guide de l`enseignant au château de chantilly

Transcription

guide de l`enseignant au château de chantilly
GUIDE DE L’ENSEIGNANT
AU
CHÂTEAU DE CHANTILLY
Présentation du château et des collections du musée Condé
Ressources en ligne : http://crdp.ac-amiens.fr/crdp/ingedoc/carte_ressources/chateau_chantilly.htm
Service éducatif - janvier 2004
SOMMAIRE
Renseignements pratiques pour votre visite,
p. 3
Tarifs de visites en vigueur depuis le 1er avril 2002,
p. 4
Chantilly et l’histoire de France : chronologie,
p. 5
Histoire du château et du parc de Chantilly,
p. 7
Plan du parc de Chantilly avant Le Nôtre et aujourd’hui,
p. 10
Les principaux seigneurs de Chantilly,
p. 12
Localisation des œuvres célèbres du musée Condé,
p. 16
Suggestions de visites à thèmes dans les collections de peinture,
p. 16
La bibliothèque du musée Condé,
p. 19
Décor et mobilier au musée Condé ; les collections du grand château,
p. 22
Décor et mobilier au musée Condé ; les collections du petit château,
p. 26
Conception et réalisation : Bernard Chambon, Françoise Marengo, Nathalie Rambault.
2
Institut de France
Château de Chantilly – Musée Condé
RENSEIGNEMENTS PRATIQUES
pour votre visite
Adresse : MUSEE CONDE - B.P. 70243 - 60631 Chantilly Cedex.
Standard : Tél. 03.44.62.62.62 Fax 03.44.62.62.61
Service des visites (réservations) : Tél. 03.44.62.62.60
SERVICE EDUCATIF DU MUSEE :
Fax 03.44.62.62.68
tél. et fax : 03.44.58.24.30
[email protected].
Jours et heures d’ouverture
Parc ouvert tous les jours, Château ouvert tous les jours sauf le mardi.
Heures d’ouverture : du 1er mars au 31 octobre : 10h à 18h
du 1er novembre au 28 février : 10h30 à 12h45 et 14h à 17 h.
Les différents types de visite pour le public scolaire
Visites libres avec dossier thématique de
parcours découverte
Galeries de peinture, Cabinet des livres, Chapelle,
expositions temporaires.
Les dossiers de parcours découverte comprennent
des fiches destinées aux enseignants et un cahier de
visite pour les élèves.
Dossiers gratuits en téléphonant au : 03.44.58.24.30.
Réservations : 03.44.62.62.60
Ateliers du Hameau
Ils ont lieu dans le hameau d'agrément édifié par le
prince de Condé en 1774 au cœur du parc.
Les participants doivent apporter un pique-nique et se
munir de vêtements appropriés au temps et à la
saison.
Les ateliers comprennent généralement une visite du
musée ou du parc en rapport avec le thème choisi et
les élèves repartent avec l’objet réalisé au cours de
l’atelier. 30 élèves maximum.
Durée : de 9 h 30 à 15 h 30.
Renseignements : 03.44.58.24.30
Visites explorations
Chaque élève reçoit un questionnaire qu’il complète
durant la visite sous la conduite d’un animateur, qui lui
apporte les informations nécessaires et présente des
éléments extraits d’une valise pédagogique. Différents
thèmes sont proposés aux élèves des écoles
maternelles et primaires. Durée : environ 1 h 30.
Réservations . 03.44.62.62.60
Visites conférences à thèmes
Visites à thème en rapport avec les programmes
scolaires du second degré, assurées par les
conférencières agrées par le musée Condé.
Réservations : 03.44.62.62.60.
Durée de la visite conférence : 1h30.
Un bon de commande daté et signé est exigé pour
toute demande de visites-conférences. Cette
prestation doit être réglée le jour de la visite, sous
forme de chèque libellé au nom du régisseur du
Musée Condé (sauf cas exceptionnel accordé par le
service des visites). Elle sera facturée si l’annulation
de la visite ne nous parvient pas 7 jours francs avant
la date de la visite.
Règlement de visite
En cas de non respect des horaires indiqués
dans la réservation, le groupe ne sera pas
obligatoirement pris en charge à l’arrivée, mais
lorsque le planning journalier le permettra.
Pour les visites-conférences, tout retard dans
les horaires entraînera une diminution de la durée de
la prestation.
En cas de fermeture partielle du Musée, les
prix restent inchangés.
Pour toute demande de règlement sur facture
des droits d’entrée ou pour les visites-conférences, un
bon de commande daté et signé sera exigé lors de la
réservation.
3
TARIFS DE VISITE EN VIGUEUR
DEPUIS LE 1er AVRIL 2002
Musée et Parc :
Adultes individuels
Groupes d’adultes (à partir de 20 personnes)
Enfants individuels entre 4 et 12 ans
Groupes d’enfants 4 - 12 ans (à partir de 20 personnes)
Enfants entre 13 et 17 ans
Groupes d’enfants entre 13 et 17 ans (à partir de 20 personnes)
Etudiants, famille nombreuse (présentation de la carte)
7.00 euros
6.00 euros
2.80 euros
2.40 euros
6.00 euros
4.20 euros
6.00 euros
Parc uniquement :
Adultes (individuel ou en groupe)
Enfants entre 13 et 17 ans (individuel ou en groupe)
Enfants entre 4 et 12 ans (individuel ou en groupe)
3.50 euros
3.50 euros
2.00 euros
Activités pédagogiques proposées par le musée Condé :
Visites explorations : supplément cahiers par classe de 30 élèves
Ateliers du Hameau : forfait individuel entrée + activité :
(Chantilly et communes conventionnées)
maternelles :
primaires :
10.00 euros
3.00 euros
Supplément pour les visites conférences ;
Forfait groupe adultes ou enfants
84.60 euros
Gratuité :
7.65 euros
30.50 euros
1 accompagnateur gratuit pour 10 enfants 3-11 ans payants.
Adhérents des Amis du musée sur présentation de leur carte.
Du 1er septembre au 30 avril pour les classes des communes suivantes :
Chantilly, Gouvieux, Lamorlaye, Avilly St Léonard, Vineuil St Firmin, Coye-laForêt.
Sur présentation des cartes professionnelles : - Les chauffeurs de cars. - Les
guides-conférenciers accompagnateurs de groupe.
Enseignants reçus par le service éducatif uniquement.
Pour toutes autres demandes, consulter le service des visites :
tél. 03 44 62 62 60 télécopie 03 44 62 62 68
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CHANTILLY ET L’HISTOIRE DE FRANCE : CHRONOLOGIE
Histoire politique
Renaissance
1494 – 1516 : Guerres d’Italie.
1515 – 1547 : François Ier.
1547 – 1559 : Henri II.
1562 – 1589 : Guerres de Religion.
1567 : Mort du connétable Anne de
Montmorency à la bataille de
Saint- Denis.
1589 – 1610 : Henri IV.
1598 : Edit de Nantes.
Histoire artistique et culturelle
Renaissance
Chantilly
Renaissance
1515 :Léonard de Vinci est invité par 1528 : Anne de Montmorency fait
er
François I .
transformer le château médiéval en
1519 :Construction de Chambord.
« maison de plaisance » par
1530 :Collège de France.
l’architecte Pierre Chambiges.
1531 :Le Primatice est invité par 1558 : Jean Bullant commence à
er
François I . Début des travaux de
construire le petit château pour
Fontainebleau.
Anne de Montmorency.
1549 :Défense et illustration de la
langue française, manifeste poétique
édité sous la direction de Du Bellay.
Grand Siècle
Grand Siècle
Grand Siècle
1610 – 1643 : Louis XIII.
1624 – 1642 : Ministère du cardinal de
Richelieu.
1643 – 1661 : Ministère du cardinal de
Mazarin.
1638 :Naissance de Louis XIV.
1648 – 1653 : La Fronde, révolte des
nobles contre le pouvoir royal,
dirigés par le Grand Condé, qui
doit s’enfuir et se met au service
de l’Espagne.
1659 : Paix des Pyrénées entre la
France et l’Espagne.
1661 : Début du pouvoir personnel de
Louis XIV.
1665 : Annexion de la Flandre par
Turenne et de la Franche-Comté
par le Grand Condé.
1672 – 1678 : Guerre de Hollande.
1681 : Annexion de Strasbourg.
1683 : Mort de Colbert.
1685 : Révocation de l’Edit de Nantes.
1688 – 1697 : Guerre de la Ligue
d’Augsbourg.
1701 – 1713 : Guerre de succession
d’Espagne.
1715 : Mort de Louis XIV.
1635 : Richelieu crée l’Académie
française.
1636 : Le Cid, de Corneille.
1640 – 1642 : Séjour de Poussin à
Paris.
1659 : Les Précieuses ridicules, de
Molière.
1661 : Fête de Vaux-le-Vicomte et
arrestation de Fouquet. Louis
XIV fait appel à Le Brun, Le Vau
et Le Nôtre pour aménager
Versailles.
1664 : Les Plaisirs de l’île enchantée,
fête donnée à Versailles, où est
représenté Le Tartuffe de
Molière, et aussitôt interdit.
1668 : Les Fables, de La Fontaine.
1673 : Mort de Molière.
1674 : L’Art poétique, de Boileau.
1677 :Phèdre, de Racine.
1680 : Création à Paris de la ComédieFrançaise.
1688 : Les Caractères, de La Bruyère.
1689 : La Galerie des Glaces à
Versailles, par Jules HardouinMansart.
ère
1693 : 1 commode de l’ébéniste
Boulle.
1623 : Henri II de Montmorency héberge le
poète persécuté Théophile de Viau
dans la maison de Sylvie.
1632 : Après l'exécution d'Henri II de
Montmorency, qui a comploté
contre Louis XIII, Chantilly est
confisqué par le roi.
1643 : Après la victoire à Rocroi de Louis II
de Bourbon, dit le Grand Condé,
Louis XIII restitue Chantilly à sa
mère, sœur d’Henri II de
Montmorency. Le château est de
nouveau confisqué au Grand
Condé par Mazarin durant la
Fronde. La paix des Pyrénées
(1659) lui permet de revenir à
Chantilly.
1662 – 1684 : Le Grand Condé fait appel à
Le Nôtre pour aménager le parc en
jardin à la française.
1668 : Molière joue Tartuffe à Chantilly.
1671 : Fête célébrant la réconciliation de
Louis XIV et du Grand Condé.
Suicide de Vatel.
1677 : Inauguration du pavillon de Manse.
1686 : Mort du Grand Condé.
Siècle des Lumières
Siècle des Lumières
1721 : Montesquieu : Lettres persanes.
1721 : L’Enseigne de Gersaint, tableau
de Watteau.
1730 : Marivaux : Le Jeu de l’amour et
du hasard.
1745 : Installation des Chevaux de
Marly, sculptés par Coustou.
1746 : Diderot : Pensées
philosophiques.
1748 : Montesquieu : L‘Esprit des lois.
1750 : Mémoires de Saint-Simon.
er
1751 : 1 volume de l’Encyclopédie de
Diderot et d’Alembert
1758 : Voltaire : Candide.
1762 : Rousseau : Le Contrat social.
1763 : Voltaire : Traité sur la tolérance.
1764 : Soufflot commence à construire
l’église Sainte-Geneviève (futur
Panthéon).
1710 : Louis-Henri de Bourbon, arrièrepetit-fils du Grand Condé, hérite
Chantilly.
1718 :Reconstruction du Grand Château
par Jean Aubert.
1719 - 1735 : Construction des Grandes
Ecuries par Jean Aubert.
