de
Samuel Beckett, May B, avant de s’imposer
au public comme une évidence, un classique, l’a d’abord choqué. On n’aimait pas
ses personnages sans qualité, mal attifés,
Pour la Comédie de Clermont-Ferrand
© Daniel Conrod, printemps 2014
3
ÉCLAIRAGE
Incontestablement l’une des pièces-phares de
la danse contemporaine. Mais aussi, le spectacle
best-seller de la chorégraphe Maguy Marin.
Créé en 1981, au théâtre d’Angers, May B met
en scène une chenille de dix humains défigurés
qui hoquètent et tremblotent, vision cruelle
et lucide de l’humain. Inspirée par l’œuvre de
Samuel Beckett, cette saga tragique, entre danse
et théâtre, fait grimper le nom de Maguy Marin
(née en 1951) en haut de l’affiche.
Si les réactions du public sont très réservées,
voire hostiles au début - les salles se vident
devant cette danse macabre -, elles basculent peu
à peu. Loin de la tendance abstraite américaine
à la mode, l’écriture expressive et acérée de
Maguy Marin sonne singulièrement crue et
réaliste. Trois ans après la création, les directeurs
de théâtre commencent à programmer le
spectacle. Depuis, le succès de May B n’a jamais
faibli. Régulièrement repris par la compagnie, la
pièce est devenue le code d’accès à l’univers de
Maguy Marin. Une cinquantaine de danseurs
ont interprété May B depuis 1981. Ulises
Alvarez, présent sur le plateau dès 1983, le
transmet aujourd’hui aux nouveaux venus.
Régulièrement, la chorégraphe elle-même se
joint à ses danseurs pour retrouver en quelque
sorte ses fondamentaux et conserver le contact
avec sa compagnie.
D’un point de vue économique, cette pièce
est aussi le garde-fou de la troupe, assurant
des rentrées financières importantes. Au point
que Maguy Marin a suspendu trois fois sa
production pour ne pas se laisser piéger dans
une seule œuvre. Au point aussi où, lorsque la
compagnie a besoin d’argent, elle la reprenne
immédiatement. Quarante et un pays des cinq
continents ont vu passer May B qui a été dansé
quelque cinq cents fois en trente ans.
A l’origine de May B, il y a la passion de lectrice
de Maguy Marin. Bouleversée par l’œuvre de
Samuel Beckett, elle rêve pendant des années
d’un spectacle autour de l’écrivain. Après un
rendez-vous avec Paul Puaux, du Festival
d’Avignon, en décembre 1980, elle passe à l’acte
et conçoit en une heure les grands motifs de son
futur spectacle. Elle décide de rencontrer Samuel
Beckett, alors âgé de 75 ans, pour évoquer
son projet. Beckett la soulage de l’obligation
d’utiliser des textes et lui glisse un conseil :
prendre toutes les libertés avec son œuvre.
May B, dont le titre évoque une pièce écrite par
Beckett adolescent, correspond aussi au prénom
de la mère de l’écrivain et à son nom réduit à
une seule lettre. Avec May B, Maguy Marin est
devenue l’une des figures emblématiques de la
danse contemporaine française dans le monde
entier.
D’origine espagnole, Maguy Marin (née en
1951) a fait ses apprentissages à l’école Mudra
de Maurice Béjart, à Bruxelles. Interprète au
Ballet du XXe siècle dirigé par Béjart, elle fonde
une première compagnie avec Daniel Ambash
et décroche un prix au Concours de Bagnolet
en 1978 avec Nieblas de Nino sur des mélodies
populaires espagnoles. Installée à la Maison des
arts de Créteil, entre 1980 et 1990, sa compagnie
devient Centre chorégraphique national en
1985. Avec le musicien et compositeur Denis
Mariotte depuis 1987, Maguy Marin creuse une
langue très personnelle, fouillant le geste et les
sons du corps, la danse et le texte, la musique
live, en se cherchant des alliés du côté de la
littérature.
