ACTUALITE LEGISLATIVE EN DROIT IMMOBILIER ET PATRIMONIAL

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ACTUALITE LEGISLATIVE EN DROIT IMMOBILIER ET PATRIMONIAL
ACTUALITE LEGISLATIVE EN DROIT
IMMOBILIER ET PATRIMONIAL
CONSEIL
La loi n°2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion,
appelée également loi "MOLLE" ou loi "Boutin" est parue au JO du 27 mars 2009.
Préparée il y a plus d'un an pour répondre à un contexte de crise profonde du logement, le projet de
loi a été adopté dans l'environnement de la récente crise financière et économique internationale.
Alors que le projet contenait initialement 27 articles, la loi comporte après la discussion parlementaire
124 articles, dont 6 ont fait l'objet d'une censure en tout ou partie par le Conseil Constitutionnel pour
des questions de procédure législative.
La loi apporte de nombreuses modifications au code de l’urbanisme dans une logique de développement
d’une offre nouvelle de logements, et nous vous invitons à lire le dossier de ce présent bulletin en page
12.
En ce qui concerne ce "Point sur", nous concentrerons nos propos sur les dispositions importantes de
cette loi concernant le droit immobilier.
L'actualité législative a également été marquée par la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification
et de clarification du droit et d’allègement des procédures. Cette loi traite également de nombreuses
branches du droit (pour l'urbanisme lire en p.12) et notre étude, qui n’a pas vocation à être exhaustive
s'attachera tout particulièrement au droit patrimonial.
I- LE DROIT IMMOBILIER ET LA LOI BOUTIN
 Dispositions concernant la vente
 Vente des logements HLM à leur occupant
L'article 12 de la loi Boutin simplifie le dispositif visant à éviter toute spéculation du propriétaire ayant
acquis son logement d'un organisme HLM et le revendant dans les cinq années suivantes. Le principe
est issu de la loi ENL du 13 juillet 2006 et énoncé à l'article L443-12-1 du Code de la Construction et de
l'Habitation (CCH). Les modalités existantes étant difficiles d'application, de nouvelles dispositions ont
été prises :
- dans le cas où l'acquéreur personne physique a acquis son logement à un prix inférieur à l'évaluation
faite par le service des domaines et le vend dans les cinq ans suivant cette acquisition, il est tenu de
verser à l'organisme HLM une somme égale à la différence entre le prix de vente et le prix d'acquisition
;
- toutefois, cette somme ne peut excéder l'écart constaté entre l'évaluation faite par le service des
Domaines lors de l'acquisition et le prix d'acquisition (plafond). La plus-value à reverser est donc limitée
à la décote obtenue à l'achat.
« Actualité législative en droit immobilier et patrimonial» – Droit immobilier- 2009.06.01 – RN et SBO
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Lors de la vente du logement HLM à l'occupant, la liste des informations que les organismes HLM doivent
indiquer par écrit préalablement à la vente est complétée. Il s'agit de la liste des charges locatives et
éventuellement de copropriété des deux dernières années, de la liste des travaux réalisés les cinq
dernières années sur les parties communes et une liste des travaux qu'il serait souhaitable
d'entreprendre. Le nouvel article L443-7 du CCH indique qu'il faut joindre une évaluation globale de ces
derniers travaux et de la quote-part imputable à l'acquéreur.
Lorsqu'une première vente d'un logement HLM à son occupant est intervenue, la copropriété est formée.
A partir de ce moment là, la liste de l'ensemble des travaux précités doit faire l'objet d'une présentation
annuelle par le syndic. Si des travaux sont votés, ils doivent faire l'objet d'une constitution d'avances
qui seront déposées sur un compte bancaire séparé ouvert au nom du syndicat des copropriétaires.
L'organisme HLM est dispensé de cette avance.
 Promesse de vente
Désormais, en vertu de l'article L290-1 du CCH, toute promesse de vente d'immeuble d'une validité
supérieure à 18 mois consentie par une personne physique est nulle si elle n'est pas constatée par acte
authentique. Par ailleurs, le contrat doit prévoir le versement d'une indemnité d'immobilisation fixée au
minimum à 5% du prix de vente. Ceci vise également toute prorogation d'une promesse portant sa
durée totale à plus de 18 mois. Ce dispositif est applicable pour les promesses conclues à partir du 1er
juillet 2009. Il a pour objectif de protéger les propriétaires particuliers face aux professionnels de
l'immobilier (promoteur, marchand de biens…).
 Vente d'immeuble à construire
Il s'agit d'harmoniser la réglementation récente de la vente d'immeuble à rénover et celui de la vente
d'immeuble à construire (VEFA, vente à terme) et d'aligner le régime de contestation des défauts de
conformité sur celui des vices apparents. Le vendeur d'immeuble à construire ne peut désormais être
déchargé, ni avant la réception des travaux, ni avant l'expiration d'un délai d'un mois après la prise de
possession de l'acquéreur, non seulement des vices de construction, mais également des défauts de
conformité apparents1.
