Comportement au feu des protections thermiques des

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Comportement au feu des protections thermiques des
Projet National de recherche et développement
INGÉNIERIE DE LA SÉCURITÉ INCENDIE
Comportement au feu des protections thermiques des éléments de structure ou d'équipement
Mars 2011 SOMMAIRE
INTRODUCTION ................................................................................................................................... 3
1 PRODUITS DE PROTECTION CONTRE LE FEU .......................................................................... 3
1.1 MATÉRIAUX DE PROTECTION ............................................................................................................. 3
1.2 TYPE DE PRODUITS..............................................................................................................................5
1.2.1
PRODUITS DE PROTECTION PROJETÉS....................................................................................................... 5
1.2.1.1
1.2.1.2
1.2.2
1.2.3
Produits projetés fibreux ............................................................................................................ 6
Produits pâteux .......................................................................................................................... 6
PRODUITS EN PLAQUES ................................................................................................................................. 6
PEINTURE INTUMESCENTE ............................................................................................................................ 7
2 PERFORMANCES DES PRODUITS DE PROTECTION ................................................................ 8
2.1 COMPORTEMENT SOUS FEU ISO ....................................................................................................... 8
2.1.1
2.1.2
SYNTHÈSE DES COMPORTEMENTS OBSERVÉS LORS DES ESSAIS ISO ................................................ 8
ANALYSE ........................................................................................................................................................... 8
2.2 COMPORTEMENT SOUS INCENDIE RÉEL ........................................................................................ 10
2.3 BILAN ................................................................................................................................................... 10
3 MESURES DES PROPRIÉTÉS THERMIQUES ............................................................................ 11
3.1 TEMPÉRATURE DE FUSION ET DENSITÉ ......................................................................................... 11
3.1.1
3.1.2
TEMPÉRATURE DE FUSION .......................................................................................................................... 11
DENSITÉ .......................................................................................................................................................... 11
3.2 CHALEUR SPÉCIFIQUE ...................................................................................................................... 11
3.3 CONDUCTIVITÉ THERMIQUE ............................................................................................................. 12
3.3.1
3.3.2
MESURE EN RÉGIME STATIONNAIRE ......................................................................................................... 12
MESURE EN RÉGIME TRANSITOIRE ............................................................................................................ 12
3.4 BILAN ................................................................................................................................................... 13
4 PROPOSITION D'UNE METHODE DE CARACTERISATION DES PROPRIÉTÉS
INTRINSÈQUES DES MATÉRIAUX DE PROTECTION ............................................................... 13
5 PROPOSITION D'UNE DÉMARCHE POUR CARACTÉRISER LES PROPRIÉTÉS DES
MATÉRIAUX DE PROTECTION EN SITUATION RÉELLE ......................................................... 14
6 CONCLUSION ............................................................................................................................... 15
BIBLIOGRAPHIE ................................................................................................................................ 16
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2/16
INTRODUCTION
La principale fonction d’un matériau de protection thermique est de retarder l’échauffement de
l’élément de structure ou d’équipement qu’il protège. Les matériaux de protection des structures, qu'ils
soient projetés, en plaques, intumescents, etc., sont très nombreux et font pour la plupart d’entre eux
l’objet d’essais normalisés spécifiques pour chaque type d'élément : structure béton, acier, bois,
plancher mixte, poteau mixte... Les résultats qui en découlent ne sont utilisables que pour des
méthodes de calcul simplifiées relatives à l'incendie normalisé.
L’objectif initial de cette action est l’élaboration d’une méthodologie afin de disposer, pour ces
matériaux de protection, de propriétés thermiques intrinsèques autorisant la détermination des
températures des éléments de structure protégés pour toute évolution d'incendie.
Le travail réalisé a consisté à recenser les différents types de protection thermique et leurs principales
caractéristiques ; les données recueillies sont exposées dans le premier chapitre. Le comportement
des produits de protection en situation d’incendie est ensuite détaillé dans le deuxième chapitre. Il
démontre la nécessité de disposer des propriétés thermiques (conductivité, capacité thermique,
densité, point de fusion) pour une gamme de températures variant entre 20 et 1200°C. Le troisième
chapitre recense les principales méthodes de mesure ainsi que leurs contraintes. Enfin, une
démarche est proposée pour s’affranchir de ses contraintes et obtenir des caractéristiques utilisables
en ingénierie de la sécurité incendie tout en ayant recours à un nombre restreint d’essai.
1
1.1
PRODUITS DE PROTECTION CONTRE LE FEU
MATÉRIAUX DE PROTECTION
Les matériaux entrant dans la composition des produits de protection ont des propriétés spécifiques
qui obéissent à certains objectifs :
-
Limiter la quantité de chaleur transmise à l’élément protégé
Deux facteurs interviennent à ce niveau : la conductivité thermique du matériau et le produit de la
masse volumique par la capacité calorifique.
La conductivité (W.m-1.K-1) thermique traduit la capacité du matériau à favoriser le transfert de la
chaleur. Pour un même gradient de température, plus la conductivité est faible, plus le flux sera lui
aussi faible.
Le produit masse volumique par capacité calorifique (J.m-3.K-1) représente la quantité d’énergie
qu’il faut fournir au matériau pour élever sa température de 1 K. Plus cette capacité thermique
sera grande, plus le matériau sera capable d’absorber de la chaleur sans subir une forte élévation
de sa température.
Il est cependant difficile de concilier ces deux derniers critères ensemble ; les isolants thermiques
ont souvent une faible capacité thermique.
-
Garantir l’adhérence au support lors de l’incendie afin qu’il protège l’élément durant toute la durée
de l’incendie.
-
Participer le moins possible à la combustion.
Les produits de protection courants utilisent des matériaux incombustibles. Ainsi, le bois qui
possède de bonnes propriétés thermiques mais qui participe à la combustion n’est généralement
pas retenu comme matériau de protection.
-
Conserver ses propriétés dans le temps, principalement pour des éléments situés à l'extérieur de
l'ouvrage.
