Tendances dans la stratégie internationale des entreprises de

Transcription

Tendances dans la stratégie internationale des entreprises de
Tendances dans la stratégie internationale des entreprises de
distribution : résultats à partir d’une analyse empirique
Dr. Daniele Pederzoli
Professeur Associé
Groupe ESC Rouen
Boulevard André Siegfried
76825 Mont Saint Aignan
tél. 02 32 82 57 85
e mail [email protected]
1
Tendances dans la stratégie internationale des entreprises de distribution : résultats à
partir d’une analyse empirique
Après deux décennies de croissance rapide et presque ininterrompue,
l’internationalisation de la distribution semble avoir démarré une phase plus orientée à
la réflexion et beaucoup plus ciblée pendant les premières années de ce nouveau siècle.
La littérature commence à prendre en compte cette nouvelle phase surtout en analysant
les échecs les plus importants qui se sont passés pendant les années récentes, à partir de
ceux de Marks & Spencer et de Royal Ahold, mais la réflexion se concentre sur
quelques études de cas. Nous avons essayé d’étudier les mouvements internationaux
d’un certain nombre d’entreprises internationales pendant la période 2000-2004 pour
déceler les nouvelles tendances en matière d’internationalisation ; cette étude a concerné
les entreprises que nous avions étudiées pendant la décennie précédente pour construire
un modèle d’internationalisation qui avait été l’objet de notre thèse. Nous avons ainsi
cherché à vérifier si le modèle que nous avions proposé est encore valable et quels sont
les changements les plus importants à apporter pour tenir compte des nouve lles
stratégies des entreprises.
Le processus d’internationalisation est beaucoup plus raisonné, mais les composantes
stratégiques fondamentales ne semblent pas changer, plutôt elles semblent devenir plus
pointues et demandent un management plus attentif à la rentabilité et non seulement à la
croissance.
Recent trends in the international strategy of retail companies : results from an empirical
research
After two decades of rapid and relentless expansion, during the first years of this new
century, the internationalisation of retail companies appears to have begun a new phase,
more oriented to reflexion and more targeted than before.
Academic literature have started to study this new phase, but the interest is mainly
concentrated in some important international failures that occurred recently, like that of
Marks & Spencer and that of Royal Ahold.
In this paper we have studied the international operations of some retail companies
during the period between 2000 and 2004 with the aim of finding the new trend s at the
strategic level; we have studied the same companies we had analysed during the
previous decade for building the model of internationalisation described in our doctoral
thesis. With this study, we have tried to verify the validity of our model in an
environment changed in deep, and also to define which changes should be made to this
model following the main strategic operations of some important companies.
The internationalisation process is more reflexive than before, but the components of
the strategy are the same, the main difference is the need to manage these issues in a
very fine way and, by consequence, the need for the management to be much more
attentive to the economic and financial results and not only to the ratio of international
growth.
2
Tendances dans la stratégie internationale des entreprises de distribution : résultats à
partir d’une analyse empirique
Introduction
L’internationalisation de la distribution, après une décennie de croissance flamboyante
et d’opérations parfois spectaculaires, semble avoir démarré vers la fin du XXe siècle
une phase beaucoup plus caractérisée par la réflexion, les opérations ciblées, la tentative
de conjuguer la recherche de la taille critique avec une forte attention à la rentabilité et
donc à la croissance durable de l’entreprise.
Cette nouvelle attitude de la part de toutes les principales entreprises représente-elle une
sixième phase dans le processus d’internationalisation des entreprises de distribution
après les cinq phases décrites par Alexander (1997) ou bien s’agit-il seulement d’une
adaptation tactique à la situation des marchés et de la demande globale ?
Dans cet article, nous chercherons à répondre à cette question en étudiant les
mouvements à l’international de quelques entreprises de distribution parmi les plus
importantes dans les trois/quatre dernières années parce qu’il nous apparaît évident que
beaucoup de choses ont changé entre la fin du XXe siècle et le début de ce nouveau
millénaire.
Les raisons qui ont certainement influenc é les changements stratégiques intervenus dans
les entreprises sont multiples ; en cherchant à suivre une certaine chronologie, on peut
rappeler les suivantes :
• L’explosion de la « bulle Internet », qui a provoqué non seulement l’effondrement
de presque tous les titres des sociétés liées à Internet, mais aussi une chute des
valeurs boursières très forte dans tous les pays ; les principales Bourses mondiales
sont encore bien en dessous des valeurs de la moitié 2000, avant l’explosion de la
bulle Internet.
• Le terrible attentat du 11 septembre 2001 a représenté un frein majeur à la tentative
de reprise économique des Etats-Unis, par conséquent on a commencé à assister à
une vrai reprise dans la première économie mondiale seulement au troisième
trimestre 2003, mais la croissance est encore loin d’être linéaire est l’optimisme
n’est certainement pas encore revenu.
• L’attentat du septembre 2001 a jeté une ombre d’inquiétude, si non de peur dans les
sociétés occidentales ; il a représenté un choc pour les citoyens américains qui
jusque là se sentaient à l’abri du terrorisme à l’intérieur de leur propre pays, mais a
effrayé par son énorme impact même les citoyens d’autres pays occidentaux qui
avaient bien connu le terrorisme dans les années précédentes.
• Deux guerres se sont passées entre 2001 et 2003, la première en Afghanistan avec
les Etats-Unis qui jouissaient d’un consensus international presque total, tandis que
la deuxième, en Iraq, a provoqué des tensions très graves dans la communauté
internationale et aussi des mouvements de boycott de la part des consommateurs
envers les produits provenant des champs adverses. Ces tensions se sont réduites
dans la première moitié 2004, surtout avec la tentative de redonner un rôle à l’ONU,
mais n’ont pas encore disparu complètement.
3
•
•
•
•
Pendant la crise irakienne, des nouveaux attentats sont arrivés, cette fois à l’intérieur
de pays jusque là épargné par le terrorisme international comme le Maroc,
l’Indonésie, l’Arabie Saoudite ou l’Espagne. La cible étant toujours les populations
occidentales ou les pays arabes « modérés » l’incertitude et la sensation d’insécurité
n’ont fait que s’accroître.
De la moitié 2000, le monde occidental a connu une phase de stagnation
économique très longue, qui a débouché dans certains pays comme l’Allemagne, la
France et l’Italie, sur une véritable récession pendant quelques trimestres. Le risque
de la déflation est devenu de plus en plus concret dans plusieurs pays, avec le
spectre de la très longue déflation japonaise à l’horizon.
Quelques crises régionales importantes ont éclaté, la plus graves étant certainement
celle de l’Argentine, le premier pays développé à devoir déclarer la mise en faillite
de sa dette internationale depuis plusieurs décennies ; heureusement, la crise
argentine n’a pas crée un effet domino dans la région d’Amérique Latine, mais
d’autres pays ont été touchés, parfois rudement, par la faillite argentine.
Presque seulement la Chine a continué sa croissance à un rythme très élevé et
constant, en devenant par cette voie l’une des destinations fondamentales pour les
investissements internationaux dans tous les domaines, y compris la distribution.
