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LES
RENCONTRES
DE LA
CONSTRUCTION
Salons HOCHE
75008 Paris
décembre 2013
CONSTRUIRE
EN
EQUIPE
0 ∕
SOMMAIRE
PREMIERE TABLE RONDE
Optimisation financière et architecturale :
équation imposible ?
Première table ronde, animée par Gaby OLMETA
Claude COVO, Directeur Général Adjoint de BNP.Paribas Immobilier
Jean-François BONNE, architecte urbaniste - Architecture Studio
Jean-François CAPEILLE, architecte - Architectes associés pour l’environnement
Pierre-Louis PETRIQUE, Président de PMG
Bernard BONNET, Président du directoire de Léon Grosse
SECONDE TABLE RONDE
Délais, performances techniques et sociétales :
quelles garanties ?
Seconde table ronde, animée par Gaby OLMETA
Eric GERLACH, Directeur Grands Projets - UNIBAIL - RODAMCO
Xavier DUBRAC, Directeur - Direction Ingénierie et Architecture de l’Aéroport de Paris
Tristan LEGENDRE, Directeur Général - ARTELIA Bâtiment et Industrie
Gilles GAUDIN, PDG de Nexilis
Fabrice THIERRY, Directeur Général QSE - Bouygues Bâtiment ïle-de-France
CONCLUSION
Michel GOSTOLI, Président d’EGF.BTP
Les Rencontres de la Construction 2013
INTRODUCTION
CONSTRUIRE EN EQUIPE
EGF.BTP a choisi d’ouvrir le débat, de risquer des analyses et pourquoi pas des
contradictions, avec une vraie volonté de transparence pour aborder essentiellement
deux thématiques.
La première thématique : l’Entreprise Générale est-elle un outil pertinent pour optimiser
les opérations, les chantiers et les dossiers ? Et comment, dans le cadre de cette
volonté d’optimiser ces opérations, s’articule la relation entre l’entreprise et
l’architecte ?
Le deuxième dossier que nous ouvrirons pose la question des délais, des
performances techniques, mais également sociales, sociétales, et environnementales.
Que proposent les Entreprises Générales dans ces domaines-là ? Quelles sont surtout
les garanties qu’elles offrent ?
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0 ∕ Première table ronde des Rencontres de la Construction 2013
PREMIERE TABLE RONDE
Optimisation financière et architecturale :
équation impossible ?
Les relations entre les architectes et les Entreprises Générales
Un premier reportage propose d’évoquer la relation entre les architectes et les Entreprises Générales. Nous nous sommes intéressés au Mucem, le Musée des Civilisations Euro-méditerranéennes de Marseille, et aux réserves du Mucem, un deuxième bâtiment qui lui est adjoint, et qui n’est pas sur le même lieu. Nous avons notamment tendu notre micro à Rudy Ricciotti et à Corinne
Vezzoni.
Un film est diffusé sur deux exemples de conception construction en région PACA
Le Mucem, Musée de la Civilisation de l’Europe et de la Méditerranée, est la réalisation phare de Marseille, capitale européenne
de la Culture. C’est aussi l’histoire d’une rencontre entre deux hommes, Philippe Avinent de Vinci Construction, entreprise choisie comme Entreprise Générale, et de l’architecte Rudy Ricciotti, qui a commencé à dessiner le Mucem il y a plus de dix ans.
Optimisation financière et architecturale : équation impossible ?
Le MUCEM
Pour Philippe AVINENT, les relations
avec l’architecte ont toujours été excellentes, viriles, gravées d’exigence, de
compréhension, de partage, et de complémentarité.
Rudy RICCIOTTI indique : « Je n’ai jamais eu aucune tension avec l’entreprise,
parce nous parlons le même discours,
nous avons la foi. Nous sommes des combattants, des chevaliers. D’une certaine
manière, nous sommes animés par une
passion qui nous aveugle, et qui peut
nous aveugler. »
« Je suis extraordinairement, volontairement favorable aux procédures de
conception-construction. C’est certain que
dans ces partenariats, en cas de fai-
blesse, l’architecte se fait laminer. C’est
ainsi, Il se fait laminer ! Ou alors si c’est
un dingue, il amène l’entreprise au tapis.
Aussi, a-t-on une responsabilité, encore
une fois, économique et sociale, de ne
pas mettre l’entreprise au tapis. »
de vouloir modifier une conception. Nous
n’avons pas cherché à refaire le projet.
Nous avons cherché à le comprendre, à
discuter avec l’architecte de ce qu’elle
avait voulu réaliser. Les mises au point ont
ensuite été réalisées en commun. Que les
relations soient sereines ou plus tempéLe Centre de conservation et de tueuses, au-delà des enjeux financiers, le
couple indissociable architecte-construcressources du MUCEM
teur reste avant tout une histoire huLuc Bouvet (Eiffage) indique que le projet maine.»
de l’architecte Corinne Vezzoni était
connu bien avant la désignation du
Corrine VEZZONI
constructeur, le groupe Eiffage.
« Cela peut paraître une figure imposée,
parce que l’on se dit que la conception est
figée et que l’on ne peut pas intervenir sur
une conception. C’est d’ailleurs souvent le
grief que l’on peut faire à une entreprise
« Il ne faut pas avoir un ego trop démesuré et vouloir être celui qui se dit : « C’est
moi le chef, qui détient l’autorité ». Nous
cherchons tous l’idéal en passant par le
réel.»
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0 ∕ Première table ronde des Rencontres de la Construction 2013
Jean-François CAPEILLE
ment, nous avons réalisé un immeuble de
cent logements dans une ZAC avec
Nexity et Bouygues. Nous sommes partis
ensemble dès le départ, car franchement,
il vaut mieux discuter autour d’une table
que se battre sur le chantier. Moi, je suis
heureux de construire avec les constructeurs. Ce qui n’est pas forcément le cas
en travaillant dans mon garage avec mes
petits dessins.
Cela fait plus de vingt ans que je travaille
en conception-construction, depuis que
j’ai construit la station d’épuration de Colombes. Chaque fois que je travaille en
maîtrise d’œuvre, je perds. Et quand je
suis en conception avec une Entreprise
Générale, je gagne. Si l’on veut que l’entreprise s’approprie le projet architectural,
autant qu’elle y rentre tout de suite, dès la
conception. Nous avons ainsi beaucoup
plus de chance qu’elle se l’approprie, Bernard BONNET
qu’elle le porte jusqu’au bout.
Les donneurs d’ordres et les clients ne
Il est vrai que je travaille sur des ouvrages comprennent pas toujours que le temps
particuliers, qui sont des ouvrages de trai- qu’il nous faut pour nous approprier le protement d’eau et de déchets. Dernière- jet. Ce temps de préparation, représente
plus de 50 % de la maîtrise des risques,
sinon 100 % de la maîtrise des risques.
Nous, entreprise, nous vivons dans le
risque, le risque du prix mal fait, de l’ouvrage mal maîtrisé.
Cette appropriation et le temps disponible
pour la préparation sont essentiels. Si ces
conditions sont remplies, en association
avec l’architecte, tout le monde gagne du
temps et, pour nous, la sécurité est garantie. Cette collaboration est fructueuse à
nos yeux. L’est-elle pour le projet ? Quand
nous travaillons avec l’architecte, nous lui
expliquons ce que nous pouvons faire, il
l’entend, et nous optimisons alors ensemble ce que nous savons faire avec ce qu’il
a envie de dessiner. Quand nous avons
Optimisation financière et architecturale : équation impossible ?
fait de la conception-réalisation avec
Rudy, nous l’avons fait changer d’avis sur
des choses que nous ne savions pas
faire. L’objectif, c’est d’optimiser ensemble.
Pierre-Louis PETRIQUE
Je représente la seule PME dans cette
salle, je fais donc attention à ce que je dis.
Nous sommes petits d’une part, et c’est
vrai que nous travaillons pour un tiers en
lots séparés, et deux tiers en Entreprises
Générales. Nous aimons bien ces dernières pour différents aspects, j’y reviendrai, mais dans l’ensemble, nous sommes
à l’aise avec les Entreprises Générales.
Nous sommes un peu frustrés dans ce
débat, où nous nous situons à la fin. Les
grandes discussions ont eu lieu entre l’Entreprise Générale et les architectes. Nous
sommes frustrés car nous ignorons à quel
moment nous devons utiliser notre matière grise. Dans notre petit lot de finitions,
nous pouvons faire gagner de l’argent à
tout le monde et travailler intelligemment.
Notre problématique est que si nous travaillons trop en amont, nous nous faisons
voler les idées.
ment je collabore, et à quel moment je
suis en concurrence. Moi, je pense que
travailler en équipe, c’est mettre en
concurrence, et choisir avant que les options définitives soient prises.
