maroc - EACEA

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maroc - EACEA
MAROC
Fiche pays Union pour la Méditerranée
Juillet 2013
Table des matières
Principales caractéristiques démographiques et économiques .......................................................3
Principaux développements politiques .............................................................................................4
Avancées en matière d'éducation et de formation ...........................................................................5
Tendances et défis du marché du travail .........................................................................................6
Impact des politiques en matière d'emploi .......................................................................................7
MAROC | 02
MAROC: FICHE PAYS
UNION POUR LA MÉDITERRANÉE
Principales caractéristiques démographiques et économiques
Le Maroc compte une population de 32,6 millions d’habitants en 2012 et est caractérisé par un double
1
processus de transition – démographique et économique . La transition démographique a été
déterminée par un taux de croissance élevé, dû à une réduction de la mortalité, un allongement de
l’espérance de vie (de 47 ans en 1962 à 74,8 ans en 2010) et une baisse de la fécondité (de
7,2 enfants par femme en 1962 à 2,3 en 2010). Au cours des 30 dernières années, la population
active (15-64 ans) est passée de 10,5 millions en 1982 à 11,6 millions en 2012. Globalement, la
population est en majorité urbaine (60 %) et jeune (45,2 % entre 15 et 29 ans).
Le Maroc est historiquement un pays d’émigration: les données officielles indiquent que 3 millions de
marocains (9,3 % de la population) résident à l’étranger (surtout en France, en Italie et en Espagne),
mais on estime que les chiffres réels sont beaucoup plus élevés (le chiffre le plus proche de la réalité
serait de 4,5 millions de personnes). L’émigration revêt un rôle socioéconomique important dans le
pays, les transferts de résidents à l’étranger représentant l’une des sources les plus importantes de
revenus du pays (6,4 millions USD en 2010, près de 10 % du PIB national).
La population du Maroc est caractérisée par un niveau de qualifications assez faible, avec 30,7 % de
2
la population active sans diplôme et 26,5 % avec un niveau scolaire primaire . En dépit des efforts du
gouvernement, le taux d’alphabétisation, qui a augmenté sensiblement au cours des dernières
décennies, reste très bas (56,1 % des personnes âgées de 15 ans et plus pour la période 2005-10),
ème
ce qui contribue à positionner le Maroc à la 130 place sur 186 dans l’Indice de développent humain
3
du PNUD . Le problème du faible niveau d’éducation et de l’analphabétisme concerne tout
particulièrement le milieu rural, les femmes et la population plus âgée. L’analphabétisme crée un
cercle vicieux de pauvreté, de faible productivité et de travail de mauvaise qualité.
Sur le plan social, le taux de pauvreté et de vulnérabilité de la population est en train de baisser mais
les inégalités restent très importantes: les salaires de la population urbaine sont beaucoup plus élevés
qu’en milieu rural et les disparités entre les plus riches et les plus pauvres demeurent importantes
(20 % de la population la plus riche dispose de 52,6 % des revenus et 20 % de la population la plus
4
pauvre ne dispose que de 5,4 % des revenus ). Pour ce qui est de l’inégalité entre les sexes, selon le
Forum économique mondial la parité entre hommes et femmes est loin d’être atteinte, le Maroc se
ème
classant à la 129
place sur 135 en 2012 (dernière position parmi les pays du Maghreb et du
Mashrek).
Sur le plan économique, la politique de libéralisation, les partenariats et les accords de libre-échange
conclus au cours des deux dernières décennies, et l’appui à certains secteurs ont favorisé la
croissance économique du pays qui est passé d’un taux de croissance de 2,2 % pendant les
années 90 à 4,9 % en 2011. La crise globale semble être arrivée en 2012 quand le taux de croissance
5
6
est tombé à 2,9 % , avec un produit intérieur brut (PIB) par habitant de 3 085 USD prix courants .
1
Haut-Commissariat au Plan, Direction de la statistique, enquête nationale sur l’emploi, 2012
2
Ibid.
3
Programme des Nations unies pour le développement, Rapport du développement humain 2012:
http://hdr.undp.org/en/media/HDR_2011_FR_Complete.pdf
4
Haut-Commissariat au Plan, Direction de la statistique
5
Donnée estimée par le Fonds monétaire international, base de données World Economic Outlook, avril 2013
6
Ibid.
