part 1 - Cours/Cas cliniques en Ophtalmologie

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part 1 - Cours/Cas cliniques en Ophtalmologie
21-200-D-20
Atteintes herpétiques du segment antérieur de l’œil :
aspects épidémiologiques, cliniques et diagnostiques
Herpetic disease of the anterior segment of the eye: epidemiological,
clinical and diagnostic aspects
M. Labetoulle, A. Rousseau, T. Bourcier
À Joseph Colin, In Memoriam.
Mots-clés :
Herpès
HSV
Conjonctivite
Kératite
Uvéite
Le virus herpès simplex (HSV) de type 1 est largement présent dans la population générale, puisque plus de
90 % des sujets ayant dépassé la cinquantaine sont infectés de façon latente dans leurs ganglions trigéminés.
Le risque de développer un épisode d’herpès oculaire est de l’ordre de 1 %. Après ce premier épisode, le principal
risque est la récidive, évalué à plus de 50 % pour le reste de la vie. Le virus HSV peut infecter toutes les tuniques
du segment antérieur de l’œil, et donc être à l’origine de conjonctivites, de sclérites, de kératites, et d’uvéite
antérieure. La gravité de ces atteintes est éminemment variable selon le site et le patient. Cette variabilité
traduit d’ailleurs la dualité des conséquences de la réponse immunitaire à l’infection virale, qui peut être à la
fois salutaire et délétère, car la réaction inflammatoire permet de mieux maîtriser le virus mais peut aussi altérer
les composants de la transparence de l’œil. Cette dualité est aussi à la base de la sémiologie des lésions. La
connaissance précise des aspects épidémiologiques et cliniques des atteintes herpétiques du segment antérieur
de l’œil permet au clinicien d’adapter sa prise en charge thérapeutique.
© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Keywords:
Herpes
HSV
Conjunctivitis
Keratitis
Uveitis
Herpes simplex virus (HSV) type 1 is widely distributed in the general population, with more than 90 % of
subjects in the 5th decade or older being latently infected in their trigeminal ganglia. The risk of developing
an episode of ocular herpes is about 1% for a human’s life. After this first episode, the main risk is recurrence,
valued at more than 50% for the rest of life. The HSV can infect all layers of the anterior segment of the eye,
and thus can induce conjunctivitis, scleritis, keratitis, and anterior uveitis. The severity of these attacks is highly
variable depending on the site and the patient. This variability also reflects the duality of the consequences
of the immune response to viral infection, which can be both beneficial and harmful, because inflammation
can alter the components of the transparency of the eye. Accurate knowledge of epidemiological and clinical
aspects of herpetic disease of the anterior segment of the eye allows the clinician to adapt therapeutics for
each patient.
© 2014 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Plan
■
Introduction
1
■
Pathogénie des atteintes herpétiques du segment antérieur
de l’œil
1
■
Aspects cliniques et épidémiologiques des blépharites
herpétiques
2
■
Aspects cliniques et épidémiologiques des conjonctivites
et sclérites herpétiques
2
Aspects cliniques et épidémiologiques des kératites
herpétiques
Épidémiologie générale
Facteurs de réactivation
Formes cliniques de kératite herpétique
2
2
3
3
Aspects cliniques et épidémiologiques des uvéites antérieures
herpétiques
Épidémiologie
Formes cliniques
Principaux diagnostics différentiels des uvéites antérieures à HSV-1
6
6
6
7
Outils du diagnostic étiologique
Diagnostic biologique des kératites herpétiques
Diagnostic biologique des uvéites herpétiques
7
7
7
■
■
■
Introduction
La prévalence de l’herpès oculaire a été estimée à 150 pour
100 000 habitants aux États-Unis dans une étude réalisée entre
les années 1950 et 1980. Appliquée à la France, cela porte à environ 90 000 le nombre de sujets ayant présenté une manifestation
d’herpès oculaire au moins une fois dans leur vie [1] . L’analyse de la
EMC - Ophtalmologie
Volume 11 > n◦ 1 > janvier 2014
http://dx.doi.org/10.1016/S0246-0343(13)60975-2
même base de données sur 20 ans de plus a montré que le risque
de développer un herpès oculaire est de l’ordre de 1 % au cours
d’une vie humaine moyenne [2] .
Le virus herpès simplex (HSV) peut atteindre tous les tissus du segment antérieur de l’œil, et générer des blépharites,
conjonctivites, kératites et uvéites antérieures. Ces quatre cadres
nosologiques recouvrent en fait un nombre important de tableaux
cliniques dont l’analyse sémiologique est la clé de la qualité de la
prise en charge thérapeutique.
Pathogénie des atteintes
herpétiques du segment antérieur
de l’œil
Les deux types de HSV (respectivement HSV-1 et HSV-2) peuvent
être à l’origine d’atteintes oculaires, mais les données épidémiologiques sont différentes.
Les atteintes oculaires à HSV-2 sont très rares, et se rencontrent
dans la presque totalité des cas dans les suites d’une contamination maternofœtale [3, 4] . Il peut s’agir d’atteintes antérieures et/ou
de rétinites herpétiques, associées ou non à une méningoencéphalite [5, 6] . Les rétinites à HSV-2 peuvent aussi se rencontrer chez des
adolescents ou des jeunes adultes [7] , probablement par réactivation de lésions acquises lors d’une contamination maternofœtale.
Nous nous focalisons dans cette revue sur les atteintes du segment antérieur de l’œil liées au HSV-1, de loin les plus fréquentes.
