Les mirages des nouveaux anticoagulants

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Les mirages des nouveaux anticoagulants
Cher confrère,
Tourcoing, le 1er août 2013
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Les mirages des nouveaux anticoagulants
La commercialisation de ces molécules, dont l'intérêt médical, l'innocuité et les coûts disproportionnés font débat,
illustre les incohérences de l'encadrement de l'industrie pharmaceutique.
Les ambiguïtés de la politique du médicament française ont la vie dure. En témoigne l'imbroglio de la gestion
sanitaire d'une famille de médicaments : les "nouveaux anticoagulants oraux" (NACO). Que faut-il penser de ces
produits onéreux, vantés par les industriels qui les commercialisent comme un progrès important, alors même que
la Haute Autorité de santé (HAS), à trois reprises, a contesté ce progrès ?
Premier constat : ces NACO suscitent depuis près d'un an (depuis leur remboursement par l'Assurance-maladie)
une flambée de prescriptions mal contrôlées. Leur sécurité d'emploi "dans la vraie vie" est pourtant loin de faire
l'objet d'un recul suffisant. D'où cette inquiétude : ne fait-on pas courir de risques aux patients ? L'inertie du
système semble retarder la diffusion de recommandations fortes sur le bon usage de ces nouveaux produits.
"UN SURCOÛT ANNUEL DE 150 MILLIONS D'EUROS D'ICI À 2016 POUR LA CAISSE NATIONALE
D'ASSURANCE-MALADIE !"
L'incohérence de certains arbitrages est aussi saisissante."Comment ces nouveaux médicaments ont-ils pu obtenir
de tels prix, alors même que la HAS juge qu'ils n'apportent aucun progrès ?, dénonce Frédéric van Roekeghem,
directeur général de la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM). Au rythme d'augmentation actuel de leurs
prescriptions, ces NACO devraient occasionner pour l'Assurance-maladie un surcoût annuel de 150 millions
d'euros d'ici à 2016 !"
La question est d'abord médicale. Ces molécules empêchent le sang de coaguler. D'où leur utilisation chez certains
patients pour prévenir le risque de formation de caillots qui pourraient obstruer un vaisseau, provoquant une
ischémie. Ce manque d'oxygène entraîne, selon l'organe, un infarctus, un accident vasculaire cérébral...
Les anticoagulants oraux sont de plus en plus prescrits parce que la population vieillit et que leurs principales
cibles sont les personnes âgées souffrant de troubles du rythme cardiaque. Les fers de lance en sont des
médicaments éprouvés depuis plus de soixante ans : les antivitamines K (AVK). Ils agissent en bloquant la
fabrication de quatre facteurs de coagulation dans le foie.
4 000 À 6 000 DÉCÈS PAR AN LIÉS À DES ACCIDENTS HÉMORRAGIQUES
Ces AVK sauvent chaque année des dizaines de milliers de vies en France. Mais ils sont aussi responsables de 4
000 à 6 000 décès par an liés à des accidents hémorragiques. Bien connu, ce risque rend leur maniement délicat :
un ajustement des doses est nécessaire pour chaque patient. Leur fenêtre d'action, étroite, impose la pratique d'un
test biologique régulier de surveillance, dit "INR", avec prise de sang - test contraignant pour les patients et
responsable de surcoûts.
"Les médecins rêvent depuis des années de disposer d'un anticoagulant actif à doses fixes et sans surveillance. Les
NACO répondent en partie au cahier des charges, mais au prix de plusieurs écueils", estime Eric Perchicot,
cardiologue à Cavaillon (Vaucluse). Deux molécules de NACO sont aujourd'hui remboursées en France : le
dabigatran (Pradaxa, laboratoire Boehringer Ingelheim) et le rivaroxaban (Xarelto, Bayer). Une troisième le sera
prochainement : l'apixaban (Eliquis, Bristol Myers Squibb/Pfizer).
"EN 2011, ENVIRON 1,1 MILLION DE SUJETS ÉTAIENT TRAITÉS PAR UN ANTIVITAMINE K EN
FRANCE"
Ces NACO, au mode d'action innovant, inhibent directement des molécules responsables de la coagulation
sanguine : la thrombine (Pradaxa) ou le facteur Xa (Xarelto et Eliquis). Leur principale indication est la prévention
des accidents vasculaires cérébraux chez les adultes atteints d'un trouble du rythme cardiaque fréquent : la
fibrillation atriale non valvulaire. Ils sont aussi indiqués, en traitement transitoire, dans la prévention des
thromboses veineuses après pose d'une prothèse de hanche ou de genou.
"En 2011, environ 1,1 million de sujets étaient traités par un AVK en France", note l'Agence nationale de sécurité
du médicament (ANSM). Mais les NACO sont en train de se tailler une part croissante du gâteau. Engendreront-ils
les mêmes errements que ceux liés à certains médicaments récents de l'inflammation, de l'obésité ou du diabète ?
