SIT face à ses transformations
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SIT face à ses transformations
[E c h o d e s C D E P ] L a t ra n sfo r m at i o n d u d é p a r te m e nt S I T e st u n ch a nt i e r e n co u rs , l i é à ce l le d e la R AT P ; sur demande du CDEP, le cabinet Emergences a réalisé en 2011 une expertise 1 sur les enjeux et les effets organisationnels de ces transformations. Si celles-ci visent à changer l’organisation de SIT, sa logique de métier et son modèle de performance, elles ne s’inscrivent pas dans un projet clairement délimité. SIT face à ses transformations D epuis vingt ans les systèmes d’information (SI) et technologies de l’information (IT) sont au cœur des transformations des grandes entreprises qu’ils outillent et accompagnent dans leur recherche de gains de productivité. La filière SI/ IT n’a pas échappé à ces évolutions et elle est l’objet d’une refonte de son organisation. Ces transformations trouvent au sein de la RATP un écho plus tardif et toujours d’actualité. Les nouvelles missions données à SIT sont inscrites dans la note générale de la présidence n° 5736 datée du 1er décembre 2008, qui se conforme au plan d’entreprise 2008-2012. Si les 22 chantiers du plan impliquent pour leur réalisation une contribution des grandes 8 CONNEXIONS _ Déc./Janv./Fév. 2012 fonctions support de l’entreprise, le n°6 « définir un schéma directeur des SI » concerne directement SIT. En outre ses contrats d’objectifs 2010 et 2011 se réfèrent aux chantiers 1, 2, 12 et 14 du plan d’entreprise. Les modifications d’une année sur l’autre de ces contrats témoignent de cette évolution constante, à laquelle le Schéma Directeur des SI, les projets SI et l’organisation qui les prend en charge, n’échappent pas non plus.Ainsi le contrat d’objectifs 2011 intègre celui, nouveau et majeur, d’adaptation de la plupart des SI de gestion à la séparation comptable entre GI et OT. Mais ce sont sur les questions d’exploitation et de maintenance que les évolutions sont les plus nettes : le contrat 2010 prévoyait le transfert de l’activité éditique vers ESP ; le contrat 2011, quant à lui, prévoit le transfert d’un certain nombre d’activités de maintenance technique vers EST et M2E. En outre il élargit le périmètre de la reprise des activités bureautiques du département M2E à d’autres comme ING ou MOT. Vers une « vraie » DSI Face à la transformation de la RATP, le département SIT affirme vouloir se recentrer sur le cœur de métier d’une direction des systèmes d’information (DSI) : organisation de type industriel, fourniture de systèmes et SIT >département Depuis janvier 2010 le département SIT s’est réorganisé en 4 unités opérationnelles (A2I Architecture et Infrastructure Informatique ; CPS Conception et Production de Systèmes ; ETI Environnement de Travail Informatisé ; OSC Opérateur de Services de Communication) et en 5 groupes de soutien (S&P Stratégie et Pilotage, COM COMmunication, CDG COntrôle de Gestion, RHC Ressources Humaines & Compétence, et HAM acHAts et Marchés). « Au sein de la RATP, le département SIT exerce une fonction de stratégie et de pilotage auprès de l’entreprise et une activité de centre de services auprès des métiers et des salariés de l’entreprise » de services, anticipation des besoins des clients. Dès mars 2009, le document Définir l’offre de services SIT en 2012 constitue la feuille de route de la transformation de SIT. Il s’agit de : - rétablir le lien amont-aval (renforcer les équipes d’urbanistes et d’Assistance à Maîtrise d’Ouvrage), - modifier le périmètre de ses activités (sortir celles d’ingénierie ou de maintenance d’équipements techniques, mutualiser les activités IT assurées par d’autres départements - cas des Assistants Bureautiques Locaux -, réintégrer les 400 « mini-SIT » sous MOE locale) - clarifier ses missions, notamment définir une offre de services et proposer une interface unique pour chaque famille de clients et pour chaque type de services SIT. Dans sa marche à la normalisation marchande, SIT ne part pas de zéro : il dispose déjà d’activités externalisées (développement et maintenance applicative), de progiciels pour les grands systèmes tertiaires, et de méthodes et outils (lexique ITIL, Astrid) propres à une détermination des coûts réels des activités SI/IT. Au 1er janvier 2010, SIT s’est doté d’un organigramme compatible avec sa feuille de route ; il s’agit d’une structure transversale qui maîtrise les systèmes de bout en bout et segmente les fonctions assurées par les différents métiers SI selon la logique de points d’entrée uniques. Cet organigramme met en place les nouvelles unités et groupes de soutien S&P, A2I, CPS, OSC et ETI selon le tableau ci-après. A cette date la direction annonce d’éventuels changements de rattachement organisationnel et non d’activité pour les agents. Mais les déménagements de plusieurs entités et le contenu du SDRH 2010-2012 prouvent le contraire. En particulier la mutualisation des supervisions à CPS, et l’élargissement de la sous-traitance de la maintenance bureautique à ETI mettent en jeu des questions d’organisation du travail. Si la création de l’unité CPS, intégrant ingénierie et production, est conforme à la feuille de route, le projet va plus loin et met à plat l’organisation de la production elle-même. Ainsi la décision de créer un Front Office unique (en charge du fonctionnement opérationnel des systèmes) se traduit par le regroupement en mars 2010 sur le site de Noisy des équipes de Neuilly sur Marne et de Belliard. Or cette mutualisation conduit in fine à la banalisation de la supervision, l’intensification et la perte