L`assurance juridique - Option consommateurs

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L`assurance juridique - Option consommateurs
L’assurance juridique :
une solution pour une
meilleure accessibilité
à la justice ?
Étude présentée au Bureau de la consommation d’Industrie Canada
mars 2007
Coordination : Me Marie-Hélène Beaulieu
Rédaction : Jacinthe Lauzon
Recherche : Me Marie-Hélène Beaulieu et Jacinthe Lauzon
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
OPTION CONSOMMATEURS
MISSION
Option consommateurs est une association à but non lucratif qui a pour mission de défendre les
droits fondamentaux des citoyens-consommateurs tels qu’énoncés par les Nations unies en
matière de protection des consommateurs et de veiller à ce qu’ils soient reconnus et respectés.
HISTOIRE
L’association existe depuis 1983. En 1999, elle a regroupé ses activités avec l’Association des
consommateurs du Québec (ACQ) qui existait depuis plus de 50 ans et accomplissait la même
mission qu’elle.
PRINCIPALES ACTIVITÉS
Option consommateurs compte sur une équipe d’une vingtaine d’employés qui oeuvrent au sein
de quatre services : le Service budgétaire, le Service juridique, le Service d’agence de presse et le
Service de recherche et de représentation. Au cours des ans, Option consommateurs a notamment
développé une expertise dans les domaines des services financiers, de la santé et de
l’agroalimentaire, de l’énergie, du voyage, de l’accès à la justice, des pratique commerciales, de
l’endettement et de la protection de la vie privée. Chaque année, nous rejoignons entre 7 000 et
10 000 consommateurs directement, nous réalisons de nombreuses entrevues dans les médias,
nous siégeons sur plusieurs comités du travail et conseils d’administration, nous réalisons des
projets d’intervention d’envergure avec d’importants partenaires, nous produisons notamment des
rapports de recherche, des mémoires et des guides d’achat, dont le Guide jouets annuel du
magazine Protégez-vous.
MEMBERSHIP
Pour faire changer les choses, les actions d’Option consommateurs sont multiples : recherches,
recours collectifs et pressions auprès des instances gouvernementales et des entreprises. Vous
pouvez nous aider à en faire plus pour vous en devenant membre d’Option consommateurs au
www.option-consommateurs.org
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
REMERCIEMENTS
Option consommateur remercie Industrie Canada pour son soutien financier à la réalisation de
cette recherche. Nous souhaitons également remercier le Barreau du Québec, Me Robert Primeau,
directeur général de la Corporation de services du Barreau du Québec et Me Diane Bélanger,
présidente de FBA groupe conseils, pour leurs précieux renseignements ainsi que tous les
participants qui ont répondu à notre appel.
La reproduction d’extraits limités de ce rapport est permise, à condition d’en mentionner la
source. Sa reproduction ou toute allusion à son contenu à des fins publicitaires ou lucratives sont
toutefois strictement interdites.
DÉPÔT LÉGAL
Bibliothèque nationale du Québec
Bibliothèque nationale du Canada
ISBN 978-2-923522-15-9
Option consommateurs
2120, rue Sherbrooke Est, bureau 604
Montréal, Québec
H2K 1C3
Téléphone : 514-598-7288
Télécopieur : 514-598-8511
Courriel : [email protected]
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
RÉSUMÉ
OBJECTIF
Afin de rendre la justice plus accessible, les compagnies d’assurances proposent maintenant à
leurs clients des produits d’assurance pour couvrir une partie de leurs frais juridiques en cas de
litige. Le régime de protection juridique créé par les compagnies d’assurances devrait permettre
aux personnes ayant un revenu supérieur à celui prévu par exemple aux lois provinciales sur
l’aide juridique d’obtenir, moyennant une prime mensuelle, des renseignements sur leurs droits et
recours, et même parfois d’être représentées en cours, si nécessaire.
Les compagnies d’assurances, entreprises privées, viennent ainsi combler un besoin créé par le
sous-financement du régime juridique canadien. Plusieurs questions sont soulevées par l’arrivée
de cette nouvelle couverture d’assurance. Notamment, les frais de l’assurance juridique
permettent-ils un réel règlement à moindre coût ? Cette étude a donc pour but de mesurer
l’impact de l’assurance juridique sur l’accessibilité à la justice pour les consommateurs.
MÉTHODOLOGIE
Pour ce faire, nous présentons dans cette étude le contexte de l’accessibilité à la justice et du
régime d’aide juridique au Québec, un aperçu du produit « assurance juridique » tel que vu au
Québec et un aperçu du produit « assurance juridique » tel que vu dans différents pays d’Europe.
Afin de connaître comment les consommateurs et le public perçoivent le produit, nous avons
réalisé trente entrevues dont quinze avec des participants ayant contracté une police d’assurance
juridique et quinze avec des participants n’ayant pas contracté une police d’assurance juridique.
Nous avons également fait l’analyse de contrats d’assurance juridique provenant de cinq
compagnies d’assurances afin de savoir si ceux-ci étaient lisibles pour les consommateurs.
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
RECOMMANDATIONS
À la suite à cette étude, Option consommateurs émet les six recommandations suivantes :
Recommandation I
-
Les assureurs devraient remettre aux assurés un contrat rédigé dans un langage lisible.
Pour ce faire, ils pourraient remettre avec celui-ci un guide d’interprétation et un
lexique rédigé dans un langage clair et concis. À l’intérieur de ce guide, ils devraient
s’abstenir d’utiliser un jargon juridique, employer des mots courants et éviter des
formulations imprécises et des structures de phrase trop lourde. Ils pourraient
également ajouter des exemples concrets pour faciliter la compréhension des
domaines couverts et des exclusions.
Recommandation II
-
Les assureurs devraient informer le plus clairement possible les assurés sur ce que le
produit peut offrir. Par exemple, la différence entre assistance juridique et assurance
juridique peut paraître claire pour les représentants de compagnies d’assurances, ce
qui n’est pas toujours le cas pour les assurés. Lorsqu’une personne contracte
l’assurance juridique, l’assureur devrait préciser les domaines couverts, les types
d’exclusions, le plafond de garantie, les honoraires couverts et autres. L’assuré devrait
également être informé s’il a déjà accès à un service d’assistance juridique via ses
autres contrats d’assurance. Cette procédure va permettre d’améliorer la relation entre
les assureurs et les assurés et éviter toutes formes de confusion et de frustration.
Recommandation III
-
Les assureurs devraient modifier les termes « assurance juridique » et « assistance
juridique » afin d’éviter que le public ne les confonde. Un grand nombre de personnes
qui souhaitaient participer à notre étude ne saisissaient pas la différence entre les deux
termes. Ils croyaient détenir une assurance juridique lorsque, en réalité, ils avaient
seulement accès à un service d’assistance juridique.
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
Recommandation IV
-
L’assurance juridique ne devrait pas être incluse « gratuitement » avec l’assurance
habitation ou d’autres produits d’assurance. Nous considérons cette pratique comme
étant une vente déguisée où l’assuré contracte l’assurance juridique sans son
consentement. En Grande-Bretagne et en France, nombreux sont les assurés qui
ignorent posséder une protection juridique étant donné que celle-ci est incluse à
d’autres produits d’assurance. Cette méthode de vente pourrait avoir le même impact
au Canada.
Recommandation V
-
Afin de favoriser l’accessibilité à la justice, il faut encourager le développement de
l’accès à l’information via, par exemple, l’assistance juridique. Ceci permettra aux
citoyens de faire valoir plus facilement leurs droits et de les familiariser aux
procédures et au langage du système juridique. Pour ce faire, il serait favorable qu’un
groupe de travail soit mis sur pied. Celui-ci pourrait être composé de représentants des
ministères de la justice de certaines provinces canadiennes et du ministère de la
Justice du Canada, de représentants du secteur financier, de consommateurs,
d’ombudsman bancaire canadien et autres. Sachant que l’assistance juridique permet
de résoudre un bon nombre de problèmes, il est essentiel que celle-ci soit gratuite,
illimitée, accessible à tous et qu’elle couvre tous les domaines du droit.
Recommandation VI
-
Afin de favoriser l’accessibilité à la justice, il faut encourager et faire connaître aux
citoyens d’autres méthodes de règlements, comme la médiation et la conciliation. Ceci
va permettre de diminuer les délais à la cour, la longueur des procès ainsi que les coûts
du système juridique.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
TABLE DES MATIÈRES
Option consommateurs……………………………………………………………………….II
Remerciements………………………………………………………………………………. IV
Résumé………………………………………………………………………………………... V
Recommandations……………………………………………………………….…………...VI
Table des matières………………………………………………………………………… VIII
Glossaire ………………………………………………………..…………………………….XI
INTRODUCTION……………………………………………………………..………..……1
1- RECHERCHE DOCUMENTAIRE………………………………………………………4
1.1
L’accessibilité à la justice……………………………..……………………..………...4
1.1.1 L’aide juridique au Québec……………………………………………………..4
1.1.2 Un aperçu de l’aide juridique en Ontario……………………………………….7
1.1.3 Un aperçu de l’aide juridique en Colombie-Britannique…………………….…7
1.1.4 Les effets au Québec d’un régime qui a souffert…………………………….….8
1.2
L’assurance juridique…………………………………………………………………11
1.2.1 Le marché de l’assurance juridique au Canada……………………………..….12
1.2.2 Les réglementations en vigueur concernant l’assurance juridique…………..…14
1.2.3 Qu’est-ce que l’assurance juridique ?..................................................................15
1.2.4 Le produit « assurance juridique » en sept points…………………………...….16
1.3
Un aperçu des systèmes d’assurance juridique européens………………………..…..20
1.3.1 L’assurance juridique en France…………………………………………..…....20
1.3.2 L’assurance juridique en Allemagne…………………………………..……….23
1.3.3
L’assurance juridique en Grande-Bretagne………………………………..…...25
1.3.4 L’assurance juridique en Suède…………………………………………...……26
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
viii
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
1.4
L’assurance juridique : une solution au manque d’accès à la justice ?......................28
2- MÉTHODOLOGIE……………………………………………………………..…………30
2.1
L’entrevue semi-dirigée…………………………………………..…………..………31
2.2
L’échantillonnage des acteurs………………………………………………..………33
2.3
Les procédures de recrutement…………………………………………………….....35
2.4
L’éthique……………………………………………………………………………...36
2.5
Les outils utilisés lors des entrevues………………………………………………....36
2.6
Le déroulement des entrevues………………………………………………………..36
2.7
Méthode d’analyse des données……………………………………………………...37
3- RÉSULTATS………………………………………………………………………..…….39
3.1
L’assurance juridique encouragée par le Barreau du Québec………...……….…..39
3.2
Les impressions du système juridique au Québec………………………....….….…40
3.3
Les participants ayant contracté une police d’assurance juridique………………..41
3.3.1
Les satisfactions des assurés………………………….....................................43
3.3.2
Les insatisfactions des assurés…………………………………………….….44
3.3.3
Les avantages de l’assurance juridique………………………………….……45
3.3.4
Les avantages de l’assistance juridique……………………………….………46
3.3.5
Les limites de l’assurance juridique………………………………….……….47
3.3.6
Les confusions des assurés face à l’assurance juridique……………….……..48
3.4
Les participants n’ayant pas contracté une police d’assurance juridique..…….…..49
3.5
La lisibilité des contrats d’assurance juridique…………………….…….…………50
3.5.1
La terminologie juridique………………………………………….………….51
3.5.2
La longueur des clauses et les références…………………………….……….51
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
ix
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
3.5.3
Des descriptions à en perdre son latin………………………………….……..52
3.5.4
Les inclusions versus les exclusions………………………………….……….53
3.5.5
Les commentaires des participants concernant la lisibilité des contrats…..…..53
CONCLUSION …………………………………………………………….………………...56
RECOMMANDATIONS…………………………………………………...………………..59
SOURCES DOCUMENTAIRES……………………………………….…………………...61
Annexes
I.
Questionnaires utilisés lors des entrevues
II.
Divers contrats d’assurance juridique
III.
Tableau comparatif des produits d’assurance juridique des particuliers réalisé par
le Barreau du Québec
Tableaux
Tableau 1
Seuils d’admissibilité au Québec à l’aide juridique pour l’année 2007……………...…. ..6
Tableau 2 Seuils d’admissibilité en Ontario à l’aide juridique pour 2007…………………………...7
Tableau 3 Les seuils d’admissibilité en Colombie Britannique à l’aide juridique gratuite
pour 2007……………………………………………………………………....…..8
Tableau 4 Les domaines de litiges garantis………………………………...…...…………...17
Tableau 5 Échantillonnage des acteurs ayant contracté une assurance juridique…..……....33
Tableau 6 Échantillonnage des acteurs n’ayant pas contracté une assurance juridique…...34
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
GLOSSAIRE
Dans les pages qui suivent, nous donnerons aux termes indiqués ci-dessous le sens suivant :
« Aide juridique »
système de soutien juridique permettant aux citoyens
économiquement défavorisés de pouvoir défendre et revendiquer
leurs droits gratuitement ou moyennant une contribution.
« Assistance juridique »
service de soutien juridique par téléphone où l’assuré peut
consulter un avocat.
« Assurance juridique »
l’assurance juridique offre une couverture contre certains
événements pouvant forcer une personne à consulter un avocat ou
à avoir recours aux tribunaux, à la médiation ou à l’arbitrage.
« Consommateur »
personne physique qui s’est procurée ou tente de se procurer une
police d’assurance juridique.
« Couverture »
somme d'argent défrayée par l’assureur qui est destinée à
compenser un déficit de l’assuré en servant de protection contre
un événement fâcheux.
« Plafond »
somme d’argent maximal défrayée par l’assureur en cas de litige
garanti ou d’une intervention juridique couverte.
« Police »
document écrit, signé par l’assureur et le souscripteur, qui atteste
l’existence d’un contrat d’assurance et qui en énonce les
stipulations et les conditions.
« Prime »
montant d’argent que l’assuré paye à l’assureur pour une
protection financière contre des risques précis pour une période
de temps préétablie.
« Protection »
garantie procurée par une assurance contre la survenance d’un
risque.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
xi
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
L’assurance juridique :
une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
Il est bien connu que l’accessibilité à la justice est l’un des fondements de notre société. Or, de
nos jours, ce droit élémentaire s’applique-t-il réellement ? En théorie, tous sont égaux devant la
loi, mais en pratique, nombreux sont ceux qui n’arrivent pas à faire valoir leurs droits. Certains
citoyens, désemparés et découragés de la complexité du système judiciaire vont même aller
jusqu’à plaider coupables pour avoir rapidement la paix sans connaître toutefois les conséquences
de leur geste 1 . D’autres se représentent seuls en cour, malgré leur manque de connaissances
nécessaires, parce qu’ils ne possèdent pas les moyens financiers pour engager un avocat.
Finalement, de plus en plus de citoyens renoncent tout simplement à recourir aux tribunaux à
cause des coûts exorbitants que cela représente.
Dans un dossier saisissant sur la justice publié en juillet 2000 dans le magazine L’actualité, Me
Pierre Noreau, directeur du Centre de recherche en droit public de l’Université de Montréal,
soutient que seulement dix pour cent des citoyens ont les moyens d’engager une poursuite et que
le même pourcentage de personnes a accès à l’aide juridique. Les 80 pour cent restants estiment
ne pas avoir les moyens de payer le prix des services juridiques 2 . En regard de ces données, on
peut se demander qui a réellement accès la justice ? Considérant qu’en moyenne les honoraires
des avocats sont de 165 dollars de l’heure 3 , pour la majorité des citoyens, ce droit fondamental
demeure une théorie utopique.
Le problème de l’accessibilité à la justice n’est pas un sujet récent. Il y a environ six ans, le juge
Michael Sheehan de la Cour du Québec avait sonné l’alarme par ses propos : « Toutes les chartes
affirment que toute personne a droit à la justice. Si le coût des procès vient dérober ça, c’est
1
Devroede, P. & Leprince J.-M. Quelle justice ? Zone Libre. Montréal : Société de Radio-Canada. 25 avril 2003.
2
Muckle, Yan (2000). Y a-t-il encore une justice ? L’actualité, juillet 2000, Montréal : p. 18.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
1
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
grave. On ne peut pas vivre au Far West et voir des gens régler leurs problèmes à coups de bâton
de baseball » 4 . On remarque d’ailleurs que le nombre de dossiers en matière civile est en chute
libre depuis 1984 malgré une hausse de la population.
Face à la complexité du système judiciaire et des nombreuses lois, le gouvernement québécois a
implanté en 1972 un régime d’aide juridique pour les personnes économiquement défavorisées.
Toutefois, ce dernier a subi de nombreuses compressions budgétaires, ce qui a mené à une
nouvelle réforme en 1996. Depuis, des milliers de demandes ont été rejetées par le régime parce
qu’elles ne correspondaient pas aux nouveaux critères d’accessibilité. D’après Statistique
Canada 5 , plus de 225 000 demandes ont été refusées au Québec entre l’année 2000 et 2004.
Afin de combler le sous-financement du régime juridique et offrir à un plus grand nombre
d’individus une meilleure accessibilité à la justice, le Barreau du Québec encourage depuis
quelques années les citoyens à se procurer une assurance juridique offerte par certaines
compagnies d’assurances. Pouvoir consulter un avocat ou un notaire pour aussi peu que quatre
dollars par mois, c’est possible disent certaines publicités. En effet, quelques assureurs offrent
désormais ce service à leurs clients par le biais d’une assurance juridique. Celle-ci devrait
permettre aux personnes ayant un revenu supérieur à celui prévu par exemple aux lois
provinciales sur l’aide juridique, d’obtenir des renseignements sur leurs droits et recours à
certaines conditions d’être représentées en cour.
À ce sujet, l’assurance juridique est-elle une voie d’avenir pour régler les problèmes
d’accessibilité à la justice ? Quels sont les avantages et les limites de ce nouveau produit ?
Comment est-il perçu par les consommateurs ? D’autre part, ce produit a-t-il déjà fait ses preuves
dans d’autres pays ? Face à ce questionnement, cette étude vise à mesurer l’impact de l’assurance
juridique sur l’accessibilité à la justice et de répondre à ces questions. Malgré le fait que
l’assurance juridique existe depuis près d’une douzaine d’années au Canada, on en parle
davantage depuis les deux dernières années. Il est donc essentiel de faire un portrait global de la
3
Série : Les coûts de la justice : Trop gourmands ? La Presse, 8 janvier 2006, Montréal : cahier plus page 3
Malboeuf, M.-C. (janvier 2006). Le cri d’alarme des juristes. Marie-Claude, La Presse, 7 janvier 2006, Montréal :
Actuel p. 3.
5
Statistique Canada. Statistiques sur l’aide juridique, site Internet.
4
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2
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
situation. En ces temps où les consommateurs ont de plus en plus de difficulté à faire valoir leurs
droits, il est nécessaire de voir si l’assurance juridique est une solution aux problèmes
d’accessibilité à la justice.
En outre, nous avons communiqué avec madame Lucille Benoît-Rousseau, responsable
d’assurance dommages au Bureau d’assurance du Canada (BAC), qui nous a indiqué que, malgré
le fait que le BAC n’a pas l’intention de créer un avenant spécial sur l’assurance juridique dans
son contrat de base, elle considère que cette couverture offerte par les compagnies d’assurances
pourrait faciliter l’accès à la justice. Elle notait toutefois que les citoyens ignoraient presque
toujours qu’ils avaient droit à de l’assurance juridique. Il est donc très important, selon elle, que
les citoyens soient mieux informés sur ce produit, d’où l’importance de cette étude.