1730 : Débuts de la manufacture de
porcelaine de Chantilly.
1740 : Mort de Louis-Henri. Son fils LouisJoseph, prince de Condé lui
succède.
1756 : Construction du Jeu de Paume par
Claude Billard de Bellisard pour
Louis-Joseph de Bourbon.
1769 : Construction du château d’Enghien
par Jean-François Leroy.
1772 – 1774 : Aménagement du Hameau
et de son jardin.
5
Siècle des Lumières
1715 – 1723 : Régence de son neveu
Philippe d’Orléans.
1716 – 1720 : Tentative avortée de
banque royale et scandale
financier dû à John Law.
1723 – 1774 : Règne personnel de
Louis XV.
1723 – 1726 : Ministère de Louis-Henri
de Bourbon. Mariage du roi avec
Marie Leczinska.
1726 – 1743 :Ministère du cardinal de
Fleury.
1740 – 1748 : Guerre de Succession
d’Autriche.
1756 – 1763 : Guerre de Sept Ans.
1762 : Le prince de Condé remporte la
victoire de Johannisberg.
1765 – 1771 :Révolte des Parlements.
1774 : Avènement de Louis XVI. Echec
de Turgot (1774-1776) puis de
Necker (1776-1781).
1778 – 1783 : La France participe à la
guerre d’Indépendance
américaine.
Révolution française
Panthéon).
et de son jardin.
er
1775 : Achèvement de la place Louis XV 1782 : Le comte du Nord, futur tsar Paul I
(Concorde) par Gabriel.
est reçu à Chantilly.
1776 : Jardin d’Ermenonville, par le
marquis de Girardin.
1784 : Première du Mariage de Figaro,
de Beaumarchais.
1785 : Le Serment des Horaces, tableau
de David.
Révolution française
Révolution française
1789 : Ouverture à Versailles des Etats
Généraux. Prise de la Bastille.
1792 : Louis XVI est déposé. La
république est proclamée.
1793 : Exécution du couple royal.
1799 : Coup d’Etat de Bonaparte.
1804 : Enlevé en Allemagne, le duc
d’Enghien est fusillé à
Vincennes sur ordre de
Bonaparte qui peu après se fait
proclamer « empereur des
Français ».
1791 : Le Serment du Jeu de paume,
tableau de David.
1792 : Chant de guerre pour l’armée du
Rhin, future Marseillaise, par
Rouget de Lisle.
1793 : Marat expirant, tableau de David.
1795 : Sade : La Philosophie dans le
boudoir.
1789 : Départ en exil le 17 juillet de LouisJoseph avec son fils Louis-HenriJoseph et son petit fils le duc
d’Enghien. Ils dirigeront l’armée
des Emigrés. Le domaine de
Chantilly est donc confisqué
comme bien national puis loti et
vendu aux enchères.
1798 : Démolition du Grand Château.
Dix-neuvième siècle
Dix-neuvième siècle
Dix-neuvième siècle
1815 : Restauration des Bourbons :
règne de Louis XVIII.
1824 : Avènement de Charles X.
1830 : Révolution parisienne (« Les trois
Glorieuses »). Louis-Philippe
devient « roi des Français ».
1843 : Prise de la smalah d’Abd-elKader par le duc d’Aumale.
1848 : Révolution et proclamation de la
e
II république.
1851 : Coup d’Etat de Napoléon III et
second empire.
1870 : Guerre franco-allemande et
e
proclamation de la III
république.
1873 : Querelle du drapeau entre
royalistes.
1875 : Lois constitutionnelles.
1879 : Démission de Mac-Mahon.
1880 :14 juillet : fête nationale.
1881 : Lois sur la presse et l’école.
1883 : Mort du comte de Chambord.
1886 : Loi d’expulsion des princes.
1887 – 1889 : crise boulangiste.
1889 : Inauguration de la Tour Eiffel.
1892 : Scandale de Panama.
1894 : Condamnation de Dreyfus.
1898 : « J’accuse », d’Emile Zola.
1819 : Le Radeau de la Méduse,
tableau de Géricault.
1820 : Les Méditations, de Lamartine.
1830 : La Symphonie fantastique, de
Berlioz.
Stendhal : Le Rouge et le Noir.
1833 : Balzac : Eugénie Grandet.
1834 : Femmes d’Alger dans leur
appartement, tableau de
Delacroix.
1841 : Chateaubriand : Mémoires
d’Outre-tombe.
1856 : Flaubert : Madame Bovary.
1857 : Baudelaire : Les Fleurs du Mal.
1862 : Hugo : Les Misérables.
1872 : Impression, soleil levant, tableau
de Monet.
1873 : Rimbaud : Une saison en enfer.
1875 : Carmen, opéra de Bizet.
1883 : Maupassant : Une vie.
1885 : Zola : Germinal.
1888 : Les Bourgeois de Calais,
sculpture de Rodin.
1890 : Mort de Van Gogh.
1895 : Onze études de la Montagne
Sainte-Victoire, par Cézanne.
1815 : Revenu d’exil, Louis Joseph rachète
ses terres de Chantilly. Le fossé
qui sépare les deux châteaux est
comblé.
1818 : Mort de Louis Joseph.
1819 : Création du jardin anglais par Victor
Dubois.
1830 : Mort de Louis Henri Joseph qui
lègue Chantilly au duc d’Aumale,
fils de Louis-Philippe d’Orléans.
1834 : Création du champ de courses.
1844 : Le duc d’Aumale s’installe à
Chantilly après son mariage.
1846 : Aménagement par Félix Duban
d’une galerie en bois à l’extérieur
du petit château.
1848 : Exil du duc d’Aumale en Angleterre.
Il y collectionne livres, tableaux et
dessins.
1870 : Retour en France du duc d’Aumale.
1875 – 1885 : Honoré Daumet reconstruit
le Grand Château.
1884 : Testament du duc d’Aumale par
lequel il lègue Chantilly à l’Institut
de France.
e
1886 – 1889 : 2 exil du duc d’Aumale.
1886 : Le duc d’Aumale transforme son
legs en donation à l’Institut de
France.
1889 : Le Logis inclus dans le musée.
1897 : Mort du duc d’Aumale en Sicile.
1898 : Ouverture au public du château de
Chantilly sous le nom de musée
Condé.
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HISTOIRE DU CHATEAU ET DU PARC DE CHANTILLY
CHANTILLY AU MOYEN AGE ET SOUS LA RENAISSANCE : DES ORGEMONT AUX MONTMORENCY
Chantilly fut d'abord un château avant d'être une ville. Construite sur un rocher parmi les
marécages de la vallée de la Nonette, la forteresse contrôlait la route de Paris à Senlis. Les Bouteiller,
premiers seigneurs de Chantilly, avaient la responsabilité de la cave des princes à la cour des Capétiens,
d'où leur patronyme. Les guerres des XIVe et XVe siècle ravagèrent la contrée et dès 1358, les Jacques
pillèrent le château, qui fut par la suite vendu à Pierre d'Orgemont, ancien chancelier de Charles V, avant
d'échoir par héritage à la famille de Montmorency en 1484.
Le connétable Anne de Montmorency,
familier de François Ier et de Henri II, décida, au
retour des guerres d'Italie, d'embellir Chantilly et
d'y réunir des collections de livres et d'objets
d’art, à l'imitation des seigneurs de la
Renaissance italienne.
En 1527 l'architecte Pierre Chambiges
rénove le Grand Château et, vers 1560, Jean
Bullant construit le Petit Château, appelé "Logis
neuf". C'est également à cette époque que
furent créés les premiers jardins de Chantilly.
Chantilly vers 1530, gravure de Du Cerceau.
En 1538 fut construite une vaste terrasse
donnant accès au château.
Ressources pédagogiques :
- Dossier de parcours découverte sur la Renaissance française à Chantilly.
- Dossier de parcours découverte sur les peintures de la Renaissance italienne au musée
Condé.
- TICE : cédérom pédagogique sur les Clouet de Catherine de Médicis (SCEREN-CRDP
Amiens).
CHANTILLY AU DEBUT DU XVIIE SIECLE : LA MAISON DE SYLVIE ET THEOPHILE DE VIAU
La maison de Sylvie, dans la partie haute
du parc, rappelle le souvenir du poète Théophile
de Viau. Né en 1590, d’une famille protestante
de Clairac, dans l’Agenais, esprit libre en
mœurs comme en paroles et volontiers
sceptique en matière religieuse, il fut mêlé à des
intrigues de cour sous Louis XIII et crut se
protéger des foudres des Jésuites en entrant au
service du duc Henri II de Montmorency, le
petit-fils du connétable Anne et donc seigneur
de Chantilly.
La Maison de Sylvie, gravure de Langlois.
Condamné à mort par le Parlement de
Paris pour des vers libertins qu’on lui attribuait, Théophile fut exécuté en effigie sur la place de Grève. Il
se réfugia à Chantilly, dans une maison construite pour recevoir Henri IV, près de l’étang où la duchesse
de Montmorency venait souvent pêcher et se reposer.
Sylvie est le surnom poétique donné à la duchesse par Théophile. Celui-ci fut cependant arrêté,
alors qu’il tentait de se réfugier aux Pays-Bas espagnols, mais, jugé à nouveau et condamné au
bannissement perpétuel après un an de détention à la Conciergerie, il bénéficia encore de la protection du
duc de Montmorency qui lui permit de passer à Paris et à Chantilly les derniers mois de sa brève
existence. Il mourut en 1626, la santé détruite par les conditions de son emprisonnement.
Théophile, auteur aujourd’hui oublié de poèmes et d’une tragédie qui fut célèbre, Pyrame et Thisbé,
fut admiré de son vivant et longtemps après sa mort. Il fut considéré comme un modèle à suivre par de
nombreux écrivains du Grand Siècle, à l’exception notable toutefois de Malherbe.
7
Ressource pédagogique :
- Prêt de panneaux d’exposition + 1 vidéo VHS (10 mn) sur Théophile de Viau
(téléphoner au 03 44 58 24 30).
CHANTILLY AU TEMPS DU GRAND CONDE
En 1632, Henri II de Montmorency fut
décapité pour avoir conspiré contre Richelieu.
Avec lui s'éteignait la branche aînée des
Montmorency, et Louis XIII, qui aimait beaucoup
Chantilly, se réserva le domaine où il venait
souvent chasser.
En 1643, Anne d'Autriche rendit Chantilly
à la sœur d'Henri II de Montmorency, dont le fils
qu’elle avait eu de son mariage avec Henri II de
Bourbon, troisième prince de Condé, venait de
s’illustrer brillamment à la bataille de Rocroi
sous le titre de duc d'Enghien.
Mais ce dernier prit parti contre Mazarin
pendant la Fronde et Chantilly fut de nouveau
confisqué par le roi en 1652. Il fallut attendre la
Chantilly après 1686, gravure de Mariette.
grâce imposée par l’Espagne lors de la paix des
Pyrénées en 1659, pour que le duc d'Enghien,
devenu le Grand Condé, retrouvât Chantilly.
Il consacra désormais tous ses efforts à son domaine, dans l’attente d’être de nouveau admis à la
cour de Louis XIV.
Aidé des mêmes jardiniers et architectes qui travaillaient au même moment à Versailles, tels Le
Nôtre ou Mansart, il fit alors réaménager entièrement les abords du château. Le parc de Chantilly ainsi
remodelé était celui que Le Nôtre préférait d’entre tous les jardins qu’il avait créés, comme il l’avoue luimême dans une des rares lettres qu’il nous a laissées, écrite à l’ambassadeur d’Angleterre, le duc de
Portland. La majorité des écrivains et des artistes du Grand Siècle furent reçus à Chantilly par le Grand
Condé, qui se réconcilia avec le roi au cours de la célèbre fête de 1671, marquée par le suicide de Vatel
qu’a relaté Madame de Sévigné. Il participa encore à quelques campagnes militaires aux côtés du roi,
puis il cessa de guerroyer et se consacra à son rôle de mécène jusqu'à sa mort, survenue en 1686.
