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Pr Marquette et Pr Lafitte Tuberculose pulmonaire et primo-infection tuberculeuse PLAN Epidémiologie Histoire Naturelle et Evolution Intradermo réaction (IDR) à la tuberculine Presentation(s) clinique(s) de la tuberculose pulmonaire Diagnostic de la tuberculose pulmonaire Traitement de la tuberculose Prévention de la tuberculose p p p p p p p 2 4 6 9 12 14 20 Texte sur fond grisé ⇒ « les bases à connaître » Texte sur fond blanc ⇒ « en savoir plus » PRINCIPALES SOURCES DE DOCUMENTATION • Recommandations de la Société de Pneumologie de Langue Française sur la prise en charge de la tuberculose en France. Conférence d’experts – texte court (Rev Mal Respir 2004 ; 21 : 414-20) et texte long (Rev Mal Respir 2004 ; 21 : 3S2) sont accessibles sur le site de la SPLF : www.splf.org/bbo/revues-articles/RMR/accesLibre/RMR2004_21_414RecosTub.pdf • Les infections à mycobactéries tuberculeuses et non tuberculeuses. Revue des Maladies Respiratoires, vol 14 Décembre 1997. N° spécial • WHO Report 2002. Global Tuberculosis Control (http://www.who.int/gtb/publications) • Tuberculose. Bulletin épidémiologique hebdomadaire. N° spécial. Décembre 1994 • Institut National de Veille Sanitaire. Epidémiologie des maladies infectieuses en France. Maladies surveillées par le Réseau National de Santé Publique. Situation en 1996 et tendances évolutives récentes (http://www.invs.sante.fr/beh/default.htm) • Diagnostic Standards and Classification of Tuberculosis in Adults and Children. American Thoracic Society. Am J Respir Crit Care Med 2000; 161: 1376-l395 • Treatment of Tuberculosis and Tuberculosis Infection in Adults and Children. American Thoracic Society. Am J Respir Crit Care Med 1994; 149: 1359-1374 • A. Infuso, D. Antoine et P. Barboza, EuroTB, pour les correspondants nationaux des pays de la région Europe de l'OMS participant au projet EuroTB. Surveillance européenne de la tuberculose en 1999 et tendances récentes. BEH 2002 ;1617 :66-67 • Corbet E. et al. The Growing Burden of Tuberculosis. Arch Intern Med. 2003;163:1009-1021 Les documents suivants sont téléchargeables en ligne sur le site du ministère de la santé l’adresse suivante : http://www.sante.gouv.fr/htm/dossiers/tuberculose/sommaire.htm - Prévention et prise ne charge de la tuberculose en France. Synthèse et recommandations du groupe de travail du Conseil Supérieur d’Hygiène Publique de France (2002-2003). Rev Mal Respir 2003 ; 20 : 7S3-7S4 Avis du Conseil Supérieur d’Hygiène Publique de France relatif à la revaccination par le BCG Avis du Conseil Supérieur d’Hygiène Publique de France Section maladies transmissibles relatif au traitement de la Tuberculose-infection Avis du Conseil Supérieur d’Hygiène Publique de France relatif au choix d'un masque de protection contre la tuberculose en milieu de soins Année Universitaire 2006-2007 I Tuberculose –Pr Marquette et Pr Lafitte EPIDEMIOLOGIE I-1 HISTORIQUE : La tuberculose existe au moins depuis 120 siècles ; elle était reconnue par les médecines grecque, chinoise, égyptienne et indienne. Dans la ville d'Alexandrie on savait que les migrants étaient des personnes souvent malades. On a retrouvé sur des momies des séquelles de mal de Pott. Hippocrate décrit des tubercules, des ulcérations et des pleurésies ainsi que les premiers « traitements ». Les idées se développent vers le 18ème siècle. Il persiste une confusion nosologique mais on connaît déjà l'intérêt d’éloigner les patients des villes vers la campagne Au 19ème siècle les connaissances sur la tuberculose évoluent grâce à Laennec, Villemin, Koch, Röentgen, Béclère, Landouzy, Calmette, Guérrin, Vaskman, à qui on doit les descriptions anatomo-cliniques, la découverte de la contagion inter humaine, la découverte du germe, la découverte des Rayons X, les descriptions cliniques, le vaccin BCG et la Streptomycine A partir du début du siècle avec l'apparition de l'hygiène dans les pays industrialisé, on voit décroître le nombre de tuberculose. Cette décroissance s'accélère avec l'apparition de la streptomycine et des antituberculeux laissant croire à la fin de l'endémie tuberculeuse pour les années 1980 En 1863, Graves décrit en Angleterre 60000 DC/an. La ville de Lille dénombrait plus de 1000 DC par an en 1945. En 1992 il n'est déclaré dans la région Nord pas de Calais que 1,7cas de décès par tuberculose pour 100000 habitants. I-2 HISTOIRE NATURELLE: la transmission se fait à partir d'une personne présentant une tuberculose pulmonaire bacillifère (contagieuse). L'homme est le réservoir naturel du germe) La transmission inter-espèce est exceptionnelle. L’infection de la personne en contact réalise la primo infection tuberculeuse ; il apparaît une certaine immunité qui permet à la personne de ne pas développer la maladie ; il s'ensuit une phase de latence, puis une phase de maladie avec réactivation des germes ou ré-infection exogène; la personne développe la maladie et devient éventuellement bacillifère. L'évolution spontanée se fait vers le décès dans (≈ 50%des cas), la guérison spontanée (≈ 30%) ou la chronicité (≈ 20%). Une personne à frottis positif infecte 10 personnes par an pendant une moyenne de 3 ans (durée de l'évolution spontanée). Durant sa vie de contagieux, le tuberculeux infecte 30 personnes, dont 1 deviendra elle aussi contagieuse. Il y a rupture de cet « équilibre » : 1. dans un sens favorable à l'espèce humaine : avec l'apparition de l'hygiène et les traitements antituberculeux à partir de 1945 et, dans les pays industrialisé, le traitement rapide des patients contagieux 2. dans un sens défavorable à l'espèce humaine avec l' apparition du VIH, la difficultés d’accès aux soins de populations marginalisées, l'accroissement des migrations.... I-3 INCIDENCE DE LA TUBERCULOSE: La tuberculose est la 5ème cause de décès par maladie. L’incidence de la maladie varie de moins de 10/100 000 (amérique du nord) à plus de 300/100 000 (Afrique sub-saharienne). Elle croît avec le niveau de pauvreté et l’incidence de l’infection par le VIH. 2 Année Universitaire 2006-2007 En Europe sur la période 1995 - 1999, l’incidence est < 20 cas pour 100 000 habitants. Ces taux sont stables ou en diminution dans la plupart des pays d'Europe de l'Ouest. En Europe centrale, les taux de déclaration se situent entre 20 et 40 cas pour 100 000 ; ils sont en diminution dans tous les pays à l'exception de la Roumanie (120) et de la Bosnie Herzegovine. Dans les pays de l'ex-URSS, les taux de déclaration sont supérieurs à 50 cas pour 100 000, en augmentation très nette (+50% en 5 ans). Les données représentatives sur les antibiogrammes en début de traitement montrent un niveau de multirésistance primaire inférieur à 1% en Europe de l'Ouest et du Centre (18 pays) et très élevé dans les pays Baltes (8-17%). L'incidence de la tuberculose en France était de 11,2 cas pour 100 000 habitants en 2000 et ne diminue plus depuis 1997. La situation épidémiologique de la tuberculose est principalement inquiétante en Ile-de-France où l'incidence est plus du double de l'incidence nationale. Elle atteint 50 cas pour 100 000 dans la ville de Paris. La part du VIH est de moins en moins importante. Les personnes en provenance d'un pays d'endémie tuberculeuse ont un risque multiplié par 8 par rapport aux nationaux et plus particulièrement les adultes jeunes. Les situations de précarité économique et sociale contribuent également à cette situation. Tuberculose –Pr Marquette et Pr Lafitte Evolution de l’incidence de la tuberculose en France Incidence de la tuberculose en France selon l’age et la nationalité I-4 DISTRIBUTION EN FONCTION DE L'AGE Dans les pays industrialisé : la tranche d'age des personnes malades est de plus de 55 ans car ce sont des personnes qui ont pu être infectés lors de la période d'endémie de ces pays (une part non négligeable des ces tuberculoses-maladie actuellement diagnostiquées sont des réactivations de tuberculoses-infection) et les jeunes actuellement ont moins de risque d'être infectés compte tenu de la faible incidence de la maladie Dans les pays en développement : il existe une prédilection pour les personnes jeunes , en pleine période d'activité sociale entraînant des perturbations sociales, d'autant que en général ces pays sont aussi touchés par le VIH I-5 INFECTION TUBERCULEUSE L'OMS, en1990, a estime supérieur à 1,7 milliard le nombre de personne infectés soit le 1/3 de la population mondiale (c'est à dire le nombre de personnes ayant fait une primo infection et qui sont asymptomatiques). Les chiffres les plus élevés sont dans le pacifique ouest et les plus faibles dans la méditerranée orientale La distribution selon l'age diffère selon les régions : en Afrique et en Europe où l’incidence est la même (30%), 80% des infectés ont moins de 50 ans en Afrique alors qu'en Europe la majorité des infectés a plus de 55 ans et représente le reliquat d'une cohorte qui a été contaminée dans leur jeune âge, au moment où la tuberculose était endémique en Europe. Le risque annuel d'infection (RAI) est le taux qui donne la proportion de personnes qui au cours d'une année sont infectées par le bacille tuberculeux ; il est évalué par un échantillon représentatif de la population, de même age, non vacciné et pour lesquels sont effectués des test tuberculiniques : 1% de RAI correspond à 50 nouveaux cas de tuberculose à frottis positif (estimations effectuées avant l'épidémie de VIH) Chiffré, dans les pays industrialisés entre 5 et 10% entre 1920 et 1930, le RAI commence à baisser de 4 à 5% par an avant 1945, en raison de l'amélioration des conditions de vie (pays occidentaux). Le niveaux le plus bas est atteint aux Pays Bas, en Suisse, en Norvège et dans certaines province du canada: 0,01%; avec l'espoir à l'époque d'atteindre une phase d'élimination (1/100000 frottis positif) et éliminée (1/1000000) Dans les pays en voie de développement le RAI reste élevé (Afrique et Asie) supérieur à 2% 3 Année Universitaire 2006-2007 Tuberculose –Pr Marquette et Pr Lafitte I-6 ROLE DU VIH L' impact est double : direct avec un risque accru pour les séro-positifs de s'infecter indirect puisque les VIH infectés deviennent rapidement malades et représentent des sources supplémentaires de contamination Dans les pays en voie de développement où il existe une épidémie de VIH, un excès de tuberculose est noté ; il est noté un doublement de l'incidence de tuberculose dans les pays où la prévalence des 2 infections est importante II HISTOIRE NATURELLE ET EVOLUTION La tuberculose est le plus souvent due aux mycobactérie du complexe tuberculosis (Mycobacterium tuberculosis et beaucoup plus rarement à Mycobacterium Africanum ou Mycobacterium Bovis). L’agent de la tuberculose ou bacille de Koch (BK) se transmet quasi exclusivement par voie aérienne. Les gouttelettes infectantes sont produites sous forme d’aérosol par les patients contagieux lors de la toux, la parole ou les éternuements. Ces gouttelettes (1 à 5 µ) restent en suspension dans l’air ambiant. Quatre-vingt-dix-neuf pour cent des particules mises en suspension sont inactivées dès leur émission et seul une fraction de 1 % survit pendant quelques heures. Les patients contagieux génèrent aussi des particules de plus grande taille, riches en BK, qui n’interviennent pas dans la transmission car elles ne restent pas en suspension dans l’air, et même si inhalées, n’atteignent pas l’espace alvéolaire. Les particules de plus de 5 µ sont arrêtées au niveau des voies aériennes supérieures, de la trachée ou des bronches. Elle sont alors remontées (escalator mucociliaire) vers le pharynx où elles sont dégluties puis inactivées dans le tube digestif. C’est la déposition alvéolaire de quelques bacilles (1 à 3) et leur multiplication, qui va être à l’origine de la primoinfection tuberculeuse (PIT). II-1 PRIMO-INFECTION TUBERCULEUSE (PIT) ET TUBERCULOSE "MALADIE" Les quelques bacilles infectants déposés au niveau des espaces alvéolaires distaux (foyer primaire, encore appelé chancre d’inoculation, le plus souvent dans les zones pulmonaires moyennes ou inférieures qui sont les plus ventilées) sont phagocytées par les macrophages alvéolaires (MA) au sein desquels ils peuvent se multiplier. Les bacilles sont alors drainés par les MA vers le ganglion hilaire satellite du foyer primaire où ils continuent à se multiplier. L’association foyer primaire et adénopathie (ADP)satellite (le plus souvent asymptomatique) est appelée complexe primaire et peut être mise en évidence sur le cliché de thorax ou le scanner thoracique. A partir du foyer ganglionnaire un certain nombre de bacilles peut disséminer dans la circulation à travers tout l’organisme (foyers secondaires). Cette phase de bacillémie est le plus souvent asymptomatique. Au cours des 2 à 10 semaines qui suivent cette infection initiale se développe une réponse immune à médiation cellulaire accompagnée d’une hypersensibilité au dérivés du BK (se traduisant par la positivation de l’intradermoréaction à la tuberculine). Cette réponse immune suffit en général à limiter la multiplication ultérieure du BK et l’hôte infecté reste asymptomatique. Au niveau du foyer primaire et des éventuels foyers secondaires, la réponse immune se traduit par l’accumulation de cellules monocytaires d’allure épithélioïde entourées d’une couronne de lymphocytes. Au centre de ces lésion peut apparaître une nécrose à riche contenu lipidique (nécrose caséeuse). Ces lésions histologiques, appelées granulomes ou follicules épithélio-giganto cellulaires avec nécrose caséeuse sont quasi pathogneumoniques, en France en tous cas, de lésions tuberculeuses. Après quelques mois (3 mois), si la réplication bacillaire est inhibée, les lésions peuvent se calcifier. Elles contiennent alors un faible nombre (< 105) de bacilles dits "quiescents" en