La contamination par HSV-1 a lieu pendant l’enfance ou les premières années de la vie adulte par l’intermédiaire de la salive
et/ou des gouttelettes de pflügge. La primo-infection par HSV-1
est asymptomatique dans plus de 95 % et les formes symptomatiques atteignent le plus souvent la sphère oropharyngée. Les
primo-infections oculaires symptomatiques sont encore plus
1
21-200-D-20 Atteintes herpétiques du segment antérieur de l’œil : aspects épidémiologiques, cliniques et diagnostiques
rares [8] . Après réplication dans l’épithélium des voies oropharyngées, le virus pénètre dans les terminaisons nerveuses pour se
propager dans le système nerveux où il entre en latence sans
induire de signes cliniques, sauf exception. Le principal site
de latence de HSV-1 est le ganglion trigéminé de Gasser, relai
des voies nerveuses sensitives de la face [9–11] . La prévalence de
l’infection latente par le HSV-1 dans le système nerveux augmente avec l’âge pour atteindre plus de 90 % chez les sujets de
plus de 60 ans [1, 4, 12] . Sous l’influence d’un stimulus (par exemple
lésion neuronale, baisse locale de l’immunité, inflammation, etc.),
le cycle réplicatif peut reprendre. Les capsides sont alors transportées le long des terminaisons nerveuses pour atteindre les
tissus périphériques, où le virus se réplique largement : c’est la
phase de récurrence clinique. Le HSV-1 se réactive surtout dans
les branches V2 ou V3 du ganglion trigéminé, ce qui explique la
fréquence de 15 % de l’herpès labial dans la population générale.
Chez 0,15 % des patients infectés, la réactivation a lieu dans la
partie V1 du ganglion trigéminé, et devient responsable d’herpès
oculaire [8] .
Pour comprendre l’inégalité des personnes devant l’infection
herpétique, il convient de se rappeler que les lésions cliniques
herpétiques sont la conséquence des rôles délétères de la réplication virale dans les tissus et de la réponse immunitaire. En effet,
cette dernière vise à débarrasser l’organisme de l’agent infectieux,
fut-ce au prix de lésions tissulaires, dont les conséquences fonctionnelles peuvent être graves lorsqu’elles concernent des tissus
nobles comme la cornée ou la rétine. Les études animales ont
clairement montré que le terrain génétique de l’hôte et celui de la
souche virale font tous deux varier la gravité des atteintes herpétiques [13] . Les formes graves d’herpès oculaires surviennent donc
si la souche d’HSV-1 est très agressive (et/ou très récidivante), chez
des patients dont le système immunitaire est trop lent pour maîtriser rapidement les réactivations virales débutantes, ou à l’inverse si
la réponse immunitaire est trop agressive, aboutissant à des lésions
tissulaires majeures.
Aspects cliniques
et épidémiologiques
des blépharites herpétiques
Les blépharites herpétiques typiques associent des vésicules au
sein d’une plage érythémateuse. Les vésicules se rompent rapidement et laissent place à des croûtes qui disparaissent sans laisser
de cicatrice.
Les blépharites peuvent être isolées, mais sont le plus souvent
associées à une conjonctivite, et/ou une kératite. C’est en particulier le cas de l’herpès oculaire chez l’enfant où ces atteintes
triples sont fréquentes [14–16] . Dans la série de Darougar et al., 38 %
des primomanifestations herpétiques présentaient une blépharite,
souvent associée à une kératite et 15 % étaient atteints de blépharoconjonctivite sans kératite [17] . En revanche, dans l’étude observationnelle sur la population de Rochester (Minnesota), menée
entre 1950 et 1982, 21 % des herpès oculaires étaient palpébraux
purs [1] . Plus rarement, les blépharites herpétiques peuvent aussi
entrer dans le cadre d’un syndrome de Kaposi–Juliusberg. Cette
éruption varicelliforme (généralisée à tout ou partie du corps) survient typiquement chez le patient atopique [18] et peut récidiver.
Aspects cliniques
et épidémiologiques
des conjonctivites et sclérites
herpétiques
Les conjonctivites herpétiques sont souvent méconnues
lorsqu’elles ne sont pas associées à une atteinte typique de
l’herpès, comme une kératite dendritique. En effet, l’aspect peut
être celui d’une conjonctivite banale, identique à celui observé
dans le cadre des autres viroses, des chlamydioses, voire de certaines formes d’allergie. La bilatéralité n’exclut pas le diagnostic
2
Figure 1. Ulcération géographique dans le cadre d’une conjonctivite
herpétique présumée, chez un patient présentant une histoire d’herpès
récidivant.
d’herpès oculaire, puisque c’est le cas de 2 à 12 % de formes
récurrentes de l’adulte [8, 19, 20] , voire même largement plus dans
le cadre d’une primo-infection (fébricule souvent associée) et/ou
d’une atteinte herpétique chez l’enfant [16, 21–23] . Les arguments
pour une atteinte herpétique sont la présence d’une adénopathie prétragienne (également possible avec les autres viroses et
les chlamydioses) et la présence d’ulcérations conjonctivales dendritiques, voire géographiques (Fig. 1) [21] . En cas de doute sur
une éventuelle origine herpétique, il est préférable d’éviter les
corticoïdes [14] . Le diagnostic peut être étayé par un prélèvement
de larmes (avec analyse en polymerase chain reaction [PCR]) [24, 25] .
Dans les rares cas de primo-infection herpétique, une augmentation des taux sériques d’anticorps antiherpétiques peut être
observée, mais elle est aussi retrouvée dans 5 % des récurrences [26] .
La fréquence réelle des conjonctivites herpétiques est mal
connue, et probablement sous-évaluée. Selon Liesegang, elles
représenteraient près de 20 % des conjonctivites aiguës d’aspect
non bactérien [27] , et constitueraient la forme clinique la plus fréquente de récurrence herpétique oculaire [28] . Parmi les 108 cas
de primomanifestation herpétique recensés par Darougar et al.,
une conjonctivite était présente dans 85 % des cas, mais elle était
isolée dans seulement 7 % des cas, et associée à une blépharite
dans 15 % des cas. Pour les autres patients, elle entrait dans le
cadre d’une kératoconjonctivite [17] . L’étude observationnelle sur
la population de Rochester (Minnesota) retrouvait une association
très fréquente entre conjonctivite et blépharite, forme clinique
mixte qui représentait 54 % des primomanifestations herpétiques
et 31 % des récurrences [1] .
