Marché interne du travail - Enjeux et limites de la mobilite
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Marché interne du travail - Enjeux et limites de la mobilite
Marché interne du travail Enjeux et limites de la mobilité 2003 - 105 Jocelyne ABRAHAM CERMAT – IAE de Tours Université François Rabelais Marche interne du travail Enjeux et limites de la mobilité Résumé : Pour tirer les meilleurs avantages de leurs marchés internes du travail, les grandes organisations ont besoin de ressources humaines flexibles, adaptables et mobiles. Nous montrons dans cet article, que les enjeux de la mobilité interne du personnel sont triples. Les enjeux structurels tiennent aux outils et méthodes à concevoir et mettre en place pour organiser cette mobilité de manière équitable et motivante. Les enjeux stratégiques de la mobilité tiennent aux résultats attendus en terme de fidélisation des meilleurs et de capitalisation des connaissances. Les enjeux sociaux et culturels tiennent aux résultats au niveau individuel en terme de carrière et d’employabilité. Nous montrons également les limites de la mobilité interne. A partir d’une étude empirique, nous examinons les risques de perte de légitimité professionnelle, de non-performance collective, le lien entre mobilité et insécurité de l’emploi et les freins de la hiérarchie. Nous concluons sur la nécessité d’évaluer ces enjeux et ces limites en repensant préalablement, dans chaque contexte, le lien employeuremployé et la nature de l’offre d’emplois et de carrière. Mots-clés : mobilité, polyvalence, gestion des connaissances, carrière, marché interne du travail, employabilité, ressources, emplois Internal labor market Stakes and limits of job mobility Abstract : To draw the best advantages from their internal labour markets, big organizations need flexible, adaptable and mobile human resources. We show in this article, that the stakes of the internal job mobility are triple. The structural stakes are due to the tools and methods to be conceived and set up to organize this mobility in an equitable and justifying way. The strategic stakes of mobility are due to the results awaited in term of personnel loyalty and knowledge capitalization. The social and cultural stakes are due to the results at the individual level in term of career and employability. We also show the limits of internal mobility. From an empirical study, we examine the risks of loss of professional legitimacy, of collective notperformance, the bond between mobility and job insecurity and the brakes of the hierarchy. We conclude on the need for evaluating these stakes and these limits by reconsidering beforehand, in each context, the bond employer-employee and the nature of the offer of employment and career. Key words : job mobility, job rotation, versatility, knowledge management, career, internal labour market, employability, resources, sustainable employments 75 Dans un contexte d’incertitude des marchés et de rareté des compétences, les entreprises sont en quête de ressources humaines flexibles, adaptables et mobiles (Cohendet P., Llerena P., 1999 ; Everaere C., 1998). Les restructurations et l’application des 35 heures, les ont incité à modifier leurs structures, à innover dans de nouvelles formes d’organisation du travail et à redéployer leurs ressources humaines (Greenan N., 1996). Ce contexte explique peut-être pourquoi les salariés soucieux de développer leur employabilité, sont réceptifs aux perspectives d’embauche que leur offre le marché du travail et ne sont plus complètement fermés aux perspectives de mobilité que leur offrent leurs employeurs1. Mais la mobilité recouvre plusieurs réalités nécessitant des éclaircissements, que nous voulons donner à lire dans ce chapitre. L’éclaircissement liminaire à apporter dans cette introduction, concerne la définition du concept. En premier lieu, il faut distinguer la mobilité externe de la mobilité interne. La première concerne des changements d’emplois avec changement d’employeurs. La seconde concerne le passage d’un emploi à un autre dans une même organisation, avec ou sans changement d’établissement et de zone géographique. La différence entre mobilité externe et mobilité interne suppose que l'on ait défini au préalable le périmètre de référence c'est-à-dire les frontières de l'organisation considérée, voire l’employeur lui-même. Or, les frontières des organisations ont eu tendance à s’élargir ces dernières années. L'ouverture du marché européen, la globalisation et les fusions d'entreprises, concourent à l'émergence de grands groupes aux frontières complexes. Cet effet-taille transforme les organisations en de véritables sous-systèmes du marché du travail mondial, qui offrent un grand choix d’emplois possibles aux salariés et des opportunités d’optimisation de main d’œuvre aux équipes dirigeantes. La mobilité interne prend donc tout son sens, dans les grandes et les très grandes organisations. Précisons, en second lieu, que la mobilité interne peut s'effectuer à des rythmes différents dans le temps. La mobilité de court terme, sur des postes, des missions ou des projets, concerne des changements de postes de travail. Il peut s’agir de la rotation de postes sur un îlot de production, dans un service ou au sein d’une équipe, ou bien de postes mobiles par définition comme les postes de remplaçants appelés parfois « suppléants2 » ou « voltigeurs3 ». Ce type de mobilité interne de court terme s’apparente à de la polyvalence, puisque les rotations se font dans des délais courts et sans temps de formation. Contrairement à la polyvalence, la mobilité interne de long terme concerne, ponctuellement le passage d’un emploi à un autre, et en cumulé, l’ensemble des changements d’emplois durant une période donnée. Elle peut être soit verticale quand elle est associée à une promotion, en terme de statut, de responsabilité et de rémunération ; soit horizontale, c’est-à-dire sans changement de niveau hiérarchique, de responsabilité ou de salaire. Cette dernière est pour certains auteurs la nouvelle voie proposée par les entreprises pour accroître l’adaptabilité des ressources humaines (Michel, 1993). En effet, dans un contexte de resserrement des structures, la mobilité interne horizontale (ou transversale), apparaît comme une nouvelle 1 Selon l’enquête mobilité APEC 2002, la mobilité des cadres est à 67% de la mobilité externe et à 33% de la mobilité interne. 2 En référence aux équipes de suppléance dans le secteur hospitalier, le SICS, Service Infirmier de Compensation et de Suppléance 3 Un voltigeur chez Pfizer est une personne qui remplace ses collègues pendant leurs pauses pour assurer la continuité de la production. 