Aujourd`hui plus connu pour ses chansons que pour son palmarès

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Aujourd`hui plus connu pour ses chansons que pour son palmarès
Aujourd’hui plus connu pour ses
chansons que pour son palmarès
sportif, Yannick Noah reste une
personnalité très appréciée
par Reinhold Hönle
Le public aime Yannick Noah. Pour la
sixième fois consécutive, selon le classement réalisé pour le compte du
Journal du Dimanche (1) en France il est
désigné comme la personnalité préférée des Français. Car même s’il a choisi
de vivre à New York, le vainqueur du
tournoi de tennis de Roland Garros en
1983 a su conquérir le cœur de nos
voisins et le sommet des hit-parades
avec des titres comme Saga Africa ou
Métisse. Fils d’un footballeur professionnel africain et d’une enseignante
française, Yannick Noah a parcouru
un long chemin depuis le jour où, à
l’âge de onze ans, il a quitté le Cameroun de son enfance afin d’intégrer un
internat tennis-études en France. À
50 ans, Yannick Noah se consacre
aujourd’hui à la chanson, mais il est
aussi conseiller du PSG et de l’équipe
nationale de football du Cameroun.
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selectionclic.com 02/10
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du 16 au 25 juin 2010
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41
Comme si cela ne suffisait
pas, ce père de cinq enfants
s’engage corps et âme dans
des actions humanitaires,
comme Les restos du cœur,
Les enfants de la Terre (2), une
association qu’il a fondée
pour venir en aide aux enfants
démunis, ou encore Fête le
mur (voir encadré page 45).
Numéro gagnant :
les albums de
Yannick Noah
caracolent en tête
des hit-parades.
et un lien très fort s’instaure. Ce sont
des moments formidables, même s’ils
sont moins intenses qu’une victoire
sportive. Je m’y prépare, pour ne pas
perdre le contrôle de mes émotions,
comme cela arrive si souvent en tennis. J’ai pleuré, Roger Federer aussi.
Nous nous laissons tous submerger
par nos émotions pour, au bout de
quelques minutes, déjà songer à renouveler l’exploit, ce qui peut prendre
des mois, des années… et même ne
jamais se produire.
Reader’s Digest : Le 25
RD : Comment expliquez-vous votre
popularité, vous qui avez été élu per-
RD : Comment décririez-vous vos émotions sur scène ?
Yannick Noah : Moins violentes,
plus douces, mais beaucoup plus durables. La scène me fait du bien et
m’apporte un bonheur subtil. Il m’arrive aussi de connaître une sorte d’état
de grâce, où je ne chante pas, je
« suis » la chanson. Ou bien je croise
le regard de quelqu’un dans le public
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« J’aime les gseanusjourd’hui, j’essaie
donné. Alorndre un peu. »
de leur re
42
(2)
Les enfants de la Terre : www.enfantsdelaterre.net
readersdigest.ch 02/11
RD : La musique est-elle pour vous le
Numéro 3 mondial
et capitaine de
l’équipe de France
de Coupe Davis,
qu’il a mené deux
fois à la victoire.
© s o n y b m g m u s i c e n t e r ta i n m e n t g m b h ; © G e t t y I m a g e s
septembre dernier, vous enflammiez le Stade de France
devant 80 000 personnes. La
sensation s’apparente-t-elle à
celle de la finale de Roland
Garros, en 1983 ?
Yannick Noah : On ne peut
pas savourer un match de tennis que l’on dispute. La tension est extrême. Celui qui
remporte le point gagnant,
parce que sa balle a atterri à trois centimètres à l’intérieur du court, a la
chance de vivre des instants indescriptibles. Un sentiment de plénitude
absolue que, pour ma part, je n’ai ressenti que deux fois : après ma victoire
à l’open de tennis et à la naissance de
mon premier fils. Quand j’ai vu Joakim, j’ai pris la main de ma femme et
lui ai dit : « Je suis heureux comme à
Roland Garros. »
sonnalité préférée des Français pour la
sixième fois consécutive ?
Yannick Noah : J’aime les gens. Ils
m’ont beaucoup donné. Mes proches,
mais aussi tous ceux qui m’ont soutenu quand je suis arrivé en France,
tout seul. À 11 ans, je ne voyais plus
ma famille que cinq jours par an. Et
tous ces fans qui, dans le monde entier, m’ont galvanisé pendant mes
matchs… Aujourd’hui, à travers mes
chansons, mais aussi mon engagement
solidaire, j’essaie de leur rendre un
peu de ce qu’ils m’ont donné.
meilleur moyen d’exprimer
l’amour ?
Yannick Noah : Oui, la
musique que l’on écoute
chez soi, mais surtout en
concert. Le public chante
avec moi ; c’est une vraie
rencontre, un moment de
détente. Mon nouvel album, « Frontières », est
celui de la maturité et des
prises de position, dit-on,
mais il y a aussi beaucoup
de chansons gaies. C’est
important, car le public
vient me voir pour vivre
un moment de fête. Je
veux continuer à leur offrir cela.
