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QUESTION 1 LES CHEMINS DE LA PUISSANCE LES ÉTATS-UNIS ET LE MONDE DEPUIS 1945 LA CHINE ET LE MONDE DEPUIS 1949 INTRODUCTION .......................................................................................................................................................................... 2 I. LES ÉTATS-UNIS ET LE MONDE DEPUIS 1945 ...................................................................................................................... 2 A. PENDANT LA GUERRE FROIDE, LES ÉTATS-UNIS « DANS LE CAMP ET À LA TÊTE DU MONDE LIBRE » ............................................................. 2 Un engagement total ....................................................................................................................................................... 3 L’instauration d’une économie-monde étatsunienne et l’affirmation d’une puissance complète ................................... 4 B. LES ÉTATS-UNIS ET LE MONDE APRÈS LA GUERRE FROIDE : LES QUESTIONS DU LEADERSHIP ....................................................................... 5 1. Le bref moment unipolaire ou l’illusion de l’Empire (1991-2001) .................................................................................... 5 2. Les États-Unis à la recherche d’un nouveau leadership ................................................................................................... 6 1. 2. II. LA CHINE ET LE MONDE DEPUIS 1949 ................................................................................................................................ 9 A. LA PÉRIODE MAOÏSTE (1949-1976) ............................................................................................................................................. 9 1949-1956 : l’enracinement du pouvoir du PCC ............................................................................................................... 9 Deux campagnes meurtrières ........................................................................................................................................ 11 La fin du règne de Mao .................................................................................................................................................. 13 B. LES NOUVEAUX CHEMINS DE LA PUISSANCE (DEPUIS 1976) .............................................................................................................. 13 1. La Chine des réformes (1978-2000) ............................................................................................................................... 13 2. La Chine, puissance montante du XXIème siècle .............................................................................................................. 15 1. 2. 3. CONCLUSION ............................................................................................................................................................................ 17 1 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 QUESTION 1 LES CHEMINS DE LA PUISSANCE LES ÉTATS-UNIS ET LE MONDE DEPUIS 1945 LA CHINE ET LE MONDE DEPUIS 1949 Manuel p.66-131 Diapo 1-2 Titre + Problématique + Sommaire I NTRODUCTION Contexte et repères p.68-69, cartes p.70-71 : Les États-Unis et le monde pendant la guerre froide ; les États-Unis et le monde au XXIème siècle- Ces deux États, bien que fort différents l’un de l’autre, forment aujourd’hui deux pôles majeurs du système mondial. Il s’agira ici de s’interroger sur les origines et sur l’évolution, les étapes, et les manifestations de la puissance des États-Unis et de la Chine, afin de proposer à partir de cette étude une réflexion sur la notion de puissance au début du XXIe siècle. Comment la notion de puissance telle que nous la considérons aujourd’hui est-elle forgée par l’exemple des États-Unis depuis 1945 ? Peut-on dire que la Chine, à l’issue d’un parcours très différent, incarne désormais elle aussi cette notion ? I. Diapo 3 Titre I + Sommaire L ES É TATS -U NIS ET LE MONDE DEPUIS 1945 Manuel p.66-99 On s’accorde communément à considérer le XXème siècle comme « le siècle américain »1, mais c’est la fin du second conflit mondial qui amorce une évolution conduisant les États-Unis à se doter d’une puissance complète et globale sans précédent, jusqu’à la situation actuelle, marquée par une remise en cause de leur domination. Diapo 4 Quelques notions-clés Cela pose la question des origines, de l’évolution, des étapes, et des manifestations de la puissance des États-Unis. Cela interroge également la notion de puissance au XXème siècle et au début du XXIème siècle. Comment la notion de puissance est-elle modelée et transformée au XXème siècle par les États-Unis ? A. P ENDANT LA GUERRE FROIDE , LES É TATS -U NIS « DANS LE CAMP ET À LA TÊTE DU MONDE LIBRE » Cours 1 p.72, « L’affirmation de la puissance américaine (1945-1950) » + Cours 2 p.74, « Une superpuissance de la guerre froide »Cours 1A p.72, Les États-Unis, vainqueurs de la Seconde Guerre mondiale- Au lendemain du conflit se produit un tournant majeur dans la politique des États-Unis 1 Cf. dans le programme de 1ère, le passage progressif d’une économie-monde britannique (18501945) à une économie-monde étatsunienne (1945-1991). 2 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 Diapo 5 La « destinée manifeste » - Citations Wilson + Johnson au XXème siècle : sortis vainqueurs et renforcés de la Seconde Guerre mondiale2, dominant un monde en ruines, auréolés de leur image de défenseurs de la liberté et pénétrés du sentiment qu’ils représentent le meilleur modèle de développement économique et social, ils « assument » leur puissance et s’engagent dans la marche du monde –Citation p.72. C’est ainsi que la « destinée manifeste » des États-Unis, concept formulé au XIXème siècle pendant le processus de formation territoriale des États-Unis, change d’échelle et trouve sa traduction contemporaine. 1. Un engagement total Lorsqu’éclate la guerre froide, les États-Unis interviennent dans le cadre de la politique d’« endiguement », leur priorité devenant dès lors de contrecarrer l’influence de l’Union soviétique. Diapo 6 Schéma - La guerre froide et le monde bipolaire Diapo 7 Citation Truman : « Dans le camp et à la tête du monde libre » La guerre froide (« Expression popularisée par le journaliste américain Walter Lippmann en 1947. Elle synthétise l’impossibilité d’affrontement entre États-Unis et Union soviétique, deux nations nucléaires » -Vocabulaire p.743), qui n’oppose jamais les deux « grands » dans un conflit militaire direct4 est à appréhender comme un affrontement multiforme (à la fois confrontation idéologique et choc de puissances) d’intensité variable, dans un contexte de peur et de diabolisation de l’adversaire. Si ce conflit alterne périodes de tensions5 et de détente (« duopole » américanosoviétique pendant la détente), on notera que tout au long de la période (19471991), l’engagement des États-Unis contre le communisme est total, qu’il s’inscrive : - Cours 1C p.72, Les États-Unis, leaders du monde libre- à ses débuts, sous la présidence Truman (1945-1953) –Biographie p.72, dans la théorie du containment (« politique officielle des États-Unis à partir de 1947 pour faire barrage à l’essor du communisme » -Vocabulaire p.72 + doc.3 p.73, La doctrine Truman) laquelle se traduit entre autres : o dans la « pactomanie », c’est-à-dire la mise en place d’une stratégie visant à encercler le bloc soviétique en multipliant les alliances militaires (ANZUS, OTAN –doc.2 p.73, Le Pacte atlantique (1949)…, OTASE, Pacte de Bagdad…) et les bases militaires dans les zones « de contact » entre les deux blocs –doc.2 p.75, Le Pacifique, « lac américain » (1947-1989) ; o dans un interventionnisme militaire assumé, que ce soit en Europe (blocus de Berlin, 1948-1949 –doc.1 p.80, L’Europe en ruines au lendemain de la guerre) ou en Asie (Guerre de Corée, 1950-1953) ; - pendant la coexistence pacifique (1953-1962), dans la paranoïa exprimée durant la période du MacCarthysme (1950-1954) 6 , dans la fermeté 2 Le conflit n’a pas affecté le territoire étatsunien (hormis Pearl Harbour), et les pertes sont certes importantes (300.000 morts), mais sans commune mesure avec celles des autres belligérants (par exemple l’Union soviétique compte 25 millions de morts). Surtout, il ne faut pas perdre de vue que c’est l’effort de guerre qui a effacé les séquelles de la crise de 1929 (plus encore que le New Deal) en relançant l’économie et en annihilant le chômage. 3 Cf. la formule du philosophe français Raymond Aron : « paix impossible, guerre improbable ». 4 Mais les conflits « périphériques » sont légion. 5 Cf. blocus de Berlin (1948-1949), guerre de Corée (1950-1953), crise de Cuba (1962) 6 Le maccarthysme est un épisode connu également sous le nom de « Peur Rouge » (Red Scare) et qualifié fréquemment de « chasse aux sorcières » (witch hunts). Il s'étend de 1950, l'apparition du sénateur Joseph McCarthy sur le devant de la scène politique américaine, à 1954, le vote de censure contre McCarthy. En 1953-1954, la commission présidée par McCarthy traqua d'éventuels agents, militants ou sympathisants communistes aux États-Unis dans une ambiance anticommuniste et paranoïaque. Source : Wikipédia. 3 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 - - Diapo 8 Citation Bush : « Un modèle unique durable » manifestée par Kennedy –Biographie p.81 lors de la construction du mur de Berlin (1961) ou lors de la crise de Cuba (1962), dans la course aux armements7 et à l’espace8 -doc.2 p.82, La politique spatiale (1961) ; Paragraphe B p.74, Le leadership américain remis en question (milieu des années 1960 - fin des années 1970)- pendant la détente (1962-1975), où la mise en place du « duopole » n’empêcha pas l’entêtement étatsunien dans le long conflit vietnamien, en vertu de la « théorie des dominos » –avec un résultat désastreux, malgré les contestations internes au camp occidental9 et un recul global de leur influence dans le monde, particulièrement auprès du tiers-monde–vocabulaire p.74 (Nicaragua, Iran, Afrique…) ; Paragraphe C p.74, le leadership retrouvé- sous la présidence Reagan (19791987)10, dans la relance de la course aux armements et dans le soutien inconditionnel apporté à des régimes et des mouvements peu recommandables11, pour peu qu’ils soient anti-communistes… Au 25 décembre 1991, quand l’Union soviétique disparaît, la guerre froide, déjà bien apaisée par l’arrivée de Mikhaïl Gorbatchev au Kremlin (1985)12, s’achève. Cette victoire couronne le « siècle américain », et certains n’hésitent pas à y voir une « fin de l’histoire » 13 , sous « l’Empire bienveillant » 14 de l’unique superpuissance (« hyperpuissance » -Vocabulaire p.76 : terme inventé par le ministre français des affaires étrangères, Hubert Védrine. Il rend compte de l’exceptionnelle avance prise par les États-Unis sur les autres pays au lendemain de la guerre froide). 2. L’instauration d’une économie-monde étatsunienne et l’affirmation d’une puissance complète Au-delà des seuls objectifs stratégiques de la guerre froide, les États-Unis assurent la promotion de la libre entreprise, du libre-échange et de la démocratie libérale. Diapo 9 Vidéo : Bretton Woods Étude 1 p.78-79, « En 1945, les architectes du nouvel ordre mondial »- Ainsi, le nouvel ordre mondial engagé dans la foulée de la création de l’ONU –doc.1 p.78, La déclaration de l’Europe libérée… + doc.5 p.79, Le siège des Nations unies… assied-il durablement la puissance économique et financière étasunienne : les accords de Bretton Woods15 -doc.4 p.79, Le regard d’un historien sur la conférence de Bretton 7 Les Américains bénéficient du monopole nucléaire en 1945, mais les Soviétiques se dotent de cette technologie en 1949 ; alors qu’en 1951, les États-Unis inventent l’explosif thermonucléaire (la « bombe H »), les Soviétiques y parviennent en 1952, instaurant dans le monde un « équilibre de la terreur ». 8 Les Soviétiques prennent une longueur d’avance en plaçant les premiers en 1957 un satellite en orbite, le Spoutnik et en envoyant en 1961 le premier homme dans l’espace, Youri Gagarine. 9 Cf. la « politique de grandeur » de la France du Général de Gaulle qui manifeste bruyamment son indépendance vis-à-vis des États-Unis, ou les mouvements révolutionnaires en Amérique latine. 10 Cf. « America’s back ! », ou encore « the Devil Empire ». 11 Dictatures militaires latino-américaines, régime d’apartheid en Afrique du Sud, contras nicaraguayens, combattants islamistes d’Afghanistan… 12 L’Union soviétique et les États-Unis connaissent à partir de 1985 une nouvelle période de « réchauffement » de leurs relations : ils signent alors des accords de désarmement nucléaire (Accords de Washington en 1987, accords START en 1991). 13 C’est le propos de Francis Fukuyama (Cf. programme de 1ère) 14 Pour Robert Kagan –à lire : cet article sur la question. 15 Les accords de Bretton Woods dessinent les grandes lignes du système financier international en juillet 1944. Leur objectif principal fut de mettre en place une organisation monétaire mondiale et de favoriser la reconstruction et le développement économique des pays touchés par la guerre (source : Wikipédia) 4 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 Woods consacrent la suprématie de la seule monnaie alors convertible en or, le dollar –doc.1 p.74, Les réserves en or des États-Unis, 1945-1970. La création du FMI, de la Banque mondiale16 et du GATT achève de dessiner le cadre d’une économiemonde étatsunienne17. Dans le même ordre d’idée, le plan Marshall (« Programme d’aide à la reconstruction des pays européens, proposé par le secrétaire d’État George Marshall en 1947. Il leur octroie des crédits et la fourniture de matériel et d’experts » -Vocabulaire p.72 + doc.4 p.73, Une affiche française en faveur du plan Marshall (1947) + doc.3 p.80, Qui bénéficie du plan Marshall ? + Sujet Bac p.97) proposé aux alliés d’Europe occidentale en 1947, bénéfique pour leur reconstruction, offre aux États-Unis de nouveaux débouchés commerciaux et une forme de contrôle sur la politique économique de ses partenaires. Diapo 10 Texte - Joseph NYE et le Soft Power La force économique et financière des États-Unis leur permet de développer toutes les autres facettes d’une puissance complète : militaire –doc.4 p.75, Le président Eisenhower et le système militaire américain (1961), technologique, mais aussi culturelle à travers le « soft power »18 et l’attractivité de l’« american way of life » doc.3 p.75, Simone de Beauvoir et le modèle américain. B. L ES É TATS -U NIS ET LE MONDE APRÈS LA GUERRE FROIDE : LES QUESTIONS DU LEADERSHIP Cours 3 p.76, « Depuis 1991, la seule puissance mondiale ? » 1. Le bref moment unipolaire ou l’illusion de l’Empire (1991-2001) Diapo 11 Texte – Hubert Védrine et la notion d’hyperpuissance La disparition de l’Union soviétique laisse les États-Unis seule puissance incontestable. Mais la guerre froide achevée, la pax americana ne règne pas pour autant. En réalité, la fin de l’Union soviétique gêne les États-Unis autant qu’elle les place dans une position unique19 : la première guerre du Golfe (1991)20 semble confirmer le rôle des États-Unis comme « gendarmes du monde », en charge de l’établissement d’un nouvel ordre mondial –Cf. Vocabulaire p.76, « Enlargement » : ou doctrine Clinton. Elle consiste à promouvoir dans le monde l’économie de marché, la démocratie et le respect des droits de l’homme... Pendant cette période, les États-Unis semblent exercer un leadership mondial et pratiquer un interventionnisme « au nom du droit » -doc.1 p.77, Les principales interventions militaires américaines… mais à géométrie variable : ainsi leur forte implication au Moyen-Orient, qui permet d’aboutir aux accords d’Oslo entre Palestiniens et Israéliens21 contraste avec le retrait hâtif de Somalie22 ; de même, la Maison-Blanche, après s’être tenue à l’écart, prend finalement en main le dossier de l'ex-Yougoslavie23 -doc.2 p.77, Les États-Unis impliqués dans le conflit yougoslave… 16 Sur ces deux organisations au cœur du processus de la mondialisation, Cf. programme de géographie, Thème 3, question 1. 17 Au sujet de l’économie-monde étatsunienne, Cf. programme de 1ère, Thème 1, Question 1. 18 Sur l’expression « Soft Power », voir les travaux de Joseph Nye (Soft Power, 2004) : lire à ce sujet son interview donnée à France-Culture en 2010. 19 En mai 1988, Georgyi Arbatov, conseiller de Mikhaïl Gorbatchev, annonçait à ses homologues américains : « Nous allons vous rendre le pire des services : vous priver d'ennemi. » 20 Cf. programme de 1ère ES/L, Thème 2, Question 2. 21 Cf. programme de TES/L, Thème 2, Question 2. 22 Sitôt élu (2012), le président Clinton –Biographie p.76 met un terme à l’opération Restore Hope en Somalie, et se tient longtemps à l’écart du premier conflit Yougoslave (1991-1995). 