Les stations WIM actuelles : des outils polyvalents pour les autorités
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Les stations WIM actuelles : des outils polyvalents pour les autorités
Les stations WIM actuelles : des outils polyvalents pour les autorités Introduction Les infrastructures routières jouent un rôle structurant sur les aspects sociaux (désenclavement) et économiques (85% du transport de marchandises se fait par la route en France). Or, les 2 principales causes du vieillissement des infrastructures sont l’eau sous toutes ses formes et la charge supportée (essentiellement le transport de marchandises) [1]. Il est donc clair qu’une observation plus fine du trafic de poids lourds permettra de mieux connaître les poids transportés, les niveaux de surcharges et les axes routiers en danger. C’est à cette fin d’observation que sont apparus en Europe les premières stations de pesage en marche des véhicules à la fin des années 60. Les évolutions successives, au niveau des capteurs, de l’électronique et des algorithmes de traitement, permettent aujourd’hui de mesurer les poids avec précision [2]. Les stations WIM actuelles sont les descendantes directes de ces matériels. Mais elles se sont enrichies d’une multitude de capteurs, pour fournir des données bien plus complètes à des utilisateurs bien plus diversifiés. Regroupées en réseau, elles donnent aujourd’hui les moyens aux autorités d’agir efficacement dans des domaines aussi variés que le respect du code de la route et de la réglementation sociale, la lutte contre la fraude, le trafic illicite et certaines formes de délinquance organisée, la préservation des infrastructures et la sécurité routière. Les stations WIM Une station WIM est capable d’estimer le poids d’un véhicule sans le ralentir ni le détourner de sa voie de circulation. Nous décrivons ici le principe de mesure de ces stations, les classes de précision et les applications possibles. Principe de mesure Les stations WIM utilisent principalement des capteurs piézoélectriques pour peser les essieux des véhicules en marche. Ce sont des capteurs rectilignes, implantés dans la chaussée perpendiculairement au sens de circulation, juste sous la surface. Leur partie sensible présente la propriété de se polariser électriquement lorsqu’on lui applique une contrainte mécanique. Ainsi, une fois le capteur connecté à un amplificateur de charge, le signal électrique obtenu au passage d’un essieu est directement proportionnel au poids dynamique de l’essieu. Il existe 3 technologies de capteurs piézoélectriques avec chacune ses avantages et ses inconvénients : Les piézo-polymères. Ces capteurs sont d’un faible coût, d’une grande sensibilité et d’une mise en œuvre aisée. Cependant, le signal fourni varie selon la position latérale des roues et dépend très fortement de la température [3]. « Les Rencontres de la Mobilité Intelligente 2016 » Page 1 Les piézo-céramiques. Ces capteurs présentent une grande longueur et sont difficilement transportable. Cependant, le signal fourni est de qualité satisfaisante pour un prix correct. Les piézo-quartz. Ces capteurs sont par construction moins sensibles que les précédents à la déformation de la chaussée, à la position latérale et à la température, mais d’une mise en œuvre plus compliquée et d’un prix élevé. a c b Figure 1 : (a) Piézo-polymère; (b) Piézo-céramique; (c) Piézo-quartz Précision sur le poids La norme américaine ASTM 1318 [4] et la prénorme européenne COST 323 [5] définissent différentes classes de précision pour les stations WIM. Ces classes sont toutes définies de manière statistique pour un niveau de confiance donné sur les erreurs relatives des mesures. La norme ASTM 1318 fixe ce niveau à 95%, tandis que la prénorme COST 323 le fait varier de 90% à 98% environ selon les conditions d’essais. Cependant, pour des usages courant et des plans d’expérience standards et prédéfinis, le niveau de confiance de 95% est généralement retenu. Cela signifie qu’au minimum 95% des mesures produites par le système doivent atteindre la précision attendue, et que jusqu’à 5% des mesures produites peuvent dépasser la précision attendue. Tableau 1 : Tolérances par rapport au poids statique de référence (au niveau de confiance requis par les spécifications) Norme COST 323 ASTM 1318 Classe de précision A(5) B+(7) B(10) C(15) D+(20) Type III Type I Type II Poids total Groupe d’essieu Essieu simple Essieu de groupe Roue 5% 7% 8% 10% - 7% 10% 11% 14% - 10% 13% 15% 20% - 15% 18% 20% 25% - 20% 23% 25% 30% - 6% 10% 15% 20% 10% 15% 20% 25% 15% 20% 30% - Il est important de noter que