2.2 Les phonemes du francais et de I`anglais

Transcription

2.2 Les phonemes du francais et de I`anglais
22
2.2
Introduction
a la phonetique
comparee
Les phonemes du francais et de I'anglais
nord-amertcalns
Le principe de I' AP.I. est de faire correspondre a un son du
langage un symbole unique, quelle que so it la langue a laquelle ce
son appartient. Par exemple, les mots homophones «eau »,
« haut » et « au » et la voyelle « 0 » elle-rnerne se transcrivent
tous en A .P.I. par le symbole 10/. De merne, le son consonantique
que representent les lettres « s », « z » et « g» dans les mots
anglais « ill us io n », «azure» et «collage» se transcrit en
AP.I. par le symbole 13/. Par convention, on met toujours les
symboles de I' AP.I. entre barres obliques dans le but de prevenir
toute confusion avec l'orthographe courante. Grace a cet alphabet,
on peut ainsi attribuer un symbole unique a tous les sons possibles
des langues humaines. Cette caracterisation unique de chacun des
sons permet de relever plus facilement les analogies et
dissemblances entre des langues differentes ou entre des varietes
distinctes d 'une meme langue. Par exemple, le symbole Iyl
represente ce que l 'allemand orthographie « ii », comme dans le
mot « fU r » (fr. pour), et que le francais orthographie « u »,
comme dans le mot « mur » . Les mots « fiir » et « mur » sont
ainsi transcrits Ifyrl et Imyr/. Si l 'A.P.I. permet de reunir sous un
me me symbole des sons orthographies de facon differente selon les
langues, il permet aussi d'identifier des sons differents la ou
l'orthographe ne les distingue pas. Par exemple, la voyelle « 0 » du
mot compose « hot dog » est prononcee differemment selon que ce
mot est dit par un Americain de l'Est ou par un Anglo-Canadien. Les
premiers prononceront /ha t d o q/, tandis que les seconds
prononceront plutot Ihotdog/. On voit done l'utilite de disposer d'un
tel instrument. L'alphabet phonetique permet de surmonter les
problemes poses par l 'alphabet orthographique et dacceder
directement ala prononciation.
Les tableaux 2.1 et 2.2 presentent l'ensemble des sons (les
phonemes) du francais et de l'anglais nord-americains (desorrnais
Les sv
F.N.A. et A.
reviendrons Sl
2.2.1
Qu '
La prer
la langue qu' i
inventaire des
Considerons 1<
de la voyelle .i
Ipil
fbil
Itil
Idil
/kil
Ifil
Ivil
IOil
Isil
I
I
t
1
~
f
1
t
s
Enjoua
le fait dinterc
entraine un cha
cette procedure
au plusieurs m
(des paires min
d ' une langue:
I
La sequ
de decouvrir I" e
systeme, Par ex
de mots preced
4 Mot archaiqu e
5
Les svsternes phonetiques du francais et de I'anglais
F.N.A. et A.N.A.). Chaque son est transcrit en A .P .I. Nous
reviendrons sur chacun de ces sons dans les parties suivantes.
iais
n son du
[uelle ce
« eau »,
iscrivent
nantique
les mots
iscrit en
[ours les
prevenir
alphabet,
possibles
acun des
ogies et
varietes
ibole Iyl
= dans le
j
ie « u »,
ur » sont
r sous un
selon les
1tS
23
la ou
~ « 0 »
du
on que ce
idien. Les
seconds
loser d'un
ionter les
iaccedcr
, so ns (les
Je sormais
2.2.1
Qu'est-ce qu'un phoneme?
La premiere tache du linguiste est d'identifier les elements de
la langue qu 'il etudie. L'operation initiale consiste a effectuer un
inventaire des sons qui constituent les unites de base de la langue.
Considerons les mots anglais formes d 'une consonne a l'initiale et
de la voyelle Ii! :
Ipil
fbil
Iti!
Idil
/kil
Ifil
Ivil
pea
bee
tea
lettre d (en anglais)
key
fee
lettre v (en anglais)
IN
I~il
Imi!
Inil
IIi!