Ressource pédagogique :
- Dossier de parcours découverte sur Chantilly au XVIIe siècle
LE JARDIN FRANÇAIS DE LE NOTRE
Chantilly au XVIIe siècle, gouache sur vélin.
André Le Nôtre dessina pour le Grand Condé un parc
à la française avant 1663 et travailla avec son neveu,
l’architecte paysagiste Claude Desgots.
Lieu marécageux, Chantilly va se transformer grâce à
l’intervention de Le Nôtre en site enchanteur où se
multiplieront les fêtes, les feux d’artifice, les concerts et les
bals qui feront la joie des invités des princes de Condé.
Le Nôtre dut domestiquer les eaux : la Nonette,
canalisée, devint le Grand Canal (1672-1673), traversant le
parc d’est en ouest.
Deux grands axes orthogonaux ont été définis par le
Nôtre : l’un est parallèle au Grand Canal, l’autre franchit la
Grille d’honneur, gravit la terrasse du Connétable, redescend
le Grand Degré vers les parterres, et monte vers la
perspective du Vertugadin, ce vaste hémicycle de pelouse
qui fait face au château, avant de s’enfoncer dans la forêt.
8
Chantilly est le seul des jardins de Le Nôtre où le château n’est pas situé au croisement des axes
principaux : c’est la statue équestre du connétable de Montmorency qui occupe le centre de la
perspective.
En contrebas de la terrasse ne sont encore visibles aujourd’hui que les parterres composés
simplement de compartiments de gazon et de bassins en leur centre.
LES BOURBON CONDE ET LA VILLE DE CHANTILLY
Pour les serviteurs qui logeaient sur
place, le fils du Grand Condé, Henry-Jules,
fit ériger Chantilly en paroisse en 1692.
On doit au fils de ce dernier, LouisHenri, duc de Bourbon, né cette même
année 1692 et appelé couramment
« Monsieur le Duc », la construction des
Grandes Ecuries (1719-1735), confiée à
l'architecte Jean Aubert, ainsi que les débuts
de la manufacture de porcelaine de
Chantilly. Ami du Régent, enrichi par le
système de Law, et ministre de Louis XV, il
négocia le mariage du roi avec Marie
Leszczynski et la combinaison diplomatique
qui apporta la Lorraine à la France. Ce fut
également lui le véritable créateur de la ville
de Chantilly, dont il traça le premier plan.
Les Grandes Ecuries abritent aujourd’hui le musée vivant du Cheval.
(tél. 03.44.57.40.40.)
Le petit parc et ses divertissements
Au début du XVIIIe siècle, le duc de Bourbon fit animer la partie boisée et surélevée du parc située
au sud-est du château et des parterres, implantant des attractions de toutes sortes : la plus remarquable
était un gigantesque jeu de l’oie dont les pions étaient les invités des fêtes de Chantilly, mais il est
malheureusement très endommagé aujourd’hui. D’autres attractions, plus habituelles dans les parcs
princiers, consistaient en un jeu de paume, un jeu du battoir, et bien sûr un labyrinthe, disparus de nos
jours. La maison de Sylvie où séjourna Théophile de Viau fait aujourd’hui partie du petit parc.
Le jardin anglo-chinois du Hameau
A la fin du XVIIIe siècle, la nature était à la mode,
promue par Jean-Jacques Rousseau et par les
philosophes.
Le prince de Condé fit alors élever par son
architecte Jean-François Leroy un groupe de maisons
rustiques, le Hameau (1774), qui fut le modèle du
Hameau de la reine Marie-Antoinette à Versailles. Les
maisons étaient luxueusement meublées, par contraste
avec un aspect extérieur rustique. Cinq des sept petites
Album du comte du Nord : vue extérieure du Salon.
maisons construites dès l'origine ont été conservées, le
salon, le billard, la salle à manger, la cuisine et le moulin.
Lieu de fêtes et de plaisirs utilisé ordinairement l’été, le Hameau reçut de nombreux invités dans la
décennie qui précéda la Révolution. On s’y rendait généralement en “ pirogue ”, en s’arrosant
copieusement au milieu des rires. Des poètes appointés par les princes composaient des vers de mirliton,
que déclamaient en chantant des domestiques costumés en paysans et en bergères pour accueillir les
visiteurs.
Un jardin anglo-chinois, dans le goût du temps, entourait le Hameau ; un lacis de petits canaux,
qu’enjambaient des ponts de rochers, rafraîchissait le site, et permettait d’agréables promenades en
barque à partir du port des Pirogues. Malheureusement, l'ensemble a pratiquement disparu.
9
LA REVOLUTION ET LA RESTAURATION
Dès le 17 juillet 1789 les princes, c’est-à-dire LouisJoseph, prince de Condé, son fils Louis-Henri-Joseph, duc
de Bourbon, et son petit-fils, Louis-Antoine-Henri, duc
d’Enghien, alors âgé de dix-sept ans, quittèrent la France
pour émigrer en Allemagne.
Leur domaine, confisqué, fut morcelé et vendu comme
bien national en 1793. Les bâtiments commencèrent à être
démantelés en 1799 par deux entrepreneurs en démolition
qui en revendaient les pierres, mais ceux-ci se virent retirer
le marché peu de temps après.
Destruction du grand château, gravure de Naudet.
Cela sauva de la destruction le petit château, les
grandes Écuries et le Jeu de Paume. Sous l’Empire, Chantilly fut donné en apanage par Napoléon à la
reine Hortense.
A son retour d'exil, le prince de Condé s'efforça de reconstituer ses domaines. Il mourut en 1818
sans en voir l’achèvement, laissant le domaine à son fils, le duc de Bourbon.
Le jardin anglais (1818-1820)
Le jardin anglais et le temple de Vénus.
Au retour d’émigration, le prince de Condé trouva
saccagée la partie du jardin de Le Nôtre qui s’étendait à
l’ouest du château, face aux Grandes Écuries, entre le Jeu
de Paume et le Grand Canal.
Il confia à l’architecte paysagiste Victor Dubois le
dessin d’un parc dans le goût romantique du temps. Le jardin
anglais, tout en courbes, est caractérisé par un savant
désordre bien organisé. Plusieurs « fabriques », lieux créés
de toutes pièces par l’architecte mais qui tentent de
s’intégrer naturellement dans le paysage, furent édifiées
dans le jardin anglais, où, seule trace des fastes révolus du
temps de Le Nôtre, demeurent encore les Cascades de
Beauvais et l’Ile d’Amour, proches du Jeu de Paume.
Le pont des Grands Hommes marque aujourd’hui les
limites d’un parc qui s’étendait avant la Révolution beaucoup
plus à l’ouest derrière la ville actuelle de Chantilly.
Ressources pédagogiques :
- Dossier de parcours découverte : le
duc d’Enghien, un prince dans la
tourmente révolutionnaire.
- Atelier pédagogique au Hameau sur
le paysage et l’histoire du parc de
Chantilly, avec Edith Vallet,
paysagiste de l’agence DVA.
- Livret jeu sur les statues du parc de
Chantilly.
Autres suggestions :
- Textes littéraires : Arthur Young,
Mademoiselle Avrillion, Description
du Hameau par Le Camus de
Mezières, des écrivains à Chantilly
après la révolution : Chateaubriand,
Nerval, Anna de Noailles.
- Propositions
de
séquences
pédagogiques : à construire autour
d’une comparaison classicisme et
romantisme (tableaux et parc).
Pour en savoir plus :
Jean-Pierre Babelon : Chantilly, éd. Scala, 1999.
10
PLAN DU PARC DE CHANTILLY AVANT L’INTERVENTION DE LE NOTRE :
(d’après un plan de Du Cerceau, 1579)
PLAN DU PARC DE CHANTILLY AUJOURD’HUI :
11
LES PRINCIPAUX SEIGNEURS DE CHANTILLY
ANNE DE MONTMORENCY (1493-1567) : HOMME DE POUVOIR ET GRAND MÉCÈNE
Une des grandes figures de la Renaissance française.
Sa famille : une des plus anciennes lignées de France
dont les membres ont occupé les plus hautes charges à la
cour.
Son père : Guillaume de Montmorency (mort en
1531), général des finances et gouverneur de plusieurs
châteaux royaux. Il accompagne Charles VIII dans la
première expédition d’Italie. Fin lettré et collectionneur averti,
il constitue à Chantilly une très riche bibliothèque. Il mène
aussi une politique d’acquisitions territoriales qui lui permet
d’agrandir le domaine autour du château.
Son éducation : Anne passe une partie de son
enfance à Amboise où il est élevé avec le futur François Ier
dont il sera le compagnon fidèle, jusqu’à sa disgrâce en
1540. Il y reçoit l’éducation d’un prince moderne.
Sa carrière : A la mort de sa mère, en 1510, il
s’engage comme soldat volontaire dans la campagne d’Italie
et combat à Marignan. Dès lors, il connaît une ascension
fulgurante :
1514 : Gentilhomme de la Chambre du roi.
1522 : Maréchal de France et chevalier de SaintMichel (voir blason, vitrail de la galerie Duban).
1526 : Grand Maître de France.
1538 : Il est fait connétable (chef suprême des armées
royales).
Portrait d’Anne de Montmorency, copie
1551 : Duc et Pair de France sous Henri II.
d’après François Clouet.
1560-1574 : Sous Charles IX , il forme avec le duc de
Guise et le maréchal Saint-André un triumvirat qui, sous le prétexte de défendre la foi catholique,
s’oppose à la politique modératrice de la reine-mère, Catherine de Médicis. Il mène alors une lutte sans
relâche contre les protestants et est fait prisonnier à la bataille de Dreux (1562), sérieusement blessé, la
mâchoire fracassée d’un coup de pistolet.
1567 : Anne de Montmorency est mortellement blessé à la bataille de Saint-Denis.
Son mécénat : Il reçoit le château de Chantilly en 1522 et l’embellit grâce à son immense fortune
et à son autorité politique. Gestionnaire éclairé, il accroît ses revenus en se constituant, à travers la
France entière, un vaste domaine de 600 fiefs, 130 châteaux et 4 hôtels particuliers à Paris, notamment
celui de la rue Sainte-Avoye où il fait travailler Nicolas dell’ Abbate. De plus, sa charge de Grand Maître
de France, qui lui donne autorité sur les commandes artistiques et les travaux dans les bâtiments royaux,
lui permet d’engager des artistes travaillant sur les chantiers de Fontainebleau ou de Saint-Germain en
Laye. De 1557 à 1563, la construction du petit château à Chantilly est confiée à Jean Bullant.
De 1538 à 1555, il préside à la reconstruction d’Écouen où il fait appel notamment à Jean Goujon
et à Jean Bullant.
Deux de ses arrière-petits-fils furent comme lui de grands soldats : Turenne (1611-1675) et le
Grand Condé (1621-1686).
Ressources pédagogiques :
- Dossier de parcours découverte sur la Renaissance française à Chantilly.
- Autre suggestion : Prolonger votre visite à Chantilly par celle du musée national de la
Renaissance à Ecouen.