76 façon de gérer les compétences pour les employeurs. C’est à ce titre qu’elle nous intéresse, en matière de développement de carrière (Guerrero, 2001). Peu différente de la polyvalence, la mobilité horizontale, renvoie aux mêmes problématiques actuelles de gestion des ressources humaines. Elles servent a priori des objectifs de flexibilité et d’adaptabilité, pour répondre aux incertitudes de l’environnement. Comme l’ont bien analysé certaines recherches, on entre dans une ère de non-division du travail (Botte, 2000) qui nous amène à nous interroger sur les motifs de recours dans les entreprises et les sources de performance de ces modes d’organisation du travail flexible. Dans la littérature, la mobilité interne se trouve à l’intersection de plusieurs thèmes de recherche : les formes d’organisation flexible du travail, le Marché Interne du Travail et le développement de carrière. La problématique centrale de cette littérature est de savoir si la mobilité en particulier et les formes d’organisations flexibles du travail en général se développent (travail en équipe, groupes projets…), dans quelles proportions, dans quels secteurs et quels types d’entreprises ; si elles contribuent à la performance, à quelles conditions et plus récemment si elles contribueront à la performance de façon durable en servant les intérêts des salariés. Ces questions sont à l’origine de l’émergence dans la littérature anglo-saxonne d’études empiriques nationales sur les Marchés Internes du Travail (Internal Labor Market4- ILM). Ainsi à partir de données du gouvernement britannique, des auteurs (Booth, Francesconi & Garcia-Serrano, 1999) analysent la mobilité et l’ancienneté d’hommes et de femmes britanniques de 1915 à 1990 et découvrent qu’ils occupent en moyenne cinq emplois différents durant leur vie professionnelle (on en compte le double aux USA) et que la moitié de leurs changements d’emploi se produit durant les dix premières années. De même aux Etats-Unis, des auteurs se sont intéressés au marché interne du travail qui révèlent qu’à partir de la fin des années 80 et durant les années 90, pour s’adapter aux évolutions de l’environnement et rester compétitives les entreprises ont développé des méthodes d’organisation dites « innovantes » ou « flexibles » caractéristiques d’entreprises dites « transformées » avec des structures plus plates, moins hiérarchiques et des « formes d’organisation du travail hautement performantes » (Osterman, 1994 ; Osterman, 2000 ; Gittleman, Horrigan & Joyce, 1998 ; Leigh & Gifford, 1999). Ces formes d’organisation du travail sont dites innovantes5, car en rupture par rapport à l’Organisation Scientifique du Travail, et flexibles car elles incluent notamment le travail en équipes autonomes et toutes les formes de mobilité interne. En 1992, par exemple, 26,6% des établissements du secteur privé, de plus de 50 personnes, utilisait la mobilité interne, avec un taux de pénétration de 50% (Osterman, 1994). Ces études portent essentiellement sur les enjeux pour l’entreprise des formes flexibles d’organisation du travail comme la mobilité interne, nous en ferons donc largement état dans la première partie de ce chapitre consacré aux enjeux actuels de la mobilité interne. Les praticiens et chercheurs en GRH qui se soucient de la performance durable et de la création de valeur des entreprises y trouveront, les uns quelques arguments pour défendre leurs idées aux seins de leurs organisations, les autres des références à la littérature pour poser des hypothèses de recherche dans le domaine du Marché Interne du Travail. Notre but n’étant pas 4 Doeringer, P.B., et Piore, M.J., Internal Labour Markets and Manpower Analysis, M.E. Shape, Lexington, MA, 1971. 5 Innovantes, certes, mais pas tout à fait nouvelles dans une perspective historique (Parks, 1995 ; Bailey, 1993) 77 de dresser un tableau idyllique et partial sur la mobilité, il convenait de combler un déséquilibre (notamment de la littérature récente) par une présentation des limites possibles à la mobilité, à la lumière de données empiriques. La prise de conscience et l’analyse des limites à la mobilité aident à orienter le décideur vers telle ou telle action prioritaire en matière de GRH et le chercheur à introduire peut-être des variables complémentaire dans ses analyses. La suite de nos propos s’articulera autour de deux axes : les enjeux de la mobilité interne (I) – les limites à la mobilité interne (II). 1 – LES ENJEUX DE LA MOBILITE INTERNE Dans les années 90, années de révolution organisationnelle, des changements importants sont intervenus dans les structures des organisations, ainsi que dans le positionnement de la GRH devenue plus stratégique. Dans une optique de développement durable, les organisations doivent prendre en compte les attentes des salariés. La convergence de ces changements doit modifier le regard que l’on porte sur la mobilité. Ainsi les enjeux de la mobilité interne, seront abordés dans cette première partie du chapitre du triple point de vue : structurel, stratégique et social. Les enjeux structurels de la mobilité En matière de structures, nous retiendrons deux phénomènes. D’une part, l'émergence de vastes Marchés Internes du Travail, d’autre part une plus grande transparence de ces marchés rendue possible par une plus grande compétence des fonctions RH, créatrices d’outils innovants. Les deux enjeux structurels tiennent, d’une part, à la taille des marchés internes du travail (§ 111) et d’autre part, à la transparence et l’efficience de ces marchés (§ 112). Tirer avantage de l’élargissement des marchés internes du travail La mondialisation des économies et les rapprochements d'entreprises ont créé de grands groupes offrant de multiples fonctions, à des collaborateurs nombreux occupant de multiples métiers. Au point qu'aujourd'hui les grandes organisations constituent de véritables marchés de l'emploi "en interne" (Turner, 1994 ; Doeringer & Piore, 1971). Pour qu’une entreprise puisse tirer avantage de sa taille, il faut que ses salariés soient incités à jouer la stratégie de la mobilité interne plutôt que celle de la mobilité externe. Ce qui pose au moins trois problèmes, celui de la concurrence des marchés internes vis-à-vis des marchés externes, celui de la loyauté du salarié vis-à-vis de l’employeur et celui de l’attractivité de la carrière interne à l’international. Dans une étude sur la mobilité des ingénieurs, Almeida & Kogut (1999) ont montré que les ingénieurs n’hésitaient pas à quitter l’employeur qui ne leur donnait plus satisfaction alors 78 qu’ils hésitent plus volontiers à changer de région. Dans une approche économique, ils montrent comment les savoirs peuvent se déployer et rester localisés dans une région plutôt qu’une autre (en l’occurrence dans la Silicon Valley). Ils expliquent, par la mobilité des ingénieurs, les différences régionales de développement d’activité industrielle, les externalités. La raison invoquée tient au caractère tacite des savoirs et le fait qu’ils soient portés par les salariés eux-mêmes et se déplacent ou se localisent au grès de leur mobilité. Bien que conçue dans une approche économique, ces réflexions nous paraissent tout à fait intéressantes à transposer à l’échelle d’un grand groupe. Elles montrent tout d’abord que les frontières des entreprises peuvent, dans certains cas, être plus perméables que celles d’une région et que pour certaines catégories de personnel le « dedans et le dehors » de l’organisation sont deux mondes perméables (Cadin, 1997). Ensuite, par simple transposition de la région à un grand groupe, elles permettent de tirer un enseignement. Si les connaissances sont tacites (non explicitées, détenues par quelques personnes identifiées) et si le marché interne du travail est actif (entendons opportunités de mobilité et de promotion) alors plus les savoirs resteront dans le groupe. Ce qui revient à poser l’hypothèse d’une corrélation négative entre la dynamique d’un marché interne du travail et le taux de turnover. Certaines recherches ont analysé les facteurs pouvant motiver les salariés à bouger tout en restant fidèles à leur employeur. En terme d’investissement en capital humain, dans la relation traditionnelle du travail, et selon la théorie des ressources (Resource-Based-View), l’entreprise prend moins de risque à investir dans du capital humain spécifique (formation, relations interpersonnelles particulières à l’entreprise et son métier) que dans du capital humain général (formation pouvant être valorisée ailleurs). Le premier permet l’obtention d’une rente, telle celle de la théorie basée sur les ressources (Resource-Based-View), tandis que l’autre peut être imité et servir à d’autres employeurs. Pour Galunic et Anderson (2000) dans un contexte de relation distante (type assureur et ses agents), la relation est différente, l’hypothèse est que plus l’entreprise investit dans du capital