position intra-cellulaire ou au sein du caséum solide. A n’importe quel moment de cette phase de primo-infection puis au delà de cette phase, les bacilles "quiescents", présents au niveau partir d’un ou de foyer(s) secondaire(s) ou, plus rarement au niveau du foyer primaire, peuvent se multiplier et être alors responsable d’une "tuberculose maladie" qui s’exprime alors cliniquement et/ou radiologiquement. On estime qu’environ 5 % des patients développent une "tuberculose maladie" dans l’année qui suit leur PIT et qu’environ encore 5 % des patients développent une "tuberculose maladie" au delà de ce délai (le risque de passage de la tuberculose-infection à la tuberculose-maladie est plus important chez l’enfant et varie en fonction de l’âge. Il est estimé à 43 % avant l’âge d’un an, 24 % entre 1 et 5 ans, 15 % entre 11 et 15 ans, alors qu’il est chez l’adulte de 5 à 10 %). Ces chiffres sont la base de la chimioprophylaxie proposée dans certains cas de PIT. Certaines situations facilitent le passage rapide à la tuberculose maladie: âge inférieur à 4 ans, importance de l’inoculum de BK transmise. La tuberculose maladie par réactivation d’un foyer quiescent s’observe surtout chez les sujets âgés. L’immunodépression est un facteur majeur de réactivation. La malnutrition, l’alcoolisme, les situations de précarité, la toxicomanie intraveineuse, la promiscuité, le diabète, l’insuffisance rénale avancée sont autant de situations qui favorisent le passage du stade d’infection tuberculeuse quiescente à la tuberculose-maladie. On appelle primo-infection maladie les tuberculoses maladies qui apparaissent au cours ou au décours immédiat de la PIT. On appelle tuberculose-infection latente les primo-infections sans localisation ou expression clinique patente (simple virage des tests tuberculiniques). On appelle tuberculose-infection patente ou primo-infection patente toute primo-infection accompagnée de signes radiologiques et/ou généraux (doit être considérée comme une tuberculose-maladie et traitée comme telle). L’immunité conférée par une PIT ou une "tuberculose maladie" est en général suffisante pour protéger l’individu d’une infection par une nouvelle souche de bacilles "exogènes". Ainsi donc, la grande majorité des "tuberculoses maladies" procèdent du réveil d’une population de bacilles 4 Année Universitaire 2006-2007 Tuberculose –Pr Marquette et Pr Lafitte quiescents à partir d’un foyer préexistant. Cependant, dans de rares cas, des réinfections exogènes ont été documentées chez des sujets ayant un antécédent d’infection tuberculeuse. Localisations pulmonaires Les localisations pulmonaires constituent la grande majorité des cas de tuberculose maladie. Au cours de cette forme habituelle de tuberculose, encore appelée tuberculose pulmonaire commune, ou tuberculose secondaire, les lésions développées à partir d’un ou de foyer(s) secondaire(s) ou, plus rarement à partir du foyer primaire, prédominent dans les régions supérieures et postérieures des champs pulmonaires. La tension partielle en oxygène est plus élevée dans ces zones, ce qui inhibe partiellement les mécanismes de défense vis à vis du bacille tuberculeux. Le caséum se ramollit et se liquéfie, aboutissant, après fistulisation à l’arbre bronchique, à la 8 10 formation d’une cavité (caverne) contenant une très grande quantité de BK viables (10 à 10 ). A partir de ce foyer excavé les bacilles peuvent disséminer au reste du poumon par voie bronchogène. L’atteinte pleurale (pleurésie), le plus souvent unilatérale, peut survenir à tout moment après la PIT. Chez l’adolescent et l’adulte jeune elle est en général concomitante ou suit immédiatement la PIT. Elle est liée à l’effraction de la plèvre à partir d’un foyer parenchymateux sous-pleural. Elle réalise le plus souvent une pleurésie exsudative, contenant de très rares BK avec une plèvre tapissée de follicules tuberculeux. Plus rarement elle se traduit par un empyème (caséum liquide), riche en BK. La pneumonie aiguë tuberculeuse fait suite à l’ensemencement massif de parenchyme sain à partir d’un foyer excavé. Ceci se traduit par une réaction inflammatoire très intense responsable d’une alvéolite aiguë parfois extensive, riche en BK. Tuberculose médiastino-hilaire : chez l’enfant ou l’adolescent la réaction ganglionnaire satellite du foyer primaire peut prendre une allure "explosive" sous la forme d’adénopathies volumineuses, comprimant l’arbre bronchique et se fistulisant parfois dans la lumière trachéo-bronchique. Il s’agit là stricto sensu d’une forme clinique de primo-infection maladie. Localisations extra-pulmonaires Les tuberculoses disséminées (poumon, moelle, foie, rate, rein, méninges) surviennent lors de la phase de bacillémie initiale (cf. supra) ou plus tardivement (chez le sujet âgé en particulier) par dissémination hématogène après érosion vasculaire, à partir d’un foyer de nécrose caséeuse. Les lésions histologiques (granulomes épithélio-giganto cellulaires avec ou parfois sans nécrose caséeuse, au moins au début) sont de petite taille (0,5 à 2 mm, réalisant un aspect radiologique en "grain de mil"), raison pour laquelle ces formes disséminées de tuberculose sont appelées miliaires tuberculeuses. La méningite tuberculeuse résulte de l’effraction de l’espace méningé à partir d’un foyer cortical cérébral. Ces formes graves de tuberculose (miliaire et méningite) prédominaient auparavant chez l’enfant. Actuellement dans les pays riches, elles sont le plus souvent rencontrées chez les sujets âgés, où le diagnostic, faute de suspicion clinique, est souvent tardif. Plus rarement les lésions extra-pulmonaires concernent les os et les articulations (abcès froid tuberculeux), le rein et les voies excréto-urinaires, ou les organes génitaux. Inhalation de bacilles en suspension dans l’air Macrophages alvéolaires Foyer primaire x bacillaire + libération de bacilles Infection contrôlée Caséum solide, calcification Rares bacilles quiescents ADP satellite x bacillaire Absence de x intra macrophagique Sujets IDR Primo-infection Développement d’une immunité à médiation cellulaire solide Développement d’une hyperréactivité vis à vis de la tuberculine (IDR +) dissémination hématogène (poumon, foie, rate, os, séreuses, méninges) Foyers secondaires Infection non contrôlée tuberculose primaire Infection contrôlée Caséum solide, calcification Rares bacilles quiescents x de bacilles quiescents caséum liquide, excavation ⇒ tuberculose secondaire ! Pulmonaire ⇒ contagiosité ! (ou extra-pulmonaire) x = multiplication 5 Année Universitaire 2006-2007 Tuberculose –Pr Marquette et Pr Lafitte II-2 CONTAMINATION La transmission de Mycobactérium tuberculosis est interhumaine. La contamination se fait par voie aérienne, a partir d’un individu contagieux. La contamination implique le plus souvent une source infectante importante et répétée, à rechercher dans l’environnement immédiat du sujet contaminé. Dans la majorité des cas, le patientsource présente une tuberculose pulmonaire excavée bacillifère, c’est-a-dire avec présence de bacilles acidoalcoolo-résistants (BAAR) à l’examen microscopique direct de l’expectoration. Le risque de transmission est proportionnel à l’intensité de la toux, de l’expectoration et de la durée de l’exposition au patient-source. Dans l’entourage d’un malade bacillifère la contamination, définie par le virage de l’intradermoréaction à la tuberculine, chez les sujets-contact, varie de 30 à 65 %. Le risque de contamination chute considérablement si l’examen microscopique direct des crachats du patient source est négatif. Sous traitement antituberculeux bien conduit, on considère qu’un patient atteint de tuberculose à bacilles sensibles n’est plus contagieux après 15 jours de traitement. II-3 IMPACT DE I’INFECTION PAR LE VIH Chez les patients infectés par le VIH, le risque de développer une tuberculose est plus élevé, soit par réactivation d’une infection ancienne, soit par contamination a partir de sujets contagieux. La promiscuité induite par certaines conditions socio-économiques ou le regroupement sur les lieux de soins de patients infectés par le VIH et susceptibles d’être également bacillifères sont particulièrement propices à la transmission. Chez les sujets infectés par le VIH, le risque de passage de la tuberculose-infection à la tuberculose-maladie est très élevé atteignant même 10 % par an dans les pays à forte endémie tuberculeuse (Afrique noire. Lorsque la tuberculose-maladie est la conséquence d’une réactivation, elle survient relativement précocement dans le cours de l’infection par le VIH. Le nombre de lymphocytes CD4 au moment du diagnostic de tuberculose est voisin de 250/mm3. En revanche, la transmission horizontale survient plus tardivement chez les sujets très immunodéprimés avec peu de lymphocytes CD4. L’infection par le VIH favorise La dissémination extrapulmonaire de la maladie. Ainsi, la proportion de tuberculoses présentant au moins une localisation extrapulmonaire atteint 75 %, celle-ci étant concomitante d’une localisation pulmonaire une fois sur deux environ. La tuberculose n’est uniquement pulmonaire que dans 25 % des cas. III INTRADERMO REACTION (IDR) A LA TUBERCULINE III-1 PRINCIPE La réaction cutanée tuberculinique (RCT) met en évidence la présence d’une réaction d’hypersensibilité retardée induite par les antigènes mycobactériens (M. tuberculosis, BCG, mais aussi certaines mycobactéries atypiques) mais elle n’est pas toujours le témoin d’une protection efficace vis à vis du bacille tuberculeux. Les tests cutanés à la tuberculine sont utilisés pour le diagnostic de l’infection tuberculeuse, à titre individuel ou épidémiologique ou pour l’étude de la réaction d’hypersensibilité retardée induite par la vaccination par le BCG. Le diagnostic de PIT repose sur la conversion de la (RCT), témoin de 1’apparition de 1’allergie tuberculinique. L’intradermo-réaction (IDR) à la tuberculine ou test de Mantoux est une réaction d’hypersensibi1ité de type retardé III-2 HISTORIQUE Après la découverte du bacille tuberculeux (1882), Robert Koch mit en évidence à partir d’une culture de Mycobacterium tuberculosis une substance protéique provoquant une réaction cutanée et qu’il nomma tuberculine. En 1932, Seibert et Munday réussirent à isoler le principe actif de la tuberculine responsable de la réaction cutanée, conduisant à la production de tuberculine DPP-S (DPP-Seibert), le lot standard international de référence de la tuberculine DPP. En raison des variations de résultats des tests tuberculiniques provenant de différentes préparations, la tuberculine RT23 fut développée à partir d’une culture de sept souches de M. tuberculosis (Institut des Sérums, Copenhague) pour donner la tuberculine de référence OMS, stabilisée par le Tween 80 (0,005 %). III-3 BASES IMMUNOLOGIQUES DE LA REACTION CUTANEE TUBERCULINIQUE (RCT) En réaction aux antigènes mycobactériens, les phénomènes immunitaires cellulaires et fonctionnels sont liés à l’expansion de clones de lymphocytes T spécifiques et à leurs effets cytokiniques et cytotoxiques. Lors de l’injection intradermique de l’antigène tuberculine, ces clones T sont extériorisables. Dans les heures suivant l’injection, il se produit un afflux de monocytes-macrophages, la formation de cellules de Langhans et surtout l’afflux d’un grand nombre de lymphocytes T CD4+. Parallèlement, les kératinocytes prolifèrent dans la basale de l’épiderme et se chargent à leur surface en protéines HLA-II. La réaction cutanée d’hypersensibilité retardée résulte de cet afflux cellulaire local dominé par les macrophages et les lymphocytes T – sont aussi présents des polynucléaires basophiles, quelques lymphocytes B et polynucléaires éosinophiles. Cette réaction cutanée est caractérisée par l’aspect typique de papule indurée érythémateuse. 