Composition : les relations internationales de 1945 à 1975

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Composition : les relations internationales de 1945 à 1975
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Corrigé Bac blanc du 16/01/2007 [MB]
Composition : les relations internationales de 1945 à 1975
INTRODUCTION (Préambule) : A bord du cuirassé USS Missouri
ancré en baie de Tokyo le 2 septembre 1945, lorsque le général américain Douglas Mac Arthur invita le général soviétique Kuzma S. Derevyanko à signer l'acte de capitulation de l'Empire du Japon, le monde assista à la fin de l'ordre international né en 1919 au Traité de Versailles. De facto1, il assistait également à la naissance d'un ordre nouveau : la puissance aéro­navale américaine désormais seule au monde dans ce domaine, étalant ses 125 porte­avions et ses 1 000 navires de combat, paraphait un document officiel avec un représentant de « l'Armée Rouge » forgée par l'Union des Républiques Socialistes Soviétiques (URSS), force terrestre humaine et mécanique de 380 divisions, sans équivalent dans l'Histoire et vainqueur de la « Grande Guerre Patriotique » après quatre années de lutte mais qui n'avait combattu l'armée nippone que pendant cinq jours. Les relations internationales seraient donc nécessairement dominées par celles de ces deux « superpuissances », alliées depuis 1941 mais placées devant le paradoxe de la reconstruction commune d'un monde en partie dévasté tout en gérant leurs propres intérêts.
PROBLEMATIQUE : comment la bipolarité amorcée par la fin de la Seconde Guerre Mondiale devint­elle la substance des relations internationales de 1945 à 1975 ?
PLAN : 1 De l'alliance à la « Guerre Froide » : 1945­1953
2 L'équilibre de la terreur : 1953­1964
3 La lente émergence d'un monde multipolaire : 1964­1975
1. De l'alliance à la « Guerre Froide » : 1945­1953
1.1. La gestion de l'immédiat après­guerre en 1945 et 1946
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La réorganisation commune du territoire européen selon les conférences de Yalta et Potsdam (février et juillet 1945)
Le jugement commun des criminels de guerre allemands à Nuremberg de novembre 1945 à octobre 1946; puis, celui des criminels de guerre japonais à Tokyo de juin 1946 à novembre 19482
Mais déjà des intérêts contradictoires poussaient à la rupture de l'alliance, annoncée par le discours de Sir Winston Churchill à Fulton (mars 1946)3
1.2. 1947 : la rupture de l'alliance et le début de la « Guerre Froide »
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L'attitude des Soviétiques en Europe de l'est et leur soutien aux rebelles communistes grecs et 1 Expression latine signifiant « de fait »
2 Le procès fut mené essentiellement par les puissances anglo­saxonnes, assistées de juges indiens et philippins.
3 Resté célèbre pour l'expression iron curtain (rideau de fer) employée par Churchill
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chinois provoquèrent une réaction majeure américaine : l'énoncé de la doctrine du containment (endiguement) par le Président des Etats­Unis Harry S. Truman (mars 1947)
Le plan Marshall (juin 1947) de reconstruction de l'Europe fut proposé à tous les pays européens, y compris l'URSS mais fut rejeté par cette dernière La réponse idéologique soviétique à la doctrine de Truman : la doctrine Jdanov, suivie de la mise en place du Kominform (octobre et novembre 1947). Le but était identique : saper la légitimité de l'adversaire à l'abri d'un « bloc » idéologiquement uni
1.3. Un monde bipolaire organisé en « blocs », marqué par des conflits indirects entre les deux superpuissances
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La logique d'organisation du « bloc de l'Est » : création de « démocraties populaires » par « la tactique du salami » ou par coup de pouce du destin4 (exemple : le « coup » de Prague en février 1948). Elle faisait face à la logique d'organisation du « bloc de l'Ouest » : la « pactomanie »5
La première crise de Berlin (juin 1948 à juin 1949) : premier conflit typique de la « Guerre Froide » en Europe qui aboutit à la séparation de l'Allemagne en deux Etats de part et d'autre du « rideau de fer »
la guerre de Corée (juin 1950 à juillet 1953) : Staline utilisa un dictateur à son image ; les Etats­Unis intervinrent sous le drapeau de l'Organisation des Nations­Unies (ONU).6
2. L'équilibre de la terreur : 1953­1964
2.1. la « coexistence pacifique » : un renforcement de fait de la logique bipolaire
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la mort de Staline le 5 mars 1953 suivi du XXe Congrès du Parti Communiste soviétique en février 1956 atténuèrent la tension de la « Guerre Froide » mais sans y mettre fin en inaugurant l'ère de la « coexistence pacifique ». Le pacte de Varsovie signé en 1955 répondit à l'entrée de la République Fédérale d'Allemagne dans l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN)
Nikita S. Khrouchtchev renforça implicitement la logique bipolaire en refusant l'émancipation hongroise (octobre 1956), en ré­intégrant la Yougoslavie du maréchal Tito dans « l'orthodoxie » marxiste­léniniste et en parvenant à une entente tacite mais réelle avec les Etats­Unis pour régler la crise de Suez au détriment de la France et du Royaume­Uni (octobre 1956)7
Cependant, ce « dégel » demeurait fragile : crise de l'avion espion Lockheed U­2 en 1960 et surtout construction du « Mur de Berlin » en août 1961.