23 Intervention militaire en Bosnie en 1994 (Cf. programme de 1ère S, ici) 5 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 Rapidement, ce leadership rencontre des difficultés : impasse des négociations israélo-palestiniennes24, imprécations contre les « États voyous » (rogue States), vagues d'anti-américanisme et de violences25… 2. Les États-Unis à la recherche d’un nouveau leadership Diapo 12 Texte – Entre unilatéralisme et multilatéralisme, DP8056, 2007 Confrontés à un monde désormais multipolaire26, les États-Unis prétendent incarner à eux seuls le nouvel ordre mondial dans une posture résolument unilatérale27, puis explorent d’autres voies. a. Le temps de l’unilatéralisme Étude p.86-87, Les États-Unis en guerre contre le terrorisme- Les attentats du 11 Septembre 2001 révèlent et font advenir un changement profond dans les relations de Washington avec le reste du monde. Ces attentats contre le World Trade Center à New York –doc.1 p.86, L’attentat du World Trade Center et le Pentagone à Washington, tout en marquant un passage à un nouvel âge du terrorisme28, suscitent une immense émotion dans le monde occidental : quand l'administration américaine déclare la guerre au terrorisme – doc.2 p.86, G. W. Bush réagit aux attentats du 11 septembre 2001, c’est avec l’approbation du Conseil de sécurité, et la solidarité des membres de l’OTAN29. L'autre effet de ces attentats est d’ouvrir un changement profond dans les relations entre Washington et le monde. Alors qu'au cours de ses premiers mois, l’administration G. W. Bush –Biographie p.86 ne semblait guère s'intéresser aux relations internationales, tout change le 11 Septembre 2001. À ses yeux, la lutte contre le terrorisme relève d’un « choc des civilisations »30 et nécessite une liberté 24 …qui débouche sur la « seconde Intifada » en 2000. Attentats contre les ambassades en Tanzanie et au Kenya, août 1998. 26 Montée en puissance des « émergents » (Chine, Inde, Brésil), concurrence des autres pôles de la Triade (notamment l’UE), ambitions de puissance russe (fin de l’ère Eltsine), développement des pôles hostiles au leadership américain (en Afrique, en Amérique latine, au Moyen-Orient…), etc. 27 Unilatéralisme : politique étrangère d’un État qui refuse toute concertation avec ses alliés ou avec la communauté internationale –Vocabulaire p.76. 28 Ils expriment un terrorisme singulier dans ses objectifs, ses moyens et ses effets. Les objectifs visés sont symboliques (l'emblème du commerce international et le siège de la puissance militaire), les moyens utilisés combinent le recours aux avions et le sacrifice de martyrs ; les effets se reflètent dans le nombre de victimes (environ 3 000 morts), c'est-à-dire dans la destruction de masse. Cf. dans le programme de 1ère ES/L, ici. 29 L’ennemi désigné est le régime taliban au pouvoir en Afghanistan depuis 1996 et protecteur de l'organisation islamiste Al-Qaïda dirigée par Oussama Ben Laden, un Saoudien fanatique. La campagne militaire (« Justice sans limite », rebaptisée « Liberté immuable »), d’octobre à novembre 2001 est un succès, qui débouche sur le déploiement, sous mandat de l'ONU, d'une force internationale chargée d'assurer la sécurité (International Security Assistance Force, ISAF) à Kaboul et dans sa région, et à instituer un gouvernement intérimaire rassemblant toutes les factions afghanes. Après un long enlisement malgré l’implication massive des États-Unis (100°000 boys au plus fort des combats), les derniers soldats américains ont quitté l’Afghanistan le 18 décembre 2011, avec des pertes évaluées à 2000 hommes. Ici encore, Cf. le cours de 1ère ES/L, ici. 30 Dans Le Choc des civilisations (1996), Samuel Huntington, professeur à Harvard, annonçait le passage d'un monde caractérisé par des oppositions idéologiques (entre communisme et capitalisme) à un monde marqué par des clivages civilisationnels. Il en veut pour preuve la résurgence des sentiments identitaires, que ce soit dans le monde musulman, en Asie ou en Europe orientale. Il estime que c'est l'islam qui explique l'échec de la démocratie dans la majeure partie du monde musulman. À l'inverse, les cultures issues du christianisme favoriseraient la prospérité et la démocratie. 25 6 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 Diapo 13-14 Vidéo + Texte – GW Bush, Discours sur l’état de l’Union, 29 janvier 2002 d'action totale des États-Unis, qui ne veulent plus être entravés par aucune contrainte internationale, même dans l'emploi de la force. C’est dans le discours de G. W. Bush sur l’état de l’Union31 du 29 janvier 2002 que cette pensée est formulée de la manière la plus claire. Et c’est dans cet état d’esprit qu’à la suite de la guerre d'Afghanistan, les États-Unis développent la notion d’emploi de la force à titre préventif32, en l’occurrence contre l'Irak de Saddam Hussein, avec l'objectif affiché d’instaurer plus largement un ordre nouveau au Moyen-Orient, fondé sur la démocratie, la défense des libertés et les droits de l'homme. Accusé de complicité avec Al Qaeda, mais surtout de produire des armes de destruction massive et de chercher à se doter de l’arme nucléaire, Bagdad dément et accepte que des inspecteurs de l'AIEA33 (qu'il avait expulsés en décembre 1998) viennent contrôler la nature de son armement. G. W. Bush recherche l'accord des pays membres du Conseil de sécurité, mais, confronté à l'opposition de la France, de l'Allemagne et de la Russie, il décide, avec le Royaume-Uni, de se passer de l’ONU. La guerre est rondement menée (20 mars-30 avril 2003) et l'armée de Saddam Hussein facilement mise en déroute34, mais la doctrine américaine d'action préventive met profondément en cause le système de sécurité collective et la place de l'ONU dans le système international et soulève une vague de protestation mondiale. b. À la recherche du Smart Power : changement de paradigme Diapo 15 Citation – S. Huntington Diapo 16 Texte – Fareed Zakaria et le monde postaméricain Le bref moment unipolaire fait place à une ère de doute et de remise en cause. Si la puissance se jauge à la faculté d'imposer aux autres pays ses propres volontés, il est indéniable que les États-Unis connaissent un affaiblissement, mesurable par de nombreux indices convergents35. Faut-il aller jusqu'à évoquer le déclin de l'Empire américain ? Comme Fareed Zakaria36, Joseph S. Nye37 propose une autre interprétation : la position hégémonique des États-Unis diminuerait sous l'effet d'un ensemble de 31 Le discours sur l'état de l'Union (State of the Union address) est un évènement annuel où le président des États-Unis présente son programme pour l'année. Ce discours est prononcé à Washington au Capitole, où les deux chambres (la Chambre des représentants et le Sénat) sont réunies (Source : Wikipédia). 32 La thèse de Samuel Huntington nourrit la vision du monde de l'administration républicaine. Ainsi, le document définissant la notion de guerre préventive (National Security Strategy 2002) évoque les alliés de la terreur comme des « ennemis de la civilisation ». Cf. « L'Amérique a été prise pour cible parce qu'elle est le phare le plus brillant de la liberté et de la possibilité d'entreprendre dans le monde » (G. W. Bush, 20 septembre 2001) 33 AIEA : Agence internationale de l'énergie atomique, organisme indépendant agissant sous l’égide de l’ONU chargée de promouvoir les usages pacifiques de l’énergie atomique et d’en contrôler les usages militaires. 34 À la suite de cette victoire, Washington crée en mai 2003 une « coalition des volontaires », force de stabilisation internationale d'une quinzaine de pays, chargée sous l'égide des États-Unis de sécuriser la reconstruction de l'Irak… L’opération Iraqi Freedom ne tarde pas à tourner au « bourbier », et l’avenir du pays reste incertain. 35 Le retrait des troupes d'Irak puis d'Afghanistan démontre l’incapacité étatsunienne de l'emporter par la force des armes. Le 6 août 2011, la dégradation de la note des États-Unis (perte du triple A) par l'agence Standard & Poor's remet en cause l’immunité financière américaine. Les révélations du site WikiLeaks montrent la difficulté pour l'État américain de conserver les secrets de son armée et de sa diplomatie. Après la Révolution égyptienne, c’est à Pékin –et non à Washington- que le nouveau président Mohamed Morsi réserve sa première visite officielle. 36 Fareed Zakaria, The Post-American World, 2008 37 Joseph Nye, Bound to Lead. The Changing Nature of American Power, 1991 7 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 Diapo 17-18 Vidéo + Texte – B. Obama à Berlin Diapo 19 Extrait Sciences Humaines : « Les ÉtatsUnis à l’ère du smart power ? Diapo 45 Vidéo B. Obama : Discours de West Point, mai 2014 facteurs (concurrence commerciale, enlisements militaires, défiance politique, etc.), mais plutôt qu'en termes de déclin, il conviendrait de comprendre la fin de la toutepuissance en la replaçant dans le nouveau contexte d'interdépendances et de multipolarité. Plus aucune puissance (les États-Unis pas plus qu'aucune autre) ne peut plus s'imposer isolément, sans prendre en considération le point de vue des autres nations. Pour J. Nye, les États-Unis doivent s’appuyer sur leur capacité à convaincre les autres pays sans utiliser exclusivement la force. Les relations internationales ne fonctionneraient plus sur le mode de la coercition, mais sur celui de la cooptation : l'image positive d'un État, son degré d'ouverture, l'exemplarité de son comportement, l’attractivité de sa culture sont déterminants. Les États-Unis ne peuvent plus maîtriser seuls la mondialisation, et doivent adapter leur leadership. Les mandats de Barack Obama –Biographie p.87 mettent un terme à ce que les détracteurs de George W. Bush désignaient sous le nom de cow-boy diplomacy. Pour l’administration démocrate, l'influence américaine ne doit plus recourir à une géostratégie manichéenne. Le leadership américain doit s'adapter à un monde de plus en plus complexe et multipolaire, marqué par des interdépendances multiples, et où la menace a changé de nature. Le 30 mars 2009, la secrétaire d'État américaine Hillary Clinton annonce l’abandon de la terminologie belliciste (« guerre contre le terrorisme », « guerre contre la terreur », etc.). Avec l’administration Obama, les États-Unis changent de paradigme et adoptent une stratégie de politique extérieure fondée sur la restauration de l'image positive des États-Unis –doc.3 p.87, Au Caire, Barack Obama s’adresse au monde musulman (2009) et sur la prise en compte du multilatéralisme : d’où la doctrine du smart power (« puissance intelligente »)38, au service d’un « nouveau leadership américain » ; d’où également les expressions de leading from behind39 et d’« hégémonie discrète »40. 38 On entend par smart power une combinaison raisonnée de soft et de hard power. Dans le modèle de J. Nye, un pays ne peut être puissant sur la scène internationale qu'en opérant une combinaison habile de « hard » et de « soft power », afin de mobiliser un pouvoir qualifié d’« intelligent », le « smart power ». Hillary Clinton, dès son accession au titre de Secrétaire d'État, se réfère, dans son tout premier discours, au « smart power » tel que le conçoit Nye et confirme ainsi les orientations données par Barack Obama dans son discours de politique générale, où les notions de « soft » et « smart power » occupaient une place essentielle. Au XXIème siècle, la théorie de Machiavel, selon laquelle mieux vaut pour un prince d'être craint que d'être aimé, n'est plus d'actualité ; aujourd'hui, la juste position consiste à être simultanément une figure de menace et de séduction. 39 B. Obama, 2011. Cf. http://politique-etrangere.com/2011/07/18/manifest-destiny-leading-frombehind-quel-avenir-pour-la-diplomatie-americaine-obama/ 40 Cf. Courrier international, http://www.ladocumentationfrancaise.fr/informations/espacepresse/communiques-de-presse/cp000258-etats-unis.-vers-une-hegemonie-discrete 8 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 II. L A C HINE ET LE MONDE DEPUIS 1949 Manuel p.100-131 Diapo 21-22 Titre + Photo JO 2008 + Problématique & Sommaire Photo p.100, Chronologie p.102-103, Cartes p.104-105- La situation de la Chine est très différente de celle des États-Unis. Elle s’inscrit en effet dans une évolution originale qui la mène, de révolution en révolution41 , d’une situation de sousdéveloppement économique et de mise sous tutelle politique à une position économique (et, de plus en plus, politique) mondiale de premier plan. Comment la Chine, affaiblie et dominée par les puissances étrangères au début du XXème siècle, est-elle (re)devenue en quelques décennies une grande puissance mondiale ? A. L A PÉRIODE MAOÏSTE (1949-1976) Diapo 23 Vidéo : proclamation de la RPC + Article Le Monde déc.1949. Cours 1 p.106, La recherche d’une voie chinoise (1949-1978)- La première moitié du XXème siècle se caractérise par la dépendance de la Chine vis-à-vis des puissances étrangères42. La victoire des Communistes en 194943 fait entrer le pays dans une nouvelle période, marquée par la construction d’un État fort et par une quête de puissance à travers la reconquête de la souveraineté et le développement d’une influence en Asie. Bien que l'organisation du Parti communiste chinois (PCC) soit supposée collégiale et démocratique, le prestige de Mao Zedong –Biographie p.113 et son habileté lui permettent d'imposer ses vues -d’où la notion de période « maoïste ». 1. 1949-1956 : l’enracinement du pouvoir du PCC a. De la « Nouvelle Démocratie » au modèle soviétique Diapo 24 La « Nouvelle Démocratie », une ligne modérée Le PCC a gagné la guerre civile en ralliant la population à son programme dit « Nouvelle Démocratie », dont les grandes orientations avaient été définies par Mao Zedong dès janvier 1940. Selon cette ligne modérée, - le PCC a pour vocation de prendre la tête d'une alliance entre toutes les classes progressistes de la société : même la bourgeoisie participe au processus révolutionnaire ; - les libertés individuelles doivent être respectées ; - pour rassurer la bourgeoisie et les petits entrepreneurs, la collectivisation ne concerne initialement que l'industrie lourde et le secteur bancaire. Mais tandis qu’un rétablissement économique spectaculaire s'opère44, les coups commencent bientôt à pleuvoir sur la petite bourgeoisie, dans le cadre de la campagne dite des « Trois Contre »45, puis celle des « Cinq Contre »46 (1951-1952). 41 « …celle de Mao Zedong, en 1949, qui instaure une République populaire, l’étatisation de l’économie et la dictature du Parti communiste ; celle de Deng, en 1979, qui a fait de la Chine un pays où le capitalisme triomphe, mais pas la démocratie. » -E. Izraelewicz, Chine, de la Révolution à la naissance d’un géant, 2013 42 Depuis le XIXème siècle, Européens, Américains et Japonais ont imposé leur influence à la Chine. 43 Après la défaite japonaise (1945), une guerre civile oppose de 1944 à 1949 les communistes dirigés par Mao Zedong –Biographie p.113 aux nationalistes du Guomindang dirigés par Tchang Kaï-Chek. Malgré le soutien des États-Unis, Tchang Kaï-Chek est vaincu et contraint à l’exil sur l’île de Taïwan, où il fonde la République de Chine, tandis que Mao Zedong proclame la République populaire de Chine (1er octobre 1949). 44 L'inflation est jugulée, à la grande satisfaction de la population. 45 Ou « Trois Anti » : anticorruption, antigaspillage, antibureaucratie. 9 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 Diapo 25 L’alliance sinosoviétique : 2 affiches de propagande Dans le même temps, la Chine se met à l'école de l'Union soviétique (qui fournit des prêts et des experts), et fait le choix d'une économie planifiée : le premier plan quinquennal, qui débute en 1953, privilégie l'industrie lourde et les infrastructures de transports et sacrifie le monde rural47 -doc.2 p.110, Hommage funèbre à Staline. b. Vers une société totalitaire Dans les campagnes, la réforme agraire qui s'engage de 1949 à 1952 s’attache, par une redistribution des terres accompagnée de violences, à briser les élites locales traditionnelles (propriétaires fonciers, paysans riches) et à assurer la fidélité des paysans pauvres aux cadres locaux du Parti. Diapo 26 Une société totalitaire Par la loi du 1er mai 1950 sur le mariage qui légalise le divorce et instaure le libre consentement des époux, le Parti communiste s'attaque au caractère patriarcal de la société chinoise. C'est un pas important fait vers l'émancipation des femmes… et en même temps une étape indispensable à la mise en place d'une société totalitaire strictement encadrée : - l'endoctrinement commence dès l'enfance dans les organisations de jeunesse ; - l’encadrement des masses rurales est assuré par les coopératives ; - dans les villes, l’encadrement des individus revient à l'unité de travail (danwei) qui fournit logement, salaire, permet l'accès aux soins médicaux et aux rations de nourriture (le danwei exerce aussi une surveillance étroite sur ses membres, y compris dans leur vie privée) ; - la mobilité est encadrée par l'instauration d'un passeport limitant les déplacements à l'intérieur du pays (le hukou) ; - la répression a largement recours aux camps de rééducation par le travail (l’équivalent chinois du goulag : le laogai). En 1954, la Chine se donne une Constitution calquée sur le modèle soviétique. Le Parti est partout, il contrôle tout et aucune opposition n'est tolérée48. La censure sévit. Après avoir encouragé les intellectuels à exercer un droit de critique lors de l'épisode des Cent Fleurs (1956-1957), la campagne antidroitière lancée le 8 juin 1957 réprime les imprudents qui avaient fait entendre une voix discordante49. c. Les premiers pas de la puissance Quand la République populaire de Chine est proclamée en 1949, elle n'est reconnue que par les pays communistes. Mao Zedong signe un traité par lequel l'URSS accorde à la Chine sa protection militaire. Tournant le dos à la mer, la Chine redevient rapidement une puissance régionale : 46 Ou « Cinq Anti » : pots-de-vin, fraude fiscale, détournements de biens publics, escroqueries dans les contrats passés avec l'État et obtention illicite d'informations économiques auprès de l'État. 47 En dépit de la rhétorique officielle qui fait des paysans le fer de lance de la Révolution, la livraison des récoltes se fait à des prix fixés exagérément bas. 48 Il existe bien des partis politiques « alliés » (qui perdurent jusqu'à aujourd'hui), comme la Ligue démocratique, mais ce n'est qu'une fiction de démocratie. 