Pierre-Marie Brisson remonte le temps

Transcription

Pierre-Marie Brisson remonte le temps
Décoration et Architecture
HOSTETTLER
Décoration et Architecture
Pierre-Marie Brisson
remonte le temps
Ses premières œuvres datent de 1979, les plus récentes
viennent à peine d’être terminées. Du 4 mai au 14 juillet
prochains, la galerie ESPACE D’ART, située au cœur de la
Vieille Ville, rendra hommage au peintre et sculpteur français
Pierre-Marie Brisson, à travers une rétrospective
qui retracera son travail sur plus d’une trentaine d’années.
Un artiste profond et très intériorisé, qui travaille un peu
comme un archéologue, dans la quête incessante
d’un sens caché..
34
N U M É R O
3 2
M A I – J U I N 2 012
35
Décoration et Architecture
«Histoire romaine I», 2008, technique mixte sur toile,
120 X 120 cm.
Pierre-Marie Brisson
poursuit, à travers ses
tableaux, la recherche
d’une origine des
choses et d’un sens
existentiel...
36
N U M É R O
S
Décoration et Architecture
«Lumière du matin», 2008, technique mixte sur toile,
150 X 150 cm.
on avenir d’artiste s’est révélé à lui un beau matin,
comme une évidence,
Pierre-Marie Brisson se souvient de
ce jour comme si c’était hier.
«C’était en 1979, explique-t-il, je
travaillais aux éditions Robert Laffont, qui m’avaient proposé un
poste plus intéressant. Je me suis
dit que si j’acceptais, j’étais fichu!
Je ne me suis pas levé, j’ai téléphoné pour faire part de ma décision
de ne plus revenir au bureau. J’avais
vingt-trois ans, j’avais des rêves de
peinture, un besoin de créer… J’ai
fait, juste après, une exposition
chez des amis dans la banlieue parisienne, j’ai tout vendu! J’étais le
premier surpris! Tout a commencé
comme ça…».
L’année suivante, le peintre est
appelé au dernier moment – parce
qu’un autre artiste s’est désisté – à
3 2
participer à la foire de New York.
Il expose à côté d’Igor Ustinov, les
médias se ruent sur celui-ci quand
il arrive avec son père, Peter Ustinov, acteur et star internationale.
«J’ai tout vendu, et lui rien» observe, encore tout étonné, P.-M.
Brisson, auquel la galerie ESPACE
D’ART consacre une rétrospective,
du 4 mai au 14 juillet prochains.
«Nous sommes tombés amoureux de ses tableaux la première
fois que nous les avons vus, expliquent Alain et Dominique Wicki, les propriétaires de la galerie.
Nous avons acheté plusieurs de
ses œuvres, emballés par l’originalité de cette peinture. Nous
avons suivi ses expositions un peu
partout, à New York, en France, en
Allemagne, nous sommes allés le
voir dans ses ateliers à Nîmes et
à Paris et nous nous sommes liés
«Les jongleurs II», 2002, technique mixte sur toile,
145 X 155 cm
d’amitié. Nous avons eu l’idée
d’une rétrospective, parce qu’elle
permet de comprendre son œuvre
dans la durée».
Peintre et sculpteur, P.-M. Brisson
explique que son travail relève aussi
de l’archéologie. C’est son fil rouge
invisible, c’est l’inspiration secrète
qui parcourt ses créations. Beckett disait que dans ses livres, «les
mots en creux», ceux qu’ils n’avait
pas écrits mais seulement suggérés,
avaient «davantage d’impact que
les mots écrits noir sur blanc». L’artiste avait pensé devenir archéologue, c’est un peu la même idée qu’il
poursuit à travers ses tableaux: la
recherche d’un passé insaisissable
mais nécessaire, de l’origine des
choses et d’un sens existentiel qu’il
veut faire ressentir au public.
Ses tableaux contiennent une
part d’histoire; ils sont composés
comme des strates superposées au
fil du temps qui ont fini par créer
une œuvre dotée de vie, capable
d’interpeler le cœur et la raison: papiers collés, rassemblés, malaxés,
recomposés comme la terre qu’un
archéologue essaie de comprendre.
Des jeux de couleurs, des ombres,
des effets de lumière, nous font deviner des mouvements et des signes
en arrière-plan. P.-M. Brisson utilise
un mélange de colle et de sable, qui
rappelle le monde antique.
L’artiste travaille chaque jour, «il
faut sans cesse que j’expérimente
quelque chose, je suis comme un
pianiste qui doit faire ses gammes…
Je suis très performant le matin,
surtout quand j’ai beaucoup rêvé.
J’aime le lever du jour, l’ambiance
calme et agréable, la sensation des
choses qui s’éveillent».
Le maître a un atelier à Paris et un
autre plus vaste à Aigues-Mortes,
entre Nîmes et Montpellier, baigné
de la lumière du sud. Son rituel de
travail: il esquisse ses tableaux dans
la capitale, puis il les transporte et
les termine en Provence.
Pour préparer sa rétrospective,
P.-M. Brisson s’est replongé dans
ses cartons, dans ses archives,
dans son «capharnaüm» comme dit
Alain Wicki en souriant. Les œuvres
sélectionnées racontent une aventure singulière, un combat joyeux
et exigeant avec, tapis au-delà des
formes et des matières, ces deux insondables mystères que sont l’histoire et le sens. n
P. Garcia
Rétrospective Pierre-Marie Brisson,
Galerie ESPACE D’ART,
37, Grand-Rue – Tél: 022 317 96 25
1207 Genève – Vieille Ville
www.espacedart.com
Du 4 mai au 14 juillet.
M A I – J U I N 2 012
37