les caractéristiques d’un site influent sur la précision de la mesure du poids. C’est pour cette raison que la prénorme COST 323 précise que le système de pesage en marche doit être installé dans une ligne droite (rayon de courbure > 1000m) et en dehors des zones d’accélération, de freinage ou de changement de voie de circulation. Elle précise également que la structure de chaussée doit être homogène sous les capteurs, avec une bonne liaison mécanique entre les couches. Enfin elle définit 3 classes de sites, avec des tolérances à respecter sur la géométrie de la route et les caractéristiques de surface de la chaussée, et elle exige que le site soit de classe « I Excellent » pour les stations WIM qui visent une classe de précision A(5) et B+(7). « Les Rencontres de la Mobilité Intelligente 2016 » Page 2 Tableau 2 : Critères pour le choix d’un site selon COST 323 Classe du site I Excellent II Bon III Acceptable Pente longitudinale Orniérage Déflexion (dynamique) < 1% ≤ 4mm < 2% ≤ 7mm < 2% ≤ 10mm ≤ 0.15mm ≤ 0.25mm ≤ 0.35mm (charge 5t, chaussée bitumineuse) Uni (index IRI) < 1.3m/km < 2.6m/km < 4m/km Applications Grâce aux capteurs piézoélectriques implantés dans la chaussée, les stations WIM disposent d’informations précises sur les véhicules tels que le nombre d’essieux, les distances entre essieux et les poids des essieux. Il est alors possible de classer précisément les véhicules par catégorie : véhicule léger avec ou sans remorque, camion avec ou sans remorque, bus, semi-remorques… Ainsi, les statistiques de trafic élaborées par les stations WIM offrent aux gestionnaires d’infrastructure une meilleure connaissance des flux de circulation [6]. Les données de poids collectées par les stations WIM permettent de calculer l’agressivité réelle du trafic sur la chaussée. La prise en compte de l’impact des poids lourds sur l’orniérage ou la fatigue des infrastructures permet de mieux dimensionner les chaussées neuves ou les ouvrages d’art [7]. L’exploitation périodique de ces données permet également au gestionnaire d’optimiser la maintenance des infrastructures, du point de vue aussi bien de la planification des travaux que de l’allocation des budgets. Enfin, la surveillance constante des charges transportées est un élément de sécurité supplémentaire pour les ponts. Les stations WIM actuelles Les stations WIM ont profondément évolué avec le temps et répondent aujourd’hui à des problématiques bien plus larges que la seule détection des charges. Nous allons montrer comment elles sont devenues des outils polyvalents qui facilitent et rendent plus efficace le travail de terrain réalisé par les agents de l’État (contrôleurs des routes, douaniers, policiers). Architecture générale Les stations WIM actuelles sont constituées de capteurs (intrusifs et non-intrusifs) et d’une armoire électronique de traitement reliée à un système de communication Ethernet. Pour chaque passage de véhicule, un fichier individuel est constitué. Ce fichier renferme des informations comme : l’heure et le lieu de passage du véhicule, sa plaque minéralogique (et le pays d’origine), sa catégorie (véhicule léger, poids lourds…), son poids détaillé (poids total, poids par essieu et par groupe d’essieux), sa vitesse, ses dimensions (hauteur, largeur, longueur), sa position sur la chaussée, le type de transport (si matières dangereuses)… Ce fichier est généralement mis à disposition en temps réel pour les agents présents sur le terrain, et parallèlement mis en base de données sur un serveur central. Pour respecter les règles de vie privée, ce fichier n’est accessible qu’aux personnels autorisés et pendant une durée limitée. Pour plus de sécurité, il peut également être crypté et signé. « Les Rencontres de la Mobilité Intelligente 2016 » Page 3 Caméras Gabarit Station Grille de capteurs intrusifs Figure 2 : Exemple d’une station WIM actuelle installée en Belgique Grille de capteurs intrusifs Les stations WIM actuelles peuvent gérer plusieurs voies de circulation. Chaque voie de circulation est équipée d’une grille de capteurs intrusifs dont la composition varie selon les besoins : Les boucles électromagnétiques sont sensibles à la masse métallique des véhicules. Elles servent à détecter l’enveloppe des véhicules et sont utilisées pour calculer leur longueur et pour déclencher la prise de vue des caméras. Les capteurs piézoélectriques sont sensibles au passage des roues. Les capteurs perpendiculaires à l’axe de circulation servent à calculer la vitesse du véhicule et à peser les essieux. Les grilles sont équipées de capteurs piézo-polymères, piézo-céramiques