6 Année Universitaire 2006-2007 Tuberculose –Pr Marquette et Pr Lafitte III-4 TUBERCULINES DISPONIBLES EN FRANCE La seule tuberculine disponible en Europe jusqu’en 2003 était la tuberculine Mérieux. Elle est maintenant abandonnée. Dans le but d’améliorer les performances du test tuberculinique pour le diagnostic de l’infection tuberculeuse (avec ou sans antécédent de vaccination BCG), en termes de sensibilité et de spécificité, une nouvelle tuberculine solution DPP a été mise au point (Tubertest®, déjà commercialisée en Amérique du Nord sous le nom de Tubersol®.) Elle se présente sous la forme d’une solution liquide prête à l’emploi (1 ampoule de 1 ml = 10 doses tests) et est mise à disposition en France et dans les autres pays européens à partir de 2003. Tubertest® (Laboratoires Aventis Pasteur MSD) est une tuberculine DPP obtenue à partir d’une souche humaine de M. tuberculosis. Le test tuberculinique est réalisé avec une dose de 0,1 millilitre. La comparaison avec la tuberculine RT23 (tuberculine de référence OMS, cf. historique) a montré une bonne concordance des résultats des tests, avec une équivalence en sensibilité et spécificité supérieure à 90 %. III-5 REALISATION L’injection doit être réalisée par une injection dans le derme à la face antérieure de l’avant-bras d’un volume exact de 0,1 ml de la solution liquide de tuberculine (soit 5 unités de tuberculine Tubertest®), avec une aiguille courte et fine à biseau très court. La pointe de l’aiguille, biseau vers le haut, est enfoncée presque parallèlement à la peau, pour ne faire pénétrer que le biseau, en étirant fermement la peau entre le pouce et l’index, dans l’axe du bras, de manière à immobiliser la peau. La validité d’interprétation du test tuberculinique nécessite une technique parfaite. La réalisation de l’injection intradermique fait apparaître immédiatement une papule par soulèvement du derme prenant un aspect de peau d’orange, témoin d’une bonne réalisation technique. L’injection de la tuberculine provoque la libération de plusieurs lymphokines qui, dans les 24 à 72 heures suivantes, donnent une infiltration localisée de la peau due à l’œdème et à l’accumulation de lymphocytes sensibilisés. La lecture de la réaction cutanée s’effectue idéalement à la 72ème heure. Elle peut être différée jusqu’au 5e jour chez les sujets âgés pour lesquels la réactivation peut se développer plus lentement. Il est possible de réaliser une IDR après application de lidocaïne en patch, sans risque d’interaction ni de modification de la réaction. L’induration qui s’est développée autour du point de ponction est mesurée transversalement par rapport au sens de l’injection, les limites de l’induration étant déterminées par la palpation et mesurées à l’aide d’une règle graduée en millimètres. Les dimensions de la réaction érythémateuse entourant l’induration n’ont aucune signification. III-6 INTERPRETATION L’interprétation de la RCT doit tenir compte des ATCDts du patient (tuberculose, PIT), de son statut vaccinal, de son état immunitaire et d’une éventuelle affection grave évolutive. Virage de l’IDR Une RCT est jugée négative lorsque le diamètre d’induration est < à 5 mm. Une réaction est jugée positive lorsque le diamètre d’induration est ≥ à 5 mm. En l’absence de toute information sur les antécédents de vaccination par le BCG L’IDR peut servir de test de référence pour un suivi, une comparaison ultérieure ou un examen de dépistage. Dans cette situation, l’interprétation est délicate. Il est nécessaire de connaître précisément le contexte épidémiologique (âge, origine ethnique, provenance d’un pays de forte endémie, situation sociale, cas de tuberculose dans l’entourage) et le contexte clinique (maladie évolutive, facteurs de co-morbidité associés) pour interpréter le résultat du test et l’intégrer à chaque situation particulière. L’IDR peut représenter dans ce cas un argument diagnostique supplémentaire qui doit être utilisé avec discernement face à une situation donnée. En l’absence de vaccination par le BCG Une IDR à la tuberculine dont le diamètre d’induration est ≥ à 10 mm est en faveur d’une infection tuberculeuse suite à un contact infectant direct avec M. tuberculosis. Cela signifie que le sujet peut conserver dans ses tissus des bacilles tuberculeux viables, et qu’il est a priori réfractaire à une nouvelle infection sauf en cas de contamination massive ou d’immunodépression. Ce sujet présente un risque, de l’ordre de 5 à 10 %, de développer ultérieurement au cours de sa vie une tuberculose-maladie (avec un risque plus fort dans les 2 années qui suivent la primo infection), par réactivation d’une tuberculose-infection latente. La découverte d’une IDR positive doit conduire à la recherche de signes cliniques et radiologiques évocateurs de tuberculose-maladie. Chez les sujets vaccinés par le BCG La vaccination par le BCG induit le virage de l’IDR dans un délai de deux à trois mois. Le diamètre d’induration provoqué par la vaccination BCG est ≥ à 5 mm. Néanmoins, des réactions fortement positives existent avec un diamètre d’induration ≥ à 10 mm qui s’observe surtout dans les premières années qui suivent la vaccination, alors que le diamètre diminue progressivement au fil des ans. Dans les dix ans qui suivent la vaccination par le BCG, l’IDR n’est pas contributive pour le diagnostic de l’infection tuberculeuse. En revanche, au-delà de dix ans après la vaccination par le BCG, une IDR à la tuberculine ≥ à 10 mm est le témoin d’une rencontre avec du bacille tuberculeux sauvage dans près de 90 % des cas. Chez les patients infectés par le VIH L’altération de l’immunité à médiation cellulaire diminue les réactions d’hypersensibilité retardée. Afin de conserver chez les patients infectés par le VIH la valeur diagnostique de l’IDR à la tuberculine, il est nécessaire d’envisager la possibilité d’une tuberculose-infection latente dès 5 mm. La positivité de la réaction tuberculinique 7 Année Universitaire 2006-2007 Tuberculose –Pr Marquette et Pr Lafitte signe une infection tuberculeuse ancienne ou récente. Dans un contexte d’immunodépression, elle indique un risque élevé de développer une tuberculose-maladie et peut donc justifier à elle seule un traitement de la tuberculose-infection latente. Il est recommandé de pratiquer une IDR dès la découverte de la séropositivité pour le VIH afin d’optimiser l’interprétation immédiate ou ultérieure d’une IDR positive chez les patients infectés par M. tuberculosis. Pour les patients dont l’immunodépression est sévère, en particulier avec des lymphocytes T CD4 < à 200/mm3, une anergie fréquente à la tuberculine est rapportée au déficit immunitaire. Dans ce cas, la RCT perd toute sa valeur discriminante. Réaction cutanée tuberculinique négative Une IDR à la tuberculine négative s’observe chez les individus qui n’ont jamais été en contact avec le bacille tuberculeux. Cependant, au cours d’authentiques infections tuberculeuses, l’IDR peut rester négative. Les causes d’IDR faussement négatives sont : - une erreur technique (tuberculine altérée, injection trop profonde, lecture trop tardive, diamètre d’induration sous-estimé) - la réalisation du test pendant la phase pré-allergique d’une tuberculose-infection latente ou d’une vaccination (moins de 2 mois après contamination ou administration du BCG) ; - la réalisation du test pendant l’évolution d’une maladie ou d’un état entraînant une anergie tuberculinique : infection virale (rougeole, oreillons, mononucléose infectieuse, grippe), infection bactérienne sévère dont une tuberculose hématogène, hémopathie maligne, immunodépression, corticothérapie au long cours, traitement immunosuppresseur et chimiothérapie anti-cancéreuse, infection par le VIH, malnutrition - la réalisation du test chez une personne âgée, car la réactivité à la tuberculine diminue avec l’âge ; au-delà de 65/70 ans IDR négative peut s’observer dans 30 à 40 % des cas d’infections tuberculeuses. L’effet amplificateur (effet « booster ») ou l’hypersensibilité réactivée Parfois, l’hypersensibilité retardée nécessite d’être réactivée pour donner une réaction observable (effet «booster»). Cette réactivation se manifeste par une augmentation du diamètre d’induration d’au moins 6 mm lors de la deuxième IDR par rapport à la première. Cet effet de réactivation peut s’observer de quelques jours à plus d’un an après la réalisation du premier test. Bien qu’il puisse s’observer à tout âge, il est beaucoup plus fréquent au-delà de 55 ans. Il est rarement observé chez l’enfant. Aussi, pour une personne âgée ayant été en contact avec un tuberculeux bacillifère, en cas d’IDR négative, il est recommandé d’effectuer une nouvelle IDR, une à deux semaines plus tard. En respectant ce délai court de réalisation de 2 IDR successives, cela permet, en cas de deuxième IDR positive, de considérer que la personne âgée était préalablement infectée par le bacille tuberculeux et qu’il ne s’agit pas d’une primo-infection avec virage tuberculinique. Aide à l’interprétation de l’IDR dans le cadre exclusif de la décision thérapeutique chez l’enfant (< 15 ans) (il s’agit du traitement de la tuberculose-infection, après avoir éliminé une tuberculose-maladie). Chez l’enfant (< 15 ans) 8 Année Universitaire 2006-2007 Tuberculose –Pr Marquette et Pr Lafitte Aide à l’interprétation de l’IDR dans le cadre exclusif de la décision thérapeutique chez l’adulte (>15 ans) (il s’agit du traitement de la tuberculose-infection, après avoir éliminé une tuberculose-maladie). Chez l’adulte (>15 ans) Dans les circonstances ci-dessus (lors du dépistage autour d'un cas.), plus l’IDR est positive, plus elle est en faveur d’une infection récente. ! chez l’adulte (> 15 ans), l’indication de traitement d’une tuberculose infection ne concerne que les cas découverts lors du dépistage autour d'un cas. Il n’y a pas d’indication à traiter devant la seule constatation d’une IDR positive, y compris si elle est > 15 mm, chez l’adulte immunocompétent en dehors de l’exposition récente à un cas de tuberculose contaminante, d’une immigration récente ou de risque professionnel. L’apport de l’IDR dans le cadre de la principale question la face à une tuberculose infection « - faut-il considérer que tuberculose infection est récente et donc la traiter ? » est rediscuté plus loin au chapitre V - IV PRESENTATION(S) CLINIQUE(S) DE LA TUBERCULOSE PULMONAIRE La tuberculose est une "grande trompeuse" qui peut simuler de nombreuses maladies. Elle peut simuler ou survenir de façon concomitante à une pneumoconiose, des bronchectasies, une sarcoïdose, une pneumonie, un abcès du poumon, un cancer, etc…. Les patients symptomatiques peuvent avoir des signes généraux, des signes respiratoires, des symptômes extra-respiratoires ou une combinaison des ces symptômes. IV-1 SIGNES ET SYMPTOMES GENERAUX Ces signes sont en général présents au cours de la tuberculose. Cependant, de nombreux patients, même au stade de maladie étendue, ont des signes insidieux qui peuvent être longtemps ignorés. Il n’est pas exceptionnel que le diagnostic ne soit évoqué qu’à un stade tardif devant la découverte d’anomalies radiologiques. Signes et symptômes généraux habituels ! Asthénie ! Anorexie ! Amaigrissement ! Règles irrégulières ! Fébricule à prédominance nocturne ! Sueurs nocturnes Evoluant sur des semaines, voire des mois, souvent attribués à un surmenage 9 Année Universitaire 2006-2007 Tuberculose –Pr Marquette et Pr Lafitte Signes et symptômes plus rares ! Tableau aigu fébrile d’allure grippale Primo-infection Tuberculeuse (PIT) ! En règle générale totalement asymptomatique ! Parfois par les signes généraux habituels (cf supra) ! Très rarement formes bruyantes avec Tableau aigu fébrile avec tuphos simulant une fièvre typhoïde (typho-bacillose de Landouzy) Kératoconjonctivite phlycténulaire Erythème noueux Formes généralisées avec dissémination hématogène (miliaires) ! Tableau en général aigu ! Peut prendre une allure insidieuse, en particulier chez le sujet âgé, avec fièvre au long cours et désordres hématologiques (pancytopénie, ou réactions leucémoïdes) IV-2 SIGNES ET SYMPTOMES DE LA TUBERCULOSE PULMONAIRE Signes fonctionnels Toux : Il s’agit du symptôme le plus habituel, évoluant sur semaines et des mois, inconstamment associée à une expectoration mucoïde ou muco-purulente Hémoptysies (10 %): Elles traduisent le plus souvent l’excavation d’une lésion parenchymateuse Dyspnée : Rare, elle traduit soit des lésions pulmonaires extensives soit un épanchement pleural volumineux Douleurs thoraciques : A type de pleurodynies (douleur à type de point de côté, majoré par l’inspiration profonde). Elles traduisent en général une pleurésie aiguë séro-fibrineuse (le plus souvent unilatérale) Dans les rares cas de pneumonie aiguë tuberculeuse le tableau clinique associe plusieurs de ces symptômes dans un contexte fébrile plus ou moins aigu, simulant une bronchite ou une pneumonie aiguë Signes physiques L’examen clinique du thorax est remarquablement négatif dans les tuberculoses pulmonaires, contrastant en cela avec l’importance des signes cliniques et radiologiques. Syndrome pleural unilatéral (en cas de pleurésie) Syndrome de condensation pulmonaire (dans les formes parenchymateuses étendues) Particularités de la tuberculose de l’enfant : La maladie se développe plus souvent dans les suites immédiates d’une infection tuberculeuse récente. Le risque de passage de la tuberculose-infection à la tuberculose-maladie est plus important chez l’enfant. Le risque de développer une forme grave (forme disséminée, miliaire, méningite) est plus important chez l’enfant, tout particulièrement chez le nourrisson. 20 à 60 % des tuberculoses-maladie sont asymptomatiques, lorsqu’elles sont symptomatiques, les signes sont non spécifiques : toux, fièvre, anorexie, asthénie, mauvaise croissance pondérale, sueurs nocturnes, troubles digestifs, adénopathies, tachypnée voire dyspnée.... L’essentiel est de penser à la tuberculose devant tout contexte à risque, devant toute situation clinique, en particulier respiratoire qui, traitée de façon correcte, n’évolue pas favorablement. La pratique d’une intradermoréaction à la tuberculine s’impose dans toutes ces situations. IV-3 SIGNES RADIOLOGIQUES Quatre éléments de base sont à retenir Les lésions élémentaires sont de trois types 1. Infiltrats 2. Nodules 3. Excavation 4. Localisation préférentielle dans les lobes supérieurs et les segments supérieurs des lobes inférieurs (voir explication ci-dessus dans le chapitre PrimoInfection Tuberculeuse et Tuberculose "Maladie") Ces quatre éléments doivent systématiquement orienter vers le diagnostic de tuberculose. 10 radio de profil Année Universitaire 2006-2007 Tuberculose –Pr Marquette et Pr Lafitte L’ensemble de ces signes n’est pas toujours aisé à distinguer sur le cliché de thorax ⇒ intérêt du scanner thoracique, en particulier pour l’exploration des sommets. Formes radiologiques plus rares 1. Miliaire tuberculeuse : Soit lors de la phase de bacillémie initiale (cf. supra) ou plus tardivement (chez le sujet âgé en particulier) par dissémination hématogène après érosion vasculaire, à partir d’un foyer de nécrose caséeuse. Les lésions histologiques sont de petite taille (0,5 à 2 mm), réalisant un aspect radiologique de micronodulations profuses en "grain de mil". Cet aspect qui peut être évident d’emblée sur le cliché de thorax est encore mieux mis en évidence sur le scanner thoracique. Dans certaines milliaires évoluées les lésions peuvent devenir macro-nodulaires, parfois excavées et être associées à des infiltrats. 2. Pleurésie tuberculeuse L’aspect radiologique n’a rien de spécifique, l’épanchement est en général abondant. Ces pleurésies, sont liées à l’effraction de la plèvre à partir d’un foyer parenchymateux sous-pleural. Ce foyer parenchymateux sous-pleural n’est cependant presque jamais mis en évidence sur la radio même après évacuation de l’épanchement. 