Iwil
Iji/
I~il
thee"
/hi!
lsi!
sea
Izi!
she
gee
me
knee
lea
we
ye
he
lettre z (en arnericain)
En jouant avec le premier son de ces mots, on decouvre que
le fait d 'interchanger Ipl par fbI, Iwl par 11/, ou encore lsI par [z},
entraine un changement de signification des suites de sons. Grace a
cette procedure, dite de commutation, qui consiste acomparer deux
ou plusieurs mots qui ne s'opposent entre eux que par un seul son
(des paires minimales), on parvient aidentifier les unites distinctives
d'une langue; dans ce cas-ci, les consonnes.
La sequence consonne suivie de IiI ne permet pas aelle seule
de decouvrir I' ensemble des unites consonantiques distinctives de ce
systeme, Par exemple, Ie son Ig/, qu 'on ne retrouve pas dans la liste
de mots precedente, n'en constitue pas moins une unite distinctive
4 Mot archaique signifiant
«
toi
».
24
Introduction
a la phonetique
Les
comparee
de l'anglais, puisqu'il permet d'opposer «gat» a «cat »,
« bat », « sat », « chat », « rat », etc. Le son lei constitue aussi
une unite distinctive en anglais, puisqu'il permet d'opposer les mots
« thou> » et « thou'' », transcrits respectivement 1~'Lwl et le~/.
Le son IfJI fonctionne aussi en tant qu'unite distinctive, puisqu'il
oppose, entre autres, le mot « sing» au mot « sin» (lslfJl - Ism/).
Le son IJ I s'oppose a Iwl dans la paire minimale «ripe» ­
« wipe » (/J~pl - /wgjp,'),
Cepe I
pas de dress:
F.N.A. Le I
d'ajouter a 1
et I!IJ. Le so
« anneau »
« huis » Itj:
Ce jeu d'oppositions permet ainsi d'identifier le systeme des
unites consonantiques distinctives de l'A.N.A., constitue de Ip/, /b/,
It/, Id/, Ik/, Ig/, IfI, Iv], lei, I~/, lsi, Izl, /fI, 13/, 1!Jj, I~/, lm], In/, IfJ/,
11/, IJ/, Iw/, Ijl et Ih/. Ces unites distinctives sont appelees des
phonemes. On peut de la merne facon dresser l'inventaire des sons
vocaliques (voyelles) de la langue, comme on le verra dans les
sections suivantes.
« jet 8 »
ImwEt/; Ij,
file» /fil:
IQ.3 1
1!Jj s'oppose
«
En resume, deux sons sont des phonemes si, dans un
entourage phonique donne, disons un mot, la substitution de 1'un
par l'autre entraine un changement de sens.
On
consonantic
fonction da
consequerm
voyelles ou
larges dotee :
En francais, maintenant, le test de commutation appliquee a
la sequence consonne et voyelle lui no us permet d'identifier au
moins seize unites consonantiques distinctives :
Ipul
/bul
ltul
Idul
/kul
Igul
poux
bout
tout
doux
cou
gout
Iful
Ivu/
Isul
Izu/
IIul
13Ul
fou
vous
sous
zo07
choux
joue
Imul
Inul
/lui
Iml
mou
nous
loue
roue
5 Pronom personnel dont l'equivalent en francais est « tu ».
6 Abreviation du mot « thousand » ,
7 Notons qu 'en francais nord-americain il est d'usage de prononcer Ie mot
« zoo» /zu/ au lieu de /zo/ com me dans d 'autres varietes de francais.
8 Dans Ie sens
9 Fr. croust ill
Les svsternes phonetiques du francais et de I'anglais
cat »,
tue aussi
r les mots
et le ~ / .
puisqu'il
«
,: - Ism/).
ripe» ­
sterne des
Ie Ip/, /hI,
l, In/, lui,
elees des
des sons
dans les
dans un
n de l'un
pliquee
Cependant, la suite consonne et voyelle lui ne nous permet
pas de dresser l'inventaire complet des phonemes consonantiques du
F.N.A. Le recours a de nouveaux tests de commutation permet
d'ajouter a la liste six nouveaux phonemes, soit IJl/, luj, Iw/, Ij/, 1rJ:31
et l!fj. Le sons IJlI s'oppose a Inl dans les mots « agneau » laJlol et
« anneau » lanol ; lu.I se distingue de Iwl dans les paires de mots
« huis » Iqil et « oui » Iwi/, «muette» /mqst/ et « mouette »
Imw€t/; Ijl s'oppose III dans la paire minimale « fille » Ifijl et
« file » Ifill; le son leBl s' oppose a 131 ou a Idl dans les mots
« jet 8 » leB€t/, « (il) jette » 13€tl et « dette » Id€tl ; enfin, Ie son
IJ.1J s'oppose a!II dans « chip? » l.!J}pl et « (il) chipe » Ifip/.
