VARIATION PROSODIQUE DANS LES INTERROGATIVES
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VARIATION PROSODIQUE DANS LES INTERROGATIVES
VARIATION PROSODIQUE DANS LES INTERROGATIVES TOTALES DU PORTUGAIS EUROPEEN CONTINENTAL Lurdes de Castro Moutinho, Rosa Lídia Coimbra Universidade de Aveiro (Portugal) [email protected] Resumen: El proyecto AMPER, Atlas Multimedia Prosódico del Espacio Románico, tiene como objetivo principal la creación de una base de datos que contemple las diversas lenguas románicas. Esta pesquisa se da cuenta de datos parcelares relativos a la variedad del portugués europeo continental. Únicamente nos dedicaremos sobre la prosodia de enunciados interrogativos globales, producidos por 6 locutores de 6 puntos de encuesta, en un total de 54 enunciados. La estructura de frase está compuesta por un SN con núcleo proparoxítono y expansiones adjetivales en las tres acentuaciones del portugués, seguido de SV con Objeto fijo paroxítono. El análisis acústico está hecho en ambiente MatLab utilizando la metodología AMPER. Se presentarán datos relativos a F0 y aun los resultados de testes de percepción. Se verifica la existencia de variación prosódica en la modalidad interrogativa, siendo más fácilmente identificada en algunas regiones que otras. El último grupo tonal es el más importante para realizar esta identificación. Palabras clave: AMPER-POR, fonética experimental, prosodia, interrogación, testes perceptuales. Abstract: The main aim of the AMPER project, Multimedia Prosodic Atlas for Romance Languages, is to create a data base contemplating all romance languages. The present research is based on some data available for the continental European Portuguese variety. This study focuses on the prosody of global interrogative utterances produced by 6 speakers from 6 different regions, in a total of 54 utterances. The sentence structure is composed of a NP with proparoxytone nucleus and adjectival expansions presenting the 3 different lexical stress structures for Portuguese, followed by a VP with a fixed paroxytone complement. The acoustic analysis was made in MatLab using AMPER methodology. Results will be presented concerning F0 and also perception tests. It was observed that there is a prosodic variation in interrogative type sentences, more easily recognized in some regions than in others. The last tonal group is the most important for this identification. Keywords: AMPER-POR, experimental phonetics, prosody, interrogatives, perceptual tests. 1. Introduction Le but de cet article est celui de présenter quelques résultats d’une recherche réalisée dans le cadre du projet AMPER, Atlas Multimédia Prosodique de l’Espace Roman. Ce projet, dont l’objectif global est l’étude de la variation géolinguistique des langues romanes, doit observer, décrire et interpréter la variabilité interne des différents traits mélodiques qui caractérisent l’identité linguistique du locuteur à l’intérieur de chaque aire linguistique étudiée dans le même domaine linguistique. En outre, le projet se propose d’identifier des macroindices de dissemblances ou similitudes qui composent le panorama prosodique des variétés linguistiques parlées dans l’espace roman et de les comparer entre elles. Pour y aboutir, toutes les équipes des différentes universités européennes et latino-américaines disposent d’une méthodologie commune pour la constitution du corpus, l’enregistrement, l’analyse et la présentation des données. Celles-ci font partie d’une base de données multimédia globale (Contini et alii 2002 e 2003, Lai e Romano 2002, Moutinho et alii 2001a e 2001b), envisagée, dès le début du projet, par l’équipe de la coordination, de l’Université Stendhal de Grenoble1. L’étude des deux variétés du portugais – portugais européen (PE) et portugais brésilien (PB) – , désignées par AMPER-POR, est de la responsabilité du premier auteur de cet article. En ce qui concerne le PE, un total de 30 locuteurs provenant de différentes régions du Portugal continental (Minho, Trás-os-Montes et Alto-Douro, Beira Litoral, Beira Alta, Alentejo et Algarve), des archipels des Açores (île de São Miguel) et de Madeira (îles de Madeira et de Porto Santo) ont été enregistrés, analysés et déjà envoyés pour insertion dans la base de données. Pour le PB, des données de 19 informants ont été envoyées par les groupes de recherche de Amazonas, Pará, Bahia, Minas Gerais, São Paulo et Santa Catarina. A la date de cet article, outre d’autres enregistrements déjà réalisés, un total de 49 locuteurs de langue portugaise font partie de la base de données multimédia du projet AMPER. 