49 La campagne des Cent fleurs se déroule de février à juin 1957. Mao, pour rétablir son autorité sur le Parti, affaiblie depuis le VIIIe Congrès, appelle à une « campagne de rectification ». Le principe est de redonner une certaine liberté d'expression à la population, tout particulièrement aux intellectuels, pour critiquer le Parti. La campagne des Cent fleurs est l'histoire d'« une comédie qui va se muer en tragédie » (Jean-Luc Domenach). En effet, le Parti réagit à la contestation en lançant une répression féroce qui fera plusieurs centaines de milliers de victimes emprisonnées, déportées et parfois exécutées. (Source : Wikipédia) 10 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 - - Diapo 27 Rupture sino-soviétique : Article Le Monde (1963) Elle restaure dès 1950 l’intégrité de son territoire continental, en reprenant le Tibet par la force –Carte 1 p.104, La Chine en 1949-1951, et en récupérant par la négociation des territoires frontaliers avec l’Union soviétique. Elle intervient en Asie : o En soutenant le parti communiste indochinois d’Ho Chi Minh pendant la guerre d'Indochine (1946-1954) ; o En envoyant des troupes en Corée contre les États-Unis en 1950 – doc.4 p.111, La propagande pendant la guerre de Corée (1950-1953). Dans un second temps, elle s’émancipe de la tutelle soviétique. Cette rupture s’explique par la persistance de différends frontaliers, par la volonté soviétique de maintenir la Chine dans une situation de dépendance50 et par la déstalinisation engagée par Khrouchtchev en février 1956 –Carte 1 p.104, La Chine en 1949-195151. À partir de 1958, la Chine sort de l'orbite soviétique –doc.5 p.111, Les affrontements sino-soviétiques dans les années 1960-1970 et s’affirme à la fois comme une puissance indépendante, et comme un leader du tiers-monde52 et des non-alignés – Troisième voie : vocabulaire p.106 + doc.1 p.107, Zhou Enlai à la Conférence de Bandung et du camp communiste. De fait, dans les années 1960, le rayonnement du modèle chinois est loin d’être négligeable 53 -Étude p.112-113, Mao, icône controversée du communisme chinois + Étude p.114-115, L’influence chinoise dans les pays des Suds. 2. Deux campagnes meurtrières Doc.4 p.113, Un bilan du Grand Bond en avant et de la Révolution culturelle- Dans ce contexte, le Grand Bond en avant et la révolution culturelle –Vocabulaire p.106 doit être considéré comme une tentative de frayer une voie originale vers le socialisme. En effet, un des traits caractéristiques du maoïsme consiste dans une vision de la Révolution non comme une phase transitoire mais comme un état permanent54. C’est dans cette perspective qu’il faut considérer la période 1949-1976 comme une série de mobilisations des masses destinées à ranimer l'élan révolutionnaire. Diapo 28 Le Grand Bond en avant : affiche de propagande + Extrait DP8093 a. La plus grande famine de l'histoire chinoise : le Grand Bond en avant Doc.3 p.110, L’annonce du « Grand Bond en avant » (1955)- Le Grand Bond en avant, politique menée entre 1958 et 1961, vise à accélérer le développement économique du pays pour l'amener vers le communisme. En rupture avec le modèle de l'industrialisation « par le haut », qui avait été mis en place avec l'aide des 50 Les dirigeants chinois reprochent aux Soviétiques de ne pas leur fournir toute l'assistance technique et financière dont ils ont besoin, notamment pour se doter de l’arme nucléaire –dont elle disposera finalement dès 1964. 51 Mao Zedong apprécie peu les remises en cause du culte de la personnalité et du pouvoir personnel, qui pourraient fort bien s'appliquer à lui. 52 Sa présence lors de la conférence de Bandung (1955) puis son ralliement aux non-alignés –nonalignement : vocabulaire p.241 annoncent déjà le rôle de chef de file qu'elle entend jouer auprès des nouveaux pays décolonisés. 53 Cf. manuel Nathan p.241 : « Son audience internationale est exceptionnelle, Mao incarnant l'espoir révolutionnaire des années 1960. Pour de nombreux intellectuels et étudiants déçus par l'URSS, la Chine maoïste est le laboratoire d'une société égalitaire brisant les hiérarchies élitistes. Pour les ressortissants du tiers-monde, elle se présente comme un modèle de développement autonome adapté aux contraintes des pays pauvres, restés ruraux et faisant face à une forte croissance démographique ». 54 Cf. la notion de « révolution permanente », initialement théorisée par Marx, réinterprétée par Trotsky puis Mao, entre autres. 11 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 techniciens soviétiques, cette politique mise sur la mobilisation de l'ensemble d'une population galvanisée par l'idéologie et le culte de la personnalité55. Réquisitionnés par des travaux d'infrastructures ou accaparés par les célèbres « petits hautsfourneaux »56, les paysans sont obligés de délaisser les travaux des champs et les récoltes. En résulte une totale désorganisation de la production, et une des famines les plus terribles de l'histoire chinoise (environ 30 millions de morts). Pire : la remontée de rapports issus des échelons régionaux de l'administration rivalisant d'exagération concernant les chiffres de la production diffère considérablement la prise de conscience du désastre. Mao Zedong apparaît de plus en plus coupé des réalités dans sa résidence luxueuse de Pékin, et ses visites sur le terrain sont de simples mises en scène orchestrées par le Parti. Dans ce contexte, Liu Shaoqi, président de la République depuis 1959, se pose de plus en plus comme un successeur potentiel de Mao, dont le prestige a été entamé par le fiasco du Grand Bond. b. Le désastre de la Révolution culturelle Diapo 29 Illustration : la Révolution culturelle + Extrait DP8093 Pour affirmer une « voie chinoise » dans l’édification du socialisme, mais aussi et surtout pour stopper la montée en puissance de la ligne pragmatique incarnée par Liu Shaoqi, Mao Zedong lance la jeunesse contre les intellectuels et les fonctionnaires du Parti en mai 1966 –doc.4 p.107, Les débuts de la Révolution culturelle : la Révolution culturelle –vocabulaire p.106 représente ainsi une projection dramatique sur l'ensemble de la société des luttes internes au plus haut niveau de l'appareil politique. Avec les encouragements de Mao, les campus se soulèvent violemment. La Révolution culturelle prend rapidement l'aspect d'une lutte à de multiples niveaux. C'est un affrontement intergénérationnel : les gardes rouges, des adolescents ou de très jeunes adultes fanatisés57, s'en prennent à tous les détenteurs d'une autorité tels que cadres du Parti, professeurs, etc. Sur le plan économique et social, la désorganisation est patente. Des dommages irréparables sont causés58, des intellectuels sont humiliés et maltraités59. Le nombre de morts causés par la Révolution culturelle est estimé entre 1 et 3 millions. Une nouvelle fois, le pays est à genoux, mais Mao Zedong triomphe : Liu Shaoqi, jeté en prison dès 1967, y meurt en 1969, victime de mauvais traitements60. Doc.1 p.110, « La pensée de Mao est la plus grande ! »- Le culte de la personnalité devient délirant et toute opposition au pouvoir personnel de Mao a été balayée : il est, plus que jamais, le maître du pays. Pour mettre un terme à l'anarchie et affaiblir les factions de gardes rouges, il organise à partir de 1969 l'envoi massif des « jeunes instruits » dans les campagnes61. 55 L'enthousiasme révolutionnaire est censé aplanir toutes les difficultés techniques. Le Grand Bond en avant pousse à l'extrême la logique de la collectivisation dans le monde rural : toutes les terres et tous les biens sont mis en commun dans le cadre des communes. Les repas ne sont plus préparés et consommés dans les familles, mais dans des cantines collectives (Cf. article Wikipédia). 56 …qui, du reste, produisent un acier inutilisable. 57 Témoignages et mémoires de cette période troublée… Lire : http://weibo.blog.lemonde.fr/2014/01/13/en-chine-le-repentir-de-lancienne-garde-rouge-enragee/ 58 …destruction de temples, de livres, d'œuvres d'art, etc. 59 Cf. le célèbre écrivain Lao She, poussé au suicide en 1966. À lire : « Vie et mort de Lao She racontées par son fils », Libération, 25 juin 1998 60 Lin Biao, dont la servilité à l'égard de Mao semble absolue, est alors désigné comme son successeur. 61 En dix ans, plus de 17 millions de jeunes gens resteront en moyenne six ans à la campagne pour, selon la phraséologie du moment, « apprendre des masses ». Une génération entière (à laquelle 12 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 3. La fin du règne de Mao Après la mort de Lin Biao62, un courant radical (la « Bande des Quatre » : Jiang Qing, la femme de Mao, Zhang Chunqiao, Wang Hongwen et Yao Wenyuan) et une faction plus modérée (Zhou Enlai et Deng Xiaoping) s’affrontent. Durant ces années, les relations avec l'URSS se détériorent encore, tandis qu’un rapprochement se dessine avec les États-Unis. D'abord timide (l’équipe de ping-pong américaine est invitée à Pékin en 1971), il s’affirme avec la visite du président Nixon en février 1972 qui avait permis à la Chine populaire de récupérer (dès octobre 1971) le siège occupé depuis 1949 par Taïwan au Conseil de sécurité des Nations unies. Diapo 30 Vidéo : JT 22 juillet 1977, réhabilitation de Deng À la mort de Mao (9 septembre 1976), la Chine semble arrêtée dans son développement. Elle a réussi à devenir une puissance politique avec une certaine légitimité internationale, mais n'est pas encore une puissance économique. Pour lui succéder, Deng Xiaoping63 -Biographie p.108, grâce à sa connaissance intime de l'appareil politique du Parti (et malgré sa mise à l’écart pendant la révolution culturelle), s’impose progressivement comme successeur de Mao et entame une politique d’ouverture et de conversion progressive à l'économie de marché en 1978. B. L ES NOUVEAUX CHEMINS DE LA PUISSANCE ( DEPUIS 1976) Cours 2 p.108, Depuis 1976, une affirmation progressive de la puissance- La mort de Mao Zedong (1976) ouvre une ère nouvelle. En une trentaine d’années, la Chine acquiert un statut de puissance économique et financière mondiale. Elle se donne désormais pour objectif de dépasser la puissance des États-Unis, auxquels elle se heurte de plus en plus dans les domaines économique et diplomatique. 1. La Chine des réformes (1978-2000) a. Ouverture économique, politique de l'enfant unique Diapo 31 Deng Xiaoping et l’ouverture économique (DP8093 p.54-55) Citation p.108 + doc.2 p.109, Le programme de Deng Xiaoping (1982)- La politique des réformes économiques se traduit, dans les années 1980, par la décollectivisation du secteur agricole, l’abandon de la planification et l’installation progressive d’une économie de marché : pour qualifier ce nouveau système économique, le PCC invente le concept de « socialisme de marché » –Vocabulaire + citation p.108. Le primat du politique disparaît64 : l'objectif prioritaire consiste désormais dans les « quatre modernisations » (agriculture, industrie, sciences et forces armées) – Vocabulaire p.108. L'ouverture aux investissements étrangers est dans un premier temps limitée aux Zones économiques spéciales (ZES) –Vocabulaire p.108 situées sur la côte, où des conditions très favorables sont offertes pour attirer technologies et capitaux 65 . La Chine connaît alors une forte croissance 66 -doc.3 p.109, Le appartiennent par exemple les prix Nobel de littérature Gao Xingjian et Mo Yan ou encore le réalisateur Zhang Yimou) en a été profondément marquée. 62 Le 13 septembre 1971, dans des conditions rocambolesques. Longtemps présenté comme un traître, il est réhabilité en 2007. 63 Il dirigera la Chine jusqu’en 1992. 64 Cf. le fameux dicton repris par Deng Xiaoping : « Peu importe qu'un chat soit blanc ou noir, s'il attrape la souris, c'est un bon chat » (1960) 65 NB : un part importante des investissements réalisés en Chine proviennent de Hong Kong, de Taïwan et des Chinois d'outre-mer. 66 NB : une partie de l'essor économique de cette époque constitue un rattrapage des années de la Révolution culturelle. 13 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 développement économique de la Chine depuis 1978, portée par une très importante industrie de biens de consommation 67 destinés à l’exportation qui emploie une main-d’œuvre bon marché, abondante et docile68. L'adoption d'une politique volontariste de maîtrise de la croissance démographique marque un autre tournant majeur en 1979, avec la politique de l'enfant unique, qui parvient à ralentir une inquiétante explosion démographique69. b. Le tournant de Tian’Anmen Diapo 32 2 Vidéos : le « Printemps de Pékin » Doc.1 p.109, La répression de la place Tian’anmen- En 1989, les étudiants prennent la tête d’un mouvement contestataire et réclament une démocratisation politique (la « cinquième modernisation »). Ils dénoncent également la corruption dans les rangs de l'administration et du PCC. L’expression la plus symbolique du mouvement est l'occupation, à la mi-avril 1989, de la place Tiananmen, au cœur de Pékin, à côté des principaux centres du pouvoir. Après quelques semaines, le mouvement est réprimé dans un bain de sang (1800 morts) par l'armée durant la nuit du 3 au 4 juin. S’ensuit une reprise en main radicale de la société, qui représente un moment décisif : si les réformes économiques se poursuivent et même s'accélèrent à partir de 199270, il n'est pas question de concéder des libertés politiques. En fait, le PCC fait un pari (gagnant jusqu'à présent) : la prospérité, fruit d'une accélération des réformes, contribue à minimiser l'expression des mécontentements. Par ailleurs, il reprend la main en matière de propagande : - en mettant en avant une rhétorique antioccidentale ; - en abandonnant la rhétorique révolutionnaire au profit du nationalisme. Diapo 33 Le renouvellement des dirigeants (texte DP + photos) Diapo 34 Carte : rétrocession Hong Kong & Macao + lien Google Earth Après Deng Xiaoping, la promotion des dirigeants s'effectue selon un processus qui, n'a évidemment rien de démocratique mais qui exclut désormais les violences physiques. Après les mandats de Jiang Zemin71 et Hu Jin tao72, il peut être considéré comme à peu près rodé : le numéro un désigné cumule les fonctions de secrétaire général du PCC et la présidence de la République. Après deux mandats de cinq ans, il s'efface. C'est ainsi que le nouveau président, Xi Jinping, a été investi lors du dernier congrès du PCC (le 18ème) à l'automne 2012. c. Fin XX è m e siècle, une politique étrangère de plus en plus active La Chine obtient la rétrocession de la possession britannique de Hong Kong (1997) et de la colonie portugaise de Macao (1999)73. Ces deux rétrocessions ont été un incontestable succès, d’autant plus que les autorités chinoises ont veillé à ne pas tuer la poule aux œufs d'or, en faisant bénéficier Hong Kong et Macao d'un cadre légal spécifique (selon la doctrine « Un pays, deux systèmes »)74. 67 Dans un premier temps, il s’agit de biens courants destinés à l’exportation ; la « montée en gamme » sera postérieure. 68 Il n'est bien sûr pas question de syndicats indépendants… 69 La barre du milliard d’habitants n'est franchie qu'au début des années 1980. En 2011, la population chinoise s'élevait à 1,347 milliard. 70 Début d’une vague de privatisations. 71 Jiang Zemin : président de la République populaire de Chine entre 1993 et 2003 72 Hu Jin Tao : président de la République populaire de Chine du 15 mars 2003 au 14 mars 2013. 73 L'île de Hong Kong étant devenue une propriété de la couronne britannique à l'issue de la première guerre de l'opium et du traité de Nankin qui y mettait fin en 1842. 74 De cette façon, leur retour dans son giron ne s'est traduit ni par un exode de population, ni par des fuites de capitaux, ni par un ralentissement économique. À lire : Hong Kong et Macao, modalités 14 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 2. La Chine, puissance montante du XXI è m e siècle Dans un ordre mondial profondément renouvelé après la fin du monde bipolaire, dominé désormais par les logiques de marché, et à l'issue de plus de trente années de réformes chinoises, la croissance économique exceptionnelle de la Chine a permis son émergence en tant que nouvelle puissance asiatique et mondiale. a. L'émergence d'une grande puissance économique... La Chine s'est urbanisée, un exode rural colossal75 drainant plus de 200 millions de personnes, principalement vers les grandes villes de la côte. Diapo 35 Article Le Monde, 10 janvier 2014, « Commerce : la Chine revendique la 1ère place mondiale » + Extrait Atlas « Autrement » Le maintien d'un fort taux de croissance économique annuel (environ 10%) a décuplé le PIB depuis 1978, permettant à la Chine de dépasser en 2010 le Japon pour devenir la seconde économie du monde derrière les États-Unis76, et d’améliorer le niveau de vie de la population –de manière très inégale. Son modèle de développement reposait jusqu'à présent sur la production de biens de consommation à faible valeur ajoutée destinés à l'exportation77. Désormais, la Chine s'efforce, avec succès, d'effectuer une montée en gamme : non contente de devenir par exemple aujourd'hui premier producteur mondial d'acier, d'aluminium, de ciment ou d'automobiles, elle produit, grâce à des transferts de technologies bien négociés et à l’investissement dans la R&D, des ordinateurs, des trains à grande vitesse et des avions. b. ...aux faiblesses multiples Faiblesses économiques, sociales, envi ronnementales - Diapo 36 Extrait DP 8093 : inégalités sociales, crise écologique - - La forte dépendance de l’économie chinoise aux débouchés des marchés nord-américain, japonais et européen la rend vulnérable à un retournement de la conjoncture mondiale comme à une montée des protectionnismes. La concurrence de pays d'Asie aux coûts salariaux encore très faibles (Vietnam, Bangladesh) commence à se faire sentir. L'enrichissement d'une élite et l'émergence d'une classe moyenne urbaine s'accompagnent du creusement des inégalités sociales entre catégories sociales comme entre régions littorales et intérieures, etc. Des dommages irréparables ont été causés à l'environnement par l'usage massif d'engrais et de pesticides, l'industrialisation à outrance, l’essor de la consommation et le laxisme avec lequel la réglementation, quand elle existe, est appliquée78. d’une rétrocession réussie… ce qui n’empêche pas certaines tensions, comme lors de la « révolution des parapluies » de l’automne 2014. 