La température, l’humidité, la corrosivité de l’atmosphère ont généralement une influence sur le
maintien des propriétés des matériaux de protection. Elles représentent l’action des intempéries.
De même en intérieur, les zones exposées (risque de choc, présence de public) ne permettent
pas l’utilisation de tous les types de matériaux.
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Les principaux matériaux employés dans la protection incendie sont le plâtre, la vermiculite, les fibres
minérales, le ciment, les produits silico-calcaires, les peintures intumescentes.
 Le plâtre
Il est composé d’anhydrite et d’hémihydrate obtenu par déshydratation du gypse naturel ou
synthétique.
Le plâtre est mélangé avec différents ajouts (souvent quelques pour mille) :
-
de l’amidon, pour améliorer l’adhésion entre le plâtre et le carton,
des adjuvants,
des retardateurs pour modifier le temps de prise du plâtre.
Les propriétés du plâtre (donc ses utilisations) dépendent, en grande partie, de sa
composition en hémihydrate et en anhydrite. Lors de la mise en œuvre d’un produit de
protection en plâtre, il peut être nécessaire d’utiliser un support pour éviter qu’il ne se détache
de l’élément à protéger ou être armé.
 La vermiculite
La vermiculite est un minéral naturel formé par l'hydratation de certains minéraux basaltiques
(famille des micas). Elle est composée d’eau et de petites particules en forme de lamelles.
Elle possède des propriétés d'expansion sous l'effet de la chaleur (exfoliation). Cette
expansion est liée à l’évaporation de l’eau qui laisse place à de l’air et écarte les lamelles. La
vermiculite expansée a une faible conductivité thermique et une faible densité. C’est sous
cette forme exfoliée que la vermiculite est principalement utilisée pour la protection incendie.
Elle entre aussi dans la composition de certains produits à base de plâtres et ou de mortiers
en tant qu’additif.
Ce matériau se trouve dans des produits en plaque ou projetés.
 Les fibres minérales
Les fibres minérales se divisent en deux catégories : les laines minérales et les fibres
céramiques. Ces deux types de fibres sont obtenus artificiellement, contrairement à l’amiante.
Les laines minérales incluent les laines de roche ou de pierre, la laine de verre et les laines de
laitier. Après formation des fibres, de faibles quantités de liants et un peu d'huile sont
ajoutées, ceci afin de réduire la production de poussière (les laines minérales contiennent
généralement un taux très élevé de particules non fibreuses) et la rupture de ces fibres. Les
fibres céramiques sont des mélanges d'alumine et de silice et d'autres oxydes réfractaires.
Ces fibres minérales sont utilisées dans les produits projetés et les produits en plaque.
 Le ciment
Le ciment est un liant hydraulique obtenu par cuisson d'un mélange, appelé clinker, de
calcaire et d'argile ou de bauxite, puis broyage. La plupart des ciments sont à base de clinker
et d'ajouts (gypse, additifs). Le ciment s'emploie le plus souvent sous forme de poudre :
mélangé avec de l'eau, il fait prise et permet d'agglomérer entre eux des sables et des
granulats (sable ou graviers), pour constituer de véritables roches artificielles.
Ce matériau est utilisé dans les produits projetés et les produits en plaque.
 Les peintures intumescentes
Elles sont constituées de composés organiques qui, sous l’action de la chaleur, gonflent aux
températures de 270°C à 300°C. Ces composés forment alors une mousse protectrice qui
enveloppe l’élément. Cette enveloppe est appelée meringue.
 Matériaux silico-calcaires
La brique silico-calcaire est fabriquée à partir d’un mélange de chaux, de sable et d’eau
(rapport d’environ 90% de sable, 7% de chaux et 3% d’eau). Elle est ensuite moulée sous
pression, puis séchée à 200°C.
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1.2
TYPE DE PRODUITS
Pour la protection des structures contre l'incendie, dans le domaine du bâtiment, plusieurs types de
produits de protection peuvent être utilisés. Les éléments à protéger vont des poteaux aux poutres,
planchers, cloisons, conduits de ventilation ou de désenfumage, gaines…. Les trois grandes familles
de produits de protection les plus utilisés sont :
1. Produits projetés (fibreux / pâteux)
2. Produits en plaques
3. Produits dits « réactifs » (intumescents / ablatifs)
Ces produits doivent être marqués CE depuis l’introduction de l’arrêté du 19 octobre 2006, publié au
JORF le 31 octobre 2006. En fonction des matériaux entrant dans la composition du produit, d’autres
arrêtés peuvent s’appliquer.
Pour un grand nombre de ces produits, le référentiel est constitué par un guide d’agréments
techniques européens organisés comme ci-dessous.
Produits de protection au feu
ETAG 018 part 1 (généralités)
Revêtements réactifs
ETAG 018 part 2
Produits projetés
ETAG 018 part 3
Produits en plaques
ETAG 018 part 4
L’exigence essentielle de la DPC à satisfaire obligatoirement pour ces produits est celle portant le n° 2
(sécurité contre l’incendie) à laquelle des notions de durabilité sont associées.
Les référentiels permettant d’évaluer ces produits de protection sont essentiellement constitués par la
série des normes ENV 13381 (parties 1 à 7, la partie 8 étant en cours d'élaboration).
Le choix d'utilisation de l'un ou l'autre de ces produits, en dehors du facteur économique, dépend de la
configuration de la structure et des conditions climatiques qu'elle subit.
1.2.1
Produits de protection projetés
Ils se prêtent bien à la protection de tous les types d’éléments constructifs : poteaux, poutres, conduits
métalliques ou encore planchers.
Leur application impose le nettoyage (dégraissage, dépoussiérage…) préalable de la surface à traiter.
Pour les structures acier, les opérations de mise en œuvre se déroulent généralement de la manière
suivante :
1.
2.
3.
4.
mise en œuvre d’un primaire anti-corrosion (familles des alkydes, époxy, etc.) ;
mise en œuvre d’un agent de collage ;
mise en œuvre de la protection en une ou plusieurs passes selon les épaisseurs ;
mise en œuvre optionnelle de la finition.