A vouloir "pousser" leur prescription, trop vite et trop largement, les laboratoires avaient fini par les tuer. Les
pilules de troisième ou quatrième génération, elles, ont été abusivement présentées comme un progrès, et leurs
prescriptions se sont avérées mal encadrées. De ces mésaventures, les autorités sanitaires, les professionnels de
santé et les industriels ont-ils tiré toutes les leçons ? Enquête et débat.
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Après le retrait des Benzodiazépines (Myolastan)
Des ordonnances sécurisées dès la rentrée
Interrogés sur les circonstances précises du retrait récent de Myolastan (tétrazépam), les représentants de l’Ansm,
les Drs Florent Perin-Dureau et Sylvain Gheo distinguent le cas du tétrazépam de celui des autres
benzodiazépines, pourtant non exemptes d’effets secondaires. Ils annoncent un plan d’action dès l’automne destiné
à limiter l’usage de ces molécules. Très vraisemblablement, comme le suggérait le rapport de l’Afssaps en 2012,
toutes les benzodiazépines devront être prescrites sur ordonnance sécurisée. Une mesure efficace déjà appliquée au
clonazépam (Rivotril) en2 011.
Dans l’enquête sur les effets indésirables du tétrazépam de 2012, cette benzodiazépine n’est pas la seule à
présenter des effets secondaires graves, cutanés ou non. Pourquoi est-ce la seule à être suspendue ?
Le
tétrazépam
(Myolastan)
est
la
seule
benzodiazépine
à
avoir
eu
une
indication
« décontracturant musculaire », la seule à donner des atteintes cutanées graves et imprévisibles. Ce tropisme
cutané n’est pas décrit avec les autres molécules de la classe (alprazolam, bromazépam, lorazépam, oxazépam,
diazépam). Il n’a par ailleurs jamais été montré que le tétrazépam entraînait des soulagements et des reprises
d’activité professionnelle, plus précoces. La balance bénéfice/risque était donc devenue très défavorable. Mais, de
toute façon, on ne peut pas comparer ses effets secondaires à ceux des autres benzodiazépines qui ont des
indications tout à fait différentes, psychiatriques et neurologiques. Notre travail a été de comprendre pourquoi le
tétrazépam a été responsable d’effets cutanés graves tels que le syndrome de Lyell, le syndrome de StevensJohsnon et le syndrome d’hypersensibilité médicamenteuse (Dress).
Comment l’expliquez-vous ?
Ils s’expliquent par une petite variante moléculaire qui n’est pas particulièrement en lien avec son effet
myorelaxant plus prononcé, mais qui du fait d’une interaction particulière myologique, pourrait expliquer les
atteintes cutanées. Il y a un vrai rationnel chimique, moléculaire. Il faut préciser également que même si le
tétrazépam était la seule benzodiazépine dont la durée de prescription n’était pas limitée, les résultats de l’enquête
ont montré que la durée moyenne de prescription a été d’une quinzaine de jours.
Les 5 autres benzodiazépines ne sont pas exemptes d’effets secondaires, notamment le bromazépam (Lexomil) qui
totalise 2830 effets indésirables dont 1 286 graves.
Les effets secondaires doivent être aussi regardés par rapport à l’exposition. Le Lexomil et le Xanax ( alprazolam)
sont de loin les benzodiazépines plus prescrites, il est donc attendu que ce soit celles qui aient le plus d’effets
indésirables. Dans l’indication troubles du sommeil ou troubles de l’anxiété, nous avons cependant des inquiétudes
sur l’utilisation de ces molécules en France qui sont mentionnées dans le rapport "benzodiazépine" qu’a publié
l’Afsapps en janvier 2012 et qui seront rappelés dans un autre que publiera l’Ansm en septembre 2013. Elles
justifient les différents plans d’action de la Haute Autorité de santé, de la Sécurité sociale et les différentes
mesures de limitations de prescriptions à venir chez les sujets âgés comme chez les sujets plus jeunes.
Le Myolastan a eu des effets secondaires qui apparaissaient de façon imprévisible, non contrôlable, et malgré des
prescriptions bien conduites. Des mesures de bonnes pratiques n’auraient pas suffi à limiter ses effets secondaires.
En revanche, le rapport bénéfice/risque d’une benzodiazépine bien prescrite, à posologie correcte, pour durée
courte, avec un arrêt rapide, sans associations médicamenteuses négatives, est plus favorable.
Cela signifie-t-il que vous allez encadrer leurs prescriptions ?
A l’automne prochain, un plan d’action destiné à limiter le mésusage des benzodiazépines dans leurs indications
neurologiques et psychiatriques, va être mis en place. Ces mesures s’inspirent de celles prises pour les formes
orales de clonazépam (Rivotril), qui nous ont valu une levée de boucliers. Rappelons que depuis le 2 janvier 2012,
elles limitent sa prescription sur une ordonnance sécurisée initiée par un neurologue ou un pédiatre. Elles
s’inscrivent dans les missions de l’Ansm mentionnées au Code santé publique...
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