75 À découvrir, parmi 24 documentaires multimédia, un portrait édifiant… et émouvant : « Zhang, une jeunesse chinoise » : http://www.france5.fr/portraits-d-un-nouveau-monde/#/theme/chine/zhangune-jeunesse-chinoise/ 76 En termes de PIB par habitant, en revanche, la Chine reste loin derrière les pays occidentaux et le Japon (5430 dollars en 2011 contre plus de 40000 au Japon). 77 Grâce à sa politique d'ouverture, la Chine a intégré tous les organismes financiers internationaux : FMI et Banque mondiale en 1980-1981, OMC en 2001. 78 Seize des vingt villes les plus polluées du monde se trouvent en Chine. À lire, Le Monde, 21 octobre 2013, « En Chine, Harbin paralysée par la pollution » 15 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 Faiblesses poli tiques Diapo 37 Reportage Euronews (vidéo) + article Le Monde (nov. 2013) : « Pékin réforme l’économie, pas la politique » Sur le plan politique, malgré certaines concessions79, le régime reste autoritaire, et la mainmise du parti sur la société incontestée80. Quelques progrès vers un État de droit ont été faits, mais il n'y a pas de séparation des pouvoirs. Les médias restent très contrôlés, y compris Internet. Le PCC continue à réprimer avec force toute forme d'organisation échappant à son contrôle81. c. Au-delà de la puissance économique À l’échelle régionale, un acteur incontournable Diapo 38 Une puissance régionale incontournable : carte « Les règlements frontaliers » + Extrait Atlas « Autrement » La Chine nie toute volonté hégémonique en Asie, mais elle s'y positionne comme une puissance régionale incontournable. Ainsi, elle y défend ses intérêts au sein d'alliances régionales comme l'Organisation de coopération de Shanghai ou de l'ASEAN82 à laquelle elle est associée. Elle intensifie aussi depuis peu ses relations commerciales avec l'Océanie (achat de matières premières, notamment à l’Australie). Le sort de Taïwan est une des préoccupations principales de la politique étrangère de la Chine populaire qui clame sa souveraineté sur l'île. Les entreprises taïwanaises ont beaucoup investi sur le continent depuis les réformes et les deux économies sont de plus en plus étroitement liées. Pékin mise sur cette interdépendance et sur le temps : une réunification par la force semble donc exclue, et le statu quo devrait perdurer à moyen terme. Aujourd'hui, les frontières terrestres chinoises sont globalement fixées83, mais les litiges restent vifs à propos des frontières maritimes en mer de Chine (avec le Japon essentiellement, mais aussi les Philippines et le Vietnam) à propos de la souveraineté sur certaines îles : îles Senkaku (Diaoyu en chinois) 84, îles Spratley, îles Paracels. À l’échelle mondiale, une superpuissance en devenir ? L e s o ft p o wer c hi no is Diapo 39 La puissance chinoise dans le monde – Extrait DP 8093. Étude 5 p.118, Le soft power chinois- La Chine affirme de plus en plus son soft power. L'organisation réussie des Jeux olympiques de Pékin de 2008 –doc.2 p.118, L’ouverture des JO de Pékin (2008) et de l’Exposition universelle de Shanghai en 2010 ont offert l’occasion au régime de présenter le visage d'un pays puissant et en 79 L’automne 2013 est marqué par des annonces fortes : assouplissement de la politique de l’enfant unique, abolition du Hukou, fermeture des laogai. 80 Le PCC, tout puissant, voit ses effectifs dépasser aujourd'hui les 80 millions. Le terme de « communiste » ne doit plus faire illusion : adhérer au PCC concrétise surtout une réussite sociale (40% des entrepreneurs en sont membres). 81 Cf. la lutte contre le Falungong (mouvement syncrétique prônant une doctrine moralisatrice, messianiste et apocalyptique ainsi que la pratique de la méditation et de techniques corporelles) depuis la fin des années 1990. Comptant des dizaines de millions de membres, excellant à utiliser les techniques les plus modernes de communication, ce mouvement est perçu comme une intolérable menace. 82 ASEAN : Association des nations de l'Asie du Sud-Est (10 membres : Indonésie, Malaisie, Philippines, Singapour, Thaïlande, Brunei, Viêt Nam, Laos, Birmanie, Cambodge) 83 Accord avec le Vietnam en 1999, la Russie en 2004. Des différends demeurent néanmoins avec l’Inde au sujet du Tibet. 84 La Chine s'oppose au Japon à propos de la souveraineté sur les îles Senkaku (en japonais / Diaoyu (en chinois). La décision récente du Japon de nationaliser ces îles, rachetées à leurs propriétaires privés, a été interprétée comme une provocation par Pékin. 16 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 voie de modernisation rapide. Le développement des instituts Confucius85 -Carte 1 p.118, Les instituts Confucius en 2010 à travers le monde témoigne également de cette volonté d'affirmer une présence culturelle86. Diapo 40 Carte : la diaspora chinoise dans le monde. La Chine conçoit les communautés de Chinois d'outre-mer87 comme un levier de sa puissance et saisit chaque occasion de mobiliser sa diaspora : celle-ci doit se sentir redevable de la Chine et contribuer par conséquent à son développement. Un l ea d e r d e s « Su d » Étude 3 p.114-115, L’influence chinoise dans les Suds- Depuis les années 1990, à mesure que croissent ses moyens financiers, la Chine renforce ses positions. Les excédents commerciaux qui lui ont permis de constituer d'immenses réserves de change s'avèrent une arme diplomatique redoutable88 pour étendre son influence : - Diapo 41 La Chine en Afrique – Extrait Atlas « Autrement ». Parce qu’elles ont permis à la Chine de constituer un important fonds souverain. Parce qu’elles ont permis l’essor des IDE chinois ; ceux-ci ont été multipliés par six entre 2004 et 2010, pour dépasser les 300 milliards de dollars. Avec les grandes compagnies minières et pétrolières d’abord89, puis avec le rachat de sociétés étrangères par les entreprises chinoises90. Parce qu’elles permettent de financer une politique d’aide au développement, notamment à destination de l’Afrique. La Chine prend en effet une part de plus en plus importante dans la vie économique des pays d’Afrique, multipliant les partenariats pour sécuriser ses approvisionnements en matières premières, particulièrement dans le domaine énergétique. R e nf o rc e m en t et mo d er nis a t io n d u po t e nt i el m il ita i r e Diapo 42 Chine-États-Unis – Extrait Atlas « Autrement ». Les dépenses militaires de la Chine sont en hausse constante depuis les années 1990 ; son budget militaire est aujourd'hui le deuxième du monde91. Cela suscite l'inquiétude des États voisins, ainsi que des États-Unis. C ONCLUSION Diapo 43 Conclusion La Chine est dorénavant l'une des principales puissances mondiales. Son retour sur la scène internationale et la force de son développement économique ont été parmi les facteurs majeurs de recomposition des équilibres mondiaux après la fin du fractionnement bipolaire qui a dominé le monde au XXème siècle. L'émergence chinoise nous fait entrer de plain-pied dans un nouveau siècle, qui, au-delà des 85 Depuis 2004, les instituts Confucius ont pour but est de diffuser la langue et la culture chinoises. Ils sont environ 700, répartis dans environ 100 pays, dont une quinzaine en France. 86 Le soft power chinois s'affirme par d'autres voies comme le cinéma ou la mode. Le secteur des dessins animés est qualitativement en net progrès et on peut parier sur des succès à l'exportation dans les années qui viennent. 87 Soit environ 35 millions de personnes en 2011. 88 En 2010, elles s’élevaient à 2850 milliards de dollars. 89 Investissements dans des pays en voie de développement et en Australie au début des années 2000. 90 Certaines de ces opérations sont très médiatisées, comme l'acquisition de la branche d'IBM fabriquant des ordinateurs par le groupe chinois Lenovo en 2005, qui fait de ce dernier l'un des leaders mondiaux du secteur. 91 Par exemple, son premier porte-avions est entré en service en septembre 2012 17 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 oppositions idéologiques d'hier, remet aussi en question des lectures ancrées depuis longtemps dans nos esprits : empire américain, domination des pays industrialisés, suprématie de la modernité occidentale. Dans un monde où l'augmentation des interdépendances économiques s'accompagne de nouvelles tensions et revendications identitaires, le poids de la Chine, plus encore que celui du Japon, place l'Asie orientale comme un partenaire décisif de notre propre avenir. Débat p.122-123, États-Unis vs Chine : quel basculement des puissances ? 18 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 QUESTION 2 UN FOYER DE CONFLITS. LE PROCHE ET LE MOYEN-ORIENT, UN FOYER DE CONFLITS DEPUIS LA SECONDE GUERRE MONDIALE INTRODUCTION ........................................................................................................................................................................ 20 I. 1945-1991. PENDANT LA GUERRE FROIDE, UNE RÉGION INSTABLE ET UN PIVOT DES RELATIONS INTERNATIONALES .... 21 A. 1. 2. UNE RÉGION AU CŒUR DES TENSIONS INTERNATIONALES DE 1945 À 1991. ........................................................................................ 21 La rivalité américano-soviétique .................................................................................................................................... 21 L'inexorable montée du fondamentalisme islamique et la révolution iranienne ........................................................... 22 a. b. 3. 4. Les hydrocarbures, enjeu économique, facteur d’inégalités et de conflits .................................................................... 23 Des conflits permanents................................................................................................................................................. 23 a. b. c. B. 1. 2. Étude : le canal de Suez, de la crise à nos jours.............................................................................................................................23 Étude : la guerre civile au Liban (1975-1990) ................................................................................................................................26 La guerre Iran-Irak (1980-1988) ....................................................................................................................................................27 CONFLITS AUTOUR DE LA CRÉATION ET DE L’EXISTENCE DE L’ÉTAT D’ISRAËL ......................................................................................... 27 1947-1948 : la guerre civile et le plan Dalet .................................................................................................................. 28 1948-1973 : de la première guerre israélo-arabe à la guerre du Kippour...................................................................... 28 a. b. 3. La proclamation de l’État d’Israël ..................................................................................................................................................28 La guerre des Six Jours et ses conséquences.................................................................................................................................29 1973-1992 : de Kippour au « processus de paix » .......................................................................................................... 29 a. b. II. Montée du fondamentalisme islamique .......................................................................................................................................22 La révolution iranienne .................................................................................................................................................................22 1973 : du conflit localisé à la crise internationale .........................................................................................................................29 L’évolution du conflit jusqu'en 1992 .............................................................................................................................................30 1991 À NOS JOURS. UN FOYER DE DÉSTABILISATION DU NOUVEL ORDRE MONDIAL POST-GUERRE FROIDE .................. 30 A. 1. LES DEUX GUERRES DU GOLFE : GUERRES DU PÉTROLE OU CONFLITS POST-GUERRE FROIDE ? .................................................................. 30 La première guerre du Golfe (1990-1991)...................................................................................................................... 30 a. b. c. 2. La seconde guerre du Golfe (2003) ................................................................................................................................ 32 a. b. B. 1. 2. 3. III. Aux origines du conflit ...................................................................................................................................................................30 Le déroulement du conflit .............................................................................................................................................................31 Quels enseignements ? .................................................................................................................................................................31 La démocratisation par la force ? ..................................................................................................................................................32 La crise irakienne : guerre préventive et occupation ....................................................................................................................33 DEPUIS 1992 : DU « PROCESSUS DE PAIX » À LA « FEUILLE DE ROUTE » ............................................................................................. 33 Vers la reconnaissance mutuelle .................................................................................................................................... 33 De l'accord Gaza/Jéricho à l'enlisement du processus de paix ...................................................................................... 34 La paix impossible ? ....................................................................................................................................................... 34 AUJOURD’HUI. LE LIEU DE TOUS LES PÉRILS GÉOPOLITIQUES .......................................................................................... 35 A. 1. 2. DE PUISSANTS FACTEURS DE DÉSTABILISATION GÉOPOLITIQUE ........................................................................................................... 35 La fragilité des États et les contestations populaires ..................................................................................................... 35 Les tensions religieuses à leur paroxysme ..................................................................................................................... 36 a. b. B. C. Une mosaïque ethnique et religieuse ...........................................................................................................................................36 La montée de l’islamisme : un phénomène puissant ....................................................................................................................37 L’ENJEU ÉNERGÉTIQUE .............................................................................................................................................................. 37 UN ARC DE CRISES .................................................................................................................................................................... 39 CONCLUSION ............................................................................................................................................................................ 