2. Corpus et méthodologie Toutes les données recueillies et analysées de notre corpus suivent la méthodologie du projet AMPER (Contini, 2007). Pour cette étude, du corpus AMPER-POR, ont été choisis un total de 6 locuteurs hommes, âgés de 50 à 70 ans, ayant 4 ans de scolarité et originaires de 6 points d’enquête du Portugal continental: Minho, Trás-os-Montes, Beira Litoral, Beira Alta, Alentejo et Algarve (voir figure 1). Figure 1 – Régions choisies Les phrases choisies sont du type SN1 + V + SN2. Le SN1 est constitué par un noyau proparoxyton et des expansions adjectivales qui recouvrent tous les accents lexicaux du portugais. Le SN2 complément, introduit par une préposition, présente un accent fixe paroxyton. Notre corpus global prévoit aussi, en final de phrase, les trois accents lexicaux du portugais mais, comme dans cet article nous ne voulons pas faire varier l’accent en final de phrase, nous avons choisi un mot à accent fixe paroxyton, puisque qu’il s’agit de l’accent le plus fréquent dans la langue portugaise. Le choix de la variation accentuelle dans le SN 1 doit 1 Cf. http://www.u-grenoble3.fr/dialecto/AMPER/amper.htm nous permettre d’évaluer l’influence de la position de l’accent lexical dans le mouvement global de la courbe mélodique et, ensuite, sa pertinence pour la perception de la modalité. Des deux modalités étudiées – déclarative et interrogative – nous avons choisi de présenter ici des résultats pour l’interrogative totale, vu que maintes fois c’est dans cette modalité que nous avons constaté une plus grande diversité prosodique. Le corpus sur lequel se base cette étude est présenté dans le tableau 1: Codage Accent lexical AMPER pour l’adj. du SN1 oxyton bwti Phrases choisies O pássaro bisavô toca no Toneca? fwti paroxyton O pássaro pateta toca no Toneca? vwti proparoxyton O pássaro cómico toca no Toneca? Tableau 1 – Structures sélectionnées du corpus AMPER-POR Pour l’analyse, à l’aide du logiciel CoolEdit, nous avons choisi les trois meilleures répétitions de chaque phrase. L’analyse du signal acoustique des segments vocaliques a été faite sur MatLab avec des routines développées par Antonio Romano (2007). Le traitement statistique des données a été réalisé en utilisant une interface créée par Albert Rilliard2. Cette interface permet aussi des représentations graphiques des paramètres prosodiques – de F0, de durée et d'intensité –, ainsi que des fichiers TON synthétisés sur les fichiers TXT qui gardent la moyenne des 3 répétitions analysées. Ces fichiers TON seront utilisés, plus tard, pour la réalisation des tests de perception. Les résultats de l’analyse, ainsi que les tests de perception, seront présentés dans le point suivant. 3. Analyse et discussion des résultats 3.1. ANALYSE ACOUSTIQUE Sur la figure 2, nous présentons les résultats de F0 pour toutes les voyelles réalisées dans les phrases interrogatives du corpus choisi. Cette figure est constituée par trois graphiques. Chacun affiche les résultats par type d’accent pour les 6 locuteurs. Si on observe le mouvement de F0 sur le premier groupe tonal de ces énoncés – O pássaro bisavô/pateta/cómico – on peut souligner les observations suivantes : - des réalisations mélodiques assez parallèles de la part de chaque locuteur, si l’on fait abstraction des différences de registre inter-locuteurs; - la présence d’un relief mélodique sur les voyelles toniques du noyau et de l’expansion adjectivale, hormis quelques exceptions (structures bwti et fwti du locuteur de Trás-osMontes); - une proximité plus évidente pour certaines régions que pour d’autres, même si elles sont géographiquement plus éloignées, comme c’est le cas de l’Algarve (sud) qui présente des résultats plus proches de ceux de Beira Alta (nord). Des résultats analogues ont été déjà constatés pour d’autres structures dans des études réalisées pour d’autres locuteurs de ces 2 Cf. Rilliard/Lai 2007 et http://groupeaa.limsi.fr/membres:rilliard:outils_amper mêmes régions3. Ce même constat a déjà été validé par une étude postérieure de mesures automatiques de la similitude entre les tracés prosodiques4. Par contre, on observe un éloignement des caractéristiques mélodiques de certains locuteurs