Installée depuis 1998 à Rillieux-la-Pape,
en banlieue lyonnaise, elle est redevenue
compagnie indépendante depuis 2011, date à
laquelle elle décide de quitter la direction du
Centre chorégraphique. Depuis 1976, Maguy
Marin a réalisé plus d’une quarantaine de
spectacles. Collaborant parfois avec des troupes
autres que la sienne comme l’Opéra de Paris ou
le Het Nationaal Ballet Amsterdam, elle a mis en
scène une version de Cendrillon (1985), succès
international, et de Coppélia (1993) pour le
Ballet de l’Opéra de Lyon.
Par Rosita Boisseau
4
May B (« peut-être ») bouleverse encore les codes
en vigueur, réconcilie théâtre et danse, marque
l’histoire des arts vivants par la grâce d’un
spectacle essentiel, mythique.
LA PRESSE EN PARLE
« Il y a des pièces historiques. May B, chorégraphiée en 1981 par Maguy
Marin, en est une. Qui plus est, elle n’a pas pris une ride depuis sa
création. Un troupeau d’humains crayeux en chemise de nuit erre sur le
plateau. Cette chenille de vieilles choses, où l’on ne reconnaît quasiment
ni les hommes ni les femmes, traîne la patte dans un dénuement absolu.
Inspirée par Samuel Beckett, May B, pièce majeure de Maguy Marin,
condense une certaine idée de la danse-théâtre à la française. Il faut voir
et revoir cette implacable ronde dont la litanie touche au plus juste de
l’absurdité humaine. Un monument comme il y en a peu. »
Rosita Boisseau, TTT Télérama
«Il faut dire que ce ballet qui a tant marqué la danse française fut donné
plus de 500 fois ici et ailleurs. […] Intemporel, May B ne vieillira jamais.»
Philippe Noisette, Les Échos, 2006
LIRE, ÉCOUTER, VOIR
PAR LES ARTISTES DE LA SAISON
Les choix de Maguy Marin
Livres
• Survivance des lucioles de Georges Didi-Huberman, 2009
• L’Espèce humaine de Robert Antelme, 1957
• Francis Bacon, logique de la sensation de Gilles Deleuze, 2002
Musique
• Winterreise (Voyage d’hiver), lied pour piano et voix de Franz Schubert, 1827
• La Jeune fille et la mort quatuor à cordes n°14 de Franz Schubert, 1824
• La Grande fugue pour quatuor à cordes de Ludwig van Beethoven, 1824-1825
Films
• La Rage de Pier Paolo Pasolini, 1963
• L’Incroyable vérité de Hal Hartley, 1990
• Une visite au Louvre (documentaire) de Jean-Marie Straub et Danièle Huillet, 2004
5
6
LA COURSE DE LA VIE
la Velette. Avec la nécessité de reprendre place
dans l’espace public. Un croisement de présences
qui agit dans un espace commun : Un « nous, en
temps et lieu ». Ainsi chercher en ce lieu la distance
nécessaire pour renforcer notre capacité à faire
surgir « ces forces diagonales résistantes à l’oubli »
(Hannah Arendt).
Le travail se poursuit dans une pluralité de
territoires - du Studio, au quartier de la Velette,
aux villes partenaires, jusqu’aux villes d’autres
pays. Un travail où s’entremêlent des créations,
des interventions multiples où l’exigence artistique
ouvre des pistes qui dépassent le désir convivial
immédiat d’un être ensemble. Avec l’arrivée en
2006 d’un nouveau bâtiment - pour le ccn de
Rillieux-la-Pape. Un lieu à habiter et
à co-habiter, un laboratoire citoyen qu’est l’art de
la scène destiné aux regards de la cité pour qu’ait
lieu le geste d’une poétique publique. Faire que
se fabrique et s’exprime par l’adresse publique,
de lieux en lieux, de villes en villes, de pays en
pays, la part d’existence que l’art nous renvoie.
Et par-delà ces multiples endroits, partager les
moyens, les outils, les expériences et les actions.
