Infection à Chlamydia trachomatis : quoi de neuf
Transcription
Infection à Chlamydia trachomatis : quoi de neuf
BACTÉRIOLOGIE Chlamydia trachomatis Infection à Chlamydia trachomatis : quoi de neuf ? B. DE BARBEYRAC1, O. PEUCHANT1, C. LE ROY1, M. CLERC1, L. IMOUNGA1, C. BÉBÉAR1 résumé Ces dernières années ont connu un certain nombre de changements importants concernant l’épidémiologie et le diagnostic des infections à Chlamydia trachomatis. Récemment modifiée, la nomenclature des actes de biologie médicale n’autorise le remboursement de la détection de C. trachomatis que par la recherche d’ADN ou d’ARN par amplification génique. Aujourd’hui, la plupart des techniques moléculaires détectent en « duplex » C. trachomatis et Neisseria gonorrhoeae, voire d’autres pathogènes responsables d’infections sexuellement transmissibles comme Mycoplasma genitalium. Mots clés : Chlamydia trachomatis, LGV, biologie moléculaire, épidémiologie. Ces dix dernières années ont été marquées par une progression régulière du nombre de diagnostics positifs d’infections à Chlamydia trachomatis aussi bien en Europe qu’en Amérique du Nord et par l’arrivée d’une épidémie de lymphogranulomatose vénérienne (LGV) rectale en Europe. Dans le même temps, les techniques de biologie moléculaire se sont généralisées, améliorant sensiblement les performances de sensibilité et spécificité de la détection. La nomenclature des actes de biologie médicale a été récemment modifiée pour s’adapter en partie à ces changements. Désormais, elle n’autorise le remboursement de la détection de C. trachomatis que par la recherche d’ADN ou d’ARN par amplification génique. La plupart des techniques d’amplification génique actuelles détectent en duplex C. trachomatis et Neisseria gonorrhoeae, voire d’autres pathogènes responsables d’infections sexuellement transmissibles (IST) comme Mycoplasma genitalium. II. - TAXONOMIE Dans la famille des Chlamydiaceae, la proposition d’Everett en 1999 de diviser le genre Chlamydia en deux genres, Chlamydia et Chlamydophila, est à l’heure actuelle abandonnée (1). La nouvelle taxonomie ne reconnaît qu’un seul genre, Chlamydia, et 9 espèces. C. trachomatis comprend 19 sérovars groupés en 2 biovars, trachoma et LGV. Le biovar trachoma comprend 15 sérovars : A, B, Ba et C (impliqués dans le trachome), D, Da, E, F, G, Ga, H, I, Ia, J et K (impliqués dans les infections oculaires et urogénitales). Le biovar LGV comprend 4 sérovars, L1, L2, L2a et L3. C. pneumoniae est isolé chez l’homme mais aussi le koala, la grenouille et le cheval. Suivant la spécificité d’hôte, les souches sont regroupées en trois biovars, TWAR, Koala et Equine. Le biovar TWAR est responsable d’infections respiratoires chez l’homme. Chlamydia psittaci, qui regroupe uniquement les souches aviaires, peut occasionnellement provoquer des pneumopathies sévères chez l’homme, en particulier chez les personnes travaillant dans la filière des canards mulards. Les autres espèces sont d’intérêt vétérinaire. C. muridarum comprend les souches isolées chez la souris et le hamster (ancien C. trachomatis biovar pneumonie de la souris). C. suis comprend les souches isolées du porc chez lequel elles sont responsables de conjonctivites, d’entérites et de 1 Centre National de Référence des Infections à chlamydiae, USC Infections humaines à mycoplasmes et chlamydiae, INRA et Univ. Bordeaux, France. - 33 - feuillets de Biologie VOL LIII N° 306 - MAI 2012 BACTÉRIOLOGIE Chlamydia trachomatis I. - INTRODUCTION pneumopathies. C. pecorum est isolé des mammifères sans spécificité d’hôte (ruminants, marsupiaux, et porcs). Les souches responsables d’avortements, les souches de chats et de cochon d’inde appartiennent