Finalement, afin de justifier le choix de notre sujet d’étude, nous évoquerons d’abord le contexte
de l’accessibilité à la justice et du régime d’aide juridique au Québec, en Ontario et en ColombieBritannique. Puis, nous présenterons le produit « assurance juridique » tel que vu au Québec,
pour ensuite aborder la place qu’il occupe dans certains pays d’Europe. Après avoir dégagé ces
éléments, nous exposerons la question de recherche qui découle de cette revue de littérature et la
méthode que nous avons retenue pour réaliser la présente étude. Enfin, nous présenterons
l’analyse de nos résultats et nous terminerons par des recommandations.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
PARTIE I
RECHERCHE DOCUMENTAIRE
1.1
L’accessibilité à la justice
1.1.1 L’aide juridique au Québec
Au début des années 1970, plusieurs lois à caractère social ont été introduites au Québec, dont la
Loi sur la protection du consommateur, la Loi sur l’assurance maladie et la Loi favorisant l’accès
à la justice. En 1972, le ministre Choquette, ministre de la Justice à l’époque, soulignait que :
« tout Québécois qui est dans une situation économique déplorable a droit à
l’aide sociale et tout Québécois a le droit de consulter un médecin et d’être traité
à l’hôpital sans désastre financier. N’avons-nous pas le même devoir
fondamental de voir à ce que, sur le plan juridique, ceux qui ont un urgent besoin
de défense dans le système juridique et l’appareil judiciaire complexe que nous
connaissons se voient reconnaître le droit à la consultation et à l’assistance alors
que leur situation financière ne leur permet pas de jouir de la plénitude de leurs
droits comme humains ? » 6
L’accessibilité à la justice étant ainsi reconnue comme un droit fondamental, le gouvernement a
implanté durant cette même année un système d’aide juridique permettant aux citoyens
économiquement défavorisés de défendre et de revendiquer leurs droits gratuitement 7 . On
entendait alors par personnes économiquement défavorisées celles qui n’avaient pas les moyens
pécuniaires suffisants pour exercer un droit ou obtenir un conseil juridique, sans se priver des
moyens nécessaires de subsistance 8 . À l’époque, la couverture des services était quasi totale et
toute personne travaillant au salaire minimum, soit de 1,60 dollars de l’heure, était éligible à
l’aide juridique. Les barèmes d’admissibilité ont d’ailleurs dépassé légèrement le salaire
minimum jusqu’en 1981 9 .
6
Ministre Jérôme Choquette. Journal des débats de l’Assemblée nationale – Comission parlementaire, 29ième
législature, 3ième session. Projet de la loi 10, vendredi le 7 juillet 1972, p. 2082’ dans Jarry, 2005, p. 3.
7
Art. 1c) et 5) de la Loi sur l’aide juridique, L.R.Q., c A-14, tel que modifié par L.Q. 1996, c. 2 art. 26.
8
id art. 2
9
Jarry, M. (novembre 2005). Une petite histoire de l’aide juridique. Commission des services juridiques. Montréal,
pp. 4-5.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
À l’exception d’une dernière augmentation en 1985, le système d’aide juridique a souffert par la
suite de nombreuses compressions budgétaires. En 1993, ces compressions ont mené à une
nouvelle réforme qui marqua des changements dramatiques. Cette réforme a eu pour effet de
détourner l’aide juridique de sa mission originale en introduisant diverses mesures : nouveau
barème de revenu des clientèles admissibles, critères d’admissibilité plus restrictifs, seuils
d’admissibilité très bas et jamais indexés, réduction des services et accès aux services moyennant
une contribution financière. À ce sujet, Me Monique Jarry de la Commission des services
juridiques, évoque dans un écrit qu’à la suite à ces modifications majeures :
« On a assisté à une diminution significative des demandes qui s’est accompagnée d’une
augmentation du nombre de refus. Alors que durant les années précédant la réforme le
pourcentage de refus pour tous les motifs prévus par la loi oscillait autour de 10 pour
cent, il se maintient à 18 pour cent en 1998 10 .
Me Jarry ajoute que l’instauration du volet contributif ne semble pas avoir eu un grand impact
puisqu’il ne représente que 2,8 pour cent des demandes acceptées entre 1998 et 2005 11 .
Malgré le fait que la réforme ait été révisée en 2004, l’aide juridique ne demeure accessible que
pour une minorité de citoyens. Les personnes seules travaillant au salaire minimum, ainsi que les
bénéficiaires d’une pension de vieillesse fédérale à laquelle s’ajoute le supplément de revenu
garanti, n’ont pas accès aux services juridiques gratuits 12 . Or, les revenus de ces individus sont
bien en deçà du seuil de faible revenu fixé par Statistique Canada, qui était de 20 778 dollars en
2005 avant impôt pour une personne seule sans enfant 13 . Le Conseil national du bien-être
considère d’ailleurs ce revenu comme un véritable seuil de pauvreté. Selon lui, les personnes
dont le revenu est inférieur à 20 778 dollars consacrent une part démesurée de leur revenu brut
au logement, à la nourriture et à l’habillement 14 .
10
Jarry, M. (novembre 2005). Une petite histoire de l’aide juridique. Commission des services juridiques. Montréal,
p. 10.
11
Idem
12
À partir de mai 2007, le salaire minimum au Québec sera de 8 dollars de l’heure. Un individu travaillant 35 heures
par semaine au salaire minimum de 8 dollars fera environ 14 560 dollars par an. Le supplément de revenu garanti
est une prestation mensuelle non imposable, versée aux personnes à faible
revenu qui reçoivent la pension de la Sécurité vieillesse.
13
Conseil National du bien-être social. Seuils de faible revenu avant impôt de Statistique Canada (établis en
1992) pour 2005, site Internet.
14
Conseil National du bien-être social, site Internet.
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
Ainsi, en 2007, pour avoir accès aux services gratuits d’un avocat via l’aide juridique, une
personne seule ne devait pas gagner plus de 10 504 dollars par année, soit 4 456 dollars de moins
que le salaire minimum. Quant au volet avec contribution du bénéficiaire, le seuil d’admissibilité
pour une personne seule était de 13 816 dollars, ce qui équivaut à environ 290 dollars de moins
que le salaire minimum. Depuis 2006, une indexation des seuils échelonnées sur cinq ans a été
apportée au régime. Sur ce point, l’année 2007 marque certains changements. Dorénavant, le
seuil maximum d’admissibilité du volet contributif est de 14 968 dollars, ce qui inclut les
personnes seules travaillant 35 heures par semaine au salaire minimum 15 . Par contre, la
contribution doit être de 800 dollars pour ces requérants, ce qui représente cinq pour cent de leur
revenu annuel brut 16 . Les citoyens devant payer des contributions doivent donc faire un effort
démesuré, compte tenu des ressources financières à leur disposition. Quant à ceux travaillant 40
heures par semaine au salaire minimum, ils n’ont tout simplement pas accès au régime avec
contribution. En outre, le tableau suivant représente les seuils d’admissibilité à l’aide
juridique 17 :
Tableau 1 Seuils d’admissibilité au Québec à l’aide juridique gratuite pour l’année 2007 (a.18, par.1)
Catégorie de requérants
Personne seule
Famille formée d’un adulte et un enfant
Famille formée d’un adulte et deux enfants ou plus
Famille formée de conjoints sans enfant
Famille formée de conjoints avec un enfant
Famille formée de conjoints avec deux enfants et plus
Revenu annuel maximal
10 504 $
13 864 $
15 816 $
14 717 $
17 090 $
19 042 $
Outre le revenu annuel brut, la composition de la famille, la valeur des biens et la valeur des
liquidités déterminent aussi l’accessibilité du requérant à l’aide juridique.
Par ailleurs, nous avons brièvement comparé notre régime d’aide juridique avec ceux en Ontario
et en Colombie Britannique. Nous avons choisi ces deux provinces parce que leur densité de
population est plus élevée que celles des autres provinces, ce qui est plus représentatif.
15
Ministère de la Justice. Règlement sur l’aide juridique, site Internet.
Les contributions varient entre 100 et 800 dollars. Par exemple, une personne seule dont le revenu est de
10 505 à 11 062 dollars doit débourser 100 dollars de contribution. Une personne seule dont le revenu est de
14 410 à 14 968 dollars doit contribuer de 800 dollars.
17
Portail Québec, communiqué 8520. Augmentation des seuils d’admissibilité à l’aide juridique à compter du 1er
16
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
6
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
1.1.2
Un aperçu de l’aide juridique en Ontario
En 1998, le gouvernement de l’Ontario a adopté la Loi sur les services d’aide juridique. En vertu
de cette loi, c’est une société autonome sans but lucratif, Aide juridique Ontario, qui administre
le régime provincial d’aide juridique. Financée par l’État, cette dernière a pour mandat de
faciliter l’accès à la justice pour les citoyens à faible revenu18 . L’aide juridique ontarienne permet
donc aux citoyens économiquement défavorisés de se défendre et de revendiquer leurs droits
gratuitement. Tout comme au Québec, les seuils d’admissibilité sont très bas. Une personne seule
travaillant au salaire minimum, soit huit dollars de l’heure, ne peut pas avoir accès gratuitement
au service. Sur ce point, voici les seuils d’admissibilité à l’aide juridique gratuite :
Tableau 2
Seuils d’admissibilité en Ontario à l’aide juridique pour 2007 19
Catégorie de requérants
Revenu annuel maximal
Taille du foyer = 1
Taille du foyer = 2
Taille du foyer = 3
Taille du foyer = 4
Taille du foyer = 5 et plus
7 212 $
12 900 $
13 900 $
15 372 $
15 372 $
Par ailleurs, nous pouvons constater que contrairement au Québec, le revenu est évalué selon le
nombre de personnes dans le ménage et non selon la composition de la famille.
1.1.3 Un aperçu de l’aide juridique en Colombie-Britannique
En Colombie-Britannique, c’est la Legal Services Society (LSS) qui administre l’aide juridique.
Cette dernière a été établie en 1970 et, en 1979, la Legal Services Act a été adoptée. « Cette loi
constitue la LSS en société indépendante du gouvernement provincial et du Barreau. La LSS
offre des services juridiques aux personnes qui n’ont pas les moyens de retenir les services d’un
avocat et assure l’éducation et l’information de la population en matière juridique 20 ». Le tableau
suivant expose les seuils d’admissibilité au service d’aide juridique.
janvier 2007.
Aide juridique Ontario, site Internet.
19
Idem
20
Legal Services Society. Site internet.
18
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
7
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
Tableau 3
Les seuils d’admissibilité en Colombie-Britannique à l’aide juridique pour 2007
Catégorie de requérants
Revenu annuel maximal
Taille du foyer = 1
Taille du foyer = 2
Taille du foyer = 3
Taille du foyer = 4
Taille du foyer = 5
Taille du foyer = 6
Taille du foyer = 7 et plus
16 188 $
22 656 $
29 124 $
35 604 $
42 072 $
48 552 $
55 020 $
Il est intéressant de constater que les seuils d’admissibilité sont beaucoup plus élevés
en
Colombie-Britannique qu’en Ontario et au Québec. Une personne seule travaillant au salaire
minimum – à huit dollars de l’heure – peut avoir accès à ce service. Toutefois, nous n’avons pu
obtenir de statistique pour savoir à quel point cela favorisait l’accès à la justice.
1.1.4 Les effets d’un régime qui a souffert
De 2000 à 2004 au Canada, pratiquement 39 pour cent des demandes d’aide juridique ont été
refusées, soit 1 575 756 sur 4 042 059 21 . Quant au Québec, un peu plus de 17 pour cent des
demandes ont été refusées, ce qui représente 225 334 requérants non éligibles. Selon
l’économiste Boucher,
« environ 559 000 ménages québécois auraient vécu au cours de l’année 2003 une
situation nécessitant l’intervention d’un avocat. De ce nombre, 385 000 y ont eu
recours, 123 000 par l’aide juridique et 262 000 par avocat de pratique privée ou
autrement. Y a-t-il une démonstration plus éloquente ? Environ 175 000 ménages ont
laissé tomber des droits qu’ils auraient pu faire valoir » 22 .
Outre ceux qui décident de renoncer à leurs droits faute de moyens financiers, de plus en plus
d’individus tentent de se représenter seuls en cour sans toutefois connaître les procédures du
système juridique. À ce sujet, l’honorable Michel Robert, juge en chef à la Cour d’appel du
Québec, relève, dans le cadre de l’émission Zone Libre de Radio-Canada, que depuis le début de
la réforme, ce phénomène est devenu une nouvelle tendance 23 . Par contre, ces personnes ne
connaissant pas suffisamment les rudiments du système juridique, elles se représentent avec
21
Statistique Canada. Statistiques sur l’aide juridique, site Internet.
Gagnon, P. (octobre 2003). Justice pour tous… et pour que tous aient accès à la justice. Le journal du Barreau du
Québec, vol. 35, n. 17 - 15 octobre 2003.
23
Devroede, P. & Leprince J.-M. Quelle justice ? Zone Libre. Montréal : Société de Radio-Canada. 25 avril 2003.
22
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
8
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
maladresse et perdent souvent leur cause devant des avocats beaucoup plus qualifiés que les
citoyens qui n’ont aucune expérience en droit.
Selon un sondage effectué par le Barreau du Québec en avril 2003, 30 pour cent des citoyens qui
auraient eu besoin d’un avocat ont renoncé à y recourir en raison des coûts 24 . Présentement, le
tarif horaire moyen des avocats québécois est de 165 dollars. Seulement huit pour cent d’entre
eux demandent moins de 100 dollars l’heure et 27 pour cent plus de 200 dollars. Les avocats très
spécialisés exigent parfois plus de 300 dollars l’heure. Ceux qui sont rémunérés au pourcentage
touchent de 15 à 20 pour cent des sommes gagnées par leur client 25 . À ce prix, seuls les plus
fortunés ont réellement accès à la justice. À ce sujet, la juge en chef de la Cour suprême du
Canada, l’honorable Beverley McLachlin, dénonçait dernièrement qu’il demeure impossible pour
un trop grand nombre de Canadiens d’avoir accès à un avocat. En raison d’un système juridique
devenu trop coûteux, la juge en chef déplore que, pour avoir accès à la justice, les citoyens de la
classe moyenne doivent réhypothéquer leur maison ou puiser dans l'argent attribué aux études de
leurs enfants et, par conséquent, mettre en péril leur avenir 26 . En raison des honoraires trop
élevés des avocats, de plus en plus d’individus minimisent leurs dommages pour accéder à la
cour des petites créances. À ce sujet, l’honorable Simon Brossard, un juge de la cour du Québec
à la retraite, nous indiquait qu’un grand nombre de personnes diminuent leur requête à 7000
dollars pour avoir accès aux petites créances même si leurs dommages réels sont de 20 000
dollars.
De même, Me José Turgeon, directeur de la Clinique juridique de Saint-Henri, soulignait en mai
2003, dans le cadre de l’émission Zone Libre de Radio-Canada, qu’il devait fréquemment
refuser des requérants en se rendant bien compte qu’ils ne seront pas capables de se débrouiller
seuls devant les tribunaux. Sur ce, il ajoute : « Imaginez-vous de vous défendre devant des
avocats payés au gros tarif de 150 dollars de l’heure. Seul, vous n’avez aucune chance. […]
Présentement, il n’est pas réaliste de s’imaginer que des gens à faible revenu peuvent s’en
24
Breton, P. (octobre 2003). Québec encourage l’assurance juridique privée – un grand nombre de citoyens renonce
à recourir aux tribunaux faute de moyens financiers. La Presse, 18 octobre 2003, Montréal : p. A-11.
25
Série : Les coûts de la justice : Trop gourmands ? La Presse, 8 janvier 2006, Montréal : cahier plus page 3.
26
Presse Canadienne. La juge en chef de la Cour suprême se plaint de délais’ dans Cyberpresse, 9 mars 2007,
Toronto, Montréal : site Internet.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
9
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
tirer » 27 . Il est donc complètement illusoire de demander à des individus qui gagnent un peu
moins de 300 dollars par semaine de payer un avocat à 150 dollars de l’heure. Étant
financièrement désavantagés, les chances sont fortes qu’ils soient condamnés d’avance. Il est
donc décevant de constater qu’une personne puisse obtenir une défense adéquate dans certains
cas, et qu’une autre ne le puisse pas.
D’autre part, les problèmes de la justice au Québec ne se limitent pas à un service d’aide
juridique restreint et aux coûts exorbitants que peut représenter un litige. Les délais et la durée
des procès sont également beaucoup trop longs. D'après la juge en chef de la Cour suprême du
Canada, l’honorable Beverley McLachlin, ces problèmes causent des répercussions déplorables
sur l’accessibilité à la justice. Entre autres, « les longs délais affectent la mémoire des faits des
témoins, ce qui peut avoir des conséquences dramatiques pour les victimes et les accusés » 28 . De
même, le 15 mars 2007, lors d’un débat sur l’accessibilité à la justice organisé par l’Association
du jeune Barreau de Montréal, Me Pierre Moreau, candidat au Parti Libéral du Québec dans la
circonscription Marguerite d’Youville, soutenait que pour désengorger les tribunaux, il faut
absolument promouvoir la conciliation et la médiation. Ainsi, les délais et les procès seront
moins longs.
En conclusion, le manque d’accessibilité à la justice est un sujet qui depuis longtemps est
d’actualité et qui est dénoncé année après année par une multitude de magistrats. Un après
l’autre, les ministres de la justice font de ce problème leur priorité. Malgré tout, très peu de
citoyens arrivent à faire valoir leurs droits. Il est inquiétant de constater que de plus en plus
d’individus, même de la classe moyenne, renoncent à recourir aux tribunaux, faute de moyens
financiers et de connaissances nécessaires pour faire valoir leurs droits. Plusieurs personnes,
dans le système actuel, ne reçoivent pas l’aide dont elles ont véritablement besoin. Nombreuses
sont celles qui ont tout simplement perdu confiance envers ce dernier. Au fil des ans, l’image des
avocats, de la justice et de la magistrature est devenue très négative auprès des justiciables 29 .
27
28
29
Devroede, P. & Leprince J.-M. Quelle justice ? Zone Libre. Montréal : Société de Radio-Canada. 25 avril 2003.
Presse Canadienne. La juge en chef de la Cour suprême se plaint de délais’ dans Cyberpresse, 9 mars 2007,
Toronto, Montréal : site Internet.
Boucher, P. (mars 2005). Assurance juridique : Étude de marché. Barreau du Québec, Montréal, p. 5.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
10
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
À titre de solution au manque d’accessibilité à la justice, le Barreau du Québec encourage depuis
quelques années les citoyens à se doter d’une assurance juridique disponible auprès de certaines
compagnies d’assurances. Ce produit, plus ou moins connu au Canada, est en revanche répandu
dans plusieurs pays d’Europe. Mais quels sont les avantages et les limites de ce produit ? Est-il
indispensable ? Quelle place occupe-t-il sur le marché canadien et québécois ? Afin de mettre en
lumière ce questionnement, nous allons au maintenant établir un portrait du produit « assurance
juridique » et de son marché.
1.2
L’assurance juridique
C’est en 1885, en France, que l’assurance juridique a vu le jour. Ensuite, en 1928, l’Allemagne a
suivi l’exemple de son pays voisin en implantant celle-ci sur le marché. Ce n’est que beaucoup
plus tard, au début des années soixante-dix, que le produit fut introduit au Canada.
En ce qui concerne le Québec, le Barreau du Québec a mis « sur pied [en 1974] un premier
comité sur l’assurance frais juridiques. En 1985, le Barreau collaborait avec les Travailleurs unis
de l’automobile du Canada (TUAC) à l’implantation d’un plan de service juridique préacquitté en
faveur de leurs membres » 30 . Mais c’est surtout au début des années 1990 que certaines
compagnies d’assurances, assistées par le Barreau du Québec, ont mis sur le marché des produits
de protection juridique. En 1996, en collaboration avec la CSN et la SSQ Assurance générale, le
Barreau du Québec a contribué à l’élaboration d’un programme d’assurance juridique. Par
ailleurs, depuis 1999, le Barreau du Québec a lancé plusieurs campagnes publicitaires de
différentes envergures visant à promouvoir l’assurance juridique et à augmenter la notoriété de ce
produit auprès du grand public 31 . Entre l’année 2000 et 2004, le Barreau du Québec a déboursé
jusqu’à trois millions de dollars dans ses campagnes.