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L’économie dépend fortement du secteur de l’agriculture, qui représente encore une part importante
7
8
du PIB (15 % ) et qui a employé 39,8 % de la population en 2011 . Les secteurs de l’agriculture et du
bâtiment et des travaux publics représentent encore les secteurs principaux de l’économie nationale
bien que participant de manière très limitée à la création directe et indirecte d’emplois. Cette structure
explique la prédominance d’emplois de faible niveau et un taux de productivité assez limité par rapport
aux autres secteurs productifs, notamment l’industrie. Ces secteurs s’adressent pour la plupart à une
main-d’œuvre peu ou pas qualifiée.
Le développement industriel a été caractérisé par une faiblesse qui n’a permis ni de stimuler les
exportations ni d’attirer les investissements espérés, en raison aussi d’un faible environnement des
9
affaires (difficultés d’installation des start-up, d’obtention d’un crédit, d’exécution des contrats, etc.) .
La mise en œuvre du Pacte national pour l’émergence industrielle devrait permettre la création de
220 000 nouveaux emplois entre 2009 et 2015 dans les six Métiers mondiaux du Maroc – notamment
les industries de l’automobile, l’aéronautique, les industries électroniques, le textile et le cuir,
l’agroalimentaire et l’offshoring – où le pays jouit d’un avantage comparatif. Les nombreux plans de
développement sectoriels adoptés par le gouvernement semblent rencontrer des difficultés dans leur
mise en œuvre, à cause d’un manque de mécanismes clairs de suivi et d’évaluation et de ressources
limitées. Ils devraient être complétés par une approche stratégique permettant de considérer
l’ensemble des problématiques et mettant en corrélation les différents objectifs sectoriels. L’économie
marocaine est caractérisée aussi par l’existence d’un vaste réseau de micro et petites entreprises (en
10
2008 78,2 % des employés travaillaient dans des entreprises de moins de neuf salariés) ,
caractérisées par une faible capacité de création d’emploi, un taux élevé de mortalité et une capacité
réduite de développer des produits innovants ou haut de gamme. Le secteur informel est aussi
largement diffusé dans le pays et représente 40,8 % de l’emploi hors agriculture et hors administration
et collectivités locales, ce qui constitue une des principales causes de la lenteur du développement du
11
pays .
Principaux développements politiques
Le Royaume du Maroc remonte à 788 apr. J.-C. et la monarchie alaouite y est établie depuis plusieurs
siècles. Après plus de quatre décennies de protectorat français, le pays a recouvré son indépendance
en 1956. Mohamed VI a été proclamé roi en 1999 à l'âge de 35 ans. Dès son accès au pouvoir, le roi
a entrepris une série de réformes avant-gardistes. C’est ainsi que bien avant le Printemps arabe, le
code de la famille a été révisé conférant davantage de droits aux femmes, un code du travail a été
adopté et la langue et la culture des Berbères ont été reconnues.
Suite à une forte demande populaire appelant à un changement profond des modèles de
gouvernance politique, de démocratie et de développement économique du pays (Mouvement du
20 février 2011), le roi a initié un processus de réformes tant institutionnelles que politiques, dont l’une
des plus importantes est sans doute l’adoption d’une nouvelle Constitution le 1er juillet 2011. C’est
ainsi que les droits fondamentaux des citoyens marocains incluent l’accès à la formation
7
Banque mondiale
8
Haut-Commissariat au Plan, Direction de la statistique, enquête nationale sur l’emploi, 2011. Cela englobe le secteur
agriculture, forêt et pêche. Pendant son allocution sur «la situation de l’emploi et du chômage au Maroc et ses déterminants
structurels et politiques dans un contexte de transition» en mai 2011, M. Alami, Haut-Commissaire au Plan, a déclaré: «Les
secteurs de l’agriculture, du bâtiment et travaux publics (BTP) et des services, qui participent pour 80 % à la valeur ajoutée
totale, continuent d’être les principaux moteurs de la croissance économique. Leurs croissances durant la décennie 2000 ont
atteint respectivement 5,8 %, 7,2 % et 5 % alors que celle du secteur industriel n’a pas dépassé 3 %.»