a
On retrouve ainsi en F.N.A. vingt-deux phonemes
consonantiques, c'est-a-dire vingt-deux sons qui ont comme
fonction dans ce systeme de s'opposer a tous les autres et,
consequernmcnt, de pouvoir se combiner avec d'autres sons,
voyelles ou consonnes pour former des unites linguistiques plus
larges dotees de sens, c'est-a-dire des mots.
a
ntifier au
mou
nous
loue
roue
.cer Ie mot
25
8 Dans Ie sens d'avion.
9 Fr. croustille.
26
Introduction
a la phonetique
Les svste:
comparee
Tableau 2.2.
Tableau 2.1. Les phonemes de I'anglais nord-americain
Ipl
fbi
It!
Idl
/k/
Ig/
IfI
Ivl
lei
151
lsi
Iz/
IfI
131
IJ§J
IrLz/
/JJj
1fJ'J1
1m!
Inl
IfJ I
N
/J I
Iwl
Iji
/hI
pin, pope
bat, baby
till, stripe
do, begged
cat, kill , ch emist, antique
goat, ghost, gu ard
fine, rifle
vine, stephen
thief, maths
that, father
sit, rice, scissors
buzz, disease, scissors
ship, sug ar
measure, collage
ritz , blitz
ad s
chance, match, nature
j am, edge
mummy, ram
run , nut
bank, singer, ring
lamb , hello
ran, stirring
wet, quite,
yet, onion
hat, reheat
iii
/II
lei
lEI
lrel
lallO
lal
101
III.. I
I'JI
101
lui
lui
lillJ
I~I
19jj
bead, see , pea
bid, sit, pity
bake, hay , beige
head, bed, said
hat, apple
par , car
purr, were, above
paw, heart, hot
fun , come, dove
paw, caught
load, go
food , nude, who
book, full
buy , hide
house, how
boy , oil
10 Notons que la distinctio n entre les phonemes la/, 101 et I:J I est absente chez
plusieurs locuteu rs de I' A.N .A. Pour ces locuteurs, les voye lles des mots
« par » , « hea rt» et «caught » sont prononcees de la meme facon, ont un
timbre identique.
Ipl
fbi
It!
Idl
/k/
Ig/
IfI
Ivl
lsi
Iz/
If!
131
IJ§J
IQ-!:I
/JJj
1fJ'J1
1m!
Inl
lIiI
N
Irl
Iji
Iql
Iwl
pipe, apte
bas, abbe
toute, meetinj
doux , fade
cou, kepi, qu
gout, guitare
fin, souffl e, p
vin, cave
si, ~a , ass is, i
zoo, bise
chou,chiche.
joue, bougie
tu, tire
du , dire
chip, sandwic
job, j eans
rna, gamma, I
ni, annee, an(
agneau, bag",
la, allo
rue , nourrir, I
fille, yatch , ill
huile , muet
oui, watt
11 De I'anglais « to I
12 De l' anglais « bre
13 Les sons [ill et [Q.;:
ad'autres langues.
14 De I'anglais « to
15 De I'anglai s « sui
Les svsternes phonetiques du franc;:ais et de I'anglais
27
Tableau 2.2. Les phonemes du francais nord-amerlcaln
1
ige
id
love
ot
.ve
zho
Ipl
fbi
It!
Idl
/k/
Ig/
IfI
Ivl
lsi
Iz/
IfI
131
IJ:§!
Idzl
MJ
I~I
1m!
Inl
IJII
III
Irl
Iji
Iql
Iwl
ente chez
les mots
. ont un
pipe, apte
bas, ab be
toute, meeting, theatre
dou x, fade
cou, kep i, qui, grecque
gout , guitare
fin, souffie, pharmacie
vin, cave
si, ca, ass is, ici
zoo , bise
chou,chiche ,
joue, bougie
tu , tire
du , di re
chip, sandwich, tcheque tjob, jeans
rna, gamma, lame
ni , annee, ane
agneau, bagne
la, allo
rue, nourrir, par
fille, yatch , million
huile, muet
ou i, watt
iii
li :1
Iyl
ly:1
lei
le:1
101
10:1
lEI
IE:I
lrel (I~I)
lre:1 (I~ :I)
Ia!