humain général, plus l’agent y gagne en terme d’employabilité, plus il en est reconnaissant et plus il est impliqué et motivé. Ainsi si l’on se range à cette hypothèse, un investissement en capital humain permettrait à la fois de dynamiser le marché interne du travail, par accroissement des compétences, mais également de réduire les risques de voir partir les collaborateurs. Quand on parle de la mobilité interne et des avantages à tirer des grands marchés internes du travail, on doit inclure la question de la mobilité internationale. D’ailleurs dans son étude Guerrero (2001) illustre parfaitement l’étroite imbrication qui existe aujourd’hui entre la mobilité interne et la dimension internationale des Marchés Internes du Travail. Dans ses conclusions, elle incite les salariés à être fidèles à leur entreprise et à vérifier trois éléments dans la construction de leur parcours professionnel : la dimension internationale du poste ; la taille et la dimension multiculturelle de l’entreprise et la fréquence des changements de poste, de préférence dans une même entreprise. Dans leur étude de 1999, Haines et Saba ont étudié comment les managers, anciens diplômés en MBA6, perçoivent la mobilité internationale, quels sont les freins et les principales mesures incitatives. Dans son étude sur la mobilité interne internationale, Mahroum (2000) montre la diversité des motivations à l’internationalisation de la carrière suivant cinq profils de candidats (dont trois repris ici) : les ingénieurs et techniciens « voyageurs en classe économique » cherchant le pays qui monnaie le mieux leurs compétences, les managers et 6 Management Business Administration 79 cadres « touristes par accident » en quête d’expériences interculturelles allant à l’étranger au grès des opportunités offertes par leur entreprise et les entrepreneurs « explorateurs » visant à faire fructifier leurs idées dans de nouvelles affaires. Sa typologie, originale, invite les entreprises désireuses de développer des mesures incitatives à segmenter leur clientèle interne pour connaître leurs motivations réelles et à diversifier leur offre ! Ainsi, le premier enjeu structurel de la mobilité interne nous semble être le suivant. Pour tirer avantage de la taille de son Marché Interne du Travail, une grande organisation doit entretenir la dynamique de ce marché, entretenir la loyauté de ses salariés et offrir des perspectives de mobilité internationale. Favoriser la transparence et l’efficience des marchés internes du travail par la création de pratiques innovantes La littérature relative au Marché Interne du Travail distingue d’une part, les nouvelles formes d’organisation flexible du travail et d’autre part, les pratiques de GRH qui n’affectent pas directement la façon de travailler, mais facilitent la mise en œuvre du travail. Certaines études empiriques ont souligné la complémentarité des deux groupes de pratiques (Ichniowski et al., 1996 ; 1997). Pour Bailey (1994) les méthodes flexibles de travail peuvent conduire à la performance à trois conditions : que les salariés possèdent les connaissances et compétences que n’ont pas les managers ; qu’ils soient motivés pour faire usage de leurs savoirs dans le travail et que l’organisation soit structurée de telle façon que les initiatives et les efforts des salariés soient couronnés de succès. Ce qui suppose la présence ou la mise en place d’une GRH spécifique, ce que souligne d’autres études (Osterman 1987) en montrant que les formes flexibles d’organisation du travail donnent le meilleur niveau de performance quand elles sont soutenues par : les efforts de formation ; la politique de rémunération et de reconnaissance ; le partage des bénéfices. Dans une autre étude, l’auteur confirme le lien entre des modes d’organisation flexible et des pratiques de GRH particulières visant à les soutenir : des systèmes de rémunération innovants, un effort de formation, une plus grande implication d’une partie des salariés et pas de promotion à l’ancienneté au détriment de la promotion au mérite (Osterman, 1994). Ces dernières années les fonctions RH se sont dotées d’outils et de méthodes d’évaluation des emplois et des compétences individuelles. Elles ont ainsi contribué à la transparence et donc à l’efficience des marchés internes de l’emploi. Tant l’entreprise que le salarié peuvent avoir à y gagner. Pour l’entreprise, le résultat se mesure en terme d’économie de coûts de transactions (Williamson, 1994). Contrairement aux candidats potentiels sur le marché externe, l’entreprise connaît les collaborateurs internes, leurs qualités, leurs compétences, leurs performances. Dans un recrutement interne, il y a donc moins d’asymétrie d’information entre l’employeur et le salarié potentiel, les partenaires se connaissent, de même, les risques de comportements opportunistes, sont probablement plus faibles. Outre les coûts d’information et d’opportunisme, l'accès au marché externe du travail peut avoir un coût financier marginal croissant. L'arrivée de classes creuses sur le marché du travail et la rareté de certaines compétences due à l'émergence de nouveaux métiers font monter les coûts de transaction. Au final, les recruteurs supportent des coûts de transaction sur le marché externe qui peuvent devenir plus élevés que les coûts d'organisation sur le marché interne. 80 Pour le salarié, le résultat se mesure en terme d’informations supplémentaires pour la gestion de sa carrière. La description des emplois, les cartes de métiers, les référentiels compétences, donnent plus de lisibilité aux changements de postes, aux parcours professionnels et à la gestion de carrière. La transparence des systèmes de rémunération et des opportunités de formation, rendent plus visible l’étendue des possibilités pour le salarié en quête de développement personnel et promotionnel. Les DRH peuvent également accompagner les salariés dans la définition et la réalisation de leur projet professionnel. Ainsi, le deuxième enjeu structurel de la mobilité consisterait, à notre sens, à créer un marché interne de l’emploi, attractif, transparent et efficient, en édictant clairement les règles du jeu de la mobilité, en stipulant les conditions générales de mobilité, et surtout les conditions économiques d’accompagnement de la mobilité. Ce qui consiste pour la FRH à innover dans ses pratiques. C’est pourquoi nous observons récemment dans les entreprises la création de charte de mobilité ou de bourses d’emplois sur leur réseau intranet. Les enjeux stratégiques de la mobilité interne Dans le premier paragraphe nous avons abordé les enjeux structurels de la mobilité, les enjeux stratégiques, quant à eux, tiennent d’une part à l’importance de la création de ressources rares et inimitables et d’autre part à l’accumulation de savoirs. Générer des ressources dans une perspective de GRH de long terme Dans leur étude empirique réalisée auprès d’entreprises européennes sur les pratiques de mobilité fonctionnelle, Friedrich, Kabst, Weber et Rodehuth (1998) cherchent à savoir si la mobilité est utilisée en réaction aux fluctuations de court terme de l’environnement ou s’il s’agit d’une pratique intégrée dans une politique de GRH plus globale. Après avoir montré que la mobilité est relativement peu étendue puisqu’elle ne concerne qu’une entreprise sur cinq, qu’il existe des disparités entre les pays (très utilisée en Finlande, 32%, elle l’est beaucoup moins en France, 10%) et des différences sectorielles (l’industrie manufacturière ayant le plus fort taux avec 23%), ils montrent que ce ne sont pas des raisons de court terme, liées aux fluctuations de l’environnement, qui poussent les entreprises à mettre en place des pratiques de mobilité du personnel, mais qu’elles le font davantage dans une approche stratégique de long terme. Ce