Numéro 1279 - Jardin de Nantes

Transcription

Numéro 1279 - Jardin de Nantes
Thème : Végétal
EN 2 MOTS
-
Saints de glace
Si anciens et jeunes jardiniers
réussisent à situer les dates des
saints de glace aux 11, 12, 13 et 14
mai, soit respectivement St Mamert,
St Pancrace, St Servais, St Boniface
ou St Pacôme, il en existe d'autres
moins connus comme St Georges le
23 avril et St Célestin le 19 mai. Pourquoi les rendons nous responsables
des tardives gelées printanières ?
Voici peut-être une explication.
Les gelées printanières existaient
bien sûr au temps des romains et
ces derniers, pour se concilier les faveurs des dieux, célébraient diverses
divisitées : Vinilia, Floralia.. L'église
voulut remplacer ces rites païens et
proposa d'implorer les saints du moment d'apporter leur aide. De ce fait,
ce sont eux qui maintenant sont tenus pour responsables des coups de
froid d'avril et mai.
St Pascal, fêté le 17 mai n'est pas
un saint de glace... il ne manquerait plus que celà!
D
PASCAL JOSSE
CASTORS
(OU CASTORS DU LAUNAY), L’ARBRE LE PLUS CONNU EST LE PLATANE DE LA PLACE DE LA PA TIENCE. SA STATURE IMPOSANTE
LE FAIT REMARQUER DE LOIN.
ANS LA CITÉ DES
DE L ’E RDRE
Un autre arbre, quelques dizaines de
mètres plus loin, est beaucoup plus
discret mais mérite cependant toute
notre attention. Il s’agit d’un vieux
tronc de saule, récemment élagué
par les « Castors » qui en sont propriétaires, sur le bord d’un étang alimenté par le ruisseau de la
Bretonnière (celui qui se jette dans
l’Erdre au parc de la Beaujoire).
SEVEINFO
seveinfo
Date : 12 avril 2004
-
N° 1279
www.jardins.nantes.fr
Le saule
de
Napoleon
Dans une coupure de presse des
années 1950 trouvée par André
Guéry et évoquant le platane et la
construction de la cité, il est fait
allusion à un « Saule de Napoléon », inclus lui aussi dans l’ancienne propriété du Launay. Il ne
peut s’agir que de ce vieux tronc
de saule pleureur, en pleine dégénérescence, mais qui parvient
tous les ans à produire quelques
feuilles… Et pourquoi « Saule de
Napoléon » ? L’un ou l’autre de nos
empereurs serait-il venu ici
s’adonner à l’arboriculture et
aurait planté un arbre ? Cela paraît peu probable. A quel Napoléon
rattacher ce saule ? S’il s’agissait
de Napoléon III, on en trouverait
fatalement trace dans les archives de la Société Nantaise d’Horticulture… Alors, Napoléon 1er ? Il
n’avait pas beaucoup de temps à
consacrer à l’horticulture, il laissait ça à Joséphine !
Je me suis alors souvenu de l’époque où je pratiquais la botanique
à Dijon, au jardin de l’Arquebuse.
Lorsque nous taillions la petite
collection de saules, au bord du
Raines, le contremaître nous disait toujours de prendre soin du
saule de Napoléon qui provenait
d’une bouture prélevée à l’île de
Sainte Hélène par un admirateur
mourra dans l’année. En Russie,
mettre en terre un saule équivaut
à creuser sa propre tombe. Le
chagrin que symbolise le saule
pleureur est souvent celui des
amoureux éconduits car l’arbre «
prend » la souffrance de la personne qui en porte un rameau.
Toute cette symbolique explique
que des nostalgiques de l’empereur aient planté des saules pleureurs. D’autant plus que les
grands poètes du 19 ème siècle
l’évoquent souvent :
Napoléon alla s’endormir sous le saule.
Et les peuples alors, de l’un à l’autre pôle,
Oubliant le tyran, s’éprirent du héros.
Victor Hugo
Tout n’est-il pas terminé avec Napoléon ? ... Il dort à jamais,
comme un ermite ou comme un paria, sous un saule, dans un étroit
vallon entouré de rochers ...
Chateaubriant
de l’empereur… Aucune pancarte
ne signalait cet arbre, mais la tradition orale perpétuait l’information, de jardinier en jardinier. La
vieille souche a maintenant disparu et je ne sais pas si mes anciens collègues ont prélevé des boutures sur le moribond avant sa mort !
La magie d’Internet permet maintenant de faire des recherches qui
auraient pris auparavant des heures. J’ai pu ainsi découvrir que si
le saule pleureur était très apprécié des romantiques car il évoquait la tristesse par son port, il
était pour les chinois un arbre
d’immortalité, de sagesse, d’inspiration spirituelle, de communication avec le ciel, et pour les tibétains l’arbre de vie. Selon certaines traditions, ses branches
tombent vers la terre depuis qu’il
a caché la Vierge et l’enfant Jésus dans leur fuite en Egypte. Selon une légende de Hongrie et de
Transylvanie, Jésus poursuivi se
reposa un moment sous un saule
pleureur car il est « l’arbre le plus
doux, il n’a aucune branche piquante. Sitôt Notre Seigneur assis, l’arbre se pencha sur lui, ses
branches ne se redressèrent plus
depuis ». On dit aussi qu’il pleure
depuis que « les verges ont frappé
Jésus ». En Belgique, celui qui
sans être jardinier en plante un
L’iconographie de l’époque représente toujours un arbre pleureur
au-dessus de la tombe de la vallée de Longwood, dans l’île de
Sainte Hélène, où fut enterré Napoléon de 1821 à 1840, date à laquelle ses restes furent transférés aux Invalides, à Paris. S’agitil vraiment d’un saule pleureur ?
Salix babylonica ne pousse pas
spontanément dans cette région
du globe. S’agit-il plutôt d’un mimosa pleureur (Acacia pendula),
comme le suggère Jacques
Brosse (Larousse des arbres et
des arbustes), ou bien un admirateur aurait-il rapporté d’Europe
à Sainte Hélène un pied de
saule ? Toujours est-il qu’au
19 ème siècle, on a
planté un
peu partout
en
France
des boutures de saules pleureurs provenant
prétendument du
tombeau
de l’empereur à
Sainte
Hélène.
Dans les
archives de certains musées
consacrés à Napoléon on trouve
même des fragments végétaux provenant du saule de Sainte Hélène… (Musée du Palais princier
– Monaco). L’abbé Coquereaud,
aumonier de la «Belle Poule» qui
rapporta les cendres de Napoléon
en France, distribua des boîtessouvenirs contenant des « Fragments du vieux saule dont les
branches servirent à descendre le
cercueil de l’Empereur dans la
tombe, id. du jeune saule planté
dans la vallée du tombeau »…
La légende du saule napoléonien
se poursuivit longtemps, puisque
Eugénie, la femme de Napoléon III,
alla planter un saule et un lierre
sur la tombe de son fils Louis-Napoléon, tué par les zoulous en
1879.
Le saule au bord du ruisseau de la
Bretonnière fait donc bien partie
de la légende napoléonienne. Un
habitant de ce quartier était sans
doute nostalgique de cet épisode de
l’histoire de France.
Mais maintenant d’autres questions me viennent :
Y aurait-il un lien avec le nantais
Cambronne ?
Qui pourrait me dire si il y a eu
un saule dans la propriété sébastiennaise du général d’Empire ?
Pourquoi n’y a-t-il pas de saule
pleureur dans le square Cambronne ?
Et puis m…, j’en ai assez de me
poser toutes ces questions !
BENOÎT LESNE
SEVEINFO
seveinfo

Documents pareils