Il y a seulement quatre ans, dans le cadre de la recherche menée pour notre thèse, nous
avions analysé les principaux mouvements à l’international de 37 entreprises de
distribution et cette analyse nous aviez permis de construire et de tester une
modélisation de la stratégie internationale pour la distribution. La période de notre
analyse avait été de 1989 à 2000, caractérisée par un environnement économique et
social assez stable, ou quand-même avec une forte orientation à la croissance
économique et sociale au niveau mondial. Les changements dans l’environnement nous
ont donc amenés à nous interroger si les stratégies internationales des entreprises de
distribution se sont modifié et si le modèle construit à l’occasion de notre thèse garde sa
validité.
Nous avons donc suivi les mouvements internationaux de quelques entreprises majeures
pendant la période 2000- moitié 2004 pour comprendre les axes stratégiques et pour
déceler les éventuelles modifications par rapport aux années précédentes.
L’analyse a été menée en utilisant des sources documentaires différentes, de la presse
spécialisée française, anglaise, italienne ou allemande, aux rapports annuels publiés par
les entreprises, aux informations contenues dans des bases de données spécialisées sur
l’information économique.
Notre communication se compose donc de deux parties : la première prendra en compte
la littérature sur l’internationalisation de la distribution et les modèles stratégiques
employés pour l’expliquer, y compris le modèle que nous avons élaboré à l’occasion de
notre thèse ; dans la deuxième partie, on va illustrer quels sont les changements majeurs
dans les stratégies d’internationalisation qui apparaissent à ce début de millénaire
comme étant les plus marquants par rapport aux périodes précédentes et aux modèles
pris en compte.
1 Les modèles stratégiques et l’internationalisation de la distribution
Le secteur de la distribution n’a pas développé de modèles stratégiques propres et a
plutôt emprunté des modèles crées pour le secteur de la grande industrie. Quelques
4
composantes des modèles stratégiques « industriels » nous apparaissent importantes
aussi pour les entreprises de distribution, surtout dans le cadre de leur
internationalisation. Les stratégies de base de Porter (1985) peuvent trouver des
exemples importants dans la distribution, comme c’est le cas de la domination par les
coûts de Wal Mart et Carrefour, de la différenciation de Sephora ou de Fnac ou de la
segmentation de Gap, Zara, Hennes & Mauritz ou bien encore Ikea
Très importante pour la distribution est aussi la chaîne de valeur (Porter 1985), qui
permet à des entreprises de distribution qui ont été capables de s’intégrer en amont ou
en aval de dégager des avantages fondamentaux par rapport à leurs concurrents.
Une autre composante de la réflexion stratégique de Porter qui a connu un certain
succès dans la distribution pendant plusieurs années est l’interrelatio ns entre les
différentes « unités d’affaires » ; ce concept a été à la base des conglomérats qui ont
connu un certain succès dans la distribution pendant des années, mais qui semblent
profondément remis en question récemment.
Le dernier aspect de l’œuvre de Porter qui nous semble s’appliquer pleinement dans la
distribution est la stratégie offensive: pour attaquer un leader on peut modifier le
domaine géographique de la concurrence (Porter 1987). Il s’agit d’une possibilité bien
connue parce qu’on a vu plusieurs entreprises très bien placées ou leaders au niveau
régional perdre leur position face à des concurrents de taille nationale qui pouvaient
générer des économies impossibles à obtenir à un niveau inférieur.
C’est la notion de “taille critique” qui est devenue de plus en plus un thème de réflexion
fondamental pour les entreprises de la distribution qui se battent au niveau international,
voire mondial.
Dans le domaine de la pensée stratégique plus orientée vers l’international, plusieurs
éléments peuvent s’appliquer dans la distribution aussi : il s’agit de l’introduction de la
stratégie globale (Levitt1983) à côté des traditionnelles stratégies internationale et
multinationale, mais aussi bien d’un concept qui nuance et modifie cette orientation en
introduisant des différenciations géographiques, comme c’est le cas de la compétition
globale dans la Triade (Ohmae 1985). Le débat globalisation-régionalisation a été
maintes fois approfondi dans la pensée académique et managériale dans les années
suivantes, mais une récente étude a montré que parmi les premières 500 entreprises au
monde du classement Fortune seulement 9 apparaissent vraiment globales, tandis que
320 sont définies « orientées vers le marché régional domestique » (home region
oriented) et 25 sont classées comme bi-régionales (Rugman et Verbeke 2004). Aucune
entreprise de la distribution n’est classée dans les entreprises globales ou bi-régionales,
tandis qu’on peut trouver deux firmes, Ahold et Delhaize Le Lion dans la catégorie des
entreprises avec une partie fondamentale du chiffre d’affaires dans une région différente
de celle domestique (host region-based) et deux autres, Wal Mart et Carrefour qui sont
classées dans la catégorie des « home region oriented ».
On peut diviser la littérature sur l’internationalisation de la distribution en deux
domaines: d’un côté, on trouve les études sur l’évolution et les raisons du
développement international, de l’autre on peut classer la recherche de quelques
modèles stratégiques pour l’internationalisation.
Dans le premier domaine, les contributions les plus importantes sont certainement les
suivantes:
• La division de l’histoire internationale de la distribution en cinq phases (Alexander
1997);
5
• Les études sur les raisons de l’internationalisation, parmi lesquelles on trouve des
raisons « contingency» ou « context» (Hallsworth 1992), mais aussi toutes les
contributions au débat entre les raisons proactives et les réactives. Dans la même
ligne de réflexion se situent les études de Treadgold (1991) sur les attitudes des
entreprises dans le processus d’internationalisation. Le schéma de Treadgold a été
utilisé quelques années après par d’autres auteurs pour vérifier les attitudes des
principales entreprises de la distribution alimentaire européenne face à la
globalisation de l’économie (Myers et Alexander 1996). Les motivations des
entreprises ont été étudiées aussi par Alexander (1995), qui a trouvé quatre
catégories en combinant le niveau de saturation du marché national et le niveau des
opérations à l’international. Dans les études de Treadgold et d’Alexander, ce sont la
volonté et l’attitude des entreprises qui deviennent de plus en plus tournées vers
l’international qui expliquent les stratégies des entreprises, même s’il ne faut pas
oublier l’expérience acquise ou la situation de la concurrence sur le marché national.
Dans la ligne des raisons, mais aussi des stratégies suivies par les entreprises dans leur
processus d’internationalisation, Dawson a donné une contribution fort originale en
introduisant le concept d’opportunisme comme l’une des explications majeures pour
comprendre les mouvements internationaux (Dawson 2001) ; l’auteur arrive même à
définir que derrière un certain nombre d’opérations on peut trouver le hasard
(serendipity). Il est certain que les conditions de l’environnement peuvent influencer
profondément les comportements des entreprises, surtout dans un contexte international,
mais les conditions extérieures à l’entreprise peuvent seulement, à notre avis, renforcer
ou modifier ses attitudes et sa volonté, sans pouvoir en aucun cas se substituer
complètement à celles-ci.
Du côté des réflexions stratégiques, les études sont assez récentes, parce qu’elles
commencent vers la fin des années ’80, même s’il ne faut pas oublier la première
contribution importante de Hollander (1970), qui classe les entreprises de distribution
qui se sont développées au niveau international en cinq catégories: distributeurs
d’articles de luxe, distribution généraliste, compagnies commerciales, chaînes
spécialisées et vente directe. L’étude de Hollander est certainement importante, mais il
s’agit plutôt d’une description à partir de la réalité des années ’60 que d’une tentative de
trouver des stratégies internationales.