résultat empirique trouve un écho dans les approches théoriques. En effet, savoir lutter contre la fuite des compétences ou inciter à leur redéploiement interne devient un atout stratégique aujourd’hui (Argote & Ingram, 2000) et un moyen pour la FRH de montrer sa contribution à la création de ressources rares (Barney, 2001 ; Barney, 1996 ; Barney, 1991). La mobilité interne permet à une organisation de redéployer ses RH en les adaptant à ses besoins sur le long terme. Indirectement, elle crée des ressources nouvelles. Parmi les ressources stratégiques, les connaissances, leur création au niveau individuel et leur diffusion au niveau collectif, sont de la plus haute importance pour la performance. Favoriser la capitalisation de connaissances Plusieurs études empiriques ont cherché à mettre en rapport la mobilité et la performance, 81 deux explications sont avancées (Campion 1994) : la mobilité encourage l’apprentissage et la formation et favorise l’accumulation de capital humain ; dans cette perspective, les managers étant exposés à une plus grande variété d’expériences contribuent à améliorer leur professionnalisme et la mobilité permet d’éviter la lassitude sur le poste et de maintenir la motivation. Un autre auteur (Ortega, 2001) propose également un autre mode d’explication, il soutient que la mobilité permet à l’entreprise de mieux connaître les compétences de ses salariés – ce qui a une incidence sur l’apprentissage de l’entreprise elle-même « the effect of rotation on firm learning, i.e., on the effectiveness employer learns about its employees », cet apprentissage constitue un gain en capacité à créer des ressources. Ainsi, outre un apport de flexibilité, la mobilité peut avoir un impact sur la capitalisation de compétences (Mallet, 1995 ; Onstenk, 1995), en permettant : des échanges d'expériences et une diversité dans les expériences ; l’élargissement des « rencontres » (Romelaer, 2000) ; l’enrichissement et l’élargissement des emplois, en étant source de décloisonnement, de diffusion des savoir-faire et de confrontation des pratiques professionnelles (Gray P.H., 2000). Enfin elle peut être source de motivation, d'implication ou de promotion. L’encadré suivant illustre de tels apports auprès de personnels soignants. 82 Encadré 1 : Expérience et Capital Humain (Témoignages d’Agents Hospitaliers, 2000) Le personnel soignant du Service Infirmier de Compensation et de Suppléance (SICS) de Tours témoignent des avantages retirés de la mobilité. Premièrement, la mobilité favorise des processus d’apprentissage en procurant aux agents la satisfaction de questionner ses propres connaissances « on se remet en cause », d’accumuler des compétences spécifiques « il y a des gestes que l’on ne fait que dans certains services » et d’éviter les phénomènes de lassitude et de fatigue « c’est stimulant de changer tout le temps ». Deuxièmement, la mobilité contribue à l’enrichissement des emplois en offrant aux agents la possibilité d’élargir les « rencontres » dont on sait qu’elles sont primordiales pour l’organisation « j’ai augmenté mon réseau de relations », le sentiment d’être doté de plus larges capacités professionnelles ce qui modifie avantageusement l’image de soi « le plus valorisant c’est de réussir », de plus le regard des autres est également modifié dans un sens favorable à l’agent « on nous considère comme des personnes ressources ». Troisièmement, la mobilité permet d’accroître l’autonomie des agents, et développe leur capacité d’adaptation. Tout ceci nous conduit à penser que l’enjeu stratégique principal de la mobilité tient à sa capacité à générer des ressources (Abraham J., 2001 ; Abraham J., 2002) d’une grande valeur pour le développement de l’entreprise, des savoirs rares et inimitables7 puisque co-construits par la rencontre de plusieurs acteurs à l’intérieur d’une même entreprise. Les enjeux sociaux et culturels : le point de vue du salarié Dans les paragraphes précédents, nous nous sommes placés du côté de l’entreprise, pour voir les effets de la mobilité interne sur l’efficacité des structures et les effets de la mobilité interne sur la création de ressources stratégiques. Dans ce paragraphe, du point de vue du salarié, nous nous interrogeons sur les apports de la mobilité quant à son implication dans l’entreprise, son employabilité, ses gains financiers et sa carrière. En outre, à la question de la réalité des enjeux de la mobilité (§ 131) s’ajoute celle de la durabilité de ces enjeux (§ 132). La réalité des enjeux de la mobilité pour les salariés Chercheurs et praticiens reconnaissent depuis longtemps la valeur de l’expérience professionnelle pour le développement de carrière (Hall, 1986 ; Morrison & Hock, 1986). La mobilité est l’une des pratiques la plus largement utilisée dans le développement de carrière, c’est une forme d’apprentissage et d’acquisition d’expériences (Noe & Ford, 1992). Comme on ne peut pas confiner les salariés dans des carrières linéaires et que les besoins en spécialisation diminuent, l’utilisation de carrières non linéaires va de paire avec des systèmes 7 Pour Barney pour être stratégique, dans l’approche resource-based une ressource doit avoir simultanément les qualités d’être : de valeur, inimitable et non substituable. Tant que ces qualités sont maintenues l’entreprise qui les détient conserve un avantage concurrentiel sur le marché. 83 de gestion de carrière sans frontière (Arthur, Rousseau, 1996). Les firmes se dotent de structures horizontales, favorisent les collaborations transversales entre unités, et le travail en équipes (Daft, 1998). Dans ce contexte, elles offrent à leurs collaborateurs des carrières horizontales plutôt que verticales. Sur les recherches concernant la mobilité, la plupart s’intéressent aux avantages de cette pratique. London (1989) a évalué les avantages pour les scientifiques et les ingénieurs, selon lui, ils comprennent mieux les avantages de la collaboration, la nécessité de confronter les différentes solutions à un problème, et la valeur des différents points de vue. Campion, Cheraskin, et Stevens (1994) ont étudié les avantages de la mobilité sur 255 salariés dans une grande entreprise pharmaceutique, parmi lesquels nous pouvons citer : le développement personnel (auto-réalisation, ouverture aux divers styles de management), un travail motivant (compétence et variété des tâches), une intégration à l’entreprise (partage de la culture et développement du réseau social) et des conséquences sur la carrière (implication dans la carrière et satisfaction). Nombreuses recherches ont montré que la mobilité, qui accroît l’expérience professionnelle, peut être une stratégie environnementale pour le développement de carrière (Campion et al., 1994). Pour les managers, la mobilité peut renforcer ou élargir leurs possibilités de carrière, car la mobilité appelle à maîtriser plusieurs situations, plusieurs rôles et permet d’acquérir des compétences de généraliste (Saari et al., 1988). Pour les hauts potentiels, les professionnels en début de carrière et les jeunes méritants, la mobilité permet un apprentissage sur plusieurs postes, la rencontre avec plusieurs collègues, elle permet la socialisation et le partage des valeurs (Burke, 1997), (Wexley & Latham, 1991). De même, la mobilité ouvre des perspectives au personnel de production (Miller, Dhaliwal, Magas, 1973) ou aux salariés en stagnation sur un plateau de carrière (Kuchta, 1988 ; Near, 1985). Ainsi, nombreuses recherches ont fait état de la réalité des apports de la mobilité interne pour les salariés, en termes d’expériences, de capital humain et de carrière, mais aujourd’hui se pose la question de la durabilité de ces apports. La durabilité des enjeux de la mobilité pour les salariés Les études sur le Marché Interne du Travail, qui