Les Demoiselles d`Avignon, Pablo Picasso, 1907

Etude d’un document :
Pablo Picasso – Les Demoiselles d’Avignon
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I-
Le cubisme
L’histoire de l’art au XX° est marquée par la naissance de l’art abstrait qui cesse de reproduire, même
en les interprétant, les êtres ou les objets réels. Il entend créer ses propres objets. L’art n’est plus
représentation mais présentation et création au sens strict du terme.
Peintres et sculpteurs doivent choisir entre l’art figuratif et l’art non figuratif.
Picasso a plutôt une vision abstraite, contrairement à beaucoup de peintres du XIX° siècle, 90% de ses
toiles sont des reproductions de mémoire. Il ne fait pas, sauf pour 10% de son œuvre, poser. La
mémoire étant sélective, ce qui reste est le plus important.
Le cubisme s’étend de 1907 à 1920 environ. C’est le mouvement artistique le plus radical du début du
XX° siècle (1er quart). Le cubisme est à l’origine de tous les courants abstraits de l’art moderne. C’est
un mouvement pictural mais il a influencé l’architecture et l’esthétique industrielle du XX° siècle. Le
trait le plus caractéristique de ce mouvement est l’utilisation de formes géométriques. Paul Cézanne
disait : « Traitez la nature en termes de sphère, de cylindre et de cône ». Avec le cubisme, on a une
tendance à la simplification géométrique, qui apparait dans l’art nègre, dont Picasso était friand.
La plus grande innovation du cubisme est la représentation simultanée de toutes les facettes d’un
sujet. Le peintre veut figurer l’espace-temps par cette simultanéité. Cela marque une rupture avec les
types de représentation hérités de la renaissance (XVI° siècle), où le sujet est vu d’un seul point de vue
unique.
Historiquement, on considère Les Demoiselles d’Avignon (1907) de Pablo Picasso (1881-1973) comme
la première œuvre cubiste. Ce tableau fait partie de la première période du cubisme (1907-1909) où
on retrouve l’influence de Paul Cézanne (précurseur du cubisme).
II-
Le tableau
Ce tableau est exposé au MOMA (Museum of Modern Art) à New York. C’est un grand tableau de
2,43m par 2,33m, peint à l’huile. Picasso a peint de nombreuses esquisses entre l’automne 1906 et le
printemps 1907. Picasso avait d’abord prévu 7 personnages.
Le titre e ce tableau ne fut attribué que quelques années après, par un de ses amis.
La scène se déroule à Barcelone, rue d’Avignon, dans une maison close. Picasso connaissait bien cette
rue puisqu’il y passait pour acheter du matériel de peinture.
La ligne directrice du tableau est verticale. Elle sépare les trois femmes de gauche des deux femmes
de droite.
Au fond, le décor est un rideau, qui évoque et fait penser à une scène de théâtre. Ce rideau délimite
un espace clos : la maison de prostitution. Il est également présent à l’avant, en masquant très
partiellement certaines femmes. Cependant, la nudité est exposée sans tabou ni pudeur.
Les couleurs dominantes sont le bleu et l’ocre (jaune ou rouge mêlé de brun). On trouve également du
gris. Le contour des femmes et celui de la table est fait en noir ou en blanc.
Le nu n’est pas une nouveauté en peinture mais ce ne sont pas des déesses mythologiques comme
autrefois ; ce sont des femmes de tous les jours. Les femmes occupent ici quasiment tout l’espace. Les
formes sont anguleuses, réduites à leur plus simple expression. Elles sont également
disproportionnées.
Les deux femmes du centre ont les yeux ourlés de noir. L’une a les oreilles en forme de 8. Picasso est
allé chercher son inspiration dans la sculpture ibérique (Espagne) d’avant JC et gréco-romaine. Ces
femmes sont représentées nues, avec le corps partiellement drapé. Le geste de leurs bras se retrouve
dans les deux types de sculpture. Le nez est représenté de profil, alors que les femmes sont
représentées de face.
Les deux femmes de droite sont disproportionnées et anguleuses. Picasso a hachuré la toile avec des
couleurs sombres. Les visages sont asymétriques : l’une a un gros œil de face et un petit de 3/4 ; celle
assise nous tourne le dos mais son visage est représenté de face et de profil. On observe une très nette
influence de l’art nègre et des masques africains sur leurs visages.
La femme de gauche est debout et est la plus habillée : elle se tient derrière un voile et tient également
le rideau. Elle a la chevelure la plus représentée. Par le fait qu’elle soit nue et drapée et qu’elle soit
représentée de profil, son visage semble porter un masque.
Au premier plan, on observe des fruits sur une table, dont une pastèque, symbole sexuel. La table et
les fruits forment une nature morte, mais la nouveauté est que la table est représentée oblique,
horizontale et verticale. Ce tableau a été un objet de scandale et de provocation :
 D’abord, le tableau est provoquant par ce qu’il représente : des femmes de maison close. Le
spectateur a une sorte de familiarité obscène : elles s’offrent à son regard. Cela montre la
volonté du peintre de peindre les exclus, les marginaux.
 Le traitement et la représentation des femmes. Picasso casse les codes car ces femmes
disproportionnées ne sont pas une copie du réel. Elles sont perçues de multiples points de vue.
 Le public n’était pas préparé à un choc pictural ; scandale de ce tableau, mal perçu. Même les
amis de Picasso n’adhéraient pas à ce tableau, qualifié d’ »épouvantable chaos » et André
Derain (ami de Picasso et d’Apollinaire) disait que ce tableau « était apparu à chacun comme
quelque chose de fou et d’atroce ».
III-
Le rapport entre le cubisme et Apollinaire
Apollinaire appréciait la peinture et a essayé, dans sa poésie, de rendre de multiples points de vue que
le cubisme adopte. D’ailleurs, dans « Zone », il juxtapose des époques différentes, séparées par des
blancs typographiques.
Dans « Zone », les vers 71 et 89, ainsi que le vers 95, indiquent des lieux différents, comme les vers
106 à 109 ainsi que le vers 113.
Il juxtapose aussi différents moments : le moment présent, son enfance (v.103)
Apollinaire repousse les limites de l’art : il ouvre son monde à l’art primitif (v.130-131).
Dans « Marie », il juxtapose deux moments (v.1-2). Cela se retrouve dans différents poèmes d’Alcools.