9
Selon le classement de la Banque mondiale sur l’environnement des affaires, le Maroc se positionne à la 94ème place (sur
182) en 2012, ce qui indique que plusieurs mesures nécessitent d’être prises pour dynamiser l’environnement économique du
pays, en dépits des améliorations importantes déjà en cours au niveau national (dans le même classement en 2011 le Maroc
était à la 115ème place). Banque mondiale, Doing Business report, 2012
10
Haut-Commissariat au Plan, Direction de la statistique, enquête sur l’emploi, 2008
11
Haut-Commissariat au Plan, Direction de la statistique, enquête nationale sur le secteur informel, 2006-07
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professionnelle et à une «vie décente», ce qui présuppose aussi l’engagement des pouvoirs publics à
assurer des conditions d’emploi décentes. Vis-à-vis de la portée innovatrice de la Constitution, sa
mise en œuvre, deux ans après son adoption, reste critique à plusieurs niveaux.
Les élections de novembre 2011 ont porté au pouvoir une coalition menée par le parti islamiste «Parti
de la justice et du développement» dont le leader, Abdelilah Benkirane, a été nommé à la tête du
nouveau gouvernement. Le programme du nouveau gouvernement pour les quatre prochaines
années vise à une croissance du PIB du 5,5 %, à une réduction du taux de chômage à 8 % et à la
lutte contre les inégalités sociales et la corruption.
Les progrès réalisés jusqu’à présent dans le domaine politique et institutionnel pourront être un levier
important permettant d’améliorer la perception qu’ont certaines institutions internationales (l'institut
12
américain Freedom House) d’un Maroc «partiellement libre» , où le pouvoir a été traditionnellement
concentré entre les mains du roi et d'élites politiques subordonnées à la monarchie. Le gouvernement
et les tribunaux harcèlent la presse libre par le biais d'arrestations, d'amendes et de peines de prison.
Les droits de l'homme sont régulièrement bafoués et la magistrature n'est pas indépendante. La
corruption généralisée reste un problème structurel, tant dans le secteur public que dans le monde
13
des affaires. Transparency International place le Maroc à la 80e place sur un total de 182 pays .
L’accord de partenariat conclu en octobre 2008 et la signature de l’accord pour le partenariat de
mobilité avec l’Union européenne peuvent constituer des leviers importants pour soutenir les réformes
et la modernisation du pays et sa coopération étroite avec les États Membres.
Avancées en matière d'éducation et de formation
L'éducation et la formation constituent une priorité nationale d’où d'importants investissements publics
14
se montant à 5,4 % du PIB en 2009 . Le capital humain est le principal levier de développement dans
un pays aux ressources naturelles limitées. L'enseignement et la formation techniques et
professionnels (EFTP) sont considérés comme un outil permettant d'accroître la compétitivité des
entreprises formelles, d'attirer des investissements étrangers et de favoriser l’inclusion sociale.
Les taux de scolarisation bruts ont augmenté de façon significative. Le taux de scolarisation primaire
est passé de 92 % en 2000 à 115 % en 2012; le taux de scolarisation secondaire (premier cycle) est
passé de 50 % à 85 % entre 2000 et 2012 et le taux de scolarisation secondaire (deuxième cycle) de
26 % à 55 %; dans l'enseignement supérieur le taux de scolarisation est passé de 9 % en 2008 à
15
14 % en 2010 . Les différences entre les sexes sont significatives au niveau du premier cycle de
l'enseignement secondaire. Ces chiffres montrent les progrès considérables accomplis en termes
d'accès à l'éducation, mais le pays reste en queue de peloton par rapport à ses voisins dans la région.
Les taux de scolarisation secondaire (deuxième cycle) et dans l'enseignement supérieur sont
beaucoup plus faibles que la moyenne régionale, et le niveau d'étude de la population de plus de
15 ans nécessite encore des interventions rigoureuses pour améliorer la situation actuelle où 40 %
des individus n'ont aucun niveau d'éducation, 22 % ont atteint le premier cycle d'éducation primaire et
seulement 12 % et 6,25 % ont terminé respectivement des études secondaires et supérieures en
2012. Les différences entre les sexes sont particulièrement importantes entre la population de 15 ans
16
et plus n’ayant aucun niveau d’éducation (26 % des hommes contre 53 % des femmes) .