ont mis en relation les pratiques de travail flexible et la GRH, ont montré que ce sont les entreprises, qui sont davantage orientées vers les salariés, qui ont tendance à utiliser la mobilité interne et que généralement les formes de travail flexibles s’accompagnent d’effort de formation, de compensation financière et de méthodes de participation. Ce phénomène a débuté à la fin des années 80 aux Etats-Unis et s’est développé pendant les années 90. Aussi la principale limite des études empiriques sur ce thème est leur manque de recul par rapport à des pratiques innovantes (bien que non révolutionnaires d’un point de vue historique). C’est pourquoi des études récentes ont cherché à vérifier le caractère potentiellement durable des modes d’organisation flexible du travail et des avantages en terme de GRH pour les salariés. La dernière étude empirique de Osterman (2000) nous paraît fort intéressante de ce point de vue. Désireux d’actualiser ses données de 1992 (Osterman, 1994), il a mené une nouvelle étude sur des données de 1997 et obtient les résultats suivants. Les nouvelles formes d’organisation du travail flexibles et innovantes, dites « à haute performance » dont font partie les pratiques de mobilité interne, ont continué à se développer dans les années 90 et à 84 produire des résultats, malgré les restructurations. En revanche, les entreprises qui les ont adoptées, ont réduit leurs emplois de managers, ont limité le recours aux travailleurs temporaires et assimilés, et surtout elles ne semblent pas avoir tenu leurs promesses quant au partage des résultats économiques. En effet les résultats montrent une relation positive avec les licenciements et pas de relation avérée avec des gains en terme de rémunération, bien qu’elles continuent à augmenter leurs niveaux d’emplois. Si les conditions défavorables aux salariés sont avérées, la question se pose du caractère durable des gains pour l’entreprise. Le personnel continuera t-il à être aussi productif ou opposera t-il des résistances aux nouvelles formes de travail, s’il ne voit pas quel gain substantiel il peut en retirer en échange ? La question de fond nous paraît être celle du choix de la nature de la relation employeur-employé que fait telle ou telle entreprise en fonction de sa stratégie RH, ses moyens financiers et sa culture organisationnelle. En multipliant les rencontres intra-entreprises, la mobilité favorise les partages de connaissances tacites. Elle est d’un apport important pour la culture d’entreprise (Fiol, 1991). Favoriser la mobilité interne par rapport au recrutement externe, c’est pour les managers faire la preuve d’une confiance investie dans le personnel et d’une priorité accordée à la valorisation du capital humain, dans une optique de long terme, les ressources humaines (RH) ne sont plus une variable d'ajustement en quantité mais une variable d'ajustement en qualité (Bukh, Larsen, Mouritsen, 1999). Ainsi se pose la question du lien entre mobilité interne et nature du contrat moral employeuremployé et par conséquent de la carrière intra-organisationnelle. La mobilité permet-elle d’offrir plus de sécurité en matière d’emploi ? Quelle forme de contrat moral les organisations soucieuses de création de valeur et de développement durable (Mahoney, 2001), adopterontelles ? Une vision à long terme suppose t-elle obligatoirement une logique d'engagement mutuel de développement de compétences et de carrière (Fish & Wood, 1993) ? Si c’est le cas, cet engagement, dans sa forme explicite, peut prévoir que le salarié s'investisse durablement dans l'entreprise, en faisant évoluer ses compétences en fonction des besoins, des mutations technologiques ou des choix stratégiques. Réciproquement, l'entreprise doit édicter des principes moraux à l’intérieur d’une charte de mobilité, qui engagent l’équipe de direction et les managers, mais également des principes de gestion, dans lesquels on trouvera des compensations financières. ) Nous avons vu dans cette première partie consacrée aux enjeux de la mobilité, que ce mode de gestion des RH pouvait permettre aux entreprises, de tirer avantage de leur vaste Marché Interne du Travail pour satisfaire les désirs de mobilité de leurs salariés ou inciter au mouvement, à condition que la FRH puisse rendre ce marché transparent et attrayant par des pratiques cohérentes. Du point de vue stratégique, la mobilité peut apporter de la flexibilité par rapport à l’environnement et elle peut être source de création et de diffusion des savoirs. Du point de vue social et culturel enfin, la mobilité du personnel sur l’ensemble de l’entreprise, accroît les rencontres et les décloisonnements ce qui favorise le partage des valeurs et le renforcement du sentiment d’appartenance. Mais la question se pose du cadre contractuel moral dans lequel les entreprises développeront leur politique de mobilité, les comportements des salariés en dépendront fortement, et par suite, la nature des carrières. 85 2 – LES OBSTACLES A LA MOBILITE INTERNE De nombreuses études, vues précédemment, ont montré les effets positifs de la mobilité pour l’entreprise et le salarié. Plus rares, en revanche, sont celles qui montrent les problèmes posés par la mobilité. Burke et Moore (2000) bien que reconnaissant l’impact positif de la mobilité sur l’expérience professionnelle ont voulu compenser ce déficit dans la littérature en montrant les effets en interne de la mobilité. Ils prennent en compte la perception des salariés non mobiles. En se fondant sur la littérature relative à l’équité organisationnelle et ils proposent un modèle conceptuel. Avant eux, Campion et al. (1994) avaient mis en évidence les coûts de la mobilité : l’alourdissement des charges de travail, la baisse de productivité dénoncée par les salariés non mobiles, la baisse de la motivation et la satisfaction dans les services et unités gagnant et perdant des salariés mobiles. Ces résultats donnent un aperçu des effets négatifs potentiels vécus par les non mobiles dans les unités. Ces études ont été menées dans ou en référence au secteur industriel, plus rares sont les études dans le secteur des services (Robson, Wholey, Barefield, 1996), les fonctions supports dans les entreprises (Cadin, 1985 ; Kelly, Gennard, 2000) ou les organisations institutionnelles (Cable, Murray, 1999) Notre étude empirique tient compte de ce double déficit puisqu’elle concerne la mobilité interne, d’une part dans ses effets internes à l’organisation – les obstacles individuels et les limites organisationnelles – et d’autre part, elle se situe dans un secteur des services publics, le secteur de la santé hospitalière. Le secteur de la santé n’est pas épargné par les mutations du travail, puisque une réflexion a été menée concernant la rationalisation des soins et l’optimisation des ressources à moyens constants, et a abouti à deux grandes réformes : la loi hospitalière du 31 juillet 1991 et l’ordonnance 96-345 du 24 avril 1996. Dans un souci de maîtrise des dépenses, de prise en charge globale du patient, de sécurité et de qualité, les établissements sont contraints de développer de nouvelles modalités d’organisation des soins, pour offrir les meilleurs soins au moindre coût. La gestion de l’emploi à l’hôpital représente donc des enjeux stratégiques nécessitant une remise en question du management des ressources humaines, dont la mobilité constitue un volet essentiel. En effet, cette dernière permet une organisation plus souple, un échange des compétences et une flexibilité des équipes. Cependant les salariés vivent plus ou moins bien cette mobilité, certains y opposent de nombreux freins. D’où l’importance de comprendre quels sont les obstacles à la mobilité du personnel hospitalier ? Les données rapportées dans ce chapitre sous forme de témoignages sont issues d’entretiens ayant été effectués dans un Centre Hospitalier du Sud-Ouest. Cet établissement, suite à des regroupements de services par secteurs d’activités sur un même étage (diabétologie, orthopédie, digestif…), avait décidé de mettre en place une mobilité intersectorielle. Dans cette organisation, la mobilité n’était pas encore complètement effective, mais sérieusement engagée. Les entretiens ont concerné 6 infirmières diplômées d’Etat, 3 infirmières du service de médecine et 3 infirmières du service de chirurgie, toutes employées à temps complet. Les entretiens enregistrés ont été intégralement retranscrits pour constituer un recueil de données de plus de 30 pages. Les mots et expressions ayant du sens au regard de notre problématique ont été rapportés, entre guillemets et italique dans le texte. Au tableau 1, figurent les caractéristiques de l’échantillon utilisé dans ce chapitre. 