respectivement à 3 espèces, C. abortus, C. felis et C. caviae. III. - ÉPIDÉMIOLOGIE ACTUELLE DES INFECTIONS À C. TRACHOMATIS BACTÉRIOLOGIE Chlamydia trachomatis L’infection à C. trachomatis est la plus fréquente des IST bactériennes rapportées en Europe et aux États-Unis. En 2009, 343 958 cas ont été rapportés dans 23 pays de l’Union européenne, correspondant à 185 cas/100 000 habitants, plus fréquemment chez la femme (217 cas/100 000) que chez l’homme (152/100 000) (http://www.ecdc.europa.eu). La véritable incidence de l’infection est probablement plus élevée. Les trois quarts sont rapportés chez les jeunes entre 15 et 24 ans. La tendance est à l’augmentation, reflétant une amélioration de la surveillance, des dépistages et des outils de détection. Aux États-Unis, entre 1997 et 2009, le nombre de cas est passé de 537 904 à 1 244 180 alors que le nombre d’infections à N. gonorrhoeae diminuait légèrement de 327 665 à 301 174. Comme en Europe, le taux d’infections à C. trachomatis en 2009 était plus élevé chez la femme (592,2/100 000) que chez l’homme (219,3/100 000) (http://www.avert.org/std-statistics-america.htm). En France, les résultats de l’enquête Natchla montrent que la prévalence chez les personnes âgées de 18 à 44 ans est de 1,4 % chez l’homme et de 1,6 % chez la femme. Cette prévalence est plus élevée chez les 18-29 ans (hommes : 2,5 % [IC 95 % : 1,2-5,0], femmes : 3,2 % [IC 95 % : 2,0 5,3]) (2). Le facteur de risque commun à tous les 18-29 ans est le fait d’avoir eu récemment un partenaire occasionnel. Les autres facteurs de risque identifiés pour les hommes sont le fait de résider en Île-de-France ou d’avoir eu récemment un nouveau partenaire ou des partenaires du même sexe, et pour les femmes d’avoir eu plus de 2 partenaires dans l’année et d’être non diplômée. Un fait notable est que la prévalence chez les femmes âgées de 25 à 29 ans ne diffère pas notablement de celle des femmes de 18 à 24 ans. De plus, dans le réseau de surveillance Rénachla, 20 % des cas sont identifiés chez des femmes entre 25 et 29 ans (3). Or, les recommandations de dépistage intéressent les femmes de moins de 25 ans, laissant de côté les femmes plus âgées. Ces résultats devraient inciter à revoir les recommandations de manière à inclure les femmes jusqu’à 30 ans. IV. - STRATÉGIES DE DÉPISTAGE Vu la gravité des complications de l’infection à C. trachomatis, des recommandations de dépistage chez les sujets asymptomatiques existent dans plusieurs pays. En France, l’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé (ANAES) considère qu’un dépistage systématique des infections uro-génitales à C. trachomatis est justifié dans les lieux de consultation à vocation de dépistage (centres de dépistage anonyme et gratuit, CDAG ; centres de dépistage et d’information des IST, CIDDIST), les centres de planifi- cation et d'éducation familiale CPEF et les centres d’orthogénie (4) chez les femmes de moins de 25 ans et les hommes de moins de 30 ans. En effet, les taux de prévalence dans ces centres sont de l’ordre de 10 %. Concernant les femmes enceintes, il n’existe aucune recommandation en France. Récemment, en 2011, nous avons fait une étude de prévalence des IST bactériennes chez les femmes enceintes, au moment de la recherche du streptocoque B en fin de grossesse. Nos résultats montrent une prévalence globale de 2,5 % sur plus de 1 000 femmes testées et de 7,9 % chez les femmes de 18 à 24 ans (résultats personnels). Cette prévalence élevée chez les femmes enceintes de moins de 25 ans plaide en faveur d’un dépistage dans cette population. Selon les recommandations, le diagnostic doit se faire par biologie moléculaire sur des auto-prélèvements, urine