ou piézo-quartz selon le niveau de précision souhaité sur le poids. Les capteurs installés en biais sont utilisés pour discriminer les roues jumelées et déterminer la position latérale du véhicule sur la chaussée. Ce sont souvent des capteurs piézo-polymères. Le capteur de température sert à mesurer la température de chaussée et à valider la gamme de fonctionnement des capteurs piézoélectriques. Boucle de sortie Capteurs piézoélectriques °C Boucle d’attaque Figure 3 : Exemple d’une grille de capteurs intrusifs « Les Rencontres de la Mobilité Intelligente 2016 » Page 4 Caméras Les stations WIM actuelles peuvent être équipées de différentes caméras : Les caméras contextuelles fournissent des images de ¾ face des véhicules, en couleur le jour et en noir et blanc la nuit. Installées en bord de chaussée, elles couvrent généralement 1 ou 2 voies de circulation. Elles permettent la reconnaissance du véhicule aussi bien de jour que de nuit. Les caméras ANPR (Automatic Number Plate Recognition) et DGR (Dangerous Goods Recognition) sont utilisées pour identifier les véhicules et les matières transportées. Elles sont généralement installées au-dessus de chaque voie de circulation. En cas d’infraction, elles servent de preuve pour interpeller ou verbaliser les contrevenants. Gabarit Les stations WIM actuelles peuvent être équipées de différents capteurs de gabarit: Le télémètre laser à balayage permet de mesurer la hauteur et la largeur des véhicules. Installé au-dessus de chaque voie de circulation, il est également capable de reconstituer le profil des véhicules en 3D, afin d’améliorer la détermination de leur catégorie. La double barrière optique infrarouge est utilisée pour détecter les véhicules qui dépassent la hauteur limite autorisée. Elle couvre toutes les voies de circulation adjacentes d’un même sens de circulation. Armoire électronique de traitement L’armoire renferme toute l’intelligence des stations WIM. Elle intègre l’électronique d’acquisition et l’unité centrale de traitement, ainsi que le moyen de communication et les systèmes d’alimentation et de régulation thermique. Performances attendues L’estimation de la précision d’une station WIM nécessite un essai mené à partir de véhicules de référence dont le poids statique est connu. Il parait évident qu’il est plus facile d’obtenir une bonne performance après une calibration sur une journée d’essai avec un nombre limité et prédéfini de véhicules, que sur une période de plusieurs mois avec des véhicules issus du trafic. Pour tenir compte de ce phénomène, la prénorme COST 323 définit des critères de reproductibilité sur les véhicules pesés (r1 à R2) et de reproductibilité environnementale (I à III) et elle impose un niveau de confiance minimum requis en fonction de ces critères. Ainsi, plus les conditions de l’essai s’éloignent de celle du trafic réel, plus le niveau de confiance minimum requis augmente. Pour donner au lecteur une idée sur la précision des stations WIM actuelles, nous allons nous focaliser ici sur les matériels proposés par la société STERELA reconnue comme performante dans le domaine. La société STERELA a installé et mis en service 29 stations WIM en France de 2007 à 2011, majoritairement sur le réseau autoroutier [8]. Toutes les stations équipées d’une grille de capteurs intrusifs comprenant une ligne de capteurs piézo-quartz respectent la classe de précision B(10) selon le COST 323 [9]. Cette précision est stable dans le temps et valable pour l’ensemble du trafic, ce qui correspond aux conditions de reproductibilité R2 (III) selon le COST 323. « Les Rencontres de la Mobilité Intelligente 2016 » Page 5 La société STERELA a également fait évaluer sa station GLOBAL-WIM avec une grille de capteurs intrusifs comprenant deux lignes de capteurs piézo-quartz. En France, les essais ont été réalisés sous le contrôle de la métrologie légale russe, avec 33 véhicules issus du trafic et 2 véhicules loués de type C2 et T2S3. Ils se sont étalés sur 7 jours répartis sur 3 mois, avec des poids totaux allant de 7.5t à 46t et des vitesses allant de 48 à 102 km/h. Les poids de référence ont été fournis par un pèse-essieu statique homologué situé quelques km en aval du site et de classe de précision IIII selon OIML R76 [10]. Au Brésil, les essais ont été réalisés par le Lab Trans (Transportation and Logistics Laboratory) avec plus de 14 000 véhicules issus du trafic. Ils se sont étalés sur 7 mois, avec des poids totaux allant de 7t à 81t et des vitesses allant de 14 à 99 km/h. Les poids de référence ont été fournis par une bascule de pesage à basse vitesse située