86 Tableau 1. Présentation de l’échantillon du personnel soignant CHSO (2001) Age Médecine 1 Médecine 2 Médecine 3 Chirurgie 1 Chirurgie 2 Chirurgie 3 35 ans 50 ans 50 ans 23 ans 26 ans 51 ans Ancienneté Ancienneté du dans le service diplôme d’Etat 4 ans 11 ans 8 ans 29 ans 20 ans 31 ans 1 ans 2 ans 2 ans 3 ans 29 ans 29 ans Durée de l’entretien 15’ 25’ 40’ 25’ 30’ 30’ Contenu de la retranscription 4 p. 4 p. 9 p. 4 p. 5 p. 5 p. En outre, depuis 2001, nous avons pu recueillir des informations approfondies sur la mobilité et le personnel mobile sur un échantillon d’entreprises à partir de témoignages, de résumés de pratiques et de rapport d’observations in situ. Ces informations montrent que si les grandes organisations, telles les bureaucraties professionnelles comme les universités8 ou les hôpitaux, cherchent aujourd’hui à développer la mobilité interne pour décloisonner leurs structures et optimiser leurs ressources humaines, les grandes entreprises du secteur privé escomptent, également, tirer avantage de la mobilité, en terme de polyvalence du personnel, de diffusion et d’acquisition de savoirs. Si les premières se heurtent aux cultures de métiers des détenteurs de compétences (enseignants ou soignants) et les secondes se heurtent au manque de motivation de leurs salariés. Aussi bien connaître ce qui peut faire obstacle à la mobilité interne est d’un grand intérêt pour les organisations qu’elles soient publiques ou privées. Bien que les contextes soient tous très particuliers, présenter une typologie des obstacles à la mobilité apporte un éclaircissement. Nous proposons une double approche des limites à la mobilité interne en examinant d’une part, les facteurs psychologiques et culturels du côté des salariés (§2.1.) et d’autre part, les facteurs organisationnels du côté de l’entreprise (§2.2). Une discussion suivra sur les résultats de l’analyse des données (§2.3). Les facteurs psychologiques et culturels Deux catégories de craintes ressortent de nos données, les premières relatives à l’incidence de la mobilité sur les performances professionnelles individuelles et les secondes relatives aux incidences de la mobilité sur la performance des équipes. La peur de perdre de sa légitimité professionnelle dans le changement L’accès à la mobilité demande au candidat un coût d’entrée important. Par nature les services ou les lieux que l’on ne connaît pas, font peur. On prend un risque celui d’être moins performant, de faire une erreur grave, de devoir faire des efforts pour apprendre ou de constater que l’on n’est pas capable. 8 Les projets de Master auront certainement pour conséquence de décloisonner les structures et les savoirs, ainsi que d’inciter à plus de mobilité et de polyvalence sur des pôles régionaux ou autres périmètres de collaboration. 87 ) « …ça me fait peur parce que nous n’avons pas de notion… j’ai peur de ne pas être à la hauteur, de ne pas comprendre plein de choses… », «… il y a des services où je n’aimerais pas du tout aller, je ne connais pas le service S par exemple, là, je ne me sentirais pas capable, je serais affolé… » ) « … je ne connais … ni la pathologie … moins bien que celles que j’ai l’habitude de traiter… » « … des signes d’appel que je ne verrais peut-être pas… par rapport à une pathologie… la personne peut avoir un problème… je ne vais pas réagir assez vite… » Un changement d’emploi occasionne la perte de ses repères, il faut faire le deuil de l’espace que l’on occupait et des personnes avec qui on travaillait. La mobilité peut être déstabilisante pour l’individu. Il craint à chaque changement de ne pouvoir s’adapter à son nouvel emploi et son environnement local ou culturel. ) « … changer de service… il faut se remettre en question à chaque fois, c’est pas évident de changer de service… » « … c’est toujours déstabilisant … le mouvement est perturbant… il faut savoir se repérer… » L’effort est à renouveler à chaque opération, il faut tisser à nouveau des liens, refaire une image ou regagner la confiance et le risque d’y perdre un peu de sa légitimité professionnelle est très présent. Le professionnalisme étant lié à l’expérience, un salarié acquiert par ancienneté dans le poste, de la légitimité professionnelle. Ce présupposé est fondé sur la courbe d’expérience. Les compétences requises pour un emploi s’acquièrent par un processus d’apprentissage qui peut demander du temps. Il en est surtout question pour le savoir-faire qui s’acquiert en pratiquant, en situation, learning by doing. ) « … il peut y avoir une technique particulière que l’on ne peut maîtriser que si on la fait régulièrement… on ne peut pas être efficace partout… » « …pour moi qui débute, c’est pas facile…je n’ai pas tout acquis, je n’ai pas toutes les techniques… il me manque de l’expérience… » Ceci explique que des salariés aient peur de perdre leur expertise en changeant d’emploi ou de service, ayant l’impression de perdre du même coup leur légitimité, auprès des collègues et des pairs. ) « … pour la technique, c’est ce qui me fait surtout peur… parce que je n’y ai jamais travaillé… les soins que je ne connais pas… les drains… ces trucs là m’impressionnent beaucoup… » « … au niveau des compétences… ça reste un problème parce que, un pansement de digestif, n’est pas le même qu’un pansement en urologie…» La peur d’être moins bon en devenant mobile s’explique par le désir de garder une bonne image de soi mais également par la volonté de toujours contribuer efficacement aux résultats collectifs. La peur de nuire à la performance collective Le taylorisme et l’OST ont la vie dure. Dans l’esprit de certaines personnes seule la spécialisation des tâches, évite les pertes de temps et garantit l’efficacité, c’est la logique du 88 « the right man for the right place », où chacun est performant dans son domaine et où tout va bien car le système de coordination est bien huilé. La mobilité ne peut que créer de la désorganisation. ) « des difficultés…il y en a : du côté organisation, les locaux… à chaque fois l’on perd du temps à rechercher où se trouve telle chose… » ; « chercher le matériel… on embête l’autre… on ne travaille pas dans des conditions idéales… on perd du temps…c’est une dépense d’énergie… » ; « …on se trouve en difficulté… on ne sait pas où est rangé le matériel, on n’arrête pas de demander aux autres» Dans un tel cadre de pensée, la mobilité ne peut apporter que désordre, perte de temps et inefficacité, quand ne pèse pas sur la tête du salarié le spectre de l’erreur grave. Dans la culture du personnel soignant, à l’image de la séparation en médecine entre généralistes et spécialistes, la spécialisation est un gage de compétence et de niveau d’expertise. La qualité des soins dépend donc du niveau d’expertise du soignant. Aussi la mobilité, dans un tel contexte, est ressentie comme une nuisance pour la qualité, et donc comme quelque chose de contre nature, ou plutôt