3. Complexe primaire Associant le foyer primaire (infiltrat) et l’adénopathie satellite (premier stade de l’infection tuberculeuse, le plus souvent asymptomatique) peut être mise en évidence sur le cliché de thorax ou le scanner thoracique. En général ces lésions passent inaperçues et ce sont leurs séquelles calcifiées qui sont mises en évidence quelques mois ou quelques années plus tard. 4. Pneumonie tuberculeuse Présentation clinique aiguë ou sub-aiguë Procède de l’ensemencement massif de parenchyme sain à partir d’un foyer excavé. Foyer de condensation alvéolaire simulant une pneumonie communautaire bactérienne au sein de laquelle on retrouve souvent une ou des excavations 5. Lésions séquellaires De la PIT calcification du chancre d’inoculation et du ganglion satellite, seule séquelle du complexe primaire bronchectasies, en particulier du lobe moyen, séquellaires de la compression de l’origine de la bronche lobaire moyenne par l’adénopathie du complexe primaire De la tuberculose pulmonaire commune Lésions excavées séquellaires d’une caverne tuberculeuse Calcifications parenchymateuses, fibroses rétractiles parfois étendues, emphysème para-cicatriciel, séquelles de lésions tuberculeuses en général étendues. 6. Aspects radiologiques atypiques Observés chez les sujets sévèrement immunodéprimés (en particulier les sujets infectés par le VIH, au stade 3 d’immunodépression sévère, CD4 < 200/mm ). ! Radio de thorax normale ! Absence d’excavation ! Prédominance des lésions dans les lobes inférieurs 11 Année Universitaire 2006-2007 V Tuberculose –Pr Marquette et Pr Lafitte DIAGNOSTIC DE LA TUBERCULOSE PULMONAIRE Le diagnostic passe par avant tout par une attention toute particulière par rapport au diagnostic éventuel de tuberculose. Il n’est pas rare en effet de voir des tuberculoses à des stades avancés dont les symptômes évoluent depuis des semaines voir des mois, sans avoir véritablement attiré l’attention. L’élément clé qui oriente le diagnostic est la radiographie de thorax, éventuellement complétée par la réalisation d’un scanner thoracique. V-1 PRELEVEMENTS 1. En première intention ! Le malade crache : examen de l’expectoration 3 jours de suite à la recherche de BK (Comme les émissions de bacilles de la tuberculose sont intermittentes, les examens bactériologiques doivent être répétés. Le nombre optimal de prélèvements est de 3 (1 par jour, 3 jours consécutifs), à réaliser avant la mise en route du traitement antituberculeux. ! Le malade ne crache pas : tubage gastrique, le matin, à jeun, avant le lever, 3 jours de suite à la recherche de BK. Cette recherche est basé sur le fait que les BKs présents dans le parenchyme et les bronches sont remontés (escalator mucociliaire) vers le pharynx puis sont déglutis et s’accumulent dans l’estomac. 2. En deuxième intention (si les prélèvements précédents ne retrouvent pas de bacilles acido-alcoolorésistants (BAAR) à l’examen direct ! Fibroscopie bronchique avec lavage bronchique, brossage voir lavage broncho-alvéolaire (Le recours à la fibroscopie bronchique n’est justifié qu’après 3 prélèvements par tubage négatifs) 3. Formes extra-pulmonaires ! En cas de suspicion de tuberculose rénale, les urines sont prélevées 3 jours de suite, si possible après restriction hydrique. ! Pour le diagnostic de méningite tuberculeuse, le liquide céphalorachidien (LCR) est prélevé par ponction lombaire. Afin d’optimiser la découverte de bacilles de la tuberculose à ! l’examen microscopique et en culture, il est souhaitable de prélever au moins 2 ml de LCR et de signaler au laboratoire la suspicion de tuberculose. ! En cas d’adénopathies, l’exérèse est préférable à la ponction-aspiration. ! Dans les formes disséminées, fréquentes chez les immunodéprimés, notamment les patients séropositifs pour le VIH, M. tuberculosis peut être cherché par hémoculture. Le prélèvement est réalisé sur tube spécial pour centrifugation-lyse, soit sur flacon spécial contenant un milieu de culture lytique radioactif ou froid. Le prélèvement de sang sur tube conventionnel n’est pas recommandé. V-2 DIAGNOSTIC BACTÉRIOLOGIQUE DE LA TUBERCULOSE Le diagnostic bactériologique des infections à mycobactéries comporte 4 étapes : 1. L’examen direct: il correspond à la recherche de BAAR à l’examen microscopique des prélèvements. Le résultat est disponible en quelques heures. 2. La culture: la mise en culture des prélèvements se fait sur milieu enrichi. Pour un bacille de Koch, il faut compter 4 semaines en moyenne. 3. L’identification: elle se fait par la mise en œuvre d’épreuves biochimiques pour l’identification des cultures. 4. L’antibiogramme: il correspond à la mesure de la sensibilité aux antibiotiques, ce qui nécessite à nouveau une culture. II est indispensable pour les bacilles tuberculeux ou non tuberculeux possiblement pathogènes. Les progrès techniques réalisés ces dernières années, en particulier en biologie moléculaire, ont permis d’optimiser certaines étapes. Cependant, le respect des 4 étapes est impératif et aucune ne doit pas être négligée. a) L’examen direct : Il n’y a eu aucun progrès en ce qui concerne l’examen direct. Il reste indispensable notamment pour affirmer la contagiosité des malades atteints de tuberculose respiratoire. L’examen microscopique est peu sensible et son seuil est de 104-105 bacilles par ml. b) La culture : La culture a bénéficié de l’arrivée de méthodes de détection rapide de la croissance des germes sur milieu liquide. Cependant, ces méthodes, essentiellement la méthode BACTEC 460 TB, présentent des inconvénients supérieurs à leurs avantages réels qui sont de donner un résultat de culture en 8 à 14 jours. Basés sur un système radiométrique utilisant des isotopes radioactifs, de nouveaux développements utilisant des milieux liquides non radioactifs devraient permettre une plus grande diffusion. Le coût de ces techniques reste toutefois un problème. Le délai de positivité des cultures dépend de la richesse en bacilles. Quand l’examen direct est négatif on peu attendre le résultat des cultures dans un délai de l’ordre de 4 semaines pour les cultures en milieu solide et de 2 semaines pour les cultures en milieu liquide. Quand l’examen direct est positif (prélévement riche en bacilles) le délai descend respectivement à 3 et 1 semaines. 12 Année Universitaire 2006-2007 Tuberculose –Pr Marquette et Pr Lafitte c) L’identification : L’identification des mycobactéries obtenues en culture demande de grandes quantités de bacilles et éventuellement la réalisation de nouvelles cultures. Actuellement, lorsque cela est possible, l’étude des caractères culturaux et biochimiques est remplacée par l’hybridation avec des sondes géniques complémentaires de séquences d’acides nucléiques spécifiques des espèces de mycobactéries. D'un coût limité, la sensibilité et la spécificité de ces sondes sont proches de 100%. Quatre mycobactéries peuvent ainsi être identifiées pour le moment : M. tuberculosis, M. avium, M. kansasii, M. gordonae. Le typage moléculaire est basé sur l’étude des variations de la séquence des nucléotides de l’ADN chromosomique. La technique de référence est la technique RFLP pour Restriction Fragment Lenght Polymorphism. Cette technique n’est pas une technique de routine. Elle est longue et complexe à mettre en œuvre. Elle nécessite, pour être mise en œuvre, d’obtenir une culture pure de bacilles. Des techniques plus simples sont en cours de développement mais ne sont pas encore validées. La technique RFLP permet d’obtenir les empreintes digitales d’une bactérie et constitue ainsi un formidable marqueur épidémiologique. Cette technique a ainsi permis de faire progresser les connaissances épidémiologiques ces dernières années, notamment sur la place des infections récentes, le rôle des réinfections endogènes, l’étude dés épidémies et de la transmission à partir de foyers identifiables. d) L’antibiogramme : l’antibiogramme des souches de M. tuberculosis est indispensable. La méthode standard repose sur la mise en culture des bacilles sur milieu solide en présence des antibiotiques. Les résultats sont fiables pour tous les antituberculeux sauf le pyrazinamide. Le résultat est obtenu en 4 à 6 semaines après le résultat des cultures. C’est ce qui explique le délai de 2 mois préconisé dans le traitement en tri- ou en quadrithérapie. En effet, le sujet doit être laissé sous antibiothérapie multiple jusqu’à l’obtention de l’antibiogramme. Une méthode dite "rapide" s’est développée pour réduire le délai nécessaire aux résultats de l’antibiogramme. Elle n’est utilisable que si l’examen direct microscopique est positif, car elle nécessite une quantité de bacilles suffisante. Il s’agit alors d’ensemencer parallèlement les cultures à la fois pour l’identification du germe et pour l’antibiogramme. Le délai d’obtention de l’antibiogramme est alors de 4 semaines comme pour une culture standard. Il est actuellement possible de réaliser des antibiogrammes de M. tuberculosis par méthode de biologie moléculaire. En effet, les principales mutations responsables de la résistance du bacille de la tuberculose sont connues. Grâce à différentes techniques, on peut repérer en quelques jours les souches mutantes éventuellement porteuses de résistance. Ces techniques sont appelées à se développer dans les années qui viennent. Peut-on en 2004 diagnostiquer une infection à mycobactéries sans passer par la culture? La réponse est malheureusement non. Deux techniques sont en théorie possibles : la sérologie et l’amplification génomique par PCR (Polymerase Chain Reaction). 1. La sérologie La sérologie n’est toujours pas fiable. Malgré l’utilisation d’antigènes de mieux en mieux purifiés, il persiste toujours des réactions croisées entre M. tuberculosis et les autres mycobactéries. Ni la sensibilité, ni la spécificité obtenues actuellement ne sont satisfaisantes. De plus, il n’est toujours pas possible de dater avec précision un résultat positif (vaccination, infection évolutive, etc.). 2. L’amplification génomique par PCR L’amplification génomique par PCR est une technique en plein développement. Il n’existe actuellement qu’une seule indication : l’identification des bacilles présents dans un prélèvement respiratoire positif à l’examen direct. En effet, grâce aux techniques de PCR, on peut répondre en moins de 24 heures à la question: est-ce que les BAAR que je vois à l’examen microscopique correspondent à des souches de M. tuberculosis ou à des souches de M. avium ? La recherche de bacilles par technique de PCR sur des prélèvements d’origine respiratoire négatifs à l’examen direct est encore décevante et limitée par les possibilités techniques actuelles. II en est de même pour la recherche par PCR sur des liquides habituellement stériles (liquide pleural, liquide céphalo-rachidien, etc.). Ces tests ne sont pas recommandés. V-2 DIAGNOSTIC ANATOMOPATHOLOGIQUE DE LA TUBERCULOSE La mise en évidence de lésions histologiques (biopsies d’adénopathie, bronche, parenchyme pulmonaire, etc…°), avec organisation en granulomes (ou follicules) épithélio-giganto cellulaires avec nécrose caséeuse sont quasi pathogneumoniques, en France en tous cas, de lésions tuberculeuses. Même en l’absence de cultures positives, la présence de telles lésions dans un contexte clinique évocateur doit faire considérer le diagnostic de tuberculose. 13 Année Universitaire 2006-2007 VI Tuberculose –Pr Marquette et Pr Lafitte TRAITEMENT DE LA TUBERCULOSE PULMONAIRE Le traitement antibiotique de la tuberculose-maladie est très bien codifié (réf. OMS 1997, UICT 2000), de même que les examens cliniques et paracliniques de surveillance qui doivent être effectués. La primoinfection patente avec signes radiologiques et/ou généraux doit être considérée comme une tuberculosemaladie et traitée comme telle. VI-1 PARTICULARITES DE L’INFECTION TUBERCULEUSE RENDANT COMPTE DES REGLES DU TRAITEMENT ANTIBIOTIQUE DANS LA TUBERCULOSE. M. tuberculosis a un temps de doublement long (20 h). Ce temps de doublement explique qu’une prise quotidienne unique d’antibiotiques est suffisante pour être efficace sur ces bacilles. Une population bacillaire assez importante pour donner une maladie cliniquement décelable (1 million de bacilles), génère, par mutation sporadique, un petit nombre de bactéries résistantes aux différents antituberculeux, alors même que la souche est globalement sensible lorsqu’elle est testée au laboratoire. Le traitement antituberculeux fait donc appel à une poly chimiothérapie dont le but principal est de prévenir l’émergence de mutants résistants, l’association des antibiotiques, n’ayant pas d’effet synergique sur les bacilles tuberculeux. La monothérapie doit donc dans tous les cas être proscrite tant qu’existent des signes cliniques ou que l’on suspecte l’existence d’un nombre élevé de bacilles tuberculeux. Une monothérapie ne peut être utilisée qu’en chimioprophylaxie primaire (quand il n’y a pas d’infection) ou en chimioprophylaxie secondaire (quand seuls quelques milliers de bacilles sont présents et que l’on veut prévenir le passage du stade de primo-infection au stade de tuberculose maladie). Trois populations bacillaires sont visées par le traitement : 1. bacilles extracellulaires. Ce sont eux qui rendent compte des signes cliniques de la maladie et qui sont responsables de la contagiosité (cavernes). Ils représentent plus de 95 % du nombre total des bacilles présents au cours d’une tuberculose pulmonaire commune. Les médicaments actifs sur ces bacilles sont l’isoniazide (INH) et la rifampicine et la streptomycine. Ces antituberculeux éliminent en quelques semaines cette population de bacilles, permettant de faire disparaître les signes cliniques et de stériliser l’expectoration. 