12
LE GRAND CONDE (1621-1686) : UN PRINCE GUERRIER ET REBELLE
Sa famille : Fils de Henri II, troisième prince de Condé
et de Charlotte-Marguerite de Montmorency. Lui-même,
épouse en 1641 Claire-Clémence de Maillé-Brézé, nièce du
cardinal de Richelieu.
Son éducation : Il reçoit l’éducation d’un prince de
son temps qui un jour pourrait devenir roi de France. Élevé
au château de Montrond, il fut placé en 1629 comme externe
chez les Jésuites de Bourges, où ses études furent brillantes
et rapides puisqu’à dix ans, il savait écrire à son père en
latin. De 1636 à 1639, sa vie se partage entre Paris, où il
complète ses études, et Dijon, où il s’initie au gouvernement
de la province.
Sa carrière : En 1640, est volontaire à l’armée de
Picardie où il fait ses premières armes et montre un grand
courage.
Richelieu, avant de mourir en 1642, recommanda au
roi de confier à ce tout jeune homme l’armée de Picardie,
face aux Espagnols qui assiégeaient Rocroi et qui
surclassaient nettement les Français, à la fois en nombre et
par la qualité de leur infanterie. Louis XIII mourut le 14 mai
Portrait de Louis II de Bourbon, dit le
1643 et le duc d’Enghien livra bataille le 18, remportant une
Grand Condé en 1653, par David Teniers.
des plus spectaculaires victoires françaises de l’Ancien
Régime, qui fit de lui le héros de toute la cour et lui permit de
prendre enfin possession de Chantilly.
De 1643 à 1648, devenu prince de Condé après la mort de son père (1646), il accumule les
victoires, souvent chèrement payées : Fribourg (1644), Nordlingen (1645), Dunkerque et Furnes (1646),
Ypres, Lens (1648), toutes représentées au musée Condé dans la galerie des Actions de Monsieur le
Prince. La victoire de Lens permit la signature du traité de Münster avec le Saint Empire (octobre 1648),
favorisant la France qui étendit alors sa frontière à l’Alsace, mais la popularité grandissante de Condé
inquiétait Mazarin, qualifié par celui-ci de « gredin de Sicile ».
Le Grand Condé et la Fronde : Lorsque la Fronde éclata, en 1649, le Grand Condé, flatté par
Anne d’Autriche et Mazarin, accepta au début de mettre ses armes au service du jeune roi, et assiégea
Paris révolté en 1649. Mais après la conclusion de la paix de Rueil, Condé, qui s’était rendu odieux à tous
par son ironie insultante et acerbe, fut emprisonné par Mazarin pendant un an avec Conti et Longueville.
Lorsque la rupture de l’alliance entre Mazarin et le Parlement le fit sortir de prison, il prit la tête de la
Fronde des Princes, et livra bataille à l’armée royale que commandait Turenne. C’est en 1652 que se
situe le fameux épisode où la duchesse de Longueville, la Grande Mademoiselle, fit donner le canon de la
Bastille contre les troupes royales pour lui permettre de se réfugier dans Paris. Obligé de s’enfuir, il fut
déchu de ses honneurs, dignités et pensions, ses biens furent confisqués et il se réfugia aux Pays-Bas
espagnols. Là, il traita avec Philippe IV, prétendant ne faire la guerre qu’à Mazarin. De 1653 à 1658, il
commanda les armées de l’Espagne dans les Flandres, ce qui le fit condamner à mort par contumace en
1654. Sa défaite à la bataille des Dunes (1658) l’obligea, ainsi que l’Espagne, à demander la paix.
Dans les négociations qui devaient se conclure par la paix des Pyrénées, le 7 novembre 1659, sa
grâce fut exigée par les Espagnols, qui s’engageaient à lui verser une pension d’un million d’écus. Louis
XIV fut obligé de lui rendre Chantilly.
Le Grand Condé et Louis XIV : A partir de son retour en grâce, Condé fut désormais le plus parfait
des courtisans, exerçant ponctuellement ses charges, présidant les États de Bourgogne, figurant dans les
fêtes officielles. Sa réconciliation officielle avec le roi fut célébrée par une grande fête donnée pour 4 000
invités à Chantilly en 1671.
Il reprit du service dans les armées royales, occupant la Franche-Comté pendant la guerre de
Dévolution (1665 - 1668). Il prit la tête de l’armée chargée d’envahir la Hollande, forçant le Rhin au gué de
Tolhuis (1672) et remportant sur Guillaume d’Orange le difficile combat de Seneffe, sa dernière grande
victoire. Après la mort de Turenne, il prit le commandement de son armée et obligea les Impériaux à
repasser le Rhin (1675). Ce fut sa dernière campagne.
13
Son mécénat : transformation du château de Chantilly dont le parc rivalise avec celui de Versailles.
Il rassembla au château de Chantilly une cour brillante d’artistes et d’écrivains, parmi lesquels il attira
surtout ceux qui fréquentaient Vaux-le-Vicomte avant la disgrâce de Fouquet : Bossuet qui plus tard fit
l’oraison funèbre du prince, La Bruyère, Boileau, La Fontaine, Racine, Molière qui monta Tartuffe, interdit
à Paris, La Rochefoucault, madame de La Fayette et madame de Sévigné.
Il mourut le 11 décembre 1686, au château de Fontainebleau, où il était accouru, bien que très
affaibli, au chevet de l’épouse de son petit-fils, la duchesse de Bourbon, elle-même malade.
Ressources pédagogiques :
- Dossier de parcours découverte sur Chantilly au XVIIe siècle.
- Atelier pédagogique au Hameau sur le paysage et l’histoire du parc de Chantilly, avec
Edith Vallet, paysagiste de l’agence DVA.
LE DUC D’AUMALE (1822-1897) : LE DERNIER FILS DU DERNIER ROI
Sa famille : Cinquième fils de la nièce de MarieAntoinette, Marie-Amélie de Bourbon-Siciles, et de LouisPhilippe, duc d’Orléans, futur roi des Français, l’enfant eut
pour parrain le possesseur du domaine de Chantilly, LouisHenri de Bourbon, prince de Condé, dont le fils unique, le
duc d’Enghien, avait été enlevé en Allemagne pour être
fusillé sur ordre de Bonaparte au château de Vincennes en
1804.
Son éducation : Il bénéficia d’une éducation à la fois
princière et bourgeoise. Princière, puisqu’un précepteur, qui
devint par la suite son secrétaire particulier, Alfred-Auguste
Cuvillier-Fleury, fut nommé auprès de lui à partir de 1827 et
qu’il bénéficia des leçons de dessin du peintre romantique
Ary Scheffer; bourgeoise, car il dut suivre de 1832 à 1839 les
cours du collège Henri IV à Paris, où il eut pour professeurs
d’histoire Jules Michelet et Victor Duruy.
Sa carrière : elle est avant tout militaire. Le duc
d’Aumale participa à la conquête de l’Algérie d’avril 1840 à
juin 1846, dans une période qui vit les Français, présents sur
le littoral depuis 1830, étendre leur contrôle vers l’intérieur,
après avoir hésité sur l’opportunité d’un établissement
définitif. Depuis 1832, la résistance était organisée par le fils
d’un marabout des environs de Mascara, l’émir Abd el Kader,
qui avait conclu une trêve avantageuse avec les Français en
1837. La guerre reprenait lorsque arriva le duc d’Aumale. Il
participa à six campagnes, sous le commandement de son
frère, le duc d’Orléans, puis des généraux Bugeaud,
Changarnier, Lamoricière, Cavaignac et Baraguey d’Hilliers.
L’épisode le plus fameux en est demeuré la prise de la
Smalah d’Abd-el-Kader, le 16 mai 1843, à la suite d’une
Portrait du duc d’Aumale à Twickenham,
course-poursuite de plusieurs jours à travers le désert, sur
par Victor-Louis Mottez.
une décision audacieuse du duc d’Aumale qui compta sur
l’effet de surprise pour compenser son infériorité numérique.
En août 1847, il fut nommé gouverneur général du pays,
poste qu’il occupa jusqu’à la Révolution de février 1848.
L’exil : En 1848, il choisit de suivre la famille royale en Angleterre plutôt que d’entamer une guerre
civile à la tête de l’armée d’Afrique qui lui était toute dévouée. C’est au cours de ses vingt-deux ans d’exil
dans sa résidence d’Orleans House à Twickenham près de Londres qu’il réunit la collection de tableaux,
de livres, de dessins et de gravures aujourd’hui visible à Chantilly.
14
Le duc d’Aumale et Chantilly : en 1830, à l’âge de huit ans il avait hérité le domaine de Chantilly
de son parrain, le duc de Bourbon, qui l’avait institué légataire universel l’année précédente. Il y fit
plusieurs séjours en famille, mais c’est à partir de 1843 que, reconnu majeur, il en assuma pleinement la
direction. Durant sa minorité furent organisées les premières courses de chevaux sur la pelouse devant
les Grandes Écuries, à l’initiative de son frère le duc d’Orléans, en 1834. En 1845, après son mariage
avec Marie-Caroline de Bourbon-Siciles, le duc d’Aumale envisagea de faire reconstruire Chantilly et fit
appel à Félix Duban, l’architecte officiel de la Monarchie de Juillet. Ce dernier n’eut que le temps
d’achever la galerie qui porte son nom dans la cour de la Capitainerie, le long du Petit Château : en 1847
le duc d’Aumale partait pour Alger d’où il gagna directement l’Angleterre l’année suivante.
La reconstruction du château : En
1871, de retour en France après la chute du
Second Empire, il entra à l’Académie française
(il devint membre de l’Académie des Beaux-Arts
en 1880) et présida le procès de Bazaine,
maréchal de France, condamné pour haute
trahison lors de la guerre franco-prussienne de
1870. Reprenant donc du service dans l’armée
française, général en poste à Besançon où il eut
sous ses ordres le futur général Boulanger, il
dut attendre 1875 pour réaliser son projet de
reconstruire le Grand Château afin d’y présenter
ses collections. Duban ayant disparu, il
s’adressa alors à l’architecte Honoré Daumet.
Chantilly en 1872, photographié par
Claudius Couton.
Le legs à l’Institut de France : en 1884, un an avant
l’achèvement de la reconstruction, il légua Chantilly à
l’Institut de France sous réserve d’en faire un musée ouvert
au public après sa mort, car tous ses enfants étaient morts,
de même que son épouse et il ne voulait pas risquer la
dispersion de ses collections après lui. En 1886, de nouveau
exilé et menacé de confiscation de ses biens, il transforma
son testament en donation avec effet immédiat sous réserve
d’usufruit. Élu en 1889 à l’Académie des sciences morales et
politiques, il fut autorisé à revenir en France et acheva
d’aménager Chantilly, enrichissant jusqu’à la fin de sa vie sa
collection d’œuvres d’art et de livres précieux. Partageant
son temps entre Chantilly et son domaine sicilien du Zucco,
près de Palerme, c’est dans ce dernier endroit qu’il mourut le
7 mai 1897.
Il avait précisé dans son testament que le musée
appelé “musée Condé”, serait ouvert au public deux jours par
semaine et que les œuvres présentées ne devraient être ni
déplacées ni prêtées.
Benjamin-Constant : le duc d’Aumale
dans le parc de Chantilly en 1896.
Pour en savoir plus :
Raymond Cazelles : Le duc d’Aumale, prince aux dix visages, éd. Tallandier, 1984.
Marc Blancpain : Anne de Montmorency, "le tout puissant" (1493-1567), éd. Tallandier, 1988.
Bernard Pujo : Le Grand Condé, éd. Albin Michel, 1995.
Brigitte Bedos-Rezak : Anne de Montmorency, éd. Publisud, 1996.
