osezla colombie

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osezla colombie
É V A S I O N
OSEZ LA COLOMBIE
Au-delà des clichés, la Colombie n’est pas seulement le pays des cartels et des narcotrafiquants. C’est surtout un pays spectaculaire dont
les racines s’étendent du Pacifique à la côte caraïbe. De l’isthme panaméen à la mystique Amazonie. Une nation fière, andine et indigène
de souche, latine et créole de fait, qui ne demande qu’à être découverte.
Les Seychelles ?
Non, une Colombie
que l’on redécouvre
enfin... Si Cartagène,
joyau classé, est
longtemps resté le seul
trésor accessible du
pays, d’autres sites
majeurs (ici les plages
du Parc national de
Tayrona) sont à
nouveau fréquentables.
PAR BÉNÉDICTE MENU (TEXTE) ET ÉRIC MARTIN POUR LE FIGARO MAGAZINE (PHOTOS)
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Perspective
sur la cathédrale
de Cartagène.
Construite entre 1575
et 1612, elle a survécu
aux canons du pirate
Francis Drake.
Indien kogi de la Sierra
Nevada (ci-dessus),
un des visages de
l’étonnante mosaïque
ethnique du pays.
A Cartagène, on croise
aussi les Palenqueras,
descendantes des
esclaves noirs qui, au
XVIIe siècle, érigèrent dans
leur fuite des villages
fortifiés. Leur culture
a survécu à Palenque
de San Basilio, le dernier
de ces villages, classé
au patrimoine immatériel
de l’Unesco en 2008.
D’OÙ QU’ON LA REGARDE, CARTAGÈNE DES INDES, LA VILLE DE TOUS LES SORTILÈGES, RACONTE SON HISTOIRE…
O
n chuchote à Cartagène
que l’ancien couvent des
Clarisses serait hanté...
Se pourrait-il que l’âme
de l’infortunée Servia
Maria de Todos los Angeles vagabonde encore entre ces murs où
Gabriel Garcia Marquez, d’un coup de pioche dans une crypte funéraire, fit naître De
l’amour et autres démons *, singulière histoire
dont elle est l’héroïne aux longs cheveux de
feu ? En ce qui nous concerne, en trois nuits
dans ce couvent devenu fleuron de l’hôtellerie de luxe, aucun fantôme n’est venu troubler notre sommeil. Mais tandis qu’un impertinent toucan tente une énième fois de
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chaparder quelques miettes dans nos assiettes, transportés hors du temps dans ce patio
luxuriant frangé d’arcades de pierre et de balcons de bois, nous ne pouvons que constater
qu’il est aisé de se prêter ici aux supputations
les plus romanesques : Cartagène est bien la
ville de tous les sortilèges.
D’où qu’on la regarde, celle qui fut le bastion de la Couronne espagnole durant près
de quatre siècles raconte son histoire et celle
de la Nouvelle-Grenade. D’abord prendre de
la hauteur et monter au couvent de la Popa,
pour embrasser toute la baie de Cartagène. A
droite, dominé par la cathédrale, le cœur historique et ses maisons couleurs ocre et pastel
aux balconnets fleuris (la Colombie est l’un des
plus grands producteurs de fleurs au
monde !). A gauche, la péninsule de Bocagrande à laquelle des buildings modernes
confèrent des faux airs de Miami. De ce point
de vue remarquable, on se souvient que Cartagène fut d’abord un archipel avant qu’on ne
comble les marais pour relier ses îles à la côte.
C’est sur celle de Calamari que le gouverneur
Pedro de Heredia fonda Cartagène en 1533.
Débarqués moins d’un demi-siècle plus tôt
sur les terres arides de Guajira, tout au nord
par-delà la Sierra Nevada, les conquistadores
eurent tôt fait de découvrir les trésors des
peuples amérindiens tandis que la légende
d’El Dorado enfiévrait leur esprit. De conquêtes en pillages, tout l’or des Amériques tran-
site bientôt par Cartagène dont la prospérité
n’échappe pas longtemps aux pirates. Francis
Drake, Jean-Baptiste Ducasse, pour ne citer
qu’eux. Pour s’en préserver, Cartagène devient au fil des décennies, la ville la mieux
protégée de toute l’Amérique du Sud. Aux
portes de la cité coloniale, le castillo de San Felipe de Barajas, bel exemple d’ouvrage militaire, en témoigne. Tout comme l’épaisse muraille en pierre corallienne qui aujourd’hui
encore enserre le cœur de Cartagène sur neuf
kilomètres. Faute d’agresseurs, les remparts
abritent désormais, dans leurs alcôves, les
amoureux qui viennent y admirer le coucher
du soleil tandis que les sabots des calèches à
touristes claquent sur le pavé.