Il faut aussi mentionner la possibilité de sclérites liées à HSV,
nettement plus rares que celles liées au virus de la varicelle et du
zona (VZV). Dans deux séries de 9 et 35 cas, l’équipe de Foster
a montré qu’il s’agit essentiellement de formes antérieures, diffuses ou nodulaires, plus rarement nécrosantes. L’atteinte était très
majoritairement unilatérale, mais les deux yeux sont concernés
dans 20 % des cas. La sclérite est due à une réaction granulomateuse. L’amélioration clinique sous antiviraux est la règle, mais
elle peut être longue [29, 30] .
Aspects cliniques
et épidémiologiques des kératites
herpétiques
Épidémiologie générale
Les estimations de l’incidence des kératites varient entre 12
et 31,5 cas annuels pour 100 000 habitants [1, 2, 31] , soit environ
18 000 épisodes d’herpès cornéen par an sur le territoire français.
EMC - Ophtalmologie
Atteintes herpétiques du segment antérieur de l’œil : aspects épidémiologiques, cliniques et diagnostiques 21-200-D-20
Le risque de récidive après un premier épisode est estimé à 10 %
à un an, 20 à 30 % à deux ans, 40 % à cinq ans et 60 à 70 % à
20 ans [8, 32–35] . On peut donc estimer qu’un patient ayant développé une kératite herpétique a près d’une chance sur deux d’être
à nouveau touché une fois dans sa vie. De plus, la fréquence des
récidives augmente avec le nombre de poussées, au moins pour
les cinq premiers épisodes [2] . Ainsi, un patient ayant subi deux
épisodes en moins d’un an présente un risque de 32 % de subir un
troisième épisode herpétique dans les 12 mois qui suivent [36] .
Les études sur les facteurs de risque naturels de l’herpès cornéen n’ont pas mis en évidence de prédominance sexuelle nette,
ni de modification de l’incidence en fonction des saisons [19] . Il
est en revanche clair que des facteurs génétiques sont impliqués,
mais ils ne sont pas encore clairement identifiés. La propension à
développer une réponse immunitaire forte, voire exacerbée, pourrait favoriser le développement de kératites stromales sévères. Des
perturbations de la réponse à l’interféron ou d’autres voies de
régulation ont été identifiées dans la sensibilité aux encéphalites
herpétiques et aux boutons de fièvre [37, 38] . À l’inverse, le fond
génétique des souches virales est aussi clairement déterminant
dans la gravité des lésions [19, 39] .
Malgré l’utilisation d’antiviraux biologiquement actifs et peu
toxiques depuis plus de 30 ans, l’herpès cornéen demeure une
maladie au pronostic redoutable. Le risque d’acuité visuelle inférieure à moins de 1/10 est de 7 % à dix ans et 11 % à 20 ans [2] . Ce
risque est d’autant plus grand que l’atteinte est profonde : 58 %
des kératites avec endothélite entraînent une acuité visuelle inférieure à 5/10 dans les cinq années qui suivent [40] . Il est aussi plus
grand si les patients sont mal ou sous-traités : d’après l’étude de
Rochester, 85 % des patients herpétiques avec une acuité visuelle
inférieure à 1/10 n’avaient pas reçu de traitement prophylactique
récent et 65 % n’en avaient jamais pris [2] .
Facteurs de réactivation
On distingue les facteurs qui favorisent directement la réplication du virus, et ceux qui diminuent la qualité de la réaction
immunitaire contre la réactivation virale.
Dans la première catégorie, on retrouve des agents chimiques comme les corticoïdes, les prostaglandines et même les
alpha-adrénergiques qui sont tous des activateurs directs de la
réplication virale [13, 41] , et des facteurs physiques qui stimulent
ou lèsent les nerfs cornéens (actes chirurgicaux, ultraviolets, etc.).
Ainsi, toutes les chirurgies du segment antérieur de l’œil, a fortiori celles combinant des aspects mécaniques et l’utilisation
d’ultraviolets, doivent être considérées comme une situation à
risque.
La seconde catégorie regroupe toutes les situations pathologiques avec immunodépression modérée (périodes menstruelles,
infection intercurrente, maladie cancéreuse, fièvre, etc.), et bien
sûr les traitements immunomodulateurs, dont les corticoïdes en
première ligne. À titre d’exemple, de nombreux cas de récurrence herpétique ont été rapportés après injection intravitréenne
de corticoïdes retards [42, 43] . Cependant, le risque relatif réel de
récurrence herpétique dans une situation donnée est difficile à
calculer [44] . Il faut enfin noter que trois populations sont particulièrement à risque. Les enfants sont rarement atteints, mais
développent volontiers des formes plus graves, plus souvent bilatérales et plus récidivantes que celles de l’adulte [15, 16, 22, 23, 45–47] . De
même, les atopiques ne semblent pas être plus souvent atteints
que la population générale, mais l’herpès oculaire prend chez
eux une tournure plus sévère, avec notamment une forte fréquence des formes nécrotiques de kératites stromales [48–50] . Enfin,
les patients diabétiques semblent avoir une incidence légèrement
plus grande de primomanifestations et des récurrences que la
population générale [51] .
Formes cliniques de kératite herpétique
Les kératites herpétiques peuvent être épithéliales, stromales,
endothéliales ou encore combinées entre ces trois formes (les
formes métaherpétiques ne sont pas traitées dans cette revue, mais
leurs aspects cliniques et thérapeutiques peuvent être consultés
EMC - Ophtalmologie
Figure 2. Kératite dendritique, sur un greffon cornéen posé dans le
cadre d’une maladie herpétique oculaire récidivante.
dans une revue de littérature sur les complications du zona [52] ).
Une des caractéristiques cliniques majeures de l’herpès cornéen
est l’unilatéralité, puisque moins de 5 % des patients sont touchés
de façon bilatérale [19] . Par ailleurs, ces kératites sont typiquement
associées à une perte globale de la sensibilité cornéenne, même
lorsque la lésion ne touche qu’une partie de la cornée, ce qui n’est
pas le cas des autres types de kératite infectieuse [14] .
Kératites épithéliales
Les signes cliniques sont la conséquence directe, et quasi exclusive, de la réplication du virus dans les cellules épithéliales. C’est
d’ailleurs une des raisons de risque d’aggravation majeure en cas
d’instillation de corticoïdes.