I'JI
101 - I'JI
10:1 - I'J:I
101
10:1
lui
lu:1
la:1
le:1
15:1
Nt:1
ni, gris, fusil
jeans, eire
du, nue , hum ide
juge, ruse
etude , mai, jouer, jouez
brequer l l, breaketpeu,deux
jefmer, creuser
eleve , faite , fesse , jouet
feter , neige , maitre
menu , je, meuble, oeil
soeur, fleurir
patte, la, 3
loge , police
pas , secretariat, 13
passer, pate
ego ,au,eau
rosee , sa uce, cote
cou,gout
mouvert ' , suit 15
chanter, en , temple
matin, plein, main
ombre, taon, honte
lundi, ajeun, emprunter
11 De I'an glais « to brake » (fr. freiner).
12 De I'a nglais « break » (fr. pause-cafe).
13 Les sons WJ et [Q3] ne se retrouvent en franca is que dans des mots ernpruntes
ad'autres langues.
14 De I' anglais « to move » (fr. bouger).
15 De I'anglais « suit» (fr. habit).
28
Introduction
2.2.2
a la
Le
phonetique comparee
Transcription large et transcription fine
Dans les pages precedentes, nous avons presente les
phonemes du francais et de l'anglais nord-americains, Toutefois,
cette transcription ne donne pas tous les details de la prononciation
reelle. En effet, une analyse plus fine des sons du F.N.A et de
l' AN.A. revelerait certaines caracteristiques dont on ne tient pas
compte dans la transcription phonemique, Considerons les enonces
1 et 2 transcrits en phonemes (La et 2a) :
l.
la
Marie vivra en ville.
Imari vivra a vil/
2.
2a
Pat spends his time praying for peace.
Ipret spsndz hIZ till-m prein f::)J pis I
Cette transcription ne rend pas compte du fait, par exemple,
qu'en F.N.A, le phoneme Ii! (i), quand il se presente dans une
syllabe finale de mot se terminant, entre autres, par la consonne Ill,
comme dans « ville » , donne lieu a un son « i » semblable a celui
qui est entendu dans le mot anglais « bill » ; cette transcription ne
montre pas non plus qu'en A.N.A, la consonne « p » au debut des
mots « Pat », « praying» et « peace» est aspiree, et qu 'elle est
non aspiree quand elle survient apres la consonne « S », comme
dans «spend » . On transcrit done de deux facons : dans une
transcription phonemique, ou large, on se limite a indiquer les
phonemes, c'est-a-dire les elements auxquels est rattachee une
fonction distinctive; dans une transcription fine ou phonetique, on
note plus precisement ce qui est reellement prononce l". Pourquoi
avons-nous deux modes de transcription? Le choix de l'un ou de
l'autre type de transcription depend du but qu'on poursuit. Si l'on se
16 La transcription large se rapproche de la transcription orthographique en ce
qu ' ell e elirnine, volontairement, certains details de prononciati on . Ce qui
distingue les deux systemes, c 'e st I'application stricte du principe « un signe, un
son » dans la transcription phon etique.
refere au
transcri ptu
details d 'u
precieuse s
ce cas , une
Ce~
appeles de
fine entre (
Une transo
2.2.3
(
On
depuis que ]
dans le cie
observer (
apparait. N
depend de
adultes qU I
langue evo:
Ain
anglais de
« spin » e
[phm], [sp:
« pin »,
5
relacherner
la product
fermees),
A l
d 'entendre
anglais tro
constituent
la procedu
Les svsternes phonetiques du francais et de I'anglais
ente les
outefois,
mciation
A. et de
tient pas
enonces
refere au sens ou a la structure des mots et des phrases, une
transcription phonemique suffit, et il est inutile de s'encombrer des
details d'une transcription fine. Mais ces precisions peuvent devenir
precieuses lorsqu'on s'interesse ala prononciation des gens et, dans
ce cas, une transcription phonetique s'avere necessaire.
Ces sons que l'on transcrit avec plus de pr ecision sont
appeles des allophones. Par convention, on met une transcription
fine entre crochets (et une transcription large entre barres obliques).