 Divers
Dans les propositions diverses concernant la vente immobilière, on peut noter que la loi Boutin exclut
les dispositions de la "vente en bloc" (Loi Aurillac) pour les cessions d'immeubles à un organisme HLM
ou à une SEM lorsque les logements font l'objet d'une convention APL. En effet, dans ce cas là, les
locataires sont déjà protégés et il n'y a pas lieu de proroger leur bail de six ans.
Certaines divisions d'immeubles sont interdites par l'article L111-6-1 du CCH (immeuble insalubres,
n'ayant pas fait l'objet de diagnostics…). Le champ d'application de cette interdiction est élargi à "toute
division, en propriété ou en jouissance, qu'elle résulte de mutation à titre gratuit ou onéreux, de partage
ou de locations", ceci pour éviter toute mauvaise interprétation du terme "division" et le contournement
de la règle par certains propriétaires afin de mettre de tels biens en location.
Le mode de calcul de la taxe sur les cessions de terrains devenus constructibles a été modifié2. La taxe
était assise sur les deux tiers du prix de vente, elle s'applique désormais sur la plus-value représentant
la différence entre le prix de cession du terrain diminué du prix d'acquisition stipulé dans les actes,
actualisé en fonction du dernier indice des prix à la consommation. En l'absence d'éléments de
référence, la taxe est alors calculée selon les modalités antérieures, à savoir sur les deux tiers du prix
de cession. Ce nouveau calcul sera applicable à partir du 28 septembre 2009.
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Article 109 de la loi modifiant l'article 1642-1 Code civil
Article 38 de la loi
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 Dispositions concernant le droit locatif
 Dispositions concernant la loi du 6 juillet 1989
La loi Boutin introduit plusieurs modifications importantes dans les rapports bailleurs-locataires dans le
cadre de la loi du 6 juillet 1989 ; citons les plus importantes :
- Interdiction du cumul caution et assurance des risques locatifs3 : la loi interdit désormais au bailleur
de demander un cautionnement au candidat locataire s'il a souscrit une "assurance garantissant les
obligations locatives du locataire".
De plus, si le bailleur est une personne morale autre qu'une "SCI familiale" (société civile constituée
exclusivement entre parents et alliés jusqu'au quatrième degré inclus), le cautionnement ne peut être
demandé que s'il est apporté par un des organismes dont la liste est fixée par décret (seront visés le
Loca-pass et le FSL – Fonds de solidarité logement) ou si le logement est loué à un étudiant ne
bénéficiant pas d'une bourse de l'enseignement supérieur.
- réductions des délais d'expulsion (de un an maximum à trois ans auparavant)4
- mention de la surface habitable dans les baux : la loi impose désormais au bailleur louant un logement
dans le cadre de la loi du 6 juillet 1989 de mentionner dans le contrat de location la surface habitable
du logement. Il n'est pas mentionné les modalités de calcul, ni les sanctions applicables en cas de
différence entre ce qui est mentionné dans le bail et la réalité des lieux.
- Restitution du dépôt de garantie au nouveau bailleur en cas de vente du logement5 : la loi adopte une
position différente de la jurisprudence et sécurise désormais le locataire quant à la récupération de son
dépôt de garantie en cas de vente de son logement occupé par lui : dans ce cas, la restitution du dépôt
de garantie incombe au nouveau bailleur, et "toute convention contraire n'a d'effet qu'entre les parties
à la mutation"...
- Possibilité de partage du coût des travaux d'économie d'énergie entre le bailleur et locataire6: elle crée
la possibilité pour le bailleur, par dérogation aux règles de la récupérabilité des charges locatives, lorsque
des travaux d'économie d'énergie sont réalisés par lui dans les parties privatives d'un logement ou dans
les parties communes de l'immeuble, de demander au locataire une contribution pour le partage des
économies de charge, à partir de la date d'achèvement des travaux, sous réserve que ces derniers lui
bénéficient directement et qu'ils lui soient justifiés. Elle ne peut toutefois être exigible qu'à la condition
qu'un ensemble de travaux ait été réalisé ou que le logement atteigne un niveau minimal de
performance énergétique. Le texte précise que cette participation, limitée au maximum à quinze ans,
est inscrite sur l'avis d'échéance et portée sur la quittance remise au locataire. Son montant, fixe et non
révisable, ne peut être supérieur à la moitié du montant de l'économie d'énergie estimée. Les conditions
d'application, notamment la liste des travaux éligibles, seront fixées par décret.
A noter également qu'une disposition de la nouvelle loi oblige désormais le propriétaire ou son
mandataire à transmettre gratuitement la quittance au locataire qui en fait la demande, y compris par
courrier.
 Dispositions concernant les locations HLM
La loi insère deux articles L442-3-1 et L442-3-2 dans le CCH ayant pour objectif de favoriser la mobilité
dans le parc HLM pour les logements sous-occupés ou dont les locataires dépassent le double des
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Article 55 de la loi
Article 57 de la loi
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Article 103 de la loi
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Article 109 de la loi
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plafonds de ressources. Les locataires devront accepter un nouveau logement ou n'auront plus de droit
au maintien dans les lieux. La loi permet également de prendre à bail des locations conventionnées du
parc privé pour les louer aux personnes en difficulté et pour les organismes HLM et SEM de signer des
contrats de conception réalisation pour accélérer les constructions de logements sociaux7.