•••
Après avoir restauré
le musée de l’Or de
Cartagène – celui de
Bogotá, repensé en 2008,
est incontournable –,
Alberto Samudio a redonné
son lustre au Théâtre
Heredia (au centre)
construit en 1911.
Les hérons se
chamaillent (ci-dessus)
devant le Sofitel Santa Clara
et la maison de « Gabo ».
Valorisation du patrimoine,
dynamisme culturel...
Peu à peu, la Colombie
se réapproprie son image,
menant de nombreuses
actions pour vaincre ses
démons.
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Au loin, les buildings
de Boca Grande, la Miami
colombienne... Au premier plan,
la place de la Douane, cœur
de la Cartagène coloniale.
L’IMAGINATION DE « GABO » NE POUVAIT QUE S’ENFLAMMER DANS UN TEL THÉÂTRE
••• La tour de l’Horloge est le principal accès
à la vieille ville ouvrant sur la place des Coches,
un des chapitres les plus sombres de son histoire. Dès le XVIIe siècle, le roi d’Espagne fit de
Cartagène son comptoir exclusif pour le commerce d’esclaves. Des milliers d’Africains
connaîtront sur cette place l’ultime humiliation d’être vendus comme bêtes sauvages. Il
faut alors dépasser la place de la Douane pour
visiter le monastère où Pedro Claver consacra
trente années de sa vie à leur venir en aide. Sacerdoce qui lui valut d’être le premier moine
canonisé du Nouveau Monde. De là, emprunter la calle qui porte son nom pour atteindre,
au centre de Cartagène, la place Símon-Bólivar aux magnifiques jalousies. Une statue
rend hommage au Libertador qui, en 1811,
permit à Cartagena de Indias, sa Ciudad
Heroica, de devenir la première cité des Amériques à déclarer son indépendance.
L’imagination de « Gabo », comme le surnomme affectueusement un peuple fier de
son prix Nobel, ne pouvait que s’enflammer
dans un tel théâtre. Bien que né à Aracataca,
petit village à l’est de la ville, et résidant au
Mexique, l’écrivain possède toujours la maison que l’architecte Rogelio Salmona, élève
de Le Corbusier, fit ériger pour lui près du
couvent des Clarisses. Elle fait partie d’un
circuit touristique bien rodé qui passe par les
arcades du portail des Douceurs aux étals débordant de sucreries, là où débute son roman
L’Amour au temps du choléra. Classée par
l’Unesco en 1984, Cartagène est devenue une
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ville sûre, destination favorite de quelque
deux millions d’étrangers qui visitent le pays
chaque année. Restaurants, boutiques branchées et hôtels y prospèrent tandis que de
belles manifestations remplissent son calendrier. Le carnaval en novembre et d’excellents
festivals de littérature et de musique classique.
La proximité du sanctuaire marin des îles du
Rosaire et de Mompox, autre joyau colonial,
comptent aussi parmi ses atouts.
Après avoir goûté à la vie nocturne dans le
quartier de Getsemani (et aux délicieux gâteaux saupoudrés d’or de Chez Mila), nous
mettons le cap au nord, traversant Santa
A Cartagène, une Palenquera vend ses fruits sous
les arcades.
Marta, première cité coloniale du pays (la
moins jolie aussi) et dernière demeure de Símon Bólivar. Plus loin, là où les contreforts de
la Sierra Nevada, la plus haute chaîne côtière
du monde (5 860 mètres pour le pic Christophe Colomb), plongent dans les eaux de l’Atlantique, se trouve un littoral d’une beauté
rare. Au pied des sommets aux neiges éternelles, les plages dorées du Parc national de Tayrona ont des faux airs de Seychelles. Elles
sont sculptées en criques idylliques où ondulent, hauts perchés, les cocotiers, et l’on s’y
rend à pied ou à cheval, sous les frondaisons
tropicales à l’écoute d’un bruissement qui
trahira l’iguane, le singe et peut-être le puma...