Croiser les champs artistiques, créer, soutenir des
recherches, ancrer des actes artistiques dans divers
espaces de vie sociale, des écoles aux théâtres,
des centres d’art aux centres sociaux, des espaces
publics aux habitations ouvertes, des lieux de
recherches aux maisons de quartier en faisant vivre
le geste artistique comme puissance poétique du
faire et du refaire les mondes. L’année 2011 sera
celle d’une remise en chantier des modalités dans
lesquelles s’effectuent la réflexion et le travail de la
compagnie. Après l’intensité de ces années passées
au CCN de Rillieux-la-Pape, s’ouvre la nécessité
d’une nouvelle étape à partir d’un ancrage dans
la ville de Toulouse, dont l’accueil permettra
de continuer àouvrir l’espace immatériel d’un
commun qui cherche obstinément à s’exercer.
Il y a un lieu de naissance, autre qu’une ville.
Toulouse. Un emplacement atteint suite à une série
de déplacements provoqués par des mouvements
politiques en Espagne. Ainsi, grandir par là, en
France, au tout début des années 50. Puis il y a un
désir de danser qui se confirme par un enchaînement
d’études – de Toulouse, à Strasbourg puis à
Mudra (Bruxelles) Maurice Béjart, Alfons Goris et
Fernand Schirren… dans lequel se manifestent déjà
des rencontres : les étudiants acteurs du Théâtre
national de Strasbourg. Une volonté qui s’affirme
avec le groupe Chandra puis au Ballet du XXe
siècle. Le travail de création s’amorce aux côtés
de Daniel Ambash, et les concours de Nyon et de
Bagnolet (1978) viennent appuyer cet élan.
Faire à plusieurs
De 1980 à 1990, portée par la confiance de l’équipe
de la Maison des arts de Créteil, la recherche se
poursuit avec Christiane Glik, Luna Bloomfield,
Mychel Lecoq et la complicité de Montserrat
Casanova. Une troupe se constitue renforcée par
Cathy Polo, Françoise Leick, Ulises Alvarez, Teresa
Cunha, et bien d’autres encore. Chercher toujours,
avec une composante, une compagnie qui deviendra
en 1985 le Centre chorégraphique national de
Créteil et du Val-de-Marne. Une tentative de
travailler à plusieurs et pouvoir en vivre, soutenue
par une intense diffusion de par le monde. En
1987, la rencontre avec Denis Mariotte amorce
une collaboration décisive qui ouvre le champ des
expériences. Les points de vue commencent à se
décaler et se prolongent de manière à approfondir
un questionnement mutuel, un entretien à bâtons
rompus sans cesse en mutations et contradictions
hors des cadres d’un champ artistique spécifique.
Après de nombreuses pièces nées de cette réflexion,
ce dialogue prendra, en 2004, la forme d’un duo
intitulé Ça quand même.
Maguy Marin sur la compagnie.
Faire - défaire - refaire
1998, une nouvelle implantation. Un nouveau
territoire pour un nouveau Centre chorégraphique
national à Rillieux-la-Pape, dans le quartier de
7
8
MAY BE AUJOURD’HUI
sont résorbés dans une masse qui se constitue
en fable matricielle, longue fable matricielle
d’errances du corps et surtout des corps-àcorps pour un nouvel itinéraire de reprises et de
répétitions. Il faut insister sur cette matriarcalité
matricielle de la fable et de l’affabulation –
­ cela
semble aller de pair avec ce que Maguy Marin
dit quand elle parle de « couches » – qui profère
toutes les gammes de son oralité et oppose
les fécondations d’un registre « matrimonial »
aux silences drapés et scellés d’un régime
« patrimonial » ; matriarcalité matricielle de la
fable dont le projet intime et attendri est celui
de s’exclure du pouvoir de l’histoire pour
épouser la douceur des fables de l’errance dans
des patch-works de continuités qui enfantent.