 Dispositions concernant la location meublée
Le caractère d'ordre public de la réglementation est rappelé par la loi. De plus, l'article L632-1 du CCH
est complété et prévoit désormais les modalités de résiliation des baux des "hôtels meublés" lorsque
l'exploitant adresse une assignation pour obtenir la résiliation du bail et que le logement meublé
constitue la résidence principale du preneur. L'huissier doit notifier l'assignation au Préfet un mois avant
l'audience pour qu'il informe le FSL.
II- LE DROIT PATRIMONIAL ET LA LOI DU 12 MAI 2009
 Disposition concernant le PACS
La loi de simplification et de clarification créé un nouvel article 515-7-1 du code civil qui traite de la loi
applicable au PACS conclu à l’étranger et à ses effets sur les notre territoire. Le but étant de permettre
la production d’effets en France des partenariats enregistrés à l’étranger. En effet, il est apparu que les
personnes ayant contracté un tel partenariat sont actuellement contraintes de le rompre pour pouvoir
signer un pacte civil de solidarité en France et bénéficier des droits afférents. L’augmentation du nombre
de partenariats souscrits à l’étranger rendait nécessaire l’introduction d’une règle de droit international
privé en droit français. En effet, certaines législations étrangères font produire aux partenariats
enregistrés des effets différents de ceux du pacte civil de solidarité français. Ainsi, au plan patrimonial,
à défaut de convention particulière, le partenariat enregistré néerlandais instaure un régime de
communauté universelle entre les partenaires, alors que le pacte civil de solidarité instaure un régime
de séparation de biens. Jusqu’à cet article, le code civil ne contenait aucune règle de conflit de lois
permettant d’apprécier la validité de ces partenariats et l’étendue de leurs effets sur notre territoire. La
lacune est comblée par ce nouvel article et répond clairement à la préoccupation principale des couples
concernés, lorsqu’ils viennent s’installer en France.
Cependant notons que la loi désignée par le contrat ne pourra trouver toutefois application si elle est
contraire à notre ordre public et que cette loi ne trouvera pas à s’appliquer en matière de succession,
filiation et d’obligation alimentaire, matières qui ne peuvent relever que de règles de conflit de loi
spéciales et non pas générales comme celle intégrée à l’article 515-7-1.
 Droit des biens : la vente forcée d’un bien indivis
La loi de simplification et de clarification créé un nouvel article 815-5-1 du code civil qui permet à des
indivisaires de vendre un bien alors-même que tous les indivisaires ne sont pas d’accord ou n’ont pas
manifestés leur opposition à celle-ci.
Cette vente ne pourra se dérouler sans un accord préalable du tribunal de grande instance sous une
double condition. La demande doit émaner d’indivisaire détenant les 2/3 des droits sur ledit bien et le
bien détenu en indivision ne doit pas avoir fait l’objet d’un démembrement de propriété.
L’intention d’aliéner le bien indivis doit être formulée devant le notaire qui aura la charge sous un mois
d’en informer le ou les coïndivisaires. Si le notaire n’informe pas les destinataires de la décision alors
toutes décisions prises par les indivisaires représentant les 2/3 des droits seront inopposables aux autres
coïndivisaires.
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Article 110 et 111 de la loi
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Cette information ouvre un délai de 3 mois aux coïndivisaire qui devront durant celui-ci se manifester
soit pour donner leur accord pour la vente amiable soit informer l’indivision de leur opposition. Attention,
en cas de silence l’adage « qui ne dit mot consent » n’a pas à s’appliquer car en la matière le silence du
coïndivisaire informé est apprécié comme une opposition à la vente.
En cas de refus exprès de vendre ou passé le délai des 3 mois, le notaire devras constater la naissance
du conflit par l’établissement d’un procès-verbal de carence et le tribunal de grande instance pourra
être saisi sur requête des coïndivisaires à l’origine de la procédure. Le procès-verbal dressé par le notaire
servira de fondement pour que le juge statue sur la question de la vente du bien. Le juge a le rôle de
vérifier que toute la procédure a été respectée via le procès-verbal qui devra être le plus détaillé possible.
Si tout est conforme le juge ordonnera la vente qui aura le caractère d’une licitation.
La question posée par cette procédure de vente alors qu’une opposition a pu être formée est celle de
savoir si les droits des indivisaires opposant sont garantis par ce mécanisme. La réponse est positive
dans le sens où la vente ne pourra être ordonnée que si le juge appelé à statuer est celui qui en principe
constate l’ouverture d’un droit préférentiel pour l’indivisaire opposant en vertu des articles 831 à 834
du code civil. Ainsi tout indivisaire qui souhaite se voir attribuer le bien de manière préférentielle pourra
faire une demande reconventionnelle en ce sens auprès dudit juge.
Enfin, si vente il y a lieu celle-ci ne vaudra pas partage et le prix tiré de celle-ci devra revenir dans la
masse indivise pour être partager par la suite entre tous les indivisaires.
Rémy NERRIERE
Sophie DROLLER-BOLELA
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