Nous sentons que ceci évolue. Il est vrai
que le mot-clé est la confiance. Nous travaillons en confiance aussi bien avec des
corps d’état séparés qu’avec les Entreprises Générales. Et nous faisons passer
les idées. Il existe un certain nombre de
projets sur lesquels on est capable de gaBernard Bonnet indique que la charte de gner de 10 à 15 % de notre coût.
la sous-traitance précise que nous devons
être loyaux vis-à-vis de nos partenaires
sous-traitants. Ce que vient de dire PierreLouis Pétrique est de savoir à quel mo-
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0 ∕ Première table ronde des Rencontres de la Construction 2013
La conception-construction
Film sur I3F et l’opération de Clichy-Montfermeil
Yves LAFFOUCRIERE indique qu’I3F est passé d’une production d’environ 2 000 logements par an dans les années 2000-2004 à une production
de 6 000 à 8 000 logements en France à l’heure actuelle, dont plus de la moitié en Île-de-France. L’année dernière, plus de 40 % des opérations de mise
en chantier en Île-de-France ont été faites grâce à la conception-réalisation.
Et grâce à cela, on a pu peser sur les coûts de construction, sur nos prix de
revient. L’opération de Clichy-Montfermeil, qui est présentée, totalise ainsi
un prix de revient inférieur de 10 %, toutes dépenses confondues, au coût
moyen de nos opérations en Île-de-France.
Nous sommes maintenant, deux ans plus tard, et dans six mois, le chantier
sera terminé. Cela veut dire qu’en trente mois, nous aurons fait tout le
travail de conception, d’obtention du permis de construire, de mise au point du projet et de réalisation
des travaux. Là où, dans un mode de production plus traditionnel, on est plutôt sur douze mois de plus.
Nous avons fait aussi bien des choix d’architectes traditionnels, et ensuite des opérations de construction en corps
d’état séparés ou en Entreprises Générales, que des opérations en conception-réalisation puisque nous avons démarré ce mode de partenariat il y a quelques années maintenant, à notre plus grande satisfaction.
Pour Laurence BAUDOUIN, architecte de l’opération Clichy-Montfermeil : « la spécificité pour ce type d’opération, c’est le fait que l’on travaille dès le début en équipe, avec l’entreprise et le bureau d’études. Pour le bureau
d’études, c’est le cas dans tous les projets, mais pour l’entreprise, non. Or, je pense qu’une opération en conception-construction ne peut être intéressante, bien menée et aboutir, que si, d’emblée, l’entreprise est impliquée dans
les premières esquisses. Avant même de tracer le plan du bâtiment, nous avons discuté du mode constructif. Ce
sont eux qui nous ont amenés vers l’utilisation d’une brique thermique pour construire les enveloppes de façades,
parce que c’est une technique qu’ils maîtrisaient bien, que l’on pouvait obtenir de bonnes performances énergétiques, et un rendu de parement extérieur qui soit dur, et qui ne soit pas rapporté. On est directement en enduits
ou en plaquettes collées. Cela donne une qualité de construction très importante. »
Yves LAFFOUCRIERE indique : « sur les coûts, on arrive à produire 50 logements à cet endroit, pour un prix de
revient de 2 200 euros TTC, du mètre carré utile, soit 170 000 euros le logement, là où notre ratio moyen de
prix de revient au logement en Île-de-France est plutôt de 180 000 à 190 000 euros TTC au logement. Et
puis enfin, les opérations de déroulement du chantier lui-même, toutes les questions liées à la sécurité, à la tenue
du chantier, au respect des délais, aux opérations préalables aux réceptions, sont beaucoup plus fluides. Donc,
c’est pour nous une expérience très positive.
Nous avons pu, pendant ces dernières années, progresser en matière de standards de qualité, puisque nous
sommes passés de la RT 2005 à la RT 2012. Et grâce à ce partenariat entre architectes, bureaux d’études et entreprises, qui se sont librement choisis entre eux, nous bénéficions d’un processus de production plus harmonieux,
et qui nous a permis de gagner en qualité de production, avec une réduction des délais. »
Optimisation financière et architecturale : équation impossible ?
tions, nous démarrons souvent en retard
la partie DCE. Et se cumulent alors la
durée d’établissement d’un dossier de
consultation avec ensuite une phase de
travaux. Nous commençons par prendre
le premier lot dont nous avons besoin, un
lot parois, un lot terrassement. Dans l’ensemble des études conception plus réalisation, nous gagnons du temps, plutôt que
de passer par cette phase de consultation
et de réalisation.
Claude COVO
Quasiment toutes nos opérations sont traitées en corps d’état séparés. Je n’ai pas la
prétention de dire que l’on construit plus
vite en corps d’état séparés qu’en Entreprise Générale. En réalité, dans toutes
nos opérations, nous commençons par
faire un dossier de demande de permis de
construire, et, en général, nous attendons
que les autorisations administratives
soient obtenues avant de commencer une
commercialisation. A ce stade, nous
avons posé le crayon, et nous attendons
le client. Rarement, on attaque plus que
ce dossier de permis de construire. En général, au moment où nous allons voir un
client et qu’il y a une phase de négocia-
Bernard BONNET
J’ai bien sûr une réaction ni syndicale ni
instinctive. Justement, cette anticipation
que vous prenez pour nous traiter le plus
tard possible, après avoir fait la boîte dans
des conditions économiques pas favorables puisque non optimisées techniquement, c’est du temps qui va nous manquer
pour nous préparer à faire le chantier avec
vous. Travailler en équipe, c’est décider
avant qu’il soit trop tard quelle entreprise
va effectuer ce chantier. Je la choisis, et
à ce moment-là, je prends les options en
toute collaboration. Et je pense que notre
performance économique sera meilleure,
et vous serez gagnants. On peut choisir
l’entreprise et être partenaire avec elle.
Claude COVO
Souvent, on laisse jusqu’à la dernière minute la possibilité au client de modifier. Et
c’est vrai que d’avoir bien optimisé chacun des lots est beaucoup plus facile pour
nous. Cela permet de gérer les modifications plutôt qu’avec une Entreprise Générale.
Bernard BONNET
Je rajouterai aux propos de Monsieur
Covo, qu’il le fait de manière techniquement moins affirmée et moins pertinente
que nous. Lorsqu’on a réalisé le stade
Jean-Bouin, nous avons commencé par
faire une simulation aérodynamique numérique, en dépensant une centaine de
milliers d’euros.
Pourquoi ? Parce que nous considérons
que l’optimisation intelligente des calculs
et la rapidité des autorisations, dont nous
aurons besoin pour faire le chantier dans
les délais, passent par là. Ce chemin-là,
nous le faisons parce que nous maîtrisons
l’ensemble de la chaîne.
∕ 0
0 ∕ Première table ronde des Rencontres de la Construction 2013
Claude COVO
Nous sommes sur des sujets un peu différents, c’est-à-dire que nous sommes
promoteur, nous construisons des immeubles de bureaux. Dans le cadre d’une
opération comme le stade Jean-Bouin,
nous ne sommes pas tout à fait dans ce
cadre-là. Et c’est évident que l’apport de
l’entreprise dans cette phase d’étude exécution est fondamental, et doit être bien
maîtrisé en amont.
Jean-François BONNE
Je pense que, déjà, nous oublions qu’il y
a des projets, avec des maîtrises d’œuvre
publiques.
Et quand j’entends Monsieur Covo dire
qu’il accepte les changements de ses
clients et de ses preneurs tout au long du
chantier, j’ai envie de dire : « Quelle
chance vous avez !». Parce que nous,
quand il y a le moindre changement dans
les projets que nous faisons, en marché
public, c’est une galère sans nom. Nous,
à l’inverse de ce que vous dites, nous souhaitons qu’il y ait le minimum de changements dans un projet. Nous souffrons sur
certains projets d’avoir étudié quatre fois
le projet en huit ans. Ceci n’est pas de
l’optimisation.
Jean-François CAPEILLE
Pierre-Louis PETRIQUE
Idéalement, il faut que le projet soit le plus
arrêté possible. Nos fournisseurs étrangers sont pliés en deux quand ils voient
l’évolution d’un projet français qui change
tout le temps. Ils n’y comprennent rien.
Idéalement, il faut aussi avoir travaillé le
plus en amont possible. Dans le cas de
maîtrise d’ouvrage publique, c’est invivable pour une PME d’être en direct avec le
client public. Quand on est sous-traitant
d’une Entreprise Générale, on est en droit
privé.
Nous sommes bien mieux défendu par le
droit privé que par le droit public. Je fais
des faux plafonds dans le public …mais
au travers des Entreprises Générales. Ma
position est claire et arrêtée.
Jean-François BONNE
Notre quotidien à nous, architectes, c’est
de faire de l’architecture dans l’économie
serrée des budgets qu’on nous donne.