Pour les structures bois et béton, les opérations de mise en œuvre se déroulent généralement de la
manière suivante :
1. mise en œuvre d’un agent de collage ;
2. mise en œuvre de la protection en une ou plusieurs passes selon les épaisseurs ;
3. mise en œuvre optionnelle de la finition.
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5/16
Une solution dite « robuste » pour l’accrochage de la protection consiste à installer un grillage ou
nergalto directement sur le support ou à une épaisseur intermédiaire, principalement si l’épaisseur de
protection est importante.
Par ailleurs, la projection contraint à une isolation des parties voisines pour éviter de les salir et doit
ensuite être suivie d’un nettoyage. Un temps de séchage de plusieurs jours à plusieurs semaines est
requis, ainsi qu’un contrôle de l’épaisseur effective. Dernier point concernant leur mise en œuvre : des
conditions sur la température ambiante peuvent être requises.
Le principal avantage de ce moyen de protection est son coût plus faible que les autres types de
protection. De plus, sa mise en œuvre sur des géométries complexes est relativement aisée.
Ce type de protection est principalement utilisé en intérieur dans des parties inaccessibles aux
occupants en raison de sa fragilité (faible résistance aux chocs). Son utilisation à l’extérieur est
toutefois possible, pourvu qu’une couche protectrice supplémentaire soit appliquée.
Ces produits destinés à la protection de structures acier, bois et béton sont classés en trois familles
principales :



produits projetés fibreux,
produits projetés pâteux à base de plâtre,
produits projetés pâteux à base de ciment.
Le choix du produit dépend du type et de la combinaison d’exigences à satisfaire.
1.2.1.1
Produits projetés fibreux
Ce sont des produits à base de fibres de laine de roche ou de laitier associées avec un liant
hydraulique de type plâtre et/ou ciment.
Les produits de masse volumique < 200 kg/m3 sont plutôt destinés à satisfaire des exigences
d’isolation thermique de confort et acoustique, en marge de la protection au feu. La gamme
d’épaisseur est assez étendue.
Les produits de masse volumique > 200 kg/m3 assurent essentiellement la protection au feu.
Les produits fibreux peuvent être revêtus d’un « encapsulage » en vue de limiter, voire d’éliminer le
relargage des fibres, ou d’un produit « d’imprégnation » fixant plutôt décoratif.
1.2.1.2
Produits pâteux
Ces produits sont à base de plâtre, de vermiculite ou encore de ciment et d'adjuvants spécifiques.
Cette famille de produits peut être divisée en deux sous-familles de produits en fonction de leur masse
volumique apparente.
Ces produits sont apparus vers la fin des années 70, compte tenu des dangers potentiels identifiés
avec l’utilisation des produits à base d'amiante.
La mise en œuvre de ces produits est identique à celle des produits fibreux.
1.2.2
Produits en plaques
Deux groupes de produits sont distingués : à faible densité (< 180 kg.m-3) pour des plaques à base de
fibres minérales ou à forte densité (de 450 à 1000 kg.m-3) dans le cas du plâtre, de la vermiculite ou
des silicates de calcium.
Ces produits en plaques sont mis en œuvre de manière à « encoffrer » la structure à protéger. Ils
s’appliquent facilement aux poutres et aux poteaux et sont utilisés pour la protection par écran. On
recense les mises en œuvre suivantes :
_____________________________________________________________________________________________________
6/16




caisson,
encloisonnement,
plafond suspendu,
fond de coffrage.
La mise en œuvre ne nécessite aucune préparation particulière de l’élément, les plaques sont fixées
entre elles par clouage, collage, vissage ou agrafage;... Il faut néanmoins apporter un soin tout
particulier aux joints entre elles afin de garantir l’efficacité de la protection.
Autre avantage de ce type de protection, leur mise en œuvre rapide génère peu de salissures. A noter
que si la fixation se fait par collage, un temps de séchage supplémentaire est nécessaire. Ces
produits sont généralement résistants aux chocs, présentent un aspect fini propre et peuvent dès lors
être utilisés dans des endroits accessibles aux occupants. Leur utilisation en extérieur est possible
mais impose l’ajout d’une peinture ou d’un film étanche.
Cependant, leur utilisation dans le cadre d’éléments de géométrie complexe ou de grande étendue est
difficilement envisageable. De plus, le coût est plus élevé que pour une protection par projection
d’enduits.
1.2.3
Peinture intumescente
La peinture intumescente est utilisable pour assurer la protection de tous les types d’éléments de
structure en acier.
D’une part, elle isole des flammes l’élément. D’autre part, l’air emprisonné dans la mousse lui procure
une faible conductivité thermique, ce qui retarde l’élévation de la température de l’élément. On
distingue les peintures à base solvant et en phase aqueuse.
Contrairement aux autres moyens de protection passive, elles exigent une préparation minutieuse
(plus soignée) de la surface.
Celle-ci doit être nettoyée et subir un sablage afin d’obtenir un état de surface favorisant l’accrochage
de la peinture. Pour des structures aciers, l’application se déroule généralement de la manière
suivante :




application d’un primaire anti corrosion (familles des alkydes, époxy, etc.) ;
application éventuelle d’un agent de collage ;
application de la protection en une ou plusieurs passes selon les épaisseurs, souvent au pistolet ;
application optionnelle de la finition.
Tout comme pour les produits projetés, des conditions ambiantes (atmosphériques) particulières sont
requises sur la température et le taux d’humidité.
Les peintures intumescentes n’entraînent pas de modifications notables des dimensions extérieures
de la structure ni de surpoids. Elles se prêtent bien à une utilisation sur des structures géométriques
complexes. La couche de finition garantit un état de surface final lisse avec une large gamme de
couleurs possibles.
Ces avantages impliquent cependant quelques contreparties ; ainsi, un grand soin dans la mise en
œuvre est requis. A cela s’ajoutent des durées de séchage de plusieurs heures entre les différentes
passes. Ce critère prend toute son importance lorsque la durée de protection exigée (et par
conséquent, l’épaisseur de peinture intumescente) est importante.
