le role des medias televises dans la diffusion des
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LE ROLE DES MEDIAS TELEVISES DANS LA DIFFUSION DES INFORMATIONS METEO . EVELYNE DHELIAT. Présentatrice et Responsable du service météo sur TF1 en France. Depuis 1992, je présente la météo sur TF1, chaîne de télévision française. Au fil des ans, j’ai pu constater l’importante évolution de mon métier et de mon rôle auprès du grand public. Constatation que j’ai pu faire également chez mes confrères de l’étranger. Cette évolution est due à deux facteurs essentiels . D’une part l’amélioration permanente des prévisions météorologiques et d’autre part l’impact de phénomènes climatiques de plus en plus préoccupants pour les populations. DES PREVISIONS METEOROLOGIQUES DE PLUS EN PLUS FIABLES : Je travaille quotidiennement avec Météo France pour la conception des bulletins météo de TF1. Les informations fournies sont du court terme, mais aussi du plus long terme avec désormais des prévisions à 7 jours. S’il est vrai qu’à 6 et 7 jours ces prévisions sont plutôt des tendances, je remarque d’année en année une précision et une fiabilité grandissante dans ces prévisions. Les scientifiques estiment gagner une journée de prévisions tous les sept à dix ans. Mais ne serait-ce que dans les prévisions à court terme le gain en qualité est permanent. Il faut savoir que les calculateurs de Météo France traitent 2400 milliards d’opérations à la seconde ! Et qu’une heure de temps de calcul suffit pour une prévision à 24h. Ma collaboration avec Météo France, consiste aussi en un travail permanent sur l’évolution des contenus et des produits mis à notre disposition. J’entends par produits, de nouvelles techniques permettant la création d’éléments visuels particulièrement informatifs pour les téléspectateurs. Par exemple, la masse d’air ou les prévisions d’humidité et de pluie à 24 ou 48 h , l’évolution des fronts…Tout ceci étant désormais visualisé par différentes séquences d’un bulletin. Ces produits peuvent aussi être à l’origine une demande de ma part, comme les données de pressions dans plusieurs villes de France . A partir de fichiers de Météo France concernant ces données, nous créons ensuite de nouveaux produits compatibles avec la charte graphique de la météo sur TF1. Cette évolution permanente permet au fil des années d’apporter aux téléspectateurs des informations crédibilisant de plus en plus les prévisions météos. On constate ainsi un regain d’intérêt porté à ces prévisions. DES EVENEMENTS CLIMATIQUES DE PLUS EN PLUS PREOCCUPPANTS : Nous avons subi en France, deux tempêtes exceptionnelles et sans précédent dans l’histoire météorologique de notre pays, les 26 et 27 décembre 1999. Ces tempêtes furent une véritable onde de choc pour les citoyens . La majorité d’entre eux ont subi de très importants dégâts matériels. Des victimes avaient également été dénombrées. J’ai pu constater à partir de cet événement, un changement radical dans l’attente des téléspectateurs à propos des bulletins météo . Une nouvelle sensibilité du risque climatique se faisait jour . Nous avons immédiatement ressenti avec Météo France, la nécessité d’une information nouvelle incluant notamment la « culture du risque ». Ce qui donna naissance aux cartes de vigilance. Cette vigilance comporte quatre degrés de risque visualisés par quatre couleurs, vert , jaune , orange, rouge . Le rouge est le degré d’alerte maximum . Les médias font état de vigilance seulement à partir du seuil orange pour concrétiser un danger potentiel. Cette nouvelle information donnée aux téléspectateurs , fut rapidement et parfaitement assimilée par le public. Voici d’ailleurs quelques chiffres édifiants : La vigilance rouge ( danger maximum) fut utilisée trois fois. Le 8 septembre 2002 (orages sur le Gard) le bilan fut très lourd, 23 morts. Le 3 décembre 2003 , (fortes pluies sur l’Hérault ) le bilan fut de 10 morts. Enfin le 6 septembre 2005, (fortes précipitations sur l’Hérault et le Gard ) pas de victimes. De plus, deux enquêtes réalisées auprès du grand public apportèrent la preuve que celui-ci assimilait de mieux en mieux la notion de vigilance météorologique : En 2002 , 2/3 du public connaissait cette vigilance. En 2005 le nombre est passé à 3/4 du public. Un autre événement climatique exceptionnel, la canicule de l’été 2003, avec plusieurs milliers de décès en France, est venu renforcer l’intérêt des téléspectateurs pour l’information météo. De ce fait, de nouvelles cartes de vigilance ont vu le jour, incluant le risque et les conséquences de températures extrêmes aussi bien en été qu’en hiver. Enfin depuis le mois de novembre 2007, le risque d’inondations est lui aussi pris en compte dans le panel des vigilances. Il existe maintenant des cartes de vigilance à l’échelle européenne. U ne information à priori encore peu utilisée par les médias notamment en France. Elles sont toutefois d’une grande utilité pour les déplacements des particuliers et ont, à coup sur, leur place dans les bulletins traitant de la météo européenne. Inutile de dire que le réchauffement climatique est un sujet qui sensibilise de plus en plus le public. J’ai personnellement pris conscience du rôle important que je pouvais jouer pour véhiculer l’information auprès des téléspectateurs. Je suis d’ailleurs convaincue qu’il est du devoir des médias de profiter de leur impact pour motiver les gens. Je souhaite ici ajouter quelques mots sur mon expérience personnelle. Lors de Forums Internationaux de la Météo, et notamment en 2003, je fus frappée par la difficulté des scientifiques à communiquer auprès du grand public leurs inquiétudes sur les conséquences du réchauffement climatique. En France, je fus donc la première à mettre au point avec eux , et notamment avec des membres du GIEC , des messages courts et efficaces sur les gestes de la vie quotidienne afin de lutter