LA TORTUE ROUGE Un naufragé est coincé sur une île gardée par

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LA TORTUE ROUGE Un naufragé est coincé sur une île gardée par
Fiche n° 1404
LA TORTUE ROUGE
de Michael Dudok de Wit
Du 13 au 19 Juillet 2016
LA TORTUE ROUGE
de Michael Dudok de Wit
Sortie nationale : 29 juin 2016.
Film d’animation. 1H20.
http://fakeimg.pl/450x600/
Un naufragé est coincé sur une
île gardée par une tortue
fabuleuse. Un beau conte, fruit
de la collaboration inédite entre
l’animation européenne et les
studios Ghibli.
Et le studio Ghibli vola au secours des naufragés de l’île de « La
Tortue rouge .
La sélection Un certain regard présentait mercredi 18 mai La Tortue rouge, de Michael Dudok de Wit, une
robinsonnade sans paroles d’une beauté visuelle et musicale à couper le souffle, suivant un naufragé échoué
sur une île.C’est le premier long-métrage du réalisateur néerlandais, oscarisé en 2001 pour les neuf minutes
de Père et fille. Il a 62 ans. Auparavant, raconte-t-il, il n’avait jamais eu l’envie de tenter le format long : outre
sa « bougeotte » créative, qui le poussait à varier sans cesse les projets, l’exemple de collègues et amis lancés
– laborieusement – dans l’aventure, leurs récits de financements impossibles et de producteurs intrusifs
l’avaient convaincu de s’en tenir au court – ce qu’il faisait avec bonheur.
Ce n’est ni aux Pays-Bas ni en France, où La Tortue rouge est produit par Why Not et Wild Bunch, ni en
Angleterre, où il travaille et vit le plus souvent, qu’est né le projet d’un voyage au long cours, mais au Japon–
et pour ainsi dire malgré lui. De passage dans un festival coréen, Isao Takahata, cofondateur du célèbre studio
Ghibli avec Hayao Miyazaki et réalisateur du Tombeau des lucioles, découvre le travail de Michael Dudok de
Wit et tombe sous le charme. Au point de se mettre en tête, en entraînant tout le studio, de coproduire un longmétrage, si l’envie lui prenait d’en réaliser un. Michael Dudok de Wit n’hésite pas longtemps : Ghibli insiste
pour que le film soit entièrement fait en France, parce que la loi y est plus favorable aux auteurs, et en lui
laissant une absolue liberté dans le processus créatif. Cerise sur le gâteau : le Néerlandais est fou du travail de
Ghibli.
Rien de « trop riche »
Qu’avait-il de si singulier pour que l’un des plus prestigieux studios d’animation vienne le chercher à l’autre
bout du monde ? Pour quiconque a vu ses courts-métrages, Le Moine et le Poisson, L’Arôme du thé ou Père et
fille, les affinités sont au fond assez évidentes. C’est en puisant dans les arts de l’Asie que le cinéaste a trouvé
sa patte : les films d’Akira Kurosawa, les estampes d’Hokusai et d’Hiroshige, l’art des moines bouddhistes du
XVIIIe siècle comme Sengai, capable de faire jaillir la vie en deux traits à l’encre. La philosophie zen,
également. Michael Dudok de Wit a gardé de ces maîtres un amour du trait souvent travaillé au pinceau, avec
un minimalisme expressif : encres noires sur fonds clairs, décors réduits à quelques éléments emblématiques.
Pas un mot, seulement la musique dans le rôle du conteur.
Pour La Tortue rouge, le réalisateur a repensé son style en mêlant crayons numériques et animation par
ordinateur, avec des décors faits à la main sur du papier dont le grain confère aux paysages une densité
étonnante. Par contraste, le corps humain apparaît gracile et gracieux dans sa quête de survie
silencieuse. Tenir sur la durée nécessitait, selon le réalisateur, d’imaginer plus de détails que les quelques
traits et jeux d’ombres qui suffisaient, dans ses courts-métrages, à faire tout un monde.