Françoise Kermina : Les Montmorency , grandeur et déclin, éd. Perrin, 2002.
15
LOCALISATION DES ŒUVRES CELEBRES DU MUSEE CONDE
Grand Château (peintures, visite libre) :
- Galerie des Cerfs (10) (expositions)
- Galerie de peinture (11)
4 Poussin (Massacre des Innocents, Enfance de
Bacchus, Numa Pompilius et la nymphe Egérie,
Paysage aux deux nymphes et un serpent), 1
Delacroix (Les deux Foscari), Corot (Le Concert
champêtre).
- Rotonde de la Galerie de peinture (12)
1 Raphaël (Madone de Lorette) Piero di Cosimo
(Simonetta Vespucci).
- Salles du Logis (13 à 22)
Enguerrand Quarton (Vierge de Miséricorde, 18),
1 Delacroix (Corps de garde à Mekhnès, 19),
Géricault (Cheval noir sortant de l’écurie, 19), 2
Watteau (L’amante inquiète, le donneur de
sérénades, 21) 2 Greuze (Le tendre désir, Jeune
fille) (21), 2 Jean Clouet (Portrait de François Ier,
portrait de Henri II enfant, 22), François Clouet
(Portrait d’Odet de Coligny, 22).
- Galerie de Psyché : 44 vitraux (23)
- Santuario (24)
2 Raphaël (Trois Grâces, Vierge de la Maison
d’Orléans), 40 miniatures de Jean Fouquet.
- Salle de la Tribune (26)
1 Poussin (Thésée), 4 Ingres (Autoportrait à 24
ans, Madame Duvauçay, Antiochus et Stratonice,
Vénus Anadyomène) 2 Mignard (Portrait de
Molière, Portrait de Mazarin)
Petit Château (décor et mobilier, visite
guidée toutes les 30 mn.) :
- Antichambre (1)
- Cabinet des Livres (2)
- Grands appartements à l’étage (3 à 8) dont
la Grande Singerie (6)
- Petits appartements (RDC), visite sur
rendez-vous par groupe de 10.
- La Chapelle (9)
Les salles du Logis :
13 et 14 : galeries du Logis. 15 : salle de la Smalah.
16 : salle de la Minerve. 17 : cabinet des Antiques.
18 : cabinet du Giotto. 19 : salle Isabelle. 20 : salon
d’Orléans. 21 : salle Caroline. 22 : salle des Clouet.
Un plan gratuit du musée est disponible à l’entrée.
SUGGESTIONS DE VISITES A THEMES DANS LES COLLECTIONS DE PEINTURE
La liste des œuvres mentionnées ici n’est bien sûr pas exhaustive. La collection de peintures du musée
Condé compte environ 800 tableaux.
LE PORTRAIT
Le portrait allégorique :
Piero di Cosimo, Simonetta Vespucci (salle 12) École Française,
Gabrielle d’Estrées au bain (salle 11) École de Botticelli, L’Automne
(salle 26) Greuze, Le tendre désir (salle 21).
Le portrait officiel :
Jean Clouet, François Ier (salle 22) Louis XV en costume d’apparat
(salle 11) Rigault (d’après) Louis XIV en costume d’apparat (salle
26) David Teniers, Portrait du grand Condé (3) Van Dyck, Portrait
de Gaston d’Orléans (salle 26) Gérard, Portrait de Napoléon
Bonaparte premier Consul (salle 26).
Portrait de Simonetta Vespucci,
par Piero di Cosimo.
16
Portrait de Molière, par Mignard.
Le portrait au XVe siècle : Memling (d’après), Portrait d’Antoine,
Grand Bâtard de Bourgogne (salle 26) Maître de Saint-Gilles,
Portrait d’un homme et de sa femme (salle 26).
Le portrait au XVIe siècle : Salle des Clouet : Jean et François
Clouet, Corneille de Lyon (salle 22)
Le portrait au XVIIe siècle : Mignard, Portrait de Molière (salle 26)
Champaigne, Portrait de Mère Angélique Arnauld (salle 26).
Le portrait au XVIIIe siècle : Drouais, Portrait de la Dauphine MarieAntoinette (salle 11), Duplessis, Portrait de Madame Denis, nièce
de Voltaire (salle 11), Nattier, Portrait de Mademoiselle de
Clermont aux eaux minérales de Chantilly (salle 11).
Le portrait au XIXe siècle : Ingres, Autoportrait, Portrait de Madame
Duvauçay (salle 26), Reynolds, Portrait de la comtesse Waldegrave
(salle 26), Scheffer, Portrait de Talleyrand (salle 26), Bonnat,
Portrait du général Henri d’Orléans, duc d’Aumale (salle 20),
Portrait de Henri d’Orléans, duc d’Aumale (salle 15).
LA PEINTURE DE LA RENAISSANCE
La Renaissance italienne:
Maso di Banco, La dormition de la Vierge (salle 19).
Giovanni di Paolo, Cinq anges dansants (salle 19).
Piero di Cosimo, Portrait de femme dit Simonetta Vespucci (salle 12).
Raphaël, La Madone de Lorette (salle 12) Les Trois Grâces, L a
Vierge de la Maison d’Orléans (salle 24).
Filippino Lippi, Esther choisie par Assuérus (salle 24).
Sassetta, Le mariage mystique de saint François d’Assise (salle 26).
Jacopino del Conte, La mise au Tombeau (salle 11).
Perino del Vaga, La Sainte Famille (salle 12).
Domenico Zampieri, La lapidation de saint Etienne (salle 26).
La Renaissance française :
Enguerrand Quarton, La Vierge de Miséricorde (salle 19).
Ecole française : Gabrielle d’Estrées au bain (salle 11).
Portraits à l’huile sur bois de la salle des Clouet, Jean et François
Clouet, Corneille de Lyon et anonymes (salle 22).
La Renaissance flamande :
D’après Hans Memling : Portrait d’Antoine, Grand Bâtard de
Bourgogne (salle 26).
Maître de Saint-Gilles, Portrait d’un homme et de sa femme (salle 26).
LA PEINTURE DU XVIIe SIECLE
Ressource pédagogique :
- Dossier de parcours découverte sur les peintures de la
Renaissance italienne au musée Condé.
Poussin, Le massacre des Innocents (salle 11).
Poussin, Numa Pompilius et la nymphe Egérie (salle 11).
Poussin, Paysage avec deux nymphes et un serpent (salle 11).
Poussin, L’enfance de Bacchus (salle 11).
Poussin, Thésée retrouvant l’épée de son père (salle 26).
Stomer, Sarah menant Agar à Abraham (salle 26).
Ruisdael, La plage et les dunes de Schweningen (salle 19).
Bigot : La Cène à Emmaüs (salle 11).
Ressource pédagogique :
- Dossier de parcours découverte sur Poussin à Chantilly.
Le massacre des Innocents,
par Poussin.
17
LA PENTURE DU XVIIIe SIECLE
De Troy, Le déjeuner d’huîtres (salle 11).
Lancret, Le déjeuner de jambon (salle 11).
Watteau, L’amante inquiète (salle 21).
Watteau, Le donneur de sérénades (salle 21).
Watteau, Le plaisir pastoral (salle 26).
Watteau, L’Amour désarmé (salle 26).
Greuze, Jeune fille (salle 21).
Greuze, Jeune garçon (salle 21).
Greuze, Le tendre désir (salle 21).
Greuze, La surprise (salle 21).
De Cort, Le château de Chantilly vu de la pelouse (salle 11).
De Cort, Le château de Chantilly vu du Vertugadin (salle 11).
Le déjeuner d’huîtres, par De Troy.
LA PEINTURE ROMANTIQUE :
Gérard, Les Trois âges de l’Homme (salle 11).
Gros, Les pestiférés de Jaffa (salle 11).
Delacroix, Les deux Foscari (salle 11).
Ingres, Paolo et Francesca (salle 19).
Ingres, Antiochus et Stratonice (salle 26).
Robert, Le lendemain du tremblement de terre (salle 19).
Delaroche, L’assassinat du duc de Guise (salle 26).
Gérôme, Les suites d’un bal masqué (salle 19).
LA PEINTURE ORIENTALISTE :
Le lendemain du tremblement
de terre, par Robert.
Decamps, Corps de garde turc sur la route de Smyrne à
Magnésie, (salle 11).
Decamps, Enfants turcs auprès d’une fontaine (salle 11).
Decamps, Enfants turcs jouant avec une tortue (salle 11).
Fromentin, La chasse au héron (salle 11).
Marilhat, Vue d’un quai à Rosette (salle 11).
Delacroix, Corps de garde à Mekhnès (salle 19).
Vernet, Chefs arabes dans leur camp (salle 11).
La chasse au héron, par Fromentin.
Pour compléter ces suggestions, des dossiers de parcours découverte peuvent vous être adressés
gratuitement ou être téléchargés sur le site du SCEREN-CRDP d’Amiens :
http://crdp.ac-amiens.fr/crdp/ingedoc/carte_ressources/chateau_chantilly.htm
18
LA BIBLIOTHEQUE DU MUSEE CONDE
UN ESPACE DE VISITE : LE CABINET DES LIVRES (en visite libre)
Aménagé entre 1875 et 1885, il conserve les 1600 manuscrits précieux, (dont 360 enluminés) qui
constituent l'essentiel de la collection de Chantilly.
Les manuscrits : Le plus ancien manuscrit remonte au
Xe siècle mais les manuscrits des XIVe et XVe siècles
sont les plus nombreux.
Les imprimés : Ils comprennent une impressionnante
collection de livres xylographiques (gravés en relief à
l’aide de planches de bois), d’incunables (ouvrages
imprimés entre 1450 et 1500), d’imprimés sur vélin que le
duc d’Aumale appréciait tout particulièrement, et de
monuments de l’édition, du XVIe au XIXe siècle.
Sur la table située au fond de la pièce, un tableau de
Gabriel Ferrier (1847-1914) montre le duc d’Aumale
travaillant dans cette salle en compagnie de son ancien
précepteur, devenu son secrétaire, Auguste CuvillierLe Cabinet des Livres au musée Condé.
Fleury.
Le plafond est décoré des écussons des compagnons d’armes du Grand Condé.
Une politique d’expositions temporaires permet au visiteur de découvrir chaque année une partie du fonds
de la bibliothèque.
LES LIEUX D’ETUDE ET DE CONSERVATION
La bibliothèque comprend deux espaces de conservation, non accessibles au public : la bibliothèque du
Théâtre, située à l’emplacement de l’ancien théâtre des princes de Condé et la Tour des Chartes, où sont
conservées les archives. Elle dispose également d’une salle de lecture réservée aux chercheurs accrédités.
60 000 ouvrages tant manuscrits qu’imprimés y sont réunis, ainsi qu’un fonds d'archives divisé en deux
parties :
- Le Cabinet des titres rassemble tous les papiers concernant la gestion des domaines des seigneurs de
Chantilly, soit en tout plus de 1 000 cartons et près de 2 000 registres, source précieuse pour l’histoire
de la région parisienne, des comtés de Clermont-de-l’Oise, de Clermont-en-Argonne, de la région de
Creil, du Languedoc, de la Provence, de la Bretagne et bien évidemment de la région de Chantilly.
- Le Cabinet des lettres est, quant à lui, constitué de la correspondance passive, c’est-à-dire reçue, des
châtelains de Chantilly et d’une très importante collection de documents sur l’armée d’émigration, en tout
près de 700 volumes reliés.
