Quand avez-vous parlé de sexualité pour la dernière fois

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Quand avez-vous parlé de sexualité pour la dernière fois
Quand avez-vous parlé de
sexualité pour la dernière fois
avec vos patientes?
Dr Christian Rollini
psychiatre psychothérapeute FMH
[email protected]
Objectifs
•
Se questionner sur sa sexualité, la sexualité en
général.
•
Etre sensibilisé à l’importance d’aborder ce thème en
consultation.
•
Reconnaître l’importance d’une évaluation
systématique.
•
Avoir des repères et imaginer une prise en charge
cohérente.
•
Réfléchir aux moyens de formation continue.
Faits
•
La sexualité est une préoccupation fondamentale, dans
un monde sexualisé à outrance.
•
Pourtant les soignants ne l’abordent pas ou peu et ne
savent pas quoi en faire.
•
Plus de 80% des patients interrogés trouveraient
normal que leur médecin aborde le sujet…
•
Plus de 80% des médecins indiquent ne pas aborder le
sujet de peur que cela ne gêne leur patients…
Quelques données
Seul 30% des patients osent en parler
spontanément à leur médecin.
Metz ME et al, 1988, 1990, Ashka C et al, 2001
Raisons évoquées par les
patients:
Raisons évoquées par les
médecins:
•
Embarras 90%
• Manque de temps 53%
•
Difficultés pour expliquer 74%
• Manque de connaissances 47%
•
Manque de confiance 21%
• Oubli 37%
• Embarras 32%
Raisons de l’inhibition
•
Tabous
•
Fausses croyances
•
Manque de connaissances, banalisation
•
Folie et troubles psychiques (folie amoureuse,
perversions, etc)
•
Dysfonction de couple
•
Résistances (anxiété)…
J’aurais plus d’indulgence pour la sexualité des
autres si elle ne constituait pas une réplique de la
mienne.
[ P. Bouvard]
Mais pourquoi s’intéresser
à la sexualité
de nos patients?
Raisons d’évaluer
les difficultés sexuelles
•
Très fréquentes (potentiellement source de souffrance,
donc enjeux de prévention)
•
Beaucoup de difficultés sexuelles résolues par
l’information et la déculpabilisation (anxiolyse et
psychoéducation)
Enjeux et raisons d’évaluer
les troubles sexuels
•
Leur incidence est élevée (proportionnellement à l’âge).
•
Les troubles sexuels sont corrélés à des troubles
organiques et psychiques fréquents (symptôme
sentinelle)
•
Il existe la plupart du temps des traitements efficaces.
•
La fonction sexuelle est donc un bon marqueur de la
santé globale d’un individu et de sa qualité de vie.
Contexte socio-historique
•La
sexualité a longtemps eu un rôle rituel souvent sacré,
cristallisant la possession de la femme par l’homme dans
une société patriarcale.
•
Le récit historique prédominant, théologique ou médical,
du moins en occident, a été jusqu’à récemment celui de
cette quête incessante d’une fusion des moitiés, afin de
respecter le vœu de la Nature, à savoir, procréer.
Morale sexuelle
• Il y a donc une bonne sexualité, celle canonique, qui
unit un homme et une femme derrière des portes
hermétiquement closes, dont les corps se rejoignent
sans artefact, si possible en silence et dans l’effroi
devant cette chose merveilleuse et secrète qu’est le
coït.
• Et il y a la mauvaise sexualité, …c’est-à-dire tout le
reste! (Et l’on cherche à consulter plutôt pour le reste.)
Médias et sexualité
Médias et sexualité
•
Vision souvent soft, glamour ou spectaculaire
(pratiques déviantes, bizarres)
•
Comment pratiquer le sexe (pour se rassurer)
•
Pour vendre, on joue sur la frustration (avec des
support virtuels irréalistes) ou sur le pouvoir de
séduction (avec des modèles idéalisés, bien sûr
inaccessibles)
Problèmes
•
Angoisse de performance partagée et besoin
perpétuel de se rassurer sur sa virilité ou sa féminité
•
L’autre est chosifié, mis à distance, contrôlé (pour le
rendre prévisible)
•
On est de plus en plus voyeur, exhibitioniste, mais
plus rarement acteur, (du moins sans un avatar!)
Différences
Femmes-hommes
Fantasmes
masculins:
1. fellation
2. coït
...
17. rencontre
romantique
Fantasmes
féminins:
1. rencontre
romantique
2. coït
...