Ce type de protection est plus adapté à l’intérieur qu’à l’extérieur où l’atmosphère est plus corrosive.
Dans ce dernier cas, seules les peintures à base solvant sont utilisables.
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2
PERFORMANCES DES PRODUITS DE PROTECTION
Après avoir recensé les produits de protection couramment utilisés, ce chapitre présente leurs
comportements possibles sur le plan mécanique et thermique en distinguant l'incendie conventionnel
(feu ISO) des incendies réels.
2.1
COMPORTEMENT SOUS FEU ISO
2.1.1
Synthèse des comportements observés lors des essais ISO
Le tableau ci-dessous présente une synthèse sommaire des performances des produits de protection.
Il est basé sur les enseignements des nombreux essais de classification réalisés au sein de la station
d’essais de Maizières-lès-Metz d’Efectis (anciennement CTICM), ainsi qu’au CSTB à Champ-surMarne. Ces deux laboratoires agréés du Ministère de l’Intérieur sont les seuls habilités en France à
effectuer des essais de classement des performances de résistance au feu des éléments de
construction. Ce classement indique, pour chaque type de protection, les durées maximales de
protection pouvant être obtenues, le mode de défaillance le plus couramment observé, ainsi que sa
cause. Enfin, les différences caractéristiques pour un même type de protection sont explicitées.
Type de
protection
Durée
maximale de
protection
Type de
défaillance
Cause
Peinture
intumescente
2h
Dégradation,
retrait
Fragilité de la
meringue
Produit projeté
4 h sur
structure
métallique
6 h sur
structure béton
Perte
d’adhérence
Dégradation
de la colle
4h
Craquelure
Rigidité du
produit
Produit en
plaque
Sous-type de
protection
Phase
aqueuse
Base solvant
Fibreux
Pâteux
vermiculite
Pâteux plâtre
Pâteux ciment
Fibre minérale
Plâtre,
vermiculite,
silicate de
calcium
Caractéristique du
sous-produit
Très fragile
Fragile
Très très souple
Très souple
Souple
Moins souple
Rigide
Très rigide
Tableau 1 : Comportement des produits de protection
2.1.2
Analyse
Le tableau 1 fait ressortir divers modes de défaillance des produits de protection. Avant de se pencher
sur les méthodes expérimentales et de calcul de détermination de l’épaisseur des matériaux de
protection, il est nécessaire de connaître les phénomènes qui gouvernent les performances isolantes
des produits de protection et conduisent à la défaillance.
Les phénomènes thermiques, à savoir le flux de chaleur absorbé, sont-ils prédominants ? Ou s’agit-il
plutôt des phénomènes mécaniques qui conditionnent les performances ? Les deux phénomènes
interviennent-ils de façon concomitante ? En effet, malgré une conductivité limitée et une chaleur
spécifique élevée, un flux de chaleur est toujours présent et conduit in fine à ce que l’élément protégé
atteigne des températures incompatibles avec le maintien de sa fonction. Concernant les aspects
mécaniques, on recense trois types de comportement mécanique pouvant dégrader les performances
d’isolation des produits de protection :
–
–
–
Dégradation mécanique du produit soumis à une forte chaleur pendant une certaine durée
(par exemple la chute de morceaux du produit).
Fissuration du produit sous l’effet de déformation de l’élément protégé.
Décollement du produit par manque d’adhérence sur le support subissant des déformations.
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Dans le cas où ces aspects mécaniques sont présents, la prise en compte de leur influence sur les
performances d’isolation du produit devient également prédominante. Compte tenu de ces éventuels
risques de dégradation des performances, lors d’un essai de caractérisation des produits de
protection sous feu ISO selon la norme d’essai Européenne, il est indispensable d’étudier
l’échauffement de l’élément protégé avec un produit spécifique sous différentes configurations,
notamment avec les poutres chargées, ce qui permet d’identifier l’influence du comportement
mécanique du produit sur ses performances.
Les phénomènes thermiques sont prédominants tant que l’élément protégé garde ses propriétés
mécaniques. Les phénomènes mécaniques prédominent dès que l’élément protégé perd ses
propriétés mécaniques (ce qui généralement accélère l’échauffement de l’élément protégé et la
diminution de la performance).
Lors d’un essai sous feu ISO, le transfert de chaleur va dans un premier temps conduire à un
échauffement modéré de l’élément protégé et, par conséquent, à sa déformation. Cette déformation
impacte à son tour la protection et peut entraîner l’apparition de craquelures qui favorisent le passage
du flux de chaleur vers l’élément protégé et accélèrent son échauffement. Un phénomène de
couplage apparaît. Les aspects thermiques et mécaniques sont donc liés. Ce constat est valable pour
tous les types de protection, indépendamment de l’élément protégé. Les différences observées
interviennent au niveau de la vitesse d’apparition des craquelures. Les produits en plaque ou projetés
contiennent de l’eau soit dans leur formulation chimique, soit sous forme libre (humidité) ; leur chaleur
spécifique est par conséquent élevée, ce qui ralentit l’échauffement et l’apparition de craquelures.
Quels sont les paramètres influant sur le comportement du matériau ?
Ils sont au nombre de trois et caractérisent la « souplesse » du matériau :

Sa dilatation ou son retrait. Par exemple, les éléments en acier ont souvent une dilatation
plus importante que le produit de protection. Les produits de protection peuvent également se
rétracter sous l’action de réactions chimiques, notamment lors de l’évaporation de l’eau qu’ils
contiennent.

Sa flexibilité, c’est-à-dire sa capacité à se déformer sans casser. C’est le point faible des
produits en plaque qui sont naturellement plus rigides que les produits projetés.

