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Dimanche 15 avril 2007 / Page
Le lièvre Rien-ne-sert
veut devenir président des
bois, des prés et des
champs. Et la carotte il la
veut plantée partout,
qu’elle se propage, orange
et vigoureuse, dans tous
les sols du pays. Lulu la
tortue, effarée par l’empirisme d’un tel programme électoral, exprime son désaccord.
Mais celui-ci ne fait
qu’enflammer l’ire de
l’animal
à
grandes
oreilles et c’est la famille
des animaux qui se scinde
en deux camps. Un front
d’opposition se met en
place autour de Lulu. Elle
aussi sera candidate, et
promouvra le débat. Mais
qui des deux remportera
les élections à l’issue de la
campagne ?
Nées d’une heureuse
émulation entre le talent
de Daniel Picouly et du
dessinateur
Frédéric
Pillot, les aventures de la
petite tortue enthousiasment. L’originalité de
Lulu présidente ! (Magnard Jeunesse), ce dernier opus, tient dans sa fin
ouverte et interactive. Un
seul bulletin saura faire la
différence ; et si c’était le
nôtre ? Servi par un ravissant graphisme tout en
rondeur, l’album incite
les enfants à prendre part
à une expérience participative drôle et rafraîchissante. Date de clôture des
élections : le 05 mai 2007 !
[ Musique
[ Concert
La nouvelle icône des ados
Les fans de la première heure de Lorie ont
grandi. Pour les 12-15 ans, la « maturation »
passe aujourd’hui par le jeune groupe de rock
allemand Tokio Hotel. Les "quatre de Magdebourg", dont la vente de disques a atteint
des scores inégalés jusqu’ici Outre-Rhin, sont
en effet en passe de convertir les Européens.
En France aussi, Schrei, leur premier
album a fait un véritable carton. Idem pour
Zimmer 483 et ses nombreux tubes, ce qui est
de bonne augure pour les deux seuls concerts
donnés par le quatuor en France (à Paris le 17
et à Nancy le 18).
Sans tapage médiatique outrancier, le
groupe germanique semble en tout cas assuré
de remplir les deux Zénith où la venue de
Bill, chanteur-leader au look androgyne est
très attendue. Car son poster, c’est bien
simple, se vend aussi bien que ses disques, et
ça, c’est un signe qui ne trompe pas sur la
planète "ados".
Photo AFP
Aux urnes les enfants !
Δ Tokio Hotel : mercredi 18 avril à
18 h 30, Zénith de Nancy.
Loc. : FNAC et points de vente habituels.
[ Cinéma
Halle Berry voit triple
IAM plus caustique
bien
gras »,
scande Akhenaton.
On retrouve des
titres très engagés comme Une
Autre Brique,
premier single
inspiré par Pink
Floyd et Offishall sur la discrimination.
L’opus compte
aussi des ballades comme
Nos heures de
gloire ou Si tu
m’aimais, déclaration d’amour
d’un sans papiers à la France.
De la France et
du drapeau bleu,
blanc, rouge, il est aussi question dans United.
IAM qui entamera en décembre prochain
une tournée en France, mais aussi en Belgique et en Suisse, renoue avec des titres dansants aux textes acerbes comme Au Quartier.
Le groupe rend également hommage à
James Brown dans Tu le sais Part 1 & Part 2
qui utilise un sample de « Take me just as I
am » interprété par Lyn Collins et composé
par le roi de la soul.
Contrairement à ce qu’il avait fait sur Revoir un printemps, il n’a invité aucune star
américaine, mais juste un ami marseillais,
Jehro, pour le duo To The World.
Journaliste d’investigation enquêtant sur un magnat de la publicité,
Halle Berry se mue en employée modèle… et en internaute délurée
dans Dangereuse séduction de James Foley.
Photo d.r.
IAM fête cette
année ses 17 ans
de carrière avec
un
cinquième
opus (Saison 5)
et revient à un
style plus direct,
plus épuré, des
morceaux faits
pour être joués
sur scène.