même si originaires de régions voisines, voire le cas des locuteurs de l’Algarve et de l’Alentejo. Observons encore une sorte de charnière opérée par le locuteur de Beira Litoral, exception faite pour le dernier groupe tonal, dont les résultats de F0 décrivent un mouvement circonflexe qui se détache de tous les autres mouvements et est caractéristique des interrogatives se terminant par ce type d’accent. Cette configuration a déjà été constatée dans d’autres études publiées antérieurement (Moutinho et al., 2011: 135). En ce qui concerne le groupe verbal, les résultats de F0 montrent: - une structure mélodique similaire, indépendamment de la structure accentuelle du SN1, du locuteur et de sa région d’origine; - une montée depuis la pré-tonique jusqu’à la tonique, avec une descente postérieure de F0 jusqu’à la dernière voyelle de l’énoncé; - un schéma mélodique final circonflexe du tonème, caractéristique toujours présente pour les finales paroxytons et proparoxytons. Ce contour n’est pas celui qui est traditionnellement décrit pour les interrogatives globales du portugais, habituellement soulignées par une montée finale (Mateus et al. 1992: 345-346), même si dans certaines études cette possibilité de variation pour l’interrogative totale a déjà été soulignée (Cruz-Ferreira, 1980; Mata/Pereira, 1992). Le contour canonique montant n’apparait dans nos études des variations prosodiques que dans les cas où les énoncés se terminent par un mot oxyton, comme c’est le cas, dans notre corpus, pour la structure «O pássaro toca no Toneca bisavÔ» (Moutinho/Rei, 2009: 66). Pour les deux autres accentuations – paroxyton, proparoxyton – le mouvement est montantdescendant, comme on peut le vérifier sur la figure 25. Accent oxyton – O pássaro bisavô toca no Toneca? “Parece-nos poder afirmar, e tendo também em conta as análises efectuadas para os outros tipos de acento, que a variação de F0 aproxima mais os dois informantes das duas áreas geográficas mais afastadas (Algarve e Beira Interior) do que os das mais próximas (Beira Litoral e Beira Interior). (...) A comparação entre Algarve e Beira Interior possui uma média inferior a 1, mostrando respostas que indicam tendencialmente uma ligeira ou mesmo nenhuma diferença; outras comparações, como as efectuadas entre Beira Interior e Beira Litoral apresentaram médias de cerca de 1.5” (Moutinho et al., 2005: 23 et 29). 4 “(...) les points 00q (Algarve) et 001 (Minho) présentent des différences importantes, tandis que les points 00q (Algarve) et 016 (Beira Alta) semblent plus proches” (Moutinho et al., 2011). 5 Les sequences numériques qui précèdent le nom de chaque région correspondent à des codes AMPER donnés à chaque point d’enquête. 3 Accent paroxyton – O pássaro pateta toca no Toneca ? Accent proparoxyton – O pássaro cómico toca no Toneca ? Figure 2 - Résultats du mouvement de F0 pour les interrogatives Afin de déterminer le rôle joué par le premier groupe tonal, nous avons étudié d’une façon plus détaillée les différents contours décrits par F0 sur le SN1 des phrases: O pássaro bisavÔ/patEta/cÓmico. En utilisant les données obtenues au cours de l’analyse acoustique, nous avons construit des graphiques sur Excel (figure 3) où l’on représente les contours mélodiques des SN1 y compris le noyau (voyelles 1 à 4) et les trois accents lexicaux de l’adjectif (voyelles 5 à 7) et ce par locuteur/région. 0012 Minho 0062 Trás-os-Montes 0132 Beira Litoral 0162 Beira Alta 00i2 Alentejo 00q2 Algarve Figure 3 - Résultats du mouvement de F0 de l’adjectif dans le premier groupe tonal Contrairement à ce que l’on a pu observer pour le deuxième groupe tonal, on constate que les courbes mélodiques décrites par F0 présentent des mouvements plus différenciés, bien que les pics tonals se manifestent presque toujours sur les voyelles toniques. Sur ce même graphique, on observe encore une grande homogénéité à l’intérieur du noyau du SN1, avec une montée vers la voyelle tonique de PÁssaro et ceci pour tous les locuteurs, excepté le locuteur6. Néanmoins, si l’on regarde de plus près les trajets des courbes mélodiques décrits par l’extension adjectivale, on voit que ceux-ci sont plus diversifiés, que ce soit intra locuteur ou interlocuteurs. Cette diversité de mouvements peut être due aux différents accents lexicaux des adjectifs, bien que plus marquée pour certains locuteurs que pour d’autres. En effet, chaque accent décrit un mouvement différent. Ainsi, sur l’oxyton bisaVÔ, on observe souvent une forme en V, comme s’il y avait un accent secondaire sur bi et un principal sur VÔ, alors que c’est l’inverse sur le paroxyton paTEta, où seul l’accent tonique ressort, en décrivant un mouvement circonflexe. En ce qui concerne le proparoxyton CÓmico, le sommet est atteint sur CÓ, suivit d’une descente sur mi et disparition de la dernière voyelle qui, dans la majorité des cas, n’est pas produite. Malgré cette diversité de configurations, les pics de F0 se manifestent toujours sur la voyelle tonique de l’adjectif. 