40 19 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 QUESTION 2 UN FOYER DE CONFLITS. LE PROCHE ET LE MOYEN-ORIENT, UN FOYER DE CONFLITS DEPUIS LA SECONDE GUERRE MONDIALE Manuel p.132-165 Diapo 1-3 Titre + Intro I NTRODUCTION Avant tout, attention aux confusions : l’ensemble Proche-Orient / Moyen-Orient ne coïncide pas avec le « monde arabe », qui s’étend du Golfe arabo-persique à l’Océan atlantique92. En France, l’expression « Proche-Orient » désigne traditionnellement les régions de l’Est du bassin méditerranéen, de la Turquie à l’Égypte. L’expression « Moyen-Orient », quant à elle, s’est imposée depuis un siècle sous l’influence des Anglo-Saxons, notamment à l’issue de la Seconde Guerre mondiale. Géographiquement, le Moyen-Orient se définit comme l’ensemble des pays de l’Asie de l’Ouest et du Sud-Ouest, de la Turquie à l’Iran, voire l’Afghanistan, et du Sud du Caucase à la péninsule Arabique, ensemble qui comprend en outre l’Égypte. Des constantes sont observables tout au long de la période : les luttes d’influence entre puissances régionales, les ingérences des puissances étrangères, l’instabilité des frontières et la fragilité des États : - Tout au long du XXe siècle, les principaux États du Proche et Moyen Orient se sont livré une lutte d’influence : nationalisme turc à partir des années 1920, rivalités pour la direction du mouvement panarabe –Panarabisme : vocabulaire p.138 dans les années 1930 puis 1950-1960, manœuvres des monarchies du Golfe contre leurs voisins trop ambitieux93… - Jusqu’à la fin de la Première Guerre mondiale, le Proche et le Moyen-Orient subissent la domination ottomane ; puis, l’entre-deux-guerres est l’ère des mandats SDN exercés par la France et le Royaume-Uni. Après quoi, dans le contexte de la guerre froide, Union soviétique et États-Unis cherchent à établir leur influence sur la région ; enfin, la guerre froide achevée, l’hyperpuissance étatsunienne, désireuse d’y établir un nouvel ordre régional, fait basculer par ses interventions militaires la région dans une nouvelle phase d’instabilité. - Par ailleurs, une des caractéristiques géopolitiques fondamentales du MoyenOrient et du Proche-Orient consiste dans l’instabilité des frontières, issues d’un découpage colonial souvent effectué au mépris des réalités humaines, 92 Entre ces deux limites, on distingue trois blocs géographiques, linguistiques et culturels : le Maghreb à l’ouest, le Machrek au centre et le Golfe à l’est : le Machrek (le « Levant », c’est-à-dire l’Est) correspond à l’ancien « croissant fertile » (Irak, Syrie, Liban, Palestine, Jordanie Égypte). Le Maghreb (le « Couchant », c’est-à-dire l’Ouest) est l’Occident du monde arabe. Le Golfe représente les pays de la péninsule arabique. 93 L’Égypte de Nasser –Étude p.144-145, Nasser, la voix du panarabisme, la Syrie d’Hafez puis de Bachar El-Assad, l’Iran des mollahs –Étude p.148-149, L’Iran et l’islamisme chiite après 1979 ou encore l’Irak de Saddam Hussein... 20 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 économiques ou historiques, qui affaiblit la notion même d’État. Modifiées à de nombreuses reprises, elles sont souvent discutées, voire niées94. Diapo 4 Problématiques + Sommaire Quels facteurs font de la région un foyer particulier de conflits ? Pourquoi ces conflits ont-ils dans le monde une telle résonnance ? I. Diapo 5 Titre I + Sommaire 1945-1991. P ENDANT LA GUERRE FROIDE , UNE RÉGION INSTABLE ET UN PIVOT DES RELATIONS INTERNATIONALES Durant cette période, on retrouve les « constantes » exposées ci-dessus : luttes d’influence entre puissances régionales, ingérences des grandes puissances étrangères, remises en cause des frontières et fragilité des États. A. U NE RÉGION AU CŒUR DES TENSIONS INTERNATIONALES DE 1945 À 1991. Entre 1945 et 1991, la géopolitique complexe de la région est également déterminée par les tensions de la guerre froide95, durant laquelle les deux superpuissances rallient à leurs blocs différents États de la région (Israël, Arabie saoudite notamment pour les États-Unis, Syrie, Irak pour l’Union soviétique). 1. La rivalité américano-soviétique Diapo 6 Texte + carte : le traité de Bagdad Le développement de la puissance soviétique au Moyen-Orient est le souci principal des puissances occidentales de 1945 jusqu'à l'effondrement de l'Union soviétique en 1991. Dans l'immédiat après-guerre, les puissances occidentales ont au MoyenOrient des intérêts vitaux pour leur sécurité, car cette région est un important carrefour de communications96. Le contrôle militaire du Moyen-Orient est donc pour l'Occident un élément fondamental de politique de défense, d’où la signature en 1955 du Pacte de Bagdad, dans le cadre du containment induit par la guerre froide97. Pour exercer ce contrôle, il faut aussi agir sur la vie politique des pays de la région, afin d'empêcher la « subversion » que Moscou exerce à travers le développement des partis communistes locaux98 et combattre l’influence des partis nationalistes et 94 À cet égard, la question de Palestine n’est qu’un objet de tension parmi d’autres. Cf. le cas de la Syrie face au Liban (création française en 1920) ou de l’Irak face au Koweït (émirat indépendant en 1961, mais issu du démembrement d’une ancienne province ottomane dont le centre était la ville irakienne de Bassorah) 95 Auparavant, c’étaient les rivalités coloniales, notamment entre Anglais et Français, qui interféraient… 96 C’est par exemple un carrefour vital pour le déploiement rapide de troupes militaires vers l'Extrême-Orient, où l'URSS effectue aussi des percées politiques considérables grâce au triomphe du communisme en Chine et au développement des partis communistes dans la péninsule Indochinoise. 97 Le traité d'organisation du Moyen-Orient, plus communément appelé pacte de Bagdad, a été signé le 24 février 1955 par l'Irak, la Turquie, le Pakistan, l'Iran et le Royaume-Uni. Les États-Unis rejoignent le comité militaire de l'alliance en 1958. Le pacte sera rebaptisé Organisation du traité central (Central Treaty Organisation) ou CenTO, après le retrait irakien le 24 mars 1959. S'inscrivant dans le cadre de la politique de l'endiguement, menée par les États-Unis lors de la guerre froide, dont le but était de ralentir la montée en puissance de l'Union soviétique au Moyen-Orient, à travers la mise en place de ce que l'OTAN appelle un « cordon sanitaire ». Source : Wikipédia. 98 Contrairement à une idée reçue, la doctrine marxiste connaît alors un succès grandissant au Moyen-Orient. Les partis communistes s'y développent considérablement. Ils ne sont pas seulement créés et dirigés par des jeunes issus de minorités ethniques ou religieuses (kurdes, juifs ou chrétiens). S'y côtoient des fils de bourgeois ou de familles aristocrates, des enfants de classe moyenne, des 21 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 anti-impérialistes, de plus en plus être attirés par les diverses formes de régimes socialistes (yougoslave, soviétique, chinois). Quant à l'Union soviétique, désireuse de rompre le dispositif de containment américain, elle cherche par tous les moyens à ancrer son influence au Moyen-Orient. Ainsi, après avoir appuyé massivement la création d'un État juif en Palestine99, elle se détourne d’Israël dès le milieu des années 1950, pour appuyer les mouvements nationaux arabes, cependant qu'Israël trouvera des alliés naturels de plus en plus proches dans les anciennes puissances coloniales européennes100. 2. L'inexorable montée du fondamentalisme islamique et la révolution iranienne a. Montée du fondamentalisme islamique À partir de la défaite arabe face à Israël en 1967, on assiste à une montée générale des fondamentalismes religieux au Moyen-Orient. Les États-Unis y voient une opportunité pour renforcer le containment. Ainsi, ils encouragent l'Arabie Saoudite à mobiliser l'islam dans la lutte contre l'influence de l'Union soviétique. D’où la fondation, en 1969 à La Mecque, de l’OCI101. La dictature militaire islamique pakistanaise, sera, aux côtés de l'Arabie Saoudite, le pilier de cette organisation. Parmi les buts de l’OCI, figurent, en plus du soutien au peuple palestinien, de l’affirmation des valeurs islamiques et de la promouvoir de la solidarité entre États islamiques, la lutte contre l'athéisme marxiste. Un peu partout, les mouvements intégristes sont financés et des subsides sont versés par l'Arabie Saoudite, le Koweït ou le Qatar aux États suivant cette voie. b. La révolution iranienne Diapo 7 Vidéo JT TF1 : la révolution iranienne Dossier p.148-149, L’Iran et l’islamisme chiite après 1979- Le succès de cette politique pousse les États-Unis à favoriser une prise de pouvoir des religieux à Téhéran, lorsque le régime du shah d'Iran vacille en 1979. La crainte est trop grande de voir la coalition des partis de gauche, en particulier le puissant Parti communiste (Toudeh), prendre le pouvoir. Tiré de son exil irakien et installé à Paris, l'imam Khomeiny –Biographie p.148 jouira d’un fort soutien occidental pour s'affirmer comme chef charismatique de l'opposition iranienne. Lorsque le shah d'Iran abandonne le pouvoir en janvier 1978, l'imam est ramené de Paris à Téhéran le 1er février 1979, dans un avion spécialement affrété par le gouvernement français, qui le traite comme un véritable chef d'État. Sitôt installé, le nouveau régime entre alors dans une surenchère islamique à l'échelle régionale et internationale, que les ÉtatsUnis ne semblaient pas avoir prévue102. ouvriers syndiqués, des chrétiens, des juifs et des musulmans, des artistes de talent et de grands intellectuels. 99 Staline considérait en effet que le sionisme, majoritairement socialiste et originaire d'Europe centrale, désormais tombée sous sa domination, avait un potentiel révolutionnaire à l'échelle de la région, chasse gardée traditionnelle des Français et des Anglais. 100 Cf. la crise de Suez ci-après, qui marque le basculement définitif d'Israël dans le camp occidental, dont les États-Unis vont désormais prendre la tête. À cette occasion, l’Union soviétique fait une entrée fracassante sur la scène du Moyen-Orient, où désormais les États-Unis et l'URSS se font directement face. 101 OCI : Organisation de la coopération islamique. 102 Cf. la prise d’otages de l’Ambassade des États-Unis à Téhéran (novembre 1979-janvier 1981) – doc.1 p.148, Le rejet de l’influence occidentale 22 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 En décembre 1979, l’Union soviétique réagit en pénétrant en Afghanistan, pour y soutenir un régime socialiste qui lui est favorable. Les États-Unis continuent alors, à travers leurs deux alliés fidèles saoudiens et pakistanais, de renforcer partout dans les pays musulmans les mouvements intégristes sunnites et chiites. 3. Les hydrocarbures, enjeu économique, facteur d’inégalités et de conflits Le Moyen-Orient concentre près des deux-tiers des réserves mondiales conventionnelles prouvées de pétrole et 40% des réserves de gaz naturel –Carte 3 p.137, une région stratégique et conflictuelle. Diapo 8 Photo Quincy + article le Monde sur le renversement de Mossadegh L’exploitation a commencé dès le début du XXème siècle, mais l’exploitation massive débute après 1945, au bénéfice des grandes compagnies pétrolières européennes et américaines. Le développement de l'industrie pétrolière a fait de la région le plus vaste réservoir mondial d'énergie à bon marché, dont le contrôle est jugé vital pour le bon fonctionnement des économies occidentales. Si les compagnies européennes dominent l'exploitation des pétroles irakien et iranien, les compagnies américaines ont obtenu en 1945 le monopole exclusif de l'exploitation des énormes réserves saoudiennes- Cf. pacte du Quincy (14 février 1945) par lequel Franklin D. Roosevelt et Abdelaziz Ibn Saoud conviennent qu’un accès aux ressources pétrolières serait garanti aux États-Unis en échange de la protection militaire de la monarchie saoudienne –doc.1 p.152, Les États-Unis protecteurs de l’Arabie Saoudite (1945). À partir du début des années 1960, les découvertes de réserves vont se multiplier au Moyen-Orient, en particulier dans les petites principautés bédouines et marchandes de la péninsule Arabique (Abu-Dhabi, Qatar, Koweït). Pour permettre au pétrole de s'écouler librement vers l'Europe et les Amériques, des oléoducs sont construits qui amènent le précieux liquide des eaux du golfe Persique et de la haute Mésopotamie en Irak (Kirkouk) à la Méditerranée. Les jeunes nations productrices ne se réapproprient que progressivement leurs ressources103, souvent avec beaucoup de difficultés104. Cf. la crise iranienne (19511953) –doc.2 p.152, En Iran, le renversement de Mossadegh (1953). En 1960, les pays producteurs parviennent à imposer leur contrôle sur les prix en se dotant de l’OPEP –Vocabulaire p.152, doc.3 p.153, La délégation du Koweït lors de la création de l’OPEP…, qu’ils utilisent aussi comme un moyen de pression sur les pays industrialisés. Cf. en 1973, au moment de la guerre du Kippour105, ils provoquent ainsi l'augmentation des prix et un premier choc pétrolier, qui contribue à déstabiliser l’économie capitaliste mondiale –doc.4 p.153, Les conséquences pétrolières de la guerre du Kippour (1973). 4. Des conflits permanents Diapo 9 Vidéo : la crise de Suez + Lien Prezi a. Étude : le canal de Suez, de la crise à nos jours 106 http://prezi.com/hkdh8pa-en_v/?utm_campaign=share&utm_medium=copy. Achevé en 1869 après 37 années de travaux conduits par le Français Ferdinand de 103 Par exemple, c’est en 1973 que le gouvernement saoudien acquiert une part de 25% dans Aramco (l’Arabian American Oil Company était jusqu’alors détenue à 100% par des capitaux étatsuniens), pour l’augmenter à 60% en 1974 et finalement en prendre le plein contrôle en 1980. Depuis 1988, la compagnie s’appelle Saudi Aramco. 104 105 106 Cf. ci-après. Cf. « Prezi » et exercice : ici. 23 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 Lesseps, le Canal de Suez fut la propriété des actionnaires de la Compagnie universelle de Suez jusqu’en 1956. Cet axe de 164 km relie la mer Rouge à la mer Méditerranée, et sépare l’Asie de l’Afrique. Sa position et l’importance de son trafic en font un des lieux éminemment stratégiques de la région et du monde107. - La nationalisation du canal Gamal Abdel Nasser, président de l’Égypte (1954-1970), leader du monde arabe – Étude p.144-145, Nasser, la voix du panarabisme, et des non-alignés, souhaite construire un immense barrage sur le Nil, à Assouan pour favoriser le développement et l'indépendance économiques de l’Égypte. Il se tourne vers les puissances occidentales pour obtenir un financement. La France et la Royaume-Uni refusent, les États-Unis conditionnent leur aide à un accord avec Israël –condition acceptée par Nasser (!), mais Washington s’oppose finalement au financement du projet de barrage et s’emploie à barrer la route à l'influence égyptienne dans le monde arabe (déclaration de John F. Dulles108 le 19 juillet 1956). En réponse, Nasser prend la décision de nationaliser la compagnie du canal de Suez, dont les revenus devront financer le barrage d'Assouan. L'annonce officielle est faite par Nasser le 26 juillet 1956 au cours d'un célèbre discours à Alexandrie –doc.3 p.145, La nationalisation du canal de Suez. En dédommagement de la nationalisation, la Compagnie universelle du Canal de Suez recevra une compensation. La liesse populaire est à son comble : Nasser est célébré comme un héros. Membre fondateur du mouvement des non-alignés, l'Égypte de Nasser incarne dans le monde arabe et dans le « Tiers-monde » naissant un nationalisme volontaire qui, au temps de la Guerre froide, a su s'affirmer sur la scène mondiale. - La réaction franco-britanni que Une conférence des usagers du canal, réunie à Londres le 16 août 1956109, adopte un projet d'internationalisation du canal110. L’Égypte rejette le projet, et l’affaire est portée devant le Conseil de sécurité de l'ONU, qui adopte une résolution le 13 octobre, stipulant la création d’un organe permanent de consultation entre les usagers et une procédure d'arbitrage international en cas de litige. Durant cette période d'attente, Français et Britanniques ne renoncent pas à leur intervention militaire, et concentrent leurs forces en Méditerranée. Les Français obtiennent l’appui d’Israël111. Il est convenu que les forces israéliennes attaqueront les premières l'Égypte. Pour imposer un cessez-le-feu, Français et Britanniques débarqueront dans la zone du canal. Le plan « mousquetaire », sous commandement britannique112, prévoit un débarquement à Port-Saïd puis une marche sur Le Caire 107 Ernest Renan souligna l'importance géopolitique que prenait la région lorsque Ferdinand de Lesseps, diplomate responsable de son percement, fut reçu à l'Académie française en 1885 : "Un seul Bosphore avait suffi jusqu'ici aux embarras du monde; vous en avez créé un second, bien plus important que l'autre, car il ne met pas seulement en communication deux parties de la mer intérieure ; il sert de couloir de communication à toutes les grandes mers du globe. En cas de guerre maritime, il serait le suprême intérêt, le point pour l'occupation duquel tout le monde lutterait de vitesse. Vous avez ainsi marqué la place des grandes batailles de l'avenir." 108 Secrétaire d'État des États-Unis de 1953 à 1959 (présidence républicaine de Dwight D. Eisenhower). 109 L'Égypte refuse d'y assister : elle se fait représenter par l'URSS et l'Inde. 110 Le Canal serait administré par un conseil dépendant des Nations unies. 111 Un accord est conclu à cet effet à Sèvres le 22 octobre 1956 entre les trois pays. 112 Les Britanniques fournissent les deux tiers des moyens militaires. 