2. bacilles intracellulaires quiescents au sein des macrophages. Les médicaments actifs sur les bacilles intracellulaires sont le pyrazinamide et la rifampicine (l’INH à un moindre degré). 3. bacilles extracellulaires au sein du caséum. La rifampicine est le seul antituberculeux actif sur les bacilles présents au sein du caséum. Le taux de croissance de ces bacilles est très faible du fait d’un environnement métabolique défavorable. Les bacilles qui n’ont pas présenté de poussée d’activité métabolique durant la période du traitement sont pratiquement inaccessibles aux antibiotiques et peuvent persister des dizaines d’années sous cette forme quiescente dans l’organisme avant de se réactiver, soit spontanément, soit à l’occasion d’une diminution des défenses immunitaires. Ceci explique des cas de rechutes à distance malgré un traitement bien conduit. Ce risque justifie le maintien du traitement antituberculeux plusieurs mois après la disparition des signes cliniques afin d’éradiquer les populations bacillaires les plus difficilement accessibles. VI-2 LES PRINCIPAUX MEDICAMENTS ANTITUBERCULEUX L'isoniazide, la rifampicine, le pyrazinamide et éventuellement l'éthambutol sont les principaux médicaments utilisés actuellement. 1. Isoniazide (Rimifon), comprimés à 50 et 150 mg, ampoules IV ou IM à 500 mg. Abréviation commune : INH. II est utilisé à la posologie de 5 mg/kg/j. Une dose adaptée d'isoniazide peut être prescrite après dosage sérique de ce médicament. Ce dosage est proposé par certains en cas d'insuffisance hépatique, d'éthylisme, chez les sujets âgés ou aux antécédents d'hépatite. En effet, l'isoniazide subit une acétylation hépatique dont la vitesse est génétiquement déterminée avec des sujets acétyleurs lents ou rapides. L'isoniazide est actif sur les bacilles des cavernes et à un moindre degré sur les bacilles intramacrophagiques. Il n'a pas d'activité sur les bacilles du caséum solide. Les principaux effets secondaires sont digestifs (nausées), hépatiques (simple élévation des transaminases ou hépatite médicamenteuse dose-dépendante, nécessitant l'arrêt du médicament). Des polynévrites sensitivo-motrices (surtout en cas de carence en vit B6), des troubles neuropsychiques, des névralgies cervico-brachiales (syndrome épaule-main) et des syndromes rhumatoïdes peuvent s'observer. 2. Rifampicine (Rifadine et Rimactan), gélules à 300 mg et suspension sirupeuse : 100 mg/cuillère mesure, flacons IV à 600 mg. Abréviation commune : RMP. Elle est utilisée à la dose de 10 mg/kg/j (sans dépasser 600 mg en deçà de 85 kg). Elle est active sur les bacilles des cavernes, du caséum solide et sur les bacilles intramacrophagiques. La molécule est métabolisée par les enzymes des microsomes hépatiques : c'est un puissant inducteur enzymatique microsomal, provoquant d'importantes interactions médicamenteuses, en particulier avec les œstroprogestatifs (risque d’inactivation de la pilule contraceptive ⇒ nécessité de changer de méthode contraceptive), les anticoagulants oraux, les anesthésiques généraux, les corticoïdes, les digitaliques, les 14 Année Universitaire 2006-2007 Tuberculose –Pr Marquette et Pr Lafitte benzodiazépines et les barbituriques. La rifampicine colore les excrétas (larmes, urines, sperme) en rouge orange (prévenir les porteurs de lentilles). Elle peut induire des phénomènes immuno-allergiques (thrombopénie, anémie hémolytique, insuffisance rénale aiguë par néphropathie tubulaire interstitielle). Ces réactions immuno-allergiques s'observent surtout lors des prises discontinues du médicament et s'accompagnent parfois d'anticorps anti-rifampicine. 3. Pyrazinamide (Pirilène), comprimés à 500 mg. Abréviation commune : PZA II est utilisé à la posologie de 25 à 30 mg/kg/j. Il est contre-indiqué pendant la grossesse et en cas d'insuffisance hépatocellulaire ou d'insuffisance rénale. Il est uniquement actif sur les bacilles intramacrophagiques et son activité à ce niveau est forte, détruisant les bacilles quiescents pouvant rester plusieurs années dans les macrophages. Il évite donc les rechutes et a permis de raccourcir le traitement antituberculeux à 6 mois. Ce médicament a une toxicité hépatique, dose dépendante, moindre que celle de celle de l'isoniazide. Il provoque une hyperuricémie, (l’absence d’hyperuricémie doit faire douter de la prise du traitement), le plus souvent asymptomatique et ne nécessitant un traitement spécifique qu'en cas de signes cliniques (arthralgies, crises de goutte). Une photosensibilisation peut aussi s'observer en cas d'exposition au soleil. 3. Éthambutol (Dexambutol à 250 et 500 mg et Myambutol à 100 et 400 mg). Abréviation commune : EMB. II est utilisé à la posologie de 20 à 25 mg/kg/j. Ce médicament est uniquement bactériostatique et agit sur les bacilles des cavernes et sur les bacilles intramacrophagiques mais n'a pas d'action sur les bacilles du caséum solide. La principale complication est ophtalmologique, avec la névrite optique rétrobulbaire se manifestant initialement par un trouble de la vision des couleurs (dyschromatopsie) puis par une baisse de l’acuité visuelle. Cette complication s’observe surtout pour des doses ≥ 25 mg/kg/j, en cas d’intoxication éthylique chronique, ou chez l’insuffisant rénal. Cela impose une consultation d'ophtalmologie avant la mise en route du traitement, puis tous les mois tant que le médicament est poursuivi. 4. Streptomycine (ampoules IM à 1 g) Sa posologie est de 15 mg/kg/j (sans dépasser 1 g/j) en une injection (intramusculaire ou perfusion intraveineuse de 60 minutes). La dose cumulée ne devrait pas dépasser 120 g. Elle possède une forte activité bactéricide sur les bacilles extra-cellulaires. Fait partie des antituberculeux majeurs répertoriés par l'O.M.S. N'est plus utilisée en première intention dans la plupart des pays aujourd'hui du fait de son administration parentérale exclusive et de sa toxicité rénale et auditive dose-dépendante. La streptomycine est utilisée en deuxième intention en cas de tuberculose résistante à la rifampicine ou en cas d'atteinte de la fonction hépatique, gênant l'utilisation des autres antituberculeux de première ligne potentiellement hépatotoxiques. Son élimination est exclusivement rénale. Il est recommandé de s'assurer, avant de débuter le traitement, de l'absence d'atteinte de la huitième paire crânienne. La surveillance est rénale et auditive. Associations fixes a) Rifater comporte dans le même comprimé 50 mg d’INH, 120 mg de RMP et 300 mg de PZA, soit 4 cp/j en deçà de 50 kg, 5cp/j de 50 à 60 kg, 6 cp/j de 60 à 70 kg et 7 cp/j au-delà de 70 kg. b) Rifinah comporte 150 mg d’INH et 300 mg de RMP, soit en général 2 cp/j pour un adulte.. ! Ces médicaments permettent de simplifier l’administration du traitement et réduisent le nombre de comprimés à prendre chaque jour, facilitant l'observance du traitement et évitant la sélection par le patient d'un ou plusieurs médicaments, ce qui pourrait provoquer des résistances du bacille. ! En revanche, L’utilisation de formes combinées amène parfois à s’écarter un peu de la posologie moyenne recommandée, en restant néanmoins dans les limites fixées par l’OMS. VI-3 BILAN PRETHERAPEUTIQUE II comporte un hémogramme avec plaquettes, un bilan biologique hépatique avec transaminases, phosphatases alcalines, bilirubine et gamma GT, le dosage de la créatinine et de l'uricémie. Si l'éthambutol est utilisé, bilan ophtalmologique est nécessaire avec vision des couleurs, champ visuel et acuité visuelle. Il est indispensable de prévenir les malades de la survenue possible d'effets secondaires afin d'éviter tout arrêt intempestif d'un ou plusieurs médicaments par le patient, pouvant amener à une situation de monothérapie. La plupart des manifestations secondaires n’entraînent pas d'arrêt des médicamenteux. La survenue d'un prurit, le plus souvent lié à la prise de rifampicine ou de pyrazinamide, ne justifie pas l'arrêt du traitement et peut être traité de façon symptomatique par des antihistaminiques. Les arthralgies induites de façon peu fréquente par le pyrazinamide sont le plus souvent soulagées par les anti-inflammatoires. La complication majeure du traitement antituberculeux est l'hépatite médicamenteuse qui est potentiellement mortelle. Si la majorité des hépatites surviennent au cours des deux premiers mois de traitement, des hépatites fulminantes ont été signalées à tout moment au cours du traitement. L'estimation de l'incidence des hépatites toxiques sous isoniazide seul est estimée à 1 % (dont 1 à 6 % d'accidents mortels) et à 2,5 % si l'isoniazide est associé à la rifampicine (6,9 % chez l'enfant). S'il existe bien des hépatites au pyrazinamide la fréquence des hépatites médicamenteuses ne semble pas avoir augmenté significativement depuis que ce médicament est utilisé dans les régimes antituberculeux modernes à la posologie de 25 mg/kg/j. Le pyrazinamide semble par contre représenter un facteur de surmortalité en cas d'hépatite fulminante induite par le traitement 15 Année Universitaire 2006-2007 Tuberculose –Pr Marquette et Pr Lafitte antituberculeux. Les facteurs de risque d'hépatite sont essentiellement l'âge (> 60 ans), l'éthylisme et l'existence d'un bilan hépatique de base perturbé. L'évolution fulminante peut être parfois prévenue par un arrêt précoce du traitement. VI-4 SURVEILLANCE La surveillance est clinique et radiologique, avec confirmation de la négativation des recherches de bacille de Koch en culture après un mois de traitement. La tolérance du traitement est explorée à l'aide d'un bilan hépatique hebdomadaire au cours du 1er mois de traitement. Le rythme de surveillance est discuté au delà du premier mois. Il n'existe en effet pas d'attitude consensuelle vis-à-vis de la surveillance de la fonction hépatique au cours du traitement antituberculeux. Ainsi, la surveillance des paramètres biologiques hépatiques n'est pas recommandée par l'American Thoracic Society chez le sujet jeune, sans facteur de risque d'hépatotoxicité associé, devant la rareté des hépatites médicamenteuses sur ce terrain (0,03 %). Une surveillance bi-mensuelle ou mensuelle des paramètres biologiques hépatiques, telle qu'elle est préconisée par certains, voire hebdomadaire comme le recommande l'A.M.M. du Rifater®, ne met pas à l'abri de l'hépatite fulminante, celle-ci pouvant se développer en l'espace de 72 heures. Au-delà du rythme de surveillance du bilan hépatique, il paraît surtout essentiel de sensibiliser les patients visà-vis de l'apparition des signes précoces d'insuffisance hépatocellulaire (nausées, vomissements, douleurs abdominales, asthénie), qui ne doivent pas être mis sur le compte d'effets secondaires banals, mais doivent faire interrompre le traitement jusqu'à ce qu'un bilan hépatique soit pratiqué. Les signes plus évocateurs, tels que l'ictère et l'encéphalopathie, sont tardifs et l'arrêt du traitement à ce stade n'évite le plus souvent plus l'évolution vers l'hépatite fulminante. Chez un patient sans signes digestifs, en cas d’élévation des transaminases sous traitement avec SGOT < 3 fois la normale, il est recommandé une surveillance rapprochée jusqu’à normalisation ainsi qu’une vérification des posologies des antituberculeux. En cas d’élévation des SGOT entre 3 et 6 fois la normale durant la phase initiale d’un traitement standard, il est recommandé d’arrêter le pyrazinamide et de poursuivre la rifampicine, l’isoniazide et l’éthambutol, puis de prolonger de 3 mois la deuxième phase du traitement standard. En cas d’élévation des transaminases avec SGOT à plus de 6 fois la normale (10 fois pour l’OMS) il est recommandé d’arrêter complètement le traitement antituberculeux pour au moins 48 heures. L’INH pourra être réintroduit si besoin à doses adaptées après normalisation des paramètres biologiques hépatiques, sous couvert d'une surveillance rapprochée des transaminases. En cas d'hépatite symptomatique, l'ensemble du traitement antituberculeux doit être suspendu. Le traitement de substitution peut faire appel à l'éthambutol, la rifampicine, les aminosides et/ou les fluoroquinolones. Enfin, il convient de vérifier l'absence d'hépatite virale associée, indistinguable d'une hépatite toxique et pouvant rendre compte de la cytolyse hépatique dans un nombre non négligeable de cas. Surveillance minimale du traitement d’une tuberculose pulmonaire Consultation Avant Traitement + J15 M1 M2 M6 M9 M12 + + + + + + + + Recherche de BK + +* Radio de thorax + + Transaminases + Examen ophtalmo + + si EMB NFS, plaquettes, créat Uricémie + si anomalies + si EMB + si EMB + * si l’examen initial était positif VI-5 REGIMES ANTITUBERCULEUX PROPOSES Il n’y a pas de schéma thérapeutique universellement validé. Cependant, les régimes de 6 mois sont actuellement la base du traitement de toutes les formes de tuberculose avec un taux de succès ≥ 95 %. Le schéma suivant (6 mois) est actuellement proposé : Traitement de 6 mois M1 M2 M3 M4 M5 M6 INH RMP PZA EMB INH RMP PZA EMB INH RMP INH RMP INH RMP INH RMP Sous forme combinaison de médicaments antituberculeux séparés (INH et RMP et PZA et EMB) pendant 2 mois suivi (INH et RMP) pendant les 4 mois suivants. 