MYLÈNE FARMER MYLÈNE FARMER
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MYLÈNE FARMER MYLÈNE FARMER
Paroles, Paroles... MYLÈNE FARMER Plusieurs nouvelles chanteuses au succès emblématique sont P apparues au cours des années 80 : Vanessa Paradis, Patricia Kaas, Mylène Farmer. Mais c’est cette dernière qui a suscité la plus M forte fascination, auprès des filles comme des garçons, et spécialement chez les collectionneurs, gatés par la démultiplication de sa discographie. La L spécificité de son aura tient surtout à son image, tourmentée et fantasmagorique, transmise à travers des clips hauts en couleur, des concerts magiques et des textes assez uniques, rarement lisses, sur lesquels il est bon de s’épancher. E n effet les textes si personnels, ciselés avec son pygmalion Laurent Boutonnat, sont décisifs dans l’incroyable impact généré par Mylène Farmer. Ils ne sont pas sans évoquer un problématique univers mental et sensuel qui va de la psychanalyse de Lacan à la poésie hermétique de Jouve, Reverdy ou Supervielle. Son timbre vocal, fragile, si particulier et immédiatement reconnaissable, accroche dès la première audition, mettant en valeur des paroles ambiguës ou aux jeux de mots savants. Son aspect provocateur cache une quête d’identité, un désir d’apaisement sexuel traduit en vers délicats. On frôle la psychanalyse. Son moi intérieur va au-delà de la recherche de l’âmesœur. Une approche toute nouvelle en chanson. Aussi, après le fabuleux itinéraire de Mylène et la quête de ses disques rares (voir Juke Box Magazine N°130, 141, 170, 179, 200), il est bon d’analyser les textes de ses chansons. Deux livres récents s’y sont par ailleurs attachés, « La Part D’Ombre » et « L’Ange Rouge ». MAMAN A TORT En mars 1984, son premier disque, « Maman A Tort » (SP RCA PB 61298), ouvre le bal. Cette déclaration choquante, en forme d’inventaire numérique, révèle aussitôt l’univers de Mylène Farmer : « Un, maman a tort/ Deux, c’est beau l’amour/ Trois, l’infirmière pleure/ Quatre, je l’aime... J’aime ce qu’on m’interdit/ Les plaisirs impolis/ J’aime quand elle me sourit/ J’aime l’infirmière maman... Un, l’infirmière chante/ Deux, ça m’fait des choses/ Trois comme l’alouette/ Quatre j’ai peur... » Un texte singulier, entre plaisir et peur du défendu, qui s’infiltre incidemment dans votre tête et fait tout le charme de la mélodie. En février 1985 elle poursuit avec « On Est Tous Des Imbéciles » (SP RCA PB 61556) : « C’est sûrement pas être poète/ Que d’chagriner la p’tite fille/ Assise au bord du Styx... Que les larmes me viennent à l’œil/ Et toi connard ça t’fait rire... On a dû s’gourrer de planète... On n’est pas loin d’ l’enfer... ». Cette foisci le côté morbide, suicidaire, prend le dessus et Mylène Farmer y reviendra souvent. En face B, « L’Annonciation » est encore plus explicite : « Il est entré dans mon lit... Sans même troubler la nuit/ En moi il a fait son lit... Dans mon sein je l’ai maudit/ Ce saint esprit... Une larme un frisson c’est l’heure.. Celle où seule on sent son cœur... Qui se gonfle de sang et meurt... Et moi je sais que Dieu est triste/ Car dans mon ventre/ Ça naît ça meurt... La vie pour moi c’est fini... Mon petit baigneur/ Sans toi je meurs. » L’attrait de la mort devient ainsi l’une de ses sources d’inspiration majeures. En septembre 1985, après avoir quitté RCA pour Polydor, Mylène Farmer, au verso du simple « Plus Grandir », enfonce le clou avec « Chloé » (SP Polydor 883 428) : « Y a Chloé qui s’est noyée... J’ai vu ses cheveux flotter... On aurait dit une fontaine/ Quand Chloé a crié/ Quand sa p’tite tête a cogné... Chloé ma moitié... Ton cœur petite sœur/ Va sans doute devenir fleur... Est-ce que tu joues ou tu meurs ?/ Adieu petite fée... Chloé, pourquoi t’es partie... » La disparition 7