Coordonner un « géant » comme le quotidien Ouest
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Coordonner un « géant » comme le quotidien Ouest
Marketing Valérie Arnould juillet/août 2000 techniques de presse Un outil d’aide à la pagination des éditions du journal Coordonner un « géant » comme le quotidien Ouest-France L’interview qui précède cet article donne une idée de la complexité du dispositif publicitaire OuestFrance. Mais ce n’est qu’une facette dans cette vaste organisation qu’est la production du plus grand quotidien régional français. Afin justement d’améliorer la gestion rédactionnelle et publicitaire, les équipes de Ouest-France et de la société ARTESYS International ont développé Siroco : Système intranet de réservations et d’ordres pour la coordination opérationnelle. Ses objectifs sont de visualiser les problèmes de pagination, de réservation et les conflits possibles lors de l’élaboration du journal. place une méthode plus industrielle de prévision. Ne voyant rien de satisfaisant se profiler sur le marché, l'entreprise a décidé de se rapprocher de la société rennaise ARTESYS afin de développer un progiciel adapté à ses besoins. Et, comme la direction du quotidien est bien consciente d'avoir eu à résoudre un problème fréquent en presse régionale, son idée a été de mettre au point un système qui puisse ensuite être réutilisé par ses confrères de la presse quotidienne. Un réflexe compréhensible car le journal aimerait mutualiser les Michel Gérard, responsable de l’informatique de production à Ouest-France. « La possibilité de modifier les fonctions et d'en ajouter est une des forces du système. » coûts de développement des futures versions du progiciel. Le système Siroco est d'ailleurs adaptable à des structures plus petites, la plupart des entreprises ne présentant pas la même complexité que Ouest-France. L'équipe d'ARTESYS, encadrée par son responsable des solutions presse, JeanFrançois Jousseaume, s'est attelée dès 1998 à la conception et à l'implantation de Siroco. Elle était épaulée dans cette mission par un groupe de pilotage au sein du journal conduit par une chef de projet, Anne-Yvonne Surel, et coordonné par le responsable de l'informatique de production, Michel Gérard. C'est un euphémisme de dire que la coordination est un thème essentiel au sein de Ouest-France : près de 540 pages produites chaque jour pour les 42 éditions quotidiennes, 120 000 lignes et 1800 photos en provenance de toutes les rédactions locales, la réservation et la réception de publicités de Précom et de la régie nationale, les annonces classées, les suppléments et le journal de fin de semaine (Dimanche Ouest-France). Face à cette périlleuse aventure quotidienne, le journal cherchait depuis longtemps à mettre en Quels étaient les besoins ? Il existe deux grandes équipes de coordination au sein du journal : l'une gère le trafic des annonces publicitaires et l'autre celle des articles. La première, sous la responsabilité de Alain Scanvic, adjoint du directeur de la publicité Philippe Toulemonde, assure l'interface entre le journal et ses régies (la régie locale Précom et la régie nationale) : « Notre rôle est de recevoir les ordres publicitaires puis les confirmations et de valider ces réserva- Siroco doit être utilisé par plusieurs services. 34 tions, en particulier quant il s'agit de quadri puisque nous avons des emplacements fixes avec 12 pages quadri possibles. La prise de réservation peut s'avérer très complexe car pour faire face à nos limites en couleur nous avons démultiplié les possibilités d'éditions pour que plus d'annonceurs aient accès aux espaces en quadri ». Au sein de cette coordination publicitaire d'une dizaine de personnes, Jacques Lerouzic et Martine O'Bavamian ont participé activement à la conception et à l'implantation de Siroco. La coordination rédactionnelle est, quant à elle, animée par Patrick Troudet : « Nous sommes le lien entre la rédaction (c'est-à-dire également les agences décentralisées) et les services publicité et fabrication. Nous devons avoir une vision sur le long terme, à l'occasion du lancement d'éditions spéciales par exemple ; à moyen terme afin d'avoir une idée des besoins en pagination rédactionnelle à huit jours et bien entendu avoir la maîtrise du jour même de parution. Quotidiennement, nous devons traiter au cas par cas les arbitrages entre rédaction et publicité, avec une visibilité à J-1 12 heures, dernier délai théorique pour les réservations publicitaires. Dans la réalité, il nous arrive d'accepter des publicités plus tardivement. » Ces équipes de coordination doivent également assurer la liaison avec les différents services techniques, en particulier le prépresse, dirigé par Pierre Saglio. Le cauchemar étant pour ce dernier de retrouver ses petits dans la multitude des « lieux » de production : les pages rédactionnelles envoyées par les agences locales ; les services de création publicitaire ; la production des pages couleur ou encore la cellule de réalisation des annonces légales et avis d'obsèques (un secteur qui pèse son poids puisqu'il représente 8 % du chiffre d'affaires publicitaire total). Comme le souligne Alain Scanvic, auparavant l'édifice reposait sur l'expertise des gens (leur énorme connaissance du déroulé du journal) et quelques outils techniques de presse juillet/août 2000 Valérie Arnould Marketing Siroco gère plusieurs paramètres et fournit des données statistiques de l'historique