16 Année Universitaire 2006-2007 Tuberculose –Pr Marquette et Pr Lafitte Ce schéma a le mérite de répondre au problème des formes présentant une résistance primaire à l’INH. Autres schémas thérapeutiques schéma de 9 mois Traitement de 6 mois M1 M2 M3 M4 M5 M6 M7 M8 INH RMP EMB INH RMP EMB INH RMP EMB INH RMP INH RMP INH RMP INH RMP INH RMP M9 INH RMP Ce schéma de 9 mois, largement utilisé jusqu’il y quelques années, a la particularité de ne pas comporter de PZA. Il est recommandé en cas de contrindication à l’utilisation de PZA : femme enceinte, insuffisance hépatique sévère, hyperuricémie sévère, symptomatique, non contrôlée. Le premier objectif de la polychimiothérapie est l’action complémentaire des antibiotiques sur les différentes populations de bacilles qui permet d’obtenir la guérison en 6 mois et d’éviter la rechute à bacilles sensibles. Dans ce cadre, les deux antibiotiques essentiels sont l’isoniazide et la rifampicine. L’historique des essais thérapeutiques antituberculeux montre que c’est la rifampicine, associée à l’isoniazide, qui a permis dans un premier temps de réduire la durée du traitement de 18 à 9 mois, en raison de son action sur les bacilles à multiplication lente du caséum. Le pyrazinamide, qui joue un rôle très important grâce à son action sur les bacilles intracellulaires, a permis de réduire dans un second temps la durée du traitement de 9 à 6 mois. Le deuxième objectif de la polychimiothérapie est d’empêcher la sélection de mutants résistants à l’origine de rechutes à bacilles résistants. En effet, avant la mise au traitement, il y a dans les lésions excavées (cavernes, 8 2 10 bacilles) d’un malade infecté par une souche normalement sensible, 10 bacilles résistants à l’isoniazide (1 6 7 sur 10 et 10 bacilles résistants à la rifampicine (1 sur 10 ). L’association isoniazide-rifampicine permet d’éviter la sélection de mutants résistants à chacun d’entre eux, inéluctable en cas de monothérapie par l’un de ces deux antibiotiques. L’éthambutol, antibiotique bactériostatique, joue un rôle très important en évitant la sélection de mutants résistants à la rifampicine en cas de tuberculose multibacillaire à souche d’emblée résistante à l’isoniazide (résistance dite primaire), ce qui est le cas chez un peu moins de 5 % des patients n’ayant jamais reçu d’antituberculeux (chiffre stable en France depuis une dizaine d’années). Cette proportion de patients avec une souche d’emblée résistante à l’isoniazide est la conséquence des échecs thérapeutiques par sélection de mutants résistants survenus lorsque le traitement de la tuberculose n’était pas bien codifié. Lorsque l’on dispose des résultats des tests de sensibilité, l’utilité de l’adjonction de l’éthambutol pour les tuberculoses à bacilles sensibles à l’isoniazide peut être discutée, puisque l’éthambutol n’est vraiment utile qu’en cas de résistance à l’isoniazide. Cependant, les résultats des tests de sensibilité étant disponibles en général 5 à 7 semaines après le prélèvement, et la durée de la phase initiale du traitement comprenant l’éthambutol étant de 2 mois, le retentissement pratique des résultats de l’antibiogramme sur l’arrêt de l’éthambutol est limité. VI-6 CAS PARTICULIERS 1. Femme enceinte : bien que l’AMM française n’ait pas été modifiée en ce sens, compte tenu des données accumulées sur la tolérance du pyrazinamide par l’OMS, un traitement standard peut être utilisé, en particulier en cas de tuberculose bacillifère 2. Insuffisant rénal : clairance de la créatinine > 30 ml/min, le traitement antituberculeux standard est recommandé ; l’éthambutol étant utilisé dans la fourchette basse de posologie (15 mg/kg) clairance < 30 ml/min il est recommandé de réduire la posologie d’éthambutol (7-10 mg/kg), de réduire celle du pyrazinamide (15 mg/kg) et de l’isoniazide (3-4 mg/kg) patient dialysé : il est recommandé d’administrer le traitement 3 fois par semaine, après chaque dialyse. L’éthambutol ne sera utilisé que chez les sujets bacillifères et à la posologie de 10 mg/kg après chaque dialyse. La posologie unitaire de rifampicine et de pyrazinamide est inchangée, la posologie unitaire d’isoniazide est de 3-4 mg/kg. Des dosages sériques sont recommandés. 3. Enfant : le traitement recommandé est l’association isoniazide, rifampicine et pyrazinamide, l’utilisation de l’éthambutol est réservée aux cas riches en bacilles ou suspect d’être à bacilles résistants. Chez l’enfant de moins de 2 ans, il est recommandé d’administrer l’isoniazide à la posologie de 10 mg/kg/j 4. La supplémentation en pyridoxine (vitamine B6) st recommandée pour limiter la toxicité neurologique de l’INH chez le patient dénutri 5. Insuffisant hépatique : le PZA est déconseillé. La streptomycine peut être associée au autres antituberculeux à la phase initiale du traitement. 6. Chez les malades justifiant une corticothérapie au long cours, il est recommandé d’augmenter les doses de corticoïdes de 30 à 50 %du fait de l’induction enzymatique induite par la rifampicine. Il est recommandé de ne pas modifier le traitement antituberculeux 17 Année Universitaire 2006-2007 Tuberculose –Pr Marquette et Pr Lafitte 7. En cas de survenue d’une tuberculose maladie sous anti-TNF, il est recommandé d’arrêter l’anti-TNF et de débuter un traitement antituberculeux standard 8. Sujets âgés : rien de particulier, sinon une tolérance au traitement plus difficile, en particulier lors de la mise en route du traitement. Vigilance toute particulière sur la toxicité hépatique de l’INH. 9. Patients VIH+ :un grand nombre d’interactions médicamenteuses avec les anti-rétroviraux justifie une prise en charge toute particulière en milieu spécialisé. 10. Contre-indication à l'un des antituberculeux majeurs On peut retenir de manière synthétique que la durée du traitement est augmentée : à 9 mois en cas de contre-indication au pyrazinamide ou à l'isoniazide, à 12 mois en cas de contre-indication à la rifampicine. S'il est impossible d'utiliser la rifampicine, le traitement peut comporter l'association isoniazide/ éthambutol/pyrazinamide plus ou moins streptomycine pendant trois mois, suivie de 9 mois de bithérapie par isoniazide et éthambutol. Si au cours d'un traitement classique la rifampicine doit être interrompue après 3 mois de traitement, elle peut être remplacée par l'éthambutol, l'association isoniazide/éthambutol devant être poursuivie pendant 6 mois. En cas de contre-indication à l'isoniazide, l'association rifampicine/éthambutol/pyrazinamide plus ou moins streptomycine est maintenue pendant les 3 premiers mois, suivie d'une bi-thérapie par rifampicine /éthambutol pendant 6 mois. VI-7 REGLES PRATIQUES ! ! ! ! M. tuberculosis a un temps de doublement long (20 h). Ce temps de doublement explique qu’une prise quotidienne unique d’antibiotiques est suffisante pour être efficace sur ces bacilles. Chaque antituberculeux est à prendre en une seule prise journalière. Le rationnel de l’association d’antituberculeux n’est pas basé sur une synergie d’action mais vise à éviter la sélection de mutants résistants. L’absorption de la RMP est meilleure à jeun. Les pansements gastriques # l’absorption des antituberculeux. De façon générale on prescrit le prise de l’ensemble des antituberculeux en une prise unique le matin à jeun De nombreux patients ressentent rapidement un véritable dégoût face à l’obligation de prendre un nombre important de comprimés (5 à 12 en début de traitement) tôt le matin (30 min avant le petit déjeuner). Ceci risque de diminuer la qualité de l’observance thérapeutique. Il est donc indispensable de revoir le patient 15 jours après la mise en route du traitement pour s’assurer de sa bonne tolérance. Tenant compte des rappels ci-dessus on peut proposer les adaptations suivantes : ! Pour les associations fixes (Rifater et Rifinah) on peut proposer de prendre les comprimés à distance des repas (milieu de matinée ou milieu d’après-midi). ! Pour la prise individuelle on peut proposer de séparer les prise des médicaments. Par exemple : rifampicine le matin à jeun (30 min avant le petit déjeuner), pyrilène et isoniazide le midi. L’important étant de ne pas diviser dans la journée la prise d’un antituberculeux (il ne faut pas par exemple dire au patient de prendre 1 cp d’ isoniazide et 1 cp de rifampicine matin, midi et soir). VI-8 TRAITEMENT DE LA TUBERCULOSE-INFECTION LATENTE Définitions et Principes ! Chimioprophylaxie secondaire : A n’importe quel moment d’une primo-infection tuberculeuse (tuberculoseinfection) puis au décours, les bacilles "quiescents", présents au niveau partir d’un ou de foyer(s) secondaire(s) ou, plus rarement au niveau du foyer primaire, peuvent se multiplier et être alors responsable d’une "tuberculose maladie" qui s’exprime alors cliniquement et/ou radiologiquement. On estime qu’environ 10 % des patients développent une "tuberculose maladie" au décours d’une tuberculose-infection (5 % dans l’année qui suit leur PIT et 5 % des au delà de ce délai). Ces chiffres sont la base de la chimioprophylaxie secondaire, le but étant d’éradiquer les bacilles d’un sujet infecté avant que le patient ne développe une éventuelle tuberculose active. ! Chimioprophylaxie primaire : traitement préventif des sujets à risque exposés à un cas de tuberculose contagieuse, en attendant de savoir si le sujet a développé ou non une infection tuberculeuse définie par le virage de l’IDR. Il est recommandé, suite à l’exposition à un cas de tuberculose pulmonaire, un traitement prophylactique pour tout enfant de moins de 2 ans ou tout sujet, enfant ou adulte, immunodéprimé ou porteur d’une pathologie chronique l’exposant à un risque élevé de progression rapide vers la tuberculose-maladie, même en l’absence de critères initiaux d’infection tuberculeuse. L’indication du traitement de la tuberculose-infection dépend des choix de santé publique retenus dans chaque pays. Ces choix faits en général au niveau national dépendent de l’épidémiologie tuberculeuse de la population concernée et du niveau de développement socio-économique du pays, en particulier de son système de santé. 18 Année Universitaire 2006-2007 Tuberculose –Pr Marquette et Pr Lafitte ! Dans les pays en développement, seule une partie des malades tuberculeux est diagnostiquée et soignée : « ceux qui émettent suffisamment de bacilles pour être positifs à l’examen direct (BAAR+) et qui présentent donc une maladie et un risque pour leur entourage » ! Dans des pays à niveau de développement intermédiaire, il existe une recommandation de soigner tous les cas de tuberculose-maladie, mais de ne pas traiter la tuberculose-infection. ! Aux États-Unis et dans certains pays industrialisés et à incidence de tuberculose faible (Incidence < à 25 / 100 000 personnes), la recommandation est depuis des années de traiter tous les cas de tuberculose-maladie, mais aussi tous les cas de tuberculose-infection avérée récents. En France, jusqu’à une date récente, la recommandation était de traiter tous les cas de tuberculose-maladie et les tuberculoses-infection de l’enfant, mais de ne pas traiter la simple tuberculose-infection de l’adulte. Depuis mars 2003 il recommandé en France (Conseil Supérieur d'Hygiène Publique de France) de traiter plus largement les tuberculoses-infection diagnostiquées autour d’un cas, y compris chez l’adulte. La suppression de la revaccination permettra, chez l’adulte, une meilleure interprétation de l’IDR. Indications actuelles du traitement de la tuberculose-infection ! tuberculose-infection de l'enfant de moins de 15 ans, qu'elle soit récente ou non ! tuberculose-infection de l'adulte immunodéprimé, ou devant recevoir un traitement immunosuppresseur ! tuberculose-infection récente de l'adulte (estimée à moins de 2 ans), lors du dépistage autour d'un cas dans la population générale ou de la surveillance des membres des professions exposées ! tuberculose-infection séquellaire latente : malades porteurs de séquelles radiologiques de tuberculose sans signes locaux ou généraux évoquant une tuberculose-maladie évolutive, n'ayant jamais reçu d'association d'antituberculeux bactéricides, et susceptibles d'être atteints par une baisse des défenses immunitaires. Deux schémas thérapeutiques sont proposés (les données de la littérature ne permettent pas de recommander de façon définitive l'un ou l'autre de ces 3 schémas): 1-lsoniazide en monothérapie, 4 à 5 mg/kg/j pendant 9 mois, 2-Rifampicine 10 mg/kg/j et Isoniazide 4 à 5 mg/kg/j pendant 3 mois Un troisième schéma, qui fait appel à la Rifampicine 10 mg/kg/j et au Pyrazinamide 20 mg/kg/j pendant 2 mois n’est pas recommandé par la Société de Pneumologie de Langue Française (2003) en raison d’un moins bon rapport bénéfice/toxicité (rifampicine - pyrazinamide) Cas particuliers: 1. Dans les exceptionnels cas où l’on a lors de l’initiation de ce traitement l’antibiogramme de la souche du contaminateur supposé, on pourra être conduit à proposer d’autres schémas thérapeutiques : ! en cas de résistance isolée à l’Isoniazide : Rifampicine et Pyrazinamide durant 2 mois ou Rifampicine et Ethambutol durant 3 mois. ! en cas de résistance associée à Isoniazide et Rifampicine : l’appel au spécialiste est indispensable, qui pourra dans certains cas proposer : Fluoroquinolone active sur les mycobactéries et Ethambutol ou Pyrazinamide ou d’autres schémas thérapeutiques à la demande après avoir pesé le rapport bénéfice/risque de chacun des choix possibles. 2. Si une monothérapie par isoniazide est choisie, le traitement pourra atteindre 12 mois chez tous les sujets immunodéprimés. Une durée de 6 mois est insuffisante sur ce terrain. En effet, ce schéma thérapeutique ne permet pas d'atteindre les bacilles intracellulaires et le risque de développement retardé de la maladie est important. 3. Le schéma thérapeutique de 3 mois associant Rifampicine et Isoniazide est proposé chez les sujets ayant positivé les réactions cutanées à la tuberculine. Ce traitement est en effet actif partiellement sur les bacilles intracellulaires et permettrait parfois une stérilisation des lésions. 4. Le schéma thérapeutique de 2 mois Rifampicine et Pyrazinamide qui s’était montré très efficace sur les modèles animaux, n’a pas d’efficacité supérieure aux autres schémas thérapeutiques dans les essais conduits chez l’homme et s’accompagne d’une toxicité supérieure. Son utilisation devra conduire à une surveillance hépatique régulière. Ce traitement n’est pas recommandé en première intention. 