d’intérêt du travail, et l’orientation des superviseurs, polyvalents, vers le métier d’analyste d’exploitation, spécialisé sur des fonctions d’amélioration ; au risque, pointe Emergences, de perdre l’aspect connaissance des systèmes. A ETI, il y a la volonté de se recentrer sur les activités purement informatiques ; celles de maintenance bureautique sont donc l’objet d’un chantier de sous-traitance et de mutualisation aux mo- CONNEXIONS _ Déc./Janv./Fév. 2012 9 [E c h o d e s C D E P ] SIT face à ses transformations tifs de gains de productivité et baisse des coûts. La direction SIT va plus loin en combinant ce chantier avec celui de la mise en place des gestionnaires bureautiques mutualisés (GBM), et avec celui de la mutualisation des fonctions bureautiques du réseau ABL. Si l’objectif de SIT est de dédoublonner des activités, les ressources sont elles aussi mutualisées et diminuées en termes de nombre de postes d’ABL2. Le SDRH 2010-2012 de SIT nous renseigne sur l’évolution de la structure des effectifs : la part des cadres est volontairement renforcée au détriment des opérateurs (respectivement 38% et 14% en 2005 ; 48% et 7% en 2011). « SIT souhaite à terme ne conserver que des cadres (...) la catégorie opérateurs est vouée à disparaître de SIT » affirme Emergences. En matière d’emplois et de compétences le SDRH mentionne une polarisation accrue sur des métiers à très forte qualification, par Structure catégorielle et moyens humains au 31 janvier 2011 Opérateurs 51 7% Cadres 355 48 % Maîtrises 337 45% • effectif administré : 743 • moyenne d'âge : 42,2 ans • 20% des recrutements cadres de l'entreprise Source : UrbanWeb Effectifs au 31 janvier 2010, hors groupes de soutien RHC, HAM, COM et CDG. Anciennes entités Nouvelles entités A2I API ESI IET IST SIE 6 21 20 2 13 62 6 111 239,5 122,5 CPS 136,5 ETI 11,5 1 TOTAL Source : expertise Emergences 10 136,5 229 OSC S&P TOTAL CONNEXIONS _ Déc./Janv./Fév. 2012 229 12,5 679,5 ila voie suggérée de la formation et du recrutement externes, et le besoin croissant de pilotage des fonctions liées à l’exploitation et à la maintenance informatique et télécoms. Mais le SDRH ne précise pas comment les nouvelles activités seront organisées. Transformations au fil de l’eau « La transformation procède donc par étape et au fil de l’eau, à partir d’une feuille de route obéissant à une stratégie d’entreprise déterminée, dont la mise en oeuvre à SIT est confiée à l’ensemble des unités, sous le contrôle de la Direction. » analyse Emergences. Pour les experts cette méthode « des petits pas » vise à répondre à des interlocuteurs et des enjeux différents : d’un côté la direction RATP à qui SIT doit montrer sa plus-value par rapport à une SSII externe, de l’autre les agents et élus auprès de qui SIT veut minimiser la portée des modifications engagées. Pour la direction il s’agit notamment d’homogénéiser la culture professionnelle des agents (objectif avoué du regroupement des supervisions de Belliard et de Neuilly), voire de maîtriser le calendrier d’éventuelles négociations sur les évolutions des conditions de travail. La démarche de conduite de changement passe mal, car chacun comprend combien cette transformation est structurelle et profonde. La signature en novembre 2011, après six mois d’âpres négociations, d’un protocole d’accord sur l’accompagnement social de la transformation à SIT témoigne des difficultés de la direction à reconnaître les impacts de cette réorganisation et des compensations aux agents (tableaux de rémunération et retraite, mobilités, enveloppes des points de parcours notamment). Emergences a identifié plusieurs facteurs de risques psycho-sociaux potentiels. Incompréhension et anxiété trouvent leurs sources dans les situations décrites de perte de la reconnaissance du travail, procéduralisation, dévitalisation des collectifs de travail, notamment. Malgré la signature récente d’un accord sur la prévention des risques psycho-sociaux à la RATP, les partenaires sociaux ont rappelé en séance CRE du 30 novembre les difficultés de négociation de ce texte, et leur vigilance quant à sa mise en application. La mise en œuvre d’une organisation transversale avec des points d’entrée uniques ouvre la possibilité à l’entreprise de se séparer des centres de services ainsi constitués et s’affranchir de certaines contraintes associées (liées au statut du personnel notamment). Quel avenir pour SIT ? Si les experts d’Emergences écartent la faisabilité d’une externalisation totale en raison de la forte composante métiers des applications, ils précisent que certaines activités pourraient être externalisées, comme ce fut le cas pour l’assistance utilisateurs de premier niveau et pour la maintenance bureautique (en cours). Mais ils rappellent que toute séparation impliquerait d’importants prérequis en termes de renforcement de la gouvernance du SI, de maturité de la normalisation marchande, et qu’il est donc à ce jour prématuré d’envisager un tel chantier. En revanche une option plus crédible à court terme serait une filialisation partielle de SIT (à l’instar de la filiale d’infogérance créée par la SNCF avec IBM). En particulier l’unité OSC « semble détachable de SIT » analyse Emergences, tant sa configuration et son expérience confortent son positionnement comme fournisseur de services télécoms pour le marché extérieur au transport urbain. Sa sortie concernerait alors près d’un tiers des effectifs (217 agents sur 751 en mai 2011). [Laurence Bourguignon] (1) RATP : la transformation du département SIT, Emergences, juin 2011. (2) cf. le vœu adopté par les élus du CRE en séance le 10 novembre 2011.