Dans la ligne de la réflexion stratégique se situent les études menées dans les années
suivantes par plusieurs auteurs. Treadgold (1988), combine la présence géographique
avec le niveau des coûts et de contrôle des opérations internationales choisis par chaque
entreprise, Salmon et Tordjman (1989), définissent trois stratégies pour les entreprises
internationales: il s’agit de la stratégie globale, de la stratégie multinationale et de la
stratégie d’investissement. Les contributions de Salmon et Tordjman concernent
l’introduction dans la réflexion des formules de distribution, à la place des entreprises
dans leur entier, mais aussi le transfert de savoir-faire, qui change en profondeur dans
chaque stratégie et qui devient une composante importante de l’orientation stratégique
des entreprises. Le thème de l’adaptation ou de la standardisation de la formule (ou des
formules) est l’un des plus importants dans le débat sur l’internationalisation, en
correspondance avec le même dualisme dans le domaine du produit pour le marketing
industriel.
Dupuis (1991), décrit trois formes d’internationalisation: l’exportation d’un concept
fort, l’exportation du capital, la recherche d’alliances efficaces. Les contributions les
plus importantes de Dupuis concernent les accords de coopération, qui sont devenus très
6
nombreux dans des années récentes, aussi bien à cause des centrales d’achat
européennes que des accords de joint venture utilisés pour pénétrer des nouveaux
marchés, et la notion de taille critique, qui signifie la dimension nécessaire pour se
confronter avec des fournisseurs de plus en plus internationaux, voire mondiaux; c’est
une notion importante et qui aura un grand succès dans les années suivantes, mais qui a
assumé aussi une autre signification plutôt interne à l’entreprise comme nous avons
décrit précédemment.
Pellegrini (1994), insère le développement international dans la générale stratégie de
croissance des entreprises en utilisant la célèbre matrice d’Ansoff adaptée à la
distribution. Alexander (1997), introduit dans la recherche une analyse sur les
différences entre le secteur alimentaire et celui non alimentaire, aussi bien que sur
l’internationalisation des différentes formules. Les contributions les plus importantes de
ce travail d’Alexander sont l’introduction de la stratégie de localisation des magasins et
la possibilité d’exporter des formules innovantes d’un marché développé sur d’autres
marchés en phase de maturité; plusieurs exemples semblent démontrer que les
spécificités nationales, créées pendant une longue période, sont très importantes sur les
marchés les plus développés, tandis que dans les pays qui ont un certain décalage il
semble plus facile de surmonter les caractéristiques de la distribution nationale.
Dans des années récentes, plusieurs auteurs ont cherché de réaliser des synthèses des
différents travaux sur l’internationalisation de la distribution pour créer des modèles
capables d’intégrer toutes les variables fondamentales de la stratégie internationale pour
les entreprises de la distribution. Les contributions les plus importantes de ces travaux
nous apparaissent:
• La culture et l’apprentissage international, même au niveau des entreprises qui
gèrent un portefeuille d’activités différentes (Helfferich, Hinfelaar et Kasper, 1997);
• L’application de la courbe d’expérience au niveau international avec un modèle
dynamique basé sur les théories comportementalistes (Vida et Fairhurst, 1998);
• L’introduction de l’attitude envers le risque pour la construction d’un modèle
normatif pour les entreprises américaines qui combine le paradigme éclectique de
Dunning avec les stratégies définies par Salmon et Tordjman (Sternquist, 1997).
La culture est certainement un élément-clé pour la distribution parce que les entreprises
de distribution doivent répondre aux besoins et aux attentes des consommateur s sur
chaque marché, il est donc très important de considérer cet aspect comme l’un des
éléments majeurs pour l’internationalisation de la distribution.
Les résultats des expériences internationales sont certainement, eux-aussi, un élément
majeur à considérer pour l’élaboration et la mise à jour d’une stratégie internationale,
comme plusieurs exemples nous confirment. En même temps, l’apprentissage
international gagné par une longue expérience peut donner un avantage fondamental
face aux concurrents.
Dans une période récente plusieurs auteurs se sont penché sur les échecs à
l’international de quelques grandes entreprises de distribution pour chercher à les
expliquer de l’intérieur de l’entreprise (Burt et alii 2002, Bianchi et Arnold 2004) ou
pour essayer de modéliser les différentes raisons externes et internes qui peuvent
motiver la sortie d’un marché étranger (Burt, Dawson et Sparks 2003).
Une autre piste de réflexion qui rencontre un intérêt croissant est la possibilité de
transférer au niveau international l’image de l’enseigne (Tordjman 1988, Dupuis 1991,
7
Burt et Carralero-Encinas 2000, Giraldi, Spinelli et Merlo 2003) en sachant que l’image
et le positionnement représentent souvent un avantage compétitif important sur le
marché domestique.
L’attitude envers le risque est aussi une partie fondamentale de l’orientation générale de
l’entreprise, ce qui peut réellement faire la différence parmi des entreprises qui se
trouvent dans la même situation de départ.
La réflexion stratégique sur les modèles d’internationalisation de la distribution
intéresse de plus en plus le secteur du conseil, outre celui de l’Académie. McKinsey a
proposé il y a quelques années un modèle basé sur un « cercle vertueux » qui se
compose de trois phases : l’accès au marché, l’acquisition de la taille critique, mais
surtout l’apprentissage de l’expertise internationale (Incandela, McLaughlin, Smith,
1999). L’approche internationale proposée trouve ses points fort d’un côté dans la
capacité des entreprises à trouver des alliés dans leur développement international et à
gérer de manière efficace ces collaborations, de l’autre dans leur capacité à investir sur
des actifs intangibles, mais très difficiles à copier par les concurrents, comme la marque,
la réputation, les technologies et les outils de gestion. McKinsey utilise aussi la
capitalisation des différentes entreprises comme un outil pour évaluer leur capacité à
gagner des avantages compétitifs sur les concurrents de la même catégorie ; à travers
cette analyse, ils définissent quatre typologies de distributeurs internationaux : les
leaders nationaux sans aucune présence internationale (incumbents), les intégrateurs
(integrators), les experts, les hors-catégories (superleaguers).
Dans notre thèse (Pederzoli 2002), à partir des travaux académiques et managériaux
précédents, nous avons construit et testé un modèle pour l’internationalisation des
entreprises de distribution qui est basé sur 20 variables ; pour la construction et la
validation du modèle, nous avons utilisé des sources documentaires aussi bien que
l’apport donné par des experts internationaux de la distribution provenant du monde
académique. Le modèle qui sortait de notre travail peut être schématisé de la façon
suivante :
8
Tab. 1 Un modèle pour l’internationalisation des firmes de distribution
FORMULE
économies
externes
CONTRÔLE DU
CANAL
fort
STRATÉGIE
MARKETING
POSITIONNE
MENT
globale
global
CONCESSION/
LICENCE
FRANCHISE
peu importante
peu importante
COÛTS DE
AVANTAGES DE
TRANSACTION
LA FIRME
peu important
très important
ORIENTAT.