5. Chez les malades avec des séquelles de tuberculose et chez qui une baisse des défenses immunitaires est attendue, le choix du schéma thérapeutique n’est pas standardisé : avant une greffe d’organe on choisira plutôt un traitement antituberculeux standard, alors que pour une baisse très provisoire des défenses on pourra se contenter d’un traitement par l’Isoniazide. 6. En raison de fréquentes interactions entre la Rifampicine et certains médicaments (antirétroviraux, ciclosporine, corticoïdes…), son utilisation devra être envisagée au cas par cas et nécessitera l’avis d’un spécialiste. 7. Pour les schémas thérapeutiques contenant Rifampicine et Isoniazide, on privilégiera les formes associées. La surveillance du traitement sera conduite comme pour tout traitement antituberculeux. 19 Année Universitaire 2006-2007 Tuberculose –Pr Marquette et Pr Lafitte VII- PREVENTION DE LA TUBERCULOSE Le prévention de la tuberculose passe par 1. La reconnaissance des cas de tuberculose contagieuses et l’enquête autour de ces cas,et par leur traitement correct (cf VI et VII) 2. La vaccination par le BCG 3. Le respect de dispositions légales (déclaration obligatoire de la maladie) VII-1 Investigations à conduire autour d’un cas de tuberculose ou de primo-infection tuberculeuse récente (d’après le BEH. n°9, 1994. V. Schwoebel, B. Hubert, JC Desenclos) Les personnes de l'entourage proche des malades porteurs de tuberculose contagieuse sont les plus exposées au risque de primo-infection tuberculeuse et, lorsqu'elles ont été infectées, c'est dans la période qui suit immédiatement la primo-infection qu'elles ont le plus grand risque de développer une tuberculose-maladie. Ces 2 éléments fondamentaux de l'épidémiologie et de l'histoire naturelle de la tuberculose justifient la priorité du dépistage des cas de primo-infection et de tuberculose-maladie dans l'entourage d'un malade dont la tuberculose a été récemment diagnostiquée. La famille ne constitue pas le seul milieu favorable à la transmission du bacille tuberculeux. Les collectivités reproduisant des conditions de promiscuité assez similaires à la promiscuité familiale sont multiples. Certaines d'entre elles peuvent regrouper des personnes particulièrement susceptibles (jeunes enfants, adolescents, malades immunodéprimés ou, de plus en plus, personnes infectées par le V.I.H.), ce qui justifie une vigilance particulière. Dans la situation épidémiologique actuelle de la France où l'incidence de la tuberculose est devenue relativement basse, le dépistage «ciblé» prend toute son importance. Les objectifs de l'investigation sont d'abord d'identifier les personnes pouvant être des sources d'infection et de les traiter pour interrompre la chaîne de transmission, ensuite d'identifier les personnes récemment infectées et de leur offrir, le cas échéant, une chimioprophylaxie secondaire (cf.supra) pour empêcher que leur primo-infection n'évolue à court terme vers une tuberculose-maladie. Dans une collectivité, il faut de plus évaluer le risque de transmission et mettre en évidence les éventuels facteurs favorisant cette transmission afin d'adapter les mesures préventives. VII-1a Évaluation du risque de transmission Elle repose sur l'évaluation de 3 types d'éléments qui doivent être passés en revue systématiquement : le cas contagieux et ses caractéristiques; l'environnement; le type de contacts entre le cas et son entourage. a- Le cas contagieux et ses caractéristiques II peut s'agir du premier cas découvert ou de cas diagnostiqués ultérieurement au cours de l'investigation. Les caractéristiques à évaluer sont celles qui témoignent de la capacité du malade à produire des aérosols de particules contenant des bacilles tuberculeux : La présence de B.A.A.R. à l’examen direct d’au moins 2 frottis d'expectoration (ou tubage gastrique, lavage broncho-alvéolaire) est le signe d'une contagiosité maximale. Les malades porteurs de tuberculose à l’examen microscopique sont en effet responsable de l’essentiel de la transmission. La présence de B.A.A.R. ne permet pas de différencier entre les bacilles tuberculeux et les mycobactéries atypiques et n'est donc pas spécifique de la tuberculose qui doit être confirmée par la culture, mais elle est un élément de forte présomption du diagnostic lorsqu'elle est associée à des signes cliniques et radiologiques si l'examen microscopique direct est négatif (la négativité étant affirmée sur un minimum de 3 échantillons successifs), la présence de bacilles tuberculeux (Mycobacterium tuberculosis, bovis ou africanum) à la culture de l'expectoration est un signe de contagiosité potentielle mais beaucoup plus réduite qu'en cas d'examen microscopique positif. en cas de négativité de l'examen microscopique direct et de la culture de l'expectoration, la contagiosité peut être considérée comme négligeable. Un minimum de 3 échantillons successifs est requis pour affirmer cette négativité. la contagiosité devient nulle généralement moins de 2 semaines après le début d'un traitement efficace et bien conduit. La grande majorité de la transmission du bacille à des sujets contacts immunocompétents a lieu avant le diagnostic et la mise en route du traitement du cas. Le risque de contamination sous traitement persiste dans les cas où les bacilles tuberculeux sont d’emblée multirésistants, ce qui est actuellement rare en France. La résistance du bacille à un seul des antituberculeux majeurs utilisés (il s’agit le plus souvent de l’isoniazide) ne diminue pas l’efficacité du traitement standard recommandé en France. Elle n’a donc aucune influence sur la contagiosité du malade. En revanche la multirésistance, lorsqu’elle concerne à la fois l’isoniazide et la rifampicine, allonge la période de contagiosité et augmente de ce fait le risque de transmission. Les autres facteurs qui ont une influence sur le risque de transmission sont : La présence d’une caverne pulmonaire (car cette forme est très riche en bacilles) 20 Année Universitaire 2006-2007 Tuberculose –Pr Marquette et Pr Lafitte La laryngite tuberculeuse (forme clinique exceptionnelle) L’intensité et la durée de la toux Les expirations forcées spontanées (chants, cris) ou provoquées par des manœuvres particulières (kinésithérapie, aérosols) b- L’environnement La transmission du bacille tuberculeux s'effectue exclusivement par voie aérienne par l'intermédiaire d'aérosols de mucus contenant des bacilles qui, en se desséchant, restent en suspension dans l’air. Tout facteur susceptible d'influencer la concentration des bacilles dans l'air ambiant agira sur le risque de transmission. Les conditions les plus favorables sont réunies dans un lieu fermé partagé par le malade contagieux et son entourage. Le premier facteur à évaluer est le volume de ce lieu fermé : plus il est faible, plus la concentration est grande. Dans une collectivité, il est recommandé de procéder à l'évaluation des locaux : pièces fréquentées ou non par le malade contagieux, circulation de l’air entre les pièces en tenant compte des éléments suivants : L’aération ou ventilation de la pièce avec l’air extérieur diminue la concentration des bacilles mais pour qu’elle soit efficace, doit répondre à certains critères (notamment assurer un renouvellement suffisant de l’air) et la porte doit être maintenue fermée L’existence d’une pression positive dans la pièce où se trouve le cas favorise la diffusion des particules à l’extérieur de la pièce lors de l’ouverture des portes • les systèmes de ventilation en circuit fermé favorisent la dispersion des bacilles. c- Le type de contacts antre le cas et son entourage Les éléments à évaluer sont la proximité des personnes en contact avec le cas de tuberculose contagieuse et le temps passé au contact de ce cas. Ces éléments permettent de classer les contacts en 3 catégories : contact étroit : personnes habitant sous le même toit ou personnes partageant le même pièce pendant de nombreuses heures par jour contact régulier : personnes partageant régulièrement le même lieu fermé contact occasionnel : personnes partageant occasionnellement le même lieu fermé Les membres de la famille vivant dans le même foyer que le cas contagieux sont toujours classés dans la catégorie des contacts étroits et c'est parmi eux que le dépistage sera conduit en priorité. VII-1b Évaluation des facteurs de risque des personnes exposées La probabilité de faire une tuberculose-maladie à la suite d'une primo-infection tuberculeuse est d'autant plus grande que la quantité des bacilles transmis est importante. Cette quantité sera appréciée à l'aide des éléments cités ci-dessus. La probabilité dépend en outre de différentes caractéristiques Facteurs de risques âge: enfants de moins de 5 ans, adolescents; pathologies induisant une dépression immunitaire (diabète alcoolisme, malnutrition), traitements immunosuppresseurs (corticoïdes, chimiothérapie anti-cancéreuse...), silicose; infection à V.I.H., d'autant plus que l’immunodépression est importante (diminution des lymphocytes CD4) Facteurs protecteurs vaccination par le B.C.G. : les personnes vaccinées par le B.C.G. ont acquis une .immunité les protégeant de l'évolution d'une primo-infection tuberculeuse en tuberculose-maladie. L'efficacité protectrice du B.C.G. a été estimée au maximum à 80 % pour la tuberculose toutes formes chez des sujets non immunodéprimés, et supérieure à 80 % pour les formes graves de tuberculose de l'enfant (miliaire et méningite). L'efficacité diminue à distance de la vaccination : la durée de la protection est généralement estimée à 15 ans. infection tuberculeuse antérieure : les personnes avant déjà fait une primo-infection tuberculeuse ont développé une immunité les protégeant partiellement contre les conséquences d'une réinfection ultérieure. Cependant, il faut rappeler que ces personnes sont également à risque de faire une tuberculose par réactivation endogène de leur infection ancienne. C'est le cas pour la majorité des malades actuellement diagnostiqués dans les pays industrialisés, surtout chez les sujets âgés. VII-1c Stratégies d’investigation Dans quelles situations entreprendre les investigations Devant tout cas nouvellement diagnostiqué de tuberculose contagieuse, on doit entreprendre une recherche de cas de tuberculose-maladie et de personnes primo-infectées dans l'entourage. Cette recherche constitue une priorité car elle permet de dépister et de prévenir rapidement des cas secondaires. Devant un cas démontré de primo-infection récente, soit patente (avec signes radiocliniques), soit latente (virage simple), on recherchera le contaminateur et ensuite les éventuelles autres personnes primo-infectées. En revanche, cette recherche ne se justifie pas pour une réaction tuberculinique positive retrouvée lors d'un dépistage systématique en l'absence d'autres éléments. Comment conduire le dépistage ? Tout cas de tuberculose pulmonaire BAAR + à l’examen microscopique et/ou culture + doit être signalé sans délai aux services de lutte antituberculeuse (LAT), et notifié aux autorités sanitaires (DDASS), pour leur permettre de 21 Année Universitaire 2006-2007 Tuberculose –Pr Marquette et Pr Lafitte procéder au dépistage parmi les membres de la famille, en liaison avec le médecin traitant et le médecin qui a fait le diagnostic. Si le malade appartient à une collectivité, le dépistage est conduit par les services de LAT, en collaboration avec le médecin intervenant dans la collectivité. Le principe du dépistage est de procéder en cercles concentriques autour du cas (selon l’image du « caillou dans l’eau »). Dans une famille, le dépistage parmi les personnes vivant sous le même toit est souvent suffisant. Dans une collectivité, la liste des personnes en contact avec le malade sera établie pour les classer en 3 catégories selon leur proximité. Le dépistage sera d’abord entrepris dans la catégorie des personnes ayant un contact étroit avec le malade (cf. ci-dessus). La décision d’étendre le dépistage aux autres catégories (contact régulier, puis contact occasionnel) sera prise en fonction : du nombre d’infections récentes trouvées dans la catégorie des personnes en contact étroit ; de la présence de personnes particulièrement vulnérables dans les autres catégories, notamment de personnes infectées par le VIH. VII-2 La vaccination par le BCG Le vaccin par le BCG a encore un caractère obligatoire en Frances. En revanche, mais les contrôles tuberculiniques systématiques et la revaccination ne sont plus obligatoires depuis mars 2003. Les services de lutte antituberculeuse assurent la réalisation des BCG pratiqués sur le territoire français, essentiellement aux enfants avant la scolarisation ou avant l’entrée en collectivité. Le BCG confère un certain degré d’immunité vis-à-vis de l’infection tuberculeuse. Chez des sujets non immunodéprimés, l’efficacité protectrice du BCG pour toutes formes de tuberculose a été estimée à 50 %. Pour les formes graves de tuberculose de l’enfant (miliaire et méningite), elle est supérieure à 80 %. L’efficacité diminue à distance de la vaccination ; la durée de la protection est généralement estimée à 15 ans. Si l’efficacité du BCG sur les formes graves de l’enfant est reconnue, la prévention par cette vaccination des formes de l’adulte, en particulier les tuberculoses pulmonaires, est très discutée. Compte tenu de ces éléments, le Conseil Supérieur d’Hygiène Publique de France s’est prononcé pour la suppression de la revaccination, même chez les personne ayant une IDR négative, sous réserve qu’ils aient été vaccinés, même une seule fois dans l’enfance. VII-3 La déclaration obligatoire de la maladie En France, la tuberculose est une maladie à déclaration obligatoire (DO) depuis 1964. La déclaration obligatoire : permet au niveau national, de suivre les tendances de la maladie et