du 1er jet chez l’homme et auto-écouvillonnage vaginal (5, 6). Les écouvillons « flockés » sont à recommander car ils prélèvent et « déchargent » mieux que les écouvillons dacron ou alginate (7). L’objectif des programmes de dépistage est de réduire le risque de complications en identifiant les femmes infectées et en les traitant avant l’apparition des complications (prévention secondaire) et/ou en réduisant la transmission dans la population afin de diminuer le nombre de nouveaux cas (prévention primaire). L’efficacité du dépistage dépend en partie de la durée de l’infection au moment du dépistage et du nombre d’infections répétées. Les questions de savoir si le risque de complications est plus élevé après des infections répétées ou avec une infection persistante, et si le traitement précoce empêche le développement d’une immunité protectrice, restent posées. En effet, dans les pays qui ont organisé des programmes de dépistage dans les années 1980, on observe depuis le milieu des années 1990, une augmentation du nombre de cas. Brunham et al. ont fait l’hypothèse que le dépistage de l’infection, en raccourcissant la durée de l’infection, diminue la durée de l’immunité et augmente le risque d’infections répétées (8). Cette question de « l’immunité arrêtée » est débattue, d’autant que d’autres raisons peuvent expliquer cette augmentation du nombre de cas comme l’amélioration de la sensibilité des techniques de détection et l’augmentation du nombre de dépistage. Le rôle des infections répétées ou d’une infection persistante dans la survenue des complications n’est pas élucidé. Il est certain que les infections répétées sont fréquentes. Une étude récente chez des adolescentes montre que les infections répétées sont des recontaminations dans 84,2 % des cas, un échec de traitement dans 13,7 % des cas et une infection persistante sans traitement documenté dans seulement 2,2 % des cas (9). Cela pose les questions du suivi des partenaires (dépistage, traitement), et de l’efficacité du traitement recommandé. Une question critique est celle de la proportion de femmes infectées qui développent des complications. Aucune étude prospective ne permet de savoir combien d’infections ont entraîné une stérilité ou une GEU. Dans l’étude POPI, l’incidence des maladies inflammatoires pelviennes ou PID (pel- - 34 - feuillets de Biologie VOL LIII N° 306 - MAI 2012 Chlamydia trachomatis V. - RECOMMANDATIONS DE TRAITEMENT ET DE SUIVI Seuls les antibiotiques à forte pénétration cellulaire (tétracyclines, macrolides, fluoroquinolones, rifampicine) sont actifs sur C. trachomatis. L’étude de la sensibilité des souches isolées ne se fait pas en routine étant donné la lourdeur des techniques, le peu d’isolats cliniques et l’absence de résistance acquise sous traitement clairement identifiée. Cependant, la sélection de souches résistantes en présence d’antibiotiques in vitro a été décrite. Suivant les recommandations françaises (11) et européennes (12), le traitement de première intention des infections urogénitales non compliquées fait appel à l’azithromycine à la dose de 1g per os en une seule prise ou à la doxycycline 100 mg per os, 2 fois par jour, pendant 7 jours. L’azithromycine en dose unique, de par sa grande pénétration tissulaire, ses taux sériques bas et sa longue durée de vie, constitue l’antibiotique de choix en générant moins d’effets indésirables que la doxycycline, et en assurant une meilleure observance. Les alternatives thérapeutiques reposent sur l’érythromycine base (500 mg, 4 fois par jour pendant 7 jours), l’éthylsuccinate d’érythromycine (800 mg, 4 fois par jour pendant 7 jours), l’ofloxacine (300 mg, 2 fois par jour pendant 7 jours) ou