Les signes fonctionnels associent souvent une douleur oculaire
marquée avec photophobie et larmoiement, un cercle périkératique, et une baisse d’acuité visuelle, surtout si la lésion déborde
sur l’axe visuel.
Kératites ponctuées superficielles localisées
Elles s’observent au début de l’infection. Elles sont caractérisées par une prise ponctuée de la fluorescéine, avec en outre un
soulèvement par œdème épithélial dû à l’effet cytopathogène du
virus [21] .
Kératites dendritiques (Fig. 2)
Elles sont la forme la plus évocatrice d’emblée d’une origine
herpétique. Elles comptent pour 50 % des herpès cornéens cliniquement patents [31] . La dendrite résulte initialement de la
coalescence de lésions vésiculaires [53] , puis s’agrandit par propagation de cellule à cellule de façon fractale. L’extrémité des branches
est souvent marquée par des renflements en « bulbe » [9] , qui les
différencient des dendrites zostériennes [14, 54] .
L’aspect en « arbre mort » de la dendrite est encore plus typique
après instillation de fluorescéine. Dans un premier temps, on
constate que le colorant se concentre dans le fond de l’ulcère,
repoussé à distance des bords par l’épithélium gonflé (effet cytopathogène sur les bords de la dendrite). Très rapidement, l’aspect
dendritique disparaît en raison de la diffusion de la fluorescéine
au-delà des limites du l’ulcère, qui témoigne des altérations de
la membrane basale. Cette évolution de la coloration à la fluorescéine permet de faire la différence avec les pseudodendrites
(kératites toxiques ou neurotrophiques), dans lesquelles le colorant reste au fond de la lésion, sans diffusion [21] . Lors de la phase
de cicatrisation d’une dendrite herpétique, le phénomène de diffusion de la fluorescéine réduit pour disparaître complètement. Il
persiste alors pendant quelques temps des anomalies épithéliales,
avec des cellules encore gonflées, qui repoussent le colorant en
regard de la dendrite initiale [14, 55] .
3
21-200-D-20 Atteintes herpétiques du segment antérieur de l’œil : aspects épidémiologiques, cliniques et diagnostiques
Figure 3. Kératite géographique, chez un patient avec antécédent
d’herpès et traité par corticoïdes par voie générale.
Kératites géographiques
Elles sont caractérisées par un vaste placard de perte épithéliale (Fig. 3). Elles peuvent être la conséquence d’un traitement
corticoïde inapproprié, ayant facilité la réplication virale à partir
d’une dendrite, voire d’une simple lésion ponctuée non identifiée comme herpétique. Les kératites peuvent aussi prendre cette
forme géographique de façon spontanée, éventualité pouvant
atteindre 22 % des cas [32] . Cette forme sévère de kératite épithéliale comptait pour 10 % des herpès cornéens dans l’étude
épidémiologique française [31] . La prise en charge est calquée sur
celle des kératites dendritiques, mais la guérison est souvent plus
lente, et la surveillance doit donc être plus rigoureuse.
Kératites marginales
Elles sont une forme rare et souvent méconnue de kératite herpétique. Elles associent une ulcération périlimbique concentrique
au limbe, un infiltrat stromal adjacent avec des néovaisseaux
cornéens et une inflammation de la conjonctive limbique en
regard [9, 14] . Ces formes marginales sont souvent plus douloureuses que les autres types de kératite épithéliale, et répondent
moins facilement à un simple traitement antiviral [32, 56, 57] . Il s’agit
en fait déjà d’une forme mixte, épithéliale et stromale, dont le
traitement par antiviraux seuls ne permet pas la guérison dans
la plupart des cas. L’ajout de corticoïdes est souvent nécessaire
pour réduire l’inflammation stromale périlimbique [14] . Les ulcérations marginales herpétiques peuvent être confondues avec
d’autres causes d’atteintes périphériques inflammatoires de la cornée, notamment les infections staphylococciques [14, 55] ou celles
liées à une rosacée oculaire. Ces dernières sont associées à des
lésions de blépharite chronique et caractérisées par une extension
circonférentielle alors qu’elle est plutôt centripète dans l’herpès.
Kératites en « archipel »
Décrites pour la première fois par une équipe française [58] , elles
apparaissent elles aussi comme une forme mixte, dont le début est
plutôt épithélial et paralimbique, souvent moins douloureuse que
les formes marginales pures décrites ci-dessus. Elles progressent
ensuite de façon centripète, mais en laissant des zones de cornée saines, d’où l’aspect en « archipel ». On retrouve à terme
des opacités stromales antérieures, modérément opaques, plutôt
rondes ou ovales, de disposition radiaire. Le traitement repose sur
l’association d’antiviraux au long cours et de corticoïdes en cures
courtes, pour limiter l’importance des opacités.
Les principaux diagnostics différentiels des kératites herpétiques épithéliales sont résumés dans le Tableau 1.
Kératites stromales
Elles sont souvent le témoin d’une maladie évoluée et
récurrente. En effet, elles ne comptent que pour 2 % des premières manifestations d’herpès, mais près de la moitié des
4
Figure 4. Kératite stromale récidivante sous une forme nécrotique, chez
un patient ayant déjà présenté un épisode similaire plusieurs mois auparavant.
récurrences [1, 17, 33, 59, 60] . Les kératites stromales peuvent être divisées en formes nécrotiques et non nécrotiques. Les premières
sont caractérisées par une réplication virale majeure. Il s’agit
d’une urgence que toute corticothérapie pourrait aggraver. À
l’inverse, la production virale est très modérée dans les formes
non nécrotiques, et le tableau clinique est surtout dû à la
réaction immunitaire antivirale [9, 11, 14, 20, 55, 57, 61, 62] . Comme souvent en médecine, cette classification dichotomique ne rend pas
compte de toutes les situations, et il existe parfois des formes
mixtes. Dans ces cas, la conduite thérapeutique est alignée sur
la part nécrotique.
