Extrait de la nouvelle La première marmotte du Bego (nouvelle
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Extrait de la nouvelle La première marmotte du Bego (nouvelle
Extrait de la nouvelle La première marmotte du Bego (nouvelle issue du recueil Contes à pic, édité chez Arthaud) de Paul Gayet-Tancrède alias Samivel [Le marmotteux] remonta la pente en bondissant d’une manière désordonnée puis plongea, tête première, dans l’épaisse fourrure maternelle où il se mit à fourrager avec des cris de joie. Après des sorties, des entrées et toutes sortes de feintes, le marmotteux se dressa debout contre le large poitrail, passa ses petites pattes autour du cou de sa mère et frotta son nez avec vigueur contre les bajoues poilues, à gauche, à droite, à gauche encore. Madame, immobile, acceptait ces manifestations de tendresse filiale avec une majesté affectée. Elle était en réalité ravie, mais elle avait des opinions sur l’éducation, tant soit peu jansénistes, qui lui venaient de sa propre mère, laquelle disait toujours qu’ « il ne faut point manifester devant les enfants ». (…) [L’homme] leva la tête avec timidité vers les terribles parois de pierre sur lesquelles s’appuyait le ciel. Là reposait dans son invisible gloire le Seigneur Beg, le Grand Dieu Taureau-Soleil-Tonnerre-Montagne, haut Protecteur de la Tribu et Nourricier des petits hommes (…) Il était la pluie et la flamme, le nuage et le vent, l’éclair bleu de la truite, le cri de l’oiseau, le sillon fumant de la charrue et l’œil du garçon regardant la fille ; et de temps à autre sa voix formidable grondait parmi ces montagnes, et il lançait le feu sur le monde terrifié. Oh ! oui, un puissant Dieu ! C’est pourquoi il était prescrit à tout homme de la tribu désirant construire sa propre maison et épouser sa jeune fille, de monter sur la cime du tonnerre rendre l’Hommage et laisser sa Marque sur les pierres, aux pieds du Grand Dieu (…).