3.2. LES TESTS DE PERCEPTION Nous appuyant sur les résultats des analyses acoustiques que nous venons de présenter, nous avons décidé de réaliser des tests de perception, afin d’avérer, d’une part, si le contenu prosodique stocké dans les fichiers TON est suffisant pour l’identification de la modalité interrogative et, d’autre part, quelle est l’importance du premier groupe tonal dans cette identification, vu que maintes fois c’est le deuxième groupe tonal, surtout les valeurs de F0, qui est reconnu comme le principal responsable de la distinction entre les modalités étudiées (Coimbra et. al 20087). Même si des études antérieures (Zerling/Moutinho, 2002: 1358; Moutinho et. al 2011: 1389) présentent le 2ème groupe tonal comme le plus grand Cette montée est apparemment absente pour le locuteur de l’Algarve (00q2), dû à la non réalisation de l’article initial dans ces phrases, néanmoins présente dans d’autres phrases de notre corpus pour ce même locuteur. 6 7 «Como aspectos a destacar deste nosso estudo, apontamos a grande importância de F0 nos dois informantes, para a distinção dos tipos declarativo e interrogativo. (…) A duração e a energia, embora contribuam, apresentam-se como parâmetros menos determinantes na distinção entre modalidades» (Coimbra et al, 2008: 290). 8 «En portugais, la courbure générale des deux schémas mélodiques est presque parallèle, mais cette fois avec une voix systématiquement plus élevée pour l'ensemble de la phrase interrogative (d'un responsable de l’identification de cette modalité, nous constatons également que, pour les deux modalités étudiées (déclarative et interrogative), les valeurs de F0 sont déjà distinctes dans le premier groupe tonal. Ce constat nous a poussées à vérifier aussi si cela est perceptif à l’oreille et quel est le rôle détenu par ce premier groupe dans cette identification. Ainsi, des tests de perception doivent répondre aux questions suivantes: - L’information prosodique contenue dans les fichiers TON est-elle suffisante pour l’identification de la modalité interrogative globale? - Quel est le rôle de chacun des deux groupes prosodiques - SN1 (N + Adj) + SV (V + SN2) dans cette reconnaissance? - Quelle est la portée du changement de l’accent lexical dans le premier groupe en ce qui concerne l’identification de la modalité? - Le nombre de réponses justes au questionnaire présenté est-il en rapport avec la provenance du locuteur? 3.2.1. Procédure pour l’élaboration et l’application des tests de perception Pour atteindre nos objectifs, nous avons procédé de la manière suivante: - utilisation des fichiers synthétisés, dans les modalités déclarative (vraie10 déclarative) et interrogative (vraie interrogative), dépourvus de contenu lexico-sémantique et obtenus à partir des données prosodiques de la moyenne des 3 répétitions des phrases analysées et stockées dans des fichiers texte; - construction de fichiers synthétisés basés sur ces fichiers texte, avec la combinaison suivante: a) le SN1 de la phrase interrogative + le SV de la phrase correspondante déclarative (fausse11 déclarative); b) le SN1 de la phrase déclarative + le SV de la phrase correspondante interrogative (fausse interrogative). De ces combinatoires résultent un total de 4 structures prosodiques par accent lexical, ce qui donne un total de 12 structures par locuteur. Chaque auditeur doit ainsi évaluer un total de 72 énoncés synthétisés, vrais ou faux, comme nous venons de l’expliciter (voir tableau 2). maximum de 5,6 demi-tons (118/164 Hz) au début, à 2,3 demi-tons (151/132 Hz) pour le reste). La distinction entre les deux phrases, au plan de la mélodie, semble tenir essentiellement à cette hauteur différente, notamment dès l'attaque initiale, ainsi qu'à la petite inversion montante sur la dernière voyelle, pour l'interrogative» (Zerling/Moutinho, 2002: 135). 