l’évolution des caractéristiques des groupes à risque. permet au niveau départemental, de réaliser les investigations autour d’un cas, de mettre en place les mesures pour contrôler la transmission de la maladie, et d’orienter la politique vaccinale et les actions de lutte antituberculeuse. Jusqu’à un passé récent (2003), la tuberculose-infection latente (« primoinfection sans localisation patente » ou « simple virage des tests tuberculiniques ») ne devaient pas être déclarées. Actuellement, doivent être déclarés : • • Tuberculose-maladie Cas confirmés Cas probables Tuberculose-infection latente (primo-infection) chez un enfant de moins de 15 ans Les infections dues aux mycobactéries atypiques ne doivent pas être déclarées. Le formulaire de déclaration obligatoire est donné en ANNEXE 22 Année Universitaire 2006-2007 Tuberculose –Pr Marquette et Pr Lafitte TUBERCULOSE – LES CHANGEMENTS RECENTS Les données épidémiologique de la tuberculose en France ont changé au cours des 10 dernières années. De nouvelles techniques diagnostiques sont apparues. Les schémas thérapeutiques ont gagné en clarté. Ceci a conduit le Conseil supérieur d'hygiène publique de France a élaborer de nouvelles recommandations sur les stratégies de prévention et de prise en charge de la tuberculose. La Société de Pneumologie de Langue Française a organisé une conférence d’experts en 2003 sur le sujet. Ce document tente de faire la synthèse des récents changements dans le domaine qui reste aussi ancienne que l’humanité. EPIDEMIOLOGIE : ème cause de décès par maladie dans le monde. Son incidence de la maladie Dans le monde : La tuberculose est toujours la 5 varie de moins de 10/100 000 (amérique du nord) à plus de 300/100 000 (Afrique sub-saharienne). Elle croît avec le niveau de pauvreté et l’incidence de l’infection par le VIH. En Europe : sur la période 1995 - 1999, l’incidence est < 20/100 000 habitants. Ces taux sont stables ou en diminution dans la plupart des pays d'Europe de l'Ouest. Dans les pays de l'ex-URSS, les taux de déclaration sont supérieurs à 50 cas pour 100 000, en augmentation très nette (+50% en 5 ans). Les données représentatives sur les antibiogrammes en début de traitement montrent un niveau de multirésistance primaire inférieur à 1% en Europe de l'Ouest et du Centre et très élevé dans les pays Baltes (8-17%). En France : l'incidence était de 11,2 cas pour 100 000 habitants en 2000. Elle ne diminue plus depuis 1997. La situation épidémiologique de la tuberculose est principalement inquiétante en Ile-de-France où l'incidence est plus du double de l'incidence nationale. La part du VIH est de moins en moins importante. Les personnes en provenance d'un pays d'endémie tuberculeuse ont un risque multiplié par 8 par rapport aux nationaux et plus particulièrement les adultes jeunes. Les situations de précarité économique et sociale contribuent également à cette situation. PRIMO-INFECTION TUBERCULEUSE (PIT) ET TUBERCULOSE "MALADIE" : Le terme primo-infection tend a être remplacé par le terme tuberculose infection. Le risque de passage de la tuberculoseinfection à la tuberculose-maladie varie en fonction de l’âge et du délai par rapport à l’exposition contaminante. Il est plus important chez l’enfant, estimé à 43 % avant l’âge d’un an, 24 % entre 1 et 5 ans, 15 % entre 11 et 15 ans. Chez l’adulte le risque est de l’ordre de 5 à 10 %, avec un risque plus fort dans les 2 années qui suivent la contamination. Ces chiffres sont la base de la chimio-prophylaxie proposée dans la tuberculose infection. L’INTRA DERMO REACTION (IDR) A LA TUBERCULINE Son principe n’a pas changé elle vise toujours à mettre en évidence une réaction d’hypersensibilité retardée induite par les antigènes mycobactériens (M. tuberculosis, BCG, mais aussi certaines mycobactéries atypiques) mais elle n’est pas toujours le synonyme d’une protection efficace vis à vis du bacille tuberculeux. En revanche la tuberculine Mérieux est maintenant abandonnée. Une nouvelle tuberculine a été mise à disposition en France et dans les autres pays européens à partir de 2003 (Tubertest®, Laboratoires Aventis Pasteur, déjà commercialisée en Amérique du Nord sous le nom de Tubersol®) et semble meilleure en terme de sensibilité et de spécificité. Elle se présente sous la forme d’une solution liquide prête à l’emploi (1 ampoule de 1 ml = 10 doses tests). L’injection se fait toujours en intra-dermique à la face antérieure de l’avant-bras, d’un volume exact de 0,1 ml de la solution liquide de tuberculine (soit 5 unités de tuberculine ème heure. Elle peut être Tubertest®), avec une aiguille courte et fine à biseau très court. La lecture s’effectue idéalement à la 72 ème jour chez les sujets âgés pour lesquels la réactivation peut se développer plus lentement. Il est possible différée jusqu’au 5 de réaliser une IDR après application de lidocaïne en patch, sans risque d’interaction ni de modification de la réaction. L’induration qui s’est développée autour du point de ponction est mesurée transversalement par rapport au sens de l’injection, les limites de l’induration étant déterminées par la palpation. Les dimensions de la réaction érythémateuse entourant l’induration n’ont aucune signification. INTERPRETATION DE L’IDR A LA TUBERCULINE L’IDR est jugée négative lorsque le diamètre d’induration est < à 5 mm. Elle est jugée positive Virage de l’IDR lorsque le diamètre d’induration ≥ 5 mm. Le virage de l’IDR se définit de la manière suivante : En l’absence de vaccination par le BCG une IDR ≥ 10 mm est en faveur d’une infection tuberculeuse. Chez les sujets vaccinés par le BCG l’IDR est ≥ à 5 mm (voir parfois ≥ 10 mm) dans les premières années qui suivent la vaccination. Dix ans après la vaccination par le BCG, une IDR ≥ 10 mm est le témoin d’une rencontre avec du bacille tuberculeux sauvage dans près de 90 % des cas. LA PRESENTATION CLINIQUE DE LA TUBERCULOSE L’expression clinique est non spécifique. C’est un patient d’un groupe à risque qui tousse et qui est fatigué. Et c’est encore et toujours la radiographie pulmonaire (± scanner) qui en présence d’infiltrat(s), de nodule(s) ± cavité(s) dans les segments pulmonaires supérieurs et postérieurs qui doit faire évoquer le diagnostic. LE DIAGNOSTIC BACTERIOLOGIQUE DE LA TUBERCULOSE Il repose sur la mise en évidence de bacilles acido-alcoolo-résistants (BAAR) à l’examen direct ou, à défaut, en culture. Chez le sujet qui ne crache pas (enfant notamment) l’expectoration induite peut remplacer le tubage gastrique et le prélèvement bronchoscopique. Le résultat (examen direct et délai de positivité des cultures) dépend toujours de la richesse en bacilles La culture sur milieux liquide tend cependant à accélérer le rendu des résultats quand l’examen direct est négatif (2 semaines au lieu de 4 pour les cultures en milieu solide). Les progrès techniques réalisés ces dernières années, en particulier en biologie moléculaire, ont permis d’optimiser notamment l’identification des bacilles. Lorsque cela est possible, l’étude des caractères culturaux et biochimiques est remplacée par l’hybridation avec des sondes géniques complémentaires de séquences d’acides nucléiques spécifiques des espèces de mycobactéries. Quatre mycobactéries peuvent ainsi être identifiées pour le moment : M. tuberculosis, M. avium, M. kansasii, M. gordonae. 23 Année Universitaire 2006-2007 Tuberculose –Pr Marquette et Pr Lafitte Peut-on en 2005 diagnostiquer une infection à mycobactéries sans passer par la culture? La réponse est non. Deux techniques sont en théorie possibles : la sérologie et l’amplification génomique par PCR (Polymerase Chain Reaction). La sérologie n’est toujours pas fiable. Quant à la PCR, n’existe actuellement qu’une seule indication : l’identification des bacilles présents dans un prélèvement respiratoire positif à l’examen direct. La recherche de bacilles par technique de PCR sur des prélèvements d’origine respiratoire négatifs à l’examen direct est encore décevante et limitée par les possibilités techniques actuelles. II en est de même pour la recherche par PCR sur des liquides habituellement stériles (liquide pleural, liquide céphalo-rachidien, etc.). Ces tests ne sont pas recommandés. LE TRAITEMENT DE LA TUBERCULOSE MALADIE Le schéma suivant (6 mois) est actuellement proposé : M1 M2 M3 M4 M5 M6 Traitement INH INH INH INH INH INH de 6 mois RMP RMP RMP RMP RMP RMP PZA PZA EMB EMB L’adjonction de l’éthambutol n’est vraiment utile qu’en cas de résistance à l’isoniazide (5 % des patients en France, stable depuis 10 ans) et on pourrait proposer ce même schéma sans éthambutol. Cependant, les résultats de l’antibiogramme étant disponibles en général 5 à 7 semaines après le prélèvement, et la durée de la phase initiale du traitement comprenant l’éthambutol étant de 2 mois, le retentissement pratique des résultats de l’antibiogramme sur l’arrêt de l’éthambutol est limité. LE TRAITEMENT DE LA TUBERCULOSE INFECTION Environ 10 % des patients développent une tuberculose maladie au décours d’une tuberculose-infection (5 % dans l’année qui suit et 5 % des au delà de ce délai). Ces chiffres sont la base de la chimioprophylaxie secondaire, le but étant d’éradiquer les bacilles d’un sujet infecté avant que le patient ne développe une éventuelle tuberculose active. Le risque est plus élevé chez l’enfant (cf supra). L’indication du traitement de la tuberculose-infection dépend des choix de santé publique retenus dans chaque pays. Ces choix faits en général au niveau national dépendent de l’épidémiologie tuberculeuse de la population concernée et du niveau de développement socio-économique du pays, en particulier de son système de santé. ! Dans les pays en développement, seule une partie des malades tuberculeux est diagnostiquée et soignée : «ceux qui émettent suffisamment de bacilles pour être positifs à l’examen direct (BAAR+) et qui présentent donc une maladie et un risque pour leur entourage» ! Dans des pays à niveau de développement intermédiaire, il existe une recommandation de soigner tous les cas de tuberculose-maladie, mais de ne pas traiter la tuberculose-infection. ! Aux États-Unis et dans certains pays industrialisés et à incidence de tuberculose faible (Incidence < à 25 / 100 000 personnes), la recommandation est depuis des années de traiter tous les cas de tuberculose-maladie, mais aussi tous les cas de tuberculose-infection avérée récents. En France, jusqu’à une date récente, la recommandation était de traiter tous les cas de tuberculose-maladie et les tuberculoses-infection de l’enfant, mais de ne pas traiter la simple tuberculose-infection de l’adulte. Depuis mars 2003 il recommandé en France (Conseil Supérieur d'Hygiène Publique de France) de traiter plus largement les tuberculoses-infection diagnostiquées autour d’un cas, y compris chez l’adulte. La suppression de la revaccination permettra, chez l’adulte, une meilleure interprétation de l’IDR. Indications actuelles du traitement de la tuberculose-infection ! tuberculose-infection de l'enfant de moins de 15 ans, qu'elle soit récente ou non ! tuberculose-infection de l'adulte immunodéprimé, ou devant recevoir un traitement immunosuppresseur ! tuberculose-infection récente de l'adulte (estimée à moins de 2 ans), lors du dépistage autour d'un cas dans la population générale ou de la surveillance des membres des professions exposées ! tuberculose-infection séquellaire latente : malades porteurs de séquelles radiologiques de tuberculose sans signes locaux ou généraux évoquant une tuberculose-maladie évolutive, n'ayant jamais reçu d'association d'antituberculeux bactéricides, et susceptibles d'être atteints par une baisse des défenses immunitaires. Deux schémas thérapeutiques sont proposés : ! lsoniazide en monothérapie, 4 à 5 mg/kg/j pendant 9 mois, ! Rifampicine 10 mg/kg/j et Isoniazide 4 à 5 mg/kg/j pendant 3 mois Un 3ème schéma, qui fait appel à la Rifampicine 10 mg/kg/j et au Pyrazinamide 20 mg/kg/j pendant 2 mois n’est pas recommandé par la Société de Pneumologie de Langue Française (2003) en raison d’un moins bon rapport bénéfice/toxicité. LA DECLARATION OBLIGATOIRE DE LA TUBERCULOSE En France, la tuberculose est une maladie à déclaration obligatoire (DO) depuis 1964. La déclaration obligatoire : permet au niveau national, de suivre les tendances de la maladie et l’évolution des caractéristiques des groupes à risque. permet au niveau départemental, de réaliser les investigations autour d’un cas, de mettre en place les mesures pour contrôler la transmission de la maladie, et d’orienter la politique vaccinale et les actions de lutte antituberculeuse. Jusqu’à un passé récent (2003), la tuberculose-infection latente (« primoinfection sans localisation patente » ou « simple virage des tests tuberculiniques ») ne devaient pas être déclarées. Actuellement, doivent être déclarés : • Tuberculose-maladie Cas confirmés Cas probables • Tuberculose-infection latente (primo-infection) chez un enfant de moins de 15 ans Le formulaire de déclaration obligatoire est disponible sur le site de l’Institut national de Veille Sanitaire (http://www.invs.sante.fr/surveillance/mdo/fiches/fiche_tuberculose.pdf ) 24 Année Universitaire 2006-2007 Tuberculose –Pr Marquette et Pr Lafitte A lire aussi : • Recommandations de la Société de Pneumologie de Langue Française sur la prise en charge de la tuberculose en France. Conférence d’experts – texte court (Rev Mal Respir 2004 ; 21 : 414-20) et texte long (Rev Mal Respir 2004 ; 21 : 3S2) sont accessibles sur le site de la SPLF : www.splf.org/bbo/revues-articles/RMR/accesLibre/RMR2004_21_414RecosTub.pdf • A voir aussi le dossier tuberculose sur le site du ministère de la santé : www.sante.gouv.fr/htm/dossiers/ 25 Année Universitaire 2006-2007 Tuberculose –Pr Marquette et Pr Lafitte Fiche de déclaration obligatoire 26