Une transcription fine se dit aussi transcription etroite,
Qu'est-ce qu'un allophone?
2.2.3
xemple,
ans une
onne /1/,
~ a celui
ption ne
ebut des
.elle est
comme
ans une
quer les
hee une
ique, on
ourquoi
.n ou de
i I 'on se
que en ce
. Ce qui
signe, un
29
On demandait a un tout jeune enfant qui observait le ciel
depuis quelques jours combien, selon lui, il pouvait y avoir de lunes
dans le ciel. II repondit qu 'il y avait autant de lunes qu'il avait pu
observer de formes differentes sous lesquelles cet astre no us
apparait. Nous, adultes, savons evidemment que la forme de la lune
depend de sa position par rapport a la terre et au soleil, mais tout
adultes que nous soyons, notre perception intuitive des faits de
langue evoque souvent celle de ce jeune enfant.
Ainsi, demandons-nous, par exemple, combien il y a en
anglais de consonnes « p », sachant que les mots « pin »,
« spin » et « nip» sont prononces par plusieurs anglophones
[phm], [spm] et [nrp"], c'est-a-dire avec aspiration de « P » dans
« pin », sans aspiration de « P» dans « sp in» et sans
relachement de I' accolement des levres dans « nip » (en effet, pour
la production du son « p » en fin de mot, les levres demeurent
fermees) .
A
partir de ce qu'il nous est objectivement perm is
d' entendre, nous serions tentes de dire qu 'il existe dans le systeme
anglais trois consonnes « p » . Pour affirmer que [ph], [p] et [pO]
constituent trois entites distinctes, il faudrait parvenir amontrer, par
la procedure de commutation, que ces sons surviennent dans des
30
Introduction
a la phonetique
comparee
contextes identiques. En effet, grace a cette procedure, on peut
demontrer que les sons consonantiques [e], [s], [Q3] et [ill sont des
entites phonemiques distinctes (des phonemes) en A.N.A. ,
puisqu' en les substituant 1'un a l ' autre au debut d ' une merne
sequence phonique, en l'occurrence la suite Im/, on cree des mots
differents, a savoir : « t h in », « sin », «gin » et « chin».
En ce qui a trait aux sons [ph], [p] et [pO] , on peut se
demander, d 'une part, s 'ils peuvent survenir dans un contexte
identique, d'autre part, si la substitution de l'un par l'autre suppose
un changement de signification, par exemple dans la suite consonne
et Im/. En d 'autres termes, est-il permis de dire [pm] au lieu de
[phm], [sphm] au lieu de [spm], etc., et cette substitution entraine-t­
elle un changement de sens (au meme titre que la substitution de [Q3]
par Lill donnant lieu a « gin» et « chin ») ?
Le s
Le I
Prenons, pa
un phoneme
minimal es
« lent» [la]
[i] n 'appara
par les cons
et [pl. En
« ( il) cliqi
« lime », «
son rapp elar
prononce-t-i
[fIj], [lrm] , [
[i] et [I] scm
est regie par
A la
premiere question, un anglophone repondra que les
suites [pm] au lieu de [p''m] et [sp''m] au lieu de [spIn] sonnent peu
nature 1 a l' ore ill e, mais que, tout de meme, les paires [pm] et [phm]
et [sphm] et [spm] renvoient aux memes significations. La raison en
est que [ph], [p] et [pO] ne constituent a proprement parler qu 'une
seule et merne entite, et que les prononciations differentes de la
consonne « p » sont conditionnees par Ie contexte au cette derniere
figure. En anglais, « p » est aspire en position initiale de mot, non
aspire apres la consonne «S» et implose (non relache, non
explose) en position finale de mot. On obtient ainsi la distribution
complernentaire suivante :
[ph]
pin [phm]
pot [ph::>t]
pack [phrek]
[p]
spin [spm]
spot [sp::>t]
spice [sp&s]
[pO]
nip [nip"]
top [t::>pO]
type [t~O]
vit [1
lit [Ii
En n
meme ph on
presentent j
cas, le rem
changement
d'ecriture, (
le phonem e
notees [ph].
et ses realis
Yu (
categoric gl
tions can ere
Les svsternes phonetiques du francais et de I'anglais
·e. on peut
10 sont des
n A.N .A.,
une meme
e des mots
hin » .