4 La guerre civile en Chine tourna à l'avantage des communistes de Mao Zedong en octobre 1949 alors qu'elle échoua en Grêce.
5 Attribuée au Secrétaire d'Etat américain John Foster Dulles dès 1949, elle aboutit par exemple à la création de l'OTAN
6 Inversement, les deux superpuissances n'intervinrent pas lors de la 1ere guerre israélo­arabe de 1948­1949 ou plus exactement, l'URSS autorisa la Tchécoslovaquie à livrer des armes aux combattants juifs ce qui décida de leur victoire
7 Cette crise symbolisa l'écroulement définitif des vielles puissances européennes du XIXem siècle, désormais incapables de jouer dans les relations internationales un autre rôle que celui de puissance secondaire régionale
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2.2. Le paroxysme de la « Guerre Froide » ●
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La rivalité nucléaire, commencée en 1949 avec la bombe A soviétique, se transforma en équilibre de la terreur nucléaire avec l'invention de la bombe H (thermonucléaire) en 1952 (Etats­Unis) et 1953 (URSS) accompagnée de la mise au point de nouveaux vecteurs sous forme de missiles ballistiques8 (théorie des massive retaliations ou « représailles massives » de John Foster Dulles)
La course à l'espace devint alors un enjeu stratégique et idéologique majeur : une nouvelle forme de conflit indirect où les Soviétiques restèrent les plus forts jusqu'en 1966 (date de la mort de leur meilleur ingénieur, Sergueï Korolev)9
La compétition idéologique et économique devint même sportive, les deux superpuissances se disputant les médailles aux Jeux olympiques10
2.3. La crise de Cuba et ses conséquences immédiates ●
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L'île de Cuba devint un terrain d'affrontement par la prise de pouvoir de Fidel Castro en 1959 et l'échec américain pour le renverser (affaire de la baie des Cochons en avril 1961), ce qui précipita Fidel Castro dans une alliance avec l'URSS (alors que telle n'était pas forcément son intention en 1959)
Le règlement de la crise fut un échec pour les deux camps : les Etats­Unis obtinrent le retrait des missiles soviétiques mais démantelèrent leurs missiles installés en Turquie11 alors que Nikita S. Khrouchtchev sauva l'existence du régime castriste mais fut renversé par un complot interne lui reprochant sa « mollesse » en octobre 1964
La crise des missiles prouvait que l'équilibre de la terreur reposait sur le complexe du « M.A.D » (Mutually assured Destruction ou destruction mutuelle assurée) et qu'il était urgent d'améliorer les techniques de communication entre les deux Superpuissances (mise au point du « téléphone rouge » dès 1963)
3. La lente émergence d'un monde multipolaire : 1964­
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3.1. La guerre du Vietnam et ses conséquences ●
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L'intervention américaine procédait de la plus classique application du containment, adaptée au contexte de l'Asie du Sud­est12 mais elle suscita dans l'opinion publique internationale une vive opposition
Cependant, l'aide soviétique aux Vietcongs et la rupture idéologique entre l'URSS et la République Populaire de Chine (RPC) favorisèrent le rapprochement sino­américain 8 Les deux camps avaient en fait profité des recherches allemandes de 1939­1945 sur les missiles V1 puis V2
9 En avril 1957, le survol des Etats­Unis par Spoutnik 1 fut ressenti par une partie de l'opinion publique américaine comme la fin de l'invulnérabilité du « Sanctuaire », c'est à dire du territoire américain qui n' avait jamais été sérieusement menacé par les Allemands ou les Japonais
10 Jamais cependant les Soviétiques ne parvinrent à dépasser les Américains (sauf à Moscou en 1980 car les Etats­Ubis n'étaient pas présents) ; seule l'Allemagne y était parvenu en... 1936 !
