Les chiffres sur les lignes de faille de la France (suite)

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Les chiffres sur les lignes de faille de la France (suite) :
un territoire déchiré ?
BILLET DE AURÉLIEN BOUTAUD
Dans son rapport sur les lignes de faille de la
société, France Stratégie fait un point sur la question
de la fracture territoriale. En la matière, les
perceptions des français et les statistiques
convergent assez largement et montrent une
fracture territoriale qui s’accroît au gré des
processus de métropolisation.
© Céline Ollivier
Aurélien Boutaud | 12 décembre 2016 | Mots-Clés mixité
pauvreté inégalité statistique chômage cohésion sociale
représentations économie
Dans son rapport sur les lignes de faille de la société française , déjà
évoqué dans un précédent billet, France Stratégie fait également un point
sur la question de la fracture territoriale. Comme pour la plupart des
thématiques abordées, le ressenti des français est confronté à la réalité
des statistiques. Mais cette fois-ci, perceptions et chiffres convergent
assez largement… et montrent une fracture territoriale qui s’accroît, au gré
de la métropolisation.
Une métropolisation qui inquiète les
habitants des zones périurbaines et
rurales
Au-delà d’un phénomène assez généralisé de déclin du secteur
secondaire, qui a particulièrement touché certains bassins industriels,
l’aménagement du territoire des dernières décennies se caractérise avant
tout par un phénomène de métropolisation. L’activité économique et
l’emploi se sont en effet concentrés dans une poignée de centres urbains :
quinze métropoles concentrent à elles seules la moitié du PIB français et
43% de l’emploi… pour 39% seulement de la population. Et ces
métropoles connaissent une croissance économique plus importante que
le reste de la France.
Cette métropolisation se réalise donc pour partie au détriment des zones
périurbaines et rurales, qui se sentent de plus en plus menacées : « La
majorité des habitants de petites et moyennes agglomérations (60 % des
salariés et 71 % des chômeurs) pense que leur territoire ne profitera pas
de la croissance économique des grandes villes et des métropoles les
plus proches. »
Ce sentiment de délaissement se traduit également dans les urnes : dans
ces zones délaissées de la périphérie, on vote davantage contre les élites
et contre le pouvoir.
Et des métropoles elles-mêmes très
inégalitaires
Mais si les inégalités sont fortes entre territoires métropolitains et
territoires périphériques, la métropolisation se réalise également en
générant de fortes disparités et une forte ségrégation socio-spatiale en
son sein. Les métropoles font ainsi cohabiter des poches de richesse et
des îlots de pauvreté. Comme nous l'avions noté dans un précédent billet,
les quartiers de la politique de la ville (QPV) sont par exemple
surreprésentés dans les métropoles, alors qu’ils concentrent les
populations les plus vulnérables : « la proportion des ménages à faible
revenu y est quatre fois plus élevée que la moyenne, un ménage sur
quatre y reçoit au moins une allocation chômage et trois ménages sur
quatre y sont logés en HLM. 42 % des habitants des QPV vivent sous le
seuil de pauvreté, contre 12 % seulement dans le reste de leurs unités
urbaines. » Pour ces habitants, le sentiment d’exclusion est d’autant plus
fort : « Les gens se sentent un peu comme des boat people amarrés à la
grande ville, qui ne peuvent jamais monter à quai . »
La délinquance est également plus présente dans ces zones urbaines
sensibles, créant un sentiment d’insécurité qui rejaillit sur les zones
périphériques. Ainsi, en 2014, « 78 % des Français se disaient
préoccupés par le sujet des quartiers sensibles. »
La métropolisation en cause ?
S’il n’est pas toujours justifié lorsqu’on observe les moyennes nationales,
le sentiment de fracture sociale que ressentent profondément les français
s’explique peut-être par une fracture territoriale qui, elle, est incontestable.
Ce qui est certain également, c’est que ces chiffres interrogent le rôle des
processus de métropolisation dans cet éclatement de la société française.