la lévofloxacine (500 mg, une fois par jour pendant 7 jours). Pour les anorectites à C. trachomatis, un traitement à base de doxycyline est recommandé, d'une durée de 21 jours en cas de LGV et de 7 jours pour les souches non L. Il est indispensable de traiter parallèlement le(s) partenaire(s) et de conseiller d’avoir des relations sexuelles protégées pendant le traitement. Il est impératif de réaliser la recherche d’IST associées et de revoir le patient au 7ème jour (ou plus tôt en cas d’échec thérapeutique). Il n’y pas de recommandations particulières pour les patients infectés par le VIH. La description d’une persistance de l’infection après traitement dans 10 à 15 % des cas, et la possibilité de sélection in vitro de mutants résistants doit inciter à la vigilance. Deux types de contrôles sont préconisés, le contrôle post-traitement, à 5 semaines de la fin de celui-ci, et le contrôle de la recontamination éventuelle à 3 ou 6 mois. À défaut de pouvoir retester les personnes infectées dans ce délai court, il est recommandé de les suivre dans les 12 mois suivant le traitement initial (http://www.cdc.gov/std/treatment/2010) dans le but de dépister et de traiter les recontaminations éventuelles. VI. - LE POINT SUR LES ANO-RECTITES À C. TRACHOMATIS Depuis les premiers cas rapportés fin 2003 à Rotterdam, l’épidémie de LGV rectale à C. trachomatis s’est répandue dans toute l’Europe. La mise en place de la surveillance a commencé en France dès 2004 à Paris et s’est progressivement étendue sur toute la France. La création d’un réseau de surveillance des ano-rectites à C. trachomatis depuis 2010 permet de recueillir des données cliniques, comportementales et biologiques. Les laboratoires envoient au CNR des infections à chlamydiae leurs échantillons ano-rectaux positifs dès le jour de leur identification, accompagnés d’une fiche de résultats de laboratoire documentant les IST associées. Dès réception, le CNR effectue le typage par une méthode rapide de PCR en temps réel spécifique du sérovar L (13). Le résultat est faxé le jour même au laboratoire. Le clinicien reçoit le résultat par courrier avec une fiche de renseignements cliniques à renvoyer au CNR ainsi qu’une note d’information et une demande de consentement de recueil de données à faire signer par le patient. Les documents nécessaires au fonctionnement du réseau peuvent être consultés et imprimés à partir du site web du CNR, http://www.cnrchlamydiae.u-bordeaux2.fr/. De 2004 à juin 2011, le CNR a réalisé le typage de 1 781 échantillons ano-rectaux positifs à C. trachomatis, identifiant ainsi 1 145 cas de LGV (64,3 %), 550 cas d’ano-rectites à souches non-L (30,8 %) et 86 cas à souches qui n’ont pu être typées (4,8 %). La courbe épidémiologique des cas de LGV montre une nette progression entre 2004 et 2010, avec cependant une inflexion en 2009 (2004 : 102 cas, 2005 : 117, 2006 : 140, 2007 : 170, 2008 : 191, 2009 : 160, 2010 : 185). Les cas de LGV sont plus souvent identifiés à Paris (81 %) qu’en province (p < 10-5). Les ano-rectites à C. trachomatis touchent les hommes ayant des rapports avec les hommes (HSH) et ayant des partenaires occasionnels. Un seul cas féminin a été rapporté (14). Le caractère épidémique de l’infection semble être confirmé par le typage MLST des souches circulant en Europe et aux États-Unis. Il s’agit bien d’une souche clonale de type L2b, déjà présente dans les années 1980 à San Francisco et qui s’est répandue ces dix dernières années en Europe (15). En France, toutes les souches séquencées sont de type L2b. La LGV se distingue de l’ano-rectite à souche non-L par son caractère symptomatique (p < 10-7) et son association avec le VIH (p < 10-8). L’association