11 Le Président John F. Kennedy ressortit pourtant de cette crise avec l'image d'un négociateur modéré et habile !!
12 La théorie des « dominos » formulée par le Président des Etats­Unis Lyndon B. Johnson
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(reconnaissance de la RPC par les Etats­Unis notamment grâce au voyage du Président américain Richard Nixon à Pékin en 1971) et l'apparition d'un pôle régional chinois, contestant la logique bipolaire L'URSS de Leonid Brejnev proposa alors en juin 1973 un « condominium » américano­
soviétique dans l'urgence de faire face au « modèle » chinois qui menaçait sa suprématie dans le monde communiste ainsi que son influence dans les pays du Tiers­Monde
3.2. Le Tiers­Monde et l'Europe : faiblesses et hétérogénéité
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Dès 1948, le maréchal Tito avait lancé le concept de « non­alignement », très vite rejoint par l'Union Indienne de Nehru
Dans la logique de la « Guerre Froide », les nouveaux pays indépendants de ce que l'on appelait déjà le « Tiers­Monde »13choisirent soit le modèle américain soit une approche marxiste comme voie de développement ou bien certains furent tentés par le « non­
alignement »
La construction européenne amorcée en 1950 ne se traduisit pas véritablement en un pôle politiquement capable d'intervenir dans les relations internationales; cependant, la politique du général Charles de Gaulle en France ainsi que l'Ostpolitik du Chancelier ouest­allemand Willy Brandt contribuèrent à la normalisation des relations avec le « bloc » de l'est et trouvèrent un aboutissement apparent avec la signature de l'Acte final de la conférence de Helsinki en 1975
3.3. Le regain de la puissance soviétique ●
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L'URSS profita de la défaite américaine au Vietnam en récupérant un nouvel allié en Asie pour contrer l'influence grandissante de la RPC
L'URSS profita aussi de la « détente » initiée par la signature des accords SALT 1 (Srategic Arms Limitation Talks soit « discussions sur la limitation des armements stratégiques ») par les voyages croisés de Richard Nixon à Moscou et de Leonid Brejnev à Washington entre 1971 et 1972
Enfin, l'URSS démontra la vigueur de son influence mondiale en mettant au point une véritable logique de points d'appui et de bases pour la nouvelle flotte crée et commandée par l'amiral Gorshkov
Lorsque les derniers ressortissants occidentaux évacuèrent en toute hâte l'ambassade américaine à Saïgon en avril 1975, une partie de l'opinion publique mondiale crut en un déclin irréversible de la puissance américaine. Au même instant, l'acte final de la conférence de Helsinki semblait montrer une mansuétude nouvelle de l'URSS vis à vis du continent européen, comme une manifestation bienfaisante de sa puissance renouvelée par la remarquable flotte de l'amiral Gorshkov et le réseau mondial de ses bases et points d'appui fournis généreusement par de nouvelles nations africaines et asiatiques indépendantes ayant choisi la voie soviétique vers le développement. Cependant, ces deux impressions devaient se révéler fausses : l'URSS perdit les derniers vestiges de son auréole libératrice en envahissant l'Afghanistan le 25 décembre 1979 alors que dès 1981, le Président des Etats­Unis Ronald Reagan força l'URSS à une course aux armements qui acheva une économie soviétique déjà in articulo mortis14. La timide émergence de pôles secondaires dans les relations internationales depuis 1964 se retrouvait de nouveau masquée par les derniers soubresauts de la « Guerre froide ».
13 Expression forgée par le fameux économiste français Alfred Sauvy dès 1953
14 Expression latine signifiant « au seuil de la mort »