Ainsi, afin de rendre la justice plus accessible à tous, les compagnies d’assurances proposent
maintenant à leurs clients des produits d’assurance pour couvrir une partie de leurs frais
juridiques en cas de litige. Le régime de protection juridique présenté par les compagnies
d’assurances devrait permettre aux personnes ayant un revenu supérieur à celui prévu aux lois
30
Gagnon, P. (mai 2004). Assurance juridique : garder le cap. Le Journal du Barreau du Québec, Vol. 36, no. 9 - 15
mai 2004, Montréal, p. 1.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
11
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
provinciales sur l’aide juridique de défendre leurs droits. Les compagnies d’assurances,
entreprises privées, viennent donc combler un besoin créé par le sous-financement du régime
juridique canadien. Mais ce produit est-il suffisamment connu ? Quelle place occupe-t-il sur le
marché ? Les compagnies d’assurances sont-elles intéressées à le vendre ?
1.2.1 Le marché de l’assurance juridique au Canada
D’après Me Diane Bélanger, présidente de FBA groupe conseils, avec qui nous avons discuté, la
part du marché de l’assurance juridique est plutôt minime au Canada. Selon elle, ce produit tel
que connu au Québec, est même pratiquement inexistant à l’extérieur de la province. Étant du
même avis, l’économiste Pierre Boucher souligne dans son étude de marché sur l’assurance
juridique que :
« le marché pour les produits d’AJ [assurance juridique] n’est pas beaucoup
développé tant au Canada qu’au Québec… L’assureur le plus important [La
Capitale Assurances générales] détient près de 45 % du marché canadien.
Pourtant, la valeur des primes souscrites chez cet assureur s’élève à 213 442 000
dollars. Ce qui signifie que le produit d’AJ correspond à 1,7 % du total des
primes souscrites » 32 .
À ce sujet, Boucher ajoute qu’en 2003, la valeur des primes en assurance juridique de cette
compagnie était de 4 155 000 dollars 33 . Boucher soutient aussi que ce produit représentait, en
2005, 0,78 % des parts totales du marché de l’assurance au Canada qui est de 27 877 milliards de
dollars. En comparaison, l’assurance automobile représentait 10 663 milliards de dollars et
l’assurance habitation était de 6 282 milliards de dollars 34 .
Afin de comprendre les causes pour lesquelles l’assurance juridique a de la difficulté à faire sa
place sur le marché de l’assurance au Canada, Alain Thériault, directeur de la revue Les
assurances, nous a fait part de ses impressions sur la question. Avec ses 26 000 lecteurs, cette
revue est devenue une référence importante en matière d’information sur l’industrie de
l’assurance. Monsieur Thériault estime que le produit n’a pas réussi à intéresser les compagnies
d’assurances et à révolutionner le marché pour trois raisons plausibles. Premièrement, ce n’est
pas un « gros » produit. Les primes sont petites et, donc, peu attrayantes pour les assureurs.
31
Idem
Boucher, P. (mars 2005). Assurance juridique : Étude de marché. Barreau du Québec, Montréal, p. 9.
33
Idem, p. 8.
34
Idem, p. 9.
32
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
12
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
Deuxièmement, il est difficile pour les compagnies d’assurances d’évaluer les risques que
l’assurance juridique peut comporter. Selon lui, les assureurs sont généralement inquiets lorsque
les risques sont inconnus. Dans ces circonstances, ils ont tendance à charger davantage les
assurés pour leurs primes. Par contre, dans le cas de l’assurance juridique, puisque celle-ci ne fait
pas partie des priorités des consommateurs, s’ils augmentent le prix des primes, le produit ne sera
pas un bon vendeur. En plus, le but de l’assurance juridique est de rendre la justice plus
accessible. Si les primes d’assurance sont trop dispendieuses, cela viendrait contredire la raison
pour laquelle le produit a été mis sur pied. À ce sujet, les risques de l’assurance juridique sont
tout de même présents. Par exemple, La Capitale Assurances générales « traite chaque année 145
réclamations pour 1000 titulaires souscrits. C’est le double du taux de réclamation de l’assurance
habitation » 35 . Troisièmement, l’assurance juridique au Canada est un produit récent et peu
connu. Les assureurs éprouvent de la difficulté à cerner le produit pour lui créer une image et une
marque de commerce. Les compagnies veulent être certaines que les consommateurs puissent
associer l’assurance juridique à une image, ce qui, selon monsieur Thériault, n’est pas le cas
présent. Ainsi, ces trois raisons font peut-être en sorte que le produit a de la difficulté à prendre
son envol et à s’implanter au pays. À ce sujet, nous tenons à souligner que les trois raisons
mentionnées ci-haut sont les perceptions de monsieur Thériault et n’ont pas fait l’objet d’une
étude. Toutefois, ces dernières semblent très intéressantes et portent à réflexion.
Néanmoins, malgré le fait que l’assurance juridique ne soit pas un produit qui rapporte
énormément pour les assureurs, certains d’entre eux songent à promouvoir davantage le produit
parce qu’il répond à une demande grandissante des consommateurs.
Sur ce point, la compagnie La Capitale Assurances générales a été la première à initier
l’assurance juridique au Québec. Elle diffuse depuis quelques années des campagnes publicitaires
à la télévision et à la radio à ce sujet. Elle propose généralement le produit à ses clients lors de
renouvellements de contrats avec d’autres formes d’assurance ou aux nouveaux titulaires. Au
cours de l’année 2006, 105 000 ménages possédaient une protection d’assurance juridique avec
cette compagnie. Ce nombre est énorme si l’on considère que, selon le Barreau du Québec, qu’en
2003, environ 150 000 ménages étaient assurés au Québec. Par ailleurs, étant donné que ce
35
Tison, M. (2006). Conciliation : Un tien vaut mieux que deux tu l’auras. La Presse - La Presse Affaire, 21 mai
2006, Montréal : dossier de la semaine.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
13
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
produit est relativement récent, nous nous sommes demandé s’il existait des législations
provinciales ou fédérales sur l’assurance juridique ?
1.2.2 Les réglementations en vigueur concernant l’assurance juridique
Au Canada, les gouvernements fédéral et provinciaux encadrent l’industrie des assurances en
fonction de leur champ de compétence respectif. L’encadrement du contrat d’assurance, les
litiges concernant les polices et les pratiques commerciales relèvent, pour leur part, de la
compétence des provinces. L'Ontario, la Colombie-Britannique et le Québec, pour ne citer que
ces trois provinces, ont adopté des lois et des règlements régissant le droit des assurances.
L'Ontario possède une loi fort exhaustive en matière d'assurance. Cette loi traite notamment des
dispositions générales applicables aux assureurs (permis, dépôts, dossiers, rapports et pratiques
commerciales. Elle comporte également une section concernant les actuaires de l'assureur, les
administrateurs d'un assureur, les règles régissant les contrats d'assurance en Ontario (conditions,
contenu, estimation, annulation, délai pour intenter une action), les règles régissant plus
particulièrement les domaines de l'assurance incendie, de l'assurance-vie, de l’assurance
automobile, de l’assurance contre les accidents et la maladie, ainsi qu’une section concernant les
agents, courtiers et experts d'assurances.
La Colombie-Britannique a également adopté une loi spécifique en matière d'assurance. Bien que
moins volumineuse que la loi ontarienne, elle comporte sensiblement les mêmes règles. Outre les
dispositions générales, on y retrouve des règles concernant l'assurance-vie, l'assurance contre les
accidents et l'assurance maladie, l'assurance incendie, l'assurance automobile et finalement des
articles sur l'administration de la loi.
Pour sa part, en raison de sa tradition juridique, le Québec encadre le domaine des assurances
d’une façon quelque peu différente des autres provinces. Cependant, la plupart des dispositions
adoptées sont similaires. Outre la solvabilité des compagnies d’assurances, la Loi sur les
assurances et son règlement d’application régissent la formation de ces compagnies, leur droit de
pratique, l’obligation de fournir un cautionnement et autres. C’est dans le Code civil du Québec,
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
14
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
qu’on retrouve les règles concernant les contrats d’assurances (i.e. règles de formation du contrat,
son contenu, les distinctions entre les différentes formes d’assurances, les droits et obligations
des parties et autres).
Toutefois, ces textes législatifs ne prévoient aucune disposition spécifique sur l'assurance
juridique. En effet, chacune des compagnies d'assurances demeure libre de décider de la conduite
de ses affaires courantes, ce qui comprend notamment le choix d’émettre ou non tel type police
(produit) ainsi que la fixation des primes.
Contrairement à ce que nous pensions lors de la rédaction de notre devis de recherche, nous
avons constaté que l'assurance juridique est un produit offert par certaines compagnies
d'assurances et qu’elle ne fait pas l'objet d'une réglementation législative. Elle est
généralement associée à un produit d'assurance dommages, notamment l'assurance habitation.
Finalement, afin de préciser davantage ce que représente une protection d’assurance juridique,
nous allons dans un premier temps définir ce qu’est l’assurance juridique pour ensuite décrire le
produit.
1.2.3 Qu’est-ce que l’assurance juridique ?
L’assurance juridique offre une couverture contre certains événements pouvant forcer une
personne à consulter un avocat ou à avoir recours aux tribunaux, à la médiation ou à l’arbitrage.
Moyennant une prime annuelle, les assurés peuvent ainsi obtenir des renseignements sur leurs
droits et recours, et même parfois être représentés en cour.
Le produit « assurance juridique » comprend trois volets :
1) un service d’assistance juridique par téléphone où l’assuré peut consulter un avocat.
2) un soutien financier pour couvrir les honoraires d’un avocat lors de litiges
spécifiques à certains domaines.
3) un soutien financier pour couvrir les honoraires d’un avocat lors d’une succession
ou de la protection d’une personne (exemple : ouverture d’un régime de protection d’un
adulte devenu inapte 36 ).
36
Exemple provenant du dépliant « On se fait une loi de vous éclairer » sur l’assurance juridique encouragée par le
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
15
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
Le service d’assistance juridique par téléphone permet à l’assuré d’obtenir les conseils d’un
avocat sur la plupart des domaines du droit. Le nombre d’appels est généralement illimité. Ce
service est le plus souvent offert par plusieurs compagnies d’assurances à leurs clients qui
détiennent une assurance automobile ou habitation. Certaines compagnies ne vendent pas
l’assurance juridique, mais offrent tout de même gratuitement ce service à leurs clients. En
somme, plusieurs assurés ont droit à l’assistance juridique par téléphone même s’ils n’ont pas
contracté une police d’assurance juridique.
1.2.4 Le produit « assurance juridique » en sept points
Nous allons maintenant présenter en sept points principaux ce qui constitue le produit « assurance
juridique » au Québec : 1) les domaines de litiges couverts, 2) les compagnies d’assurances
offrant le produit, 3) les assurés, 4) la prime, 5) le plafond de garantie, 6) les honoraires couverts,
7) les procédures à suivre lors d’une réclamation.
1.2.4.1 Les domaines de litiges garantis
Il existe six domaines où les litiges sont couverts par l’assurance juridique. Le tableau suivant
illustre ceux-ci ainsi que des exemples de litige 37 .
Tableau 4
Les domaines de litiges garantis
DOMAINES
EXEMPLES
Actes de consommation
- publicité mensongère ou trompeuse
- problème avec un entrepreneur
- non respect d’un contrat de vente ou de location
d’un bien et garanties qu’il contient
- problèmes vécus à l’étranger à la suite
d’une mauvaise exécution du contrat de
voyage
Dommages corporels ou matériels
- blessures lors d’une chute sur un plancher
mal entretenu
- blessures subies par un enfant dans la
cours d’école en raison d’installations non
37
Barreau du Québec.
À l’exception de l’usurpation d’identité et du bornage, tous les domaines et tous les exemples présentés dans le
tableau 1 proviennent du dépliant « Justice pour tous ! À partir de 4 $ par mois » sur l’assurance juridique
encouragée par le Barreau du Québec.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
16
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
sécuritaires
- souffrance physique ou handicap
découlant d’une erreur médicale
Propriété et habitation
- achat d’une maison ayant des vices cachés ou des
vices de construction
- bornage
- troubles de voisinage où l’assuré est la victime
- différends entre propriétaire et locataire
(éviction, insalubrité, dommage au logement)
Sécurité du revenu
- difficultés à faire valoir ses droits auprès de
régimes publics ou privés comme :
la Commission de la santé et de la sécurité du
travail, la Société de l’assurance automobile,
l’assurance emploi, un assureur en invalidité
Travail
- congédiement ou déclassement sans motif
valable
- discrimination et harcèlement
- refus de l’employeur de payer les deux
dernières semaines de travail ou les commissions
à la suite d’une mise à pied
- vol d’identité
Usurpation d’identité
(offert seulement par certaines compagnies)
Les domaines matrimonial, pénal et criminel ne sont donc pas couverts par l’assurance juridique.
Toutefois, l’assuré peut consulter le service d’assistance juridique par téléphone où tous les
domaines du droit peuvent être abordés.
1.2.4.2 Les compagnies d’assurance juridique
Neuf compagnies d’assurances offrent ce produit au Québec (certaines d’entre elles dont Allstate,
Axa offrent également le produit dans d’autres provinces) 38 :
- Allstate
- Aviva Traders
- Axa
- La Capitale Assurances générales
- Échelon
- La Fédération
- ING assurance
- Missisquoi
- Union Canadienne
38
Source : Barreau du Québec
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
17
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
À l’exception des compagnies Aviva Traders et Échelon qui proposent des contrats d’assurance
juridique autonomes, l’assurance juridique est présentée en complément à un contrat d’assurance
habitation ou automobile. Toutefois, nous avons constaté une nouvelle tendance : la compagnie
La Capitale Assurances générales inclut dorénavant automatiquement l’assurance juridique aux
primes d’« assurance habitation » lorsque l’assuré possède avec elle une assurance habitation et
une hypothèque.
Par ailleurs, comme nous l’avons souligné antérieurement, de nombreuses compagnies
d’assurances ajoutent automatiquement en prime à leurs contrats d’assurance habitation et
d’assurance automobile, un service d’assistance juridique sans toutefois vendre le produit
« assurance juridique ». Plusieurs des neuf compagnies qui vendent l’assurance juridique offrent
également gratuitement ce service à leurs clients. Ceci crée en quelque sorte une forme de
doublon puisque pour contracter une police d’assurance juridique avec la plupart de ces neuf
compagnies, il faut déjà souscrire à une autre forme d’assurance. Ainsi, l’assistance juridique, en
plus d’être une valeur ajoutée à d’autres formes d’assurances, est l’un des trois volets offerts par
l’assurance juridique. D’une certaine façon, l’assuré qui a contracté une assurance juridique paie
pour un service déjà inclut.
1.2.4.3 Les assurés
De manière générale, l’assureur couvre l’assuré ainsi que les membres de sa famille vivant sous
le même toit. Le nouveau titulaire doit attendre généralement une soixantaine de jours avant que
sa police de protection juridique entre en vigueur.
1.2.4.4 La prime
La prime annuelle varie entre 30 et 100 dollars selon la compagnie choisie.
1.2.4.5 Le plafond par litige
La majorité des assureurs offrent une protection allant jusqu’à 5 000 dollars par litige et une
couverture maximum annuelle des réclamations de 15 000 dollars. Cependant, un petit nombre
d’assureurs, dont la compagnie Échelon, offrent également, selon le coût de la prime, une
protection allant jusqu’à 10 000 dollars par événement.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
18
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
1.2.4.6 Les honoraires
En général, les honoraires des avocats et des notaires défrayés par les assureurs varient entre 85 et
105 dollars de l’heure. Certaines compagnies d’assurances défraient jusqu’à 150 dollars de
l’heure pour les avocats possédant plus de dix ans d’expérience. Si les honoraires sont plus élevés
que le montant fixé par la compagnie, l’assuré doit débourser la différence. Sur ce point,
rappelons que le tarif horaire moyen des avocats québécois est de 165 dollars 39 .
De plus, un nombre d’heures déterminé est souvent alloué aux démarches juridiques. Par
exemple, l’assureur peut défrayer jusqu’à dix heures pour un règlement de dossier à l’amiable, 8
heures pour un cas de succession, sept heures par jour en cas d’audition et 6 heures pour la
préparation d’audition et de rencontre de témoins.
1.2.4.7 Les procédures à suivre lors d’une réclamation
Lorsqu’un assuré souhaite avoir recours à un avocat, celui-ci doit dans un premier temps
contacter son assureur afin d’être certain que sa réclamation sera couverte. Si la réclamation est
admise, il peut ensuite contacter l’avocat de son choix. Pour des raisons d’éthique et de
transparence, la compagnie d’assurances ne recommande jamais d’avocat à l’assuré. La
compagnie ne peut donc pas être accusée de suggérer des avocats qui la favoriseraient en dépit du
client. Ensuite, l’avocat choisi et l’assuré doivent s’accorder sur les honoraires. L’avocat envoie
finalement une facture détaillée du solde au client et une copie à la compagnie d’assurances. Il est
très important pour l’assuré de suivre ces procédures. Certaines personnes avec lesquelles nous
nous sommes entretenues nous ont révélé qu’elles n’avaient pas été couvertes parce qu’elles
avaient entamé une première procédure juridique sans avoir avisé leur assureur. Selon elles, cette
démarche n’était pas claire. Toutefois, si un assuré s’adresse à un avocat en ayant oublié d’en
discuter avec sa compagnie d’assurances, il peut bénéficier de sa couverture si l’avocat entame
aussitôt les démarches de réclamation auprès de l’assureur.
En conclusion, le consommateur doit s’assurer de comprendre réellement quels sont les domaines
couverts par l’assurance juridique, le plafond par litige, les honoraires et les procédures à suivre.
L’assurance juridique ne dédommage pas tous les frais de l’assuré lors d’un événement. Sur ce
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
19
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
point, 5000 dollars par litige n’est pas une somme faramineuse. Mais comme le soulève madame
Sylvie Berthiaume, coordonnatrice des communications du Barreau du Québec, puisque les
citoyens n’économisent pas pour leurs problèmes juridiques, il faut percevoir l’assurance
juridique comme un coussin financier 40 .
Par ailleurs, sachant que l’assurance juridique existe en Europe depuis de nombreuses années,
nous allons maintenant comparer les différents régimes d’assurance juridique de certains pays,
incontournables dans ce domaine.
1.3
Un aperçu des systèmes d’assurance juridique européens
En regard du point précédent, nous avons estimé qu’il était nécessaire de présenter un aperçu des
systèmes d’assurance juridique de différents pays européens. L’année dernière, lorsque nous
avons rédigé notre devis, nous avons cru qu’il serait intéressant de présenter les modèles
d’assurance juridique américain et australien. Toutefois, nous avons décidé d’aborder seulement
les cas de la France, de l’Allemagne, de la Grande-Bretagne et de la Suède. À la suite de nos
lectures, nous considérons que ces pays ont joué un rôle beaucoup plus important dans le
développement de ce produit. En effet, la France est le pays fondateur de l’assurance juridique,
l’Allemagne occupe la plus grosse part du marché de ce produit en Europe, la Grande-Bretagne
est le troisième pays européen qui détient le plus de cotisations et le gouvernement suédois
encourage fortement ses citoyens à contracter le produit. De plus, comme l’assurance juridique
existe depuis plus longtemps dans ces pays, ils nous a été plus facile – sauf pour la Suède – de
trouver des données sur ce sujet. Malgré tout, il existe de manière générale très peu de documents
sur l’assurance juridique.
1.3.1 L’assurance juridique en France
En 1897, l’association le Sou médical créa ce qui est le fondement de l’assurance juridique afin
d’assurer la défense des médecins, moyennant une prime d’un sou par jour. Toutefois, ce n’est
que beaucoup plus tard, en 1982, que les premières sociétés spécialisées proposèrent de véritables
39
40
Série Les coûts de la justice : Trop gourmands ? La Presse, dimanche le 8 janvier 2006, cahier plus page 3.