Son aptitude à adhérer. L’interface produit de protection / élément protégé se dégrade et
l’accrochage d’une partie ou de la totalité de la protection n’est plus assurée. Ce point
concerne les produits qui font appel à une colle (cas des produits projetés ou des peintures
intumescentes mises en œuvre avec un agent de collage). La forme de l’élément protégé peut
favoriser l’accrochage, c’est le cas sur les poutres en I ou en H, la protection entourant
l’élément forme une coquille. Inversement, l’accrochage est souvent plus fragile sur de
grandes surfaces planes. Ainsi, la performance d’une protection pour une dalle en béton est
souvent limitée par l’accrochage (avec, lors de la rupture, des chutes de grandes surfaces de
produits de protection). Enfin, les produits mis en œuvre avec un nergalto ont un meilleur
comportement en ce qui concerne l’accrochage.
Classification des comportements :
Chaque famille de produits de protection a donc des points faibles et des points forts. Les produits
projetés sont plus souples que les produits en plaques, les jointures constituant généralement le point
de faiblesse de ces produits. Parmi les produits projetés, on distingue différents niveaux de souplesse.
Les produits fibreux sont les plus souples, suivis par les produits pâteux à base de vermiculite, les
produits pâteux à base de plâtre et enfin les produits pâteux à base de ciment.
Les peintures intumescentes ont une relative fragilité ; les peintures à base solvant ont un meilleur
comportement que celles en phase aqueuse dont la meringue est plus fragile. La meringue est
également sensible aux déformations de l’élément protégé, celle-ci favorisant l’apparition de
craquelures.
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2.2
COMPORTEMENT SOUS INCENDIE RÉEL
La performance des produits de protection soumis aux effets d’un feu caractérisé par une température
qui suit, dans un four, la loi ISO, résulte d’effets thermiques et mécaniques. Les industriels savent par
expérience, sous ce type d’action thermique, anticiper le comportement de leurs produits et estimer
une durée de performance adaptée à l’utilisation envisagée.
L’ingénierie de la sécurité incendie réclame de définir des scénarios d'incendie spécifiques au
bâtiment étudié. L’action thermique sur le matériau de protection qui en résulte en dépend
donc également. L’ingénierie de la sécurité incendie introduit donc un paramètre
supplémentaire ; l’action thermique n’est plus unique (conventionnelle) mais varie selon
l'ouvrage et l'activité rencontrés.
Lors d’un essai sous feu ISO, l’action thermique est uniforme sur la surface de l’élément et la
température suit une loi spécifique toujours croissante. Sous un feu réel, l’évolution de l’action
thermique dépend des scénarios retenus. Ainsi, une partie de la surface d’un élément peut être
fortement chauffée, alors que le reste l’est nettement moins. Le cas d’un élément partiellement dans
les flammes est typique de cette situation. Les éléments proches d’une flamme seront également
soumis à un flux radiatif élevé.
L’action thermique peut augmenter (phase de croissance du feu), puis diminuer (si l'apport en
oxygène est limité), puis augmenter de nouveau (plus ou moins rapidement selon la ventilation du
local – bris de vitrage par exemple) à mesure que le feu se développe, pour enfin diminuer avec
l’épuisement du combustible.
Or, les matériaux de protection ainsi que les éléments protégés ont parfois des propriétés qui
dépendent non seulement de leur température mais aussi de son évolution. A titre d’exemple, un
échauffement plus lent que celui imposé par la courbe ISO peut, pour une peinture intumescente,
compromettre la formation de la meringue. Ce phénomène est caractéristique d’une peinture qui
"fond" sans former de meringue (ce phénomène est toutefois prévu dans les essais européens, en
faisant référence au feu couvant – smoldering curve – voir EN 13381-4). Un matériau à forte teneur en
eau, échauffé à une température suffisante pour provoquer l’évaporation de l’eau, a des propriétés
thermiques différentes après refroidissement. Ces phénomènes n’apparaissent pas avec l’action ISO.
Dans le cas d’une sollicitation sous incendie réel, l’utilisation de modèles de calcul d’échauffement et
de comportement mécanique est une solution possible. Mais pour effectuer une simulation numérique,
il s’avère nécessaire de disposer des propriétés thermiques et mécaniques des produits
caractéristiques des situations rencontrées. Les protocoles d’essai sous feu ISO décrivent, en plus du
mode opératoire de l’essai, des méthodes pour estimer des propriétés thermiques "conventionnelles"
des produits. Ainsi, les valeurs obtenues sont globales (caractéristiques de l’ensemble produit de
protection – support) et approximatives. De plus, les hypothèses utilisées limitent l’utilisation de ces
valeurs à des modèles simplifiés comme ceux des Eurocodes. Ces modèles simplifiés ne sont
utilisables qu’avec une action thermique conventionnelle et pour un même ensemble de produits de
protection – support dont l'épaisseur de protection reste dans les limites des valeurs testées.
2.3
BILAN
Les comportements types des produits de protection sont relativement bien connus dans le cas d’une
action thermique conventionnelle, grâce au grand nombre d’essais sous feu ISO réalisés par les
laboratoires. Ces essais permettent de classer un ensemble donné de produits de protection et
supports. Il est obligatoire de caractériser un même produit appliqué sur des supports différents (acier,
bois, béton). Ce mode opératoire se révèle coûteux, alors que du point de vue transfert thermique, les
comportements sont souvent proches indépendamment du type de support. Un essai de
caractérisation pour un ensemble produit de protection – support, puis le recours à la simulation
numérique avec des modèles de transfert thermique avancés est une alternative, à condition de
disposer des propriétés thermiques des matériaux.
Les comportements des produits de protection sont plus difficiles à estimer dans le cas d’une action
thermique sous feu réel avec la nuance suivante : la partie mécanique (fissuration, décollement…) est
encore difficilement modélisable, alors que le comportement thermique est plus facilement
modélisable avec des modèles de transfert thermique avancés. Ils sont utilisables quelle que soit la
sollicitation thermique, donc plus souples et moins coûteux qu’un essai.
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10/16
Bien entendu, des essais spécifiques sont encore nécessaires pour appréhender le comportement
mécanique des protections appliquées sur des éléments de construction.
