Étudier les communautés par les sciences sociales
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Étudier les communautés par les sciences sociales
« Étudier les communautés par les sciences sociales : ressources, régulations, inégalités » Proposition de communication Ilka Vari-Lavoisier, École Normale Supérieure (Ulm, Paris) Doctorante en science politique (Centre Maurice Halbwachs) et en économie (CEPREMAP) Sous la direction de Michel Offerlé (ENS) et Sylvie Lambert (INRA, PSE) [email protected] Mots clés : réseaux, migrants, Sénégal, associations de ressortissants Réseaux communautaires et protection « sociale » Les associations de migrants : une cohésion forte – en marge de la société d’accueil La « communauté » n’est pas une donnée : c’est le fruit de dynamiques entre le groupe formé, le groupe latent (tous ceux qui seraient susceptibles d’y participer) et l’environnement (ici : la société d’accueil. Cf. Tilly, 1986). Une source statistique récente, l’enquête Trajectoire et Origine (TeO, INED, 2008) permet de documenter à nouveaux frais les pratiques de migrants nés à l’étranger et vivant en France1. La cohésion, très variable, entre ressortissants d’un même pays tiers pose avec acuité la question du regroupement communautaire – entendu ici comme rassemblement basé sur le partage d’une origine (géographique ou ethnique) commune. Notre intérêt pour les dynamiques réticulaires a mis en évidence l’exemple – frappant – des ressortissants Sénégalais. Ces derniers se démarquent par des pratiques fortement orientées vers leur conationaux, qu’ils vivent ici ou « là-bas » : propension marquée à l’endogamie (existence d’un lien de parenté entre conjoints), réseaux amicaux largement sénégalais, recours à des mécanismes d’entraides basés sur le partage d’une origine commune ; ainsi que maintien de liens étroits avec le pays d’origine et souhait de retourner y vivre. Si les réseaux transnationaux (Lacroix 2012)informels ont d’abord retenu l’attention de notre équipe (Senne et al. 2011), nos travaux ont progressivement mis en évidence le rôle crucial de réseaux institutionnalisés : les associations de migrants. Crées par et pour les 1 Notre exploitation concerne avant tout les primo-migrants. L’échantillon total compte 21 271 personnes. Cf. http://teo.site.ined.fr/ pour plus de détails. ressortissants d’un même pays (et en réalité, souvent d’un même village), ces structures incarnent l’actualité et la prégnance de regroupements à base « communautaires ». Mais comment éclairer alors les stratégies très différenciées des migrants à l’égard de ces groupes d’intérêt basés sur le partage d’une origine commune ? Pourquoi certains s’impliquent – quand d’autres choisissent l’« exit » ? Notre enquête a révélé comment les inégalités socio-professionnelles en France favorisent le recours aux réseaux communautaires, qui fournissent un certain nombre de prestations (ou ressources) tout en nécessitant l’allégeance à certaines règles (ou régulations). A cet égard, on constate que les migrants ayant connu des épisodes de précarité (situation irrégulière, chômage,…) sont nettement plus enclins à avoir recours à des réseaux de pairs (Vreyer et al. 2010). A ces éléments objectivables s’ajoute une précarité plus subjective : le sentiment d’être discriminé, ou de ne pas être considéré comme Français apparaissent également liés statistiquement à l’allégeance aux réseaux de pairs (formels ou non). En croisant ethnographie, statistiques descriptives (ACM) et modélisations (probit), nous étudions comment certaines caractéristiques, dont on peut identifier les effets propres, se conjuguent en réalité dans des configurations récurrentes (Biland et al. 2009). Autant d’éléments permettant de mieux comprendre les trajectoires différenciées des migrants dans ou hors réseaux communautaires. Bibliographie succincte Biland, Émilie, Jean-Sébastien Eideliman et Séverine Gojard. 2009. « Ceteris (non) paribus ? », Genèses, n° 73, no 4 : 37‑56. Lacroix, Thomas. 2012. « Transnationalisme villageois et développement : Kabyles algériens, Chleuhs marocains en France et Panjabis indiens en Grande-Bretagne », Revue européenne des migrations internationales, Vol. 28, no 1 : 71‑84. Senne, Jean-Noel, Isabelle Chort et Flore Gubert. 2011. Migrant Networks as a Basis for Social Control: Remittance Obligations among Senegalese in France and ItalyVerein für Socialpolitik, Research Committee Development Economics. Vreyer, Philippe De, Flore Gubert et Anne-Sophie Robilliard. 2010. « Are There Returns to Migration Experience? An Empirical Analysis using Data on Return Migrants and NonMigrants in West Africa », Annals of Economics and Statistics / Annales d’Économie et de Statistique, no 97/98 : 307‑328.