LES MANUSCRITS DE CHANTILLY
Chantilly offre l’exemple d’un bibliothèque privée d’origine princière,
dont l’apparition remonte au Moyen-Âge, en relation avec le renouveau
intellectuel et littéraire des XIIe et XIIIe siècles. Deux bibliothèques du XVe
siècle se retrouvent en partie dans la bibliothèque du musée Condé :
La bibliothèque d’Antoine de Chourses et Katherine de Coétivy.
Seigneur du Maine, Antoine de Chourses avait épousé en 1477
Katherine de Coétivy, petite-fille de Charles VII et d’Agnès Sorel, qui
hérita les ouvrages de son oncle, l’amiral Prigent de Coétivy, en
particulier :
Boccace, Le livre des cas des nobles hommes et femmes, (ms 858)
Antoine de Chourses mourut en 1484 et sa veuve poursuivit ses
acquisitions. Leur bibliothèque nous est parvenue intacte, à l’exception
des reliures.
Livre des cas des nobles hommes
et femmes : Adam et Eve.
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Elle comprend 47 manuscrits, dont une forte proportion de livres anciens (9 manuscrits du XIIIe
siècle, 9 du XIVe siècle). Katherine de Coétivy a fait placer ses armes dans ses livres, ce qui est habituel
depuis le XIIIe siècle et permet de dater et localiser les manuscrits.
Saint Augustin, la Cité de Dieu (ms 122). A
appartenu au duc Jean de Berry.
Heures de Marguerite de Coétivy (ms 74).
Marguerite était la sœur de Katherine.
Albert le Grand, Somme abrégée de théologie
(ms 130).
Geoffroy de la Tour-Landry, Le livre du chevalier
de la Tour pour l’enseignement de ses filles (ms 293)
Il convient de signaler que les bibliothèques
féminines sont alors exceptionnelles, surtout
lorsqu’elles dépassent la dizaine de volumes. Cette
bibliothèque est arrivée à Chantilly par héritage et
La Cité de Dieu : à droite, Saint Augustin.
appartient aux Bourbon-Condé dès le XVIIe siècle.
La bibliothèque de Jean du Mas, seigneur de l’Isle.
Seigneur du Berry, né vers 1437, éduqué chez Charles d’Orléans, il partage sa passion des livres,
car il a eu accès à la bibliothèque du prince poète. Lié très jeune à Pierre de Beaujeu, 3e fils du duc de
Bourbon et gendre de Louis XI, il devient grand officier de la Couronne et participe à la confiscation par
Louis XI des biens de Jacques d’Armagnac, duc de Nemours, en 1476. Il participe également à la prise
de Carlat, dans le Cantal, où il s’empare d’une partie de la bibliothèque du duc héritier de Jean de Berry.
Un certain nombre de ses ouvrages sont donc butin de guerre…
Au XVIe siècle, la veuve de son fils aîné, qui connaît des difficultés financières pour élever ses sept
enfants, vend au maréchal Anne de Montmorency, seigneur de Chantilly, les manuscrits de son beaupère. 12 manuscrits ayant appartenu à Jean du Mas sont restés dans la bibliothèque de Chantilly.
Des romans de chevalerie : 4 manuscrits du Roman de Tristan (ms 645 à648)
Le Roman de la Rose (ms 481)
Le Songe du vergier ou la disputation du clerc et du chevalier (ms 220)
La bibliothèque d’Anne de Montmorency
A la Renaissance, l’apparition du livre imprimé bouleverse la composition des bibliothèques : le livre
imprimé y devient prépondérant, le livre manuscrit acquiert en partie un nouveau statut d’objet
archéologique. La séparation actuelle entre manuscrits et imprimés dans les bibliothèques, qu’on appelle
jusqu’en 1580 « librairies », n’existe pas. En ne parlant que des manuscrits, nous créons donc une
division factice.
Depuis cinq siècles, Chantilly conserve un manuscrit qui y a toujours été localisé :
Réponse du comte de Carpi à Erasme (ms 187), dédicacé à Guillaume de Montmorency, le père du
Connétable Anne de Montmorency.
La bibliothèque d’Anne de Montmorency, caractéristique
de la Renaissance, manifeste le goût pour l’Antiquité du
connétable, qui, comme le Roi, commande des traductions de
textes antiques. Son importance est difficile à évaluer. Elle a pu
compter jusqu’à plus de cent cinquante ouvrages. Aujourd’hui,
vingt-deux manuscrits ayant appartenu au connétable, portant
ses armes et dans leur reliure d’origine, sont conservés à
Chantilly. Il s’agit de traductions de textes antiques (Appien,
Cicéron, Platon , Valère Maxime), de poésies (Clément Marot,
Mélin de saint-Gelais), de deux traductions de Machiavel : Le
Prince, traduction par Jacques de Vintimille, dédiée au
connétable, et du Discours de l’état de paix et de guerre.
Il s’y trouve également les Heures d’Anne de
Montmorency (ms. 1476), qui portent ses armes.
Livre d’Heures d’Anne de Montmorency.
20
Après l’exécution à Toulouse en 1632 du petit-fils d’Anne, Henri II de Montmorency, ses biens sont
saisis et confisqués par Louis XIII. Une partie de ses manuscrits est intégrée par le roi dans la
bibliothèque royale ou offerte en cadeaux à de grands personnages. Mais une partie des livres demeure à
Chantilly et est restituée avec le château par Anne d’Autriche, après la mort de Louis XIII en 1643, à la
sœur d’Henri II de Montmorency, Charlotte-Marguerite, épouse d’Henri II de Bourbon-Condé et mère du
Grand Condé.
La bibliothèque des Bourbon-Condé
Après la Paix des Pyrénées, le Grand Condé reçoit le duché de Bourbon en échange du duché
d’Albret et devient ainsi propriétaire du château de Moulins où sont conservés 30 manuscrits :
Valère Maxime, Dicta et facta memorabilia (ms 833), qui a appartenu au cardinal de Bourbon.
Sa bibliothèque contient alors 10000 livres, mais c’est davantage celle d’un lecteur insatiable, dont
la curiosité s’accorde mal avec la censure politique ou religieuse, que d’un bibliophile. Il charge l’avocat
Soru de chercher des manuscrits rares qu’il fait copier, et d’importer de Hollande ou d’Italie les écrits
prohibés en France. Soru fait entrer dans la bibliothèque du grand Condé des ouvrages réputés
« curieux ». Par exemple, il lui fait faire en grand secret une copie du « testament politique » de Mazarin,
qui était dans la bibliothèque Colbert, alors mise en vente. Les trois centres d’intérêt majeurs de Condé
portent sur l’histoire, les sciences et la controverse religieuse.
Au XVIIIe s, cette bibliothèque fut transférée au Palais Bourbon, à Paris. A partir de ce qu’il en reste
à Chantilly, soit 933 manuscrits, on peut saisir l’image d’une bibliothèque princière à la fin de l’Ancien
Régime. Parmi les ouvrages acquis à cette période :
Christine de Pisan, Le livre de la mutation de fortune (ms 494), manuscrit littéraire du XVe siècle.
Traité d’astronomie et d’astrologie (ms 322), manuscrit italien du XIVe siècle.
Gui de Pavie, Traité de médecine (ms 334) XIVe siècle, médecin de Philippe de Valois.
Gaston Phébus, Le Livre de la chasse (ms 367) XVe siècle.
Pietro Crescenzi, Le Rustican (ms 340) Traduit de l’italien pour Charles V.
La bibliothèque du duc d’Aumale
Saisie sous la Révolution et transférée à Paris en 1793, la bibliothèque est restituée aux Condé en
1814. Sous l’ancien Régime, le château de Chantilly abritait plus une bibliothèque qu’une collection de
livres. C’est par les manuscrits que les livres conservés à Chantilly formaient en partie une collection. A
partir de 1830, date du legs à Henri d’Orléans, duc d’Aumale (1822-1897), il devient approprié de parler
de collection pour l’ensemble des livres, manuscrits ou imprimés, et plus encore de parler d’un Cabinet
des livres, terme retenu par le duc d’Aumale.
Durant ses campagnes en Algérie, le duc d’Aumale
recueille en 1840, dans la synagogue de Médéah, un rouleau
du Pentateuque, en hébreu, et il s’empare comme butin de
guerre, en 1843, lors de la prise de la Smalah d’Abd el Kader,
de 42 manuscrits arabes juridiques, littéraires, historiques et
religieux faisant partie de la bibliothèque personnelle de l’émir.
La bibliophilie devient très vite sa passion. En cinquante
ans, il va acquérir 545 manuscrits (et 11500 livres imprimés
rares et précieux). Il est favorisé par sa grande fortune, mais
aussi par l’intense circulation des livres dans la période qui suit
la Révolution. De nombreuses collections se constituent alors
et un regard érudit est pour la première fois porté sur ces
ouvrages.
De 1850 à 1870, on peut parler d’une bibliophilie de
curiosité, constituée à partir d’achats effectués à travers toute
l’Europe, chez des libraires ou dans des ventes publiques. Son
premier achat, en 1850, est un manuscrit du XVIe s :
François Demoulins, Commentaires des Guerres
galliques (ms 764), dialogue entre Jules César et François Ier.
En 1851, il acquiert la collection d’un riche amateur
anglais, Frank Hall Standish, qui comporte 2500 ouvrages. dont
Très Riches Heures du duc de Berry : Avril,
14 manuscrits seulement, mais un certain nombre d’incunables
le mariage de Bonne d’Armagnac et de
Charles d’Orléans
21
comptent parmi les ouvrages imprimés. Cette acquisition va
faire naître chez le duc d’Aumale une passion pour les
imprimés égale à celle des manuscrits. En particulier il
cherchera à acquérir en éditions imprimées remarquables les
ouvrages dont il possède les manuscrits.
En 1856 il se porte acquéreur du fleuron de sa collection,
les Très Riches Heures du duc de Berry, pour la somme de
22000 francs (en 1855, un ouvrier maçon gagne à Paris 3,60
francs par jour). Cet achat le situe comme un des
collectionneurs majeurs de son temps.
En 1859, il achète une autre bibliothèque entière,
comprenant 3500 livres dont 87 manuscrits, celle d’Armand
Cigongne, un agent de change parisien. Il poursuit sans relâche
ses acquisitions au cours des années 1860, en dépit des
drames domestiques qui le frappent.
Après son retour en France, en 1871, il est accaparé par
la vie politique et par la reconstruction du château de Chantilly :
ses achats se font plus rares. Il reprend du service comme
général de 1872 à 1879. Durant cette période il se consacre à
l’installation de sa bibliothèque dans son nouveau château.
Heures d’Etienne Chevalier : Job.
Après 1881, il reprend ses acquisitions pour une
collection dont il n’est bientôt plus le propriétaire.
En 1886 il donne Chantilly à l’Institut de France. Près de 150 manuscrits rejoignent toutefois la
collection. En 1891, il acquiert auprès du banquier allemand Brentano, de Francfort, les quarante
miniatures de Jean Fouquet, pour la somme de 250 000 francs. Deux autres manuscrits majeurs de la
collection y entrent dans les dernières années de sa vie :
En 1892 : le Psautier d’Ingeburge de Danemark, l’épouse de Philippe-Auguste répudiée le soir de
ses noces (XIIIe siècle, ms 9).
En 1894 : le Bréviaire de Jeanne d’Evreux, l’épouse du dernier roi capétien, Charles IV le Bel (XIVe
siècle, ms 51). Ainsi le duc d’Aumale n’aura cessé de son vivant de compléter et d’enrichir sa
bibliothèque.
Ressource pédagogique :
- TICE : DVD pédagogique sur les Très Riches Heures du duc de Berry (SCEREN-CRDP Amiens).
- Atelier de calligraphie et d’enluminure au Hameau.