In peut se
n contexte
tre suppose
e consonne
au lieu de
entraine-t­
tion de [Q3]
ira que les
onnentpeu
n] et [phm]
.a raison en
rler qu'une
entes de la
tte derniere
e mot, non
lache, non
Iistribution
31
Le F.N.A. n 'est pas exempt de ces cas d'allophonie .
Prenons, par exernple, le son vocalique [i]. Ce son est en principe
un phoneme, car il s'oppose a d 'autres sons, comme dans les paires
minimales : « lit » [li], « (il a) In » [Iy] , « (il) lone » [Iu] et
« lent » [Iii]. Toutefois, I'examen d 'autres mots revele que le son
[i] n'apparait jamais dans une syllabe finale d'un mot se terminant
par les consonnes [p], [b], [t], [d], [k], [g], [s], [fJ, [I], [j], [m], [n]
et [J1]. En effet, « i» des mots « pipe », « vlte », « vid e )) ,
« (i l) clique )) , «lisse », « b iche », « v i ll e )) , «fille )) ,
« lime » , « Line » et « ligne » n 'est pas prononce [i] , mais [I],
son rappelant celui entendu dans le mot anglais « (to) live » . Aussi
prononce-t-on reellement [pIp], [VIt] , [vrd], [klrk], [lis], [bIfJ, [vII],
[fIj], [lim] , [lm] et [1IJ1] . On est done amene aconclure que les sons
[i] et [I] sont des allophones du phoneme Iii , puisque leur apparition
est regie par un entourage phonique particulier,
[i]
/
vit [vi]
lit [Ii]
"'­vitesse [Vit8S]
ligne [liJ1e]
vite [VIt]
ligne [hJ1]
En resume, deux ou plusieurs sons sont des allophones d'un
merne phoneme et sont en distribution complementaire s'ils ne se
presentent jamais dans un meme entourage phonique ; si c 'etait Ie
cas, le rernplacernent de l' un par I'autre n 'entrainerait pas un
changement dans le sens de la suite phonique. Selon les conventions
d' ecriture, on fait figurer les phonemes entre banes obliques. Ainsi,
le phoneme anglais « p » sera note Ipl et ses realisations effectives,
notees [ph], [p] et [pT Le phoneme francais « i » sera transcrit Iii
et ses realisations effectives [i] et [I].
Vu de cette facon , un phoneme constitue done une sorte de
categoric generique, une unite abstraite ; et les differentes realisa­
tions concretes, articulees, de ce phoneme en sont les allophones.
32
Introduction
a la phonetique
comparee
Les allophones des consonnes et voyelles de l' AN.A et du
F.N.A figurent dans les tableaux 2.3 a 2.6.
Revenons maintenant aux enonces 1 et 2 presentes plus tot en
transcription large, en transcription phonernique. Transcrits finement
(phonetiquernent, en tenant compte des allophones), ces enonces se
presentent comme en lb et 2b :
2.2.4
1
la
lb
Marie vivra en ville.
Imari vivra a vil/
[mari vivra a vII]
2
2a
2b
Pat spends his
/pset spsndz hrz
[phret spsndz hrz
mult:
I'uvr
zone
appa
tradi
comr
varia
des \
libre ,
l'util
locut
geog :
time praying for peace
tajm pJellJ
f::>J pis I
th~m ph.re:llJ far phi:s]
La variante libre
Deux ou plusieurs sons sont des allophones d'un meme
phoneme s'ils ne figurent jamais dans un meme entourage phonique.
Par exemple, en F.N .A., la voyelle « i» du mot «ville» est
toujours prononcee [I] [vIl], tandis qu'elle est prononcee [i] dans les
mots « vie» [vi] et « village» [vilay]. De la meme maniere, en
AN.A, la consonne « p » est toujours articulee [ph] quand elle est
situee en debut de mot (Pat [phret]), [p] apres la consonne « S »
(spat [spret]), et [pO] ala fin du mot (tap [teep'j). Cela revient a dire
que la presence d 'un allophone donne est determinee par le contexte,
de sorte qu'une regle peut prevoir son apparition.