anti-culturel. « …si on veut bien le faire, il faut savoir le faire… » « …je pense qu’on ne doit pas pouvoir arriver à faire du bon travail, parce qu’on arrive dans un service où l’on ne connaît pas bien les problèmes, comment on fait… il n’y aurait pas de sécurité, c’est surtout ça. Il y a plein de choses qui pourraient être oubliées, je ne pense pas que la qualité du travail soit bonne. Dans les cabinets de consultants également, la mobilité interne n’est pas la bien venue. En effet, la complexité du dossier d’un client, une bonne connaissance de la culture d’entreprise dans laquelle on intervient, et un interlocuteur unique auquel le client peut accorder sa confiance, sont des qualités de service d’une importance stratégique, qui laissent peu de place à la mobilité. Ainsi les préoccupations de performance et d’efficacité des équipes doivent être prises en considération, compte tenu du contexte, dans le choix du recours à la mobilité interne et dans celui du rythme de la mobilité. Outre les limites d’ordre individuel, des facteurs organisationnels peuvent également faire obstacle à la mobilité interne des salariés. Les facteurs organisationnels Parmi les facteurs organisationnels qui peuvent freiner la mobilité, nous avons retenu d’une part la perception par les salariés des risques encourus de perdre leur emploi – l’insécurité de l’emploi – et d’autre part, les réticences de la hiérarchie directe. Les différences sectorielles et l’insécurité de l’emploi D’après nos données, il existe une distinction à faire entre le secteur privé et le secteur public, ceci peut s’expliquer par le type de contrat qui lie le salarié à son employeur et qui détermine 89 sa prédisposition à être ou non mobile. Robson, Wholey et Barefield (1996) ont bien analysé cette triple relation entre les structures organisationnelles, les institutions sociales et les comportements individuels, montrant que la profession peut avoir un poids sur les acteurs. Dans des organisations institutionnelles comme les hôpitaux, ou encore les universités (Cable & Murray, 1999), la mobilité et la carrière ne seront pas vues de la même façon. Les hôpitaux sont parmi les institutions publiques, les plus durement et de façon vitale, concernées par la qualité de service, en l’occurrence la qualité des soins. Dès le début des années 90, la mobilité est apparue comme le moyen le plus économique d’optimiser les RH et de décloisonnement les structures. La question se pose de savoir si cette économie de moyens peut nuire à la qualité du service ou au contraire l’améliorer. Les témoignages d’agents hospitaliers soignants concernant leurs perceptions et leurs expériences de mobilité nous ont permis de faire la liste des craintes le plus souvent évoquées : la peur de ne pas être à la hauteur, des habitudes et méthodes différents d’un service à l’autre, l’absence de procédures écrites dans les services, le risque d’erreurs et de non-qualité, le côté déstabilisant pour l’individu, les pertes de temps, l’inefficacité et le manque d’apprentissage. Dans le secteur privé, nous avons repéré ce même type de craintes liées aux enjeux de qualité du travail et de performance individuelle, que les salariés expriment ainsi : - la peur de réaliser de moins bonnes performances la crainte de ne pas pouvoir apprendre on sait ce que l’on perd, mais on ne sait pas ce que l’on va (y) gagner la crainte d’une inadaptation à un nouveau contexte local ou culturel la nécessité de faire le deuil de son ancien bureau et de ses anciens collègues la nécessité de se refaire une image, regagner la confiance et reprendre ses marques ailleurs. En outre, dans le secteur privé, nous avons recueilli des craintes liées aux enjeux de carrière et de conservation de son emploi, qui ne semblent pas concerner le personnel de la santé. Les salariés expliquent leurs réticences par : - la peur de prendre une mauvaise orientation, se tromper de voie - le sentiment d’être infidèle à son supérieur ou à son équipe - la peur d’être pénalisé, la peur de représailles - la mobilité perçue comme une porte vers la sortie : peur de perdre son emploi - le sentiment d’être trop vieux On voit dans ces témoignages que dans le secteur privé peuvent s’ajouter aux craintes précédemment énumérées, des craintes liées à l’insécurité de l’emploi. Ces craintes sont justifiées. En effet, les conclusions de l’étude empirique complémentaire de 1997 d’Osterman (2000), que nous avons évoquées dans la première partie de ce chapitre, montrent que dans les années 90 les entreprises de son échantillon avaient continué à adopter des méthodes flexibles de travail, sans que les salariés bénéficient d’une plus grande sécurité de l’emploi ou de compensations financières. Les réticences du supérieur hiérarchique 90 Les organisations qui veulent encourager la mobilité de leurs salariés se heurtent à des obstacles tant de la part des salariés eux-mêmes, qui ont du mal à lâcher prise, que de la part de leurs managers qui éprouvent des réticences à les voir partir. Les premiers freins à la mobilité concernent la hiérarchie. Pour susciter la mobilité du personnel, il paraît nécessaire que les managers soient prêts à libérer leurs collaborateurs désireux de partir (même les meilleurs), que les mouvements s’organisent de manière non conflictuelle entre les managers des services concernés par la mutation, c’est-à-dire qu’il n’y ait pas de divergence d’intérêts entre un service qui perd son collaborateur au profit d’un autre qui le recrute. Il convient notamment de garantir au manager qui libère un membre de son équipe de pouvoir recruter un remplaçant sur le poste, cette pratique ne va pas de soi dans toutes les entreprises. L’hostilité du hiérarchique s’explique par : - un instinct protectionniste, une volonté de garder les meilleurs, une crainte d’hériter d’un mauvais à la place, la jalousie de voir les compétences que l’on lâche profiter à d’autres, le sentiment de trahison de voir partir quelqu’un qu’on a formé à qui on a tout appris, que l’on a vu s’épanouir, le sentiment d’être propriétaire de son collaborateur, la peur de moins bonnes performances dans le service, la peur de perdre un poste et de voir son service « dégraisser », la crainte de déstabilisation et de démotivation de l’équipe, un deuil difficile à faire au niveau de l’équipe et les risques de contagions. Le second groupe de freins concerne l’objectivité et la transparence du système de gestion de la mobilité. Ce qui suppose de permettre à tout salarié l’accès à des informations actualisées et la possibilité de se référer à des règles du jeu, claires et connues de tous. Le troisième groupe de facteurs, directement lié au précédent, concerne la gestion des compétences et des potentialités individuelles de mobilité. En effet, aux choix en termes de valeurs s’ajoutent des options concrètes à prendre en matière de GRH comme, investir dans la formation, réévaluer les définitions d’emplois, évaluer les compétences des individus, savoir gérer les carrières, savoir diffuser les connaissances et capitaliser sur les expériences. Cet ensemble d’éléments montre combien la motivation du salarié à être mobile est contingente de son environnement de travail. Discussion et synthèse sur les obstacles à la mobilité interne Un obstacle essentiel à la mobilité est constitué des croyances partagées et des systèmes de conventions. Dans certains établissements ou certains services, tout se passe comme si la mobilité n’était pas conventionnelle et que personne ne voulait prendre le risque de jouer le jeu de peur que les autres ne le jouent pas. De même, dans des organisations où l’ancienneté procure une légitimité et une expertise, la mobilité perçue comme anti-conventionnelle sera difficile à envisager. Les habitudes, le mimétisme et les comportements