Le groupe marseillais sort du registre trop récitatif, trop torturé,
trop orchestré de
sa dernière production Revoir
un
printemps
sorti en 2003. Il
propose cette fois
17 titres énergiques,
caustiques et pleins d’humour. Imhotep, l’architecte musical du collectif, s’est
principalement inspiré de musiques ethniques, orientales et asiatiques à l’instar du
titre d’ouverture Ww, dans lequel, les six
membres rappellent que le « rap n’a jamais
été un préau de maternelle. On a botté le cul
de la pop conne ! »
Dans Rap De Droite, ils dénoncent les dérapages d’un certain nombre de formations
parlant plus de « fesses que de fond », qu’ils
qualifient de « faux rebelles » ou de « vrais
fachos » qui ne jurent que par les « femmes
soumises » ou l’argent roi : « Avant c’était
le goudron / maintenant on veut du caviar
-Timbaland : Shock Value (Blackground Records). Difficile de parler d’un album solo.
Le terme collectif serait plus approprié. Excepté le premier titre Oh Timbaland, le célèbre
producteur aux doigts d’or a convié une pléiade de star pour son album de 17 titres aux sonorités hip-hop, tribales, matinées de R&B. Ils sont principalement fabriqués pour danser à
l’image du très efficace premier single Give it to me, interprété avec Nelly Furtado & Justin
Timberlake.
On retrouve Timbaland avec Justin Timberlake sur Release avant qu’il ne muscle son jeu
sur Bounce avec Dr. Dre, Missy Elliott et à nouveau Justin Timberlake. Le ton monte encore
d’un cran sur Come & Get Me avec 50 Cent & Tony Yayo.
par Michel BITZER
H
ALLE Berry est heureuse. Il y a
quelques jours, elle a inauguré
son étoile – la 2 333e – sur le fameux Walk of fame à Hollywood. Juste
face au Kodak Theatre, où elle avait reçu
en 2002 l’Oscar de la meilleure actrice
pour A l’ombre de la haine de Marc Forster. Une reconnaissance définitive pour la
comédienne qui avait précédemment obtenu un Emy Award et un Golden Globe
pour son interprétation de Dorothy Dandridge, l’actrice noire des années 40, dans
le téléfilm homonyme de Martha Coolidge. Flanquée de son boyfriend canadien Gabriel Aubry, Halle Berry a même
versé quelques larmes en dévoilant
l’étoile à son nom. « Je suis si émotive,
que dès que j’ai vu cette foule de gens
et d’amis, je me suis mise à pleurer ! »
Quelques jours plus tôt, dans sa suite
d’un palace parisien, cette fille d’un
médecin et d’une infirmière nous
confiait qu’elle rêvait de faire carrière
dans… le journalisme. « Mais dès mon
premier article, à l’université, j’ai
compris que ça serait difficile ! » Et
"Boubou la stupide", comme ses copines l’avaient surnommée « parce que
je n’avais pas de chance en amour, je
tombais toujours sur des salauds »,
s’est découvert d’autres horizons en
quittant Cleveland pour Chicago. « J’ai
commencé une carrière de mannequin et j’ai pris des cours de comédie,
avant de me lancer dans ce métier. »
Des apparitions dans les séries The living doll et Cote Ouest et dans Jungle
fever de Spike Lee décideront définitivement de son avenir.
C’était en 1991. Seize ans plus tard,
l’ancienne finaliste du concours Miss
Monde peut se targuer d’un solide palmarès. James Bond girl face à Pierce
Brosnan dans Meurs un autre jour de
Lee Tamahori, elle a figuré à l’affiche
Photo Barry WETCHER
[ Album
« Le mariage,
c’est fini
pour moi ! »,
affirme Halle Berry,
après avoir vécu
deux expériences
douloureuses
avec la star
du base-ball
David Justice
puis avec
le chanteur
Eric Benet.
des trois X-Men. Et conquis également
les réalisateurs français : Mathieu Kassovitz l’a dirigée dans Gothika, puis
Pitof en a fait sa Catwoman, inspirée
d’un célèbre "comics" américain. « Ce
film n’était pas aussi mauvais que ça.