D’autre part, la scansion rhapsodique est prise
en charge par le questionnement posé à la
danse, transformée en une sorte de maïeutique
complexe : partant de sons gutturaux et palataux,
de souffles et de hâlètements, mais surtout
d’un pas « frotté » et d’un corps « frottant »
qui cherchent et mesurent leurs scansions
dans l’adhérence la plus marquée possible avec
leur sol de poussières, les corps arrachent à la
lenteur et à l’hésitation originaires des élans
et des tensions nouvelles, qui se découvrent
dans les mouvements d’élasticité produits par
l’emballement d’un seul corps globalement
collectif qui avance comme une horde contre
toute parade du corps singulier.
Linéarité extravertie du « danser » , où la
prolongation de gestes jamais exténués énonce
une sorte de clarté rayonnante qui n’arrête pas
de se dire et de se faire chair, rendant à la chair sa
pureté préverbale - malgré l’apparente carapace
des épidermes. Au point que la multiplicité de
récitatifs des gestes efface les notions d’espace
et de temps, propres à l’histoire, pour ne
s’ancrer que dans la parade des démonstrations
dans l’espace et le temps simples du plateau.
La dramaturgie de la danse finit ainsi par
questionner la dramaturgie elle-même, lui
May B est un récit lointain, reculé, surgi d’un
temps sans époque, d’une vie sans ordre ni
mesure, d’une tension enfouie dans les rêveries
de l’étrange, sans mémoire, sans histoire. Les
danseurs, issus d’une scène du crétacé, êtres
cavernicoles d’un monde que nous percevons
comme étant nôtre parce qu’il appartient à nos
fibres plus encore qu’à nos cultures, retracent
une histoire de géologie mêlée de généalogie.
Mais ce « raconter » n’est pas narratif, il ne
décrit que des intuitions, des inductions, il
saisit la multiplication des gestes – les uns après
les autres – du passage et de la reconnaissance
d’un non-tout à fait humain vers la constitution
de l’homme : comment s’arracher lentement
d’une masse inexpressive et méfiante d’argile,
de plâtre, de déchets essayant d’aboutir à une
formidable conformation prête, peut-être, à
entrer dans l’histoire.
La force et la puissance de May B restent
intactes dans cette capacité – qui peut paraître
aujourd’hui invraisemblable – de raconter des
histoires de brisures constitutives, de mises au
monde et d’enfance, de grognements et de
hurlements aboutissant dans l’arc de son récit
à la reconstitution d’une parade parfaitement
expressionniste.
May B épouse d’un seul geste – anti théâtral
par son extrême théâtralisation même –
la cassure d’une esthétique et ramène sur le
devant de la scène le devenir de sa nouvelle
expression : les corps alignés qui se déchaussent
et se parent d’une nouvelle carapace soulignent,
à l’intérieur de l’oeuvre, le rebondissement vers
un ailleurs infiniment répété, infiniment morcelé
dans lequel ils s’engagent.
Force et puissance viennent de quelques motifs
essentiels : d’une part, la volonté d’exclure la
continuité narrative et la fondation récitative
dans une logique resserrée de l’accomplissement
et de lui préférer, plus encore que le rythme
ordonné,
les
cadences
d’un
parcours
rhapsodique. Tentatives et efforts descriptifs
10
dans une hilarité féroce.
May B – probablement, sans doute, peut être.
Mimant l’hésitation – ou façonnant, plus
vraisemblablement, un nouveau mode expressif
de l’hésitation comme véritable outil et matériau
de travail – cette grande œuvre se détournait dès
sa naissance de toute stagnation existentialiste
et empruntait de nouvelles circulations. En
s’écartant de l’horizon étroit des abstractions,
trop elliptiques et distantes, en s’investissant
dans une dimension matériellement tout
aussi plastique, l’élaboration s’engageait dans
une formulation plus politique du lyrisme –
minoré, dans le cas de May B, par sa contreface « grotesque » : car c’est bien des grottes
dont nous sommes qu’échouent sur scène ces
personnages rocheux et excrémentiels, plongés
dans les surprises de leur événement d’humains.