quelques km en aval du site et testée selon les spécifications d’INMETRO (institut national de métrologie) le 16 janvier 2015. La bascule présentait alors sur les mesures de poids total une performance équivalente à la classe de précision 2 selon OIML R134 [11]. Le tableau ci-dessous présente les précisions obtenues sur les 2 sites classés « I Excellent » selon le COST323 : Tableau 3 : Performance de la station GLOBAL-WIM avec 2 lignes piézo-quartz Évaluation selon COST323 Nombre de véhicules pesés Conditions de reproductibilité Erreur moyenne sur le poids total Écart type sur le poids total Classe de précision sur le poids total Niveau de confiance pour cette classe France 33 R2 (II) 0.17% 2.47% A(5) 89.4% 78 R1 (II) -0.76% 2.45% B+(7) 98.6% Brésil 14 421 R2 (II) 3.99% 2.82% B(10) 98.3% Les applications terrain Présélection des véhicules La toute première application des stations WIM actuelles est la présélection des véhicules en infraction. Les infractions qu’elles peuvent détecter sont nombreuses : vitesse et surcharge au poids total selon la catégorie du véhicule (y compris transport de matières dangereuses), surcharge à l’essieu selon le type d’essieu (simple, tandem, tridem) et le type de roues (simples ou jumelées), dépassement de hauteur, largeur ou longueur, circulation sur une voie ou plage horaire interdite. Lorsqu’un véhicule est détecté en infraction, les stations WIM actuelles génèrent automatiquement une alerte à destination des agents sur le terrain qui vont intercepter le véhicule pour le contrôler. Cette interception est facilitée par l’affichage de la plaque d’immatriculation et de la photo de ¾ face du véhicule. Optimisation des contrôles manuels Les statistiques élaborées par les stations WIM permettent d’identifier les plages horaires où les infractions constatées sont les plus importantes. En optimisant ainsi le planning des contrôles, et grâce à la présélection des véhicules en surcharge, l’efficacité des contrôles manuels est passée en France de 25% à 96% [8]. « Les Rencontres de la Mobilité Intelligente 2016 » Page 6 Les stations WIM actuelles peuvent également sécuriser les interceptions en pleine voie en commandant des panneaux d’affichage dynamiques qui obligent les véhicules à quitter la route pour rejoindre l’aire de contrôle. Cette commande s’effectue soit en local, lorsque les stations sont proches de l’aire de contrôle, soit à distance, après ré-identification dans le trafic grâce à une caméra ANPR des véhicules en infraction sélectionnés par les contrôleurs [8]. Cette automatisation des interceptions libère des ressources humaines qui peuvent être réaffectées aux tâches plus valorisantes de contrôle, aussi bien du code de la route que de la réglementation sociale et de celle des transports (vérification du temps de conduite et de repos, du travail dissimulé, des bons de transport…). Les données fournies par les stations WIM actuelles, tant au niveau local qu’au niveau national, sont alors autant d’informations précieuses qui aident les contrôleurs à détecter les fraudes au limiteur de vitesse, au chronotachygraphe ou au cabotage. Contrôle sanction automatisé L’objectif ultime est de réaliser le Contrôle Sanction Automatisé (CSA) sur le poids. C’est l’objet du projet « CSA surcharges » et de son expérimentation, lancé en France par la Direction Générale des Infrastructures, des Transports et de la Mer (DGITM), piloté par l’IFSTTAR et réalisé avec le concours du CEREMA [3]. C’est également l’objectif final du Service Public de la Wallonie (SPW) en Belgique, qui souhaite faire homologuer les 5 stations WIM installées en 2015 sur son territoire. L’enjeu majeur est de rendre les stations WIM conformes aux exigences de la métrologie légale, qui impose que 100% des mesures produites soient inférieures à l’erreur maximale tolérée. Pour ce faire, les stations WIM doivent éliminer de leurs mesures produites toutes les valeurs jugées incertaines à partir de critères de validation basés sur l’analyse du comportement dynamique des véhicules. Les stations GLOBAL-WIM de STERELA intègrent déjà depuis plus de 2 ans ce type de critères. Le tableau ci-dessous présente les résultats obtenus lors des 2 campagnes d’essais précédemment citées : Tableau 4 : Évaluation des critères de validation de la station GLOBAL-WIM Évaluation selon CSA France Véhicules Nombre de véhicules Erreur maximale tolérée Erreur maximale Nombre de faux positif Tous 111 5% 6.01% 6 Brésil Validés 61 (55%) 5% 3.88% 0 Tous 14 421 10% 107% 192 Validés 2 159 (15%) 10% 17.74% 35 À critères identiques, le pourcentage plus faible