GÉNÉRALE
TEMPS
offénsive
expérience
acquise
ORGANISATION
CONCURRENCE
centralisée
élevée
ADAPTATION
DE LA
FORMULE
MARCHÉS
VISÉS
GESTIONE DES
R.H.
distance
culturelle
management
national
ACQUISITION
DEVELOPT
DIRECT
standardisation
JOINTVENTURE
moyenne
importance
importance
élevée
importance très
élevée
CONCURR.
.
OLIGOPOL
peu important
RESSOURCES
FINANCIÈRES
élevées
A partir des analyses effectuées et des modèles étudiés ou élaborés, nous allons
maintenant vé rifier si les derniers mouvements internationaux des principales
entreprises confirment les variables stratégiques déjà mises en place dans la décennie
précédente ou si nous assistons à des changements importants, voire des
bouleversements, des axes stratégiques suivis jusque là.
2. Les comportements les plus récents des entreprises internationales
En analysant les stratégies et les mouvements internationaux de ce début de siècle, il
nous semble pouvoir schématiser quatre tendances fondamentales qui se différencient
par rapport aux périodes précédentes : la modification de la notion de taille critique, le
développement multi- format et multi-enseigne, l’apparition d’une orientation
géocentrique, la flexibilité des stratégies d’entrée.
2.1 Pendant la première partie du XXIe siècle, l’un des moteurs fondamentaux de la
croissance internationale n’a pas diminué son importance dans la stratégie des
entreprises : la recherche de la taille critique . Toutes les principales entreprises ont
continué leur développeme nt international aussi bien à travers la croissance organique
que par acquisition. Cette tendance nous semble toutefois profondément modifiée par
9
rapport à la décennie précédente parce que les effets de taille au niveau global sont mis
en discussion et le nouveau mot d’ordre semble la recherche de la taille économique
suffisante sur chaque marché. Plusieurs exemples peuvent conforter cette réflexion :
- La crise internationale de Royal Ahold, avec un procès de restructuration qui a
déjà entraîné l’abandon des marchés de l’Amérique Latine et de l’Asie. On
connaît bien que la crise de l’entreprise hollandaise a été causée par les
irrégularités comptables découvertes dans une filiale américaine, mais cette
découverte et la chute de la valeur boursière qui en a suivi n’ont fait que mettre
en évidence que l’entreprise avait atteint un niveau de dette insupportable et que
trop de ses activités internationales n’étaient pas rentables. La crise d’Ahold a
mis en discussion un modèle de croissance internationale trop rapide et coûteux,
mais aussi mal maîtrisé parce que les synergies souhaitées n’ont jamais vraiment
fonctionnées entre les différents pays et même à l’intérieur du marché le plus
important, les Etats-Unis, où les différents enseignes possédées travaillaient,
elles-aussi, de manière non coordonnée.
- Le processus de concentration de Carrefour sur le marché européen, qui
représente plus de 85% de son chiffre d’affaires globale en 2003, semble
confirmer que l’internationalisation dispersée n’est plus une stratégie viable. On
peut coupler ce constat par la volonté affirmée par le management de l’entreprise
d’occuper toujours une position de leader dans les marchés sur lesquels
l’entreprise est présente, ou bien de pouvoir atteindre cet objectif dans le court
terme. Fait certainement partie de cette stratégie l’abandon du Chili à la fin 2003
parce que dans le pays andin le numéro deux mondial stagnait depuis longtemps
et n’avait pas des réelles perspectives de croissance à court terme pour rejoindre
une position de leader. Par contre, toutes les opérations menées en Europe, de
l’achat du groupe belge GB au contrat de franchise passé avec Norgesgruppen
en Norvège, au développement direct en Grèce et Turquie confirment cette
volonté de Carrefour d’occuper une position parmi les deux/trois principaux
opérateurs sur chaque marché abordé. L’autre grand axe de développement du
Groupe au niveau mondial est la Chine, pays dans lequel le géant français est en
train d’exporter toutes ses formules modernes, comme on verra ultérieurement,
tandis que Carrefour semble non intéressé par le marché russe, pourtant cible
privilégiée pour un certain nombre de ses concurrents, dont Auchan.
- La stratégie de Kingfisher répond à la même logique parce que le plus grand
conglomérat non alimentaire a abandonné sa politique et est arrivé jusqu’à la
séparation de ses opérations dans le bricolage de celle dans l’électroménager. En
même temps le groupe britannique a cédé les activités non rentables ou dans les
pays dans lesquels il occupait une position faible, comme Réno Dépôt au
Canada, Pro Markt en Allemagne, Nomi en Pologne, aussi bien que les magasins
Castorama en Allemagne. Il semble donc évident que les synergies
internationales souhaitées par la création d’un grand conglomérat n’ont pas
réussi, au moins dans la mesure attendue, mais que dans le secteur du bricolage
non plus, les économies obtenues sur les marchés les plus importants ne
justifient pas une présence beaucoup plus faible dans d’autres pays.
- Le dernier exemple des effets de taille est représentée par les difficultés de Wal
Mart en Allemagne. Le géant américain, après quatre ans d’efforts, est obligé
d’essuyer encore des pertes importantes, qu’on estime autours de 100 millions
10
d’Euros. 1 Il est évident que la dimension de l’entreprise au niveau global n’est
pas capable de lui assurer les économies indispensables sur un marché hyperconcurrentiel comme celui de l’Allemagne, surtout parce que la dimension du
leader mondial sur ce marché est trop limitée par rapport à ses principaux
concurrents. Cette considération peut être confirmée par le succès des opérations
de sa filiale britannique Asda, qui continue d’augmenter sa part de marché dans
le pays et qui présente des résultats fort positifs, mais qui occupait déjà la
troisième position sur son marché avant le rachat de la part de Wal Mart.
La notion de taille critique semble donc mieux se préciser et on abandonne
l’optimisme parfois excessif des années ’90. Le débat autour de la notion de taille
critique dans la distribution date depuis plusieurs années, mais les mouvements
récents des entreprises de distribution semble confirmer la préconisation de Filser
(2004) selon laquelle « dans le contexte de la stratégie de la firme de distribution ….
la taille critique est plutôt définie par la part de marché relative d’un distributeur vis
à vis de ses concurrents ».
Il faut, à notre avis, considérer deux aspects dans les effets de taille : d’un côté, il y a
les économies d’échelle, de l’autre les économies de dimension. Les économies
d’échelle ne sont certainement pas aussi importantes dans la distribution que dans
l’industrie parce qu’il y a des plus en plus de réglementations dans tous les pays qui
concernent les relations industrie-distribution ; cet aspect de l’avantage lié à la taille
de l’entreprise est donc assez limité, mais il ne faut pas oublier non plus les
économies d’échelle dans le domaine de la logistique ou de la communication que
les entreprises qui possèdent un réseau de magasin très dense peuvent exploiter.