Différences
Filles-garçons
•
On nie les différences (égalité de droit vs identiques)
ou on les caricatures (mars et venus), ce qui met à mal
le désir.
•
On a donc d’un côté des femmes qui se cherchent
dans leur identité, leur féminité…et de l’autre, des
hommes qui les traitent comme des objets sexuels
chosifiés!
Institutions et individualisme
•
Les institutions de même que le «sacré» sont ébranlés
•
L’engagement n’est plus institutionnel mais personnel
•
Le feedback vient de l’autre plutôt que des institutions
•
La conformité dépend de la réaction de l’autre, ce que
l’on peut moins bien prévoir dans une société
individualiste et du «tout est possible, tout de suite»
•
L’imprévisibilité est une source d’angoisse
interpersonnelle majeure
Révolution sexuelle?
•
La révolution sexuelle a-t-elle eu lieu?
•
Doit-elle encore avoir lieu?
•
Ou est-elle en cours?
Nouvelles contraintes
•
La sexualité est devenue une affirmation de soi
•
Liberté individuelle rime en fait trop souvent avec peur
de l’autre
•
D’où la nécessité d’un nouveau paradigme, d’une
véritable révolution sexuelle
Aspects cliniques
Etiologies organiques/
toxicologiques
•
Génétiques
•
Vasculaires (diabète, FRCV, Synd. vol pelvien, etc)
•
Neurologiques (lésion système autonome, tumeurs frontales, SEP, comitialité, etc)
•
Endocriniennes/ âge (hypoandrogénie, dysfonction axe H-hypophysaires, dysthyroïdies,
hypercorticisme, mal. métaboliques)
•
Locales/ interventions chirurgicales (traumas, maladies gynécologiques ou urologiques)
•
Infectieuses, IST
•
Toxiques/ médicamenteuses
•
Néoplasiques, mal. chronique, fatigue…
Etiologies psychologiques
•
Troubles psychiatriques (axe I et II)
•
Anxiété de performance
•
Dépression
•
Image de soi, estime de soi
•
etc
Etiologies systémiques et
sexuelles
•
Dysfonction relationnelles de couple
•
Problématiques intergénérationnelles
•
Troubles dans le développement sexuel
•
Troubles identitaires
•
etc
Et maintenant que l’on
connaît
les raisons pour aborder,
pourquoi on ne le fait
toujours pas?
Pré requis
•
Connaissances physiologiques, fonctionnelles, etc. du
thérapeute et du patient (vérifier ses acquis!).
•
Être à l’aise avec sa sexualité et les représentations
que l’on peut avoir de notre propre sexe, genre,
sexualité et celles du sexe opposé ou de la sexualité
de nos patients.
•
Capacités corporelles et interpersonnelles (savoir faire,
savoir être, habiletés relationnelles) que l’on acquière.
Evaluation et anamnèse
sexologique
•
Intersystémique
•
Individuelle (biologique, médicale,
toxicologique)
•
Relationnelle (couple)
•
Transgénérationnelle (famille)
Evaluation sexologique
•
Multidimensionnelle
•
Relationnelle
•
Somatique
•
Psychiatrique
•
Toxicologique
•
Sexologique
Anamnèse sexologique
•
Aborder avec modèles bio-psycho-social et
intersystémique.
•
Caractériser le trouble.
•
Explorer la fonctionnalité et classer (désir, excitation,
orgasme, douleur).
•
Explorer les ATCD et la dynamique psychosexuelle, la
constitution identitaire, l’estime de soi, la centration…
•
Contextualiser la problématique en cherchant à
restituer une logique de fonctionnement par rapport à la
sexualité.
Quand aborder le sujet?
•
A la demande du patient ou en cas de plainte faisant suspecter un
problème sexuel
•
Début d’un suivi médical
•
Maladies chroniques, post-chirurgie, etc.
•
Check-up et tous les 5 à 10 ans en cas de FRCV
•
En cas de prescription médicamenteuse
•
Etapes de vie
•
Difficultés de couple
Comment aborder la
sexualité?
•
Repérer les allusions
•
Demander la permission
•
Avec tact et simplement et ouvertement
•
Partir de là où se trouve le patient
•
Utiliser des termes simples, avec ses mots, clarifier
•
Accompagner et expliquer pourquoi on le fait (partie de
l’évaluation médicale)
Compléments d’anamnèse
•
Tentatives précédentes de résolution?
•
Quelles attentes?
•
Pourquoi maintenant?