Kératites stromales nécrosantes
Elles sont de loin la forme la plus rare des kératites stromales
(Fig. 4). Leur pronostic est cependant redoutable, surtout si la mise
en route du traitement est retardée. La nécrose stromale se reconnaît à l’existence d’un infiltrat blanc jaunâtre, très dense [9, 21] ,
souvent associé à une inflammation intraoculaire, avec précipités
rétrocornéens, voire hypertonie oculaire [55] . La nécrose stromale
peut rapidement évoluer vers une descémétocèle puis une perforation cornéenne. Si un traitement antiviral efficace est instauré
à temps, éventuellement en association à une greffe de membrane amniotique, l’amincissement stromal peut régresser, mais
au prix d’une opacité séquellaire, avec souvent des néovaisseaux
nourriciers.
Kératites stromales non nécrosantes
Elles font intervenir des mécanismes immunitaires, de type
réaction antigène–anticorps–complément (AAC) [63] , comme en
témoigne parfois l’anneau immunitaire, similaire à un anneau de
Wessely. Une réaction lymphocytaire dirigée contre les cellules
infectées entre aussi en jeu [11] , faisant finalement souffrir les tissus
cornéens de façon persistante [55] .
Le tableau est moins bruyant que dans les kératites épithéliales
et les formes nécrotiques de kératites stromales, puisque la douleur
et la perte visuelle sont souvent modérées. Selon les cas, l’infiltrat
peut être diffus ou focal, unique ou multiple, plus ou moins profond et plus ou moins dense, et même parfois de localisation
multiple (Fig. 5). Il n’y a cependant pas de zone très opaque, ni
de nécrose stromale. L’évolution spontanée se fait vers le développement d’un appel néovasculaire (surtout dans les formes
périphériques) puis d’une diminution lente de l’inflammation.
Mais les néovaisseaux et un certain niveau d’opacité séquellaire
grèvent le pronostic visuel. Une taie peut persister finalement,
avec parfois en négatif les traces des néovaisseaux déshabités.
Lorsque ces derniers restent actifs, ils compromettent le pronostic
d’une éventuelle greffe de cornée.
Les principaux diagnostics différentiels des kératites herpétiques stromales sont résumés dans le Tableau 2.
EMC - Ophtalmologie
Atteintes herpétiques du segment antérieur de l’œil : aspects épidémiologiques, cliniques et diagnostiques 21-200-D-20
Tableau 1.
Principaux diagnostics différentiels des kératites herpétiques épithéliales.
Étiologie
Formes cliniques possibles
Principales caractéristiques
Virus
varicelle–zona
Dendrite (sans bulbe, typiquement),
géographique
Souvent au décours d’un zona ou d’une varicelle, mais
formes isolées possibles
Amibes
Kératite ponctuée apparemment banale le
plus souvent, mais dendrites possibles,
parfois multiples, lésions géographiques
Douleurs majeures, antécédents de port de lentilles (ou de
traumatisme)
Champignons
Lésions épithéliales rarement isolées,
peudodendrites possibles
Caractère indolent/chronique, antécédent de traumatisme
Cause toxique
Kératite ponctuée et pseudodendrites
souvent associées
Prise chronique de collyres potentiellement toxiques
(conservateurs surtout, antiviraux, corticoïdes, AINS,
antibactériens)
Kératoconjonctivites
sèches
Pseudodendrites récidivantes
Contexte de sécheresse oculaire sévère, marquage
conjonctival typique à la fluorescéine, voire filaments
Kératalgie
récidivante
Ulcérations épithéliales récidivantes, en
général de petite taille (ronde ou stellaire)
Chercher une dystrophie de Cogan, sinon un antécédent
de traumatisme cornéen
Épithéliopathie
superficielle
hypertrophique
dendriforme
postkératoplastie
Plaques épithéliales hypertrophiques grises
ou blanches, dendritiques, à la surface du
greffon, dans les suites opératoires d’une
kératoplastie
Conséquence de la combinaison de l’irrégularité de la
surface du greffon, de l’insuffisance lacrymale, de la
toxicité médicamenteuse et de l’inflammation du bord
palpébral
Kératite de
Thygeson
Ponctuations intraépithéliales bilatérales,
atteignant le centre de la cornée, sans
conjonctivite associée
Bilatéralité fréquente
Très corticosensible mais aussi rapidement
corticodépendante
Kératites à virus
d’Epstein-Barr
Kératite avec microdendrites stellaires et
conjonctivite folliculaire unilatérale
Dans un contexte de mononucléose infectieuse (fièvre,
adénopathies, pharyngite et splénomégalie, etc.)
Tyrosinémie de
type II
(syndrome de
Richner–Hanhart)
Ulcères pseudodendritiques ne prenant pas
la fluorescéine, plus rarement opacification
cornéenne avec néovascularisation dans les
formes chroniques
Dans le cadre d’un syndrome oculocutané, avec kératose
palmoplantaire
Taux élevés de tyrosine dans le sérum et les urines, par
déficit en tyrosine aminotransférase
Transmission autosomique récessive
AINS : anti-inflammatoires non stéroïdiens.
Tableau 2.
Principaux diagnostics différentiels des kératites herpétiques stromales.
Étiologie
Formes cliniques possibles
Principales caractéristiques
Virus
varicelle–zona
Dendrite (sans bulbe, typiquement), géographique
Souvent au décours d’un zona ou d’une varicelle, mais
formes isolées possibles
Amibes
Nécrotique avec infiltrat disciforme, anneaux
immunitaires. La présence de lésions satellites est
évocatrice d’une cause non virale
Douleurs majeures. Antécédents de port de lentilles
(ou de traumatisme). Rechercher une co-infection
Champignons
Aspect potentiellement identique à celui des amibes.
Néovascularisation fréquente
Peu de douleurs (sauf dans les formes traitées par
corticoïdes). Contexte traumatique ou
immunodépression (dont corticoïdes). Rechercher une
co-infection
Bactéries
Aspect potentiellement identique à celui des amibes.
Sécrétions purulentes
Facteur favorisant à rechercher (corticothérapie, lésions
chroniques de la surface, diabète, drépanocytose)
Kératites
cristallines
infectieuses
Infiltrat stromal blanc grisâtre, arborisé, avec des
opacités en forme d’aiguilles, siégeant dans l’épaisseur
moyenne du stroma
Typiquement lié à Streptococcus viridans, mais de
nombreux autres germes peu virulents peuvent générer
ce tableau. Immunodépression locale (kératoplastie).