9 «En las interrogativas, la trayectoria prenuclear se presenta siempre con un nivel de F 0 superior al de las asertivas, pareciendo contener información relevante para la diferenciación entre regiones e incluso entre locutores de una misma región./ Sin embargo, parece que es el último grupo tonal el gran responsable por la percepción de una interrogativa, y que es lo que detiene el pico de F 0» (Moutinho et. al 2011: 138). 10 Quand le fichier synthetisé (fichier TON) est construit sur les donnés des fichiers texte obtenues a partir de l’analyse des énoncés tel qu’ils ont été réellement produits. 11 Quand le ficheir synthetisé (fichier TON) est construit sur les donnés des fichiers texte avec le remplacement des données du SN1 par celles du SN1 de la modalité contraire. Structure Composée par SN1 SV déclarative déclarative Vraie déclarative bwta bwta bwta Vraie interrogative interrogative interrogative bwti bwti bwti interrogative déclarative Fausse déclarative bwtia bwti bwta interrogative Fausse interrogative déclarative bwtai bwta bwti Tableau 2 – Exemple des 4 combinatoires présentées pour l’accent oxyton Ces fichiers, ainsi conçus, ont été écoutés et jugés par 21 femmes portugaises, étudiantes de 1ère année de l’enseignement supérieur, non linguistes, âgées de 17 à 22 ans. Pour la réalisation des testes de perception, nous avons utilisé un ordinateur portable Vaio et des haut-parleurs Sony SRS-A57Mega Bass dans un environnement non insonorisé (salle de cours). Après quelques consignes fournies aux auditrices, on leur a distribué une feuille où elles devaient noter leurs réponses. Pour chaque fichier TON écouté trois réponses étaient possibles: déclarative, interrogative, je ne sais pas. Une seule audition était prévue pour chacune des 72 phrases synthétisées. Ensuite, nous représentons sur différents graphiques (figures 4 à 6) les résultats de ces tests. 3.2.2. Résultats des tests de perception En observant la figure 4, nous pouvons constater, dans un premier aperçu, que toutes les structures y représentées, vraies ou construites, ont été bien identifiées. Les réponses justes, pour l’identification de la modalité de n’importe quelle structure, dépassent 60%. Les erreurs (modalité non identifiée ou identifiée de façon incorrecte) présentent un pourcentage de l’ordre de 20%, ou même inférieur. Un seul cas (fwta) dépasse légèrement ce pourcentage d’erreur. La lecture de ce graphique nous permet aussi de voir que les réponses des auditrices sont, dans la plupart des cas, en accord avec le dernier groupe tonal, qui constitue chaque énoncé. En effet, si le dernier groupe appartenait à une déclarative, presque dans tous les cas, la phrase était reconnue comme déclarative; si le dernier groupe appartenait à une interrogative, presque dans tous les cas la phrase était reconnue comme interrogative. Et ceci indépendamment du contenu vrai ou faux du premier groupe. Figure 4 - Résultats globaux des tests pour toutes les modalités comprises (vraies et fausses) Dans la figure 5 (voir ci-dessous), nous représentons les résultats distribués par accents lexicaux sur l’adjectif du SN1 pour tous les énoncés interrogatifs. Globalement, nous pouvons constater que le changement d’accent lexical sur l’adjectif du SN1 n’est pas déterminant pour le nombre de réponses justes pour les différentes structures accentuelles des vraies interrogatives (bwti, fwti, vwti), vu que les résultats obtenus dans les deux cas (vraies et fausses) sont très proches. Pourtant, quand on compare ces structures avec celles dont les SN1 appartiennent à la déclarative (bwtai, fwtai, vwtai), le taux de succès baisse, ce qui nous mène à croire qu’effectivement il a déjà un peu de l’information prosodique dans ce premier groupe tonal pour l’identification de la modalité, même si cette information est peu pertinente. Ces résultats perceptifs peuvent être mis en rapport avec les résultats des analyses acoustiques où les valeurs obtenues pour F0 sont déjà différentes dans ce premier groupe, se traduisant ici par une légère difficulté au niveau de la perception. Ce constat est récurrent dans nos analyses antérieures et se traduit par des valeurs plus élevées pour la phrase interrogative par rapport à celles obtenues pour la déclarative, comme on le mentionne dans la note 9 (voir plus haut). Malgré cette différence au début de