avec d’autres IST, syphilis et gonocoque, est fréquente, respectivement 44 % et 24 %, mais non statistiquement différente entre les deux populations infectées à souche L ou non-L. On observe également une augmentation du nombre de cas d’ano-rectites à souches non-L entre 2004 (26 cas) et 2010 (103 cas). L’étude de la répartition des sérovars montre que les sérovars D (35,2 %), G (29,5 %) - 35 - feuillets de Biologie VOL LIII N° 306 - MAI 2012 BACTÉRIOLOGIE Chlamydia trachomatis vic inflammatory disease) était de 1,3 % dans le groupe dépisté-traité et 1,9 % dans le groupe contrôle. Parmi les femmes ayant un test positif à C. trachomatis, 9,7 % (7/74) des femmes du groupe contrôle ont présenté une PID contre seulement 1,6 % (1/63) dans le groupe traité (10). Ceci tend à démontrer l’importance du dépistage. Cependant, la majorité des PID était survenue chez des patientes négatives lors du dépistage (30/38), traduisant une incidence élevée d’infections dans l’intervalle de temps séparant le dépistage de l’apparition de la PID, d’où l’importance de la répétition des dépistages. Les considérations éthiques limitent la durée de ces études. De plus, les complications sont jugées sur l’apparition d’une PID, cliniquement mal définie, et ne prennent pas en compte les complications à distance que sont la stérilité et les GEU. et J (17,3 %) sont les plus fréquents alors que le sérovar E, majoritaire dans les prélèvements génitaux, ne représente que 10,3 % des ano-rectites (16). Le typage régulier de souches génitales montre que la LGV ne s’est pas, pour l’instant, disséminée dans la population générale. La LGV reste essentiellement ano-rectale, seulement 32 cas de LGV génitales avec ulcération et adénopathie inguinale dont un cas d’arthrite réactionnelle (17), ont été identifiés. La surveillance des ano-rectites à C. trachomatis a permis d’identifier plusieurs cas de récidive sur 5 à 6 mois, montrant que cette infection ne protège pas des recontaminations. De plus, une amorce de changement dans le profil des individus semble se dessiner en 2010 en France. En effet, le nombre d’individus présentant une LGV et qui sont séropositifs pour le VIH diminue et n’est plus que de 82 %. Ceci pose la question de la prise de risque des HSH séronégatifs pour le VIH. VII. - ACTUALITÉS SUR LES MÉTHODES DE DIAGNOSTIC A) Diagnostic direct Les tests de biologie moléculaire avec amplification génique ont nettement amélioré la qualité des résultats en termes de sensibilité et de spécificité, et doivent remplacer toutes les autres techniques (culture cellulaire, tests antigéniques, hybridation moléculaire sans amplification). La nomenclature des actes de biologie médicale vient d’être modifiée en ce sens et n’autorise le remboursement de la détection de C. trachomatis que par la recherche d’ADN ou d’ARN par amplification génique in vitro sur tout type d’échantillon à partir de sites possiblement infectés (JO Décret du 5 octobre 2011). BACTÉRIOLOGIE Chlamydia trachomatis Toutes ces techniques d’amplification ont une excellente spécificité et sensibilité, ce qui les autorise, à la différence des autres techniques (excepté la culture) à être utilisées dans les échantillons pluri-microbiens (rectum, vagin, pharynx) et dans des échantillons pauci-microbiens comme peuvent l’être les auto-prélèvements. Les échantillons prélevés en milieu de transport spécifique peuvent être conservés à +4°C, voire à température ambiante pendant moins d'une semaine. Pour un délai supérieur, ils doivent être maintenus à -20°C. De nombreux systèmes de détection de C. trachomatis par amplification génique sont disponibles sur le marché français. Les techniques diffèrent par leur principe (PCR [polymerase chain reaction], TMA [transcription mediated amplification], SDA [strand displacement amplification]), par leur cible d’hybridation (ADN plasmidique et/ou chromosomique, ARN ribosomique), leur technicité (manuelle ou automatisée). La plateforme Cobas 4800 (Roche) présente d’excellentes performances, notamment sur les urines. Des essais comparatifs avec les systèmes Abbott m2000, Gen-Probe AC2 et BD ProbeTec Viper, montrent un taux global de concordance supérieur à 98 %, aussi bien sur les urines masculines que sur les écouvillons en- docervicaux ou vaginaux. Tous ces automates sont équipés d’un extracteur et d’un amplificateur permettant de réaliser des séries plus ou moins importantes avec une parfaite robustesse et traçabilité. Ils présentent tous l’avantage de détecter simultanément C. trachomatis et N. gonorrhoeae. Le CNR effectue les tests en duplex depuis 6 mois et le taux de positivité global de N. gonorrhoeae est de 2 % et celui de C. trachomatis de 9.2 % (résultats personnels). Les taux de positivité de C. trachomatis et N. gonorrhoeae sont, respectivement, de 9,7 % et 8,4 % chez les hommes symptomatiques consultant un CIDDIST, et de 5,4 % et 0,7 % chez les hommes asymptomatiques consultant un CDAG. Dans ces mêmes centres, les taux de positivité sont, respectivement, de 11,6 % et 2,9 % chez les femmes symptomatiques, et de 11 % et 0,7 % chez les femmes asymptomatiques. Une nette différence de taux de positivité de N. gonorrhoeae est observée entre les personnes symptomatiques et asymptomatiques. D’une manière intéressante, nous observons des taux de positivité de N. gonorrhoeae beaucoup plus élevés chez les femmes asymptomatiques consultant au centre d’orthogénie et au planning familial (respectivement, 2,8 % et 3,8 %), avec des taux de positivité de C. trachomatis similaires voire moindres (respectivement, 10,7 % et 6,1 %). Ces résultats montrent bien l’intérêt de rechercher ces deux pathogènes dans tous les échantillons génitaux, que les patients soient symptomatiques ou non, surtout chez les personnes consultant les centres de planning familial et d’orthogénie. L’avenir est à la détection multiplex associant les principaux agents bactériens responsables d’IST, C. trachomatis, N. gonorrhoeae et M. genitalium, mais également parasitaire, Trichomonas vaginalis, et viraux comme l’Herpes simplex. La société Bio-Rad vient de commercialiser un système de PCR en temps réel triplex permettant de détecter simultanément, C. trachomatis, N. gonorrhoeae et M. genitalium, dont les performances se sont révélées excellentes (résultats en cours de publication). Ce système ne dispose pas pour l’instant d’extracteur. Dans la population de CDAG/CIDDIST incluse dans cette évaluation, la prévalence de C. trachomatis était de 9 %, celle de M. genitalium de 1,9 %, et celle de N. gonorrhoeae de 1,8 %. La proportion de coinfection était de 8,7 %. M. genitalium et N. gonorrhoeae étaient associés à C. trachomatis dans respectivement 30 % (3/9) et 28 % (2/7) des cas. L’utilisation croissante de ces outils devrait permettre un meilleur dépistage des IST bactériennes, et donc une meilleure prise en charge des personnes infectées, et rompre la chaîne de transmission. Dans le décret du JO du 5 octobre 2011, il est bien précisé qu’en cas de rapport sexuel anal et/ou pharyngé, il est important de rechercher C. trachomatis dans les deux ou trois sites, génital, rectal et/ou pharyngé. Sur les six derniers mois, sur les 134 échantillons pharyngés que nous avons testés, cinq étaient positifs à C. trachomatis (3,7 %) et cinq à N. gonorrhoeae (3,7 %). Aucune infection mixte n’a été détectée. Signalons, à ce sujet, que la technique que nous