24 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 pour renverser Nasser, réoccuper le canal et dessiner une nouvelle carte de la région113. - L'échec de l'opération « mousquetaire » L'attaque israélienne commence le 29 octobre 1956. Le lendemain, Français et Britanniques envoient leur ultimatum aux belligérants. Nasser décide de retirer son armée du Sinaï et fait couler dans le canal des bateaux pour le rendre impraticable. Les Israéliens occupent rapidement le Sinaï et s'arrêtent à quinze kilomètres du canal. Le 2 novembre, l'Assemblée générale de l'ONU vote une résolution exigeant l'arrêt des combats et le retrait des forces israéliennes du Sinaï. Ben Gourion114 accepte le cessez-le-feu mais refuse toute restitution du Sinaï. Le 4 novembre, l'Assemblée générale ayant décidé la constitution d'une force internationale d'interposition, l'intervention franco-britannique est désormais sans objet. Les réactions internationales deviennent de plus en plus hostiles à ce coup de force, de part et d’autre du Rideau de fer : les États-Unis exercent une forte pression économique et financière sur la France et le Royaume-Uni, et l'Union soviétique se déclare prête à l'utilisation de l'arme nucléaire pour stopper l’action francobritannique. Les Anglais et les Français sont contraints de se retirer. Sous la pression d'Eisenhower, Israël évacue le Sinaï et Gaza. Des forces de l'ONU s'installent le long des lignes d'armistice et dans le golfe d'Akaba pour faire respecter la liberté de circulation maritime. - Les ensei gnements de la crise de Suez La crise de Suez représente le chant du cygne de la présence française et britannique au Proche-Orient. Cet échec consacre la montée en force de l’URSS, vers laquelle les chefs d’État arabes se tournent désormais, et des États-Unis : la confrontation directe entre les deux grands commence alors dans la région. Par la même occasion, Nasser devient alors un leader du tiers-monde, et plus particulièrement du monde arabe. - Le canal de Suez aujourd’hui Les accords de paix israélo-égyptiens de 1978 ont entraîné l’apaisement des tensions régionales et rendu le canal à sa vocation commerciale. Aujourd’hui, le développement international des échanges profite à l’activité du canal, dont l’exploitation a rapporté à l’Égypte 3,6 milliards de dollars en 2006 et plus de 4 en 2007115. L’accroissement du trafic en provenance de Chine et d’Inde (39% du total) est la cause première de cette prospérité. Ce sont près de 8% du commerce maritime mondial qui transitent par le canal. Pour satisfaire la demande croissante, l’Égypte a entrepris d’importants travaux de modernisation de l’ouvrage116. Dans le même temps, aux extrémités sud (Suez) et nord (Port-Saïd), d’importantes infrastructures portuaires destinées à l’accueil et à la 113 Il s’agirait d’imposer non seulement un régime « pacifique et ami » en Égypte, mais aussi en Syrie. David Ben Gourion (1886-1973), dirigeant travailliste israélien, fondateur de l'État d'Israël, Premier ministre israélien de 1948 à 1953 et de 1955 à 1963. 115 Les revenus du canal représentent la seconde source de devises pour l’Égypte, derrière le tourisme. 116 La profondeur en a été portée à 66 pieds, au lieu de 62, afin de favoriser le passage de navires d’une capacité oscillant entre 220 000 et 240 000 tonnes. 114 25 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 réexpédition de conteneurs se développent rapidement. Entré en service en 2004, le terminal de Port-Saïd, doublé d’une zone franche fortement réceptrice d’IDE chinois a vu sa taille doubler en 2009. b. Étude : la guerre civile au Liban (1975-1990) Diapo 10-11 La guerre du Liban (Atlas du Monde arabe) + Vidéo BA Valse avec Bachir http://prezi.com/szkhsvytbe_c/?utm_campaign=share&utm_medium=copy Jusqu'au milieu des années 1970, le Liban, issu du mandat SDN français (1919-1946), vivait sur un équilibre précaire fondé sur une savante répartition des pouvoirs entre les diverses communautés (chrétiens maronites, musulmans sunnites, chiites et druzes), organisées en clans dirigés par des grandes familles et disposant de milices armées. L'arrivée massive de réfugiés palestiniens à partir de 1967 (plus encore après 1970) rompt cet équilibre, et le Liban se divise entre « conservateurs », (chrétiens maronites et sunnites modérés), et « islamo-progressistes » (chiites, sunnites radicaux, druzes de Kamal Joumblatt et Palestiniens). La guerre civile éclate en avril 1975, opposant les milices « phalangistes » des conservateurs aux fedayin palestiniens. Début 1976, la Syrie intervient aux côtés des phalangistes et occupe le Liban. En 1978, en réponse à la Syrie, l'armée israélienne pénètre au Sud du Liban et y met en place une « zone de sécurité », avec l’appui de milices libanaises islamochrétiennes, qu'elle entraîne et armé. Les Israéliens soutiennent le chef chrétien Bachir Gemayel, pour en faire le maître d'un Liban allié d'Israël, débarrassé des Syriens et des Palestiniens. Begin engage le 6 juin 1982 l’offensive par le Sud du Liban117. Beyrouth est assiégée, Bachir Gemayel est élu président de la République le 23 août… et il est assassiné le 14 septembre. À la suite des massacres punitifs perpétrés les 15 et 16 septembre 1982 par les milices phalangistes avec la complicité passive de l'armée israélienne dans les camps palestiniens de Sabra et Chatila, à Beyrouth-Ouest (2000 morts), l’ONU déploie une force multinationale de sécurité à Beyrouth118. La Syrie, mais aussi l'Iran et la Libye soutiennent les organisations les plus radicales (comme les chiites du Hezbollah 119 ), qui poussent les Français, les Italiens et Américains à retirer leurs troupes du Liban 120 en février 1984. Une anarchie sanglante s'installe dans le pays121 où s'opposent d'un côté les milices chrétiennes et des groupes sunnites commandés par le général Aoun, de l'autre les druzes de Walid Joumblatt, soutenus par la Syrie, les chiites du mouvement Amal et du Hezbollah pro-iranien et ce qu'il subsiste des fedayin palestiniens. Après 1990 (fin de la guerre -défaite du général Aoun) et l’élection de 1992, un relatif retour au calme s’est opéré pour les deux tiers du territoire, mais sous le contrôle de la Syrie ; quant au Sud, il reste agité de violents soubresauts : le Hezbollah, dernière milice libanaise non désarmée, mène une guerre d'usure contre 117 C’est l’opération « paix en Galilée ». Elle est composée d'Américains, de Français et d'Italiens. 119 Le Hezbollah (« Parti de Dieu » en arabe), créé à la suite de l'invasion israélienne du Liban en 1982, est un mouvement politique chiite libanais financé par l’Iran essentiellement et possédant une branche armée. 120 Cf. l’attentat aux voitures piégées qui coûtent la vie, en octobre 1983 à Beyrouth, à 239 soldats américains et 60 français. 121 1984-1987 : « guerre des rues ». 118 26 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 la présence israélienne dans cette région, entraînant de violentes ripostes jusqu’au retrait israélien en 2000. Aujourd’hui, même si la Syrie s’est retirée du Liban en 2005, beaucoup considèrent que le conflit syrien pourrait déstabiliser l’équilibre toujours précaire du Liban. c. La guerre Iran-Irak (1980-1988) Doc.4 p.139, La guerre Iran-Irak- L'Irak, poussé par les gouvernements occidentaux et désireux d'affirmer sa puissance au Moyen-Orient, se lance en septembre 1980 dans une guerre dévastatrice contre l'Iran, qui avait exercé plusieurs provocations militaires et politiques à son endroit. C'est sous le régime de Saddam Hussein –Biographie p.248, à partir de 1969, que l'Irak avait acquis le statut de puissance régionale, jouissant de la sollicitude des pays occidentaux. Le dictateur irakien se présente en effet comme un moderniste et un nationaliste laïque, alors que la région verse dans diverses formes d'islamisme. Dans les années 1970, l'Irak se développe considérablement (éducation, santé, grandes infrastructures…). L'armée irakienne est dotée des armements les plus sophistiqués, livrés par les puissances européennes et l’Union soviétique ; enfin, il développe considérablement ses réserves et sa production pétrolières. En bref, ce pays jusqu'alors marginal devient un élément clé de la région. Diapo 12 Vidéo : la guerre IranIrak (JT FR3 1980) Toutefois, en envahissant l'Iran (pour le plus grand profit des monarchies pétrolières du Golfe placées sur la défensive par la propagande iranienne, subversive de l'ordre établi, mais aussi poussé par les États-Unis et les pays européens qui voient avec inquiétude la capacité déstabilisatrice du régime de Khomeiny), Saddam Hussein s'attaque à un pays beaucoup plus grand et plus puissant que le sien. Aussi, après la griserie des premières victoires irakiennes en Iran, l'armée iranienne passe à la contre-offensive et s'enfonce à son tour dans le territoire irakien. Pour contenir la poussée iranienne, l'Irak recevra alors des États occidentaux, notamment de la France et des États-Unis, toute une panoplie d'armements, y compris des armes prohibées servant à fabriquer des gaz de combat. Ce n'est qu'en juillet 1988 que l'Iran acceptera le cessez-le-feu. Les pertes en vies humaines (sans doute plus d'un million de morts) et en destructions sont immenses dans les deux pays. B. C ONFLITS AUTOUR DE LA CRÉATION ET DE L ’ EXISTENCE DE L ’É TAT D ’I SRAËL Diapo 13 Carte : le MO en 1939 L’État d’Israël est proclamé le 14 mai 1948, mais ce n’est pas une création ex nihilo : cette proclamation vient conclure un long processus qui remonte aux premières entreprises sionistes –Sionisme : vocabulaire p.143 de la fin du XIXème siècle. Au terme de ce premier processus d’aliyah122 -Vocabulaire p.143, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, on compte environ 1,75 million d'habitants en Palestine : 1,2 million d'Arabes, 550 000 Juifs –doc.1 p.142, La population juive par les alyas successives en Palestine. Les Britanniques maintiennent le contingentement de l'immigration juive décidé avant-guerre à la suite des nombreux affrontements entre Juifs et Arabes, alors que les rescapés des camps affluent par milliers –doc.2 p.142, L’odyssée de l’Exodus. Juifs et Arabes s’opposent aux Britanniques : 122 Aliyah : mot hébreu signifiant littéralement « ascension » ou « élévation spirituelle ». Ce terme désigne l'acte d'immigration en Terre sainte pour un juif. 27 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 Diapo 14 Carte : le MO en 1939 + Vidéos : Alyah + attentats de l’Irgoun Diapo 15 Carte : le plan de partage de l’ONU - côté arabe, la répression des années 1930 a laissé le terrain à des groupes plus radicaux et favorisé l’ingérence des autres États arabes ; côté sioniste, le mouvement est désormais dominé par les groupes armés (Irgoun, groupe Stern), qui s’attaquent aux Britanniques. Dans l’impasse, ceux-ci transmettent le dossier palestinien aux Nations unies le 18 février 1947. Le 28 avril 1947, une assemblée générale extraordinaire réunie à l'ONU décide la création d'une commission d'enquête, l'UNSCOP 123 . Celle-ci propose l'abolition du Mandat et un partage de la Palestine en trois États : un État arabe et un État juif qui accéderaient à l'indépendance dans un délai de deux ans, et un État de Jérusalem sous tutelle internationale. En outre, un traité d'union économique serait conclu entre ces États, qui inscriraient également dans leur constitution des dispositions protégeant les droits de leurs minorités. L'Agence juive accepte le plan, les Arabes palestiniens et la Ligue des États arabes le refusent. Saisie, l'Assemblée générale des Nations unies approuve le plan le 29 novembre 1947, avec le soutien de l’Union soviétique et des États-Unis. La Grande-Bretagne décide d'évacuer la Palestine, sans aucune procédure de transfert de pouvoirs. Des violences éclatent : la grève générale est décrétée par les Arabes et les quartiers juifs sont attaqués, entraînant des opérations de représailles de la part des groupes sionistes armés. Le pays s'enfonce dans la guerre civile. 1. 1947-1948 : la guerre civile et le plan Dalet Les forces sionistes sont plus nombreuses, mieux équipées et mieux organisées. Outre l’Irgoun et le groupe Stern, rompus aux actions de guérilla, les sionistes peuvent compter sur la Haganah et sur la légion juive, formée durant la guerre. Les forces sionistes appliquent le plan Dalet124, qui vise l'élimination des forces adverses présentes dans la partie juive et dans plusieurs zones limitrophes. D’où la destruction de nombreux villages arabes et l'expulsion de leur population, à partir d’avril 1948, au fur et à mesure des départs des forces britanniques : - Attaque de la Galilée afin de s'assurer des positions solides face à l'intervention prévisible des armées arabes -ce qui entraîne la fuite des civils arabes vers la Syrie et le Liban. - Prise d'Haïfa le 22 avril 1948 après un bombardement de la ville par la Haganah, qui a entraîné un exode de la population arabe125. - Prise de Jaffa le 13 mai 1948 après un assaut de l'Irgoun126. 2. 1948-1973 : de la première guerre israéloarabe à la guerre du Kippour Diapo 16 Photo : David Ben Gourion Diapo 17 Vidéo : naissance de l’État d’Israël a. La proclamation de l’État d’Israël Doc.3 p.143, La proclamation de l’État d’Israël- David Ben Gourion –Biographie p.143 proclame le 14 mai 1948 l'indépendance d'Israël. La guerre qui s'engage aussitôt avec les États arabes voisins est finalement remportée par Israël en février 1949, d’où l’annexion des territoires arabes palestiniens par Israël, la Transjordanie et 123 UNSCOP : United Nations Special Committee On Palestine. Arrivée dans le pays en juin 1947, la commission remet ses 11 conclusions le 31 août. 124 Dalet est la quatrième lettre de l’alphabet hébreu ()ד. 125 Début mai, il ne reste que 4 000 Arabes dans la ville contre 70 000 deux mois plus tôt 126 Au moment de la reddition, la ville ne compte plus que 5 000 Arabes sur une population originelle de 80 000 habitants. 28 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 Diapo 18-19 Cartes : la première guerre israélo-arabe (1948-1949) ; la Palestine en 1948 et en 1950 l’Égypte. Jérusalem est partagée entre Israéliens (Ouest) et Jordaniens (Est). Ce sont environ 700 000 Palestiniens qui trouvent refuge dans des camps installés dans les pays arabes voisins (Cf. Naqba127 -Vocabulaire p.143) –Carte 4 p.143, Projet et réalité des partages de la Palestine. À partir de cette date, les relations restent tendues entre Israël et ses voisins128 et se détériorent même à partir de 1964, avec la création de l’OLP129 par la Ligue arabe. b. La guerre des Six Jours et ses conséquences Diapo 20-21 Vidéo + carte : la guerre des six jours (1967) Diapo 22 Texte : La résolution 242 (1967) Diapo 23 Photo : Yasser Arafat Diapo 24 Photo : Hussein II de Jordanie Étude p.146-147, La guerre des Six-jours (5-10 juin 1967)- Mai 1967, Nasser ordonne le départ des casques bleus du Sinaï. Mais le 5 juin, c’est Israël qui déclenche une offensive aérienne (neutralisation de l’aviation égyptienne), puis terrestre (les blindés de Tsahal130 prennent Gaza et le Sinaï). La Syrie et la Jordanie attaquent Israël, mais sont repoussées et perdent la Cisjordanie et une partie du plateau du Golan. La guerre des Six jours se solde, pour les États arabes, par une défaite cuisante et de lourdes pertes territoriales. Carte 1 p.146, Les conquêtes israéliennes au lendemain de la guerre des Six joursL'équilibre régional est bouleversé : Israël occupe le Sinaï, la bande de Gaza, la Cisjordanie, une partie du Golan, ainsi que Jérusalem-Est, annexée après le cessez-lefeu. Novembre 1967, le Conseil de sécurité de l'ONU adopte la résolution 242 –doc.2 p.146, La résolution 242…131, qui reste lettre morte. Après la guerre, 300 000 Palestiniens supplémentaires rejoignent des camps dans les États voisins –doc.3 p.147, Un camp palestinien en Jordanie (1969), ou un exil plus lointain, et 1 million de Palestiniens sont désormais à Gaza et en Cisjordanie sous la domination directe des Israéliens. Le potentiel de recrutement des organisations palestiniennes s’en trouve accru, comme le Fatah132, qui prend le contrôle de l'OLP, dirigée à partir de 1969 par Yasser Arafat –Biographie p.150 + doc.4 p.147, La charte de l’OLP. En Jordanie, les fedayin ouvrent un front le long du Jourdain. En septembre 1970, se sentant menacé par le Fatah, Hussein de Jordanie lance l'armée jordanienne contre eux (« septembre noir »). Les Palestiniens quittent en masse la Jordanie pour le Sud du Liban. À ce moment, les actions terroristes changent de nature et d’échelle133. 3. 1973-1992 : de Kippour au « processus de paix » a. 1973 : du conflit localisé à la crise internationale Diapo 25-26 Photos : Sadate, Haffez el-Assad Égyptiens et Syriens recherchent l’effet de surprise. Fixée au 6 octobre pour des raisons à la fois techniques (vitesse du courant, hauteur de la lune) et stratégiques (Yom Kippour + Ramadan), une offensive égyptienne est lancée sur le canal de Suez. 127 La Naqba ou Nakba (en arabe, la « catastrophe ») désigne l’exode des Arabes palestiniens en 1948. Cf. crise de Suez (1956). 129 OLP : Organisation de libération de la Palestine –Vocabulaire p.276. 130 Tsahal : l’armée israélienne. 131 La résolution 242 de l’ONU affirme « l'inadmissibilité de l'acquisition de territoires par la guerre » et le droit de tous les États du Moyen-Orient de « vivre en paix dans des frontières sûres et reconnues ». 132 Le Fatah (« conquête » en arabe) est fondé en 1959 au Koweït par Yasser Arafat. 