Peut-être que les gens ne l’ont pas
compris. Mais j’ai adoré travailler
avec Pitof et j’ai appris énormément
de choses sur ce tournage », explique
Halle Berry, qui fête d’autres retrouvailles avec Dangereuse séduction de
James Foley, sorti ce mercredi dans les
salles.
En 1992, elle incarnait une strip-teaseuse dont Bruce Willis tentait de démasquer le meurtrier dans Le dernier
samaritain de Tony Scott. « A cette
époque, Bruce ne savait même pas
qui j’étais ! » Dans Dangereuse séduction, c’est elle qui essaie de mettre au
jour les activités criminelles du magnat
de la publicité que joue Bruce Willis.
« Après avoir lu le scénario et accepté
le rôle, les producteurs m’ont demandé d’aller le porter à Bruce… qui
est mon voisin de pallier. » Et l’exgros bras du cinéma US, qui redeviendra bientôt John McClane dans Die
Hard 4, ne s’est pas fait prier pour affronter la belle aux trois personnalités :
journaliste d’investigation, mais aussi
employée de son agence… et séductrice
sur internet.
Rowena Price, son personnage dans
Dangereuse séduction, y avance mas-
quée. Comme Halle Berry, parfois, dans
la vie. « La célébrité empêche toute
conversation normale. Quand je
parle avec des gens, j’ai l’impression
qu’ils connaissent tout de ma vie.
Alors il m’arrive d’aller anonymement dans des chats sur internet.
Mais quand je révèle mon identité, on
me dit : dégage, c’est pas toi ! » Bruce
Willis, lui, aura aussi du mal à découvrir qui se cache derrière Veronica, l’internaute qui n’a guère froid aux yeux
dans ce thriller psychologique aux ficelles souvent un peu grosses, mais qui
se rachète grâce à son renversement de
situation final. Et puis il y a Halle
Berry. « Rien que pour vos yeux »,
comme dirait James Bond.
[ Livres
Une lueur, les héros de Kébir M. Ammi et Salim Bachi ne la cherche
plus depuis longtemps déjà. Hargneux, teigneux, voire fous, ils ont
rendez-vous au bal des désemparés. Une vision grinçante du Maroc
et de l’Algérie contemporaine.
L
L’Orient
aux portes du désespoir
nuit, sombre nuit qui s’empare
des esprits, même des plus sains,
pour les mener à la dérive. La littérature orientale a souvent un goût de miel.
Le sourire masque les heurts de la vie. Ici,
la sucrerie recèlerait quelques pointes
amères. Les Douze contes de minuit (éditions Gallimard) de Salim Bachi penchent vers la folie. Le désespoir est partout, alors pourquoi continuer. Douze
nouvelles au cœur de Cyrtha, cité imaginaire, pourtant très inspirée de l’Algérie
contemporaine. On y croise "Le cousin",
par exemple, qui préfère à sa vie médiocre
se pencher sur celle de ses voisins, en lorgnant sur leurs fenêtres. Sans scrupule, il
profite de l’argent amassé en dealant pour
se payer une place au soleil. Les injures
fusent à la mesure de son agressivité. Sans
aucune ponctuation, Salim Bachi, l’auteur, crée un état d’urgence, comme pour
crier une détresse débarrassée de toutes les
conventions. Les paroles des uns se superposent à celles des autres sans césure,
A
7
compliquant parfois la lecture. Héros et
lecteur ne font plus qu’un, entourés par un
sentiment d’inconfort.