C’est le maître d’ouvrage qui, en faisant
son programme, définit un budget – on
ignore souvent comment, il est d’ailleurs
souvent sous-estimé –, c’est l’un des
graves problèmes que l’on rencontre. Le
thème, qui est de construire en équipe, est
une évidence.
On va chercher dans l’entreprise ce
qu’elle a de mieux. Lorsque l’on conçoit le
Eric GERLACH
projet avec une entreprise qui a, comme
Dès qu’il s’agit de projets privés, comcertaines, des procédés constructifs spémerciaux ou tertiaires, nous avons besoin
cifiques et performants, qu’elles ont étude modifier ces projets, et de les adapter
diés, sur lesquels elles ont investi
à l’actualité, si nous voulons qu’ils restent
beaucoup, à ce moment-là, cela ne me
des projets commerciaux. Ce que j’atgêne pas du tout d’être influencé par ces
procédés-là pour essayer de faire avan- Le chantier n’est pas un problème d’ar- tends d’une Entreprise Générale, c’est
chitecte, c’est un problème collectif.
qu’elle réagisse très vite, et en temps réel
cer l’acte de construire.
Optimisation financière et architecturale : équation impossible ?
Le dernier mot
à ces modifications. Je rejoins complètement Monsieur Covo, quand il dit qu’on va
beaucoup plus vite en allant directement Jean-François CAPEILLE
aux entreprises en lots séparés.
Après vingt ans de conception-construction, je ne reviens pas en arrière, c’est sûr.
Je suis intervenu dans l’hôpital de Carcassonne, notre maîtrise d’œuvre forte a
Intervention de Frédéric CELDRAN
permis de travailler avec des entreprises
Aujourd’hui, la qualité de l’Entreprise Gélocales, des petites entreprises qui
nérale a augmenté. A force de traiter de
n’avaient pas les moyens de réaliser cet
tous les corps d’état, les conducteurs de
hôpital. Nous sommes partis tous ensemtravaux se sont améliorés. Du coup, le
ble et nous avons gagné contre les maservice a progressé. Ce débat corps d’état
jors. Cela a surpris tout le monde. Il s’agit
séparés et Entreprises Générales est un
d’un travail commun, d’un groupement en
peu dépassé. L’Entreprise générale donne
conception-réalisation, où l’on est vraiaujourd’hui une meilleure maîtrise en
ment ensemble, et où ce n’est pas la taille
amont, et ceci permet de réduire à la fois
qui compte, c’est la volonté de travailler
les délais et les coûts. Ce débat me semen équipe.
ble vieux, il faut le reconsidérer.
Intervention de Jean GUENARD
Il y a des projets qui ne sont pas faisables
autrement qu’en Entreprise Générale,
avec ce travail en amont. Pour les projets
de stations d’épuration, les projets techniques, compliqués, quand nous démarrons le travail ensemble, nous savons
qu’un objectif est à tenir, qui se mesure en
qualité d’eau à sortir. Nous ne savons pas
le faire en corps d’état séparés. Et nous
gagnons un an à deux ans sur la réalisation globale en travaillant ensemble, sans
parler du respect des coûts.
sien, nous voyons donc les étapes successives, et à la fin, il ne reste plus qu’une
chose, une fois que tout est prêt : le prix.
Nous savons que ce raisonnement est
idiot, surtout pour les corps d’état de finition. Ce qui va compter, ce sera la livraison dans le délai, et tout le service qu’il y
a à la fin. Je crois que nous ne sommes
pas assez habitués à prendre le risque du
partenariat en amont. De nombreuses Entreprises Générales sortent un peu de la
logique de mise en concurrence pure et
dure. Elles cherchent ce partenariat en disant : « Nous essayons d’aller vers la
meilleure solution, si nous y arrivons, nous
ne remettons plus en concurrence ». Nous
allons être condamnés à être intelligent
Bernard BONNET
ensemble. Séparer les étapes de l’intelliJe parle aux maîtres d’ouvrage et aux ar- gence, n’est pas optimal.
chitectes : donnez-nous la possibilité de
gérer le temps. Tout ce qu’on peut faire en
temps masqué, faire des études ou faire Jean-François BONNE
des choix, nous sommes capables de le La qualité architecturale ne coûte pas plus
maîtriser. Nous avons besoin de temps cher. Nous pouvons très bien faire des bâpour nous approprier le projet, pour le pré- timents économiques de qualité. Même
parer.
les bâtiments emblématiques que nous
avons construits sont très économiques.
Dans vos syndicats, vous devriez plaider
Pierre-Louis PETRIQUE
pour que la notion de mieux-disant l’emMon point de vue n’est pas très éloigné de porte sur le moins-disant, comme cela se
celui-ci. Nous vivons dans un pays carté- passe dans plusieurs pays voisins.
∕ ∕ Première table ronde des Rencontres de la Construction 2013
La conception-construction est-elle une exception ou une spécificité française ?
Philippe Bonnave, Directeur général délégué Bouygues Construction.
La première grande différence de la façon de travailler à l’étranger, est la
notion de forfait, qui n’existe pas comme elle existe chez nous. En général, les travaux sont payés en dépenses contrôlées. Et donc, l’entrepreneur s’engage plutôt sur des coûts objectifs, appelés target cost, avec
derrière une règle de répartition des surcoûts, ou des gains par rapport à
ce target cost. C’est déjà une grande différence par rapport au marché
français tel que nous le connaissons.
Le contrat prévoira un mode de répartition des gains. Par exemple, si
l’objectif n’est pas atteint, il y a une économie sur le prix objectif, la répartition peut-être de 50-50 entre le maître d’ouvrage et l’entreprise. En revanche, si le prix objectif est dépassé,
il y a beaucoup de formes de répartitions de ce surcoût. L’entreprise peut par exemple n’être pénalisée que sur
les dix premiers pourcents. En clair, dans ce cas, elle risque ses frais généraux. Au-delà, c’est le maître d’ouvrage
qui prend le surcoût. Mais, il peut y avoir aussi prise en compte par l’entreprise aux premiers dollars ou pennies,
au-delà du coût objectif. Elle prend alors 100 % du surcoût de l’ouvrage.
Le modèle anglo-saxon influence de nombreux pays, c’est évident. Alors, quels sont les acteurs ? Déjà, l’Entre-
Optimisation financière et architecturale : équation impossible ?
prise Générale, telle que nous la connaissons, n’est pas
un modèle répandu dans le monde entier, c’est totalement
différent. On rencontre souvent des entreprises de gros
œuvre, qui ont avec elles un certain nombre de sous-traitants attitrés, réguliers, avec lesquels elles travaillent tout
le temps et avec des consultants qui managent l’ensemble
du chantier, toute l’économie du chantier.
Très peu d’entreprises disposent en interne des engineerings, tels que nous les connaissons chez nous. Souvent,
dans ces entreprises, celui qui domine est ce fameux QS,
quantity surveyor, qui fait la loi sur les chantiers, parce que
tout le règlement du chantier dépend de lui. Il évalue toutes
les dépenses, tout ce qui se passe sur un chantier, et ce sont eux qui font l’économie globale du projet. En règle
générale, à l’étranger, le rôle de l’architecte et des engineerings externes est très différent. Ces derniers sont extrêmement puissants sur les opérations, parce que certains d’entre eux s’engagent sur des contrats globaux. Et
donc, l’Entreprise Générale, quand elle existe, n’est qu’un sous-traitant de ces grands engineerings, qui sont extrêmement forts et puissants sur les marchés.
C’est une exception française de passer par l’architecte pour déposer les permis de construire. Partout ailleurs,
un engineering peut déposer un permis de construire pour réaliser un hôpital, pour réaliser un ensemble de bureaux, pour construire un hôtel, c’est tout à fait courant. L’architecte n’est que le sous-traitant de l’engineering.
Elle existe, mais, là encore, sous des formes différentes. Par exemple, en Suisse, la conception-construction peut
exister, mais néanmoins à partir d’un avant-projet sommaire, choisi par un maître d’ouvrage, lequel ensuite choisit une entreprise sur la base d’un prix enveloppe, et un architecte, pour la réalisation, devient le sous-traitant de
l’entreprise. C’est un modèle appelé « l’entreprise totale ». Autrement, sur d’autres marchés, les entreprises sont
consultées très en amont. Elles peuvent faire une proposition avec un architecte, avec un engineering, et avoir
une approche globale. Mais cette entreprise n’est pas forcément une entreprise de construction. Elle peut être une
entreprise de maintenance, dont le métier de base est la maintenance, qui prend le contrat global, et qui va soustraiter la partie construction en passant par ces engineerings et ces architectes. Donc, nos concurrents peuvent
être directement pour nous des grands de la maintenance, c’est le cas par exemple au Royaume-Uni.