Tison, M. (2006). Conciliation : Un tien vaut mieux que deux tu l’auras. La Presse - La Presse Affaire, 21 mai
2006, Montréal : dossier de la semaine.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
20
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
contrats de protection juridique 41 . En plus d’être le pays pionnier de l’assurance juridique, la
France se situe au deuxième rang du marché européen dans ce domaine après l’Allemagne. Elle
détient onze pour cent des cotisations pour l’ensemble de l’Europe, ce qui équivalait en 2005, à
plus d’un milliard d’euros 42 . Malgré le fait qu’en France, le produit ne représente qu’un modeste
0,5 % du marché des assurances, son potentiel est prometteur. Depuis 1996, il est en croissance
de huit pour cent par année 43 . En outre, en 2005, 21 pour cent des ménages étaient pourvus d’une
protection juridique 44 .
En France, les primes annuelles d’assurance juridique varient entre 10 euros (23 dollars
canadiens) et 250 euros (381 dollars canadiens) selon les couvertures offertes. Les primes les
moins dispendieuses sont systématiquement incluses dans certains contrats d’assurance
habitation. Quant aux plus coûteuses, elles offrent des produits haut de gamme destinés à une
clientèle plus restreinte. Il est possible de se procurer une protection couvrant les divorces pour
environ 60 euros (91 dollars canadiens). La prime la plus populaire chez les Français est de 25 à
30 euros (28 à 46 dollars canadiens). Celle-ci est offerte par les assureurs sous forme de valeur
ajoutée aux contrats d’assurance habitation. Les domaines couverts sont : la consommation, la
défense pénale des délits non intentionnels, l’habitation, les services publics et sociaux et le droit
du travail 45 .
De manière générale, les domaines couverts ressemblent à ceux offerts au Québec. Cependant,
les approches des assureurs visant à minimiser les coûts de l’assurance juridique sont très
différentes. Par exemple, au Québec, afin d’offrir une prime abordable, la majorité des assureurs
accordent un plafond de garantie maximal de 5 000 dollars par événement. En France, le plafond
de garantie n’est pas aussi tangible. Il varie selon l’événement et le type de couverture. Afin
d’éviter le plus possible de payer des sommes astronomiques lors de séances au tribunal, les
41
Fédération Française des Société d’Assurance (mai 2004). Assurance de protection juridique : les conclusions
du rapport Bouquin. Assurer, no. 27. Le 5 mai 2004, p. 2.
42
Sénat. Autorité de contrôle des assurances mutuelles. Proposition de loi relative aux contrats d’assurance de
protection juridique, rapport législatif, site Internet.
43
Fédération Française des Société d’Assurance (mai 2004). Assurance de protection juridique : les conclusions
du rapport Bouquin. Assurer, no. 27. Le 5 mai 2004, p. 2.
44
Jurisques. (novembre 2005) L’assurance protection juridique. 11 novembre 2005, France, site Internet.
45
Bouquin, J.-P. (avril 2004). L’assurance de protection juridique des particuliers. Paris : Fédération française des n
sociétés d’assurances, pp. 9-10.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
21
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
assureurs encouragent un règlement rapide des litiges. Pour ce faire, ils jouent un rôle très actif et
favorisent énormément les ententes à l’amiable. À ce sujet, 70 pour cent des litiges couverts sont
réglés de cette manière 46 . Ainsi, les assurés n’ont pas à se référer à un avocat pour résoudre
l’événement, ce qui diminue grandement les frais des assureurs.
De plus, contrairement au Québec, afin de réduire davantage les coûts de l’assurance juridique,
les assureurs donnent les mandats à des réseaux d’avocats dont les honoraires sont réduits et
déterminés à l’avance en échange d’un flux d’affaires accru. Ainsi,
« la plupart des contrats n’assurent la gratuité de la prestation d’avocat que si l’assuré
choisit l’avocat suggéré par l’assureur et précisent que les honoraires d’un avocat désigné
parmi ceux du réseau de correspondants sont payés directement à ce dernier sans
l’intervention de l’assuré » 47 .
Les assurés qui souhaitent choisir leur propre avocat n’ont donc pas la garantie que ses honoraires
seront entièrement couverts. Cette approche a été fort critiquée par certains consommateurs. Sur
ce point, Jean-Paul Bouquin soulève – en 2004, dans un rapport sur l’assurance juridique – que
les consommateurs n’ont pas véritablement la possibilité de choisir leur avocat « parce que les
plafonds de garantie d’honoraires figurant dans les contrats protection juridique sont tellement
bas qu’aucun avocat ne peut accepter ces affaires, sauf s’il s’en fait une spécialité en entrant dans
le réseau d’un assureur de protection juridique » 48 . De nombreux avocats désapprouvent
également cette tactique employée par les assureurs parce qu’elle place forcément les avocats
dans une position de subordination à leurs égards, puisqu’ils sont perçus comme leurs
employeurs 49 . De plus, cette tactique fait en sorte que les avocats qui ne travaillent pas pour un
assureur sont rarement considérés par les assurés. Ils sont ainsi exclus du marché de l’assurance
juridique et, par conséquent, ils perdent des clients potentiels.
En outre, Bouquin maintient dans son rapport que ces deux tactiques des assureurs visant à
réduire les coûts de l’assurance juridique engendrent de nombreux « désaccords entre l’assuré et
46
Sénat. Autorité de contrôle des assurances mutuelles. Proposition de loi relative aux contrats d’assurance de
protection juridique, rapport législatif, site Internet.
47
Idem
48
Bouquin, J.-P. (avril 2004). L’assurance de protection juridique des particuliers. Paris : Fédération française des
sociétés d’assurances, p. 17.
49
Sénat. Autorité de contrôle des assurances mutuelles. Proposition de loi relative aux contrats d’assurance de
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
22
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
l’assureur sur la conduite à tenir, sur la compétence des équipes et sur l’impartialité du conseil
apporté » 50 . De plus, selon lui, le produit « assurance juridique » contient souvent des doublons.
Par exemple, certains événements peuvent être couverts à la fois par l’assurance juridique et à la
fois par l’assurance habitation. Bouquin affirme que, sans ces doublons, tous les domaines du
droit pourraient être couverts sans devoir augmenter le coût des primes 51 .
Pour conclure, la Commission de l’accès au droit et à la justice affirmait que l’assurance
juridique ne devait pas être perçue comme une alternative à l’aide juridique parce qu’elle ne
couvre pas les domaines matrimonial et pénal. En 2002, le nombre de procès pris en charge par
les assureurs représentaient seulement deux pour cent de tous les litiges 52 . Toutefois, Bouquin
note que grâce à l’assurance juridique, de nombreux consommateurs « ont vu se résoudre une
multitude de petits litiges dont l’enjeu est beaucoup trop faible pour recourir à un avocat, et qui
n’étaient pas traités par le passé » 53 .
1.3.2 L’assurance juridique en Allemagne
L’Allemagne est le pays où l’assurance juridique est la plus populaire de l’Europe. Elle constitue
56 pour cent des parts de ce marché 54 . Selon la Fédération des assureurs allemands (GDV), plus
de 43 pour cent des foyers possèdent une police d’assurance juridique. En 2003, la valeur totale
des primes pour ce pays était 4, 649 milliards de dollars canadiens55 . Les cotisations sont en
moyenne très élevées, soit de 139 euros par contrat (212 dollars canadiens) et de 94 euros par
risque (143 dollars canadiens) 56 . Toutefois, elle inclut les procédures judiciaires en cas d’accident
de la route. D’après l’économiste Boucher, la popularité de l’assurance juridique s’explique par
l’insatisfaction des citoyens envers les autres moyens d’accéder à la justice. Par exemple, un
protection juridique, rapport législatif, site Internet.
Bouquin, J.-P. (avril 2004). L’assurance de protection juridique des particuliers. Paris : Fédération française des
sociétés d’assurances, p. 17.
51
Idem
52
Sénat. Autorité de contrôle des assurances mutuelles. Proposition de loi relative aux contrats d’assurance de
protection juridique, rapport législatif, site Internet.
53
Bouquin, J.-P. (avril 2004). L’assurance de protection juridique des particuliers. Paris : Fédération française des
sociétés d’assurances, pp. 23-24.
54
Sénat. Autorité de contrôle des assurances mutuelles. Proposition de loi relative aux contrats d’assurance de
protection juridique, rapport législatif, site Internet.
55
Boucher, P. (mars 2005). Assurance juridique : Étude de marché. Barreau du Québec, Montréal, p. 11.
56
Bouquin, J.-P. (avril 2004). L’assurance de protection juridique des particuliers. Paris : Fédération française des
sociétés d’assurances, p. 12.
50
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
23
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
requérant à l’aide juridique qui perd sa cause en cour est obligé de couvrir les frais de sa partie
adverse 57 .
En outre, les primes sont élevées étant donné que les avocats détiennent un monopole en matière
de conseil et d’actes juridiques, et que leurs honoraires sont réglementés et dispendieux 58 . Ainsi,
contrairement à la France, les compagnies d’assurances n’ont pas le droit d’occuper un rôle actif
lors d’un événement, de favoriser les ententes à l’amiable et de proposer des avocats aux assurés.
En outre, à l’opposé de nombreux pays tel le Canada, les avocats allemands s’occupent
également de domaines qui sont généralement couverts et exercés par les assureurs. Par exemple,
au Canada, les assureurs gèrent les procédures judiciaires en cas d’accidents de la route, celles-ci
étant comprises dans les contrats d’assurance automobile. En Allemagne, ces procédures sont
prises en charge par les avocats et sont couvertes par l’assurance juridique qui est vendue sous
forme de complément aux autres contrats d’assurance. Ceci fait d’ailleurs augmenter
considérablement le coût des primes.
D’autre part, Boucher soulève que l’un des critères de succès du modèle d’assurance juridique
allemand…
« réside dans le fait que le niveau de risque a pu être circonscrit par une approximation
assez juste de l’exposition au niveau du risque. […] Les honoraires professionnels des
avocats [étant réglementés] sont payés selon une échelle établie en regard de la valeur
d’un litige donné et ce, indépendamment du degré de complexité du dossier, de sa durée
ou encore du niveau d’effort requis de la part de l’avocat. Ainsi, l’assureur connaît la
hauteur de sa couverture c’est-à-dire le coût maximal des honoraires professionnels, la
valeur déboursée, la TVA et les autres dépenses incidentes » 59 .
Comme nous l’avons précédemment mentionné, cette situation paraît bien différente de celle du
Canada où les assureurs semblent avoir des difficultés à cerner la valeur des risques qu’engendre
l’assurance juridique. De plus, l’auteur soutient qu’un autre critère de succès du modèle allemand
est que les assureurs déterminent la valeur des primes des assurés selon un calcul des risques
qu’ils peuvent représenter. « Des classes d’affaires sont alors établies afin que les ménages
57
Boucher, P. (mars 2005). Assurance juridique : Étude de marché. Barreau du Québec, Montréal, p. 12.
Bouquin, J.-P. (avril 2004). L’assurance de protection juridique des particuliers. Paris : Fédération française des
sociétés d’assurances, p. 12.
59
Boucher, P. (mars 2005). Assurance juridique : Étude de marché. Barreau du Québec, Montréal, p. 12.
58
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
24
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
potentiellement litigieux soient contre-balancés par des ménages qui le sont beaucoup moins, voir
pas du tout » 60 .
Finalement, Bouquin affirme que le modèle allemand de l’assurance juridique ne semble pas
avoir été conçu dans le but de faciliter l’accessibilité à la justice puisque le monopole des avocats
rend ce produit indispensable et très onéreux au détriment des consommateurs 61 .
1.3.3 L’assurance juridique en Grande-Bretagne
Représentant six pour cent des cotisations d’assurance juridique pour l’ensemble de l’Europe, la
Grande-Bretagne se positionne au troisième rang des pays où l’on vend le plus d’assurance
juridique. Les primes sont comprises ou ajoutées aux contrats d’assurance habitation, aux
contrats d’assurance voiture ou aux contrats de carte de crédit. Lorsqu’elles sont ajoutées, elles
coûtent généralement entre 10 et 50 euro par an (de 15 à 76 dollars canadiens) 62 . Les limites de
couvertures tournent autour de 25 000 à 36 300 euros par année (de 38 185 à 55 465 dollars
canadiens). Toutefois, nous tenons à spécifier que ces chiffres comprennent les événements de
défense et de recours en cas d’accidents de voiture, ce qui fait évidemment augmenter les limites
des plafonds. D’autre part, lorsqu’elle est conjointe à l’assurance habitation, l’assurance juridique
couvre des domaines reliés au préjudice corporel, à la santé, à la consommation, au droit du
travail, à l’habitation et aux troubles de voisinage. En outre, l’assurance juridique est de plus en
plus incluse automatiquement aux polices d’assurance habitation. À ce sujet, la Fédération des
assureurs (ABI) estimait qu’en 2003, de 60 à 65 pour cent des contrats habitation comportaient
une protection juridique.
La première procédure à suivre lors d’un événement ressemble à celle du Québec. L’assuré doit
joindre le service d’assistance juridique offert par la compagnie d’assurances afin de savoir si son
événement est couvert. Par contre, si l’assureur décide de couvrir l’événement, il peut choisir de
le négocier lui-même lorsqu’il est de petite envergure ou de le confier à des avocats dès la phase
amiable. Si tel est le cas, l’assuré a le droit de choisir son avocat. Par contre, s’il n’est pas
60
Idem
Idem
62
Données obtenues sur le site Internet de la Legal Services Commission (LSC). Document rédigé par Bolt, R.
(October 2006). No-win, No-fee Actions. Site consulté en février 2007 à l’adresse : www.clsdirect.org.uk
61
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
25
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
suffisamment compétent ou si ses honoraires sont trop élevés, l’assureur peut décider de le
refuser et de confier le mandat à un cabinet d’avocats avec lequel il possède une entente 63 . Les
volumes de dossiers et les frais d’honoraires sont par conséquent négociés à l’avance avec le
cabinet. Cette approche permet aux compagnies d’assurances de conserver un contrôle sur les
coûts de l’assurance juridique 64 . Certains assureurs offrent même à leurs clients des listes
d’avocats agréés où les honoraires sont entièrement couverts par eux. Cette liste peut cependant
causer un problème pour les avocats qui n’en font pas partie puisque leurs honoraires sont en
moyenne 75 pour cent plus élevés que ceux des cabinets agréés 65 .
D’après le Financial Ombudsman Service, l’une des plaintes les plus communes émise par les
consommateurs envers le système d’assurance juridique britannique est justement que les
assureurs détiennent un trop grand pouvoir décisionnel concernant la sélection des avocats.
Plusieurs assurés maintiennent que seule une personne de leur choix peut défendre correctement
leurs intérêts. De plus, l’assuré et l’assureur donnent simultanément des instructions à l’avocat, ce
qui complique l’interaction entre les acteurs. Les consommateurs se plaignent aussi que les
assureurs attribuent leur litige à un cabinet sans prendre nécessairement en considération la
distance qui sépare leur lieu de résidence et la localisation du cabinet. Il s’agit d’un autre facteur
qui défavorise également l’interaction entre assureurs et assurés. Finalement, les assurés
n’apprécient guère que les cabinets aient parfois tendance à changer le personnel traitant leur
dossier 66 , car cela nuit sérieusement à la communication entre l’assuré et l’avocat qui le
représente.
1.3.4 L’assurance juridique en Suède
La Suède a implanté dans le passé un régime d’aide juridique exemplaire. Quatre-vingt-cinq pour
cent de l’ensemble de la population y avait accès, et pratiquement tous les domaines de litiges
étaient couverts. Cependant, l’État a été forcé de diminuer de 50 pour cent les fonds publics
63
64
65
66
Bouquin, J.-P. (avril 2004). L’assurance de protection juridique des particuliers. Paris : Fédération française des
sociétés d’assurances, p. 16.
Boucher, P. (mars 2005). Assurance juridique : Étude de marché. Barreau du Québec, Montréal, p. 18.
Bouquin, J.-P. (avril 2004). L’assurance de protection juridique des particuliers. Paris : Fédération française des
sociétés d’assurances, p. 16.
Financial Ombudsman Service (avril 2001). Legal Expenses Service, Obudsman News. Article consulté en février
2007 à l’adresse : www.financial-ombudsman.org.uk
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
26
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
attribués à l’aide juridique. Ceci a mené, en 1997, à une réforme qui a restreint considérablement
le régime. Dès lors, le nombre de dossiers à l’aide juridique a chuté de plus de 75 pour cent
67
.
Afin de résoudre son problème au manque d’accessibilité, le gouvernement suédois encourage
fortement ses citoyens a se procurer de l’assurance juridique. Même que 97 pour cent des Suédois
âgés entre 20 et 64 ans détiennent une police d’assurance juridique. Les honoraires des avocats
couverts pour un litige sont de 170 dollars canadiens et le plafond annuel de garantie est de
16 980 dollars 68 . Notons toutefois que l’assistance juridique n’est pas offerte par les assureurs.
Par ailleurs, l’assuré a la liberté de choisir un avocat pour défendre ses intérêts.
L’économiste Boucher soutient dans son étude sur l’assurance juridique qu’en dépit de certains
ajustements requis sur le plan des couvertures de dossiers, « on peut référer la réforme suédoise
comme étant une bonne politique. […] En somme, dans le cas de la Suède, l’aide juridique et
l’assurance juridique ont été modulées avec un certain succès » 69 .
Outre l’étude de Boucher et le texte de Regan auquel il se réfère, nous n’avons pas réussi à
obtenir davantage de données sur le système d’assurance juridique suédois. Le modèle suédois
d’assurance juridique nous semblait particulièrement intéressant parce que le gouvernement
encourage fortement ce produit et que 97 pour cent des Suédois l’ont contracté. Nous avons fait
de nombreuses recherches à ce sujet sans toutefois obtenir les informations souhaitées 70 . En effet,
rares sont les documents traitant de l’assurance juridique suédoise qui sont rédigés en anglais ou
en français.
Pour terminer, il est intéressant de souligner qu’en Grande-Bretagne et en France, nombreux sont
les assurés qui ignorent posséder une protection juridique. Le produit ne jouit donc pas d’une
grande notoriété. De plus, plusieurs critiques ont été portées par les consommateurs envers le
67
Source des statistiques : Regan F. (mars 2003). The Sweedish Legal Services Policy Remix : The shift form
Public Legal Aid too Private Legal Expenses Insurance. Journal of Law and Society. Volume 3, n. 1, mars
2003, page 49’ dans Boucher, P. (mars 2005). Assurance juridique : Étude de marché. Barreau du Québec,
pages 14-15.
68
Idem
69
Boucher, P. (mars 2005). Assurance juridique : Étude de marché. Barreau du Québec, Montréal, p. 16.
70
Nous nous sommes entretenus avec un avocat originaire de ce pays et nous avons consulté de nombreux sites
Internet spécialisés en droit, des sites officiels du gouvernement de la Suède, des sites de chaires de recherche
universitaire et autres (ex. Quicklaw, British Law Journal, International review of Law and Economics, Kluwer
Law International, etc.).
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
27
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
manque de transparence et de la lisibilité des contrats d’assurance juridique. Selon le Sénat, en
France, les assurés ignorent souvent le contenu des prestations, de même que l’étendue de la
couverture à laquelle ils ont droit 71 . À ce sujet, Jean-Paul Bouquin recommande aux assureurs
d’améliorer la visibilité de l’assurance juridique, et de rendre l’information sur le produit plus
compréhensible, afin de s’assurer que les consommateurs saisissent parfaitement ce que
représente leur couverture. Il suggère aussi de vulgariser le vocabulaire utilisé dans les contrats et
de clarifier les notions de défense-recours et d’assurance juridique 72 . Concernant la GrandeBretagne, Pierre Boucher souligne, selon un rapport de la Nuffield Foundation, que, lorsque les
consommateurs contractent de l’assurance juridique, ils ne reçoivent que peu d’information écrite
sur le produit. Les agents de « télémarketing » qui réalisent souvent les ventes ne possèdent pas
les connaissances requises pour bien informer les consommateurs sur le produit 73 . Il est donc
encore une fois nécessaire d’accroître la visibilité de l’assurance juridique. Ces constats sur le
manque de notoriété de l’assurance juridique et des problèmes de lisibilité des contrats en
Grande-Bretagne et en France viennent d’ailleurs rejoindre les observations de madame Lucille
Benoît-Rousseau, responsable d’assurance dommages au Bureau d’assurance du Canada (BAC).