A notre avis, il faut aussi considérer les économies d’échelle que les entreprises les
plus importantes peuvent obtenir dans le domaine de la création et de la production
des marques de distribution. Dans ce domaine, la dimension des économies
possibles se rapproche beaucoup de celui de l’industrie, surtout si les marques
propres peuvent être vendues dans plusieurs pays, voire dans tous les pays dans
lesquels l’entreprise est présente. Il est donc évident que, au niveau international, les
économies d’échelle sont d’autant plus importantes que la part des marques propres
sur les ventes totales est élevée. Cette considération introduit une différenciation
importante entre deux types d’entreprises de distribution : d’un côté, les entreprises
de la grande distribution et un certain no mbre de grandes surfaces spécialisées, qui
sont obligé de changer leurs fournisseurs et leurs assortiments d’un pays à l’autre et
qui donc n’arrivent pas à dégager des économies d’échelle importantes en dehors de
chaque pays ; de l’autre côté, les entreprises qui offrent une grande majorité de
marques propres, comme les chaînes spécialisées, qui sont capables de garder le
même assortiment partout dans le monde et qui peuvent donc exploiter des
économies d’échelle importantes au niveau global.
La deuxième source d’effets de tailles sont les économies de dimension et dans cette
catégorie les plus importantes nous apparaissent les économies liées à l’utilisation
de la technologie. La distribution est en train de devenir un secteur qui exploite de
plus en plus de technologies avancées qui permettent souvent de gagner des
avantages importants face aux concurrents moins performants dans le domaine de la
1
La Lettre de la distribution internationale, Mai 2004
11
gestion des stocks, de la définition des assortiments, de la gestion de l’espace dans
les magasins, des relations avec les fournisseurs. Les coûts de ces technologies sont
élevés et seulement les entreprises qui réalisent un certain niveau de chiffre d’affaire
et de bénéfice peuvent les développer ou les utiliser. La notion de taille critique
représente donc dans ce cas la barrière entre les entreprises avancées et les autres,
mais ces technologies permettent aussi d’augmenter la différence entre les
entreprises les plus performantes et les autres, ce qui peut donc élever le niveau des
barrières entre les deux catégories au fil du temps.
Dans ce cas, le chiffre d’affaires et surtout le cash flow et le bénéfice représentent
donc un atout pour accéder et exploiter des technologies des plus en plus avancées et
qui améliorent la performance ; la recherche de la croissance au niveau international
répond donc à cette stratégie, mais cela n’empêche que les entreprises doivent être
rentables et il faut donc bien évaluer les opérations sur tous les marchés.
Une deuxième conséquence qu’on peut observer à partir des mouvements des
entreprises à la recherche de la taille critique on pourrait l’appeler « back to basic » ;
après des années de croissance tous azimuts et caractérisées par l’importance accrue de
la finance, on assiste au retour de la gestion et à l’importance des résultats, non
seulement des taux de croissance du chiffre d’affaires. Les exemples déjà cités de Ahold
et Kingfisher sont une confirmation importante de cette nouvelle orientation, mais on
peut souligner que Carrefour s’est fortement recentré sur sa gestion, en vendant aussi
une partie des ses activités non stratégiques comme les magasins d’optique et les
galeries commerciales pour réduire son endettement.
Faudra-t- il inscrire dans cette ligne stratégique le groupe Inditex aussi ? La question se
pose car le groupe a obtenu pendant 2003 pour la première fois des résultats assez
décevants ; ce n’est pas la variation du chiffre d’affaires qui ne satisfait pas, bien au
contraire, mais c’est la marge qui est négative pour la première fois depuis plusieurs
années. Les explications peuvent être multiples et certainement la dévaluation du dollar
américain a beaucoup contribuée à cette sous performance, mais son principal
concurrent, H&M, affiche des résultats très positifs, on peut donc se questionner si
l’expansion internationale du groupe n’est pas trop rapide ou trop dispersée, étant donné
que dans certains pays le groupe n’exploite que très peu de magasins. Le Groupe ne
donne pas des chiffres sur ses résultats dans les différents pays, mais il serait très
intéressant de pouvoir analyser ces chiffres pour comprendre si même Inditex doit
réviser sa stratégie internationale dans le sens de la recherche des économies par pays et
non seulement au niveau global.
Les opérations internationales les plus récents des principales entreprises semblent
confirmer la première partie de notre modèle, étant donné que les mouvements
internationaux dispersés semblent avoir été abandonnés par les principales entreprises,
qui préfèrent désormais des opérations que peuvent donner la dimension critique pour
chaque pays, ou zone géographique homogène, en très peu de temps. Pour gagner cette
dimension économique, les entreprises se basent de plus en plus sur une organisation
centralisée, des formules fortes et bien maîtrisées et, souvent, une centralisation des
achats et de la relation avec les fournisseurs pour contrôler le circuit de distribution.
En même temps, ces entreprises standardisent leurs formules et adoptent une stratégie
marketing et un positionnement globaux pour exploiter le maximum d’économies
possibles au niveau international (voire le développement des marques de distribution
12
dans tous les pays), mais elles sont très attentives aux ressources financières dégagées
pour financer leur développement et l’amélioration de leur performance sur tous les
marchés.
2.2 La deuxième tendance qui émerge dans les opérations internationales récentes est le
développement multi-format et multi-enseigne . Il s’agit d’une stratégie relativement
nouvelle, mais qui est en train de s’accentuer dans les années plus récentes, sans
distinction entre les différents niveaux de développement des marchés visés. Les
exemples de cette tendance sont nombreux, on peut donc chercher à le schématiser en
prenant en considération les deux secteurs, alimentaire e non alimentaire.
Dans l’alimentaire, quelques exemples très intéressants sont ceux de Wal Mart,
Carrefour, Casino, Tesco e Metro.
Wal Mart a concentré depuis quelques années sa croissance internationale sur la formule
du supercenter, mais il vient d’annoncer l’ouverture de plusieurs warehouse club, l’une
des formules qui ont le plus contribué à son succès sur le marché domestique, au
Canada ; plusieurs Sam’s Club sont aussi présent en Asie et en Amérique du sud. Le
numéro un mondial est aussi entré sur le marché japonais à travers une prise de
participation dans Seiyu, une entreprise spécialisée dans la gestion de la formule du
supermarché. Wal Mart a apporté au réseau Seiyu son savoir- faire en matière de gestion
et a aidé l’entreprise dans l’ouverture du premier hypermarché de 8.000 mètres carrés,
qui s’est réalisée en avril 2004.
Carrefour a ouvert pendant le mois de novembre 2003 ses premiers discounts Dia en
Chine, où il prévoit de mettre en place un réseau de 400 magasins dans 5 à 6 ans ; en
avril 2004 on a assisté aussi au débarquement en Chine des supermarchés Champion,
ainsi toutes les formules du Groupe, hors proximité, sont présentes dans le pays. Le
Groupe a annoncé sa volonté d’utiliser l’expérience chinoise pour développer son
réseau de supermarchés et de discounts dans d’autres pays d’Asie.
Le Groupe Casino ha exporté en Pologne non seulement son enseigne d’hypermarché
Géant, ma aussi celle de discount, Leader Price, et compte déjà une soixantaine de
magasins discount dans ce pays ex-communiste. Des magasins Leader Price sont aussi
présent en Argentine et en Thaïlande, dans ce cas à côté des autres formules qui
affichent des enseignes locales que le Groupe a rachetées ou développé dans ce pays.