l’énoncé, il nous semble que le deuxième groupe mélodique est toujours le plus pertinent pour l’identification de la modalité, vu que l’identification est surtout basée sur le contenu prosodique final, comme les pourcentages inscrits sur la figure 4 en témoignent. Figure 5 – Résultats des tests par structure accentuelle pour les interrogatives (vraies et fausses) Finalement, nous présentons dans les graphiques de la figure 6 les résultats des tests de perception par locuteur/région. Figure 6 – Résultats des tests de perception par locuteur/région En observant le graphique de gauche où sont représentés les résultats par locuteur/région, tous accents confondus, nous constatons que les auditrices ont manifestement plus de facilité à reconnaître les interrogatives chez certains locuteurs que chez d’autres. En dépit de ces différences, le pourcentage de réponses justes reste élevé dans tous les cas. Exception faite pour le locuteur de Minho, tous les pourcentages de réponses justes dépassent toujours 60% et atteignent même plus de 90% pour le locuteur de l’Algarve. Sur le graphique de droite, où les résultats représentés ont été calculés en croisant les données des différentes structures accentuelles et l’origine des locuteurs, les réponses des auditrices ne rendent visible aucune régularité entre structure accentuelle/origine des locuteurs. Malgré le nombre réduit de phrases par locuteur, il nous semble pouvoir affirmer qu’aucune structure accentuelle du SN1 ne rend plus facile la reconnaissance de la modalité en question. On observe que même s’il y en a quelques-unes qui aident plus à l’identification de la modalité que d’autres, cela peut varier en fonction de l’origine du locuteur. Il serait souhaitable d’élargir les tests de perception à d’autres phrases du corpus pour vérifier si cette irrégularité se maintient, de façon à mieux déterminer le rôle joué par la variation accentuelle dans l’identification des modalités. 4. Considérations finales Les résultats des analyses acoustiques présentées plus haut montrent que le mouvement de F0 sur le premier groupe tonal se présente plus diversifié, non seulement en fonction du locuteur, mais aussi en fonction de la position de l’accent lexical de l’extension du SN1. En ce qui concerne le dernier groupe mélodique, on trouve une configuration prosodique plus similaire entre les locuteurs, présentant une montée jusqu'à la dernière voyelle tonique de l’énoncé suivi d’une descente abrupte finale, ce qui se traduit par une configuration mélodique circonflexe. La façon dont nos auditrices ont perçu les énoncés est sûrement à mettre en rapport avec la variation des valeurs de F0. En effet, on pourrait dire que les résultats des tests de perception confirment que l’information prosodique se révèle déterminante pour l’identification de la modalité interrogative. Les résultats attestent que le dernier groupe tonal est le principal responsable de la perception de la modalité. Dans tous les cas, en dépit du mouvement final circonflexe (voir figure 2), la phrase interrogative a été facilement reconnue. Ceci est visible sur la figure 5, où les fausses interrogatives (bwtai, fwtai, vwtai) continuent d’avoir des taux de réponses justes favorables et certaines structures ont même atteint des valeurs presque identiques à celles des vraies interrogatives (bwti, fwti, vwti). Cela montre aussi que le contenu prosodique dans le 1er groupe tonal, indépendamment de l’accent lexical qui porte l’adjectif, ne facilite ni ne nuit à l’identification de la modalité interrogative, bien quelle soit plus facilement identifiée quand le SN1 et le SN2 appartiennent tous deux à la phrase interrogative. Finalement, les résultats des tests de perception montrent aussi que le nombre de réponses justes données par les juges peut être en rapport avec l’origine du locuteur, bien que les énoncés de tous les locuteurs aient été facilement identifiés. Pourtant, le nombre réduit de locuteurs par point d’enquête nous mène à considérer que les différents taux obtenus pour ce test peuvent aussi être dus à des différences idiosyncrasiques où de registre. Des études comme celle que nous venons de présenter mériteraient d’être élargies de façon à pouvoir inclure un plus grand nombre de locuteurs par aire dialectale ainsi que d’autres structures déjà présentes dans notre corpus. 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