utilisons est bien spécifique de N. gonorrhoeae et ne détecte pas N. meningitidis, ce qui est primordial dans - 36 - feuillets de Biologie VOL LIII N° 306 - MAI 2012 Chlamydia trachomatis B) Le sérodiagnostic D’une manière générale, la recherche d’anticorps antiC. trachomatis n’a pas la valeur diagnostique de la mise en évidence de la bactérie, notamment en raison de la persistance des anticorps des mois voire des années après l’infection. Cela rend difficile la distinction entre cicatrice sérologique et réelle infection en évolution. Dans les infections génitales basses et dans le trachome, le sérodiagnostic n’a aucun intérêt, car l’infection restant superficielle, le taux d’anticorps est faible. En revanche, dans les infections profondes à C. trachomatis, le sérodiagnostic prend tout son intérêt étant donné l’accessibilité difficile du site infectieux. Un taux élevé d’IgG ou d’Ig totales est significatif d’une infection passée ou en cours. La mise en évidence d’une séroconversion, ce qui est extrêmement rare, ou d’une augmentation significative d’anticorps (x4) entre deux sérums prélevés à 15 jours d’intervalle permet le diagnostic d’infection en évolution. Si le titre reste en plateau, certains préconisent la recherche d’IgM, dont l’intérêt n’a été démontré que dans les pneumopathies du nouveau-né, ou d’IgA en raison de leur demi-vie courte. Sur ce dernier point, les opinions divergent, d’autant que la détection d’IgA dépend beaucoup de la technique utilisée. L’étude des profils sérologiques des personnes dont l’infection est documentée par PCR montre que l’absence d’IgA sériques n’est pas un marqueur de guérison, et qu’à Références Bibliographiques (1) Kuo CC, Horn M, Stephens RS. PhylumXXIV. Chlamydiae Garrity and Holt 2001. In: Krieg NR, Staley, J. T., Brown, D. R., Hedlung, B. P., Paster, B. J., Ward, N. L., Ludwig, W., Withman, W.B., editor. Bergey's Manual of Systematic Bacteriology. Athens, GA, USA: Springer New York Dordrecht heidelberg London; 2011. p. 843-965. (2) Goulet V, de Barbeyrac B, Raherison S, Prudhomme M, Semaille C, Warszawski J. Prevalence of Chlamydia trachomatis: results from the first national populationbased survey in France. Sex Transm Infect 2010 Aug ; 86 (4) : 263-70. (3) Goulet V, Laurent E, Semaille C, Rénachla elbdr. Augmentation du dépistage et des diagnostics d'infections à Chlamydia trachomatis en France: analyse des données Rénachla (2007-2009). Bull Epid Hebd 2011 ; 5 Juillet N°26-27-28 : 316-20. (4) Anaes. Evaluation du dépistage des infections urigénitales basses à Chlamydia trachomatis en France. Paris : Agence nationales d'accréditation et d'évaluation en santé 2003 février 2003. (5) Chernesky MA, Hook EW, Martin DH, Lane J, Johnson R, Jordan JA, et al. Women find it easy and prefer to collect their own vaginal swabs to diagnose Chlamydia trachomatis or Neisseria gonorrhoeae infections. Sex Transm Dis 2005 Dec ; 32 (12) : 729-33. l’inverse, leur présence n’est pas un marqueur d’infection récente. Après traitement, les anticorps peuvent persister à un taux élevé pendant plusieurs mois et la sérologie ne permet donc pas de surveiller l’évolution de la maladie. La nomenclature a limité les indications du sérodiagnostic de C. trachomatis aux infections hautes, à la LGV, au bilan d’hypofertilité et d’arthrite réactionnelle en utilisant des trousses Elisa spécifiques d’espèce. La recherche des IgA a été supprimée. VIII. - CONCLUSION Les infections uro-génitales à C. trachomatis sont en recrudescence et sont le plus souvent asymptomatiques. Il est donc nécessaire de les dépister pour éviter les complications, d’autant que nous disposons d’outils de détection performants sur des auto-prélèvements