Gilles Clavreul, le délégué antiraciste qui n`aime pas

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Gilles Clavreul, le délégué antiraciste qui n`aime pas
Gilles Clavreul, le délégué
antiraciste qui n’aime pas certains
antiracistes
Le délégué interministériel à la lutte contre le racisme et
l’antisémitisme est engagé dans une nouvelle passe d’armes avec une partie
du monde associatif.
Le délégué interministériel à la lutte contre le racisme et l’antisémitisme
(Dilcra), Gilles Clavreul, a une dent contre les «antiracistes pervertis».
Placé sous l’autorité du ministère de l’Intérieur, l’homme est encore monté
d’un ton dans sa critique des partisans, à ses yeux, d’une «offensive
antirépublicaine» qui se rendraient coupables d’une «instrumentalisation» de
la «jeunesse des quartiers populaires». Dans son viseur, les participants au
meeting de Saint-Denis organisé le 11 décembre pour «la paix, la justice et
la dignité».
A lire aussi : Ce qu’il s’est dit au meeting polémique de Saint-Denis avec
Tariq Ramadan
«Légitimer l’islamisme»
Dans un texte publié sur sa page Facebook, Clavreul a éreinté «Tariq Ramadan,
le Parti des indigènes et un certain nombre de collectifs antidémocratiques,
racistes et antisémites», qui auraient, à cette occasion, reçu «le concours
ou la bienveillance de certaines organisations d’extrême gauche et syndicats
professionnels». Tous se rendraient coupables, à ses yeux, de «légitimer
l’islamisme» et de «défendre les prédicateurs fondamentalistes», «sous
couvert de dénoncer une prétendue atteinte aux libertés fondamentales» en
critiquant l’état d’urgence.
La Ligue des droits de l’homme, qui participait à ce meeting en tant
qu’invitée, a tenu à répondre aux attaques du délégué, en publiant elle aussi
un texte signé de sa présidente, Françoise Dumont. Celle-ci interpelle Gilles
Clavreul et lui demande s’il «range» la LDH parmi les «collectifs
antidémocratiques, racistes et antisémites» auxquels il fait référence.
Dénonçant une «ignorance scandaleuse» des positions de l’association,
Françoise Dumont balaie également l’amalgame consistant à écrire que toute
critique de l’état d’urgence conduirait «tout naturellement» au terrorisme.
Et la LDH de poursuivre : «Il ne vous appartenait pas […] de dicter une doxa
antiraciste et pas plus d’exclure tel ou tel. Vous êtes-vous seulement rendu
compte que votre propos ne peut qu’être ressenti que comme un mépris
institutionnel ? Au risque de ruiner l’impact de la mission que le
gouvernement vous a confiée.» Françoise Dumont, qui rappelle les critiques de
la LDH à l’encontre de «certaines positions qui remettent en cause
l’universalisme de l’antiracisme», affirme que celles-ci sont aussi «le
résultat d’une réalité qu’aucun gouvernement n’a su ou voulu réduire».
«Le jeu du communautarisme»
Cette opposition idéologique entre Clavreul et une partie du monde
associatif, notamment le Collectif contre l’islamophobie en France et des
militants antiracistes – qui ont lancé sur Twitter le hashtag #Dilcragate –,
n’est pas nouvelle. Dans un portrait que lui consacrait Libération au
printemps, l’énarque s’en prenait à «tous ces gauchistes qui jouent, sans
vergogne, le jeu du communautarisme». Une phrase lâchée lors de cet entretien
lui colle depuis à la peau et ne cesse d’être ressortie par ses détracteurs :
«Tous les racismes sont condamnables, mais le racisme anti-Arabe et anti-Noir
n’a pas les mêmes ressorts que l’antisémitisme dans sa violence. Il faut être
capable de dire la particularité de l’antisémitisme.»
Fin octobre, lors de la marche de la dignité organisée à Paris, le Dilcra
avait déjà dégainé un texte au vitriol, s’en prenant «à un discours
communautariste qui ne condamne jamais, et bien souvent encourage, les
débordements racistes, antisémites et homophobes».
© Sylvain MOUILLARD
Source :© Gilles Clavreul, le délégué antiraciste qui n’aime pas certains
antiracistes – Libération