de véhicules validés au Brésil s’explique par des oscillations importantes des véhicules liées à une « bosse » en amont du site. Ces résultats sont plutôt encourageants, car ils montrent que les critères de validation sont efficaces pour limiter l’erreur maximale sur les mesures produites. Certes, ils doivent encore être améliorés pour éliminer tous les faux positifs, mais ils laissent espérer qu’une homologation est possible. « Les Rencontres de la Mobilité Intelligente 2016 » Page 7 Les applications réseau Si les applications de terrain sont déjà nombreuses, variées et prometteuses, les applications réseaux le sont encore plus. Le maillage de tout un territoire avec des stations WIM actuelles, et la centralisation des données sur un serveur, offre des possibilités de « data mining » qui intéressent beaucoup les autorités. Contrôle des transports terrestres Les contrôleurs peuvent rechercher sur tout le territoire les véhicules qui présentent des infractions récurrentes. Si le serveur central des stations WIM est connecté à un Système d’Immatriculation des Véhicules (SIV), cela permet d’identifier facilement les entreprises qui commettent le plus d’infraction et de mieux cibler les plans de contrôle en entreprise. Il est également possible de marquer ces véhicules dans une « black list », afin que dès qu’ils passent sur une station WIM, ils soient automatiquement présélectionnés et contrôlés. Les contrôleurs peuvent également rechercher des présomptions d’infraction aux règles de cabotage, en comparant les données de poids horodatées d’un même véhicule étranger de transport de marchandises à différents endroits du territoire. Brigade judiciaire ou financière La connexion du serveur central des stations WIM à un Système d’Immatriculation des Véhicules (SIV) peut également intéresser d’autres autorités. Ainsi en Suisse, la Police judiciaire se connecte à la base de données fédérale RIPOL pour identifier les véhicules non assurés, les conducteurs titulaires d’un permis de conduire non autorisé en Suisse ou encore les fausses déclarations de résidence. Sécurité intérieure La police, la gendarmerie et les douanes sont bien entendu intéressées par la surveillance du trafic sur l’ensemble d’un territoire. Les informations recueillies par les stations WIM actuelles peuvent les aider dans leur lutte contre le trafic illicite (recherche de « Go Fast ») et certaines formes de délinquance organisée. La connexion du serveur central des stations WIM au fichier des véhicules recherchés par la Police serait encore un plus. Les bénéfices sociétaux escomptés Sécurité routière En France, les poids lourds représentent seulement 1.8% du trafic, mais ils sont responsables de 14% des personnes tuées sur la route [12]. Faire respecter les limites maximales de charge, pouvoir contrôler la répartition gauche-droite des charges pour éviter le renversement des véhicules articulés, contrôler les excès de vitesse sont autant de possibilités offertes par les stations WIM actuelles pour améliorer encore la sécurité des poids lourds sur nos routes. Lutte contre la concurrence déloyale Si une entreprise de transport de marchandises surcharge de 10% tous ses camions de 40t, elle augmente de façon illicite sa capacité de chargement de près de 16%. Elle réalise ainsi l’économie complète d’un camion tous les 6 camions en circulation, soit une économie annuelle de près de 140 000 € pour un transport « Les Rencontres de la Mobilité Intelligente 2016 » Page 8 longue distance [13]. En collectant 24h/24 les plaques d’immatriculation des véhicules en surcharge, les stations WIM actuelles donnent aux autorités les moyens de cibler les entreprises incriminées et de lutter efficacement contre la concurrence déloyale. Préservation des infrastructures routières La durée de vie théorique des chaussées est comprise entre 20 et 30 ans, selon la classe de trafic cumulé de poids lourds. Quand on sait que sur une chaussée semirigide, le passage d’un essieu surchargé de 10% équivaut aux passages de 3 essieux normalement chargés [14], on comprend l’importance de réduire les surcharges à l’essieu pour préserver la durée de vie des chaussées. En France, l’exploitation régulière d’un réseau de 29 stations WIM de présélection des véhicules a permis de diviser par 2 les surcharges constatées en moins de 5 ans. Les freins à lever Le maillage de tout un territoire avec un réseau de stations WIM actuelles peut donc être extrêmement bénéfique pour les autorités. Néanmoins, certains freins à sa réalisation existent encore, comme par exemple les enjeux financiers (comment le