Messe du jour Noel - fr Jean-Claude Lavigne Télécharger

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Messe du jour Noel - fr Jean-Claude Lavigne Télécharger
Mardi 25 décembre 2012 – Couvent de l’Annonciation
Messe du jour de Noël
La gloire et la beauté
Dostoïevski dans son roman l'Idiot fait dire au prince Michtine : "La beauté sauvera le
monde" et c'est vers cela que nous conduisent les textes du jour. La beauté et la gloire, qui se
reflètent dans l'enfant-Dieu sont les voies du salut, à nous offertes en ce matin de Noël.
Beauté des messagers de la Bonne Nouvelle du salut qui courent dans les montagnes car le
bonheur des habitants de Jérusalem n'attend pas. Gloire de l’héritier de Dieu qui est le reflet
resplendissant de son Père et gloire du Verbe qui vient du Père. Gloire et beauté, lumière,
grâce et vérité.
En ce matin tout semble beau. Les ruines elles-mêmes crient de joie, les anges se prosternent
et tous ont part à la plénitude. Oui ce matin de Noël est lumineusement marqué par la beauté
et la gloire... et en même temps, à travers notre réalisme, le tableau qui se donne à voir ne
semble pas mériter de tels exclamations et enthousiasmes. Un couple dans une auberge banale
ou une étable, un enfant nouveau-né normal sans signe particulier, dans un village sans
réputation, avec comme compagnons d'infortune : des moutons, des bergers.... Rien de
glamour, rien pour faire un video clip branché ou pour exciter des blogueurs. Tout comme ce
matin à travers notre monde si nous avons écouté les informations.
Ce contraste entre l'effet de réel et les textes proposés pour la messe du jour est immense. Si
grand, qu'il est peut-être le point de départ pour comprendre ce que peut être Noël pour nous,
maintenant et ici.
Assurément, ce qui se passe à Bethléem n'est pas une chute par rapport à la beauté céleste.
L'enfant de Noël n'est pas une déchéance de Dieu, une « miniature » de Dieu ou un petit qui
deviendra Dieu plus tard quand il sera grand. Cet enfant est la manière dont Dieu nous parle :
il est le Verbe, langage du Dieu immense, une expression parfaite de Dieu le Très Beau.
L'enfant de Noël n'est pas un symbole qu'il faudrait décoder pour découvrir la gloire de Dieu
par delà le réel. Il est Dieu-le-Fils par qui le monde a été créé, la Lumière première et
véritable. Ce qui se passe à Bethléem est donc la vraie beauté de Dieu et sa gloire, mais nous
avons peine à l’accepter tellement cela est simple.
Dieu est beau et glorieux parce qu'il s'est fait petit enfant et qu’un nouveau né est toujours une
merveille. A la fois petit et appelé à grandir dans une histoire, avec l'avenir devant lui comme
un combat à gagner et en même temps celui qui est introduit dans le monde, qui est engendré
par un autre (le Père), celui qui se reçoit des autres : sa famille. Fragilité et passivité sont les
caractéristiques de la beauté et de la gloire divines. Ne serait-ce pas un des enseignements du
message de Noël a contrario des règles de notre temps ? Voir Dieu non pas dans la puissance
et le clinquant, le buzz ou le nombre d'amis sur Facebook mais dans ce qui entre dans la vie
avec discrétion, invisibilité, précarité… non à cause d’une idéologie minimaliste, d’un small
is beautiful, mais parce que c’est là que sont la gloire et la beauté de Dieu. Il nous faut donc, à
Noël, tenter de quitter la fascination du succès pour regarder ailleurs et autrement. Dieu,
personne ne l'a jamais vu ; le Fils unique, qui est dans le sein du Père, c'est lui qui a conduit à
le connaître or ce fils unique est un enfant vagissant et il est pourtant notre Maitre et notre
guide.
Noël est une invitation à voir le monde à partir et à hauteur de l’enfant de la crèche et de
recevoir ainsi le pouvoir de devenir enfants de Dieu. Ce qui signifie être capable de s’étonner
de tout, de questionner tout, de vouloir vivre goulument, d’expérimenter le monde afin qu’il
soit plus beau et de croire que tout est possible quand il s’agit d’aimer et d’être aimé. Avec des
yeux pleins de lumière. Cela signifie aussi pleurer de rage quand le mal résiste et que les
méchants gagnent au jeu de la vie, hurler quand l’amour n’est pas donné ou partagé, crier
quand quelqu’un est ignoré, méprisé ou simplement déconsidéré. Etre enfant de Dieu, c’est
aussi désirer que Jésus revienne dans la Gloire, que la fraternité soit plus présente que
l’indifférence et vouloir que tout soit habillé de beauté. C’est s’endormir de bonheur quand le
cœur a trouvé la paix parce que l’amour nous a enveloppés. Etre bien avec Jésus pour ami.
Pas difficile d’être cet enfant là. Nous l’avons été et nous avons peut-être donné la vie à de
tels enfants. Noël n’est pas un souvenir nostalgique de cette enfance mais le rappel par Dieu
qu’il est présent quand nous faisons le choix de relire nos vies, nos relations, nos prises de
responsabilité à partir de l’Enfant et, qu’avec ses yeux à lui, nous fassions l’expérience que la
beauté et la gloire sont déjà des mises en déroute de la mort et l’aube de la vraie vie.
Alors Gloire à Dieu.
fr Jean-Claude Lavigne, op