Évolution lente
Adénovirus
Infiltrats sous-épithéliaux, multiples mais séparés par
des intervalles de cornée saine
Antécédents de kératoconjonctivite, dans sa forme
épidémique ou non (syndrome
adéno-pharyngo-conjonctival, avec pharyngite et
adénopathies prétragiennes)
Kératites à virus
d’Epstein-Barr
Opacités stromales antérieures discrètes à bords bien
limités, infiltrats multifocaux localisés surtout en
cornée périphérique, et infiltrats stromaux antérieurs,
semblables à ceux dus à l’adénovirus
Dans un contexte de mononucléose infectieuse (fièvre,
adénopathies, pharyngite et splénomégalie, etc.)
Kératites endothéliales
Ce sont les plus rares des kératites herpétiques, et combinent les complications de la réplication virale et celles de
la réaction immune antivirale [57, 64] . Le diagnostic de l’atteinte
endothéliale repose sur l’association d’un œdème stromal (sans
infiltrat cornéen) et de précipités rétrocornéens en regard de la
EMC - Ophtalmologie
plage d’œdème [14, 55] . La distinction avec une kératite stromale
compliquée d’atteinte endothéliale n’est pas toujours aisée car
l’œdème peut être suffisamment dense pour masquer les précipités
rétrocornéens [57] .
On distingue trois formes d’endothélite herpétique : disciforme,
diffuse ou linéaire [57, 65] .
5
21-200-D-20 Atteintes herpétiques du segment antérieur de l’œil : aspects épidémiologiques, cliniques et diagnostiques
doses n’est pas mis en place. L’introduction des corticoïdes ne
peut être réalisée qu’une fois obtenue la confirmation clinique de
l’efficacité des antiviraux [55, 57, 68–70] .
Aspects cliniques
et épidémiologiques des uvéites
antérieures herpétiques
Figure 5.
Kératite stromale non nécrosante.
Les uvéites antérieures induites par le virus HSV-1 partagent
beaucoup de similitudes avec celles induites par l’autre virus
humain de la sous-famille des Alphaherpesvirinae, à savoir le VZV.
Un autre membre de la famille des Herpesviridae, le cytomégalovirus (CMV, sous-famille des Betaherpesvirinae), peut aussi induire
des uvéites, mais les signes cliniques sont notoirement différents,
le plus souvent à type de syndrome de Posner–Schlossmann [71–73] .
Les uvéites à HSV-1 peuvent être très délétères pour le pronostic visuel en raison de leur caractère récidivant, de la fréquence
de l’hypertonie qui fait souvent le lit d’un glaucome rapidement
évolutif, et/ou des complications cornéennes associées.
Épidémiologie
Parmi l’ensemble des uvéites antérieures, celles liées aux virus
HSV-1 et VZV représentent 33 % des formes sévères vues en centre
tertiaire [74] . Celles plus particulièrement dues à HSV-1 représenteraient environ 10 % des cas selon certaines séries [75] . Cependant,
cette fréquence varie en fonction du niveau de chronicité et/ou de
récurrence. Ainsi, pour des premiers bilans d’une uvéite récente,
le virus HSV-1 n’est identifié comme agent étiologique que dans
4 % des cas, alors que cette fréquence monte à 44 % dans des séries
prenant en compte des périodes de suivi plus importantes [75–77] .
Le premier épisode clinique d’uvéite à HSV-1 apparaît en
moyenne aux alentours de 45 ans [75, 76] , mais le diagnostic étiologique est souvent porté avec retard [75] . Les hommes et les femmes
semblent être atteints avec la même fréquence [76] .
Formes cliniques
Figure 6. Endothélite disciforme diffuse. Noter les plis descemétiques
et l’œdème cornéen sur l’ensemble de la cornée.
Endothélites disciformes
Elles sont caractérisées par un œdème central et circulaire, laissant une zone de cornée saine jusqu’au limbe. Un
effet Tyndall peut être visible dans l’humeur aqueuse, et
une trabéculite associée peut se traduire par une hypertonie oculaire [66] . Pour cette forme qui est la plus fréquente
des endothélites herpétiques, la gêne est variable, parfois
modérée quand l’œdème est modeste. Le pronostic est généralement bon, sous réserve d’associer des antiviraux et des
corticostéroïdes [14, 57] .
Endothélites diffuses
Elles témoignent d’une altération diffuse de toute la surface endothéliale, qui se traduit par un œdème de tout le
stroma, sans zone saine près du limbe (Fig. 6). La trabéculite
est fréquente [55] . Les signes fonctionnels sont plus importants que dans l’endothélite disciforme, avec rougeur et baisse
d’acuité visuelle. Le traitement antiviral doit être donné à fortes
doses avant la mise en route des corticoïdes, qui doit être
prudente [14, 57] .
Endothélites linéaires
Ce sont les plus sévères. Elles sont reconnaissables à la disposition des précipités rétrodescémétiques selon une ligne droite
ou serpigineuse, progressant de la périphérie vers le centre de la
cornée, comme dans les rejets endothéliaux des greffes de cornée [14, 67] . Le risque de cette forme clinique est la destruction
endothéliale, qui peut être rapide si un traitement antiviral à fortes
6
Les uvéites antérieures représentent près des 9/10e de toutes les
atteintes uvéales à HSV. À l’inverse, un examen du fond d’œil
doit être systématique pour ne pas méconnaître une nécrose rétinienne périphérique débutante.