Le leader britannique Tesco, spécialiste des superstores dans son pays, développe
surtout des hypermarchés à l’international, mais n’a pas hésité à racheter une chaîne de
convenience store en 2003 et une petite chaîne de supermarché en 2004 au Japon, avec
une stratégie très différente de celle de ses principaux concurrents internationaux qui
cherchent à pénétrer le pays du soleil levant à travers des grandes surfaces. Il ne faut pas
oublier non plus que l’entreprise a annoncé pour 2004 et 2005 l’ouverture de plusieurs
supermarché de taille moyenne en Pologne, pays dans lequel elle est présente avec 38
hypermarchés.
Le leader allemand Metro, qui d’habitude débarque sur les nouveaux marchés avec la
formule du Cash & Carry, exporte aussi ses hypermarchés en Turquie et en Pologne,
tandis que le management déclare de n’avoir aucune intention de se lancer dans le
secteur du détail en Russie ou en Chine, où la présence des C&C est plutôt importante.
Dans le secteur non alimentaire, quelques exemples intéressants sont le groupe espagnol
Inditex, le groupe italien Miroglio et le groupe français PPR.
13
Le Groupe Inditex est en train d’exporter non seulement son enseigne-phare, Zara, ma
plusieurs autres qui ont une cible différente : Zara est actuellement présente dans 48
pays, Massimo Dutti dans 24, Pull & Bear dans 17 et la bien plus récente Berska dans
13. La toute dernière- née, Zara Home, tout de suite après sa première ouverture en
Espagne, s’est implantée avec un corner dans le nouveau mégastore Zara de Londres,
mais en juillet 2004 elle est déjà installée dans 4 pays différents. Le groupe textile
italien Vestebene – Miroglio suit une stratégie semblable parce qu’il a décidé d’exporter
progressivement non seulement son enseigne la plus connue, Motivi, mais aussi les
autres qui ont été développées entre temps, Elena Miro’, Caractère et Oltre. La présence
internationale du Groupe est donc devenue de plus en plus importante et s’est diffusée
de l’Europe en Amérique Latine, au Moyen Orient.
PPR, premier groupe européen dans le détail non alimentaire, exporte ses enseignes
spécialisées en même temps sur plusieurs marchés, tels que l’Espagne où sont déjà
présente La Redoute, Conforama et Fnac, et l’Italie qui voit la présence de Fnac et de
Emmezeta, la chaîne qui ressemble à Conforama et que le groupe a achetée il y a
quelques années.
Cette tendance au développement multi-enseigne s’explique par deux types d’avantages
au niveau international : d’un côté, il s’agit de la construction et de l’exploitation de la
taille critique au niveau de chaque pays que nous avons décrit précédemment, de l’autre
il s’agit en même temps d’exploiter la courbe d’expérience internationale de
l’entreprise. En ce qui concerne le premier aspect, la notion de taille critique signifie
aussi bien les volumes d’achat pour gagner un pouvoir de négociation face aux
fournisseurs que l’optimisation des coûts et structures centrales crées dans le pays, de la
logistique aux fonctions marketing, à la gestion des ressources humaines. Les
avancements technologiques appliqués dans ce secteur, permettent de plus en plus
souvent de mettre en place des plates- formes logistiques uniques qui servent les
différents formats, il est donc évident quels peuvent être les avantages en terme de coûts
de la fonction logistique si l’on peut ajouter à un réseau d’hypermarché un deuxième de
hard discount et éventuellement un troisième de supermarché sans devoir, bien
évidemment, ajouter d’autres entrepôts ou plates- formes d’éclatement.
L’exemple du Groupe Inditex à ce propos est encore plus frappant, étant donné que
toute la logistique des enseignes du groupe, y compris les produits de vaisselle de Zara
Home, se concentre sur les deux immenses entrepôts de La Coruna et de Barcelone,
toujours en Espagne.
En ce qui concerne la courbe d’expérience, il semble apparaître que les principales
entreprises cherchent à exploiter l’apprentissage international qu’elles ont acquis à
travers le développement d’une enseigne pour l’appliquer aux autres, en raccourcissant
ainsi de manière significative le rythme de croissance des nouvelles enseignes.
Cette évolution signifie pour les entreprises la mise en place d’une fonction
développement international au niveau « corporate » et non seulement dans chaque
enseigne, bien que les autres fonctions marketing soient normalement séparées pour
préserver et développer l’identité de chaque enseigne.
En ce qui concerne le développement dans un pays, la stratégie normalement suivie est
celle de confier à la direction de la première enseigne qui s’est implantée la
responsabilité de suivre aussi le développement des autres enseignes jusqu’au moment
où la taille des nouvelles enseignes ne permet la création d’une direction autonome. De
cette manière on exploite la courbe d’expérience du management qui est déjà dans le
14
pays pour accélérer l’implantation des autres enseignes du groupe et, en même temps,
on réduit le coût d’entrée des nouvelles enseignes qui peuvent créer leur structure de
management au fur et à mesure de leur croissance dans le pays.
2.3 Un troisième élément de la stratégie internationale récente des principales
entreprises semble l’apparition d’une orientation beaucoup plus géocentrique que
dans les années précédentes. Pendant une grande partie de leur histoire internationale,
toutes les entreprises les plus importantes ont utilisé leurs marchés domestiques comme
seule source de recherche et d’innovation, tandis que le début de ce nouveau millénaire
montre une attitude beaucoup plus ouverte dans le domaine de l’apprentissage
international. Deux exemples nous apparaissent particulièrement importants pour
illustrer cette démarche, d’un côté l’expérience de Wal Mart et de sa marque de
vêtements George et de l’autre côté la création et diffusion de la MDD N° 1 chez
Carrefour. En démarrant par ce dernier, il est bien connu que la marque de premiers prix
N° 1 a été crée par Carrefour Espagne pour répondre à l’offensive de plus en plus lourde
des hard discounts ; le succès de ce lancement a été tel que les produits N° 1 ont ensuite
été introduits dans les hypermarchés du groupe en France, en Italie, en Pologne et il y a
aussi un projet pour les insérer dans les assortiments de tous les magasins du groupe, y
compris les supermarchés.
Quant à Wal Mart, le géant de Bentonville a trouvé la marque de vêtements George
dans l’escarcelle de Asda à l’occasion de l’achat de la chaîne britannique. Dans ce cas
aussi, l’originalité et le succès de la marque ont amené Wal Mart à expérimenter
pendant deux ans son introduction dans l’assortiment d’un certain nombre de ses
magasins en Allemagne, Corée, Mexique, Japon et Etats-Unis, avant d’arriver à la
décision, annoncée en mai 2004, de mettre en place une division George Global au
niveau du siège. 2 La nouvelle division sera en charge de la conception, production et
distribution des produits à la marque George pour toutes les enseignes du groupe.
En septembre 2003, Wal Mart a crée deux magasins à l’enseigne George en Grande
Bretagne avec l’objectif d’expérimenter une nouvelle formule commerciale en
concurrence avec d’autres enseignes d’habillement du pays. Pour l’instant on n’a pas de
nouvelles sur les résultats de cette expérimentation et sur la possibilité de son extension
en dehors de la Grande Bretagne, mais il est évident que l’apprentissage international de
Wal Mart continue.