133 Cf. les premiers détournements d'avions, ou le massacre par un commando d'une partie des athlètes israéliens aux Jeux olympiques de Munich (1972) –doc.2 p.139, Des athlètes 128 israéliens… 29 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 L’armement soviétique permet aux Égyptiens de progresser dans le Sinaï. Épaulés par des unités marocaines, koweïtiennes, irakiennes, saoudiennes et jordaniennes, les Syriens s’engagent sur le plateau du Golan. Diapo 27 Carte : La guerre du Kippour (1973) Côté syrien, le front se stabilise le 10 octobre, puis l'armée israélienne reprend le terrain perdu. Côté égyptien, le front se stabilise le 12 octobre après une contreoffensive israélienne –doc.3 p.139, La guerre du Kippour (1973). Soviétiques et Américains interviennent. Moscou installe un pont aérien pour ravitailler Syriens et Égyptiens en armes et en munitions, renforce la flotte de Méditerranée et met en alerte des divisions aéroportées. Exemple suivi par Washington en faveur des Israéliens. Après un voyage-éclair de Kissinger à Moscou, l’ONU vote le 22 octobre sa résolution 338 : cessez-le-feu sur les positions acquises, application de la résolution 242 et ouverture de négociations. b. L’évolution du conflit jusqu'en 1992 Au lendemain de la guerre d'Octobre, des casques bleus sont déployés dans le Golan et dans le Sinaï. Il est décidé que le canal de Suez serait ouvert aux navires israéliens, et que le Sinaï serait rendu à l’Égypte. Diapo 28 Vidéo : Arafat à l’ONU (1973) Diapo 29 Vidéo : Les accords de Camp David (1978) Diapo 30 Sommaire II Le problème palestinien est désormais la difficulté majeure dans la région : le 13 novembre 1974, Yasser Arafat est accueilli triomphalement à l’ONU et prononce un discours dans lequel il annonce que l'OLP renonce au terrorisme « hors d'Israël »134. Parallèlement, les relations israélo-arabes s’améliorent : ainsi, en 1977, Sadate est reçu à Jérusalem et prononce un discours devant la Knesset135 ; à son tour Begin est reçu au Caire. La rencontre de Camp David (septembre 1978) aboutit en mars 1979 à la signature du traité de Washington mettant fin à trente années d'état de guerre entre les deux pays –Sujet bac p.164-165, Israël et Egypte : le tournant Sadate. Sadate paiera son geste de sa vie, tué le 6 octobre 1981 par un commando islamiste –Biographie p.248. II. 1991 À NOS JOURS . U N FOYER DE DÉSTABILISATION DU NOUVEL ORDRE MONDIAL POST - GUERRE FROIDE A. L ES DEUX GUERRES DU G OLFE : GUERRES DU PÉTROLE OU CONFLITS POST - GUERRE FROIDE ? 1. La première guerre du Golfe (1990-1991) Survenue au lendemain de l'éclatement du bloc de l'Est, c’est la première guerre du Golfe qui voit s'esquisser un nouvel ordre international, différent de celui qui a pris fin avec la guerre froide. a. Aux origines du conflit 134 « Je suis venu en tenant à la fois une branche d'olivier et l'arme du combattant de la liberté. Ne laissez pas la branche d'olivier tomber de ma main… » 135 Knesset : le Parlement israélien 30 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 L’Irak de Saddam Hussein –biographie p.248 sort de la guerre avec l'Iran –doc.4 p.139, La guerre Iran-Irak (1980-1988)136 à la fois surendetté et surarmé. Son riche voisin, le Koweït, principauté de la famille al-Sabah, protectorat britannique indépendant depuis 1961, et doté d'immenses ressources et réserves pétrolières, lui refuse une remise de dettes et une correction de frontières, ainsi que l'arrêt des pompages pétroliers excessifs dans le champ de Roumeila, situé à cheval sur la frontière. L'invasion du Koweït par l'Irak le 2 août 1990 provoque la première guerre du Golfe. Derrière cette invasion se cachent d'une part la volonté de Bagdad de s'assurer le leadership du monde arabe –doc.1 p.141, Saddam Hussein représenté en Saladin, d'autre part la nécessité pour l'Occident industrialisé de protéger un de ses « greniers à pétrole ». b. Le déroulement du conflit L’ONU réagit rapidement à cette violation du droit international : le Conseil de sécurité, qui n'est plus paralysé par le risque de veto d'un membre permanent, prend plusieurs résolutions, et met Saddam Hussein en demeure. Hormis de vagues propositions d'arbitrage, l’Union soviétique se tient à l’écart du litige. Les États-Unis, à la tête d’une vaste coalition137, mettent en place d'un important dispositif militaire en Arabie Saoudite... Diapo 31 Vidéo : extrait Envoyé Spécial, déc. 1991 L'opération déclenchée sous le nom de « Tempête du désert » se déroule en deux phases : bombardements aériens intensifs à partir du 17 janvier 1991 et offensive terrestre du 24 au 28 février. Elle aboutit à la libération du Koweït et à l'occupation d'une partie de l'Irak, mais non à la chute de Saddam Hussein138. Celui-ci garde même les moyens de réprimer des révoltes internes (chiites et kurdes). Par la Résolution 687 (avril 1991), le Conseil de sécurité contraint l'Irak à payer des dommages de guerre et à éliminer une part importante de ses armements pour le priver de toute capacité d'agression. c. Quels enseignements ? Les États-Unis ont pu gérer la crise au mieux de leurs intérêts, en profitant d'un consensus fondé à la fois sur la diabolisation de Saddam Hussein et sur le refus de voir un État membre des Nations unies, en l'occurrence le Koweït, rayé purement et simplement de la carte. À bon compte, Washington a pu se poser une nouvelle fois en champion de la démocratie et du droit, sans que soient trop visibles les mobiles moins nobles qui guidaient son action. Celle-ci aurait-elle été aussi rapide et aussi vigoureuse si le Koweït n'avait pas été un gros exportateur de pétrole et si le Golfe n'avait pas recelé plus de la moitié des réserves mondiales d'or noir ? 136 Voir également ici. La France, du Royaume-Uni, du Canada et des Pays-Bas, mais aussi d'une bonne partie des États du Moyen-Orient, dont l'Arabie Saoudite, la Turquie, l'Égypte et la Syrie. La coalition anti-irakienne autour des Américains (400 000 hommes) regroupe aussi bien des forces occidentales (29 000 Britanniques, 12 000 Français) que des forces issues du monde arabe (Saoudiens, Égyptiens, Syriens, Marocains). 138 Ce sont les pays arabes voisins, ainsi que la Turquie, qui dissuadent le président américain de laisser les troupes de la coalition arriver à Bagdad pour y opérer un changement de régime, voire un démembrement du pays qui s'esquisse avec les deux rébellions, kurde au nord et chiite au sud. L'Égypte et les pays de la péninsule Arabique ont craint en effet que l'Iran, qui se veut protecteur des chiites et qui abrite une partie de l'opposition au régime irakien, n'augmente encore son influence sur les pays arabes. Quant à la Turquie, qui fait face chez elle aux revendications nationalistes kurdes, elle ne peut que craindre la création d'une région autonome kurde à ses frontières. 137 31 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 De toute évidence, la disparition de l'Union soviétique a laissé le champ libre aux États-Unis dans la région, mais les conséquences vont au-delà de ce constat. Désormais, partout les mouvements islamistes s'agitent, sans que l'on sache qui les contrôle. Peu de temps après la première guerre du Golfe, survient ainsi une série d'attentats terroristes dans le royaume saoudien lui-même, dont l'un vise un camp militaire américain : l'irruption de l'armée américaine en Arabie Saoudite, terre des Lieux saints musulmans, a en effet provoqué l'indignation dans les milieux rigoristes islamiques, d'autant plus que, après leur victoire, ces troupes ne se sont pas retirées. Un autre retournement, plus lourd de conséquences, intervient à la suite de la première guerre du Golfe : les groupes de terroristes se réclamant d'Oussama Ben Laden, « héros » saoudien de la guerre d'Afghanistan qui a formé, avec l'appui des États-Unis, de l'Arabie Saoudite et du Pakistan, des milliers de jeunes recrues arabes pour aller se battre contre l'armée soviétique, deviendront de plus en plus agissants : dans les Balkans (en Bosnie et au Kosovo), où la Yougoslavie éclate en plusieurs États, mais aussi en Russie (Tchétchénie). Ils sont alors encore dans le sillage des politiques occidentales de l'après-guerre froide, mais, à partir de la moitié des années 1990, ils retourneront leurs armes contre les États-Unis, dont les ambassades au Kenya et en Tanzanie seront l'objet d'attentats sanglants en 1998. Ben Laden deviendra l'homme le plus recherché de la planète, en particulier après les spectaculaires et dramatiques attentats de New York et de Washington du 11 septembre 2001. Diapo 32 Vidéo : La deuxième guerre du Golfe (2003) 2. La seconde guerre du Golfe (2003) 139 a. La démocratisation par la force ? L'équipe de faucons néoconservateurs fédérée autour du nouveau président rêve de remodeler le Moyen-Orient, région du monde restée à l’écart de la vague de démocratisation de la fin des années 1980. Les cercles néoconservateurs américains sont alors séduits par la thèse de l'universitaire Samuel Huntington sur un conflit de civilisation qui risque d'opposer l'Occident à l'islam et, éventuellement, au confucianisme asiatique. Les attentats du 11 septembre 2001 sont perçus comme une confirmation de cette vision du monde, et ils ouvrent pour les États-Unis la voie 1/ à la guerre contre le terrorisme (Afghanistan, 2001) ; 2/ à la guerre préventive (Irak, 2003). Au-delà du prétexte de la présence d'armes de destruction massives en Irak140, le président George W. Bush affirme vouloir reconstruire le Moyen-Orient sur des bases démocratiques et stables –Sujet bac p.160-161, Discours de G. W. Bush sur l’intervention américaine en Irak en 2003. En effet, le 6 novembre 2003, en effet, soit six mois environ après l'invasion et l'occupation de l'Irak, il annonce officiellement une initiative pour promouvoir la liberté et la démocratie au Moyen-Orient, appelée Greater Middle East. Elle doit établir un « Forum pour le futur », et elle prévoit aussi la promotion d'institutions démocratiques dans la région, et diverses aides au développement économique. Même la Ligue arabe, lors d'un sommet de chefs d'État tenu à Tunis les 22 et 23 mai 2004, entonnera le chant de la réforme et de la gouvernance. 139 140 Voir également : programme d’histoire de TS, Thème 2, Question 1 en fait inexistantes, comme le montrera un rapport officiel américain neuf mois après l'invasion 32 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 b. La crise irakienne : guerre préventive et occupation Les motifs réels de l'invasion américaine continuent d'être objet de perplexité et d'interprétations divergentes : contrôle du pétrole, besoin d'affirmation de la puissance impériale après l'effondrement de l'ennemi soviétique, ou les deux… Mais, quel qu'ait été le motif de l'invasion, le résultat, lui, ne fait pas de doute : - Délabrement absolu des infrastructures irakiennes et l'appauvrissement généralisé de la population créé par l'invasion141. - Pillage des administrations d'État et du patrimoine archéologique du pays. - Dissolution de l'armée, de la police et de tous les services de sécurité. - Exaspération, à la façon des anciens colonialismes européens au ProcheOrient, des divisions communautaires, ethniques et régionales 142 ; communautarisme et ethnisme ont été poussés à leur paroxysme, encourageant une guerre civile entre sunnites et chiites au Sud, entre Kurdes, Turcomans et Arabes au Nord. En janvier 2005, des élections consacrent la rupture entre sunnites, qui boycottent largement le scrutin, et chiites qui y participent massivement, raflant la majorité des sièges. L’engrenage de la violence est dès lors hors de contrôle : sabotages répétés des installations pétrolières, attaques meurtrières contre les commissariats de police, voitures piégées qui visent des lieux de culte ou des places publiques, sans compter les attaques contre les troupes américaines occupantes. Ces dernières pratiquent des représailles massives et collectives sur des villes entières (comme à Falouja en 2004), cependant que la corruption des autorités d'occupation et des nouveaux responsables nommés par elles prend sans cesse plus d'ampleur, que les enlèvements et assassinats se multiplient, mais qu'éclate aussi le scandale des tortures pratiquées par l'armée américaine dans les prisons irakiennes : tout cela crée dans la région un nouveau foyer spectaculaire de tension. B. D EPUIS 1992 : DU « PROCESSUS DE PAIX » À LA « FEUILLE DE ROUTE » 1. Vers la reconnaissance mutuelle La première guerre du Golfe (1990-1991) et le désengagement de l'Union soviétique ont renforcé la domination américaine. Dans ce contexte, les pays arabes sont contraints de dialoguer avec Israël, dialogue facilité à partir de 1992 par le retour au pouvoir des travaillistes143. Après la « conférence de la Paix », réunie en octobre 1991 à la suite de la guerre du Golfe, des pourparlers s'engagent entre Israël et ses voisins. 141 Celle-ci a achevé l'œuvre de déstructuration totale de la société irakienne qu'avaient provoquée treize années d'embargo économique décrété par les Nations unies, venant se surajouter aux massacres et déplacements forcés de populations entrepris par la dictature de Saddam Hussein dans le contexte de guerre permanente qu'il faisait vivre à son pays depuis le déclenchement des hostilités avec l'Iran en 1980. 142 Une victime expiatoire a été désignée par les médias internationaux comme source unique de tous les malheurs : la minorité sunnite, ainsi que Saddam Hussein et son clan qui en sont issus. Les chiites et les Kurdes ont été mis en avant comme seules victimes de la dictature. 143 Premier ministre : Yitzhak Rabin. 33 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 Diapo 33 Vidéo : Le processus de paix (1993) Doc.1 p.150, Les accords d’Oslo- Parallèlement, les conversations secrètes engagées à Oslo aboutissent à la reconnaissance réciproque de l'OLP et de l'État d'Israël144. Le 13 septembre 1993, à l'initiative du président américain Bill Clinton, est signée à Washington une « déclaration de principes »145. La remise conjointe du prix Nobel de la paix en 1994 à Yitzhak Rabin –Biographie p.150, Shimon Peres et Yasser Arafat, est perçue comme le symbole d'un possible retour à la paix au Moyen-Orient. 2. De l'accord Gaza/Jéricho à l'enlisement du processus de paix Dans la foulée des accords de Washington, Yitzhak Rabin et Yasser Arafat ont signé au Caire un accord sur l’instauration d'une Autorité palestinienne à Gaza et en Cisjordanie, dont Yasser Arafat est en 1994 le premier président élu. Un Conseil palestinien est élu pour gérer l'éducation, la santé, l’agriculture, la police et les impôts, tandis qu’Israël conserve la main sur les colonies. Diapo 34 Bande annonce « Le dernier jour d’Y. Rabin » Mais le processus de paix est freiné tant par la surenchère des mouvements extrémistes palestiniens (encouragés notamment par l’Iran et la Syrie) –doc.4 p.151, Démonstration de force du Hamas à Gaza, que par la poursuite de l’implantation de colonies à Gaza146 et en Cisjordanie –Carte 2 p.150, La Cisjordanie, une « peau de léopard » (2010). Le 4 novembre 1995, quand Yitzhak Rabin est assassiné par un extrémiste israélien (Ygal Amir), le processus semble définitivement enterré. 3. La paix impossible ? Diapo 35 Vidéo : Le « mur de sécurité » (DDC) Diapo 36 Vidéo Le Monde : Comprendre les origines de la guerre à Gaza (2014) Le sommet « Camp David II » convoqué par le président Clinton (2000) échoue. La deuxième Intifada147, puis la « guerre contre le terrorisme » ont contribué à la cristallisation du conflit. Une « feuille de route » parrainée en 2003 par les ÉtatsUnis, l'ONU, la Russie et l'UE prétendait aboutir en 2005 à la coexistence entre Israël et un État palestinien –doc.4 p.141, La « feuille de route » de la paix israélopalestinienne. Elle n'a pu être appliquée, faute d'un compromis sur Jérusalem et sur le droit au retour des réfugiés palestiniens148. Le « mur de sécurité » érigé depuis 2002 par Israël autour de la Cisjordanie, les dissensions entre les partis palestiniens du Fatah (dirigé par Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne) et du Hamas149 (qui dirige la bande de Gaza), les récentes interventions armées (Sud Liban, été 2006 ; Gaza, 2006, 2008-2009, 144 L’annonce d'autant plus surprenante que la situation s'était dégradée dans les territoires occupés, avec l'implantation de nouvelles colonies juives, les Palestiniens répliquant par la première Intifada (1988-1993) –Vocabulaire p.138. 145 « Le gouvernement de l'État d'Israël et l'équipe de l'OLP représentant le peuple palestinien sont d'accord sur le fait qu'il est temps de mettre fin à des décennies de confrontation et de conflit, de reconnaître leurs droits légitimes et politiques mutuels, de s'efforcer de vivre dans la coexistence pacifique, la dignité et la sécurité, et d'aboutir à un accord de paix juste, total et durable, ainsi qu'à une réconciliation historique dans le cadre du processus de paix agréé ». 146 Les colonies israéliennes de Gaza furent finalement démantelées en 2004. 147 La seconde intifada débute en 2000 –doc.3 p.151, L’ONU réagit à la seconde Intifada. 148 Le Droit au retour est une des revendications fondamentales des Palestiniens au cœur du conflit israélo-palestinien. C'est aussi une des plus controversées et problématiques. Lors de la Guerre de 1948, environ 720 000 Arabes palestiniens sur les 1 200 000 qui peuplaient la Palestine furent chassés de leur terre. À ceux-ci s'ajoutèrent près de 300 000 individus supplémentaires chassés de Cisjordanie lors de la Guerre des six jours. Leurs descendants, réfugiés palestiniens, sont aujourd'hui au nombre de 4 000 000. Source : Wikipédia. Cf. également le site de l’UNRWA. 149 Le Hamas (« ferveur » en arabe) est un mouvement islamiste composé d’une branche politique et d’une branche armée –Vocabulaire p.140. 