Les uvéites antérieures dues au HSV peuvent être isolées
(15 % des cas) ou associées à une kératite (85 %), exceptionnellement à une kératosclérite (qui est plutôt l’apanage des
complications du zona). En réalité, cette répartition est de plus
en plus difficile à affirmer de façon définitive, car les moyens
diagnostiques modernes permettent dorénavant de retrouver
plus facilement la trace de génome viral dans des uvéites
antérieures aiguës et à l’inverse, la classification nosologique
est discutable car les atteintes endothéliales isolées peuvent
être alternativement considérées comme des kératites (au sens
anatomique) ou des formes particulières d’uvéite puisqu’elles partagent certaines caractéristiques cliniques typiques des uvéites
à HSV, en particulier l’association fréquente avec une trabéculite [75, 76, 78] . Il est intéressant de noter que même en l’absence de
signe biomicroscopique de kératite, la moitié des yeux atteints
d’uvéite antérieure herpétique présente une baisse de sensibilité cornéenne [75, 77] , ce qui traduit un certain niveau d’atteinte
des terminaisons sensitives malgré l’absence de complication
intracornéenne.
Les principales caractéristiques d’une uvéite herpétique sont
tout d’abord son unilatéralité (moins de 10 % de formes bilatérales) et son caractère récidivant (épisode identique, même très
lointain). Un autre signe très évocateur est la présence d’atrophie
irienne sectorielle en « rayon de roue » transilluminable, éventuellement multiple (particularité partagée avec les uvéites
à VZV) [78] .
De même, une hypertonie oculaire d’emblée au-dessus de
30 mmHg, ou simplement relative (plus de 4 mmHg de différence
avec l’autre œil) est très évocatrice d’une origine herpétique (ou
EMC - Ophtalmologie
Atteintes herpétiques du segment antérieur de l’œil : aspects épidémiologiques, cliniques et diagnostiques 21-200-D-20
zostérienne). Le principal mécanisme en cause est une trabéculite
liée à la présence de virus dans les tissus du trabéculum uvéal. Un
obstacle prétrabéculaire par collection de cellules inflammatoires
peut aussi participer au déficit de filtration [75] . La régression rapide
de cette hypertonie dans les heures qui suivent la mise en route
d’un traitement antiviral est un argument clinique majeur pour
conforter le diagnostic clinique d’uvéite à HSV (ou VZV). Enfin, les
précipités rétrodescémétiques peuvent être évocateurs lorsqu’ils
sont nombreux et granulomateux, donnant un aspect en « peau
de léopard ». Cet aspect n’est cependant pas la règle. On peut aussi
observer parfois une collection blanche, fibrineuse, dans l’angle
iridocornéen inférieur, avec parfois même quelques traces hématiques. D’ailleurs, lors d’une ponction de chambre antérieure sur
uvéite antérieure herpétique, il n’est pas rare d’observer un signe
d’Amsler, qui n’est pas pathognomonique des iridocyclites de
Fuchs.
Le pronostic des uvéites antérieures à HSV dépend de la forme
clinique. Dans les kérato-uvéites, le problème est surtout celui du
maintien de la transparence cornéenne malgré les épisodes successifs. Dans les formes uvéitiques pures, le principal écueil est le
glaucome, qui atteint 28 à 45 % des patients [76] . Il peut se développer à la faveur des épisodes récurrents de trabéculite et/ou des
cures de corticoïdes topiques. Ces dernières peuvent aussi favoriser l’apparition d’une cataracte, comme d’ailleurs les épisodes
inflammatoires récidivants. Mais finalement, le risque évolutif
majeur est celui de la transformation, ou l’association d’emblée
d’une uvéite antérieure herpétique en une forme postérieure, avec
rétinite nécrosante [75] .
Principaux diagnostics différentiels
des uvéites antérieures à HSV-1
Hormis les cas où l’uvéite antérieure survient dans les suites
d’une varicelle ou d’un zona, il est quasi impossible de différencier
cliniquement les uvéites liées à HSV de celles liées au VZV [76, 79] .
Les outils biologiques permettent de rétablir le diagnostic étiologique.
Une autre cause d’uvéite antérieure unilatérale et récidivante
est le syndrome de Posner–Schlossman, qui touche les adultes
immunocompétents, avec un fort taux de glaucome secondaire.
Il n’y a en revanche pas d’atrophie irienne, et les précipités
rétrodescémétiques sont peu nombreux et centraux. Le CMV
serait responsable d’environ la moitié des cas [80] , même si le
caractère unilatéral reste difficile à comprendre pour un virus
hématotrope.
Enfin, certaines formes d’uvéites à CMV du sujet immunocompétent pourraient aussi induire une atrophie en secteur [81] .
La toxoplasmose oculaire peut aussi entraîner une uvéite antérieure unilatérale et hypertonique : l’examen du fond d’œil permet
de rétablir le diagnostic. De même, les uvéites antérieures liées à
la sarcoïdose ou aux spondylarthropathies peuvent être hypertonisantes, mais elles sont rarement unilatérales strictes et d’autres
signes orientent le diagnostic (fibrine en chambre antérieure dans
les spondylarthropathies, nodules de Koeppe et Bussaca dans les
sarcoïdoses, apparition rapide de synéchies iriocornéennes dans
les deux cas). Citons aussi la syphilis comme autre cause possible
d’uvéite antérieure aiguë hypertonisante. La présence d’autres
anomalies (roséole irienne, rétinite ou choroïdite) et le terrain
exposé font en règle évoquer le diagnostic, sachant que les tests de
Treponema Pallidum Haemagglutination Assay (TPHA) et Venereal Disease Research Laboratory (VDRL) font partie du bilan de
première intention des uvéites [75] .
Enfin, l’iridocyclite de Fuchs est une cause classique d’uvéite
antérieure unilatérale et hypertensive, mais elle évolue sur un
mode chronique et l’atrophie irienne n’est pas en secteur, mais diffuse, aux dépens du stroma antérieur. Typiquement, les précipités
rétrodescémétiques sont petits, étoilés, répartis sur l’ensemble de
la surface endothéliale et reliés entre eux. Cet aspect est observable
à la lampe à fente, mais une analyse en microscopie confocale (de
type Heidelberg Retina Tomograph II [HRT-II® ]) permet de mieux
observer cet aspect typique, qui conforte largement le diagnostic [82] . Cet examen peut notamment être utile dans les formes
débutantes, qui peuvent faire discuter une origine herpétique.