II Y a des cas, en revanche, pour lesquels il n' est pas
possible de rendre compte d'une substitution au moyen d 'une regle
systematique. Par exemple, en F.N.A, la consonne Irl se realise sur
Ie plan articulatoire de diverses manieres : par un battement unique
sur les alveoles (ce son est note [r] et il est identique au son qu' on
retrouve dans le mot espagnol «pero»), par des battements
17 V I
18 I
voye
« r »
syste
Les svsternes phonetiques du francais et de I'anglais
\. et du
; tot en
iernent
nces se
multiples sur les alveoles ([r]), par une friction ou un battement sur
I'uvule ([R]), enfin, par un retrecissement du conduit vocal dans la
zone du palais mou ([ g]) 17. Pourtant, cette variation n 'obeit
apparemment a aucune regle proprement ditel". On designe
traditionnellement ces prononciations dont 1'usage, dans une
cornmunaute, varie sans etre determine par un contexte phonique, de
variantes libres. Ainsi, les sons [r], [r], [R] et [g] seraient en F.N.A.
des variantes libres du phoneme lt]. Bien que cette variation so it
libre, il reste qu'on observe chez chaque locuteur une tendance dans
I 'utilisation de l'une ou I' autre variante. Cette variation entre les
locuteurs est liee a des facteurs sociaux ainsi qu'a la provenance
gecgraphique.
Tableau 2.3.
[i:]
[I]
meme
mique.
~» est
ansles
ere, en
elle est
e«s»
t a dire
mtexte,
[~]
[E]
[re]
[a:]
[0:]
[d]
[1\ ]
[:):]
[QjV]
[u:]
[u]
[m]
.st pas
e regle
lise sur
unique
I qu'on
ernents
33
[~]
[Qi] -
- [~]
[~]
Allophones de I'anglais nord-amerlcaln
Les voyelles
bead, see, pea
bid, sit, pity
bake, hay, beige
head, bed,said
hat, apple
par, car
paw, heart, hot
purr, were, sir, above
fun, come, dove
paw, caught
load, go
food, nude, who
book, full
cry, hide
house, how
bOY,oil
17 Voir chapitre 4, section 4.2.6.
18 II semble, selon Tousignant (1987), que la nature de la consonne ou de la
voyelle precedente soit fortement reliee au mode d 'articulation de la consonne
« r » . Toutefois, il ne s'agit Iii que d'une tendance et non d 'une regie
systematique.
34
Int roducti on
a la phonetique
Le
comparee
Tal
Tableau 2.4. Allophones de I'anglais nord-amertcaln
Les consonnes
[p]
[ph]
[pO]
[b]
[t]
[th]
[to]
[d]
[k]
[k h]
[kg]
[g]
[f]
[v]
[8]
[5]
[s]
[z]
U1
[3]
[.!§]
[dz]
(ill
[Q3]
[m]
[n]
[r]
[{) ]
spin, spill
[1]
pin, pot
[t]
cup, tip
[J]
bat
[w]
[j]
still , stall
till, tall
[h]
[M. ]
cat, lot, fault
[~]
do , begged
skin, skill
cat , kill , chemist
bunk, back
goat, ghost, guard
fine, rifle
vine, Stephen
thief
that, father
sit , rice , scissors
buzz, disease, scissors
ship, sugar, lash
measure, collage
ritz , blitz
ads
chance, match, nature
jam, edge
mummy
run
runner, Barney
bank, sin ger, ring
lamb, hello
gull, ballpark
ran, stirring
wet, quite,
yet, onion
hat , reheat
whales, whine
hues, Houston, Hugh
voyelles
[i]
[I]
[i:]
ill]
[y]
[y]
[y:]
[ty]
[e]
[e:]
[til
[0]
[0: ]
[®]
[E]
[E:]
[~]
n-n
[ee]
[ee:] ([d:])
[1!Y]
[a]
19 De l'angl,
Les svsternes phonet iques du f rancais et de I'anglais
n
:h
35
Tableau 2.5. Allophones du francais nord-amerlcaln
Les voyelles
voyelles orales
ni , gris , fusil
[i]
pipe, mille
[I]
friser, eirer
[i:]
frise, eire, jeans
ill]
du, nue, humide
[y]
[y]
jupe,buche
[y:]
juger, abuser
juge, abuse, ruse
[U]
etude, mai, jouer
[e]
brequer
[e:]
breque, stea k 19
[~]
peu,deux
[0]
jefmer, creuser
[0:]
jefme, creuse
[®]
eleve, faite,
[8]
fesse, jouet
[8:]
feter, neiger
fete , neige
rei]
menu, je, meuble
[re]
[re:] ([a :]) fleurir, apeurer
fleur, peur
[~]
patte,a
[a]
o-n
19 De l'anglais
«
voyelles orales
cou, pouvoir
[u]
bouche, soupe
[u]
mouver, bouger,
[u:]
courir
bouge, cams, suit
[®,]
ego, au, eau
[a]
[a :]
rosee , saucer,
enjoler
rose, sauce, toast
[@']
[:> ]
loge, police
[0]-[:>] rat , Canada
[0:] - [:> :] passer, pateux
pa sse, pate, sport,
[~]
voyelles nasales
[e]
matin, plein,
main
princesse
[e:]
prince, sainte
[[j]
defunt,
brun,
[~]
emprunt
lundi, emprunter
[~:]
emprunte, defunte
[®]
[5]
taon, long
monter, tomber
[5 :]
monte, tombe
[~]
[a]
temps, an , chant, lent
[a:]
chanter, grandir,
lenteur
chante, grande, lente
[awl
steak » (fr. tranche de viande de boeuf).