Selon elle, les consommateurs ignoraient presque toujours qu’ils avaient droit à de l’assurance
juridique, car ils n’avaient pas lu leur contrat d’assurance. Il est donc essentiel que les
consommateurs soient mieux informés sur l’existence du produit. Face à ces constats sur
l’assurance juridique en Grande-Bretagne et en France, nous avons cherché à savoir si les assurés
au Québec étaient satisfaits de l’information écrite qu’ils avaient reçue lorsqu’ils ont contracté
l’assurance juridique, s’ils considèrent leur contrat lisible et s’ils connaissaient bien ce qu’offre
leur couverture.
1.4
L’assurance juridique : pour faciliter l’accès à la justice ?
À la suite des mises en contexte que nous venons de présenter sur l’assurance juridique, nous
nous sommes posée cette question : l’assurance juridique est-elle une solution pour une meilleure
71
Sénat. Proposition de loi relative aux contrats d’assurance de protection juridique. Rapport législatif. Rapport
consulté en février 2007 à l’adresse Internet : www.senat.fr
72
Bouquin, J.-P. (avril 2004). L’assurance de protection juridique des particuliers. Paris : Fédération française des
sociétés d’assurances, p. 24.
73
Abrams, P. (2002). In Sure Hands ? Funding Ligitation by Legal Expenses Insurance: The Views of the
Insurer, Solicitors and Policy Holders. The Nuffield Foundation’ dans Boucher P. (mars 2005) Assurance
juridique : Étude de marché. Barreau du Québec, p.17.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
28
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
accessibilité à la justice ? Afin d’en trouver la réponse, nous avons cherché à mieux comprendre
ce que représente ce produit. Pour ce faire, nous avons relevé une multitude de questions : quel
est le profil des consommateurs possédant une assurance juridique ? Pourquoi ont-ils décidé de
contracter le produit ? Les procédures à suivre sont-elles simples ? Les consommateurs sont-ils
satisfaits du service qu’ils ont reçu ? Quels sont les avantages et les limites de l’assurance
juridique ? Le produit comporte-t-il des éléments qui peuvent porter à confusion ? Les contrats
d’assurance juridique sont-ils lisibles ? En somme, comment l’assurance juridique est-elle perçue
par le public ?
Puisqu’il existe très peu d’études sur l’assurance juridique au Canada, nous croyons qu’il est
indispensable d’entendre ce que le public et les consommateurs ont à dire sur ce produit. À cet
égard, nous croyons que l’assurance juridique est peu connue des citoyens, qu’il y a un manque
d’information sur le produit, que plusieurs personnes confondent les termes « assistance
juridique », « assurance juridique » et « aide juridique », et que l’assurance juridique ne s’adresse
pas réellement aux personnes à faible revenu.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
29
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
PARTIE II
MÉTHODOLOGIE
Afin de trouver des réponses à nos questions, nous considérons qu’une recherche qualitative est
nécessaire pour saisir ce que représente l’assurance juridique. Pour ce faire, nous nous sommes
entretenue avec deux groupes d’individus : 1) des intervenants clés en assurance juridique et 2)
des personnes qui ont contracté ou non une police d’assurance juridique.
En ce qui a trait aux intervenants clés, nous avons dans un premier temps rencontré trois
représentants du Barreau du Québec : madame Sylvie Berthiaume, coordonnatrice des
communications, Me Dyane Perreault, directrice du service aux membres et Me Michel Moisan,
responsable de la ligne téléphonique. Ceux-ci nous ont parlé de leurs campagnes visant à
promouvoir l’assurance juridique, de l’implantation de ce produit au Québec, des appels qu’ils
reçoivent des consommateurs, de l’importance qu’ils accordent à l’assurance juridique et en quoi
celle-ci est avantageuse pour les citoyens.
En outre, nous avons demandé à cinq avocats travaillant pour différentes firmes ce qu’ils
pensaient de l’assurance juridique et comment réagissaient-ils face à leurs clients assurés et aux
procédures à suivre lors des réclamations.
Afin d’obtenir des informations sur l’assurance juridique, nous nous sommes également
entretenue avec différents intervenants sans toutefois en faire une analyse : plusieurs
représentants de compagnies d’assurance, Me Diane Bélanger, présidente de FBA groupe
conseils (pp. 12 et 46), l’honorable Simon Brossard, ancien juge de la cour du Québec (pp. 47 et
49), madame Lucille Benoît-Rousseau, responsable d’assurance dommages au Bureau
d’assurance du Canada (BAC) (pp. 12 et 38) et monsieur Alain Thériault, directeur de la revue
Les assurances (p. 12).
Par ailleurs, concernant les consommateurs, nous avons réalisé 30 entrevues téléphoniques dont
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
30
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
quinze avec des personnes ayant contracté une police d’assurance juridique et quinze avec des
personnes n’ayant pas contracté une police d’assurance juridique. Ainsi, ces deux catégories de
consommateurs nous ont permis d’obtenir différentes perceptions sur l’assurance juridique afin
d’être le plus représentatif possible de la réalité.
Puisque l’un des objectifs de notre étude est d’obtenir les impressions de différents personnes sur
l’assurance juridique et d’obtenir des récits de consommateurs, l’entrevue semi-dirigée est, selon
nous, la méthode la plus efficace pour recueillir de telles données. Puisque nos répondants
proviennent de différentes régions du Québec, ils nous auraient été difficile de réaliser des
groupes de discussion. C’est pour cette raison que nous avons opté pour des entretiens
téléphoniques. De plus, nous considérons les entrevues semi-dirigées beaucoup plus efficaces
pour approfondir les perceptions de nos interlocuteurs et pour discuter de cas particuliers tels que
des récits de vie.
Nous allons maintenant présenter notre méthodologie en développant ce que constitue une
entrevue semi-dirigée, en présentant l’échantillonnage des participants, l’éthique de notre
recherche, les outils utilisés lors de la cueillette des données, les procédures de recrutement des
participants, le déroulement des entrevues et la méthode d’analyse des données.
2.1
L’entrevue semi-dirigée
Nous avons choisi d’utiliser le modèle des entrevues semi-dirigées afin de laisser une certaine
ouverture aux acteurs tout en s’assurant de ne pas s’éloigner de notre objet d’étude. Selon
Lessard-Hébert et al, l’entrevue semi-dirigée porte « non sur les réactions de l’interviewé à des
questions précises mais sur l’expression libre de ses idées sur un sujet » 74 . Ainsi, ce type
d’entrevue offre l’opportunité au répondant d’élaborer sur ses perceptions et ses interprétations.
L’interlocuteur construit de sa propre réalité en interprétant ses expériences vécues. Il nous est
donc possible d’explorer en profondeur les commentaires qu’il développe. Par contre, puisque
notre étude se précise sur des aspects particuliers, nous pensons qu’il est essentiel de diriger les
thèmes des discussions tenues avec les interlocuteurs. Pour ce faire, nous avons établi ce que
74
Lessard-Hébert et al. (1990) Recherche qualitative : fondements et pratiques. Éditions agence d’Arc. Montréal, p.
28.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
31
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
Russel 75 appelle un guide d’entretien. L’auteur soutient que ce guide permet au chercheur de
rappeler
« quels points l’interviewé devra être amené à aborder, soit spontanément, soit en y étant
incité par l’intervieweur. Il arrive que ce guide se réduise à une simple série de questions.
Quand il utilise son guide d’entretien, l’interviewer est libre de choisir de quelle manière et à
quel moment il posera ses questions. Pour effectuer ce choix, il n’a qu’à se référer aux
informations dont il dispose déjà (ou qu’il peut deviner) quant aux caractéristiques de son
interlocuteur comme son âge, son niveau d’instruction, ou encore la manière dont celui-ci
réagit aux questions qui lui sont posées (comme l’étendue de ses connaissances, ou son
aisance à aborder des sujets variés). Le guide d’entretien est là pour aider l’interviewé à
s’assurer que tous les thèmes prévus seront bien abordés à un moment ou l’autre au cours de
l’entrevue » 76 (parenthèses de l’auteur).
Sur ce point, notre guide d’entretien comportait quatre thèmes :
1) le produit « assurance
juridique », 2) les compagnies d’assurance, 3) les contrats d’assurance juridique et 4)
l’accessibilité à la justice. Afin de diriger les participants vers ces catégories, nous avons inclus
dans notre guide des questions formulées de manière ouverte. Ainsi, selon Russel,
« l’interlocuteur est libre de répondre comme il le souhaite » 77 . L’auteur mentionne aussi que
« les questions ouvertes présentent un avantage évident : elles laissent à l’interviewé le soin de
fournir les informations qui lui semblent les mieux appropriées » 78 .
Par ailleurs, nous n’avons pas délimité un temps prévu pour la durée des entretiens. Nous avons
décidé que les entretiens allaient durer jusqu’à l’épuisement des thèmes. Étant donné que chaque
participant est différent, nous croyons qu’il est difficile de déterminer un temps précis sur la
durée de ce que les personnes peuvent avoir à nous dire. Il est important de prendre en
considération que certains participants peuvent être plus à l’aise avec le sujet d’étude que
d’autres ou qu’ils ont tout simplement plus d’information à donner sur certains thèmes. Par
contre, nous avons constaté que la durée de nos entrevues variait entre 25 et 45 minutes.
En conclusion, pour préserver l’idée d’ouverture de l’entrevue semi-dirigée, les questions ont été
bâties de manière à mettre en place un échange de type informel avec l’interlocuteur. Le principe
de cette forme d’entretien est donc de diriger la discussion de telle sorte que la personne
75
Russel A., J. (2000). Méthodes de recherche en sciences humaines. Paris ; Bruxelles : De Boeck Université.
Idem, p. 139
77
Idem, p. 142
76
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
32
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
concertée ne s’éloigne pas des intérêts du chercheur.
2.2
L’échantillonnage des acteurs
Afin d’obtenir différentes opinions sur l’assurance juridique, nous avons diversifié notre
échantillonnage par deux catégories d’acteurs : les personnes ayant contracté une police
d’assurance juridique et les personnes n’ayant pas contracté une police d’assurance juridique. Le
premier groupe possède une connaissance plus approfondie du sujet. Certains des participants ont
d’ailleurs vécu des expériences où ils ont eu recours à leur protection juridique.
Étant conscient que très peu de personnes possède une police d’assurance juridique au Québec,
nous avions au départ comme objectif de nous entretenir avec quinze acteurs de cette catégorie.
En outre, le tableau suivant permet d’illustrer l’échantillonnage de cette catégorie.
Tableau 5
Échantillonnage des acteurs ayant contracté une assurance juridique
Genre
Groupe
d’âge
Niveau de
scolarité
Homme
30-39 ans
DEC
Homme
30-39
ans
30-39 ans
DEC
Homme
Homme
Homme
Homme
50-59
ans
50-59 ans
Baccalauréat
Baccalauréat
Baccalauréat
Homme
60-69
ans
60-69 ans
Baccalauréat
Homme
60-69 ans
Secondaire
Homme
60-69 ans
Doctorat
Homme
60-69 ans
DEC
Femme
25-29
ans
Secondaire
78
DEC
Domaine d’emploi
Revenu
annuel
brut
Administration
30 000 à
39 999 $
Travaux
40 000 à
publique
49 999 $
Secteur financier
60 000 à
69 999 $
Traduction / fonction 30 000 à
39 999 $
publique
Retraité /
40 000 à
fonction publique
49 999 $
Revenu
familial
brut
50 000 à
59 999 $
70 000 à
79 999 $
80 000 et
plus
30 000 à
39 999 $
40 000 à
49 999 $
Locataire ou
propriétaire
Retraité /
service de la police
Retraité /
enseignement
Retraité /
fonction publique
Psychologie
70 000 à
79 999 $
20 000 à
29 999 $
Inconnu
70 000 à
79 999 $
60 000 à
69 000 $
Inconnu
Propriétaire
60 000 à
69 999 $
30 000 à
39 999 $
20 000 à
29 999 $
80 000 $ et
plus
30 000 à
39 999 $
30 000 à
39 000 $
Retraité /
administration
Bureautique /
service municipal
Propriétaire
Locataire
Propriétaire
Propriétaire
Locataire et
propriétaire
Propriétaire
Propriétaire
Propriétaire
Propriétaire
Propriétaire
Idem
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
33
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
Femme
40-49 ans
Femme
40-49 ans
Certificat
universitaire
Maîtrise
Femme
60-69 ans
Baccalauréat
Femme
70 ans et Doctorat
plus
Emploi de bureau
30 000 à
39 999 $
Gestionnaire
40 000 à
49 999 $
Retraité / domaine de 50 000 à
la santé
59 999 $
Retraité /
50 000 à
Enseignement
59 999 $
40 000 à
49 999 $
80 000 et
plus
50 000 à
59 999 $
50 000 à
59 999 $
Propriétaire
Propriétaire
Propriétaire
Propriétaire
Par ailleurs, afin d’être le plus représentatif possible de la réalité, nous avons cru qu’il était
important de s’entretenir avec des personnes n’ayant pas contracté une police d’assurance
juridique soit parce qu’elles ne connaissaient pas le produit ou soit parce qu’elles n’étaient pas
intéressées par celui-ci. De plus, une semaine avant l’entrevue, nous avons remis aux participants
de cette catégorie un dépliant sur le produit et un contrat d’assurance juridique provenant de l’une
des cinq compagnies suivantes : Aviva Traders, La Capitale Assurances générales, Échelon, ING
assurance et La Fédération. Le but de cette démarche était de familiariser ces derniers au produit
afin d’obtenir leurs impressions sur la lisibilité du contrat.
Tout comme la première catégorie de participants, nous avons décidé de nous entretenir avec
quinze acteurs. Étant donné que nous pouvions plus facilement les sélectionner, nous avons
cherché à varier le plus possible notre échantillonnage selon l’âge, le domaine de l’emploi, le
revenu familial brut et autres. Le tableau suivant représente cette dernière :
Tableau 6
Échantillonnage des acteurs n’ayant pas contracté une assurance juridique
Genre
Groupe
d’âge
Niveau de
scolarité
Domaine d’emploi Revenu
annuel
Revenu
familial
Femme
25-29 ans
Maîtrise
Enseignement
Femme
25-29 ans
Baccalauréat
Communication
Femme
25-29 ans
Baccalauréat
Droit social
Femme
25-29 ans
Baccalauréat
Femme
30-39 ans
DEC
Ressources
humaines
Administration
Moins de
10 000 $
Moins de
20 000 $
30 000 à
39 999 $
50 000 à
59 999 $
30 000 à
39 999 $
20 000
à Locataire
29 999 $
30 000 à
Locataire
39 999 $
50 000
à Propriétaire
59 999 $
70 000 à
Propriétaire
79 999 $
30 000 à
Locataire
39 999 $
Femme
30-39 ans
Baccalauréat
Journalisme
30 000 à
39 999$
30 000 à
39 999$
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
Locataire /
propriétaire
Locataire
34
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
Femme
40-49 ans
DEC
Secrétariat
Femme
40-49 ans
Baccalauréat
Communication
Femme
40-49 ans
Maîtrise
Information
Homme
30-39 ans
Baccalauréat
Vente
Homme
40-49 ans
Maîtrise
Ingénierie
Homme
50-59 ans
DEC
Homme
60-69 ans
Homme
60-69 ans
2.3
20 000 à
29 999 $
80 000 $ et
plus
30 000 à
39 999$
80 000 $ et
plus
80 000 $ et
plus
Refus
Propriétaire
Alimentation
20 000 à
29 999 $
40 000 à
49 999 $
30 000 à
39 999$
50 000 à
59 999 $
80 000 $
et plus
Refus
Baccalauréat
Retraité / milieu
hospitalier
30 000 à
39 999 $
80 000 $ et
plus
Propriétaire
Maîtrise
Retraité / fonction
publique
Refus
Refus
Propriétaire
Propriétaire
Locataire et
propriétaire
Propriétaire
Propriétaire
Propriétaire
Les procédures de recrutement
Sachant que très peu de citoyens ont contracté une police d’assurance juridique, nous avons eu
recours à quatre médiums pour recruter les participants assurés. Premièrement, nous avons fait
paraître le 18 janvier 2007 une annonce dans l’hebdomadaire montréalais Voir. Ce dernier détient
un tirage de 12 000 copies et 36 000 lecteurs. Par la suite, nous avons fait paraître une annonce le
20 janvier 2007 dans La Presse du samedi. La Presse est distribuée partout au Québec. Son tirage
du samedi est de 284 672 copies et le nombre de lecteurs est de 800 480. Nous avons également
affiché sur le site Internet d’Option consommateurs un appel à tous et finalement, nous avons
envoyé un courriel à plus de 1200 personnes membres ou utilisateurs des services d’Option
consommateurs. Suite à ces démarches, de nombreuses personnes ont répondu à l’appel.
Toutefois, la plupart d’entre eux confondaient assurance juridique et assistance juridique et ne
correspondaient pas à ce que nous cherchions. Nous avons finalement réussi à obtenir les quinze
répondants souhaités qui avaient véritablement contracté une police d’assurance juridique. Ces
derniers ont reçu 25 dollars pour avoir participé à notre étude. Afin de s’assurer qu’ils
possédaient bel et bien une assurance juridique nous leurs avons pour la plupart demandé de nous
lire une partie de leur contrat ou de nous le télécopier.
Concernant les participants n’ayant pas contracté une police d’assurance juridique, nous nous
sommes entretenue avec des personnes ayant répondu à l’annonce émise dans le Voir et des
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
35
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
personnes de notre entourage en s’assurant d’obtenir un échantillonnage varié. Les procédures de
recrutement se sont échelonnées sur une période de quatre semaines. De manière générale, les
entrevues se sont très bien déroulées.
2.4
L’éthique
Afin de respecter l’anonymat des personnes interviewées, nous nous sommes engagée à ne pas
divulguer leurs noms et leurs coordonnés. Avant chaque entrevue, les participants ont été
informés de cette dimension déontologique.
2.5
Les outils utilisés lors des entrevues
Si les participants le permettaient, nous avons eu recours à un magnétophone lors des entrevues
téléphoniques. Nous nous sommes assurée d’obtenir le consentement des personnes interviewées
avant de faire usage de cet outil d’enregistrement. Selon Russel, l’enregistrement des entretiens
fait en sorte que
« l’intervieweur est libéré d’une préoccupation lancinante et peut mieux prêter attention à ce
que l’interviewé est en train de dire, remarquer quels points méritent d’être clarifiés, veiller à
ce que tous les thèmes envisagés soient traités avec suffisamment de profondeur et assez de
précision » 79 .
L’utilisation d’un magnétophone nous a donc permis de nous concentrer davantage sur les
réponses de nos interlocuteurs lors des entrevues. Par ailleurs, aucun test et aucun questionnaire à
remplir n’a été utilisé lors des entretiens. Toutefois, la majorité de nos répondants avaient entre
les mains un contrat d’assurance juridique, soit celui que nous leurs avions remis à l’avance ou
soit leur propre contrat.
2.6
Le déroulement des entrevues
Nous avons laissé les participants choisir le temps de l’entrevue téléphonique afin qu’ils se
sentent le plus à l’aise possible.
En outre, Russel suggère quelques trucs que nous avons tenté de suivre lorsque les participants
79
Russel A., J. (2000). Méthodes de recherche en sciences humaines. Paris ; Bruxelles : De Boeck Université, p.