•
Conséquences d’une « guérison »?
Ok, j’ai les outils pour
aborder le sujet,
mais au fait c’est quoi le
sujet?
Pathologies sexuelles
•
Souvent définie par rapport à une norme sociale,
culturelle
•
Norme vs conformisme?
•
Fausses croyances (inné vs apprentissages, identiques
vs égaux, etc)
Dysfonctions sexuelles
•
Ejaculation prématurée prév env 30% (anxiétés, déterminé
génétiquement)
•
Dysfonction érectile prév var 10 à 60% (anxiétés, cannabis, OH,
médicaments tq AD, AP et anticonvulsivants, etc, FRCV, hormones)
•
Vaginisme prév 5-10%? (anxiétés, abus)
•
Dyspareunie incid? 10-30% (mixte, organique si profond)
•
Anorgasmie prév 15% voir plus? (médicaments)
•
Troubles du désir incid env 30%/ vie (multifactoriel, stress, estime, psy,
hormones…)
Causes organiques d’un
HSDD
•Maladies génétiques
•Affections gynécologiques-(urologiques)
•Affections endocrinologiques
•Dysfonctionnement de l’axe hypotalamohypophisaire
•Déficience androgénique
•Hyper-prolactinemie
•Maladies métaboliques (diabète, Cushing…)
•Maladies neurologiques
•Épilepsie temporale
• Maladies infectieuses
•MST
•Toute maladie entraînant une douleur chronique
•Maladies chroniques
•Fatigue
•Médicaments
•Contraception hormonale
•Drogues / Substances
Causes organiques d’une
dyspareunie
•
•
•
•
•
•
•
•
•
mycoses vaginales récidivantes
infections du col utérin
atrophie vulvo-vaginale post ménopausique
dysfonctions hormonales diverses
Endométriose
kystes ovariens
utérus rétroversés
déchirures périnéales
causes toxiques / médicamenteuses
Prise en charge
•
Evaluation et pose d’un diagnostic précis (trouble vs
difficulté)
•
En cas de difficultés (plus de la moitié des cas) une
simple dédramatisation et information suffisent
•
En cas de troubles: thérapeutique étiologique et
sexologique (bio-psycho-sociale et multimodale)
•
Cave faire DX d’exclusion
•
Médications possibles: AD, IPDE-5, hormonothérapies,
etc.
Prise en charge
interdisciplinaire
•
Plus qu’ailleurs, le travail en sexologie est
interdisciplinaire.
•
Ceci implique des praticiens d’horizons divers,
intéressé par le sujet et par une collaboration.
•
Un réseau en sexologie?
Formation postgrad en
sexologie
•
Diplôme universitaire en santé sexuelle et reproductive
spécialiste en guidance et santé sexuelle
•
Certificat de sexologie clinique spécialiste en
sexologie (en intervention sexologique)
•
Certificat de formation avancée en sexologie 
spécialiste en sexologie (thérapie sexologique)
THM
•
Sytématiquement évaluer la sexualité (marqueur de
qualité de vie et symptôme sentinelle)
•
Se former (apprentissages, nécessité d’une formation)
•
Créer un réseau
Contacts
•
[email protected]
•
www.swissexology.ch
octobre 2010 – novembre 2011
Bibliographie
1.
2.
3.
4.
5.
6.
7.
8.
9.
10.
11.
12.
13.
Principles and practice of sex therapy, S. leiblum, Ed. Guilford
Systemic Sex Therapy, K. M. Hertlein and al.
Les dysfonctions sexuelles, Gilles Trudel (Presses de l’Université du
Québec, 2ème édition)
The New Sex Therapy, Active Treatment of Sexual Dysfonctions, Helen
Singer Kaplan, Brunner (Mazel, Publishers, New York 1974)
Antimanuel d’éducation sexuelle, M. Iacub et P. Maniglier, Ed. Bréal
La vie sexuelle des magazines, A. Steiger, Ed. Michalon
Hommes, femmes, D.C. Geary, Ed. De Boeck
The new sex therapy, H. S. Kaplan
Basson R., Schultz W.W., Sexual sequelae of general medical disorders,
Lancet 2007
Stevenson RWD et al. How to become comfortable talking about sex to your
patients. CMAJ 1983; 128: 797-800
Metz et al. Women’ expectations of physicians’ in sexual health concerns.
1988; 7: 141-52
Metz et al. Men’s expectations of physicians in sexual health concerns. 1990;
16: 79-88
Global Sex Survey, Durex

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