3
MESURES DES PROPRIÉTÉS THERMIQUES
Ce chapitre se focalise sur les méthodes de mesure des propriétés thermiques qui sont compatibles
avec la précision requise par des modèles avancés.
3.1
3.1.1
TEMPÉRATURE DE FUSION ET DENSITÉ
Température de fusion
La température de fusion est une propriété intrinsèque d’un corps. Elle détermine la température
maximale pour les mesures de densité (masse volumique), de chaleur spécifique et de conductivité
thermique. Cette propriété est mesurable avec les bancs de mesure courants (tube de Thiele par
exemple).
3.1.2
Densité
A température ambiante, la méthode de mesure la plus courante est fondée sur la poussée
d’Archimède. La mesure de la densité à température ambiante se fait simplement en pesant un
échantillon, puis en l’immergeant dans un fluide dont la densité est connue (le plus souvent l’eau). La
masse de fluide déplacée donne le volume de l’échantillon. L’utilisation d’un pycnomètre est une autre
solution. Cet appareil mesure le volume de gaz qu’il faut injecter dans une chambre, avec, puis sans
l’échantillon pour déterminer son volume.
A une température donnée, la mesure peut se faire indirectement en mesurant le coefficient
d’expansion thermique. Connaissant la densité à une température de référence, on accède alors à la
densité.
L’utilisation d’un dilatomètre est la méthode usuelle pour déterminer le coefficient d’expansion
thermique. La variation de longueur d’un échantillon de référence est déterminée en mesurant le
déplacement d’une tige en contact avec l’échantillon. Cette mesure peut aussi se faire directement par
interférométrie. Cette dernière technique, moins courante, est plus précise mais plus lourde à mettre
en œuvre. La mesure par une méthode optique est une autre possibilité. Des marques régulièrement
espacées le long de l’échantillon sont incrustées. Leur déplacement en fonction de la température est
analysé au moyen d’un dispositif vidéo.
Les bancs usuels travaillent sur une gamme de température allant jusqu’à 1000 °C, soit un niveau de
température rencontré en incendie et sont adaptés à la mesure de la densité des produits de
protection.
3.2
CHALEUR SPÉCIFIQUE
Le principe général est de mesurer une différence de température ou de chaleur par rapport à un
élément de référence dont on connaît la chaleur spécifique ou capacité thermique massique.
Trois méthodes sont principalement utilisées [1] : la calorimétrie différentielle à balayage, l’analyse
thermique différentielle et la calorimétrie à chute. Pour des températures comprises entre 20°C et
800°C, les appareils de mesure courants sont suffisants. Cependant, ils sont majoritairement destinés
à faire des mesures sur des échantillons de l’ordre de 1/10 de cm3. A cette échelle, seul le plâtre est
suffisamment homogène pour permettre la mesure. Pour les produits pâteux, la granulométrie varie
entre 1 et 8 mm ; la situation est encore plus délicate avec les produits fibreux. Cette technique n'est
donc pas adaptée à la grande majorité des produits de protection.
Un banc de mesure spécifique doit donc être mis au point pour ces produits. En effet, l’obstacle n’est
pas sur le plan technique mais sur les dimensions des appareils utilisés : ces dimensions sont
corrélées à la précision souhaitée. Ainsi, en fixant une précision moins forte, l’utilisation d’échantillons
compatibles avec la granulométrie des produits de protection est envisageable.
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11/16
3.3
CONDUCTIVITÉ THERMIQUE
La conductivité thermique caractérise la capacité d’un matériau à conduire la chaleur. Sa
connaissance est donc primordiale dans les calculs de transfert thermique.
La conductivité thermique dépend également de la température. Pour certains matériaux, des effets
d’anisotropie existent, par exemple dans les matériaux fibreux. De même, si des phénomènes
physico-chimiques modifient la composition du matériau lors d’un changement de température, alors,
lors du retour à la température initiale, la conductivité thermique est différente. Cet effet d’hystérésis
s’observe par exemple pour les produits à base de ciment à cause de l’évaporation de l’humidité lors
d’une montée en température.
Les méthodes de mesure se classent en deux catégories :
-
mesure en régime stationnaire,
mesure en régime transitoire.
3.3.1
Mesure en régime stationnaire
Ces méthodes sont les plus anciennes et les plus simples à mettre en œuvre. Elles reposent sur
l’établissement et la mesure d’un gradient de température à travers l’échantillon. La plus courante de
ces techniques est la méthode par plaque chaude gardée.
Le temps d’établissement du régime stationnaire peut se révéler très long (de l’ordre de 24 h). La
caractérisation d’un matériau sur une large gamme de température (et par conséquent de points de
mesure) est alors très longue. Par ailleurs, les bancs de mesure fonctionnent rarement au-delà de
500°C car les pertes thermiques périphériques deviennent importantes et biaisent la mesure.
3.3.2
Mesure en régime transitoire
La conductivité thermique est déterminée à partir du suivi dans le temps de la température en réponse
à une sollicitation thermique. La conductivité thermique est déduite par comparaison entre la courbe
obtenue et la solution analytique. Cette dernière dépend de la forme de l’échantillon et de l’impulsion
d’énergie émise (il faut d’ailleurs que cette forme soit suffisamment simple pour que la solution
analytique existe). En fonction de la technique employée, la mesure donne accès à la conductivité, à
la diffusivité, voire aux deux. La diffusivité thermique est reliée à la conductivité thermique par la
formule :
a

C P
a : diffusivité thermique (m2.s-1)
λ : conductivité thermique (W.m-1.K-1)
ρ : densité (kg.m-3)
CP : capacité thermique massique (J.kg-1.K-1)
Les méthodes les plus employées sont la méthode flash (laser flash method), la méthode par fil
chaud, la méthode du ruban chaud (hot strip method) et la méthode TPS (transient plane source
method).