12
Des informations sur la situation politique et civile sont disponibles à l’adresse suivante:
http://ec.europa.eu/community_law/eulaw/pdf/com_2007_502_fr.pdf
13
Transparency International: www.transparency.org/policy_research/surveys_indices/cpi/2010/results
14
Institut de statistique de l’Unesco
15
Ibid.
16
Ibid.
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La combinaison d'un meilleur accès à l'éducation et d'un grave problème d'abandon scolaire précoce
produit un scénario peu satisfaisant. En fait, seulement 12,3 % des étudiants s'inscrivent à des
établissements d'enseignement secondaire professionnel et technique. Le niveau d’alphabétisation
des adultes (15+) était de seulement 56,1 % en 2009 contre une moyenne régionale de 74,7 en 2010;
les femmes sont les victimes principales du manque d’éducation.
Le système de formation professionnelle initiale est assez structuré avec 320 filières et cinq niveaux
de formation. Entre 2001 et 2011 le taux de croissance des effectifs était de 8 % par an, exerçant une
forte pression «quantitative» sur le système. Une amélioration quantitative et qualitative de l’offre de
formation est fortement demandée pour mieux répondre aux besoins du marché du travail et des
demandeurs d’emploi. Plusieurs approches novatrices ont été mises à l'essai pour améliorer la qualité
et la pertinence de l'EFTP, comme des formations fondées sur les compétences et des programmes
d'apprentissage et de formation alternée, et plus récemment l'établissement d'un cadre national de
certification. Toutes ces actions doivent être appliquées à l’échelle nationale et dépasser la phase de
pilotage. Le dispositif d’évaluation doit être renforcé et cibler la performance globale du système et sa
qualité. La formation en cours d'emploi est réglementée par la loi, mais les mécanismes de mise en
œuvre ne marchent pas.
Tendances et défis du marché du travail
Le poids du nombre croissant de jeunes, – notamment les diplômés et les femmes –, appelés à une
participation beaucoup plus active, ajoute une dimension supplémentaire liée à la relation entre le
modèle de croissance économique et la structure du marché de l’emploi. Celui-ci se caractérise au
Maroc par un taux d’activité très faible, avec de fortes disparités, et un taux de chômage très élevé,
surtout parmi les jeunes et les diplômés en particulier. Malgré des investissements massifs visant à
améliorer l’éducation et la formation de la population (en 2009 les investissements publics
constituaient 5,4 % du PIB), le taux le plus élevé d’instruction n’a pas encore généré des résultats
satisfaisants sur le plan de l’emploi.
En dépit des résultats positifs observés au cours de la dernière décennie par rapport au taux de
chômage (qui a baissé de 13,4 % en 2000 à 9 % en 2012 au niveau national), le taux d’activité reste
en 2012 l’un des plus faible au monde (48,4 %), en raison principalement du grand déséquilibre entre
17
la participation active des femmes par rapport aux hommes (respectivement 24,7 % et 73,6 %) . Au
niveau général, le taux d’activité varie aussi considérablement entre les différentes régions, l’âge et le
niveau de qualification: il est plus élevé en milieu rural, presque le double pour les jeunes entre 35 et
44 ans (61 %) comparés aux jeunes entre 15 et les 24 ans (33,5 %) et il est le plus élevé entre les
diplômés de l’enseignement supérieur (61,6 % par rapport à 48,6 % des sans diplômes).
Malgré la légère diminution du taux du chômage global que l’on vient de mentionner, le chômage
reste particulièrement élevé parmi les jeunes de 15 à 24 ans (en 2012 18,6 % au niveau national et
18
35,5 % en milieu urbain), les diplômés de niveau supérieur (18,7 %), et de niveau moyen (15,3 %) , à
19
20
l’exception des lauréats des grands écoles et de la population urbaine (13,4 %) . L’existence d’une
large proportion de chômeurs de longue durée témoigne de l’inadéquation structurelle entre certains
diplômes et les qualifications requises par le marché de l’emploi. De plus, les déséquilibres sectoriels
et l’absence d’outils pour anticiper les besoins en compétences contribuent à aiguiser les frustrations
des chercheurs d’emploi. De grandes disparités géographiques caractérisent aussi le pays.
17
Haut-Commissariat au Plan, Direction de la statistique, enquête nationale sur l’emploi, 2012
18
Ibid.