Le temps apparaît donc comme une variable fondamentale pour une stratégie
internationale réussie, surtout quand les entreprises sont capables d’exploiter cette
variable pour apprendre au niveau international et pour diffuser les pratiques les plus
performantes dans tout leur réseau.
2.4 Le quatrième élément important de la stratégie internationale que nous avons trouvé
concerne la flexibilité des stratégies d’entrée sur les nouveaux marchés.
Pendant les deux décennies précédentes, on a souvent constaté des stratégies d’entrée
très coûteuses, avec l’objectif de se garantir un contrôle fort des opérations
internationales menées, tandis que plusieurs développements récents semblent s’orienter
vers une direction presque opposée. Si l’on considère les mouvements internationaux de
Carrefour dans les années de 2000 à 2003, on peut remarquer que son entrée en Suisse
2
M+M Planet Retail, 25/05/2004
15
s’est passée à travers un joint-venture avec l’entreprise de la famille Maus, tandis que sa
pénétration de la Norvège s’est réalisée par un contrat de franchise avec Norgesgruppen.
En même temps, la présence de l’enseigne en Roumanie et confiée à un franchisé
historique, la société Arlaud. Il est vrai que, pendant la même période, Carrefour est
débarqué au Japon en solo et que la situation de l’Argentine l’a obligé de racheter
complètement la société dont il détenait une participation, mais il est remarquable
d’assister à ce changement de stratégie de la part d’une des entreprises les plus intégrées
au niveau international.
Wal Mart, de son côté, ne semble pas moins flexible, vu son choix de pénétrer le
marché japonais à travers le rachat de 36% des actions de Seiyu, bien qu’il existe un
accord pour monter au-dessus de 60% dans quelques années ; jamais dans les opérations
internationales de Wal Mart on avait assisté à son entrée sur un marché sans prise de
contrôle totale de sa filiale étrangère.
Tesco, après l’achat en 2003 de la chaîne japonaise C-Two Network et de la chaîne
turque Kipa, en avril 2004 a accepté de devenir le sponsor de la firme japonaise Frec’s,
qui a entamé un programme de redressement à cause de sa mauvaise situation
financière ; le sponsoring représente le premier pas pour racheter la firme japonaise,
mais il s’agit quand même d’une nouveauté absolue pour le leader britannique.
Un quatrième exemple est Leclerc, qui, pour son entrée sur le marché italien, a choisi le
contrat de joint-venture avec la coopérative de détaillants Conad, mais en laissant 60%
des droits de vote de la nouvelle société au partenaire italien. Tous les hypermarchés de
la nouvelle société afficheront l’enseigne Leclerc, qui apporte son savoir- faire dans la
conception et gestion de cette formule, mais le management sera italien.
Zara, dans son développement international a toujours privilégié la croissance interne,
sauf pour les pays les plus éloignés au plan culturel ou avec un potentiel faible, mais
pour débarquer sur le marché italien a conclu un joint venture avec le Groupe Percassi,
présent dans l’immobilier commercial, mais en même temps l’un des plus importants
franchisés de Benetton en Italie.
D’autres entreprises qui utilisaient déjà des stratégies d’entrée à coût réduit, comme la
franchise ou les accords de licence, continuent sur cette route, voire sont en train de
l’intensifier en utilisant ces types de contrat même dans des zones proches sur le plan
géographique et culturel.
Dans ce domaine, on assiste donc à quelques changements importants par rapport aux
tendances précédentes, mais derrière ces changements on pourrait avoir aussi bien des
raisons stratégiques que d’autres d’ordre tactique. Sur le plan stratégique, il est vrai
qu’il est de plus en plus difficile de pénétrer de nouveaux marchés, surtout quand ils
sont très concentrés, comme c’est le cas pour les pays scandinaves, ou très différents au
plan culturel, comme c’est le cas du Japon ; voilà ce qui pourrait donc expliquer des
stratégies d’entrée adaptées à la situation du marché.
Du côté tactique, on peut souligner l’incertitude économique générale, la morosité de la
consommation dans plusieurs pays et presque dans tous les secteurs, quelques risques
pays qui existent encore dans certaines zones ; tout cela semble justifier pleinement la
décision d’adopter des stratégies d’entrée peu risquées, au moins jusque quand la
situation économique internationale ne montre des signes d’amélioration substantie ls.
16
Conclusions et pistes de réflexion ouvertes
Comme on a vu dans l’analyse empirique réalisée, ils apparaissent des changements
importants dans les stratégies internationales des entreprises de distribution au début de
ce nouveau millénaire ; il ne s’agit pas de véritables renversements par rapport au
modèle stratégique que nous avions élaboré il y a seulement trois ans à partir des
expériences des années ‘90, mais il ne s’agit pas non plus de modifications négligeables.
Les entreprises protagonistes de ces changements appartiennent surtout au secteur
alimentaire, ce qui ne représente pas une surprise si l’on considère le niveau de
concurrence que les principales entreprises se livrent désormais au niveau global ; on
voit apparaître, toutefois, des tendances semblables dans le secteur non alimentaire,
surtout quand le niveau de concentration et la concurrence internationale s’intensifient.
Certaines tendances, comme celles liées aux stratégies d’entrée, semblent posséder une
composante tactique importante, et on pourra donc probablement assister à d’autres
changements quand la situation économique et sociale sera plus stable et définie ;
d’autres tendances, comme la recherche de la taille critique dans chaque marché,
apparaissent beaucoup plus profondes et vont devenir donc avec toute probabilité une
composante fondamentale de la stratégie pour toutes les entreprises dans les prochaines
années.
Les modèle issu de notre thèse n’est pas remis en question par cette analyse sur les
dernières années, il en est même renforcé dans son coté préscriptif sur la nécessité de
mettre en place une stratégie vraiment globale pour réussir son processus
d’internationalisation. Les modifications les plus importantes concernent les stratégies
d’entrée et les vecteurs de crois sance à l’international, mais, comme nous avons
souligné plus haut, c’est le cadre général qui a changé et qui se présente beaucoup plus
incertain dans cette dernière période que dans les onze ans de notre recherche de thèse.
Les pistes de réflexion ouvertes sont multiples :
• la première concerne l’évaluation des attitudes envers le risque et les moyens utilisés
pour réduire ce type de risque, surtout en période d’incertitude. La seule réponse
dans notre analyse sont les stratégies d’entrée et les vecteurs de croissance, mais il
serait très intéressant de comprendre s’il y a des stratégies défensives dans le
domaine des assortiments, de la politique de prix ou dans d’autres variables
marketing importantes que nous n’avons pas pu analyser à partir des sources
documentaires utilisées.
• La deuxième piste de réflexion concerne le risque de réduction des différences entre
les différentes formules dans une stratégie multi-enseigne ; il ne s’agit pas, dans ce
cas, d’un risque sur le marché national, où les enseignes se sont affirmées et où les
consommateurs les connaissent en profondeur, mais d’un risque qui pourrait exister
sur les marchés étrangers, surtout s’ils se trouvent à un faible niveau de
développement et donc les consommateurs ne connaissent pas les différentes
formules. Le choix stratégique des firmes d’exporter les différentes formules mais
en réalisant aussi une forte centralisation des achats et d’autres aspects marketing
pour gagner en terme d’économies d’échelle et de dimension, contient le risque que
les assortiments et les marques se rassemblent dans les différentes formules, par
conséquent en donnant aux consommateurs une image non bien définie.