A l’étranger, le cadre des PPP est tout à fait propice à faire de la conception-construction, à appliquer notre modèle à l’intérieur d’une opération de PPP. C’est le cas actuellement sur des opérations à Singapour sur le Sports
Hub. Nous réalisons un grand centre sportif, et à l’intérieur d’un PPP, nous avons réalisé l’opération de conception-construction. C’est aussi le cas sur des opérations au Canada. Ce qu’il faut bien noter, c’est que cette capacité à s’engager très tôt sur une formule de forfait, sur un délai, sur un ensemble de conditions de réalisations,
est une spécificité française. A l’étranger, on ne retrouve pas cette spécificité. Toutes les entreprises d’EGF.BTP
ont l’habitude de prendre ces engagements très globaux, très tôt, ce qui reste une exception culturelle par rapport à ce que l’on rencontre sur des marchés étrangers.
∕ ∕ Les Rencontres de la Construction 2013
∕ SECONDE TABLE RONDE
Délais, performances techniques et sociétales :
quelles garanties ?
Le respect des délais
Eric GERLACH
L’Entreprise Générale offre des garanties
en matière de respect des délais. D’ailleurs, à ce titre, avec le groupe Eiffage,
nous sommes en train de réaliser la tour
Majunga à la Défense, et malgré mes propos de tout à l’heure, cette opération d’environ 200 millions d’euros est réalisée en
Entreprise Générale. Je pense, et c’est la
conviction du groupe UNIBAIL – RODAMCO, qu’il n’y a pas systématiquement
de vérité entreprise générale ou lots séparés. Il existe, pour chaque projet, public
ou privé, une problématique à résoudre,
un allotissement à définir. Et pour chaque
projet, il faut définir la bonne stratégie du
point de vue du maître d’ouvrage.
De façon assez simple, la stratégie en la
matière d’UNIBAIL – RODAMCO, c’est
pour les immeubles de bureaux, en particulier les IGH, plutôt l’Entreprise Générale, parce qu’il y a là une forte valeur
ajoutée en matière de coordination des
entreprises, et c’est absolument là que
∕ Seconde table ronde des Rencontres de la Construction 2013
l’on retrouve le plus grand savoir-faire en contrôle de sûreté de l’aéroport, le verFrance en matière de coordination de tra- rouillage, les portes. Il y a des conditions
très particulières qui allient la sécurité et
vaux.
la sûreté. Nous nous sommes aperçu que
Moi aussi, je manage certains projets à
sur un certain nombre de ces lots très parl’export, comme celui que nous avons réaticuliers, l’Entreprise Générale ne les maîlisé avec Bouygues : un grand centre
trisait pas complètement, ou recherchait à
commercial, ouvert à Prague cette année.
chaque fois des sous-traitants pour pouL’Entreprise Générale, c’est une réponse
voir les maîtriser, mais sans vraiment
à une autre problématique qui est l’éloiconnaître ses sous-traitants. Donc, augnement, et la confiance que l’on peut
jourd’hui, nous sommes plutôt orienté vers
mettre dans une Entreprise Générale à
un travail en Entreprise Générale pour ce
réaliser les travaux alors qu’on est à 2 000
qui est du clos et du couvert.
ou 3 000 kilomètres de ses bases.
Sur l’aéroport, nous sommes également
sur des ouvrages qui vont très vite, et qui
Xavier DUBRAC
vont évoluer au fur et à mesure du projet.
Cette
évolution, qui mène à construire raJe dois reconnaître qu’en Entreprise Gépidement,
nous conduit à avoir des envenérale, au sens de tout corps d’état et tous
loppes
qui
sont vraiment dans les délais
les lots, nous avons connu des expépour
pouvoir,
derrière, finaliser les opérariences qui n’étaient pas toujours très
tions.
Nous
avons
les mêmes problémaréussies. Je pense à tout ce qui est
tiques commerciales, donc des choses qui
bougent beaucoup à l’intérieur. Les confier
à l’Entreprise Générale, c’est quelque part
aussi la perturber dans l’agencement de
son chantier. Nous ne souhaitons pas
avoir une entreprise qui soit en difficulté,
parce qu’à l’intérieur même de ses corps
d’état, on lui cause des problèmes particuliers avec des lots qui ne pourront pas
être correctement maîtrisés.
C’est une bonne solution de prendre une
Entreprise Générale quand on a un délai,
à condition de retirer ce qui ne pourra pas
être maîtrisé par l’entreprise dans les
temps.
∕ Seconde table ronde des Rencontres de la Construction 2013
l’on retrouve le plus grand savoir-faire en contrôle de sûreté de l’aéroport, le verFrance en matière de coordination de tra- rouillage, les portes. Il y a des conditions
très particulières qui allient la sécurité et
vaux.
la sûreté. Nous nous sommes aperçu que
Moi aussi, je manage certains projets à
sur un certain nombre de ces lots très parl’export, comme celui que nous avons réaticuliers, l’Entreprise Générale ne les maîlisé avec Bouygues : un grand centre
trisait pas complètement, ou recherchait à
commercial, ouvert à Prague cette année.
chaque fois des sous-traitants pour pouL’Entreprise Générale, c’est une réponse
voir les maîtriser, mais sans vraiment
à une autre problématique qui est l’éloiconnaître ses sous-traitants. Donc, augnement, et la confiance que l’on peut
jourd’hui, nous sommes plutôt orienté vers
mettre dans une Entreprise Générale à
un travail en Entreprise Générale pour ce
réaliser les travaux alors qu’on est à 2 000
qui est du clos et du couvert.
ou 3 000 kilomètres de ses bases.
Sur l’aéroport, nous sommes également
sur des ouvrages qui vont très vite, et qui
Xavier DUBRAC
vont évoluer au fur et à mesure du projet.
Cette
évolution, qui mène à construire raJe dois reconnaître qu’en Entreprise Gépidement,
nous conduit à avoir des envenérale, au sens de tout corps d’état et tous
loppes
qui
sont vraiment dans les délais
les lots, nous avons connu des expépour
pouvoir,
derrière, finaliser les opérariences qui n’étaient pas toujours très
tions.
Nous
avons
les mêmes problémaréussies. Je pense à tout ce qui est
tiques commerciales, donc des choses qui
bougent beaucoup à l’intérieur. Les confier
à l’Entreprise Générale, c’est quelque part
aussi la perturber dans l’agencement de
son chantier. Nous ne souhaitons pas
avoir une entreprise qui soit en difficulté,
parce qu’à l’intérieur même de ses corps
d’état, on lui cause des problèmes particuliers avec des lots qui ne pourront pas
être correctement maîtrisés.
C’est une bonne solution de prendre une
Entreprise Générale quand on a un délai,
à condition de retirer ce qui ne pourra pas
être maîtrisé par l’entreprise dans les
temps.
Délais, performances techniques et sociétales : quelles garanties ?
Tristan LEGENDRE
Il faut que nous bougions, que nous
soyons innovants, réactifs, il faut que nous
soyons à l’écoute du monde qui nous entoure, et qui devient de plus en plus complexe. Aujourd’hui, avoir des débats un
peu tranchés, comme ça, entre Entreprise
Générale et corps séparés, c’est presque
fini. En tant qu’un des leaders de l’ingénierie en France, avec près de 1 200 projets en carnet à l’instant T, je dirais
pratiquement que j’ai une vision sur le
l’ensemble des maîtres d’ouvrage publics,
qu’ils soient étatiques ou collectivités. Ils
me demandent tous des choses aussi
complexes les unes que les autres. Les
repères ont explosé. J’aime les Entreprises Générales, y compris dans leur im-
plication, parfois très en amont dans les
projets. Nous avons des clients qui nous
disent, alors que l’on n’a pas vraiment
commencé un dessin : « Combien cela
coûte ? Demandez à l’Entreprise Générale, il faut qu’elle s’engage ».
Fabrice THIERRY
Nous, fondamentalement, Entreprises Générales, sommes ravies de la complexité
qui, effectivement, ne fait que se renforcer. Parallèlement, nous développons
notre ingénierie. Alors ensuite, il faut que
tous les intervenants soient professionnels. Comme nous l’avons dit tout à
l’heure, il faut que les projets soient définis
suffisamment tôt pour que l’on puisse
commencer le chantier, lorsque l’on sait
comment on va le réaliser.
Éric GERLACH
Nous développons en interne des
équipes, qui s’impliquent dans l’évolution
de ces projets au fur et à mesure du
temps, ce qui permet de prendre les
bonnes décisions au bon moment. Une
Entreprise Générale doit au maximum travailler dans un objet contenu, dans un
délai convenu. Quand ce projet se définit
en cours d’exécution, ce n’est pas possible de traiter en Entreprise Générale.