Et inscrire en même temps, dans l’invention de
cette forme lyrico-grotesque, le renouvellement
de ce quelque chose qui est “danser”, en gardant
devant soi tous les possibles dont “danser”
lui-même dispose, les replacer comme un jeu
et jouer jusqu’à traîner enfin la danse dans la
danse. Et le voyage par lequel s’achève l’action
rassemble dans quelques valises la rouille de
l’histoire de chacun partant vers une destination
sans destin, comme la litanie de Gavin Bryars,
répétée à l’infini dans un bredouillement
plaintif, recolle et redistribue toutes les cassures
: les danseurs renvoient à chacun des spectateurs
l’image rêveuse des Eldorados et des Terres
promises, ainsi que les solutions possibles d’une
histoire noyée dans son « final » .
offrant ses tensions non comme architecture
mais comme pluralité de lignes dessinées d’où
faire surgir un dionysiaque très particulier qui
se pose, dépose et dépossède : ça prend et ça
lâche, ça ôte, ça pousse vers la joie et l’allégresse
au lieu de décourager dans la plongée et
l’affirmation des tristesses toujours aux aguets.
Le dionysiaque comme manière de façonner
inlassablement la continuité d’émotion et de
commotion rattrapées par la queue endiablée de
l’humour.
L’élément musical qui sert de base sonore offre
à travers quelques incises – un lied au début, des
citations de Schubert, un second lied au milieu,
un troisième à la fin, c’est-à-dire des chants qui
surgissent d’un territoire parcouru – offre de
simples points de démarcation, comme autant
de haltes dans les moments de la fable. En
réalité, tout comme le rhapsodique joue contre
la textualité narrative, c’est à travers la reprise et
la répétition de deux grands motifs musicaux que
« danser » épouse ses cadences et ses vibrations
: à la rhapsodie correspond alors un refrain de
litanie, une sorte de stillation constante, un
marquage, un battement du cœur, mais aussi
une façon de dire ce qui est inépuisable, comme
la fable, la fable de la vie, de même que la marche
et sa répétition remodèlent les corps dans leurs
traversées vers l’acte de danser. Danser est alors
l’agencement d’un jeu complexe des corps,
eux-mêmes boîtes à jouets, sachant scander la
totalité dans des précisions minutieuses où tout
ce qui, à proprement parler, n’est pas fait pour
la danse commence à danser : le moment le plus
singulier de cette démonstration est sans doute
celui où toutes les dents se mettent à danser
« May B aujourd’hui », par Jean-Paul Manganaro
POUR ALLER PLUS LOIN
Bibliographie autour de May B proposée par Maguy Marin
De Samuel Beckett
• Fin de partie • En attendant Godot
• Molloy • Malone meurt
• L’innommable • Mal vu, mal dit
et aussi
• Le Geste et la parole dans le théatre de Samuel Beckett de Michèle Foucre
11
12
LES SPECTACLES À VENIR
ET PENDANT CE TEMPS-LÀ !
boom’structur et la Comédie
font une…
PAUSE
Du 31 mars au 2 avril
3 conférences
2 ateliers
1 performance
Avec Julien Fournet, Sébastien Vial,
Pamina de Coulon et l’aimable
participation de Maguy Marin.
Au total, 6 modules pédagogiques, ludiques
et esthétiques pour aborder la question des
mutations de la production artistique.
Programme à composer !
www.boomstructur.fr
CARTE BLANCHE
À OSCAR BIANCHI
Orchestre d’Auvergne
9 avril à 20:30
Opéra-théâtre
© Philippe Stirnweiss
L’Orchestre d’Auvergne accompagne
le compositeur Oscar Bianchi pour une
carte blanche très actuelle, tout en nuances.
Au programme, quatre compositeurs :
Hugues Dufour, Yotam Haber, Fausto
Romitelli, Tristan Murail, ainsi qu’une
création d’Oscar Bianchi.
FIRE OF EMOTIONS
de et par Pamina de Coulon
jeudi 2 avril à 19:00
Maison de la culture salle Boris-Vian
Pamina de Coulon, artiste suisse installée
à Bruxelles, développe une pratique de la
performance de la narration, à la croisée de
la chronique, du stand-up et du storytelling
anglo-saxon.
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