Fidèle à son approche zen, il ne voulait pas pour autant renoncer à la simplicité. Aux artistes chargés
d’élaborer les décors, il explique ne rien vouloir de « trop riche ». La forêt de bambous fait à l’île de La
Tortue rouge un manteau luxuriant mais uni, sous lequel on ne croisera qu’une ou deux espèces animales.
Cela, « en réaction sans doute, explique Michael Dudok de Wit, à certains films américains dans lesquels on
trouve toutes les couleurs de l’arc-en-ciel dans chaque plan. Ce qui peut être très beau aussi, mais je voulais
pour mon film qu’on sente la nature plus qu’on ne la voie, à travers des éléments simples : la mer bleue, le
ciel bleu, le vert des arbres, un temps gris. Je ne voulais pas montrer l’homme face à la nature mais l’homme
dans la nature : dans cette simplicité, ils sont toujours ensemble. Ils s’appartiennent.
Film d’animation franco-japonais de Michael Dudok de Wit (1 h 20). Sur le Web : latortuerouge-lefilm.com
Le MONDE.
La Tortue rouge marque une étape importante dans l’histoire du cinéma d’animation : la rencontre entre
l’animation européenne (et des producteurs comme Arte, Why Not et Wild Bunch, entre autres) et les
célèbres studios japonais Ghibli (qui n’avaient jamais travaillé avec un autre studio, pas même japonais).
Isao Takahata, le plus grand animateur nippon avec Miyazaki, est également le directeur artistique du film
du Néerlandais Michaël Dudok de Wit – dont le scénario a été écrit avec la collaboration de la cinéaste
Pascale Ferran. Plus étonnant : ce sont les gens de Ghibli qui ont fait appel il y a dix ans à Dudok de Wit,
qui s’était fait connaître en 1994 avec un court métrage d’animation, Le Moine et le Poisson, ayant
triomphé dans les festivals du monde.
Une histoire simple, presque biblique
La Tortue rouge, film sans aucun dialogue, bercé par la musique parfois un peu omniprésente de Laurent
Perez Del Mar, raconte une histoire extrêmement simple, presque biblique, toute métaphorique : celle de la
vie. Un naufragé (aux traits neutres, pas du tout dans la veine des studios Ghibli, avec ses grands yeux bien
connus) se retrouve sur une île déserte. Il sympathise avec des crabes. Il tente d’abord de s’échapper de
l’île en construisant des radeaux de fortune.
Mais ils se font tous détruire par une créature étrange, qui va s’avérer être une grande tortue rouge. Elle le
ramène sans cesse vers l’île. Cette créature, l’altérité, se fait femme pour lui, et ils vont avoir un enfant.
Puis un tsunami – magnifique scène – s’abat soudain sur l’île…
Ici, l’homme n’est que de passage
Tout est simplicité et beauté, humanité et universalité dans ce récit d’une vie humaine à travers ses
multiples étapes, obstacles et découvertes : la solitude, l’étrangeté du monde et de l’autre, l’amour, la
vieillesse et mort, en passant par l’enfant qui grandit et qui lui aussi découvre le monde.
On notera, dans un geste d’une belle épure et comme on aurait pu s’y attendre, que jamais le duo puis trio
ne s’installe, ne construit des infrastructures (même une simple cabane) ou ne colonise ce territoire
sauvage, comme auraient pu le faire des Robinson Crusoé modernes. Non, ici tout reste inviolé, l’homme
n’est que de passage.
La Tortue rouge a reçu le prix spécial Un certain regard lors du dernier
Festival de Cannes. Dudok de Wit, vient, à plus de 60 ans, de réaliser un très
beau film, pour adultes et enfants de tous âges, sans prêchi-prêcha.
Les INROCKS Jean Baptiste Romain.
La semaine prochaine, au Cinémateur :
BADEN BADEN de Rachel Lang (comédie –France)
MR GAGA de Tomer Heymann (documentaire-Israel)

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