∕ ∕ Seconde table ronde des Rencontres de la Construction 2013
Fabrice THIERRY
Une étude très intéressante a été réalisée
par la Mission d’assistance aux hôpitaux
(MAINH) : une comparaison sur une cinquantaine d’hôpitaux, entre ceux qui
avaient été réalisés en corps d’état séparés et ceux qui avaient été réalisés en Entreprise Générale. Il est exact que les
hôpitaux sont des ouvrages relativement
compliqués. L’étude porte sur le délai,
l’évolution du prix, etc.
traditionnelles, fédératives, nous entendons toujours les entreprises se plaindre
de la manière dont elles sont traitées par
les Entreprises Générales. Alors, je fais ce
constat lorsque je regarde dans mes sociétés. Je l’ai fait avant de venir puisque
je savais que je venais m’exprimer.
83 % de notre chiffre d’affaires est réalisé
en Entreprise Générale ou en en groupement d’entreprises. Nous constatons une
très grosse évolution dans la manière dont
les Entreprises Générales se sont structurées pour répondre à la demande. C’est
tout à fait exact, y compris sur la relation
qu’elles mènent aujourd’hui sur nos lots
techniques.
Le bilan est sans appel. L’Entreprise Générale avait complètement donné satisfaction sur une cinquantaine d’hôpitaux.
Ce n’est pas l’Entreprise Générale qui le
disait, c’était un organisme d’Etat, la
MAINH. Je pense que ce qui est vrai pour Nous nous sommes rendu compte qu’il y
l’hôpital est vrai pour d’autres structures. avait entre 10 et 30 % de variations de
notre prix de revient, qui dépendaient de
l’encadrement du chantier. Donc, en clair,
Gilles GAUDIN
et on vous le dit souvent, lorsque vous
Lorsque l’on veut respecter les délais, êtes bons, nous sommes bons, que le
lorsque l’on veut une garantie de perfor- projet soit simple, qu’il soit compliqué, qu’il
mance, il faut passer par l’Entreprise Gé- soit bien vendu ou pas bien vendu. Il y a
nérale. C’est effectivement un discours qui une magie, cette étincelle qui est plus
est assez original de la part d’une entre- forte lorsque les gens se connaissent,
prise de corps d’état secondaires, lorsque les gens ont l’habitude de travailpuisque, en général, dans nos institutions ler ensemble. Et lorsque je réponds sur un
corps d’état séparé, j’ai beau faire
d’énormes efforts, je remets une copie
face à un maître d’ouvrage, un système.
Selon notre expérience, les délais sont
considérablement mieux respectés en Entreprise Générale. Les Entreprises Générales se sont « staffées » pour mettre des
effectifs énormes. Je ne vois pas comment nous pourrions, en corps d’état séparés, arriver à avoir autant de personnes.
Des gens qui sont spécialisés dans nos
lots.
Nous sommes un orchestre philharmonique. Donc nous, on joue du violon. Mais
si nous n’avons pas un super-bon chef
d’orchestre, je suis désolé, nous n’arriverons pas à faire une belle partition. C’est
vrai que nous respectons ce chef d’orchestre qu’est l’Entreprise Générale.
Délais, performances techniques et sociétales : quelles garanties ?
Film
L’Entreprise Générale, vrai gage de réussite en matière de performance énergétique, peut-être parce que le
cadre permet d’optimiser la mise en œuvre de processus innovants.
Dans la région Centre, le groupe Eiffage s’est engagé dans un Contrat de performance énergétique, qui
porte sur des lycées, pour lesquels le groupe a mis en œuvre ses dernières technologies en matière d’isolation, tout en respectant l’âme du vieux bâtiment.
Toutes les données de consommation et de températures sont collectées et envoyées au siège de l’entreprise. Pour gagner le marché de la performance énergétique, l’Entreprise Générale a su répondre à toutes
les exigences du cahier des charges : le diagnostic des bâtiments, les travaux, puis la gestion des chaudières et des panneaux solaires, L’objectif écrit est de faire 40 % d’économies d’énergie.
La performance énergétique, c’est la spécialité de GA. Depuis 20 ans, ses ingénieurs planchent sur le sujet
avec des procédés de fabrication parfaitement au point.
Nous avons commencé par industrialiser les bétons, puis progressivement, nous nous sommes développés
sur les menuiseries extérieures, les façades. Et puis, de proche en proche, nous avons également inventé
des systèmes de climatisation, qui sont des modèles de traitement d’air.
Chez GA, il y a un véritable rouage d’entreprises qui travaillent ensemble, qui sont habituées à construire
ensemble, et qui fournissent des services de très bonne qualité aux utilisateurs. Par exemple, nous venons
de livrer 10 000 m2 à Niort pour la Macif, nous avons réalisé cela en onze mois. Onze mois, c’est un challenge extrêmement important. Et onze mois, cloisonné, câblé, cela veut dire que, onze mois après l’ordre
de service, les gens peuvent travailler dans leurs bureaux.
∕ ∕ Seconde table ronde des Rencontres de la Construction 2013
La performance énergétique
Tristan LEGENDRE
Si, c’est tout à fait possible, puisque ce qui
a été démontré, je crois dans cet exemple, c’est qu’à un moment, il fallait
construire une ingénierie du projet de performance pour pouvoir apporter la garantie. Nous-mêmes, nous avions réalisé des
contrats de performance énergétique aux
côtés d’EDF pour la ville de Paris. Effectivement, le chantier s’est ensuite déroulé
en corps d’état séparés, mais je dirais que
la garantie était apportée ici par une Entreprise Générale.
l’Entreprise Générale, pour ces garanties
énergétiques, sur un objet donné.
Pour en revenir aux propos sur l’énergie,
80 % des surfaces sont occupées par des
preneurs, et nous travaillons plutôt sur des
baux, que nous appelons chez UNIBAIL
des baux verts, c’est-à-dire que nous obligeons nos preneurs à diminuer de façon
drastique leur consommation énergétique.
Pour cela, nous travaillons sur l’éclairage
puisque, dans un centre commercial,
l’éclairage représente environ 50 % des
consommations. Et donc, sur 50 % des
consommations et sur 80 % de la surface,
Fabrice THIERRY
nous arrivons à travailler sur 40 % de
Les derniers bâtiments que nous construi- l’énergie.
sons, sortent à moins de 40 % de
consommation par rapport aux anciennes
constructions. La performance énergé- Gilles GAUDIN
tique nous pousse à l’excellence, que ce
Les trois dernières années ont vraiment
soit les maîtres d’œuvre ou que ce soit les
vu sortir une avalanche de produits nouEntreprises Générales. Si vous décidez
veaux, dans des techniques plus ou moins
de faire un dossier avec une maîtrise
maîtrisées. Il n’y a jamais eu autant de bed’œuvre traditionnelle, vous devez faire
soin de dialogue entre nous, entreprise de
l’ensemble des calculs, et l’ensemble des
chauffage, entre le gros œuvre, entre les
calculs doit tenir la route. Si vous consularchitectes et avec l’ingénierie. Je dirais
tez l’Entreprise Générale, tôt dans les parque c’est même l’élément essentiel du
ties de projet, l’Entreprise Générale va
dialogue, pour moi l’Entreprise Générale,
devoir faire l’ensemble des calculs avant
c’est avant tout une équipe, au dialogue.
même d’avoir fini la conception finale de
son bâtiment. Donc, ces éléments-là nous
poussent à aller très loin, et de fait, à avoir
des structures qui le permettent.
Eric GERLACH
Oui, dans les tours, la performance énergétique est réelle, là aussi. Nous pouvons
nous appuyer sur les compétences de
Délais, performances techniques et sociétales : quelles garanties ?
Performances sociales et sociétales
Xavier DUBRAC
Nous construisons des ouvrages qui accueillent beaucoup de public. L’aviation
est une activité polluante, donc les maires
et les conseillers généraux sont extrêmement attentifs au fait que la croissance du
trafic aérien, qui amène bon an mal an
entre 300 et 500 millions d’euros d’investissements sur les aéroports parisiens,
soit correctement répartie. Nous ne pouvons pas travailler qu’avec des majors,
qu’avec des Entreprises Générales et des
très grosses entreprises, il faut aussi absolument nourrir les entreprises de petite
taille.
Fabrice THIERRY
Les engagements des Entreprises Générales sont effectivement nombreux.
Déjà, nous avons des engagements à
l’égard des sous-traitants, parce que
nous les accompagnons dans nos démarches de progrès, notamment sur la
santé et la sécurité. Rappellons-nous
quand même quelques chiffres, publiés
par la CRAMIF : les entreprises de
moins de 200 salariés ont un indice
d’accidentologie de 55. Entre 200 et
1 500 salariés, elles sont à 25, et les entreprises, qui ont plus de 1 500 salariés,
sont à 1,5. Donc, clairement, les
grandes entreprises ont beaucoup
moins d’accidents. Et par conséquent,
nous invitons les sous-traitants dans
notre démarche, nous les invitons au
quart d’heure sécurité, en maintenant la
sécurité collective. C’est une éducation
permanente. Et quand nous interrogeons
des sous-traitants, 95 % d’entre eux redemandent à travailler à nouveau en Entreprise Générale.