36
Introduction
a la
phonetique comparee
Tableau 2.6. Allophones du francais nord-amerlcaln
Le s consonnes
[p]
[b]
[t]
[d]
[k]
[g]
[f]
[v]
[s]
pipe , apte
bas, abbe
toute , meeting, theatre
doux, fade
cou, kepi , qui, grecque
gout, guitare
fin, souffle, pharmacie
vin, vallee, wagon
si, -;a, assis, ici
[z]
zoo , bise
ch ou, chaque
U1
joue, bougie
[3]
tu, tire
I:!§]
du , d ire
[Q.?:]
[ill
ch ip, sandw ich, tchequ e
job, j ean s
[Q;j]
[m]
rna, gamma, lam e
[n]
ni, annee, ane
epargner,
agneau, signa l, gnocchi,
[11]
epargn e, signe, beigne,
[0]
[1]
la, allo
[r] - [R] - [s] - [r] rue, nourrir, par
fille, yatch , million,
[j]
[q]
huile , muet
oui, watt
[w]
2.3
BIBEA
CARTI
CATFC
CRYSl
GER M
G ER M
GLEN
HYM A
LADE]
LYON
PICAR
PULL;
TaUS]
Les svsternes phonetiques du francais et de I'anglais
lin
icchi,
2.3
37
Lectures suggerees
BIBEAU, G. (1975), Introduction
francais, Montreal, Didier.
a la grammaire generative du
CARTIER, F. et M. TODARO (1971), The Phonetic Alphabet,
Iowa, William C. Brown.
CATFORD, J. (1977) , Fondamental Problems in Phonetics,
Bloomington, Indiana University Press.
CRYSTAL, D. (1985), A Dictionnary ofLinguistics and Phonetics
(2 e edition), Oxford, Blackwell.
GERMAIN, C. et R. LEBLANC (1981), Introduction a la
linguistique generale, La phonetique, vol. 1, Montreal , Les
Presses de I'Universite de Montreal.
GERMAIN, C. et R. LEBLANC (1981), Introduction a la
linguistique generale. La phonologie, vol. 2, Montreal, Les
Presses de I'Universite de Montreal.
GLEASON, H.A. (1967), An Introduction to Descriptive
Linguistics, Holt, Tinehart et Winston.
HYMAN, L.M. (1970), Phonology: Theory and Analysis, New
York, Holt , Rinehart and Winston.
LADEFOGED, P. (1990), « The Revised International Phonetic
Alphabet » , dans Language, vol. 66, nO 3, p. 550-552.
LYONS, J. (1970), Linguistique genera le , Paris, Librairie
Larousse.
PICARD, M. (1987) , An Introduction to the Comparative Phonetics
of English and French in North America, Studies in the
Sciences of language Series, nO 7 (SSLS), Amsterdam/
Philadelphie, John Benjamins Publishing Company.
PULLAM, G. et W. LADUSAW (1986), Phonetic Symbol Guide,
Chicago, Chicago University Press.
TOUSIGNANT, C. (1987), La Variation sociolinguistique. Modele
quebecois et methode d'analyse, Sainte-Foy, Les Presses de
I'Universite du Quebec.