du journal, l'établissement et le suivi des budgets. L'outil se présente sous la forme d'un éditeur entièrement graphique (nommé « paginateur » par ses utilisateurs) qui inclut la gestion des cahiers, des éditions (départements, régions, toutes éditions), des rubriques (appelées classeurs dans le jargon Ouest-France), des possibilités quadri (configurations couleur multicahiers en tenant compte des contraintes des rotatives), de la disponibilité (options de vente, pages de reprises, annonces groupées...), des rigueurs de positionnement (couleur, activités similaires entre annonceurs...) ou du taux de sur-réservation accepté. L'ensemble de ces données permet de construire un « Journal Type » et de le décliner ensuite en fonction du planning d'occupation des pages. Les équipes de coordination peuvent accéder au journal tel qu'il est prévu en théorie et ce jusqu'à plu- sieurs mois d'avance. A partir de ce modèle, des informations sont entrées au fur et à mesure afin d'enrichir le modèle théorique avec les ordres et réservations, les projets d'articles et de suppléments. Plus on se rapproche de la date de parution et plus ce modèle s'oriente vers une version définitive avec la confirmation des emplacements rédactionnels et publicitaires. Le jour de parution (« Journal du Jour »), le modèle servira de guide pour le système rédactionnel DMPAO (une autre spécificité maison de Ouest-France) et pour informer les services de production des films (SPI : système de suivi des pages à l'atelier films), plaques (GAP : gestion automatisée des plaques à l'atelier plaques) et l'imprimerie (calcul d'encrage des pages, gestion des priorités selon le plan de tirage...). Le grand avantage de cet outil tient dans la modélisation des données techniques (éditions, emplacements couleur, rubriques...) et des comportements, ainsi qu'à son intégration dans les systèmes d'informations existants. Afin de constituer un véritable outil de liaison, Siroco doit communiquer avec un environnement logiciels et matériel hétérogène, celui qui existait déjà dans l'entreprise : le système de prise d'ordres Publissimo (XMedia) utilisé par Précom, celui de la gestion des annonces classées (Calligramme de Insert), de fabrication des annonces publicitaires (DESC d'IPA) ou le système rédactionnel. Il est un point de rencontre entre tous ces outils qui effectuent une tâche précise mais travaillent en quelque sorte « en aveugle » par rapport à la structure générale du journal. Comme le souligne Jean-François Jousseaume, ARTESYS a choisi d'utiliser dans ses développements des solutions très ouvertes du marché : « l'import/export des ordres se fait au format XML. Le poste client est entièrement écrit en Java, tout poste équipé d'un moteur d'exécution Java est suffisant (PC Pentium avec Windows 95,98 ou NT 4.0, Mac OS 8.5, 9 ou 10, avec ou sans navigateur de type Internet Explorer ou Netscape). Le serveur de base de données installé à Ouest-France est Sybase 11.9. » L'autre grande contrainte vient du fait que les journaux ne sont pas figés, ils évoluent et génèrent de nouveaux produits éditoriaux. « Siroco est installé depuis le mois d’octobre 1999 au sein de OuestFrance, explique Michel Gérard et nous avons déjà ajouté la gestion de Dimanche Ouest-France, de deux nouvelles éditions créées pour le quotidien et du supplément Ma ville. La possibilité de modifier les fonctions et d'en ajouter est une des forces du système ». Si les cellules de coordination publicitaire et rédactionnelle et le service prépresse ont désormais l'outil bien en main, l'idée est dans une seconde phase de décentraliser son utilisation. « C'est-à-dire, poursuit Michel Gérard, que les secrétaires d'édition des agences locales et les commerciaux de Précom puissent bénéficier d'une interface plus légère afin de visualiser le « paginateur » du journal. Une troisième phase étant même une connexion avec la sortie des films afin de suivre le processus de production. » L'équipe de Jean-François Jousseaume prépare déjà une nouvelle version pour septembre qui permettra aux commerciaux de Précom de disposer d'une sorte de « petit Siroco » sur des téléphones WAP afin de consulter la base de données des réservations publicitaires et de pouvoir, chez le client, proposer des emplacements et des options de réservation. Mais il faudra encore du temps pour que les commerciaux franchissent cette nouvelle étape. < Exemple du fonctionnement d’une interface lors de la réservation d’un espace publicitaire. L’outil doit être graphique afin de permettre une visualisation rapide de l’état d’avancement du journal. La calendrier permet d’accéder au jour de parution sur lequel on souhaite travailler. proches du listing informatique pour gérer l'« occupation » du journal. Le besoin était d'utiliser un outil à la fois visuel et prévisionnel afin de se concentrer sur l'expertise fonctionnelle et de passer plus de temps sur les vrais problèmes tels que l'optimisation des espaces publicitaires quadri et l'anticipation de conflits possibles de réservation : « Siroco ne trouve pas les solutions et n'arbitre pas tout seul, poursuit Alain Scanvic. Mais c'est un outil d'aide à la décision et il évite certaines erreurs d'appréciation puisqu'il intègre les servitudes du journal (limitations techniques, espaces publicitaires permanents...). C'est une base de travail transversale qui libère du temps pour les équipes de coordination. » Plusieurs niveaux de prévision 35