La petite fille sans larmes
Fdéla traverse le Maroc avec sa grandmère, Ma Zahra, une matrone qui lui enseigne que la vie se reçoit comme un
coup de fouet. En témoignent les
marques sur son corps. Il faut vivre tant
bien que mal, déjouer les pièges et ne jamais s’apitoyer. La gamine croyant innocemment rendre visite à un cousin, se retrouve en fait vendue à lui. Elle devient
la bonne, mal nourrie, essayant de refréner les idées saugrenues du fils, Selim :
dévaler un escalier les yeux fermés, s’enfuir vers Casablanca. Condamnée à perpétuité à être une fille, condition trop injuste, elle s’imagine un autre sort. « Je
suis un garçon, me dis-je peu après. Un
garçon. Un vrai. Cette apparence est
trompeuse. Il ne faut pas y croire. C’est
un masque. » Elle tremble à l’idée de frô-
ler le mariage avec un vieil usurier. « Tu
seras une jeune veuve ! Tu feras semblant de pleurer ! On ne t’en demandera
pas plus. Mais à toi la vie, ma chérie ! »
Les plaisirs sont rares, contempler
l’ombre qui mange progressivement son
corps à l’avancée du soleil, s’enivrer des
parfums des élégantes durant la fête du
Ramadan…
Kebir M. Ammi déroule la vie de Fdéla,
sur fond d’histoire marocaine, de l’occupation française en 1912 aux émeutes de
Fès en 1990, dans Le ciel sans détours
(éditions Gallimard). Une multitude de
petits chapitres sous forme de confessions
de la vieille dame à un journaliste. « Attends. Je voudrais reprendre un peu mon
souffle. » Pour l’honneur et la survie,
celle qu’on a jetée dans la vie par son versant le plus rude, garde une naïveté salvatrice. Là où la dignité résonne, le larmoiement n’existe pas.
Claire PIERETTI
Pulps en poche
Parue dans les années 50 aux États-Unis,
la collection "Hard Case Crime", le must
du roman noir populaire anglo-saxon débarque
en France aux éditions J’ai Lu.
A ne pas manquer !
L
ES "pulps" sont ces fascicules bon marché aux
couvertures colorées et
aguicheuses nés aux USA il y
a un demi-siècle. "Hard Case
Crime" est à l’origine une édition américaine qui depuis
2004, a publié une quarantaine
de romans noirs de célèbres
précurseurs (Ed McBain, Mickey Spillane) et d’auteurs
contemporains (Lawrence
Block, Donald Westlake, Ken
Bruen, David Goodis, Stephen
King). Polar, SF, romans
d’aventure, d’espionnage ou
romance, ils ont notamment
inspiré Pulp Fiction de Tarantino et reviennent désormais à
la mode.
En France, la collection démarre sur trois titres qui ne
suivent pas l’ordre américain.
Ed McBain ouvre le bal avec
Le caniveau pour tombe
(1958), une classique histoire
de détective qui plante l’ambiance de la série. Le second
tome, Un dernier pour la
route (2006) de Max Allan
Collins nous invite à suivre le
dernier contrat d’un tueur à
gages. L’auteur est connu
pour ses novélisations de la
série TV Les Experts et a déjà
signé de nombreux titres à la
Série Noire. Enfin, La
confession de Domenic
Stansberry, prix Allan Edgar
Poe 2004, est un terrible cauchemar qui a scandalisé ses
premiers lecteurs par sa noirceur.
"100 % noir, 100 % inédit",
clame la couverture. "Hard
Case Crime" est une heureuse
initiative, dont il faut cependant pointer un défaut majeur. Là où les ouvrages originaux offrent d’authentiques
couvertures pulps en couleur,
le directeur de collection
français a choisi une hideuse
mise en page sur fond fluorescent rose, orange et bleu, à
peine illustrée par de tristes
dessins ébauchés ! Pulps
noirs en poches fluos : une
véritable injure visuelle sur
les linéaires des librairies,
mais attention, le monstre
cache un trésor à ne pas
rater ! On pourra patienter
entre les titres avec la revue
Black Mamba, unique périodique pulp français, qui
compte déjà cinq numéros
aux éditions Céléphaïs.
Jean-Baptiste DEFAUT