Ces méthodes possèdent des atouts majeurs face aux mesures en régime stationnaire :
-
la conductivité des matériaux anisotropes est mesurable,
des mesures jusqu’à 1000°C sont réalisables sur la majorité des bancs de mesure,
le temps requis pour réaliser une mesure est négligeable par rapport à une mesure en régime
stationnaire.
Quelques incompatibilités avec les matériaux de protection existent cependant. La première est due à
la nature même des matériaux de protection dont la diffusivité est faible. En effet, la solution
analytique est souvent obtenue en faisant certaines hypothèses (certains termes sont par exemple
négligés), notamment sur la diffusivité. La seconde porte sur la taille des échantillons ; des
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échantillons cylindriques d’environ 5 mm de diamètre et quelques millimètres d’épaisseur sont utilisés.
Cela induit deux limitations : l’une sur l’hétérogénéité de l’échantillon, par exemple avec les produits
fibreux ou pâteux, l’autre sur la réalisation même de l’échantillon. Par exemple, un produit composé
de plâtre (suffisamment homogène pour les mesures) est trop friable pour être usiné sur une
épaisseur de quelques millimètres, d’autant que l’état de surface de l’échantillon conditionne fortement
la précision des mesures.
La précision fournie par les méthodes de mesure ci-dessus est bien supérieure à celle requise par les
modèles de transfert thermique. Une alternative serait de conserver le principe général de ces
méthodes, à savoir solliciter thermiquement un élément de géométrie simple de manière à avoir un
signal de réponse de forme simple. La conductivité thermique est alors obtenue soit par identification
avec une solution analytique si elle existe, soit par une méthode inverse. L’intérêt de travailler avec
des signaux de forme simple est de faciliter l’identification et limiter les erreurs. L’utilisation d’un four
de taille réduite, contenant un échantillon en forme de plaque, instrumenté d’un nombre adéquat de
thermocouples dans son épaisseur, est une piste à explorer.
3.4
BILAN
Ce chapitre fait suite aux discussions des partenaires sur l’élaboration d’une méthode de mesure des
propriétés thermiques pour des matériaux de protection. Hormis pour la masse volumique, les
contraintes existantes sur les bancs de mesure ainsi que sur les échantillons montrent qu’il n’est pas
possible en l’état actuel de déterminer ces propriétés avec les bancs de mesure conventionnels pour
les températures rencontrées en situation d’incendie. Toutefois, ces bancs ont vocation à fournir des
mesures avec une précision bien supérieure à celle requise par les modèles de transferts thermiques.
En ce sens, des bancs de mesure faisant le lien entre les bancs de mesures actuels adaptés à des
corps purs (mais inadaptés aux produits de protection) et les essais réalisés dans les laboratoires de
résistance au feu (mais uniquement à des fins de classement et non de mesure) sont une voie
possible. De tels bancs cibleraient une précision intermédiaire.
4
PROPOSITION D'UNE METHODE DE CARACTERISATION DES
PROPRIÉTÉS INTRINSÈQUES DES MATÉRIAUX DE PROTECTION
L’extension des méthodes de mesure actuelles est relativement aisée pour la chaleur spécifique.
Ainsi, l’utilisation d’un petit four calorimétrique apte à recevoir un échantillon cylindrique de diamètre 5
cm et de hauteur 5 cm est suffisante. Ces dimensions permettent de s’affranchir des inhomogénéités
rencontrées dans les matériaux de protection. Lors de sa fabrication, sept thermocouples doivent être
implantés dans l’échantillon (tolérance +/- 0.25 cm) suivant le schéma ci-dessous (1 au centre de
l’échantillon, les six autres à 0.5 cm du bord). Ces thermocouples servent à contrôler la température
de l’échantillon et à asservir l’énergie injectée dans le four.
5 cm
5 cm
Vue de face
Vue de dessus
L’échantillon est placé dans le four dont la température est contrôlée de manière à augmenter par
pallier de 50°C jusqu'à, au moins, 1200°C et jusqu’au point de fusion si possible. L’énergie nécessaire
pour que l’échantillon atteigne la température du four étant liée à la chaleur spécifique du matériau, on
en déduit sa valeur.
Remarque : l’énergie absorbée par l’air pour monter de 50°C étant faible devant celle des produits de
protection, elle est négligée.
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La mesure de la conductivité thermique est à faire une fois les lois d’évolution pour la masse
volumique et pour la chaleur spécifique connues. La loi d’évolution de la chaleur spécifique est
déterminée avec la méthode ci-dessus alors que pour la masse volumique les méthodes décrites au
3.1 sont utilisables. Un échantillon de dimension 20 cm x 20 cm x 4 cm instrumenté avec 25
thermocouples comme indiqué sur le schéma ci-dessous est placé au centre d’un petit four.
Espacement entre les
thermocouples suivant
l’épaisseur : 1 cm
Vue de face
Vue de côté
Le programme de température imposé dans le four suit une loi linéaire avec une augmentation de
température de 1 à 10 K.min-1 jusqu'à 1200°C au moins et jusqu’au point de fusion si possible. La
vitesse de montée en température est à corréler avec la montée en température dans l’échantillon.
L’évolution de la température dans l’échantillon est quasiment mono-dimensionnelle. L’équation
différentielle régissant la température du matériau de protection ne dépend alors plus que de la
diffusivité thermique (comme définie en 3.3.2). Connaissant la masse volumique et la chaleur
spécifique, il est possible de déterminer la conductivité thermique en utilisant une méthode inverse du
type moindre carrés. Ce type de méthode impose d’avoir des données le moins bruitées d’où le grand
nombre de thermocouples dans l’échantillon.