conventionnels peuvent ainsi faire obstacle à la mobilité interne. La mobilité souffre d’images d’Epinal qui ont la vie dure. Comme par exemple : « il n’y a que les mauvais qui changent d’employeurs » ; « c’est les plus gênés qui s’en vont », ou encore 91 « aller voir ailleurs, donne l’impression d’être infidèle à ses supérieurs hiérarchiques ». Ces croyances participent aux représentations sociales des acteurs dans les organisations. Anderson, Milkovich et Tsui, (1981) dans leur modèle sur la mobilité intra-organisationnelle, proposaient trois groupes de facteurs explicatifs, les caractéristiques de l’environnement, de l’organisation et de la main d’œuvre. Pour ce dernier groupe, ils prenaient en compte des indicateurs objectifs : les compétences, les étapes de la carrière, et des caractéristiques démographiques. Cependant, par nos témoignages nous faisons ressortir d’autres facteurs internes aux individus et d’ordre plus psychologique comme la relation des individus avec leur travail, la vision qu’ils ont de leur métier et de la façon de l’exercer qui s’apparente à la culture professionnelle et aux valeurs liées au métier. Ces éléments micro culturels semblent avoir une influence sur la mobilité. Nous avons également trouvé dans nos données des freins au niveau interpersonnel, dans la relation de l’individu avec ses pairs et de l’individu avec son supérieur hiérarchique, au niveau de l’équipe et enfin à celui de l’entreprise en tant que collectif et en tant qu’employeur. Ces obstacles tiennent nous semble t-il à une façon traditionnelle de concevoir la relation employeur-employé. Arthur et Rousseau (1996) notamment, ont montré par leur « lexique sur la carrière au 21ème siècle » que, si les termes utilisés pour caractériser la relation employeur-employé n’avaient pas changé, on parle toujours de la carrière, de l’organisation ou de l’emploi, la connotation des termes, elle, avait connu de grandes transformations. Concernant la notion de frontière de l’organisation, dans une conception traditionnelle, elle évoque une limite entre un environnement familier d’un côté et un environnement hostile de l’autre ; alors qu’aujourd’hui, selon eux, les frontières sont faites pour être « traversées dans les développements de carrière et dans l’appréhension de la complexité. Les salariés doivent regarder bien au delà des limites de leur emploi, pour comprendre la réalité de leur entreprise, plutôt que de vouer un attachement paternaliste à un patron (rather than deferring to a patronizing boss). De même l’organisation, dans la conception traditionnelle, pouvait évoquer une entité légale définissant des relations d’autorité et des droits de propriété ; aujourd’hui, elle peut avoir une toute autre connotation, évoquant le fait d’être membre d’un même réseau, partie prenante d’une chaîne de valeur, dans une conception plus dynamique, plus plastique aussi. Dans la même veine, l’emploi peut être vu (sans frontière) comme un état temporaire, ou la manifestation présente d’une employabilité de long terme. ) Nous avons vu dans cette seconde partie du chapitre que des facteurs psychologiques pouvaient freiner la mobilité, comme la peur de porter atteinte à son niveau d’expertise et à l’image de soi ; comme la peur de nuire à la performance de l’équipe, qui peut entraîner des sanctions sociales comme la marginalisation par les collègues ou les pairs. Du côté de l’organisation, il y a aussi des limites, l’insécurité ambiante que peut faire peser la hiérarchie sur le personnel ou les réticences de la hiérarchie directe. Toutes ces limites tiennent, nous semble t-il, à une approche traditionnelle de l’emploi et de la relation employeur-employé, ainsi qu’à une vision statique de l’organisation et passéiste de la notion de carrière. Peut-être cette conclusion est surtout vraie dans des organisations institutionnelles et des bureaucraties professionnelles comme les hôpitaux, et demanderait à être validée auprès d’un échantillon plus diversifié d’organisations. 92 Conclusion L’objet de ce chapitre était d’apporter des éclaircissements sur les enjeux et les limites de la mobilité intra-organisationnelle. Ces enjeux et limites sont essentiels pour comprendre dans quelle mesure la mobilité interne peut être source de création de valeur pour l’entreprise, à la recherche d’une optimisation de ses ressources, et le salarié en quête d’évolution personnelle et professionnelle. A notre sens, la réponse est controversée, c’est pourquoi nous avons tenu dans un premier temps à montrer les enjeux possibles en terme stratégique, structurel et culturel et dans un second temps à sensibiliser le lecteur aux difficultés, psychologiques et organisationnelles, qui peuvent entraver une politique de mobilité. Cette analyse complète d’autres recherches récentes sur les effets de la mobilité (Swaen & Kant, 2002). Ainsi, la réponse à la question n’est pas binaire mais contingente des métiers, des personnes et des choix des organisations elles-mêmes en terme de GRH. En terme de flux, la mobilité permet de nourrir les capacités d’adaptation et les potentiels d’ajustements. En terme de stock, elle permet d’accumuler des connaissances, des savoir-faire et des expériences variées qui peuvent améliorer l’employabilité. Mais elle comporte des risques liés à la nonspécialisation et la dilution des savoirs. En outre, elle engendre des coûts, des coûts de formation et d’information, des coûts de désorganisation puisque toutes les personnes ne sont pas à leur rendement optimal en permanence et des coûts de coordination puisque la mobilité doit être anticipée pour correspondre aux attentes. Pour que la mobilité soit créatrice de valeur nette, il faut que les espérances de gains soient supérieures aux risques et aux coûts, pour chacune des parties prenantes. A notre sens, c’est précisément en augmentant les espérances de gains et en diminuant les coûts que la fonction RH peut apporter une contribution majeure. Elle peut accroître les gains de temps en identifiant clairement les compétences nécessaires, en définissant des parcours professionnels et en facilitant l’entrée dans les emplois par des retours d’expériences. Elle peut éviter le risque de déqualification des salariés en étudiant les rythmes et les espaces de mobilité appropriés à chaque type d’emploi et à chaque profil de personne. Elle peut limiter les freins psychologiques en faisant évoluer la culture et les conventions internes. Elle peut réduire les coûts de perte de savoir-faire en utilisant la mobilité comme un moyen de transmission des informations et des savoirs (Nonaka et alii, 1998 ; Nonaka et alii, 1996). Dans une stratégie gagnant-gagnant, la mobilité peut être vue comme un processus de ré appropriation des connaissances par l’entreprise (Cooper, 2001) et de sa carrière par le salarié. En résumé, en considérant la mobilité comme un mode de management des connaissances et non uniquement comme une variable de flexibilité (Koste & Malhotra, 1999), la FRH peut contribuer à placer les ressources humaines au cœur des avantages concurrentiels. 93 BIBLIOGRAPHIE Abraham, J. , (2002), « Gestion de la mobilité interne et création de valeur » - XIIIe Congrès annuel de l'AGRH, Nantes, 21-23 Novembre, GRH et Stratégie, Tome 1/3, p.9. Abraham, J., (2001), « Mobilité interne et polyvalence : efficience et création de ressources », Cahiers du CERMAT-UPRES, IAE de Tours, vol 14, N°88. Almeida, P., Kogut, B., (1999), “Localization of Knowledge and the Mobility of Engineers in Regional Networks”, Management Science, July, vol.45-7, pp.905-917. Anderson, J.C., Milkovich, G.T., Tsui, A. (1981), “A model of intra-organizational mobility”, Academy of Management Review, vol. 6-4, 529-538. Argote, L., Ingram P. 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