financer ?) ou règlementaires (comment mettre en place la verbalisation automatisée sur les surcharges ?). Nous expliquons ici en partie, comment lever ces freins. Quel mode de financement ? Grâce à la présélection des véhicules et à l’optimisation des contrôles manuels, les stations WIM actuelles contribuent à rendre les personnels en charge des contrôles plus efficaces, donc plus rentables. Comme les stations WIM actuelles intéressent différentes autorités, il est possible d’envisager une action interministérielle visant à mutualiser les investissements dans une solution globale unique qui rende service à tous. À l’instar des concessions autoroutières, il est possible d’imaginer un modèle d’exploitation B.O.T (Build Operate Transfer). Ce modèle est d’ailleurs déjà utilisé dans certains pays comme le Brésil pour l’exploitation des aires de contrôle de pesée. Son principal avantage est de limiter l’investissement pour les autorités publiques. À l’image de ce qui est en train de se mettre en place en Chine, au Kazakhstan ou aux États-Unis, il est aussi possible d’introduire de manière systématique des péages au poids réellement transporté. Ce péage est d’ailleurs plus juste que le péage basé sur la classification des véhicules, puisqu’il fait payer l’usager en proportion des dégradations qu’il génère. Quelle procédure d’homologation ? Le Contrôle Sanction Automatisé (CSA) des véhicules en surcharge doit certes impliquer les organismes métrologiques, mais aussi et surtout les instances législatives et judiciaires. C’est d’ailleurs ce que précise l’OIML dans ses recommandations métrologiques internationales : « Les interprétations juridiques des résultats de mesure, le choix des types de cinémomètres et les conditions dans lesquelles ils sont utilisables sont laissés aux réglementations nationales. » [15]. « Les Rencontres de la Mobilité Intelligente 2016 » Page 9 La certification OIML R134 [11] d’un matériel peut donc constituer une condition nécessaire à la mise en place du CSA des véhicules en surcharge, mais elle n’est pas une condition suffisante. Il est du ressort de chaque État de définir le cadre légal à mettre en œuvre pour l’application du CSA. C’est d’ailleurs tout l’objet du projet « CSA surcharges » lancé en France : s’assurer que le matériel est fiable du point de vue métrologique, mais aussi et surtout définir la réglementation à mettre en place et garantir que le matériel sera exploitable juridiquement. Quelle gestion de la verbalisation ? Contrairement aux systèmes de taxation des poids lourds (en France : taxe environnementale dite « Écotaxe » ou taxe à l’essieu imposée par le Code des Douanes), un système de verbalisation basé sur des stations WIM actuelles sera mieux accepté par les professionnels du transport. En effet, verbaliser les surcharges ne pénalise que les contrevenants, contrairement aux taxes qui augmentent le coût du transport pour tous. Le risque de levée de bouclier contre un tel projet est donc quasiment nul. En revanche, la verbalisation devra s’appliquer à tous les véhicules, même ceux en provenance de l’étranger. Pour s’assurer que le recouvrement des amendes est effectif, il faudra signer des accords de poursuite transfrontalière avec les pays concernés. Une autre solution pourra consister à identifier par leur plaque minéralogique les poids lourds entrant sur le territoire national, et émettre des alertes lorsque ces poids lourds ont des amendes à régulariser. Ainsi ils pourront être interceptés par des forces de l’ordre en patrouille. Conclusion Les stations WIM actuelles sont bien des outils polyvalents pour les autorités. Les freins à leur déploiement massif sont plus de nature règlementaire que technique ou financière. Néanmoins, des expérimentations sont en cours pour démontrer que les stations WIM actuelles peuvent être au contrôle du poids, ce que les radars automatiques sont au contrôle des vitesses. Références [1] Livre blanc. 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D’abord ingénieur d’études, puis chef de projet, j’ai participé au développement de nombreux produits de comptage routier fixes et mobiles utilisant tous types de capteurs : tubes pneumatiques, boucles électromagnétiques, magnétomètres, capteurs piézoélectriques… Membre de l’International Society for Weigh-In-Motion (ISWIM) depuis 2007, je suis également un expert du pesage dynamique en marche. Enfin, je suis membre de la commission de normalisation BNTRA/CN08 travaillant sur les données routières, leur élaboration et de leur stockage. « Les Rencontres de la Mobilité Intelligente 2016 » Page 12