∕ ∕ Seconde table ronde des Rencontres de la Construction 2013
Le pacte social et sociétal des entreprises générales de BTP
Philippe FABIÉ, Directeur Général Délégué de Bouygues Construction, PDG de Bouygues Bâtiment IDF :
Dès 2010, EGF.BTP, syndicat professionnel des Entreprises Générales de construction, s’était attaché
à définir, à partir de bonnes pratiques observées au sein de l’Entreprise Générale, un ensemble
d’engagements sociaux et sociétaux, dont il avait ensuite recommandé la mise en œuvre à
l’ensemble des entreprises adhérentes, dans le cadre de démarches
volontaires et responsables.
Les résultats, affichés aujourd’hui,
sont probants à de nombreux titres.
En témoigne une enquête menée
par EGF.BTP au premier semestre
2013 auprès de ses adhérents :
trois majors, une quinzaine de
grandes entreprises ou ETI, une
quinzaine de PME, qui regroupent
au total, en 2012, sur le seul marché français, environ 95 000 collaborateurs BTP. Malgré un
environnement peu favorable, les
Entreprises Générales ont globalement su maintenir leurs effectifs.
Les Entreprises Générales de BTP
sont un lieu de cohésion sociale.
Elles accueillent depuis toujours
des collaborateurs de toute culture,
de toute origine, de toute formation.
La promotion sociale fonctionne à
plein et la majorité de nos chefs de
chantiers ont démarré compagnons. L’emploi durable bénéficie
d’une priorité absolue au sein des
entreprises d’EGF.
Nous accueillons chaque année
11 500 jeunes en stage ou en contrat
d’alternance, sans compter les multiples actions d’insertion des publics
éloignés de l’emploi.
Les rémunérations sont très supérieures aux minimums légaux, particulièrement en ce qui concerne les
compagnons. 90 % des compagnons
bénéficiaient en 2012 d’une rémunération mensuelle brute supérieure d’au
moins 10 % au SMIC 35 heures :
1 426 euros. 72 % des compagnons
enfin recevaient en 2012 une rémunération mensuelle brute supérieure
d’au moins 20 % au SMIC 35 heures.
3,6 % de notre masse salariale est
consacrée à la formation quand le minimum légal est de 1,6 % ; cela au bénéfice de toutes les catégories de
salariés. Enfin, je finis par le meilleur,
avec la sécurité : entre 2005 et 2012,
nous avons ramené notre taux de fréquence de 30 à 14,5 et notre taux de
gravité de 1,5 à 1. Cette progression
est le résultat d’une culture sécurité
que l’on inculque à nos collaborateurs.
Les taux de fréquence et de gravité
sont largement inférieurs à ceux de la
branche du BTP, lesquels dépassent
respectivement 40 et 2,5.
C’est le résultat de nos efforts en formation. La moitié de nos dépenses en
formation est consacrée à la sécurité.
C’est aussi le résultat de l’optimisation
de notre matériel. C’est enfin le résul-
tat de la définition des modes opératoires par nos services méthodes.
Nos Entreprises Générales vont audelà, elles font bénéficier leurs partenaires sous-traitants de leur
investissement dans la sécurité.
Elles s’emploient à leur faire partager cette culture de la sécurité. Son
encadrement travaux et ses préventeurs veillent à la sécurité collective et donc protègent tous les
intervenants. La majorité des Entreprises Générales remettent un livret
d’accueil à leurs intérimaires et
sous-traitants. Par exemple, chez
Bouygues Bâtiment Île-de-France,
nous avons mis en place les démarches suivantes. Nous ne travaillons qu’avec des entreprises de
travail temporaire qui se sont engagées, tout d’abord à nous adresser
des intérimaires ayant reçu au mini-
Délais, performances techniques et sociétales : quelles garanties ?
mum une formation théorique de
deux jours sur la sécurité. Egalement à dispenser une formation de
deux jours à l’utilisation de deux outils, pour les intérimaires qui ont des
missions longues. Enfin, à former
des sauveteurs secouristes du travail.
5 % des heures travaillées dans tous
les marchés. Sur le plan de la sécurité, cette population implique un accompagnement de tous les instants.
Enfin, par leur cinquième engagement, les Entreprises Générales se
sont engagées sur la voie du badgeage systématique de tous les inConcernant nos sous-traitants, tervenants sur les chantiers, afin de
nous leur remettons des fiches ré- lutter contre le travail illégal.
capitulant les consignes générales
Par ces cinq engagements, les Ende sécurité propres au chantier, et
treprises Générales de France monles consignes particulières de sécutrent leur volonté d’assurer
rité propres à leur lot. Nous nous
pleinement leur rôle d’entreprise cisommes engagés dans une
toyenne, souhaitant que le décideur
convention de partenariat avec
public préserve l’investissement
l’OPPBTP, qui prévoit notamment
dans le BTP, générateur de croisdes visites de chantiers inopinées
sance et d’emplois non délocalisapar l’OPPBTP.
bles.
Ce pacte, nous devons le faire
Cela permettrait aux Entreprises Géconnaître à tous les intervenants
nérales de poursuivre leur politique
dans l’acte de construire. Je vous
sociale, en dotant le pays des équirappelle les quatre autres engagepements nécessaires à ces habiments de ce pacte. Le second entants.
gagement consiste à recruter, en
2013 et 2014, 13 500 collaborateurs, dont 85 % seront en CDI. La
moitié de ces jeunes auront moins
de 30 ans, et les Entreprises Générales, par leur organisation, ont les
moyens de les encadrer et de les
tutorer. Troisième engagement : les
Entreprises Générales se sont engagées à porter leur effort de formation à 4 % de la masse salariale.
Quatrième engagement : les Entreprises Générales se sont déclarées
favorables à un taux d’insertion de
Gilles GAUDIN
Tout était très bien dit dans les propos de
Philippe Fabié. Donc, nous sommes obligés à appliquer un certain mimétisme, soit
parce que nous y sommes contraints, soit
parce que nous sommes curieux. Et effectivement, j’ai l’honnêteté de reconnaître
que nous nous sommes tournés vers la
sécurité parce que, au départ, nous avons
été obligés de le faire. Et cinq ans après,
nous avons divisé par quatre nos accidents du travail, nous appliquons tous les
lundis matins, le quart d’heure de sécurité.
Mais je voudrais rajouter quelque chose
de beaucoup plus pragmatique, je ne sais
pas si j’aurai l’occasion de le faire après,
cela me semble quand même essentiel : il
ne faut pas oublier que lorsque nous travaillons en Entreprise Générale, nous
sommes certains d’être payé à l’heure.
Ce qui veut dire que je mettrais plus de
cœur, plus de qualité dans les ouvrages
avec des gens dont je sais qu’ils me paieront à l’heure. Etre sûr d’être payé, c’est
aussi un facteur de réduction des coûts.
Si vous voulez avoir un bon prix d’une entreprise, assurez-vous qu’elle soit payée.
C’est pour cela que ça ne coûte pas plus
cher de travailler en Entreprise Générale.
∕ ∕ Seconde table ronde des Rencontres de la Construction 2013
Le dernier mot
Xavier Dubrac
Moi, je voudrais également saluer l’effort
de modernité des Entreprises Générales.
Nous voyons bien que dans un certain
nombre de domaines, ce sont elles qui tirent réellement à la fois la compétitivité et
la qualité sur nos chantiers. Il y a un autre
domaine, qui va bientôt arriver, et qui est
fondamental, celui de la conception assistée par ordinateur en 3D. Là encore, les
Entreprises Générales ont un rôle majeur
à jouer puisqu’elles vont avoir des soustraitants qu’il va falloir épauler, aider, coordonner, parce que les petites entreprises
n’y seront pas encore.
Eric GERLACH
A l’issue de ces deux tables rondes, je
voudrais renforcer l’idée qu’il faut avoir
des projets bien étudiés, en s’appuyant
sur les ingénieries, sur les architectes bien
entendu, et aussi sur la valeur ajoutée des
entrepreneurs. Cela est évident, mais
d’abord parlons de ce qu’il faut faire, faisons-le bien, et après, tout sera beaucoup
plus simple.
Le deuxième axe que je voudrais évoquer,
c’est qu’il n’y a pas de vérité. S’il y avait
une vérité, on ferait tous de l’Entreprise
Générale ou du lot séparé, et nous ne serions pas là pour en parler pendant deux
heures. Donc, avant de décider de la
façon dont nous réalisons un projet, posons-nous bien le problème de comment
nous voulons le faire, avec qui nous voulons le faire, et comment le maître d’ouvrage est équipé pour le réaliser.