Si Bogota, vibrante mégapole perchée à 2 600
mètres d’altitude, témoigne dans ses élans
artistiques de l’avènement d’une nouvelle ère
pour la Colombie, la Sierra Nevada offre une
belle leçon d’humilité à la rencontre des communautés kogis, arhuacos, wiva et akuamo,
derniers descendants d’une grande civilisation
amérindienne dont le génie s’illustre encore
dans les vestiges de la Ciudad Perdida, à trois
jours de marche de Santa Marta. Traversant
les époques, quand d’autres grandes civilisations (Incas, Mayas) se sont depuis longtemps
éteintes, les héritiers des Tayronas, gardiens
des équilibres de la terre, entendent bien ne
rien rater du XXIe siècle, porteurs d’un message écologique qu’ils se transmettent de génération en génération, et qui n’a jamais sem■ BÉNÉDICTE MENU
blé autant d’actualité.
* Grasset, 234 p., 17, 60 ¤.
MER DES C ARAÏB ES
É V A S I O N
VENEZUELA
Bogotá
COLOMBIE
Barranquilla
Santa Marta
Parc national de Tayrona
Au Sofitel Santa
Clara, sous les
arcades de pierre
du patio, le temps
suspend son vol.
Pratique
Pas de visa pour un séjour de moins
de 90 jours. Sécurité : s’inscrire sur
le site consulaire
(www.ambafrance-co.org). Saisons
des pluies d’avril à juin et d’août à fin
novembre. Fêtes de fin d’année et
semaine sainte sont très prisées.
Y aller
Air France (36.54 ;
www.airfrance.fr) dessert Bogotá
à raison d’un vol quotidien.
Connexions vers Cartagène, île
de San Andrés, etc. Compter 11 h
de vol entre Paris et Bogotá et un
prix à partir de 800 ¤ environ
l’aller-retour, taxes incluses.
L’offre du voyagiste
Spécialiste de cette région du
globe, La Maison des Amériques
Latines (01.53.63.13.40 ;
www.maisondesameriqueslatines.
com) propose « Aux portes de
l’Eldorado », un circuit essentiel
(à partir de 2 285 ¤, en groupe)
qui permet de découvrir en 11 jours
Bogotá, la cathédrale de sel de
Zipaquirá, le village colonial Villa de
Leyva où Banderas joua les Zorro le
temps d’un film ; Cartagène, bien
sûr, l’archipel du Rosaire, Mompox,
autre merveille coloniale classée
par l’Unesco ; Santa Marta
et le parc national de Tayrona.
Ecotourisme
Fondée à Cartagène par Matthieu
Bohringer (fils de Richard), grand
amoureux de la Colombie qu’il
sillonne depuis plus de 10 ans,
Aventure Colombia
(00.57.311.534.4554 ;
www.aventurecolombia.com).
Excursions à travers tout le pays
dans un esprit solidaire, du désert
de la Guajira où vivent les
mystérieux Wayuus, jusqu’aux
confins de l’Amazonie.
Séjourner
A Bogotá. L’Hôtel Windsor House
(00.57(1)63.43.630 ;
www.ghlhoteles.com). A partir de
121 ¤ en Business Suite, petit
déjeuner inclus. Plus excentré,
mais tellement plus original, le Art
Suites Hotel (00.57(1)60.25.959 ;
www.104artsuites.com). Environ
113 ¤ la nuit en Executive Suite
(63 m2). A l’image de la nouvelle
Bogotá. Chambres high-tech
décorées par de jeunes artistes
colombiens qui ne manquent ni
d’humour ni de talent. Cheminée
(les soirées sont fraîches à
2 600 m), kitchenette, certaines
chambres avec terrasse ou jacuzzi.