EMC - Ophtalmologie
La présence d’une cataracte sous-capsulaire postérieure et d’une
hyalite granulaire sont d’autres éléments qui étayent le diagnostic. En cas de doute, les prélèvements biologiques avec recherche
d’HSV dans l’humeur aqueuse sont très utiles. Il est d’ailleurs intéressant de noter qu’une origine virale, en particulier la rubéole,
a été évoquée dans ce syndrome dont la pathogénie demeure
largement inconnue [83–87] .
Outils du diagnostic étiologique
La confirmation biologique de l’origine herpétique des atteintes
du segment antérieur n’est pas nécessaire pour la prise en charge
thérapeutique car les signes cliniques sont très évocateurs dans la
plupart des cas, et la mise en route du traitement est le plus souvent urgente. Cependant, il est souvent intéressant de confirmer
qu’il s’agit bien du virus HSV-1, notamment dans les formes cliniques où des diagnostics différentiels sont possibles (cf. supra).
Par ailleurs, la confirmation étiologique permet de justifier, si
besoin est, la prescription au long cours d’antiviraux dans les
formes récidivantes.
Diagnostic biologique des kératites
herpétiques
La recherche d’anticorps sanguins antiherpès n’a pas d’intérêt
vu leur fréquence dans la population générale (séroprévalence
de plus de 90 % à partir de 50 ans). Les grattages conjonctivaux
et/ou cornéens ont longtemps été utilisés pour la mise en évidence
du virus par coloration histologique ± immunomarquage, ou par
titrage viral en culture de cellules [88] . Ces techniques sont maintenant largement supplantées par l’amplification génique (PCR),
technique de biologie moléculaire de référence. Subhan a comparé cette technique avec celles plus anciennes : la PCR permet
d’obtenir des index de sensibilité et spécificité de 100 % et 68 %
contre respectivement 57 % et 87 % pour les colorations histologiques, et 86 % et 85 % pour l’immunofluorescence. Les grattages
cornéens sont nettement plus rentables que les prélèvements de
larmes (37 % de PCR positives dans ces cas sévères contre 14 %
pour les larmes) [89] . Les techniques de PCR ont largement évolué depuis les premières mises au point dans les années 1990.
Deux techniques sont actuellement utilisées, la PCR multiplex
et la PCR quantitative. La première a comme intérêt de pouvoir tester plusieurs agents infectieux sur le même échantillon.
Les contraintes techniques de ce type d’analyse peuvent être
complexes à résoudre, et toutes les combinaisons ne sont pas
forcément possibles. Robert et al. avaient décrit en 2002 une
série de PCR multiplex pour les virus HSV-1, -2, VZV, CMV, virus
Epstein-Barr (EBV), human herpesvirus-6 (HHV-6) sur 186 yeux de
93 patients [24] . La PCR quantitative, parfois appelée « en temps
réel », a pour intérêt de donner une idée de la charge virale dans
le prélèvement, et donc du niveau de réplication. Fukuda et al.
ont montré que la PCR est positive dans 100 % des prélèvements
sur kératite dendritique avec une charge de 6 × 105 copies/ml
de larmes, contre 57 % dans les cas de kératites stromales non
nécrosantes actives (charge moyenne de 105 copies/ml), 0 % des
cas de kératites stromales en période active et 0 % des endothélites [90] . Cette technique a aussi permis de montrer que le
virus est sécrété en quantité significative dans 89 % des déficits
épithéliaux persistants [91] , alors que ces pathologies sont classiquement considérées comme liées à un problème purement
neurotrophique.
Diagnostic biologique des uvéites
herpétiques
Comme dans les atteintes de surface, la recherche d’anticorps
sanguins antiherpès n’a pas d’intérêt diagnostique. En revanche,
le calcul du coefficient de charge immunitaire, appelé aussi rapport de Witmer–Desmont (comparaison entre l’humeur aqueuse
et le sang du rapport entre anticorps spécifiques et totaux),
a été le premier outil fiable pour faire la preuve de l’origine
7
21-200-D-20 Atteintes herpétiques du segment antérieur de l’œil : aspects épidémiologiques, cliniques et diagnostiques
herpétique d’une uvéite. Il est maintenant largement complété
par la PCR qui vise à démontrer la présence de génome viral
dans l’humeur aqueuse. Sous réserve que les pièges de la technique soient maîtrisés par les biologistes qui mettent en œuvre le
test, la spécificité est proche de 100 % (il n’y a normalement pas
de génome d’HSV dans un œil sain) et la sensibilité au moment
de la poussée inflammatoire est de l’ordre de 80 % [74, 92–94] . Pour
comparaison, les index de sensibilité et spécificité du coefficient de charge immunitaire sont de l’ordre de 60 % en période
aiguë. Ce coefficient reste toutefois d’actualité pour établir un
diagnostic au décours de l’épisode aigu, car il peut rester positif quelques semaines ou mois après la résolution clinique de
l’inflammation [93, 95–97] .
Déclaration d’intérêts : missions ponctuelles d’expertises pour Alcon, Allergan, Baush & Lomb, MSD Pasteur, Santen, Thea.
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Pour en savoir plus
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M. Labetoulle ([email protected]).
Service d’ophtalmologie, Hôpital de Bicêtre, 78, rue du Général-Leclerc, 94275 Le Kremlin-Bicêtre cedex, France.
Laboratoire de virologie moléculaire et structurale, UMR 2472, CNRS, 91198 Gif-sur-Yvette, France.
A. Rousseau.
Service d’ophtalmologie, Hôpital de Bicêtre, 78, rue du Général-Leclerc, 94275 Le Kremlin-Bicêtre cedex, France.
T. Bourcier.
Service d’ophtalmologie, Nouvel hôpital civil, B.P. 426, 67091 Strasbourg, France.
EA7290, Institut de bactériologie, 3, rue Koeberlé, 67000 Strasbourg, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Labetoulle M, Rousseau A, Bourcier T. Atteintes herpétiques du segment antérieur de l’œil : aspects
épidémiologiques, cliniques et diagnostiques. EMC - Ophtalmologie 2014;11(1):1-10 [Article 21-200-D-20].
Disponibles sur www.em-consulte.com
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