34 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 2012, 2014) semblent éloigner encore davantage la perspective d’une issue négociée. Diapo 37 Article Le Monde (29 nov. 2012) + Vidéo Fr24 (30 déc. 2014 + Lien article Le Monde (16 janv. 2015) Diapo 38 Sommaire III C’est dans ce contexte de blocage que Mahmoud Abbas conduit auprès des instances internationales les négociations restées dans l’impasse avec Israël pour aboutir à la reconnaissance d’un État palestinien –doc.5 p.151, Le rêve d’un État (2001). Ainsi, il a demandé et obtenu, malgré l’opposition d’Israël et des États-Unis, que l’autorité palestinienne soit admise comme « observateur non membre » à l’ONU le 29 novembre 2012 ; après le rejet par le Conseil de sécurité de l’ONU, le 31 décembre 2014, d’une résolution accordant leur indépendance aux territoires palestiniens, Mahmoud Abbas a obtenu, le 7 janvier 2015, l’adhésion à la CPI, ce qui lui permet d’engager des actions légales contre Israël150. III. A UJOURD ’ HUI . L E LIEU DE TOUS LES PÉRILS GÉOPOLITIQUES A. D E PUISSANTS FACTEURS DE DÉSTABILISATION GÉOPOLITIQUE 1. La fragilité des États et les contestations populaires Diapo 39 Trois grandes catégories d’États Diapo 40 Prezi : Des régimes contestés par la rue La fragilité de la notion d’État caractérise la plupart de ces pays, marqués par l’absence de tradition démocratique et/ou par la domination d’un groupe communautaire religieux, ethnique ou tribal (à l’exception de la Turquie 151 et d’Israël152) ; Cf. : - les monarchies conservatrices de la péninsule arabique (Arabie saoudite – Pour comprendre, p.140, Qatar, Émirats arabes unis, etc.) ; - la monarchie autoritaire, puis république islamique, en Iran ; - les États de forme plus moderne longtemps dominés par des régimes autoritaires inspirés du modèle du parti unique à partir des années 1950 (Syrie, Égypte, Irak) 153. Ces États sont à des degrés divers confrontés à des revendications populaires, qui peuvent prendre la forme de séquences révolutionnaires mobilisant les masses populaires (NB : tout en faisant l’objet d’ingérences étrangères !) 154 . Ainsi, un mouvement de révolte et de contestation politique, désigné par l’appellation « Printemps arabe », qui frappe l'ensemble de la région à partir de 2011, a atteint notamment l'Égypte155, la Syrie156, Bahreïn157 et le Yémen. 150 Cf. « La Cour pénale internationale se penche sur la « situation » en Palestine », Le Monde, 16.01.2015. 151 La Turquie, seul État ayant échappé à la domination directe des Européens, héritier de l’empire ottoman, s’est lancée dès les années vingt dans une politique volontariste de modernisation et de laïcisation ; longtemps de nature autoritaire, le pouvoir a connu une évolution démocratique. 152 Une démocratie… en guerre. 153 Comme les partis baas en Syrie et en Irak. 154 Cf. contestation des élections de 2009 en Iran –Histoire des Arts, p.154-155 155 En Égypte, le régime du président Hosni Moubarak, au pouvoir depuis 1981, est renversé et les élections qui suivent donnent le pouvoir aux frères musulmans (à leur tête, Mohamed Morsi), finalement renversés par un coup d’État militaire (dirigé par Abdel Fattah al-Sissi). 35 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 Diapo 41 Vidéo : DDC, Jérusalem 3 fois sainte (10’52’’) + Extrait Atlas des pays arabes : « Les chrétiens, les sunnites et les chiites » 2. Les tensions religieuses à leur paroxysme Les trois grands monothéismes s’inscrivent dans la région par la présence de leurs pratiquants et de leurs lieux saints : principalement Jérusalem, « ville trois fois sainte », Médine et la Mecque –mais pas seulement. a. Une mosaïque ethnique et religieuse Diapo 42 Cartes + schémas + récapitulatif (7 item) Cartes 1 et 2 p.136, Une mosaïque de peuples / de religions- Une mosaïque de peuples et de religions se partagent le Proche et le Moyen-Orient. Historiquement, avant la Première Guerre mondiale, trois grandes cultures s’étaient imposées dans la région : Perses, Turcs, Arabes. Aujourd’hui, trois grands peuples composent l'essentiel du Moyen-Orient : les Perses, ou Iraniens (65 millions), les Arabes, les plus nombreux (190 millions), et les Turcs (60 millions). En plus de cet héritage historique, vivent dans toute la région des communautés non arabes mais largement arabisées car scolarisées en arabe, langue de culture et de travail. C’est le cas des Kurdes (25 à 30 millions d’individus), éparpillés entre Turquie, Iran, Syrie et Irak158. Les antiques religions (zoroastrisme159, yézidisme160…) sont encore représentées à l’état résiduel, principalement en Syrie, en Irak et en Turquie. Les minorités chrétiennes (environ 10 millions d’individus) remontent aux origines du christianisme. Les onze Églises orientales se répartissent en deux grandes familles : - les Églises catholiques dont les trois principales minorités sont les maronites au Liban161, les melkites en Syrie et les chaldéens en Irak ; s’y ajoutent des Arméniens catholiques162 réfugiés dans le monde arabe163 suite au génocide de 1915 ; - les Églises orthodoxes dont les coptes d’Égypte et la communauté grecque orthodoxe de Syrie et du Liban. Depuis 1948, l’émigration juive en Israël a conduit des populations de tous horizons dans l’État hébreu (les 5,5 millions de Juifs que compte la région sont très majoritairement issus de l’Alyah). À l’exception d’Israël, les musulmans sont majoritaires dans tous les pays du Proche et du Moyen-Orient. Cependant, l’Islam, souvent perçu comme une religion monolithique et homogène, est en réalité divisé en au moins deux grands courants, 156 En Syrie, le régime du président Bachar Al-Assad réprime violemment les mouvements protestataires et la guerre civile qui s’ensuit, opposant le régime et ses soutiens à divers mouvements soutenus par diverses puissances étrangères, menace de déstabiliser la région. 157 Au Bahreïn, les manifestations sont durement réprimées par l'armée aidée par des troupes venues d'Arabie saoudite. 158 La présence kurde remonte à l’Antiquité. Le rêve kurde de bâtir un État échoue avec le partage de la région entre les puissances occidentales mandataires puis avec la création des États indépendants après la Seconde Guerre mondiale. Leur lutte est un facteur de tension permanente. En Irak, elle aboutit en 2003 à la création d’une région autonome, le Kurdistan. 159 Le zoroastrisme est une religion (non-biblique) mais monothéiste où Ahura Mazdâ (pehlevi : Ohrmazd) est seul responsable de l'ordonnancement du chaos initial, le créateur du ciel et de la Terre. 160 Le yézidisme ou religion des sept anges est une religion qui est présentée par ses pratiquants comme plongeant ses racines dans l'Iran antique. 161 Les maronites sont les seuls à affirmer une fidélité sans faille à Rome. 162 Les Arméniens résistent à l’arabisation en maintenant des institutions propres (écoles, centres culturels…). 163 Nombreux en Syrie, ils forment une importante communauté à Alep. 36 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 eux-mêmes divisés en de nombreuses branches 164 . La forte majorité sunnite entretient des relations souvent conflictuelles avec les minorités musulmanes. Minoritaires en Syrie165, les chiites sont plus nombreux en Irak et davantage encore en Iran. Diapo 43 Un peu de vocabulaire Diapo 44 Texte : les Frères musulmans Diapo 45 Vidéo : Nasser et les Frères musulmans (1953) Diapo 46 Texte : Les grands courants de l'Islam politique dans les années 1980 et 1990 Diapo 47 Vidéo : Comprendre l’État islamique (Lemonde.fr) b. La montée de l’islamisme : un phénomène puissant Celui-ci trouve son origine dans une lecture littérale et rigoriste des textes sacrés, et devient un véritable projet politique et social avec l’association des Frères musulmans créée en Égypte en 1928. L’islamisme, tel que le théorisent dès les années 1930 les Frères musulmans, comprend l'islam comme un système complet, politique, législatif, économique et social. Il rejette le double modèle occidental de l'État-nation et de l'État laïque et veut réformer le monde musulman en revenant aux fondements de la loi divine. Si les questions religieuses ont une forte résonnance politique dans la région durant toute la période, c’est de manière assez récente qu’elles se traduisent par l’affirmation du fondamentalisme musulman comme une force politique autonome : l’islamisme n’émerge réellement que dans les années 1970, se manifestant de manière spectaculaire en 1979 avec la révolution en Iran qui chasse le Shah et porte au pouvoir les tenants d’un islam radical166. Se présentant comme une réponse à l’occidentalisation qui déstabilise les sociétés traditionnelles –et paradoxalement encouragé par les États-Unis dans le cadre de la guerre froide167, l’islamisme se diffuse dans les années 1970 et 1980 dans l’ensemble du monde musulman. Après quoi, aussi divers et divisé que l’Islam lui-même168, il se déploie sous des formes multiples : - politique et plus ou moins démocratique comme en Turquie avec l’AKP de Recep Erdogan ; - armé, comme jadis dans le cadre du djihad mené en Afghanistan contre l’occupation soviétique169, ou aujourd’hui des actions menées à Gaza et en Cisjordanie avec le Hamas –Sujet bac p.163, La charte du mouvement islamiste Hamas (août 1988) ou au Sud-Liban avec le Hezbollah170 ; - voire terroriste, à travers des réseaux comme Al Qaeda ou Da’ech, ce dernier ayant fondé un « califat » entre Irak et Syrie en 2006. B. L’ ENJEU ÉNERGÉTIQUE Diapo 48 La principale région productrice d’hydrocarbures (stats) Le Moyen-Orient est la principale région productrice de pétrole au monde avec, en 2012, la moitié des réserves de pétrole prouvées et 45% de celles de gaz. Elle contribue au tiers de la production mondiale de pétrole et à 20% de celle de gaz. Quelques acteurs principaux : 164 Sunnites et chiites sont les principaux courants (le kharidjisme n’est plus représenté que par les Ibadites d’Oman), mais il y en a en réalité une multitude. 165 Cf. situation particulière des alaouites, qui forment la minorité chiite (environ 10% de la population) la plus nombreuse sur la façade littorale et qui tiennent le pouvoir à Damas –jusqu’à ce jour en tout cas. 166 L’Iran, perse et à majorité chiite, demeure relativement isolé. Lors de la guerre qui l’oppose à l’Irak (1980-1988), ce dernier État est soutenu par les Occidentaux, mais aussi par la plupart des pays arabes. Seule la Syrie, pour des raisons géopolitiques, se rapproche de Téhéran. 167 Cf. ici. 168 Cf. ici. 169 …qui porte finalement les Talibans au pouvoir en Afghanistan en 1996. 170 Dans le cas du Hezbollah et du Hamas, il s’agit d’un islamisme à la fois politique et armé. 37 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 Diapo 49 L’enjeu pétrolier L’enjeu pétrolier : acteurs + Article Le Monde sur l’embargo iranien + Extrait Atlas des pays arabes : du gaz et du pétrole - - - - L’Arabie Saoudite, deuxième producteur mondial de brut (10 Mbj171, soit 13% de la production mondiale pour 22% des réserves prouvées) en 2013172. Les principaux producteurs d’hydrocarbures de la région (Bahreïn, Oman, les Émirats Arabes Unis173, le Koweït174, le Qatar175) sont engagés par des accords de défense et de libre-échange avec les États-Unis. L’Irak, plongé dans la guerre civile depuis 2003, détient des réserves importantes (12%, 4e rang) : sa capacité de production, estimée à 6 à 7 Mbj, plafonnait encore à 2,9 Mbj en 2012. L'Irak redevient un producteur de pétrole important avec la remise en état de ses infrastructures, mais l'insécurité qui règne dans le pays gêne encore le retour à la normale176. L’Iran dispose des troisièmes réserves mondiales prouvées de pétrole conventionnel (13%), et les négociations en cours autour de ses velléités nucléaires 177 ont déjà permis une levée partielle de l’embargo qui a durement frappé le pays depuis 2006178. L'Égypte a récemment fait des découvertes de gaz importantes qui allègent sa facture énergétique et génèrent des exportations vers Israël, la Jordanie, la Syrie et le Liban. Les États-Unis, premiers consommateurs de pétrole (25% de la consommation mondiale), majoritairement importateurs mais aussi producteurs, ont pour objectif majeur le maintien et le renforcement de leur position dominante au Moyen-Orient. Ils exercent encore aujourd’hui une véritable tutelle sur les approvisionnements en provenance de cette région, facilitée par une infrastructure colossale de bases militaires tout le long de « l’arc d’instabilité » Golfe Persique – Asie Centrale. Parallèlement, ils se sont employés à réduire leur dépendance vis-à-vis du pétrole du Moyen-Orient, en augmentant leur production propre et en diversifiant leurs sources d’approvisionnement : Venezuela (!), Canada179… Par conséquent, la Chine et le Japon sont devenus les principaux importateurs de pétrole et de gaz de la région. Le contrôle de ces ressources est devenu un enjeu majeur pour l’émancipation des États concernés, en même temps qu’un objet de convoitise pour les grandes 171 Mbj : millions de barils par jour (1 baril = 159 litres) Derrière la Russie (10,3 Mbj). Source Wikipédia. 173 èmes 6 réserves mondiales prouvées de pétrole conventionnel. 174 èmes 5 réserves mondiales prouvées de pétrole conventionnel. 175 NB : le Qatar est plus riche en gaz naturel qu’en pétrole –NB2 : le Moyen-Orient dispose de 45% des réserves mondiales de gaz naturel. 176 Dans le Nord, le groupe djihadiste État islamique (ÉI), les Kurdes et le gouvernement fédéral rivalisent pour le contrôle des puits pétroliers : les Kurdes se sont emparés de ceux de Kirkouk et l'ÉI de ceux de Mossoul. 177 La révolution islamiste en Iran (1978), la guerre Irak-Iran (1980-1988), l’intervention américaine en Irak (2003) ont fait de l’Iran un pays en état de siège. L’Iran a désormais sur toutes ses frontières maritimes et terrestres (Turquie, Irak, Koweït, Arabie saoudite, Bahreïn, Pakistan, Afghanistan, etc.) une menace immédiate en raison de la présence militaire des États-Unis. D’où la stratégie adoptée : se rapprocher du nucléaire militaire, développer des armements de frappe à longue portée, s’appuyer sur les forces chiites dans le reste du Moyen-Orient (en Irak, en Syrie et au Liban principalement, mais aussi au Yémen par exemple –Cf. I.B.2. Un arc de crises 178 Le Monde, « Nucléaire iranien : le point sur les négociations », 12 novembre 2014 179 Cf. le pétrole issu des schistes bitumineux de l’État canadien de l’Alberta (Cf. Programme de Géographie, Thème 3, Question 1). 172 38 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 puissances étrangères, de conflits internes entre pays producteurs 180 et de déséquilibres régionaux. Les hydrocarbures ont permis un décollage économique fulgurant de l'Arabie saoudite, du Koweït, de Bahreïn, du Qatar, des ÉAU et d'Oman. Composé de ces six pays, le Conseil de coopération du Golfe (CCG) représente la douzième économie mondiale. Avec une croissance économique de 3,7% en 2013, le CCG peut être associé au groupe des pays émergents181. Diapo 50 Carte DP 8102, Le poids de la rente pétrolière au MO + Prezi Les réserves de devises des pays du CCG sont placées dans des fonds souverains (le quart du montant total des fonds souverains de la planète). Ils sont principalement investis dans les pays occidentaux, mais une part croissante se dirige désormais vers les pays émergents et les autres pays arabes182 -L'aide bilatérale constitue également un soutien indispensable. Les pétromonarchies du Golfe sont donc devenues des acteurs incontournables, tant au niveau mondial qu'au niveau régional. À cette échelle, elles utilisent leur puissance financière pour peser sur les décisions géopolitiques et s'émanciper de la tutelle des pays occidentaux183. C. U N ARC DE CRISES Diapo 51-58 Vidéo : DDC2010, « Le Mo, un arc de crises » (1’17’’ ; 2’56’’ ; 3’34’’ ; 1’07’’ ; 1’15’’ ; 0’45’’) + Vidéo LeMonde.fr Yemen2015 + DDC2012, « Syrie, les implications régionales »(9’30’’) + DDC2015, « Islam en guerre (2/2) » (1’37’’ ;1’17’’) Foyer de conflits depuis la fin de la Première Guerre mondiale, le Moyen-Orient connaît une nouvelle phase de déstabilisation depuis l’intervention étatsunienne de 2003. Du Sinaï à l’Iran (voire à l’Afghanistan), se dessine aujourd’hui un inquiétant arc de crises : - entre Israël et les Palestiniens ; - en Irak, menacé d’implosion ; - en Syrie, en proie à une guerre civile dont les enjeux débordent le seul cadre national ; - au Yemen, destabilisé par une guerre civile, miné par le terrorisme, frappé depuis mars 2015 par l’Arabie saoudite, à la tête d’une coalition ; - autour des ambitions régionales de l’Iran ; - dans la zone « Af-Pak », même si elle n’appartient pas au Moyen-Orient stricto sensu, 180 Cf. La guerre entre l'Irak et l'Iran, de 1980 à 1988, pour le contrôle des zones frontières du Chatt elArab et du Khûzistân, où se font face les installations pétrolières des deux pays, oppose le régime laïc de Saddam Hussein à la république islamique chiite de l'ayatollah Khomeiny. Le conflit, qui reste localisé et s'achève plus ou moins par le maintien du statu quo, échappe déjà aux logiques de la Guerre froide, chaque camp bénéficiant de soutiens à l'Est comme à l'Ouest. 181 Son dynamisme économique est inférieur à celui de la Chine (7,2% de croissance en 2013), mais son excédent commercial (plus de 500 milliards de dollars en 2012) est deux fois supérieur à celui de la Chine. 182 Les pays du CCG sont ainsi devenus en 2013 le premier investisseur au Proche-Orient et au Maghreb, devant l'UE. Il ne s'agit là que de quelques milliards de dollars, mais pour des pays désertés par les IDE des pays du Nord en raison de leur situation politique comme la Tunisie ou l'Égypte, ces investissements sont capitaux. 183 Ainsi, l'Arabie saoudite n'a pas hésité à appuyer le coup d'État du maréchal al-Sissi en Égypte en juillet 2013, contre l'avis des États-Unis. De même, le choix de sociétés françaises pour la construction d'infrastructures au Qatar et en Arabie saoudite a pu être favorisé par une prise de position géopolitique, en l'occurrence le soutien à l'opposition syrienne sur le plan diplomatique, sinon militaire. 39 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016 dans lesquelles les tensions religieuses (rivalité sunnites/chiites, vigueur du phénomène islamiste sous toutes ses formes…) s’ajoutent aux rapports de force politiques. C ONCLUSION Révisions bac p.158-159 40 TS, Histoire-Géographie - Michelangeli, 2015-2016