A Cartagène. Mythique, le Sofitel
Santa Clara (00.57(5)65.04.700 ;
www.sofitel.com). A partir de
202 ¤ la nuit en chambre
supérieure. L’ancien couvent des
Clarisses devenu havre de luxe. Les
chambres coloniales sont en cours
de rénovation, l’hôtel étant en lice
pour devenir l’un des fleurons
de la collection « Legend » du
groupe Sofitel. L’aile Républicaine,
moderne, entoure la piscine que
domine, face à la mer, le spa.
Cloître-jardin extraordinaire. Une
adresse hors du temps où l’on
mange divinement grâce au chef
français Cyril Cheminot. La
Passion (00.57(5)66.48.605 ;
www.lapassionhotel.com).
Compter 190 ¤ la nuit en chambre
standard, petit
Salon du Art Suites
déjeuner inclus. Elu
Hotel à Bogotá.
par The Guardian
l’un des cinq plus
beaux hôtels
d’Amérique latine.
Inspiration
marocaine pour le
toit-terrasse et sa
petite piscine.
Azulejos et frises,
meubles et objets
chinés en voyage...
Un bel escalier
de granit escalade
Archipel
du Rosaire
R
SIE
R
D
VA
A
Dîner, sortir
Notre coup de cœur
Leo Espinosa, chef
réputée et artiste.
Cartagène
Rio M
Mompox
agd
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na
VENEZUELA
ANDRÉ DE CHASTENET
C A R N E T D E VOYAG E
E
AN
C O L O M B I E
Mine de sel de Zipaquirá
le patio central où un salonbibliothèque et mille détails
laissent l’esprit vagabonder.
8 chambres, un bonheur.
Le bon plan : El Delirio
(00.57(5)66.02.404 ;
www.deliriohotel.com). Compter
110 ¤ la nuit en chambre standard,
petit déjeuner inclus. Dans le
quartier de la cathédrale,
17 chambres contemporaines
où s’affiche la Cartagène
des années 60-80 immortalisée
50 km
par le photographe Hernán Diaz.
Dans le parc Tayrona. EcoHabs
(00.57(1)38.21.616 ;
www.concesionesparquesnaturales.
com). A partir de 170 ¤ la nuit
(plus 8 ¤/adulte pour l’entrée dans
le parc). Une des concessions
écotouristiques du puissant
groupe Aviatur présidé par
l’homme d’affaires français, JeanClaude Bessudo. 14 cabanes sur
pilotis façon Robinson dominant
les plages sauvages de Canaveral.
A Bogotá. Leo Cocina y Cava
(00.57(1)28.38.659 ;
[email protected]).
L’étoile montante de la scène
culinaire locale stimule tous les
appétits tant à travers ses œuvres
de plasticienne, que dans l’assiette.
A Chia. Dans la banlieue nord de
Bogotá, Andrés Carne de Res
(00.57(1)86.37.880 ;
www.andrescarnederes.com). On
y dîne (viandes excellentes) et on
fait la fête dans un cadre délirant.
A Cartagène. Mister Babilla,
resto-boîte sur des rythmes
latinos et les tubes de Shakira.
Notre préféré : le Habana, bar
salsa du quartier de Getsemani.
Et, pour la vue sur la place de la
Douane, le Hard Rock Cafe.
Pour l’exceptionnelle
scénographie du Museo del
Caribe (00.57(5)37.20.582 ;
www.culturacaribe.org) ouvert
en avril à Barranquilla. Un lieu
magique dédié aux cultures et
merveilles naturelles de la côte
Caraïbe. Interactif.
Insolite
Le volcan Totumo, à 45 min de
Cartagène, étudié par le baron
von Humboldt au XIXe siècle :
il s’agit là du plus haut volcan
de boue du monde, son cratère
plongeant jusqu’à 1 600 m dans
les entrailles de la terre. On peut
y prendre un bain de boue et même
s’y faire masser !
En savoir plus
Guides : Le Petit Futé et Lonely
Planet (en anglais). L’association
Tchendukua (01.43.65.07.00 ;
www.tchendukua.com) pour en
savoir plus sur les Indiens kogis.
L’office de tourisme colombien
(www.colombia.travel) peaufine la
version française de son site. ■ B. M.
Venez découvrir dès aujourd’hui
La nouvelle destination du Maroc
Le long d’une plage de 7 km, une somptueuse propriété de 500 chambres et suites
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