Gilles GAUDIN
Simplement, si je suis là où j’en suis aujourd’hui, c’est grâce aux Entreprises Gé-
nérales. Vous nous avez fait grandir, vous
nous avez appris à nous remettre en
cause au moment où il fallait, vous nous
avez appris à nous transcender, vous
nous avez appris à respecter les délais, à
satisfaire nos clients, à faire des ouvrages
de qualité. Vous nous avez conduits sur
le chemin d’une superbe aventure humaine.
Fabrice THIERRY
Je voudrais juste que l’on retienne que
nous, Entreprise Générale, nous ne valorisons peut-être pas assez notre travail,
parce qu’en CPE, nous nous s’engageons
sur des résultats, mais nous n’expliquons
pas comment nous arrivons à tenir ces engagements. Nous connaissons le nombre
de conducteurs présents sur nos chantiers, mais pour respecter nos engagements énergétiques, il faut des
conducteurs de travaux qui vont vérifier
partout la pose des joints pour une parfaite perméabilité à l’air, etc.
De la même manière, nous avons des
conducteurs de travaux qui luttent contre
le travail illégal qui, effectivement, nous
l’avons dit, s’imposent le badgeage, mais
c’est quelque chose qui n’est pas suffisamment valorisé.
L’entreprise générale, depuis quand ?
L’Entreprise Générale, depuis quand ?
Xavier BEZANÇON
L’Antiquité : nous sommes très bien documentés sur l’Antiquité romaine, et nous
avons même les noms des entrepreneurs
de l’époque : les machinators, les dynastes, c’est l’Entreprise Générale. Alors,
ces entrepreneurs généraux maîtrisaient
des constructions très complexes, la
construction des aqueducs.
d’une certaine répétitivité dans les ouvrages, et la maîtrise de l’opus caemanticum, c’est-à-dire le ciment et le béton. Et
d’ailleurs, ils atteignaient un niveau de
construction en béton extraordinairement
élevé puisqu’il existe encore plein d’ouvrages en béton de cette époque. Je rappelle qu’à Paris, l’ouvrage le plus ancien,
c’est le toit des thermes de Cluny, qui est
Je vous rappelle que, par exemple, la ville
un ouvrage du Ier siècle. Il a donc dixde Lyon a trois aqueducs, dont un qui fait
neuf siècles.
80 kilomètres de long. A Rome, il y avait
vingt-six aqueducs, et c’était en centaines Ce qui est sûr, c’est que les Romains maîde kilomètres de long.
trisaient parfaitement le béton, et même
les adjuvants au béton, puisqu’ils metCes grands entrepreneurs généraux retaient des cendres pouzzolanes, qui occrutaient les architectus, géraient les
casionnaient le durcissement du béton,
chantiers, géraient les approvisionnecomme on l’a découvert, il y a quelques
ments, géraient le coût financier, et
années.
avaient des méthodes constructives. Ces
méthodes constructives étaient basées La période médiévale : là, la grande
sur la standardisation des pierres, des question est de construire des cathéméthodes de poses, l’industrialisation drales. Cette construction de cathédrales
∕ ∕ Seconde table ronde des Rencontres de la Construction 2013
fait émerger un homme très important : le
maître d’œuvre médiéval. Le maître d’œuvre médiéval est un homme issu des professions de la construction, généralement
maçonnerie ou charpenterie, qui a la capacité de construire et de concevoir un ouvrage, y compris techniquement. C’est un
homme créatif, et on peut dire « hardi »,
un mot du Moyen Âge, un homme innovant.
Au XVIIème siècle se pose la problématique de faire des canaux, de construire
des aqueducs à nouveau, des ponts toujours, des quartiers entiers, et même des
villes. Et là, apparaît une forme qui est effectivement la forme du concessionnaire,
financeur, c’est Christophe Marie, avec le
pont Marie dans Paris, qui dessert l’île
Saint-Louis, qu’il a également construite
en concession. C’est Pierre-Paul Riquet
Alors il invente, par exemple, les tech- qui fait le canal du Languedoc.
niques de coulage au plomb vertical, ce Nous avons trois figures : les concessionqui équivaut à une véritable technique de naires, qui financent, qui conçoivent et qui
béton armé, alors que les Romains construisent. Et nous avons également les
n’avaient jamais fait de coulage au plomb architectes entrepreneurs, comme Louis
vertical, ils le faisaient horizontal. Il invente Le Vau, dans l’île Saint-Louis justement,
les rosaces, il invente les arcs-boutants, il ou des maçons créateurs de plans, parce
invente la structure ogivale, qui est une que l’on n’identifie pas la fonction d’archistructure d’araignée qui fait tenir l’ouvrage, tecte de la fonction de maçon.
il invente la standardisation des pierres
pour faire les très hautes élévations d’ou- Tout cela est mélangé, cela va même
vrages, et il invente également les outils, jusqu’au Code civil, oui. Et à ce moment
que je ne détaille pas. C’était de véritables donc, les uns et les autres vendent de
divas pour certains d’entre eux. Puisqu’il y l’Entreprise Générale, tantôt architecte,
en a un, qui s’appelait Jean Deschamps, tantôt maçon, et font des ouvrages clés
il a construit cinq cathédrales, dont Nar- en mains.
bonne, Rodez, Clermont et Orléans.
Nous arrivons au XIXème siècle. Là, les
questions sont plus nombreuses : apparaissent le métal, la construction en métal,
les chemins de fer — qui sont à l’origine
de la croissance du XIXème siècle et de la
Révolution industrielle —, les villes et les
services urbains.
Émergent alors trois types d’entrepreneurs généraux : les Schneider ou les
Gouin. Gouin avait fondé la Société de
Construction des Batignolles en 1845,
Schneider en 1834, œuvre en métallurgie
et en travaux publics. Et nous avons des
entrepreneurs, à la fois de travaux publics,
qui construisent des locomotives, comme
la Société des Batignolles, et des Entreprises Générales de constructions mixtes,
qui apparaissent au XIXème siècle : Fougerolle, Léon Grosse, on pourrait en citer
d’autres.
Et puis, apparaissent ces grands concessionnaires entrepreneurs, parce que le
XIXème siècle est le siècle de la concession, des chemins de fer, des villes. Alors,
ce sont des financiers, des Pereire ou des
Rothschild, ce sont des ingénieurs comme
Délais, performances techniques et sociétales : quelles garanties ?
Eiffel, ce sont également des architectes
comme Blondel et Ricardo qui réalisent la
reconstruction de Paris. On dit que Haussmann a construit Paris, mais Haussmann
n’a rien construit du tout. Il a signé quarante-deux contrats à des groupements
d’architectes, entrepreneurs, financiers,
qui étaient d’ailleurs menés en premier
lieu par des architectes, les deux fameux
Blondel et Ricardo, qui d’ailleurs n’ont pas
laissé une œuvre architecturale impressionnante, mais qui, en revanche, ont
laissé les rues de Paris. Les rues de Paris
comprennent la construction des égouts,
des trottoirs, l’adduction d’eau, l’adduction
de gaz et l’éclairage urbain. Paris ville Lumière, cela date de cette époque-là. C’est
quarante-deux contrats signés pour la reconstruction totale de Paris, entre 1851 et
1870.
Au XXème siècle, deux problématiques apparaissent au début du siècle, c’est l’électricité, le moment où l’on commence à
faire des barrages et des réseaux électriques ; c’est également le béton armé,
en remplacement du métal et de la maçonnerie. Et là, arrive ensuite au cours du
siècle, le développement des grandes infrastructures, des villes, des autoroutes,
etc. Nous voyons bien qu’apparaissent
des entreprises moyennes d’abord, puis
des grands groupes multifonctions. Mais
par exemple, dans les travaux électriques
au départ, la Société Générale d’Electricité, l’ancêtre de Vinci et GTM, sont des
sociétés d’électricité. La SPIE, dont j’ai
parlé, la Société Parisienne d’Industrie
Electrique, qui ensuite fusionnera avec la
Société de construction des Batignolles
dans les années plus récentes, est une
société
qui est née en 1900, pour la
La conception-construction fonctionnait à
construction
du métro de Paris.
plein régime. Le tunnel du Mont-Cenis,
par exemple, a été réalisé en conception- A cette époque, a lieu une séparation déconstruction.
finitive de l’architecte et de l’entreprise.
Nous assistons à un développement exceptionnel du béton, qui est vraiment la
technique française, avec Freyssinet, qui
invente le béton précontraint en 1928, le
béton post-contraint en 1938, les deux
brevets de Freyssinet. Nous avons les
contrats globaux et nous avons cette ingénierie très forte, qui reste au sein de
l’Entreprise Générale, qui est vraiment
une caractéristique essentielle en France.