non invasifs et d’un traitement antibiotique minute efficace. Il est nécessaire de contrôler régulièrement les patients infectés. Enfin, il ne faut pas oublier qu’une IST peut en cacher une autre et l’utilisation des techniques de détection de plusieurs microorganismes simultanément devrait permettre une meilleure connaissance de l’épidémiologie des ces infections et une meilleure prise en charge des patients. Conflits d’intérêt B. de B., C. B. Essais de plateformes de détection et rédaction de rapports d'expertise (rémunération sur le budget du laboratoire), invitations dans des congrès nationaux ou internationaux pour présentation des résultats, pour les entreprises Roche Diagnostics et Bio-Rad. (6) Schachter J, McCormack WM, Chernesky MA, Martin DH, Van Der Pol B, Rice PA, et al. Vaginal swabs are appropriate specimens for diagnosis of genital tract infection with Chlamydia trachomatis. J Clin Microbiol 2003 Aug ; 41 (8) : 3784-9. (12) Lanjouw E, Ossewaarde JM, Stary A, Boag F, van der Meijden WI. 2010 European guideline for the management of Chlamydia trachomatis infections. International Journal of STD and AIDS 2010 Nov ; 21 (11) : 729-37. (7) Chernesky M, Castriciano S, Jang D, Smieja M. Use of flocked swabs and a universal transport medium to enhance molecular detection of Chlamydia trachomatis and Neisseria gonorrhoeae. Journal of Clinical Microbiology 2006 Mar ; 44 (3) : 1084-6. (13) Morré SA, Spaargaren J, Fennerna JSA, de Vries HJC, Coutinho RA, Pena AS. Real-time polymerase chain reaction to diagnose lymphogranuloma venereum. Emerg Infect Dis 2005 Aug ; 11 (8) : 1311-2. (8) Brunham RC, Rekart ML. The arrested immunity hypothesis and the epidemiology of chlamydia control. Sex Transm Dis 2008 Jan ; 35 (1) : 53-4. (9) Batteiger BE, Tu W, Ofner S, Van Der Pol B, Stothard DR, Orr DP, et al. Repeated Chlamydia trachomatis genital infections in adolescent women. J Infect Dis 2010 Jan 1 ; 201 (1) : 42-51. (10) Oakeshott P, Kerry S, Aghaizu A, Atherton H, Hay S, Taylor-Robinson D, et al. Randomised controlled trial of screening for Chlamydia trachomatis to prevent pelvic inflammatory disease: the POPI (prevention of pelvic infection) trial. BMJ 2010 ; 340 : c1642. (11) AFSSAPS., Debord T, coordonnateur. Traitement antibiotique des urétrites et cervicites non compliquées. http://france.elsevier.com/direct/MEDMAL/. Med Mal Infect 2006 ; 36 (http://france.elsevier.com/direct/MEDMAL/) : 27-35. - 37 - feuillets de Biologie VOL LIII N° 306 - MAI 2012 (14) Peuchant O, Baldit C, Le Roy C, Trombert-Paolantoni S, Clerc M, Bebear C, et al. First case of Chlamydia trachomatis L2b proctitis in a woman. Clin Microbiol Infect 2011 Dec ; 17 (12) : E21-3. (15) Christerson L, de Vries HJ, de Barbeyrac B, Gaydos CA, Henrich B, Hoffmann S, et al. Typing of lymphogranuloma venereum Chlamydia trachomatis strains. Emerg Infect Dis 2010 Nov ; 16 (11) : 1777-9. (16) Clerc M. IL, Le Roy C., Peuchant O., Bébéar C., Goulet V., de Barbeyrac B. Evolution du nombre de lymphogranulomatose vénérienne (LGV) rectale et d’ infection rectale à Chlamydia trachomatis à souches non L en France 2002-2009. Bull Epidemiol Hebd 2011 ; 26-27-28 : 310-3. (17) El Karoui K, Mechai F, Ribadeau-Dumas F, Viard JP, Lecuit M, de Barbeyrac B, et al. Reactive arthritis associated with L2b lymphogranuloma venereum proctitis. Sex Transm Infect 2009 Jun ; 85 (3) : 180-1. BACTÉRIOLOGIE Chlamydia trachomatis le cas de recherche dans la gorge. Ce taux de positivité est donc non négligeable et pourtant la nomenclature n’autorise qu’une seule cotation par patient, ce qui n’est guère incitatif. Tout patient porteur de ces pathogènes dans la gorge est contagieux et doit être traité.