145.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
36
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
ont eu des difficultés à répondre aux questions. Par exemple, l’auteur suggère de poser des
questions directes telles « pourquoi ? », de répéter une question déjà posée pour obtenir plus
d’information sur le sujet, de brièvement résumer ce que l’interlocuteur a dit, de faire des silences
et de demander des informations supplémentaires 80 . Lors de nos entretiens, nous avons suivit ces
recommandations.
2.7
Méthode d’analyse des données
Nous avons décidé de former notre analyse selon nos intuitions tout en nous référant au modèle
de Morse et aux idées de Kaufmann. Selon Morse, quatre procédures cognitives se retrouvent
intégralement dans toutes les méthodes de recherche qualitative : la compréhension, la synthèse,
la théorisation et « recontextualisation » 81 .
La première étape du modèle de Morse, la compréhension, consiste à se familiariser avec les
données recueillies afin de donner un sens à nos idées. Pour ce faire, Russel propose au chercheur
de créer « une liste de toutes les idées, de toutes les questions, des thèmes et des
pressentiments » 82 qui lui vient en tête, ce qui permet d’obtenir le fondement des « dossiers
analytiques ». Pour sa part, Kaufmann suggère qu’il faut observer récurrences et les
contradictions dans un discours 83 . Les récurrences représentent la tendance d’un individu à
revenir sur les mêmes sujets élaborés. La contradiction désigne l’action de soutenir des
propositions qui sont incompatibles les unes avec les autres. L’isolement d’éléments clés permet
donc au chercheur de trouver des voies interprétatives à l’intérieur du discours. Ainsi, le
chercheur peut ensuite procéder à la synthèse.
La synthèse signifie qu’il faut réduire les données, trier l’information, faire des liens et de trouver
des indices qui permettront de répondre à la question de recherche. Selon Morse, cette étape est
réussie lorsque le chercheur est capable de décrire les composantes de ses catégories et des
propos de ses informants sans se référer à ses notes et lorsque le chercheur possède l’habilité
80
Idem, p. 143.
Morse, J. (1994). Critical Issues in Qualitative Research Methods. Bervely Hills : Sage, p. 25
82
Russel A., J. (2000). Méthodes de recherche en sciences humaines. Paris ; Bruxelles : De Boeck Université, p. 145.
83
Kaufmann, J.C. (1996). L’entretien compréhensif. Paris : Éditions Nathan, pp. 95-100.
81
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
37
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
d’utiliser des exemples spécifiques qui illustrent la généralisation de sa synthèse 84 .
Ensuite, la théorisation représente l’abstraction. Elle aide à retourner vers la dimension
conceptuelle. Le but de cette démarche est d’apporter des réponses en fonction de notre question
de recherche et qui dépassent des situations particulières.
Finalement, la « recontextualisation » permet de savoir si les propositions sont transférables à
d’autres contextes et si elles contribuent à la littérature sur le sujet. La « recontextualisation »
permet de voir si les propos qui découlent de notre analyse peuvent apporter de nouvelles
informations à la littérature déjà existante sur l’assurance juridique. Cette étape représente donc
la contribution de notre travail et le sens qui se dégage de celui-ci.
Les quatre étapes de Morse et les conseils de Kaufmann concernant les récurrences et les
contradictions nous semblent des méthodes efficaces d’analyser les données recueillies par les
entrevues. Le modèle de Morse est suffisamment général pour laisser la chance au chercheur
d’utiliser des techniques qu’il favorise.
Pour terminer, les entrevues semi-dirigées par téléphone nous sont apparues le moyen idéal pour
réaliser nos objectifs de recherche. Elles nous ont permis de saisir davantage les perceptions des
consommateurs face à l’assurance juridique. Nous croyons que notre échantillonnage est varié et
que le nombre de 30 participants est suffisant pour notre étude, surtout si nous considérons que
très peu de personnes possèdent une assurance juridique. Par ailleurs, le modèle de Morse et les
propos de Kauffman nous ont permis de réaliser plus efficacement notre analyse des données
recueillies lors des entrevues. Nous allons donc maintenant exposer les résultats de cette
dernière.
84
Morse, J. (1994). Critical Issues in Qualitative Research Methods. Bervely Hills : Sage, p. 30.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
38
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
PARTIE III
RÉSULTATS
Cette partie se divise en trois volets : un résumé de notre entretien avec des représentants du
Barreau du Québec, les résultats des trente entrevues que nous avons réalisées et l’analyse des
contrats d’assurance juridique.
3.1
L’assurance juridique encouragée par le Barreau du Québec
Le Barreau du Québec jouant un rôle indispensable au développement de l’assurance juridique, il
était fondamental pour notre étude de nous entretenir avec des représentants de cette organisation.
Nous avons donc rencontré lors d’une entrevue Me Dyane Perreault, directrice du service aux
membres, Me Michel Moisan, responsable de la ligne téléphonique et madame Sylvie
Berthiaume, coordonnatrice des communications. Selon eux, à part l’aide juridique, ce produit est
présentement la seule option qui s’offre aux consommateurs pour les soutenir en cas de litige. La
mission du Barreau du Québec est de protéger le public et de lui faciliter l’accès à la justice.
L’assurance juridique étant perçue par celui-ci comme une solution importante au manque
d’accessibilité à la justice, l’organisme a depuis l’année 2000 dépensé plus de trois millions de
dollars en campagnes visant à promouvoir le produit. Son public cible est spécialement les
personnes âgées entre 35 et 55 ans dont le revenu familial est de 60 000 dollars par année. Bref,
selon eux, l’assurance juridique s’adresse à la classe moyenne. Selon madame Berthiaume,
d’après une étude réalisée par le Barreau du Québec en 2004, 30 pour cent des citoyens
connaissent l’existence du produit. Toutefois, Me Moisan affirme que, malgré cette statistique,
l’assurance juridique n’est toujours pas connue du grand public. Les citoyens manquent
d’information sur le sujet. Plusieurs personnes ont de la difficulté à saisir ce qu’offre le produit.
Le Barreau du Québec reçoit d’ailleurs entre 25 et 30 appels par semaine à ce sujet. D’autre part,
Me Perreault soutient qu’en général, les courtiers d’assurance ne cherchent pas véritablement à
offrir l’assurance juridique aux consommateurs. Ils ne veulent pas perdre de leur temps à vendre
un produit qui ne rapporte pas réellement.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
39
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
En revanche, madame Berthiaume souligne que, lorsque le Barreau du Québec présente
l’assurance juridique au public, celui-ci est très enthousiaste face au produit. C’est également le
cas pour les avocats qui éprouvent moins de soucis par rapport au statut financier de leur client.
Ils sont assurés qu’une partie de leurs honoraires sera couverte. Selon Me Moisan, ceux-ci
considèrent d’ailleurs que les procédures à suivre avec l’assureur sont simples et efficaces. À ce
sujet, nous avons demandé à cinq avocats ce qu’ils pensaient des démarches qu’ils devaient
suivre avec les assureurs et ils nous ont tous répondu être très satisfaits de celle-ci. Quant aux
assurés, ceux-ci sont habituellement conscients que, pour quatre dollars par mois, ils ne peuvent
pas s’attendre à être entièrement protégés. Le plafond de garantie qui est pour la plupart du temps
de 5 000 dollars est donc perçu comme un bon coussin de départ. Après tout, comme le souligne
Me Perreault, « quatre dollars par mois, c’est moins cher qu’un paquet de cigarettes ».
3.2
Les impressions du système juridique au Québec
Par ailleurs, plus de 11 participants sur 30 ont déjà été impliqués dans une poursuite judiciaire.
Lors de nos entrevues, nous avons demandé à nos 30 interlocuteurs quelles étaient leurs
impressions du système juridique au Québec. À l’exception de deux personnes, celles-ci sont très
péjoratives. Et nous avons perçu davantage de frustrations envers le système de la part des
individus ayant contracté une police d’assurance juridique. Le vocabulaire qu’ils ont employé
était beaucoup plus négatif. Par exemple, les mots « une risée », « une farce », « un bordel », « un
bateau » se sont souvent dégagés de leur discours. Qui plus est, certains affirment qu’ils ne
souhaiteraient jamais à leur pire ennemi de faire face à la justice, et que les délais sont tellement
longs qu’ils ont l’impression de ne plus jamais être en paix. En outre, plusieurs soutiennent que
les citoyens de classe moyenne n’auront jamais accès à la justice puisqu’ils n’ont pas les moyens
financiers de faire valoir leurs droits et parce qu’ils n’ont pas accès à l’aide juridique. En somme,
les participants soulignent que le système juridique est inutile, qu’il n’est pas accessible, qu’il est
une fausse représentation de l’accès à la justice, que les procédures sont longues et complexes,
que le langage juridique est incompréhensible et que les frais des avocats sont excessivement
dispendieux. Un grand nombre des répondants ont le sentiment de ne pas être entendus et d’être
« étouffés » par le système. La justice est donc perçue comme un mythe. Tout compte fait, il est
décevant de voir à quel point ces citoyens ont entièrement perdu confiance envers ce qui est l’un
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
40
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
des fondements de notre société. Pour conclure, il serait important que de nouvelles procédures
soient davantage développées pour faciliter les règlements de conflit.
3.3
Les participants ayant contracté une police d’assurance juridique
Dans cette section, nous allons présenter les perceptions des assurés face à l’assurance juridique,
présenter les avantages et les limites de ce produit et discuter de certains aspects du produit
pouvant porter à confusion.
Dans un premier temps, il est important de mentionner que sur quinze assurés, dix étaient des
hommes dont cinq étaient retraités et âgés entre 60 et 69 ans. En tout, huit répondants sur quinze
étaient à la retraite et étaient âgés de plus 50 ans. Il est probable que ce profil soit un simple
hasard de circonstances, mais il aussi possible que ce public soit davantage intéressé par
l’assurance juridique. À ce sujet, l’un de nos participants nous a souligné qu’en vieillissant, il
s’était senti de plus en plus anxieux face aux divers risques comme celui d’être impliqué dans une
poursuite judiciaire. Face à ce sentiment, il a commencé à se protéger davantage en contractant
diverses polices d’assurance dont l’assurance juridique. Est-ce un phénomène fréquent ? Si tel est
le cas, il serait intéressant d’approfondir cette piste lors d’une prochaine étude sur l’assurance
juridique. Spécialement si l’on considère que, présentement, le public visé lors des campagnes du
Barreau du Québec est âgé de moins de 55 ans.
D’autre part, sur les quinze participants qui ont répondu à notre entrevue, treize possédaient une
assurance juridique avec la compagnie La Capitale Assurances générales et deux avec la
compagnie Échelon. Les clients de La Capitale Assurances générales payent en moyenne entre 40
et 50 dollars par année pour une couverture allant jusqu’à 5 000 dollars par litige. La plupart
détiennent également une police d’assurance habitation et d’assurance automobile avec ce même
assureur. Quant aux deux clients de la compagnie Échelon, ils payent en moyenne 84 dollars par
année pour un contrat unique qui offre un plafond 10 000 dollars par litige. Tous nos participants
considèrent la prime abordable malgré le fait qu’ils jugent les domaines couverts et le plafond de
garantie limités. Plusieurs participants ont souligné qu’en raison du faible coût de leur prime, ils
ne s’attendaient pas à obtenir une meilleure couverture. Sur ce point, nous leurs avons demandé
s’ils étaient prêts à débourser davantage pour obtenir une plus grande couverture. Pratiquement la
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
41
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
moitié d’entre eux ont répondu par l’affirmative à condition que le plafond de garantie ou les
domaines couverts soient plus larges. Ceux qui ont répondu par l’affirmative à la question étaient
prêts à payer une prime de 100 à 200 dollars par année pour un plafond de garantie allant de
10 000 à 15 000 dollars par litige couvert. Il serait donc intéressant pour les consommateurs
désirant obtenir une plus grande couverture que la plupart des assureurs offrent différents forfaits.
Cette situation est toutefois complexe car le but premier du Barreau du Québec en faisant la
promotion de l’assurance juridique est de rendre la justice plus accessible. Pour ce faire, il est
nécessaire que la prime du produit soit abordable pour tous. Il serait injuste que ceux qui ne
peuvent pas se permettre de payer davantage pour une plus grande couverture soient
désavantagés. Par ailleurs, ceux qui ont répondu par la négative ne se considèrent pas
suffisamment à risque.
En outre, lorsque que nous avons demandé aux quinze assurés où et dans quel contexte ils avaient
entendu parler de l’assurance juridique pour la première fois, neuf d’entre eux ont répondu qu’ils
avaient été sollicités par leur assureur lors d’un renouvellement de contrat. Deux de ces personnes
ont reçu une souscription gratuite d’un an et ont décidé de la renouveler. En revanche, un
participant affirme que le produit a été ajouté à ses autres polices d’assurance sans son
consentement. Autrement, six répondants ont eux-mêmes demandé à leur assureur de contracter
le produit.
Par ailleurs, plus de huit participants sur quinze se considéraient à risque lorsqu’ils ont contracté
l’assurance juridique pour les raisons suivantes : 1) plusieurs sont propriétaires d’une maison ou
d’un immeuble à logements, 2) quelques-uns vivaient à l’époque un trouble de voisinage ou un
trouble au travail, 3) une personne ayant un parent malade envisageait une succession prochaine,
4) une personne signait régulièrement des contrats et 5) un participant avait en tête d’entamer un
litige avant même de contracter le produit, ce qui prouve qu’il ne comprenait pas bien les
conditions du produit. Ces participants étaient donc fort conscients lors de l’achat du produit
qu’un jour ou l’autre leur police d’assurance juridique leur serait utile. En ce qui a trait aux
répondants qui ne se considéraient pas à risque lorsqu’ils ont contracté une police d’assurance
juridique, plusieurs d’entre eux connaissaient un proche ayant vécu difficilement un litige. Ils
étaient donc conscients des coûts excessifs qu’un litige pouvait représenter.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
D’autre part, sept répondants sur quinze avaient déjà eu recours au système juridique avant de
contracter l’assurance juridique. Ils étaient avisés de la complexité de ce dernier lorsqu’ils ont
décidé d’obtenir le produit. Les participants étaient donc tous conscients des réalités du système
juridique lorsqu’ils ont contracté une police d’assurance juridique.
Finalement, treize assurés sur quinze ont eu recours à des conseils d’un avocat par l’entremise de
l’assistance juridique pour de nombreuses raisons, tels la succession, le divorce, les troubles de
voisinage, les vices cachés, le non-respect d’un contrat et une fausse représentation d’un vendeur
à l’achat d’un produit. Le tiers des participants ont dû entamer un litige concernant les domaines
de la propriété et de la consommation.
3.3.1 Les satisfactions des assurés
Nous avons demandé à nos participants ce qu’ils pensaient du service qu’ils avaient reçu. La
majorité des assurés ont affirmé être entièrement satisfaits. Certains assurés ont même souligné
avoir obtenu un « service de Cadillac » et qu’ils recommanderaient le produit à leur entourage.
Les répondants ont aimé que le service soit simple et rapide. Les délais pour être remboursés
dépassaient rarement les 48 heures, et peu de formulaires devaient être remplis. Ils étaient
également satisfaits de pouvoir choisir eux-mêmes un avocat et qu’une partie de ses honoraires
soit couverte.
Par ailleurs, nous tenons à rappeler que l’assistance juridique est un service offert par l’entremise
de l’assurance juridique. En ce qui a trait à l’assistance juridique, les assurés ont pour la plupart
aimé pouvoir facilement obtenir les conseils d’un avocat. Ils ne voulaient pas déranger un avocat
pour lui demander une simple question. Certains ont répondu ne pas connaître d’avocat et encore
moins leurs façons de fonctionner. L’assistance juridique représente donc un outil qui facilite
l’accès à l’information, qui sécurise les assurés et qui leur permet d’économiser sur les frais
d’avocat pour une brève consultation. Certains soutiennent même que les conseils qu’ils ont reçus
leur ont permis d’éviter un litige. À ce sujet, un participant résume très bien ce que l’assistance
juridique lui a apporté :
« Vivant un divorce, j’étais désemparée "émotionnellement" et financièrement. Je ne
connaissais pas les procédures à suivre lors d’une telle situation et j’avais plusieurs
questions en tête. Je les ai souvent appelés et ça m’a toujours rassurée de savoir
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
43
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
qu’ils étaient là pour me répondre et pour obtenir leurs conseils. Je me serais mal vue
consulter un avocat chaque fois que j’avais une question à poser. J’étais en crise.
L’assistance juridique m’a donc permis de préparer mon divorce et d’éviter un litige.
Je ne voulais pas me tromper. Je voulais connaître mes droits et mes obligations afin
d’éviter un litige et afin que notre entente soit avantageuse pour tous les deux. Je
voulais me préparer à toutes les éventualités. J’étais rassurée et contente de ne pas
avoir à payer un avocat. On peut appeler l’assistance juridique quand on le veut ».
À la suite à ce commentaire, cette personne a ajouté des propos forts intéressants face au service
d’assistance juridique qu’elle avait reçu :
« On aurait dit que les avocats étaient pris dans le temps et qu’ils devaient se
dépêcher. Moi, j’avais une multitude de questions. Quand j’étais rendue à quatre ou
cinq questions, je sentais une sorte de pression. Dans ce temps-là, je rappelais plus
tard. […] Je me suis arrangée pour passer deux heures en plusieurs coups de
téléphone. […] J’ai fait en tout dix appels car je voulais véritablement être préparée.
[…] Je ne sais pas comment les assureurs fonctionnent, mais je présume que les
avocats sont limités dans le temps ».
Il est vrai que cette personne avait probablement davantage de questions à poser que la plupart
des assurés lorsqu’ils ont recours à l’assistance juridique. Mais nous considérons que les
assureurs doivent éclairer le plus possible leurs clients, spécialement lorsque ceux-ci se sentent
démunis face à un événement. Pour terminer, nous pouvons dire qu’en général, la majorité des
consommateurs était très satisfaits du service reçu.
3.3.2 Les insatisfactions des assurés
Seulement deux assurés étaient entièrement insatisfaits du service qu’ils ont reçu : le premier visà-vis l’assurance juridique et le deuxième vis-à-vis l’assistance juridique. Le premier souhaitait
entreprendre un litige contre la ville de Montréal concernant une norme environnementale qui
interférait dans la vente de son quadruplex. La ville de Montréal lui a vendu une partie de la
ruelle derrière sa propriété, mais elle n’était pas au courant lors de l’achat que cette dernière était
contaminée. Par conséquent, il n’arrivait plus à vendre son immeuble. Il désirait donc entamer
une poursuite contre la ville de Montréal pour vice caché. Son avocat était persuadé que, selon le
contrat, cet événement était couvert par l’assureur, ce qui n’était pas le cas. Face à cette situation
cet assuré se méfie dorénavant des agents d’assurances. Il perçoit maintenant l’assurance
juridique comme une fausse représentation et un vol déguisé. Il est donc essentiel pour les
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
44
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
assureurs, afin d’éviter toute confusion, d’expliquer clairement aux consommateurs qui
contractent l’assurance juridique ce qui est couvert par le produit et ce qui ne l’est pas.
Concernant l’assistance juridique, le deuxième assuré soutient qu’à deux reprises il a voulu
obtenir des conseils d’un avocat par l’entremise de l’assistance juridique. Toutefois, on a refusé
de lui répondre affirmant que ses questions ne correspondaient pas aux domaines couverts. Cette
personne a appelé son assureur pour la première fois en 2000 concernant une question sur la
succession, et pour la deuxième fois en 2005 concernant une question sur le divorce. À ce sujet,
elle mentionne :
« On m’a répondu que ce n’était pas de leur domaine. Pourquoi je paye si on ne
répond pas à mes questions. J’avais besoin de conseils et de renseignements, pas
d’un avocat. Dans les deux cas, on n’a pas su me répondre et je paye pour ça. On ne
m’avait jamais dit que ces domaines n’étaient pas couverts. Si on l’avait fait, je
n’aurais pas pris le produit. Ça ne répond pas au besoin des consommateurs ».