DECOR ET MOBILIER AU MUSEE CONDE
COLLECTIONS DU GRAND CHATEAU (visite libre)
LE VESTIBULE D’HONNEUR
Carreaux historiés de Masséot Abaquesne (?- vers 1564)
faits à Rouen entre 1542 et 1544.
D’origine normande, premier grand maître faïencier français, il
travailla pour le connétable de Montmorency au château
d’Écouen d’où proviennent ces panneaux qui racontent deux
épisodes de l’histoire romaine, d'après Tite-Live.
Technique utilisée : faïence dite de "grand feu", obtenue à
partir d’une terre rouge, couverte d’un émail blanc à l'oxyde
d'étain et d'antimoine. Le décor est posé sur émail cru : le vert
est obtenu par l’oxyde de cuivre, le brun pourpré par le
manganèse, les nuances du jaune au brun par le fer, les
diverses valeurs de bleu par le cobalt. Certains carreaux
manquants ont été remplacés.
Mucius Scaevola tendant sa main au
brasier, carreaux de faïence, Rouen.
22
Côté château : Mucius Scaevola (“ le gaucher ”)
étendant la main sur le brasier.
Lors du siège de Rome par Porsenna (507 av
JC), il pénétra sous la tente du roi des
Étrusques, dans le but de le poignarder. Mais il
frappa par méprise le secrétaire du prince.
Arrêté, au lieu de répondre à l’interrogatoire du
roi, il plaça sa main droite sur un brasier ardent,
comme pour la punir de sa maladresse et la
laissa brûler. Puis il déclara à Porsenna que 300
jeunes Romains aussi déterminés que lui
devaient pénétrer dans son camp. Effrayé, ce
dernier le libéra et se hâta de conclure la paix.
Côté cour : Marcus Curtius se précipitant dans
le gouffre du forum pour apaiser la colère des
dieux.
Un large gouffre s’étant ouvert au milieu du
Forum et l’oracle ayant déclaré qu’il ne se
refermerait que lorsque Rome y aurait jeté ce
qu’elle avait de plus précieux, Curtius, déjà
célèbre pour ses exploits, se précipita tout armé
dans l’abîme qui se ferma aussitôt (360 av. JC).
LA CHAPELLE (1882)
Dédiée à saint Louis dont la statue par Marqueste
surmonte la façade extérieure, elle fut construite par
l’architecte Honoré Daumet sur la demande du duc
d’Aumale, à peu près à l’endroit où se dressait l’ancienne
chapelle avant la Révolution. Son architecture extérieure
s’inspire de la chapelle du château d’Écouen, datant du XVIe
siècle.
Le sacrifice d’Abraham, bas-relief
attribué à Jean Goujon.
Partie antérieure :
Vitraux, autel attribué à Jean Goujon et lambris en
marqueterie du XVIe siècle provenant d’Écouen.
L’entrée et la sacristie sont ornées de peintures
représentant Saint Christophe et Saint Jacques.
Au-dessus de la sacristie, dans un cadre doré, un drapeau
représentant l’aigle bicéphale des Habsbourg pris à la
bataille de Rocroi en 1643 sur une milice de la ville
d’Augsbourg.
Partie postérieure :
Derrière l’autel, six figures et les bas-reliefs de bronze dus au sculpteur Jacques Sarazin (15921660), qui ornaient le monument à la mémoire du prince Henri II de Condé, commandé en 1648 par son
fils le Grand Condé, et destiné à l’église des Jésuites de la rue Saint-Antoine à Paris : la Religion, la
Prudence, en Minerve, la Piété, priant mains croisées sur la poitrine, la Justice, avec l’épée et les
plateaux de la balance, un enfant présentant un bouclier armorié, et un enfant présentant une épitaphe.
Quatre grands bas-reliefs en bronze ajoutés en 1659, d’après des modèles de Jacques Sarazin,
évoquent en une longue procession les Triomphes de la Mort, du Temps, de la Renommée (qui atteint les
héros de la Bible, les poètes et les artistes), et de l’Éternité.
Sauvé de la fonte en 1791 par Alexandre Lenoir, fondateur du musée des Monuments Français, le
monument fut rendu aux Condé en 1816 et installé par le duc d’Aumale dans la chapelle du château en
1885.
Au centre, l’urne où les cœurs des princes de la maison de Condé sont venus rejoindre celui du
prince Henri II.
LA GALERIE DE PSYCHE
Le mythe de Psyché : Apulée, écrivain latin du IIe siècle après Jésus-Christ, raconte dans son roman Les
métamorphoses ou l'Âne d'or, l'histoire d'Amour et de Psyché. Ce conte est présenté comme un excursus,
une histoire divertissante racontée, à la façon d'un conte milésien, par une vieille femme un peu ivre qui
cherche à consoler une jeune fille enlevée par des brigands le jour de ses noces. Apulée en fait un récit
23
initiatique dans un roman consacré à l'apprentissage d'un jeune homme.
Le récit dans l'art : au XVIe siècle, grâce aux nombreux manuscrits latins que les savants byzantins
apportent avec eux lorsqu'ils se réfugient en Italie, de nouvelles éditions critiques du texte voient le jour en
Europe ainsi que des traductions en langue vernaculaire.
On sait que Raphaël, par exemple, exécuta des dessins de commande pour décorer la villa d'un riche
marchand siennois. Deux scènes seulement sont peintes au plafond de la Farnesina à Rome.
Les gravures utilisées pour les vitraux conservés au musée servirent de modèle pour des tapisseries, à
Léonard Limosin pour deux séries d'émaux ainsi que pour des majoliques d'Urbino exécutées vers 1540.
Psyché découvre l’Amour
endormi.
Les vitraux du musée Condé : ces 44 vitraux, commandés par
Anne de Montmorency pour décorer Écouen, sont l’œuvre d’un
artiste sans doute parisien, mais resté anonyme, qui s'inspira d'une
suite gravée par le Maître au Dé, proche de Raphaël et actif entre
1532 et 1550. Il a travaillé à partir de cartons exécutés d'après ces
gravures et attribués à un peintre flamand, Michel Coxcie. C'est
pour servir de légende aux vitraux qu'Anne de Montmorency fit
traduire le texte d'Apulée en français, sous forme de trente poèmes
de huit vers qui ont pour auteurs Claude Chappuys, La Maison
Neuve et Melin de Saint Gelais.
La galerie qui les abritait, dite "galerie de Psyché", est située au 1er
étage de l'aile ouest du château d'Écouen. Déplacés du château
d'Écouen en 1793, les vitraux furent installés à Chantilly dans les
années 1880, dans une nouvelle galerie de Psyché construite pour
eux. Deux vitraux n'ont pu être installés le long de la galerie. Ils
sont disposés dans les passages de la Tribune.
Ces vitraux sont peints selon la technique de la grisaille, qui permet
de rendre parfaitement les plis des vêtements et les ombres. Les
touches de jaune d'argent, pour la chevelure et les accessoires, la
finesse du trait et l'illusion de la profondeur que crée l'encadrement
architectural ou les arrières plans, montrent bien que le vitrail ici
rejoint la peinture de chevalet. Cette œuvre témoigne
magistralement de l'évolution technique qu’a connu l'art du vitrail au
XVIe siècle.
Ressources pédagogiques :
- atelier de peinture sur verre au Hameau.
LE SALON D’ORLEANS ET LA PORCELAINE DE CHANTILLY (salle 20, plan p. 12)
Origine : Dès le XVIIe siècle, toutes les Cours
d’Europe cherchèrent le secret de fabrication de la
porcelaine, afin de diminuer les coûteuses
importations d’Extrême-Orient. A Chantilly en 1725
Louis-Henri, duc de Bourbon (1692-1740) réussit à
faire produire une pâte de porcelaine dite tendre,
c’est-à-dire sans kaolin. Difficile à cuire, elle était
néanmoins translucide. Le duc de Bourbon fit
construire en 1730 une manufacture de porcelaine
à Chantilly et, en 1735, Louis XV lui accorda pour
vingt ans un privilège pour la production de
porcelaine tendre imitée de la "Chine et du Japon".
Le décor : Cinq couleurs font ressortir le blanc de
Paire de rafraîchissoirs, décor Kakiemon.
la pièce : rouge kaki, jaune pâle, vert tilleul, vert
d'eau, bleu.
1725-1740 : période d'inspiration "Kakiemon", du nom d'un célèbre céramiste japonais. 1740-env. 1750 :
période de transition, postérieure au duc de Bourbon. Décor floral polychrome. Apparition de l'or et du
24
pourpre, lié à l'emploi de l'or.
Vers 1750-1792 : période dite "à la brindille". Camaïeu de bleu, de style Delft ou Rouen, en raison de
l'interdiction d'employer l'or et la polychromie. Certains motifs peuvent évoquer le parc de Chantilly, telle
l'assiette dite "au jet d'eau".
Marques et signatures : La marque traditionnelle de Chantilly est le cor de chasse, peint au revers de la
pièce. Parfois des noms sont inscrits en creux, pour comptabiliser le travail des ouvriers. Plusieurs styles
de cor de chasse se sont succédés au cours du XVIIIe siècle, sans qu'il soit possible de les dater avec
précision.
Les collections de porcelaine du musée Condé, constituées postérieurement au duc d’Aumale, sont
présentées dans le salon d’Orléans, qu’il consacrait à ses dessins, déplacés par la suite pour des raisons
de conservation.
LA COLLECTION D’ANTIQUES
Vase trouvé à Nola.
En haut : Thésée
combattant les Amazones.
A droite : Politès, un des fils
de Priam.
Le XIXe siècle a développé un fort intérêt pour
les vestiges archéologiques de l’Antiquité
classique, hérité des grandes découvertes du
siècle précédent en Italie. Herculanum a été
découverte en 1739, et Pompéi en 1748 : de
1770 à 1815, les fouilles de Pompéi se
développèrent sous l'impulsion des rois
Bourbon de Naples. Très vite, rois, princes,
artistes, vinrent de toute l'Europe pour visiter le
chantier. En 1843, le duc d’Aumale, parcourant
l’Italie à la recherche d’une épouse, fut invité
par Ferdinand II, roi des Deux-Siciles à
entreprendre l’ascension du Vésuve et à
participer à une fouille spectacle dont le produit
lui fut offert. Il y contracta le goût de la
collection érudite qui ne le quitta jamais, bien
que ne figurant pas au nombre de ses
principaux centres d’intérêt.
Les pièces qu’il a réunies sont essentiellement
montrées dans deux salles : le Cabinet des
Antiques (17 sur le plan p. 16) et la Rotonde
de la Minerve (16 sur le plan p. 16).
Le vase dit de Nola, car trouvé dans cette ville
d’Italie, est une amphore attique à figures
rouges, attribuée au peintre athénien Aison
(env. 440 - 420 av. J.C.). Elle représente d’un
côté le combat de Thésée contre deux
Amazones; Hyppolite à cheval et Deinomaché
à pied; et de l’autre un éphèbe, Politès, placé
entre deux femmes, Phylonoé et Deinomaché,
et recevant des mains de cette dernière une
coupe à libations. Il fut acquis lors de la vente
de la collection du comte de Pourtalès, en
1865.
Minerve, bronze
gallo-romain.
Trois Bronzes grecs : Jupiter et Minerve (qui a
donné son nom à la salle), également acquis à
la vente Pourtalès, auxquels fut adjoint en 1875
un Satyre dansant. Tous trois ont été trouvés
en France.
Jupiter, bronze
gallo-romain.