contre ce changement climatique. Ces informations distillées dans mes bulletins météo du soir sont écoutés par plus de neuf millions de téléspectateurs . Il faut savoir que la météo est à TF1 le programme le plus regardé. Il est , de plus, particulièrement fédérateur, toutes les tranches d’age, toutes les catégories sociales et professionnelles s’y intéressent. L’importance des médias pour véhiculer l’information se mesure aussi au retour et à la demande du public envers les journalistes. Suite à ces messages pour lutter contre le réchauffement climatique que je donne à l’antenne, bon nombre de téléspectateurs m’ont ensuite demandé plus d’informations et de solutions concrètes dans la vie de tous les jours. Ce que j’ai consigné dans un livre sorti en librairie en octobre dernier et intitulé « C’est bon pour la planète ». Une façon de prolonger l’information. Je dois aussi ajouter que je suis parfaitement consciente de l’impact économique des bulletins météo. Bon nombre d’hôteliers ont remarqué que les réservations ou les annulations de leurs clients , pour le week-end par exemple, dépendaient des prévisions données par les médias trois jours plus tôt. Les informations météo concernant les chutes de neige dans les stations de ski jouent aussi un rôle décisif pour les vacanciers. LES BULLETINS METEO TELEVISES A TRAVERS LE MONDE. Lorsque j’observe les bulletins météo diffusés par des chaînes du monde entier, je constate une importante évolution au fil des années, mais aussi une certaine « homogénéisation ». Les cartes et les images 3D sont quasi identiques d’un pays à l’autre et même désormais d’un continent à l’autre. Ceci est sans doute la conséquence d’une uniformité des logiciels météo présents sur le marché. J’en ai fait le constat en septembre dernier à Amsterdam lors du salon professionnel IBC qui rassemble matériel et logiciels au service des médias télévisés. Je souhaite également ajouter quelques mots sur les difficultés rencontrées par certains journalistes et présentateurs météo pour réaliser leurs bulletins. Je pense entre autre à ceux de certains pays africains dont les moyens financiers et techniques sont parfois limités. Je souhaite leur dire toute mon estime et mon admiration. Pour avoir eu l’occasion de travailler avec un certain nombre d’entre eux, j’ai pu constater leur enthousiasme et leur volonté de délivrer une information météorologique de qualité malgré des conditions de travail parfois difficiles. A la demande de l’OMM , j’ai en effet participé à une semaine de formation de présentateurs météo de pays africains de langue française. Cela s’est passé à Dakar en septembre 2004. Depuis, je constate d’année en année, lors des Forums Internationaux de la météo notamment, les efforts importants et fructueux qu’ils ont pu fournir pour améliorer leur bulletins. Ces présentateurs sont conscients de l’importance de délivrer à leurs concitoyens des prévisions météo fiables et les plus détaillées possible pour prévenir les fléaux naturels ou améliorer les récoltes agricoles, entre autre. Ils ont souvent du se battre pour imposer cette information parfois jugée comme secondaire par les décideurs locaux. Il est primordial à l’avenir d’aider les pays en voie de développement afin qu’ils bénéficient d’informations météo de qualité. C’est à nous de mettre notre expérience à leur service. L’AVENIR DE L’INFORMATION METEO. On peut d’ailleurs s’interroger sur l’avenir de l’information météo qui sera donnée par les médias dans les prochaines années. Bien sur les moyens techniques et les prévisions n’iront qu’en s’améliorant, ce qui confortera les présentateurs dans leur rôle. Pour ma part, je constate que l’on passe progressivement d’une météo « basique », cartes de nébulosité, de températures à une météo de plus en plus riche en informations. Toutefois la place et le temps d’antenne réservés dans les médias à la météo ne sont pas extensibles. Nous serons donc à l’avenir amenés à une sélection permanente de l’information et de ses supports en fonction des évènements météos dominants du moment. Devant les risques et les conséquences redoutées du réchauffement climatique, le public va se trouver de plus en plus réceptif et exigent quant à la qualité de cette information. Il faudra sûrement inclure des renseignements concrets à propos des risques encourus et des conséquences secondaires suite à ces phénomènes météorologiques violents et dangereux. Comme je l’écrivais plus haut, Météo France a par exemple mis en place récemment de nouvelles cartes de vigilance concernant les crues et les inondations après de fortes pluies et ceci pour répondre à une demande pressante du grand public. Par ailleurs, l’amélioration constante de la qualité des prévisions à plus long terme aura pour effet une fidélisation croissante pour cette information. Il est ainsi possible d’espérer qu’à l’avenir la météo soit considérée par tous les médias comme une information primordiale et inévitable ce qui n’est pas encore toujours le cas. Pour terminer , et sans rentrer dans une polémique que j’ai parfois constatée chez certains de mes collègues étrangers, j’ajouterai quelques mots sur la formation professionnelle du présentateur météo. C’est important pour l’avenir puisque cette information est appelée à occuper une place de plus en plus importante dans les médias. Je pense qu’il n’est absolument pas nécessaire qu’un présentateur météo soit obligatoirement prévisionniste de formation . En revanche, il est primordial qu’il reçoive une formation de base pour bien interpréter et restituer les prévisions des météorologues. Ceci paraît peut-être évident, pourtant on peut fréquemment constater l’ignorance totale dans laquelle se trouve certains présentateurs sur le sujet. Gageons toutefois que la météo a désormais gagné ses lettres de noblesse dans les médias et que le métier de présentateur le fera tout autant.