5
PROPOSITION D'UNE DÉMARCHE POUR CARACTÉRISER LES
PROPRIÉTÉS DES MATÉRIAUX DE PROTECTION EN SITUATION
RÉELLE
Dans le but, d'une part, d'optimiser le recours à l'expérimentation pour les produits de protection
pouvant être utilisés pour une gamme étendue de matériaux de structure (béton, acier, bois,
aluminium…) et, d'autre part, de pouvoir disposer des données techniques nécessaires au
dimensionnement des épaisseurs nécessaires de protection à utiliser, quelle que soit l'évolution de
l'incendie de référence, la démarche suivante est proposée :
o Détermination des caractéristiques thermiques du matériau de protection
 Densité (et sa variation éventuelle avec la température)
 Chaleur spécifique entre 20° et 1200°C suivant le protocole du chapitre 4
 Conductivité thermique entre 20° et 1200°C suivant le protocole du chapitre 4
O
Essai d'adhérence, pour le support à protéger sous charge mécanique et de cohésion du
matériau à haute température. Les essais seront effectués en suivant dans le four
l'évolution de l'incendie normalisé (ISO 834) avec l'épaisseur minimale et l'épaisseur
maximale de protection pouvant être utilisée. Selon l'utilisation prévue du matériau de
protection ces essais seront, par exemple, réalisés sur un ou plusieurs des éléments
suivants :
 Plancher béton nervuré de 5 m de portée
 Poutre acier type IPE de 5 m de portée
 Plancher à bac acier collaborant de 3 m de portée
 Poutre en alliage d'aluminium équivalent à IPE de 5 m de portée
 Poutre bois de 5 m de portée
Remarque : l’élément de type poteau n’est pas listé car il est considéré comme plus
pénalisant (et donc sécuritaire) de faire un essai sur un élément poutre dont la flexion
évolue graduellement avec la température. Toutefois, en cas d'utilisation d'un matériau de
protection uniquement pour des éléments comprimés, les poutres peuvent être
remplacées par des poteaux.
O
Appréciation de la capacité, à partir des caractéristiques thermiques intrinsèques, de
retrouver par simulation numérique les températures mesurées dans les éléments de
structures lors des essais précédents.
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14/16
o
Tant que l’adhérence et la cohésion interne du produit sont satisfaisantes, les modèles
thermiques doivent pouvoir fournir une bonne estimation des températures. Cela donne le
domaine de validité des propriétés thermiques mesurées. Dans un second temps, lorsque
l'adhérence ou la cohésion interne (voire l'apparition de fissures) n'est plus totalement
satisfaisante, les simulations numériques sont à nouveau entreprises mais en introduisant
des coefficients de correction tels que ceux décrits dans la norme ENV 13381-4. Tant
qu’ils ne dépassent pas une certaine valeur critique, on se situe dans le domaine de
validité « étendu » des propriétés thermiques. Elles restent utilisables pour simuler
numériquement une sollicitation conventionnelle ou pour déterminer l’échauffement avec
une épaisseur de matériau de protection différente de l’essai.
Remarque : la notion de valeur critique et surtout sa quantification est complexe et
nécessite à elle seule de faire un projet de recherche.
o
En cas de nécessité (comparaison insuffisamment favorable) des essais de transfert
thermique additionnels sur des échantillons de poutres ou de planchers non chargés
mécaniquement peuvent être réalisés. Les simulations numériques réalisées pour simuler
l’échauffement (méthode avec coefficient de correction) seront réputées se situer dans le
domaine de validité « étendu ».
O
Afin de valider l'utilisation des caractéristiques thermiques mesurées à des incendies à
développement "réel" (incluant une phase de refroidissement) des essais additionnels sur
éléments non chargés doivent être réalisés et choisis en fonction des résultats obtenus
sur éléments chargés. Ces éléments non chargés, après protection par une épaisseur
moyenne du matériau de protection, seront soumis à une évolution de température
représentative d'un incendie de type courbe paramétrée telle que définie dans l’annexe A
et l’Eurocode 1 partie 1-2. Les paramètres à utiliser pour cette évolution peuvent être G =
6,25 et qt,d = 180 MJ/m². Ils donnent une température maximale de 1065°C à 21,6 min et
un retour à 20°C après 61.7 min. Cette courbe d’incendie a une montée plus rapide que la
courbe ISO dans sa phase croissante.
O
Suite à ces essais sous incendie à développement "réel" il sera vérifié les possibilités de
retrouver par simulation numérique l'évolution des températures enregistrées dans les
éléments non chargés de la même manière que pour les essais sous courbe ISO sur le
domaine de validité défini précédemment.
Une fois les caractéristiques thermiques validées, pour un domaine d'application spécifié, elles
peuvent ensuite être utilisées soit pour la détermination de tableaux ou abaques relatives à une
évolution d'incendie donnée, soit dans le cadre d'une démarche d'ingénierie de la sécurité incendie.
6
CONCLUSION
Le comportement d’un produit de protection associé à un support spécifique fait intervenir à la fois des
aspects mécaniques et thermiques. Les aspects thermiques sont modélisables à condition de
connaître les propriétés thermiques de ces matériaux et fourniraient déjà une information fiable sur le
comportement du produit de protection. Cependant, il est apparu que les moyens de mesure
conventionnels ne sont pas adaptés à ce type de produit. D’un autre côté, les méthodes d’essai
existantes ne permettent pas non plus d’accéder de manière suffisamment précise à ces informations.
Ainsi, une méthode de mesure a été proposée pour déterminer les caractéristiques intrinsèques des
matériaux de protection. Elle est complétée par une proposition de démarche à la fois expérimentale
et numérique afin d’utiliser de pouvoir déterminer d’une part le domaine de validité de ces propriétés
et d’autre part un domaine de validité « étendu » en introduisant des coefficients de correction dans
lequel les modèles numériques sont utilisables pour des sollicitation autre que la sollicitation
conventionnelle ou pour des configurations de celles testées. La démarche proposée nécessite
encore de préciser des seuils à ne pas dépasser pour les coefficients de correction et ainsi définir de
manière précise le domaine de validité pour les propriétés thermiques mesurées. Cette étape pourrait
réunir tous les acteurs mentionnés dans ce rapport autour d’un projet de recherche complémentaire.
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BIBLIOGRAPHIE
[1] – W. HEMMINGER AND S.M. SARGE. Handbook of thermal Analysis and Calorimetry. Editions
Elsevier, 1998.
[2] – ENV 13381 : caractérisation des protection des structures.
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