En conclusion, nous voyons qu’à
chaque époque, il y a eu :
• une problématique, des innovations, qui ont été prises en main par des
formes d’Entreprises Générales.
• une permanence du besoin de clés
en main. Cela est quand même très intéressant. L’Entreprise Générale n’existe
pas par elle-même, elle existe parce qu’il
y a des gens qui veulent du clé en main.
Et on a des grands entrepreneurs innovateurs : Jean Deschamps, Christophe
Marie, Riquet, Eiffel, j’en passe et des
meilleurs.
Et encore au XXème siècle, on ne peut pas
tous les citer, ce n’est pas possible, il y en
a plein la salle !
∕ ∕ Les Rencontres de la Construction 2013
Conclusion
CONCLUSION
Michel GOSTOLI, Président d’EGF.BTP
Au moment où notre pays vit dans une
réelle confusion sociale et économique,
attisée par le manque de détermination à
prendre des décisions courageuses et à
trancher ; au moment dramatique, cela a
été dit tout à l’heure, où plus de 25 % des
jeunes Français sont au chômage, et dans
ce contexte que je trouve presque surréaliste, permettez-moi de vous exprimer la
fierté que j’ai à conclure ces Rencontres
de la construction. Ces Rencontres de la
Construction bien sûr, mais surtout à
conclure cette année 2013, puisque nous
sommes le 12 décembre, pour nos Entreprises Générales de France.
Je suis vraiment épaté par la capacité
qu’elles ont à tenir la route, dans un environnement économique complexe et dans
une instabilité administrative chronique.
Parfois, je me demande si vous, les dirigeants, les cadres de ces entreprises, si
vous n’êtes pas un peu prestidigitateurs.
Les coups de boutoir permanents de certains élus, pour imposer l’allotissement ou
pour critiquer les partenariats public-privé,
fragilisent nos Entreprises Générales. La
difficulté de compréhension, même pour
les initiés que nous sommes, des nouvelles lois, pour la plupart d’entre elles toujours en attente de la publication
d’innombrables décrets, sont un autre
exemple.
En revanche, il y a des dispositions et des
idées qui vont dans le bon sens. En premier lieu, bien sûr, le CICE qui apportera,
dès 2014, un ballon d’oxygène à nos entreprises. La capacité pour l’ANRU de
prendre une participation dans une société de développement pour encourager
les initiatives privées dans les secteurs difficiles. L’étude de la création, sous l’égide
de la Caisse des dépôts, d’une société de
financement de la transition énergétique,
qui soutiendrait la rénovation du parc ter-
tiaire public. Un grand enjeu : on parle
d’un volume de financement de l’ordre de
10 milliards d’euros.
La volonté déclarée, toujours par l’ANRU,
de développer les CREM pour la construction d’équipements publics en zones de
renouvellement urbain. La pérennisation,
nous en avons parlé ce soir, de la conception-construction dans le secteur des logements aidés, dont nos maîtres
d’ouvrage, en tout cas une majorité d’entre eux pour le logement social, ont compris qu’il s’agit d’un contrat
gagnant-gagnant. Et enfin, je voudrais saluer d’une manière plus générale certains
élus qui, sur leur territoire, savent trouver
et valoriser les complémentarités entre le
secteur public et le secteur privé, plutôt
que de les opposer, souvent par dogmatisme.
∕ ∕ Seconde table ronde des Rencontres de la Construction 2013
Non, si nous en sommes là, si nos entreprises sont en bonne santé, c’est grâce à
nous-mêmes, c’est grâce à vous, grâce à
certains de nos partenaires qui nous sont
fidèles et qui sont d’ailleurs, pour certains
d’entre eux, parmi nous ce soir.
Les capacités d’innovation de nos entreprises, sur lesquelles d’ailleurs nous ne
communiquons pas encore assez, participent à l’amélioration de nos offres et de
notre productivité. Notre détermination à
élaborer, comme l’a tout à l’heure si bien
dit Philippe Fabié, et à promouvoir notre
pacte social et sociétal, ces cinq engagements forts concernant nos partenaires,
notre soutien l’emploi, à la formation, à
l’insertion et au respect du droit du travail,
sont précieux pour notre économie mais
aussi pour la structure de notre pays. Et
ce sont des gages de performances que
les élus doivent reconnaître en soutenant
notre activité.
sens dans le cadre de la polémique brûlante du détachement des travailleurs en
Europe. L’avancée d’avant-hier à
Bruxelles peut être lue comme une avancée importante, espérons que ce ne soit
pas qu’un effet de communication politique ou publique.
gement la plus forte TVA en Europe.
Toutes ces propositions permettraient
concrètement d’accélérer la production de
logements dans notre pays.
Enfin, je reviens aux deux tables rondes
qui viennent de se dérouler devant vous.
Elles sont la preuve de notre volonté et de
notre capacité de remise en cause, avec
pour objectifs principaux : partager nos
bonnes idées, toujours mieux travailler
ensemble, cela a été dit, susciter encore
plus de confiance réciproque, et bien sûr,
encore mieux servir nos clients. L’Entreprise Générale plus que jamais est un outil
remarquable au service de nos clients. Il
est certain que si nous sommes bons, nos
clients apprécieront toujours un service
complet, dans un délai et un budget fixés,
et respectés. Cela commence par là :
Soyons bons.
Les propositions que nous poussons auprès des cabinets ministériels, je pense
entre autres au bail emphytéotique logement attribué en conception-construction,
qui a pour but d’organiser la session foncière et l’élaboration du projet en même
temps ; je pense aux contrats de partenariats opérateurs-propriétaires fonciers-collectivités publiques, qui a déjà été conduit
par certains d’entre nous et qui permet de
gagner beaucoup de temps dans le développement des opérations ; je pense enfin
à la baisse de la TVA sur le secteur du logement, qui est recommandée également
Par opposition, l’allotissement, dont il a
par le Conseil d’analyse économique. Saété question tout à l’heure, entraîne des
chez, vous le savez sans doute, que la
Je tiens à souligner que les engagements
désagréments aux maîtres d’ouvrage.
France est le pays qui applique sur le lode notre pacte prennent encore plus de
Délais, performances techniques et sociétales : quelles garanties ?
En marge de tout ce qui a été dit cet
après-midi, je veux attirer votre attention,
mes chers collègues, sur les niveaux de
prix pratiqués dans nos marchés. Il me
semble qu’ils baissent dangereusement
pour nos entreprises. N’oublions pas deux
choses. Premièrement, c’est nous qui faisons les prix. Deuxièmement, nos maîtres
d’ouvrage peuvent choisir et doivent choisir, cela a été évoqué tout à l’heure, les
Ensuite et enfin, les contrats de concepmieux-disants. Et nous devons les en
tion-construction, ou les CREM, sont de
convaincre.
remarquables outils contractuels. Grâce à
eux, nos entreprises sont fédératrices et L’année dernière, j’avais dit que nos enintégratrices des compétences indispen- treprises devaient être de véritables locosables de nos partenaires architectes, de motives dans de nombreux domaines : la
nos partenaires bureaux d’études. Je rénovation urbaine et énergétique, la prol’avais déjà formulé l’an dernier, mais je duction de logements vertueux et éconosouhaite que nos amis architectes m’en- miques, le combat contre le chômage des
tendent à nouveau, ils ont leur place dans jeunes.
nos équipes pluridisciplinaires. Même si
Je pense, moi, globalement, qu’elles l’ont
cela les éloigne de leurs lois fondatrices
été. Elles ont été des locomotives, malgré
de 1977 et de la rigueur, toujours actuelle
toutes les difficultés rencontrées au cours
mais quelque peu dépassée me semblede cette année 2013. Et c’est pour cela fit-il, de la loi MOP.
Nos partenaires sous-traitants nous disent, quant à eux, qu’ils ont avantage à
travailler avec nous pour des raisons d’organisation, de garantie de paiement et
pour la sécurité qu’offrent nos chantiers.
Nous ne sommes pas encore parfaits.
Alors, continuons donc à les valoriser en
appliquant tout simplement notre pacte
social et sociétal.
nalement que nos entreprises, cette
année, plus que l’année dernière encore,
m’ont bluffé. Alors ce soir, puisque dans
notre pays, il semble que ce soit la mode
des bonnets, je veux vous attribuer à tous
le bonnet d’or de la combativité et de la
pugnacité.
Je vous souhaite encore un petit zeste de
courage pour les derniers jours de l’exercice, parce que l’on sait que ce n’est pas
terminé, et que cela va jusqu’au 31 décembre. Je remercie tous les acteurs, et
ils sont nombreux, qui ont préparé et qui
ont participé à ces 13èmes Rencontres de
la Construction. Et puisque ce sont nos
13èmes Rencontres, je sens bien qu’elles
vont nous porter chance. Je vous remercie de votre attention.
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