• La troisième piste concerne les stratégies des entreprises non occidentales : après
des années de quasi totale absence de la scène internationale, les entreprises des
pays d’Orient s’orientent de plus en plus vers l’international, comme c’est le cas de
17
•
Ito Yokado qui a débarqué en Chine avec la formule de l’hypermarché mais qui
annonce aussi de vouloir exporter ses convenience store « seven/eleven » dans
plusieurs pays. La question se pose de savoir si les entreprises orientales sont en
train de suivre les mêmes stratégies que celles occidentales ou si les routes sont
différentes, suite aussi à la culture organisationnelle de ces entreprises.
Une quatrième piste concerne l’effet de la propriété des entreprises sur leur stratégie
internationale : dans la distribution on a encore un certain nombre d’entreprises qui
ne sont pas cotés en Bourse et qui ne sont donc pas obligées de publier des
informations tous les trois mois pour la communauté financière. Est-ce que la
stratégie, même internationale, de ces entreprises est différente de celle des
entreprises cotées ? Selon un certain nombre d’experts, Marks & Spencer n’aurait
pas abandonné toutes ses activités internationales en Europe si l’entreprise n’était
pas cotée. On peut supposer des fortes pressions de la communauté financière
derrière la décision de Sainsbury de céder ses activités américaines pour se recentrer
sur son marché britannique, où elle est en déclin depuis quelques années. Il y a
certainement des pressions très fortes sur Carrefour aussi pour que l’entreprise
améliore ses résultats à partir de la France ; quels seront les effets de ces pressions
sur la stratégie internationale de l’enseigne ? Il s’agit dans ce cas d’étudier quels
sont les effets sur les plans stratégiques des entreprises cotées déterminés par
l’obligation de donner des informations à la communauté financière avec des délais
très courts, l’objectif étant de vérifier comment les principales entreprises
réussissent l’arbitrage entre le très court terme et le moyen/long terme nécessaire
pour un plan stratégique, surtout au niveau international.
18
References bibliographiques
Alexander N.(1995), Expansion within the Single European Market: a motivational
structure, The International Review of Retail, Distribution and Consumer Research,
vol.5 :4 , pp.472-487
Alexander N. (1997), International Retailing, Oxford, Blackwell Business
Alexander N. et Quinn B. (2002), International retail divestment, International
Journal of Retail and Distribution Management, vol. 30(2), pp. 112-125
Alexander N. et Myers H. (2000), The retail internationalisation process, International
Marketing Review, vol.17 n°4/5, pp. 334-353
Bianchi Costanza C. et Arnold Stephen J. (2004), “An Institutional Perspective on
Retail Internationalisation Success: Home Depot in Chile”, International Review of
Retail, Distribution and Consumer Research, vol. 14, pp.149-169
Burt Steve et Carralero -Encinas Jose (2000), “The role of store image in retail
internationalisation”, International Marketing Review, Vol. 17, pp. 433-453
Burt Steve, Dawson John et Sparks Leigh (2003), “Failure in international retailing:
research propositions ”, International Review of Retail, Distribution and Consumer
Research, vol. 13 , pp.355-373
Burt Steve, Mellahi K. Jackson T.P. et Sparks Leigh (2002), “Internationalisation
and retail failure: issues from the case of Marks and Spencer”, International Review of
Retail, Distribution and Consumer Research, vol. 12, pp.191 – 219
Colla E. (1996), Les stratégies d’internationalisation des entreprises commerciales,
Revue Française du Marketing, n° 157/8, pp.133-159
Dawson J.(2001), Strategy and opportunism in European Retail Internationalization,
British Journal of Management, vol.12, pp. 253-266
Dupuis M (1991)., Marketing international de la distribution, Paris, Les Editions
d’Organisation,
Dupuis M. and Prime N.(1996), Internationalisation du produit magasin: le prisme
culturel, Revue Française du Marketing, n°157-158, pp.160-169
Filser Marc (2004), “La stratégie de la distribution: des interrogations managériales
aux contributions académiques”, Centre de Recherche en Marketing de Bourgogne,
Cahier de Recherche 04-01
Giraldi Janaina de Moura E., Spinelli Paula B. et Merlo Edgard M.(2003), « Retail
store image : analysis of the implications for store positioning », Revista Electronica de
Adminstraçao, vol.9
Hallsworth A.G. (1992), Retail Internationalisation: Contingency and Context,
European Journal of Marketing 26, 8-9, pp. 25-34
Hollander S.(1970), Multinational Retailing, Michigan State University
Helfferich E. Hinfelaar M. Kasper H. (1997), Towards a clear definition on
international retailing, The International Review of Retail Distribution and Consumer
Research, vol. 7:3, pp. 287-307
Incandela D. , Mc Laughlin K.L. et Smith Shi C. (1999), Retailers to the world, The
McLinsey Quarterly, n.3 pp. 84-97
Levitt T.(1983), The globalisation of markets, Harvard Business Review, pp. 92-102
19
Myers H. and Alexander N. (1996), European Food Retailers' Evaluation of Global
markets, International Journal of Retail and Distribution Management vol.24 n°6,
pp.34-42
Ohmae K.(1985), Triad Power: the coming shape of global competition, Mc Kinsey
Pederzoli D. (2002), Élaboration et Test d’un Modèle d’interprétation des Stratégies
d’internationalisation des Grandes Entreprises de Distribution des pays occidentaux,
Thèse de doctorat de l’Université de Rennes 1
Pellegrini L. (1994), Alternatives for growth and internationalisation in retailing, The
International Review of Retail, Distribution and Consumer Research,vol. 4, pp. 121-148
Porter M.E.(1985), La Strategia competitiva Analisi per le decisioni, Bologna,
Tipografia Compositori,
Porter M.E.(1987), Il Vantaggio Competitivo, Milano, Edizioni di comunità
Porter M.E.. and Takeuchi H. (1999), What went wrong in Japan, Foreign Affaires,
pp.66-82
Rugman Alan M. et Verbeke Alain (2004), “A perspective on regional and global
strategies of multinational enterprises”, Journal of International Business Studies,
vol.35, pp. 3-18
Salmon W. Tordjman A.(1989), The Internationalisation of Retailing, International
Journal of Retailing, vol.4 n°2, pp. 3-16
Sternquist B.(1997), International expansion of US retailers, International Journal of
Retail and Distribution Management, vol. 25 n°8, pp.262-268
Tordjman A. (1988), The French Hypermarket – could it be developed in the States?,
International Journal of Retail and Distribution Management, vol. 16 (4), pp. 14-16
Treadgold A.(1988), Retailing without frontiers – The emergence of transnational
retailers, Retail and Distribution Management, pp. 8-12
Treadgold A.(1991), The Emerging Internationalisation of Retailing: Present Status
and Future Challanges, Irish Marketing Review, vol. 5, pp.11-27
Vida I. Fairhurst A.(1998), International expansion of retail firms: A theoretical
approach for future investigations, Journal of Retailing and Consumer Services, vol.5
n°3, pp. 143-151
20