RD : Vos textes sont tout
de même plus politiques,
pourquoi ?
Yannick Noah : Disons que c’est une ques43
à la politique. Nous avons
tous les deux des discussions
passionnées sur des sujets
comme l’écologie ou l’immigration. Il y a vingt-cinq ans,
je n’en aurais pas pris le
temps — le sport était ma
priorité absolue.
York. En quoi cette nouvelle vie a-t-elle
changé vos perspectives ?
Yannick Noah : Ma perception du
monde évolue constamment. Il s’y
passe des choses extraordinaires, il y
a des catastrophes écologiques… et il
y a des dirigeants politiques qui monopolisent l’attention des Français…
(Il rit.) Ce qui m’étonne le plus, c’est
que les médias sont de plus en plus au
service du gouvernement et que personne n’y trouve à redire dans le pays
de la première déclaration des droits
de l’homme, en 1789 ! Peut-être les restrictions sont-elles plus évidentes
vues de l’extérieur, en toute liberté ?
RD : Qui vous a inspiré le titre
tion d’âge. J’ai 50 ans et 5 enfants ; je
pourrais déjà être grand-père ! En tant
qu’adulte et citoyen responsable, je
commence à me demander ce que je
pourrais faire pour les générations
futures. Ma fille, qui étudie l’histoire
des civilisations, s’intéresse beaucoup
RD : Après l’élection de Nicolas
Sarkozy, vous vous êtes exilé à New
en plus
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« Les médiau gouvernement. Et
au service d n’y trouve à redire. »
personne
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readersdigest.ch 02/11
RD : Que représente New York pour
vous ?
Yannick Noah : La liberté, l’anony-
© s o n y b m g m u s i c e n t e r ta i n m e n t g m b h
Yannick Noah
est père de cinq
enfants, dont
Joakim, membre
des Chicago Bulls.
«Angela», sur la militante des
droits de l’homme Angela Davis ?
Yannick Noah : Un jour,
mon fils Joakim, qui joue pour
l’équipe de basket des Chicago
Bulls, m’a appelé pour me
dire qu’il ne pourrait pas aller
voter lors de la présidentielle
car il était en stage d’entraînement avec son équipe.
« Dis à ton entraîneur que tu
dois prendre l’avion pour aller voter à Chicago, parce que
c’est obligatoire ! lui ai-je rétorqué. Souviens-toi qu’il y a
six ans, c’est toi qui m’as donné un
livre en me disant “Papa, il faut que tu
lises ça. L’auteur est un type incroyable ; il s’appelle Barack Obama”. »
mat, le spectacle d’une vie à cent à
l’heure, de gens qui courent dans tous
les sens pour devenir quelqu’un d’autre
— mais pas pour devenir américains à
tous crins. Ils savent respecter les origines et la culture de leurs voisins.
C’est une ville où l’on peut passer en
cinq minutes de l’Italie à la Chine, de
l’Afrique à l’Amérique du Sud ou du
Nord.
RD : Comment en êtes-vous venu, dans
les années 1980, à y ouvrir un pub ?
Yannick Noah : A 23 ans, je suis tout
à coup devenu une célébrité, en France.
Dans la rue, tout le monde me reconnaissait. Alors je me suis aperçu que ce
que j’avais tant désiré pouvait aussi se
révéler anxiogène. Je suis donc parti
me réfugier chez un ami, à New York.
J’y ai rencontré ma première femme, y
« Fête le Mur » Après avoir été joueur, puis entraîneur,
Yannick Noah a voulu transmettre sa passion
du tennis aux jeunes de quartiers défavorisés
n’ayant guère accès à ce sport pour des
raisons essentiellement sociales et économiques. Lui qui avait tapé des balles pendant des
milliers d’heures sur le mur d’entraînement
a voulu détourner l’image traditionnelle du
mur de béton des banlieues, et en faire un
synonyme d’évasion. En 1996, il crée « Fête le
Mur », avec Séverine Thieffry. Son but principal : permettre aux enfants des cités d’avoir la
possibilité de jouer au tennis gratuitement.
Onze ans plus tard, l’association est présente
dans 25 zones urbaines sensibles en France et
permet aux enfants de ces quartiers de
pratiquer le tennis, de se perfectionner,
guidés par des équipes professionnelles et
des entraîneurs diplômés.Parallèlement,
« Fête le Mur » a développé d’autres axes
comme l’accompagnement à la compétition,
l’aide à la formation professionnelle, l’initiation à l’arbitrage, l’ouverture à la culture.
Avec toujours la même ambition : offrir aux
enfants des cités les moyens de réaliser des
projets qui leur tiennent à cœur.
suis resté et ai retrouvé une vie normale. C’est là que mes deux aînés sont
nés. Aujourd’hui, je fais la navette entre
Paris et New York. Je décide à mon gré
d’être un personnage actif ou un simple
figurant du spectacle. n
Yannick Noah est en tournée jusqu’à fin
mai 2011. Toutes les dates sur :
www.yannicknoah.com
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