Face à ces circonstances, le consommateur en question a été très frustré du service qu’il a reçu et
a décidé, après cinq ans d’utilisation, d’annuler sa police d’assurance. Pourtant, nous avons
contacté le service à la clientèle de son ancienne compagnie d’assurances et on nous a confirmé
que le divorce et la succession sont des domaines bel et bien couverts par l’assistance juridique.
3.3.3 Les avantages de l’assurance juridique
Lorsque nous avons demandé aux assurés quels étaient les avantages de l’assurance juridique, les
mots « sécurité », « protection », « abordable », « accès à l’information », « rapidité »,
« pratique » se sont dégagés à plusieurs reprises du discours des participants.
L’assurance juridique est perçue par les participants comme étant un outil qui permet de faciliter
les démarches lors d’un litige et de couvrir une partie des frais en cas d’événement. L’assurance
juridique représente pour eux une porte de sortie qui les aide à résoudre rapidement un événement
difficile. Selon eux, elle permet d’accélérer les démarches juridiques qu’ils entreprennent, car ils
sont rapidement conseillés par l’assistance juridique. Sachant que le système juridique est
complexe, cette solution les rassure énormément. Ces personnes ne veulent pas être seules à faire
face à la justice, surtout considérant à quel point un événement peut être difficile à vivre sur le
plan émotionnel et financier. Elles veulent donc qu’un professionnel du droit soit présent pour les
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
45
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
soutenir dans leurs démarches. Les assureurs peuvent leur dire précisément à quel moment elles
doivent consulter un avocat et pour quelles raisons précises. Les assureurs peuvent également
leur suggérer les procédures les plus favorables à entamer, ce qui est très rassurant pour elles.
3.3.4 Les avantages de l’assistance juridique
Tout compte fait, ce que les assurés recherchent le plus en contractant l’assurance juridique sont
la sécurité et la protection. Et l’accès à l’information contribue à ce sentiment sécurité. Une
personne ne peut pas faire valoir ses droits adéquatement si elle ne connaît pas les lois et les
procédures à suivre. L’assistance juridique est donc un outil important puisqu’elle répond à ce
besoin. Elle est perçue par les participants comme un moyen rapide d’avoir accès à l’information.
Ils sont rassurés de savoir que ce service est présent pour eux et qu’ils n’ont pas à se soucier de
prendre un rendez-vous avec un avocat pour une consultation, et de payer ses honoraires pour une
simple question. Plusieurs considèrent d’ailleurs intimidant de rencontrer directement un avocat.
Selon eux, l’assistance juridique est efficace, accessible, simple et rapide. S’ils vivent un
problème, ils savent précisément qui contacter. De plus, ils font davantage confiance en leur
assureur qu’à un avocat inconnu pour deux raisons. Tout d’abord, ils se disent que l’assistance
juridique est efficace car elle est incluse à l’assurance juridique qui est encouragée par le Barreau
du Québec. Certains prétendent également que l’assureur a avantage à leur donner un bon service
s’il veut préserver sa réputation et ne pas perdre sa clientèle. En somme, ils n’ont pas à se casser
la tête pour obtenir des réponses à leurs questions. L’assistance juridique favorise ainsi
l’accessibilité à l’information.
Me Diane Bélanger, présidente de FBA groupe conseils, ajoute à ce sujet que de nombreux
individus se rendent à la cour des petites créances sans être préparés. Ne connaissant pas bien le
fonctionnement de cette cour, ils ne réalisent pas l’importance d’apporter des preuves appuyant
leur récit. Par conséquent, de nombreuses personnes n’arrivent pas à faire valoir leurs droits par
manque de connaissances du système juridique. Les conseils d’un avocat pourraient leur être fort
utiles pour éviter une telle situation. Toutefois, aucun avocat traite les litiges à la cour des petites
créances. L’assistance juridique est donc un bon moyen pour informer ces personnes et pour
mieux les préparer.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
3.3.5 Les limites de l’assurance juridique
En revanche, concernant les limites de l’assurance juridique, la plupart de nos répondants
considèrent que le plafond de 5 000 dollars est insuffisant, que les domaines garantis sont limités
et que la couverture comporte trop d’exclusions. Plusieurs n’apprécient guère qu’un nombre
d’heures déterminé soit attribué aux démarches juridiques. Par exemple, l’assureur va
dédommager un maximum de dix heures pour un règlement de dossier à l’amiable. Comme la
majorité des participants le maintiennent, le système juridique ne fonctionne pas de la sorte. Les
procédures sont lentes, nombreuses et complexes. De plus, malgré le fait qu’ils aient contracté
une police d’assurance juridique, ils ne se sentent toujours pas véritablement protégés car la
couverture garantie par litige est seulement de 5 000 dollars. Certes, un plafond de garantie de
5 000 dollars peut être un bon coussin de départ, mais dans le cas d’un gros litige, si l’assuré n’a
aucunement les moyens de débourser lui-même les frais supplémentaires, il n’arrivera pas
véritablement à faire valoir ses droits. Dans ce cas, il sera contraint à se tourner vers la cour des
petites créances, à minimiser ses dommages à 7 000 dollars et à ne pas avoir recours à un réel
soutien d’un avocat. En minimisant ses dommages, cette personne se voit obligée de perdre une
somme d’argent qui lui est due. À ce sujet, l’honorable Simon Brossard, juge de la cour du
Québec à la retraite, nous indiquait qu’il est fréquent de voir des individus minimiser leurs
dommages à 7 000 dollars pour pouvoir accéder à la cour des petites créances même si leurs
dommages réels sont de 20 000 dollars. Même si une personne possède une assurance juridique,
si les coûts de son litige excèdent les 5 000 dollars et qu’elle est limitée financièrement, elle se
retrouve dans une position difficile. L’assuré doit donc être dans la mesure de débourser la
différence. L’assurance juridique est-elle donc moins avantageuse pour les citoyens à
faible revenu ? En réponse à cette question, Me Bélanger soutient qu’il est faux de penser ainsi
car, en général, les frais des litiges couverts par l’assurance juridique excèdent rarement les 5 000
dollars. Elle ajoute à ce sujet que 80 pour cent des litiges sont couverts à 100 pour cent.
Par ailleurs, l’assurance juridique ne couvre pas le domaine de droit le plus commun, soit le
domaine matrimonial. Il est évident que ce type de litige représente un risque élevé pour
l’assureur. Un tel événement entre également en conflit d’intérêt pour l’assureur puisqu’il se
trouve à couvrir deux personnes avec une même prime d’assurance.
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
De plus, l’assurance juridique s’annule lorsqu’un assuré entame un litige contre une personne
également protégée par la même compagnie d’assurances. Il est compréhensible qu’une telle
situation représente également un conflit d’intérêt pour l’assureur. Par contre, si nous considérons
qu’au Québec, la plupart des assurés sont protégés par la même compagnie, cela peut facilement
compliquer les litiges. Les assurés ne peuvent pas prévoir contre qui ils devront entamer des
procédures judiciaires. Si le produit devient plus populaire au Québec, et que seulement neuf
compagnies offrent celui-ci, cette condition ne sera plus logique pour les consommateurs.
Tout compte fait, les assurés ne se sentent pas complètement protégés par l’assurance juridique
parce qu’ils considèrent le plafond de 5 000 dollars limité, les domaines couverts trop restreints et
les exclusions nombreuses. De plus, le produit leur étant souvent mal présenté par les
représentants des assureurs, certains aspects fondamentaux portent à confusion.
3.3.6 La confusion des participants face à l’assurance juridique
Le tiers des trente participants nous ont avoué confondre les termes « aide juridique »,
« assistance juridique » et « assurance juridique ». Sur ces dix personnes, deux possèdent une
assurance juridique. Ceux qui n’avaient pas contracté le produit avaient reçu à l’avance le
dépliant sur l’assurance juridique encouragée par le Barreau du Québec ainsi qu’un contrat à lire.
Malgré tout, plusieurs d’entre eux n’avaient toujours pas saisi exactement ce que l’assurance
juridique représentait. Par exemple, certains croyaient que l’assureur leur allouait gratuitement les
services d’un avocat pour les représenter lors d’un litige. Il est donc essentiel de spécifier
davantage ces termes de base et de vulgariser le plus possible les outils d’information sur ce
produit.
De même, nous avons pu constater qu’un certain nombre des participants possédant une
assurance juridique ne comprenaient toujours pas ce que le produit offrait. Par exemple, un assuré
croyait au moment de l’entrevue que l’assurance juridique était limitée seulement à l’assistance
juridique. Il nous a mentionné à ce sujet : « je croyais avoir seulement droit à des conseils
juridiques par téléphone. […] C’est de cette manière que les assureurs nous présentent le
produit ». Un autre assuré nous a affirmé qu’il a contracté l’assurance juridique seulement pour
avoir accès à de l’assistance juridique. Puisqu’il ne se considère pas comme une personne à
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
48
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
risque, l’assurance juridique ne l’intéresse pas. Dans ses deux cas, les assurés payaient pour un
service d’assistance juridique qu’ils possédaient déjà puisqu’ils y avaient accès par l’entremise
des autres contrats qu’ils détiennent avec le même assureur. Ils payaient donc deux fois pour le
même service. Sur ce point, l’honorable Simon Brossard, juge de la cour du Québec à la retraite,
nous a affirmé que de nombreux citoyens ne savaient pas qu’ils avaient accès à de l’assistance
juridique par le biais de leur assurance habitation.
Par ailleurs, certains participants nous ont mentionné qu’ils croyaient que l’assurance juridique
pouvait couvrir des événements déjà en cours. À ce sujet, un assuré nous a affirmé ne pas avoir
été averti de cette restriction lorsqu’il a contracté le produit. Ceci peut paraître évident pour les
assureurs, mais ils devraient toujours préciser ce point lorsqu’une personne contracte l’assurance
juridique afin d’éviter la confusion.
Il est aussi fort important que les assureurs précisent et expliquent les domaines couverts par
l’assurance juridique à leurs clients lorsqu’ils contractent le produit. À ce sujet, un assuré soutient
qu’il n’a pas été informé des domaines couverts et que, s’il l’avait été, il n’aurait jamais contracté
l’assurance juridique parce qu’il ne se sent pas concerné.
Finalement, l’aspect de l’assurance juridique qui porte le plus à confusion est la lisibilité des
contrats. Avant de présenter notre analyse à ce sujet, voici les commentaires des participants
n’ayant pas contracté une police d’assurance juridique envers ce produit.
3.4
Les participants n’ayant pas contracté une police d’assurance juridique
Tout d’abord, le tiers de nos participants n’ayant pas contracté une police d’assurance juridique
avait auparavant entendu parler de l’assurance juridique, soit dans les médias, soit par le Barreau
du Québec ou encore lors d’un renouvellement d’un contrat d’assurance habitation. Il est
intéressant de souligner que cette donnée correspond à celle du Barreau du Québec. Seulement
deux participants sur quinze étaient intéressés par le produit parce qu’ils se considéraient à risque.
Les treize autres répondants jugeaient que l’assurance juridique ne leur était pas nécessaire pour
les six raisons suivantes : 1) ils ne sentent pas le besoin de s’assurer parce qu’ils ne se considèrent
pas à risque, 2) ils ne se sentent pas ciblés par le produit, 3) ils se méfient des compagnies
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
49
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
d’assurances, 4) ils estiment que l’assurance juridique est un produit de luxe ou 5) ils connaissent
personnellement un avocat.
En outre, le tiers de nos interlocuteurs estiment que l’assurance juridique est un bon produit. Ils
considèrent que c’est abordable, sécurisant et utile pour résoudre des problèmes de la vie
courante. En revanche, les autres répondants jugent l’assurance juridique inutile car elle possède
trop d’exclusions, elle ne couvre qu’une partie des frais, elle est seulement profitable pour les
catégories de personnes à risque, elle n’est pas conçue pour les personnes à faible revenu et les
domaines couverts sont trop spécifiques.
Par surcroît, quatre personnes sur quinze avaient eu recours au système juridique dans le passé
pour les raisons suivantes : éviction d’un locataire par le propriétaire, divorce, décès, vente d’un
immeuble à logements, fausse représentation d’un produit par un vendeur et autres. En somme,
nous avons pu constater qu’un certain nombre de ces acteurs étaient moins soucieux des
difficultés financières et émotionnelles que peut représenter un litige. De plus, comparativement
aux participants ayant contracté l’assurance juridique, nous avons observé que plusieurs de ces
répondants ne ressentent pas le besoin de se sentir en sécurité face aux risques. Sur ce point,
certains nous ont répondu que, puisqu’ils ne se sentaient pas visés par l’assurance juridique et
qu’ils ne se considéraient pas à risque, ils préfèrent simplement subirent les conséquences s’ils
doivent vivre un événement fâcheux.
3.5
La lisibilité des contrats d’assurance juridique
Afin de comprendre davantage ce qu’offre le produit « assurance juridique », nous avons fait
l’analyse de contrats provenant de cinq compagnies d’assurance : Aviva Traders, La Capitale
Assurances générales, Échelon, La Fédération et ING assurance. Pour ce faire nous avons porté
une attention particulière envers le langage juridique employé ainsi que la clarté du contrat, du
vocabulaire, des structures de phrases, des clauses et des exclusions. De plus, nous avons
demandé aux trente participants quelles étaient leurs impressions du contrat qu’ils avaient lu afin
de savoir si celui-ci était lisible et si des éléments leur semblaient obscurs.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
3.5.1 La terminologie juridique
Tout d’abord en ce qui a trait à la terminologie juridique, les compagnies emploient des termes
trop spécialisés et techniques ce qui rend la compréhension du contrat hermétique pour les
consommateurs. Par exemple, nous avons repéré dans des contrats les mots « porte-fort »,
« homologation » et « trop-perçu ». Ces mots connus du jargon juridique ne sont pas communs au
langage populaire. C’est également le cas pour des termes tels que « cessionnaire de droit » et
« offre de règlement ». Les contrats d’assurance contiennent des définitions pour les termes
primaires tels qu’ « assureur », « assuré », « acte de consommation », « honoraires et frais
juridiques », « litige » et « plafond de garantie ». Toutefois, ils ne contiennent pas de lexique
pour faciliter la compréhension du vocabulaire et des termes juridiques.
3.5.2 La longueur des clauses et les références
Nous considérons que certaines clauses sont formulées de façon beaucoup trop longue, surtout
lorsqu’elles demandent au lecteur de se référer à d’autres sections du contrat. Ceci alourdit
énormément la lecture. Par exemple, voici une clause d’un contrat où le lecteur doit se référer à
cinq autres sections pour comprendre le sens de celle-ci : « La garantie litige prévue à l’article 1.4
du présent contrat […] ni aux garanties prévues aux articles 1.1, 1.2, 1.3 et 1.5 du présent
contrat ». Pourtant, si nous lisons la clause 1.4 de ce contrat, celle-ci se réfère à la définition d’un
litige. La phrase serait donc : « La garantie litige prévue au litige[…] ». Dans ce cas, pourquoi ne
pas écrire « Un litige est garanti […] ». Ces clauses qui se rapportent à d’autres sections donnent
réellement l’impression au lecteur de lire un casse-tête. Nous pouvons comprendre que plusieurs
lecteurs se découragent et mettent de côté leur contrat sans l’avoir lu correctement et sans l’avoir
compris.
De plus, quelques clauses se réfèrent à des articles du Code civil du Québec et du Code de
procédure civile de la province de Québec. Nous avons même vu une clause où seulement
l’acronyme du Code civil du Québec, le C.C.Q., était employé pour se rapporter à un article.
Rares sont les personnes qui connaissent le contenu de ces codes et encore plus rares sont ceux
qui peuvent reconnaître leur sigle. Le contrat est d’abord censé s’adresser aux consommateurs et
non à des juristes. Si les compagnies qui vendent des produits de consommation remettaient aux
consommateurs des instructions aussi complexes pour leurs produits, plusieurs personnes se
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
plaindraient de ne pas pouvoir utiliser leur bien parce qu’ils n’arrivent pas à comprendre les
instructions. Dans ce cas, pourquoi est-ce accepté que les assureurs remettent à leurs clients des
contrats qui leurs sont illisibles ? Nous comprenons que les assureurs emploient un vocabulaire
précis pour éviter toutes confusions et interprétations possibles de la part des spécialistes du droit
et de l’assurance. Par contre, cela augmente inévitablement le niveau de confusion et de méfiance
des consommateurs. Encore une fois, les assureurs pourraient ajouter à leur contrat un lexique ou
un document vulgarisé.
3.5.3 Des descriptions à en perdre son latin
Certaines clauses sont également difficiles à comprendre soit par leurs descriptions lourdes à lire
ou soit par leurs descriptions ambiguës. Par exemple, voici une description alourdie qui vise à
expliquer ce que signifie un recouvrement de débours juridiques : « Les débours juridiques
recouvrés de la partie adverse au titre des dépens doivent réduire d’autant la note de débours du
professionnel que vous avez choisi ». La définition d’un mandataire est également complexe à
lire : « On entend par mandataire l’assuré désigné par tous les assurés nommés à la police afin
d’envoyer et de recevoir l’avis de résiliation ». Dans les deux cas, il est évident qu’il y a un
moyen de simplifier ces phrases pour le lecteur. L’assuré ne devrait pas devoir lire à plusieurs
reprises les mêmes phrases pour les comprendre.
En revanche voici la description d’une clause que nous considérons ambiguë : « Tout litige
concernant les conflits individuels de travail de l’Assuré en sa qualité de salarié ou d’employeur à
l’exception de ceux qui résultent d’activités syndicales ou professionnelles ». Dans ce cas, un
travailleur autonome contractuel est-il perçu comme un salarié ? Ceci peut porter à confusion. De
plus, si l’assuré est en conflit avec son syndicat ou s’il considère que ce dernier ne le représente
pas correctement, celui-ci sera désavantagé. Par ailleurs, l’assuré doit avertir l’assureur dès
l’origine du litige, soit au moment où « l'assuré acquiert la connaissance du litige ». Ce type de
clause est très subjectif. Comment un assuré peut-il prouver le moment précis où il a pris
connaissance qu’il devait entamer des procédures judiciaires ? Cette clause n’est également pas
claire et subjective : « Est exclu tout litige qui, lors de la déclaration de sinistre en vertu des
présentes, fut déjà confié par l’assuré à un professionnel, sauf les cas d’urgence… ». Dans ce cas,
que considère-t-on par « les cas d’urgence » ?
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
3.5.4 Les inclusions versus les exclusions
Comme nous l’avons déjà mentionné, la majorité de nos participants considèrent que les contrats
d’assurance juridique comportent de nombreuses exclusions. En moyenne, les contrats
contiennent entre 18 et 20 exclusions pour cinq à sept domaines de litiges couverts. Il devient
complexe pour le lecteur de faire une mise au point afin de saisir quels litiges sont réellement
couverts par l’assureur et quels litiges ne le sont pas. L’événement de l’assuré doit précisément
entrer dans une case spécifique. Certaines compagnies d’assurances ont même ajouté cette clause
à leur contrat : « Qui n’est pas expressément garanti ou qui est exclu par avenant de ce contrat ».
Bref, il y a d’autres exclusions possibles. L’assureur se donne ainsi une grande marge de
manœuvre pour accepter de couvrir un événement ou de le refuser.
En outre, une clause peut parfois donner l’impression d’en annuler une autre. Par exemple, un
litige est exclu lorsqu’il oppose l’assuré à son assureur. Il est compréhensible que ce type
d’événement peut causer un conflit d’intérêt pour l’assureur. Par contre, cette clause peut entrer
en contradiction avec celle-ci concernant le domaine du travail : « Tout litige concernant vos
difficultés à faire valoir vos droits en vertu de régimes publics ou privés visant à remplacer votre
revenu ». Donc, si l’assuré est souscrit par son employeur à un régime d’assurance salaire avec la
même compagnie d’assurances et qu’il doit contester cette dernière, il ne sera pas couvert par
l’assurance juridique.