19
Allocution sur la situation de l’emploi et du chômage au Maroc et ses déterminants structurels et politiques dans un contexte
de transition d’Ahmed Lahlimi Alami, Haut-Commissaire au Plan, mai 2011
20
Haut-Commissariat au Plan, Direction de la statistique, enquête nationale sur l’emploi, 2012
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La crise financière et économique globale a commencé à affecter le pays en 2011. Concrètement,
dans le secteur des services 111 000 emplois ont été créés en 2012 et 110 000 postes ont été perdus
dans les autres secteurs. Les 1 000 emplois nets créés sont insuffisants pour satisfaire les besoins
des nouveaux entrants sur le marché de travail. L’agriculture reste le secteur qui emploie la plupart
des travailleurs (le taux d’emploi y était de 39,2 % en 2012). Ce secteur se caractérise surtout par une
main-d’œuvre peu qualifiée et peu protégée.
Les difficultés du Maroc à moderniser le secteur industriel (y compris le secteur de la construction)
expliquent pourquoi ce secteur ne représente que 21,4 % de l’emploi en 2012. Les trois secteurs
porteurs – textile et cuir, agro-alimentaire et pièces automobiles – ont enregistré une croissance
modérée au cours des dernières années alors que le nombre d’entreprises exportatrices enregistre
une baisse constante depuis 1995. Finalement, 39,4 % de la population travaille dans le secteur des
21
services, principalement en milieu urbain .
Le taux d’emploi global reste faible et assez stable (44,1 % en 2012) et le taux de sous-emploi
22
demeure élevé (9,2 %) . Dans le secteur informel, mais aussi largement dans le secteur formel, le
marché du travail marocain reste pourtant caractérisé par des emplois de très basse qualité, peu ou
non protégés, précaires et avec des salaires en dessous des seuils de subsistance.
Face aux défis caractérisant le marché de l’emploi marocain, le gouvernement a montré sa volonté de
développer une vision stratégique intégrée pour l’emploi – en partant d’une analyse diagnostique à
faire suivre par une stratégie nationale de l’emploi. Selon le ministère de l’Emploi et de la Formation
professionnelle, le diagnostic sera prêt en novembre 2013.
Le système de gouvernance et l’architecture institutionnelle sont complexes et les différents acteurs
impliqués dans la définition et la gestion des politiques et des actions concernant le marché du
23
24
travail œuvrent de façon peu coordonnée . Des fonctions de monitorage, de suivi et d’évaluation qui
permettraient de contrôler l’efficacité réelle des politiques mises en place ne sont pas expressément
attribuées ni exécutées.
Impact des politiques en matière d'emploi
D’une manière générale, les politiques gouvernementales qui ont été adoptées au cours des dernières
années et les mesures d’urgence annoncées et mises en place ne sont susceptibles de modifier que
partiellement le marché du travail marocain, mais constituent de toute façon une évolution positive en
la matière.
L’emploi – et en particulier l’emploi de jeunes – est devenu un thème central et prioritaire à l’ordre du
25
jour du gouvernement. Plusieurs déclarations de Sa Majesté le Roi et des institutions en charge de
l’emploi reconnaissent que l’emploi revêt une importance prépondérante dans toute société
démocratique. Dans son rapport Employabilité des jeunes: les voies et les moyens, le Conseil
économique et social et l’Instance nationale d’évaluation proposent l’adoption d’un «pacte national
21
Haut-Commissariat au Plan, Direction de la statistique, enquête nationale sur l’emploi, 2012
22
Ibid.
23
À part le ministère de l’Emploi et de la Formation professionnelle, le marché du travail est réglementé par les acteurs suivants
(la liste n’est pas exhaustive): le Conseil supérieur de promotion de l’emploi, les conseils régionaux et provinciaux de promotion
de l’emploi, le Comité national et les comités régionaux Moukawalati, les comités régionaux d’amélioration de l’employabilité,
l’Observatoire de l’emploi, l’Agence nationale de promotion de l’emploi et des compétences, l’Agence nationale de promotion de
la petite et moyenne entreprise, les centres régionaux d’investissement.
24
La nouvelle stratégie vise à augmenter la coordination entre les différents acteurs du gouvernement qui participeront à la
conception de cette stratégie.
