18_plus beau rêve

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18_plus beau rêve
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Au-delà des mots : pages 156 et 157
Le plus beau rêve
II arriva, un automne où les arbres avaient
revêtu leurs plus belles couleurs, que trois
bourgeois
partirent
pour
la
chasse
accompagnés d'un cuisinier. Celui-ci, chargé
de veiller à apprêter le gibier qu'ils allaient
abattre, les suivait discrètement, emportant
sur son dos ses chaudrons, ustensiles et
couverts.
Toute la journée, les chasseurs circulèrent par des sentiers mal tracés,
grimpèrent des collines, s’enfoncèrent dans des taillis de ronces. Mais à la fin du
jour, épuisés et affamés, ils n’avaient à eux trois tué qu'une seule perdrix. Ils
avaient bien vu détaler quelques lièvres, fuir un magnifique cerf et voler audessus de leurs têtes de beaux canards mais la malchance était avec eux. Ils
étaient, vous pouvez l'imaginer, de fort mauvaise humeur ; et le cuisinier,
inoccupé. Alors, ils dirent :
« Gardons la perdrix pour demain. Celui qui aura fait
Ie plus beau rêve la mangera. »
Ils montèrent une tente et, le ventre creux,
s'installèrent pour la nuit en bougonnant. Éveillés à
l’aube, le premier chasseur dit ou deuxième :
« Quel rêve as-tu fait ? »
« J'ai rêvé que j’épousais la plus belle princesse du monde. Elle avait des joues
de pêche, une chevelure éblouissante, des yeux brillants comme des diamants
et un sourire à chavirer les cœurs. »
« Ah ! quel beau rêve tu as fait ! Moi, j’ai rêvé que j'étais le roi d'un pays où il n'y
avait pas de pauvres, où tout le monde s'entendait bien sans jamais se chicaner.
La haine n'existait pas, on ne vivait que d'amour et de gentillesse. »
« Ah ! vraiment, c'est un rêve épatant », dit le premier chasseur.
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avril 2011
Les deux premiers demandèrent alors ou
troisième s'il avait rêvé.
Celui-ci
s'empressa de répondre :
« Moi, j’ai rêvé que j'étais ou ciel où j’ai vu
Dieu dans toute sa gloire, entouré des
saints et de milliers d'anges volant autour
de son trône, plus magnifiques les uns que
les autres. »
« Ah ! quel beau rêve ! dirent les autres.
C'est toi qui as fait le plus beau ! C'est
donc toi qui mangeras la perdrix ce
matin. » Mais le cuisinier, qui fricotait dans
ses chaudrons où cuisaient des patates,
leur dit tout à coup :
« Moi aussi, j’ai fait un rêve, un beau rêve. J’ai rêvé que je mangeais la perdrix.
Elle était préparée merveilleusement, avec des oignons et du chou et elle était
succulente.
« Tiens donc ! firent les chasseurs. Curieux rêve. »
« Et il doit être vrai, ajouta le cuisinier, puisque ce matin, je n’arrive pas à mettre
la main sur la perdrix. Je n'en ai retrouvé que le bec et les pattes. »
L’histoire ne dit pas comment se termina cette partie de chasse mais je crois
bien que le cuisinier a dû quitter bien vite le bois en courant, les chasseurs à ses
trousses. Il doit courir encore.
[…] Le plus beau rêve, Contes traditionnels du Québec, Cécile Gagnon, Éditions Milan, 1998
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