25
Les figurines en terre cuite provenant de Tanagra :
Tanagra, qui doit son nom à une nymphe mythique, fut la principale ville de
Béotie du IVe au IIIe siècle av. J.C., après la chute de Thèbes, située à quelques
kilomètres à l'est. La nécropole mycénienne de Tanagra a livré de nombreux
sarcophages ainsi que des statuettes votives en terre cuite. Certaines, pleines
et modelées à la main, remontent à 600 ans av. J.C. Elles représentent
essentiellement des animaux stylisés et des divinités avec leurs attributs. Les
figures étaient colorées par application d'argile. Les artisans moulaient la partie
antérieure des statuettes, qui furent évidées, à partir du milieu du Ve siècle av.
J.C., afin d'obtenir une meilleure cuisson. Ils représentaient des patriciennes,
des danseuses, des éphèbes et des enfants dans un style de plus en plus
réaliste. Ces œuvres furent peintes à la fin du IVe siècle. Les figurines et moules
de Tanagra furent exportés dans le bassin méditerranéen et donnèrent leur nom
aux figurines de terre cuite produites tout aussi bien en Asie Mineure ou à
Alexandrie. Les Athéniens adoptèrent la technique béotienne pour produire
essentiellement des figures d'acteurs souvent grotesques.
Les figurines de Tanagra furent découvertes en 1871, provoquant un engouement
des musées européens et des riches particuliers, qui apprécièrent ce qu’ils
considéraient comme un témoignage pittoresque et décoratif de la vie quotidienne
en Grèce. Le duc d’Aumale, cédant à cette mode, chargea en 1877 son architecte
Femme drapée et voilée,
Honoré Daumet, connaisseur de l’art grec et romain, de se procurer sept de ces
statuette votive en terre
terres cuites auprès de Lambros, marchand à Athènes. Mais ce commerce était
e
cuite, IV s. av. J.C.
tellement lucratif que les marchands faisaient réaliser des faux par d’habiles
artisans locaux. Les deux seules statuettes authentiques de la collection sont
donc :
- la femme drapée et voilée, production de l’Attique.
- l’acteur en Silène, production typique de la région de Myrina, en
Asie mineure.
Ressource pédagogique :
- Dossier de parcours découverte : la mythologie à Chantilly.
COLLECTIONS DU PETIT CHATEAU (visite guidée)
L’ANTICHAMBRE
Les deux dessus de portes représentent des chiens de la meute de Condé : Briador et Balthazar,
tableaux de l’atelier de François Desportes. Ces animaux portent sur le flanc la marque en forme de
triangle-rectangle qui était celle des Condé. La meute se trouvait au XVIIIe siècle dans les Grandes
Ecuries, cour des Chenils (actuel Musée Vivant du Cheval).
Le meuble minéralogique de l’ébéniste suédois Haupt fut donné par le Roi de Suède Gustave III
au prince Louis-Joseph de Condé en 1774, en remerciement de l’accueil qu’il avait reçu à Chantilly. Ce
meuble, couronné de minéraux, appartenait au Cabinet d’Histoire Naturelle des princes de Condé, dont
les collections furent saisies en 1793 et annexées au Muséum d’Histoire Naturelle à Paris. A son retour
d’émigration, en 1814, le prince Louis-Joseph de Condé réclama ce meuble qui revint ainsi à Chantilly.
La Salle des Gardes
L’enlèvement d’Europe, mosaïque d’Herculanum.
Portraits de Louis II de Bourbon, prince de Condé, dit le
Grand Condé (1621-1686) en armure, par Juste d’Egmont,
au-dessus de la vitrine de gauche, et par David Teniers, à
droite en entrant.
Sur la cheminée, une mosaïque antique provenant
d’Herculanum représente L’enlèvement d’Europe par le
dieu de l’Olympe Jupiter qui a pris la forme d’un taureau. Elle
provient de la collection du prince de Salerne, beau-père du
duc d’Aumale, que ce dernier racheta après son décès, en
1854.
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Elle comprenait, outre de nombreux tableaux italiens, une autre grande mosaïque antique, la
mosaïque de la chasse, qui se trouve dans la Rotonde à l’extrémité de la Galerie de Peinture.
La Chambre de Monsieur le Prince
Les boiseries de cette pièce, comme des suivantes, ont
été exécutées vers 1720 sous la direction de Jean Aubert, le
constructeur des Grandes Ecuries, de la galerie de l’abbaye de
Chaâlis et du Palais-Bourbon, pour le duc de Bourbon (16921740), ministre du roi Louis XV.
Les cinq peintures décoratives sont de Christophe
Huet ; elles représentent des animaux exotiques dans un décor
de pagodes orientales. Deux de ces peintures sont signées et
l’une est datée 1735 ; elles furent mises en place au XIXe
siècle, sous la Restauration. Au XVIIIe siècle la chambre du
prince comportait un décor peint formé de portraits de famille,
Chambre de Monsieur le Prince.
dont le Portrait de Mlle de Clermont par Jean-Marc Nattier,
aujourd’hui exposé dans la Galerie de Peinture.
Au fond, à la place du lit, la grande commode en marqueterie est de Jean-Henri Riesener (1734 1806), ébéniste d’origine allemande, avec des bronzes dorés et ciselés de Hervieu, provenant de la
chambre du roi Louis XVI à Versailles (1775). A gauche, autre commode en marqueterie de Riesener,
vers 1775 provenant du château d’Eu.
Le Cabinet d’angle
Choc de cavalerie et d’infanterie, par
Casanova et Le Paon.
Les dessus de portes représentent des scènes
militaires aux XVIIe et XVIIIe siècles, commandées en 1779
aux peintres de batailles Jean-Baptiste Le Paon (17381785) et Francesco-Giuseppe Casanova (1727-1802) pour
la Galerie du Palais-Bourbon à Paris, qui était la résidence
parisienne du prince de Condé.
Au-dessus de la porte donnant accès à la Chambre de
Monsieur le Prince, Choc de cavalerie et d’infanterie par
Francesco-Giuseppe Casanova pour le dessin et Jean
Baptiste Le Paon pour la couleur.
Puis trois combats de sièges menés par le Grand
Condé au XVIIe siècle, par Jean-Baptiste Le Paon : Siège
d’Ypres (1648), Siège de Philippsburg (1644) , et enfin Siège
de Dunkerque (1646), au-dessus de la porte donnant accès
à la Singerie.
La Grande Singerie (1737)
Christophe Huet (1700-1759)
Issu de l'école de Jean-Baptiste Oudry et élève de Claude Gillot, Christophe Huet est un peintre
décorateur animalier travaillant dans le style de Watteau et de Lancret. On lui doit également la
décoration du Cabinet des Singes de l'hôtel de Rohan (entre 1749 et 1752) et celle du Salon chinois au
château de Champs-sur-Marne (avant 1755).
Huet a travaillé dès 1734-1735 pour les Condé à Chantilly : il est l'auteur des paysages avec
animaux de la Chambre dite "de Monsieur le Prince". Il est sans doute également l'auteur du décor de la
Petite Singerie de Chantilly, située dans les appartements privés du duc d'Aumale, au rez-de-chaussée,
que l'on peut visiter sur rendez-vous (billet spécial).
La rencontre de l'art de Cour et de la satire sociale
Le décor de ce salon, que l'on a longtemps attribué à Watteau, est composé de singes et de
chinois, et se révèle typique d'un goût qui s'est développé dans le premier tiers du XVIIIe siècle, sous la
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Régence et au début du règne de Louis XV : le goût de l’exotisme.
Ce goût de l'exotisme, incarné par les Chinois chez les hommes et
figuré par les singes dans le règne animal, se diffuse auprès des Cours
européennes en écho à la découverte récente de la civilisation chinoise
que les missions des Jésuites depuis le XVIIe siècle ont permis de
connaître de manière approfondie. La chinoiserie s'est le plus souvent
limitée au domaine de l'architecture intérieure et des objets décoratifs,
dont l'histoire de la porcelaine de Chantilly offre par ailleurs un bon
exemple.
Mais le XVIIIe siècle voit aussi les débuts de la caricature, de la
satire et du portrait charge, avec des artistes tels que William Hogarth
(1697-1764) en Angleterre ou bien l'imagerie satirique populaire, qui se
multipliera sous la Révolution. La mode des Singeries se situe donc au
carrefour de ces deux influences tout en permettant à l'artiste animalier de
montrer sa virtuosité et son talent.
Le singe peintre, par Huet.
La Grande Singerie présente un décor complexe, formé d'allégories
des cinq sens, des quatre continents, des Sciences et des Arts, de la Guerre, de la Chasse, de la
Peinture, de la Sculpture, de la Géométrie, de la Chine, et d'autres sujets où les Chinois sont
accompagnés de singes.
Les allusions aux maîtres des lieux sont fréquentes : ainsi le singe porte-drapeau (porte d'entrée du
côté du Cabinet d’angle) est vêtu de l'uniforme de Condé. De même, à gauche de la cheminée, un
alchimiste parmi ses cornues est entouré d'un singe décorant une céramique : sans doute faut-il voir là
une allusion à la manufacture de porcelaines créée à Chantilly par le duc de Bourbon en 1725, tandis
qu'un singe peignant des arabesques est un clin d'œil de l'artiste qui se représente ainsi en plein travail.
La Galerie des Batailles, dite "Galerie des Actions de Monsieur le Prince"
Le Grand Condé avait commandé au peintre Sauveur Le
Conte, élève de Van der Meulen et spécialiste de peinture militaire,
une série de onze toiles représentant ses principales actions
militaires et il avait donné des indications précises pour leur
exécution. Il mourut en 1686 alors que le travail, qui dura jusqu’en
1692, était à peine commencé.
La série chronologique de ces batailles débute vers la
gauche, se poursuit jusqu’au fond et revient du côté des
fenêtres du fond à la porte d’entrée. La suite des grandes toiles
comprend La bataille de Rocroy (1643), Fribourg (1644),
Combat de Brie-Comte-Robert, détail
Nordlingen (1645), Dunkerque (1646), Lens (1648), Le blocus de
du Blocus de Paris (1649), par
Paris (1649), La conquête de la Franche-Comté (1668), Le
Sauveur Le Conte.
passage du Rhin (1672).
La série est interrompue par une toile de Michel Corneille rappelant la révolte du Grand Condé
de 1652 à 1659 intitulée Le Repentir. On y voit le prince empêchant une Renommée de publier ses
actions de rebelle et invitant une autre Renommée à proclamer son repentir, cependant que l’Histoire, au
premier plan à gauche, arrache de son livre, appuyé sur le Temps personnifié par Saturne, avec sa faux
et son sablier, les pages que le Grand Condé souhaite effacer de la postérité. Ce tableau fut commandé
après la mort du Grand Condé par son fils.
Le mobilier :
- A l’entrée, à gauche, bureau plat et son cartonnier en marqueterie, provenant de Vaux-le-Vicomte
et ayant appartenu au comte de Choiseul, ministre de la Marine sous Louis XV. Sur une table à
plateau de marbre, cassette à papiers du Grand Condé en maroquin, la dernière acquisition faite
par le duc d’Aumale.
- Au centre, table en marqueterie d’André Boulle (1642-1732) 1er ébéniste de louis XIV, vers 1710.
- Au fond, autre bureau cartonnier et pendule de l’ébéniste Leleu, avec bronzes de Caffieri, exécuté
en 1756 pour l’amateur d’art Ange-Laurent La Live de Jully, introducteur des Ambassadeurs du roi
Louis XV. C’est un des premiers meubles néo-classiques, influencé par la mode de l’Antiquité
consécutive à la découverte de Pompéi et d’Herculanum.
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