25
«Notre but ultime est d’assurer les conditions d’une vie digne à tous les Marocains, surtout aux plus démunis, et de réaliser
un développement global permettant de créer des emplois productifs, notamment au profit de la jeunesse que Nous plaçons au
cœur de Notre politique de développement», discours de Sa Majesté le Roi Mohamed VI lors de l’installation du Conseil
économique et social en février 2011.
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pour l’emploi des jeunes» comme canalisateur apte à mobiliser l’ensemble des composantes de la
nation.
L’Agence nationale de promotion de l’emploi et des compétences (Anapec) est responsable de la
mise en œuvre des programmes de politiques actives de promotion de l’emploi; l’inscription est
obligatoire afin d’accéder aux programmes. Les trois principaux programmes mis en œuvre sont les
suivants: Idmaj (premier contrat de recrutement pour les diplômés et titulaires de diplômes de
formation professionnelle); Taehil (contrat de formation pour améliorer l'employabilité des demandeurs
d'emploi avec des qualifications d'enseignement ou de formation professionnelle); Moukawalati
(programme de soutien à l'entrepreneuriat intégré pour la création d'entreprises).
Cependant, au niveau quantitatif, les programmes n’ont touché qu’une partie très limitée de la
population, très en dessous des objectifs attendus par le gouvernement. Au niveau qualitatif, les
mesures financées par l’Anapec ont exclu des catégories de jeunes durement affectées par le
chômage, notamment les illettrés, les jeunes en rupture de scolarité, les jeunes diplômés et titulaires
du baccalauréat ou d'un diplôme de formation professionnelle provenant des petites villes ou des
régions périphériques où des cours de formation ne sont pas offerts, et les chômeurs de longue durée
26
et en situation d’exclusion ou de handicap . Aucune mesure spécifique n’a été adoptée pour favoriser
l’insertion dans le marché du travail des femmes, en dépit de l’exclusion évidente dont elles sont
l’objet. Enfin, ce n’est qu’à la fin de 2011 avec l’entrée en vigueur de la convention de partenariat
entre le gouvernement et la Confédération générale des entreprises au Maroc (CGEM), qu’une
27
couverture sociale pour les bénéficiaires des programmes de stage a été introduite . La
standardisation des dispositifs d’insertion rend les politiques actives du marché du travail moins
pertinentes et efficaces, aussi bien pour les chercheurs d’emploi plus vulnérables que pour les
28
entreprises plus traditionnelles . La faible évolution des bases de données, des dispositifs
d’investigation, d’enquête et d’analyse des changements des formes du travail et des modes d’emploi
29
représente aussi un élément fort limitant des programmes .
D’autre part, l’existence de l’Anapec constitue sans doute un élément positif du marché de l’emploi
marocain, car l’agence exerce la fonction d’intermédiaire entre les jeunes diplômés ou sortants
qualifiés et les entreprises privées, facilite la circulation des informations, soutient l’amélioration des
compétences des groupes ciblés et exerce également un rôle essentiel de conseiller en emploi.
Néanmoins, son rôle doit être renforcé afin qu’elle puisse se concentrer davantage sur la qualité des
services rendus au détriment de leur quantité. Le gouvernement a proposé des mesures visant à
améliorer les programmes gérés par l’Anapec (Plan 2013-16). Ces mesures sont actuellement en
cours d’approbation et les détails y afférent ne sont pas encore disponibles.
26
L’inscription à l’Anapec, ouverte uniquement aux diplômés provenant de l’enseignement général (baccalauréat et plus) ou de
l’enseignement professionnel initial (technicien ou technicien supérieur) est essentielle afin de bénéficier des programmes gérés
par l’agence.
27
Contrat de prise en charge sociale, comme mentionné auparavant.
28
Ibourk, Les jeunes diplômés au Maroc face au dilemme de l’emploi: contenu et évaluation des dispositifs mis en œuvre
29
Les informations collectées par l’Anapec sont fournies directement par les bénéficiaires du programme mais l’agence n’est
pas en mesure d’en contrôler la véracité ni de suivre tout changement intervenu dans la situation des individus, vu que le Maroc
ne dispose pas d’un système de soutien financier ou d’assistance sociale pour ces chômeurs.
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