En plus, les contrats sont écrits dans un caractère très petit, ce qui ne facilite pas la tâche.
Finalement, déchiffrer un contrat d’assurance juridique peut être une tellement complexe, qu’un
de nos participants a évoqué en rigolant qu’il aurait besoin de l’assistance juridique pour
comprendre son contrat d’assurance juridique.
3.5.5 Les commentaires des participants concernant la lisibilité des contrats
Nous avons remis un contrat d’assurance juridique aux quinze participants n’ayant pas contracté
une police d’assurance juridique afin de pouvoir obtenir leurs impressions sur celui-ci. Ainsi,
chacun de nos trente interlocuteurs avaient en leur possession un contrat au moment de
l’entrevue.
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
Lorsque nous avons demandé aux 30 répondants s’ils considéraient le contrat lisible, 17 ont
répondu qu’il n’était pas clair. Sur ces 17 personnes, trois nous ont avoué ne pas avoir pris le
temps de le lire entièrement. Douze répondants estimaient que le contrat était lisible, dont trois
qui se considéraient familiers au vocabulaire juridique. Toutefois, six de ces douze personnes
nous ont également avoué ne pas avoir réellement lu le contrat. Ainsi, nous pouvons dire que plus
de la moitié des participants éprouvaient de la difficulté à comprendre le contrat, et pratiquement
le tiers des participants ne l’ont pas véritablement lu.
La plupart des participants jugent les aspects primaires du contrat précis tels le montant de la
prime, le plafond de garantie et les domaines couverts. Par contre, ce qu’ils évaluent plus difficile
à comprendre sont les exclusions, les explications, les définitions, la terminologie juridique, la
formulation des phrases, le vocabulaire spécialisé et, pour certains, la schématisation des
honoraires défrayés. En raison de ces éléments, ils estiment que le contrat est trop abstrait et
ennuyant à lire. Ceci fait en sorte que plusieurs consommateurs ne lisent pas leur contrat. Ils se
disent qu’ils s’informeront en temps et lieu si un événement fâcheux survient. Toutefois, c’est à
ce moment-là que plusieurs d’entre eux réalisent pour la première fois qu’ils ne sont pas couverts
à cent pour cent et que leur litige peut être considéré comme une exclusion, ce qui entraîne de
nombreuses frustrations envers l’assureur. Ainsi, plusieurs consommateurs se fient seulement à la
réputation de l’assureur lorsqu’ils contractent une assurance et ne se soucient pas de lire leur
contrat. Ces frustrations envers les assureurs ont été dégagées dans le discours de plusieurs
répondants. Ceux-ci ne font plus confiance aux compagnies d’assurances et soutiennent que si les
contrats sont si complexes à lire, c’est parce que les assureurs veulent se garder une marge de
manœuvre pour ne pas les protéger.
En conclusion, l’assurance juridique ne s’adresse pas à tous les citoyens. En général, les
consommateurs contractent une police d’assurance juridique lorsqu’ils se considèrent
véritablement à risque. L’assurance juridique est ainsi perçue comme un outil qui les sécurise
face aux risques qu’ils courent. En ce qui a trait à l’assistance juridique, ils estiment que celle-ci
facilite l’accès à l’information, ce qui permet de connaître rapidement leurs droits. Ce qu’ils
trouvent rassurant est le fait qu’en cas d’un événement, ils savent immédiatement où se tourner
pour obtenir les conseils d’un avocat. De plus, ils n’ont pas à se soucier des coûts d’une
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
consultation pour poser une simple question à un avocat. Ils considèrent donc indispensable la
sécurité que l’assurance juridique leur apporte. En revanche, plusieurs sont insatisfaits de ce
qu’offre concrètement le produit. Ils estiment que la couverture de 5 000 dollars par litige et les
domaines couverts sont limités. La moitié des personnes assurées qui ont participé à notre étude
souhaiteraient payer davantage pour une meilleure couverture. En outre, les exclusions étant très
nombreuses, les participants n’étaient pas certains de saisir parfaitement ce que l’assurance
juridique offre. Certains vont même confondre des concepts de base telles l’assurance juridique et
l’assistance juridique. Comme un grand nombre d’assurés se découragent à lire leur contrat
d’assurance, ces exclusions peuvent créer de nombreuses frustrations. L’assuré qui lit son contrat
pour la première fois lorsqu’un événement survient, réalise trop tard qu’il n’est pas entièrement
couvert. Plusieurs estiment d’ailleurs que les contrats d’assurance juridique sont illisibles. Les
assureurs ne s’adressent pas à eux dans un langage qui leur est familier. Il y a donc un très grand
travail à faire de la part des assureurs pour améliorer la lisibilité des contrats et pour vulgariser
l’information concernant le produit.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
55
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
CONCLUSION
L’assurance juridique est un produit qui n’est pas perçu nécessaire par un grand nombre de
citoyens. Avant de se procurer de l’assurance juridique, la majorité des personnes vont penser
à se procurer une assurance habitation, une assurance médicale et une assurance vie. Un bon
nombre d’individus ne possèdent toujours pas d’assurance habitation. Il est évident que s’ils
pensent à contracter une police d’assurance, ils vont dans un premier temps chercher à
protéger leurs biens. Obtenir une protection juridique est donc le moindre de leurs soucis. De
plus, de nombreux individus ne considèrent pas courir un grand risque d’être impliqués dans
une poursuite judiciaire. Ils estiment être des citoyens responsables qui suivent les normes.
Par conséquent, ils ne se sont pas intéressés à contracter une police d’assurance juridique.
D’autre part, l’assurance juridique intéresse les personnes qui se considèrent exposées aux
risques. Ainsi, l’assurance juridique comble seulement le besoin d’un groupe de personnes
précis. C’est donc véritablement un produit ciblé. Cette limite fait en sorte que l’assurance
juridique ne peut pas être perçue comme une véritable solution au manque d’accessibilité à la
justice.
De plus, le produit ne couvre pas tous les domaines du droit et possède de nombreuses
exclusions. Toutefois, l’assurance juridique peut être considérée comme un outil qui favorise
l’accès à la justice et qui sécurise les citoyens exposés aux risques. Par exemple, plusieurs
personnes vivent un jour ou l’autre un problème relié au domaine de la consommation, telle
une fausse représentation d’un vendeur à l’achat d’une voiture d’occasion. Par l’entremise de
son service juridique, Option consommateurs constate régulièrement que, face à de telles
situations, certains consommateurs se découragent après quelques démarches, ayant
l’impression de se battre inutilement. Finalement, ils décident de ne pas entamer de
procédures judiciaires. L’assurance juridique peut soutenir ce type de litige et ainsi permettre
à ces personnes, qui sinon ne l’auraient pas fait, de faire valoir leurs droits.
Par ailleurs, pour faciliter l’accessibilité à la justice, il est primordial de favoriser l’accès à
l’information. Faire valoir ses droits n’est pas seulement une question d’argent, il faut
également permettre aux citoyens de se documenter afin de comprendre le langage juridique
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
56
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
et de connaître les procédures du système juridique. Puisque de nombreuses personnes se
représentent seules en cour faute de moyens financiers pour engager un avocat, il est essentiel
de leurs donner des outils nécessaires pour les soutenir dans leurs démarches. C’est également
le cas pour ceux qui décident de se défendre à la cour des petites créances. L’accès à
l’information est indispensable pour aider les citoyens à affronter des problèmes de la vie
courante, comme un divorce, une succession, une faillite, une éviction, une perte d’emploi,
une discrimination et autres. L’assistance juridique est alors un excellent moyen pour rendre
l’information accessible. Selon nous, il est donc essentiel que ce service soit gratuit,
accessible à tous, illimité et qu’il couvre tous les domaines du droit. Pour ce faire, nous
croyons qu’il serait favorable qu’un groupe de travail soit mis sur pied. Celui-ci pourrait être
composé de représentants des ministères de la justice de certaines provinces canadiennes et du
ministère de la Justice du Canada, de représentants du secteur financier, de consommateurs,
d’ombudsman bancaire canadien et autres.
Malgré le fait que plusieurs compagnies d’assurances offrent désormais l’assistance juridique
à leurs clients, la plupart des assurés ne savent pas qu’ils y ont accès. Lorsqu’une nouvelle
police d’assurance est contractée, les compagnies offrant l’assistance juridique devraient
toujours informer leurs clients des avantages de ce service. Elles devraient également par
éthique mentionner aux personnes intéressées à contracter l’assurance juridique s’ils ont déjà
accès à ce service via d’autres polices d’assurance déjà souscrites afin d’éviter toute
confusion.
Sur ce point, nous avons constaté qu’il existe un manque flagrant de communication entre les
assurés et les assureurs. Lorsqu’un client décide de contracter l’assurance juridique, l’assureur
devrait toujours informer celui-ci sur la couverture du produit, les domaines de litige garanti,
les types d’exclusion et autres. Il est important que l’assureur prenne le temps d’éclairer le
plus possible le client à ce sujet afin d’éviter toutes surprises fâcheuses. De plus, plusieurs
personnes estiment que les contrats d’assurance juridique sont illisibles. Découragés, les
assurés concluent qu’ils s’informeront lorsqu’un événement surviendra. N’ayant pas été
proprement informés sur le produit, ils réalisent trop tard que le contrat comporte de
nombreuses exclusions, ce qui engendre des frustrations de la part des assurés. Malgré le fait
que les contrats s’adressent aux consommateurs, ceux-ci sont manifestement rédigés dans un
langage spécialisé difficile à comprendre pour la majorité des assurés. Nous comprenons
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
57
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
parfaitement que les assureurs qui émettent des contrats se réfèrent à une terminologie
juridique afin d’éviter toute confusion de la part des spécialistes du droit et de l’assurance.
Toutefois, les assurés expriment le besoin d’être mieux informés face à leur police
d’assurance. Il serait donc important qu’un guide d’interprétation soit remis avec le contrat.
Une note pourrait indiquer sur ce dernier qu’il n’est qu’un élément de vulgarisation et que la
seule référence valable en cas d’événement est le contrat.
Tout compte fait, l’assurance juridique peut être considérée comme un coussin financier très
utile pour régler des événements fâcheux de la vie courante. Toutefois, en raison des limites
du produit, (ne s’adresse pas à tous les citoyens, domaines de litige couverts restreints,
nombreuses exclusions et plafond de garantie limité), il ne faut pas considérer ce dernier
comme une véritable solution au manque d’accessibilité à la justice, mais comme un outil
abordable qui favorise celle-ci et qui sécurise les citoyens exposés aux risques. En outre, le
manque d’accessibilité à la justice est un problème sérieux qu’il ne faut pas négliger. Si de
plus en plus d’individus sont obligés de se représenter seuls en cour faute de moyens
financiers, il faut trouver un moyen de les soutenir afin de faciliter leurs démarches. Selon
nous, il est donc indispensable de favoriser l’accès à l’information.
En somme, cette recherche nous a permis de prendre connaissance de l’existence d’un produit
qui pourrait potentiellement favoriser l’accès à la justice pour les consommateurs canadiens.
Cependant, comme le produit est relativement récent sur le marché canadien et que très peu
d’individus l’ont contracté, nous considérons qu’il est difficile d’évaluer son impact sur
l’accessibilité à la justice. Afin de mieux cerner cet impact, il serait intéressant dans une
recherche future d’approfondir davantage le niveau d’accessibilité à la justice dans les autres
pays où le produit est plus populaire. Par exemple, il serait essentiel d’observer les effets de
l’assurance juridique sur les délais d’attente. Il serait également important d’examiner les
autres volets de l’accès à la justice dans ces pays et de voir beaucoup plus en profondeur
l’encadrement légal et réglementaire de l’assurance juridique ainsi que l’étendue des
couvertures et des plafonds garantis de remboursement et les répercussions sur les primes.
Pour le moment, nous n’avons pas obtenu suffisamment de données pour conclure sur les
répercussions de l’assurance juridique sur la justice dans différents pays européens.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
58
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
RECOMMANDATIONS
À la suite à cette étude, Option consommateurs émet les six recommandations suivantes :
Recommandation I
-
Les assureurs devraient remettre aux assurés un contrat rédigé dans un langage
lisible. Pour ce faire, ils pourraient remettre avec celui-ci un guide d’interprétation
et un lexique rédigé dans un langage clair et concis. À l’intérieur de ce guide, ils
devraient s’abstenir d’utiliser un jargon juridique, employer des mots courants et
éviter des formulations imprécises et des structures de phrase trop lourde. Ils
pourraient
également
ajouter
des
exemples
concrets
pour
faciliter
la
compréhension des domaines couverts et des exclusions.
Recommandation II
-
Les assureurs devraient informer le plus clairement possible les assurés sur ce que
le produit peut offrir. Par exemple, la différence entre assistance juridique et
assurance juridique peut paraître claire pour les représentants de compagnies
d’assurances, ce qui n’est pas toujours le cas pour les assurés. Lorsqu’une
personne contracte l’assurance juridique, l’assureur devrait préciser les domaines
couverts, les types d’exclusions, le plafond de garantie, les honoraires couverts et
autres. L’assuré devrait également être informé s’il a déjà accès à un service
d’assistance juridique via ses autres contrats d’assurance. Cette procédure va
permettre d’améliorer la relation entre les assureurs et les assurés et éviter toutes
formes de confusion et de frustration.
Recommandation III
-
Les assureurs devraient modifier les termes « assurance juridique » et « assistance
juridique » afin d’éviter que le public ne les confonde. Un grand nombre de
personnes qui souhaitaient participer à notre étude ne saisissaient pas la différence
entre les deux termes. Ils croyaient détenir une assurance juridique lorsque, en
réalité, ils avaient seulement accès à un service d’assistance juridique.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
59
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
Recommandation IV
-
L’assurance juridique ne devrait pas être incluse « gratuitement » avec l’assurance
habitation ou d’autres produits d’assurance. Nous considérons cette pratique
comme étant une vente déguisée où l’assuré contracte l’assurance juridique sans
son consentement. En Grande-Bretagne et en France, nombreux sont les assurés
qui ignorent posséder une protection juridique étant donné que celle-ci est incluse
à d’autres produits d’assurance. Cette méthode de vente pourrait avoir le même
impact au Canada.
Recommandation V
-
Afin de favoriser l’accessibilité à la justice, il faut encourager le développement
de l’accès à l’information via, par exemple, l’assistance juridique. Ceci permettra
aux citoyens de faire valoir plus facilement leurs droits et de les familiariser aux
procédures et au langage du système juridique. Pour ce faire, il serait favorable
qu’un groupe de travail soit mis sur pied. Celui-ci pourrait être composé de
représentants des ministères de la justice de certaines provinces canadiennes et du
ministère de la Justice du Canada, de représentants du secteur financier, de
consommateurs, d’ombudsman bancaire canadien et autres. Sachant que
l’assistance juridique permet de résoudre un bon nombre de problèmes, il est
essentiel que celle-ci soit gratuite, illimitée, accessible à tous et qu’elle couvre tous
les domaines du droit.
Recommandation VI
-
Afin de favoriser l’accessibilité à la justice, il faut encourager et faire connaître
aux citoyens d’autres méthodes de règlements, comme la médiation et la
conciliation. Ceci va permettre de diminuer les délais à la cour, la longueur des
procès ainsi que les coûts du système juridique.
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
60
L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
LES SOURCES DOCUMENTAIRES
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Économie. Le Figaro, n. 19334, 30 septembre 2006, p. 29.
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Boucher, P. (mars 2005). Assurance juridique : Étude de marché. Barreau du Québec,
Montréal : 40 pages.
Bouquin, J.-P. (avril 2004). L’assurance de protection juridique des particuliers. Paris :
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Fédération française des sociétés d’assurances (mai 2004). Assurance de protection
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Gagnon, P. (octobre 2003). Justice pour tous… et pour que tous aient accès à la justice. Le
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Jarry, M. (novembre 2005). Une petite histoire de l’aide juridique. Commission des services
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Justice Québec (octobre 2006). L’augmentation des seuils d’admissibilité à l’aide juridique :
Un grand pas pour l’accès à la justice au Québec. Communiqué. Ministère de la Justice du
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Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
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seuils d’admissibilité financière à l’aide juridique pour l’année 2007. Québec : Ministère de la
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Lessard-Hébert et al. (1990). Recherche qualitative : fondements et pratiques. Éditions agence
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SOURCE FILMIQUE
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Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
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Site consulté en novembre 2006 à l’adresse : www.axa.ca
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Site consulté en décembre 2006 à l’adresse : www.assurancejuridique.ca
Bolt, Roger (October 2006). No-win, No-fee Actions. Legal Services Commission (LSC).
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Site consulté en janvier 2007 à l’adresse : www.cnt.gouv.qc.ca/fr
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Site consulté en novembre 2006 à l’adresse : www.educaloi.qc.ca
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Gélinas, M. L’assurance des frais juridiques – une protection contre les « accidents
juridiques ». Le réseau juridique du Québec.
Site consulté en décembre 2006 à l’adresse : www.avocat.qc.ca/public/iiassjur.htm
ING Assurance. Le Conseiller juridique : Votre bouclier contre les tracasseries.
Site consulté en novembre 2006 à l’adresse : www.ingassurance.ca
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Document consulté en décembre 2006 à l’adresse : www.juridques.com/apj.htm
Legal Services Society. What is legal laid?
Site consulté en mars 2007 à l’adresse :
www.lss.bc.cd/legal_doc/financial_guidelines_advice.asp
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
Presse Canadienne (Toronto). La juge en chef de la Cour suprême se plaint de délais dans
Cyberpresse, 9 mars 2007, Montréal.
Article consulté en mars 2007 à l’adresse : www.cyberpresse.ca
Sénat. Proposition de loi relative aux contrats d’assurance de protection juridique. Rapport
législatif. Rapport consulté en février 2007 à l’adresse : www.senat.fr
Statistique Canada. Statistique sur l’aide juridique (demandes approuvées, demandes et
avocats salariés offrant des services).
Statistiques consultées en janvier 2007 à l’adresse : www.statcan.ca
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
ANNEXE I
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
QUESTIONNAIRE UTILISÉ LORS
DES ENTREVUES SEMI-DIRIGÉES
LES PARTICIPANTS AYANT CONTRACTÉ UNE POLICE D’ASSURANCE
JURIDIQUE
1- COMPAGNIES D’ASSURANCES & ASSURANCE JURIDIQUE
Questions à réponse précise :
● Avec quelle compagnie possédez-vous une assurance juridique ? Depuis
quand ?
● Pourquoi avez-vous choisi cette dernière ?
● Quel est le montant de votre prime ?
● Avez-vous magasiné votre police auprès de différentes compagnies d’assurances qui
offrent le produit d’assurance juridique avant d’arrêter votre choix?
● Possédez-vous d’autres formes d’assurance et avec quelle compagnie ?
● Dans quel contexte avez-vous entendu parler de l’assurance juridique pour la première
fois ?
● Pourquoi avez-vous décidé de souscrire une police d’assurance juridique ?
Questions à réponse ouverte :
● Que pensez-vous de l’assurance juridique ? Quels sont les avantages et les
inconvénients de l’assurance juridique ?
● En quoi considérez-vous cette dernière essentielle ?
● Croyez-vous que le gouvernement devrait rendre l’assurance juridique obligatoire
comme l’assurance automobile ?
● Avez-vous vécu une ou des situations où vous avez eu recours à votre service de
protection d’assurance juridique ? Si oui, que pensez-vous de cette expérience ?
● Quelles sont vos réactions face au service que vous avez reçu par votre compagnie
d’assurances ?
● Avant de contracter une police d’assurance juridique, avez-vous déjà eu recours au
système juridique (ex. avez-vous eu recours à un avocat) ?
● Quelles sont vos impressions du système juridique au Québec en ce qui a trait à
l’accessibilité à la justice ?
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
2- CONTRAT D’ASSURANCE JURIDIQUE
Questions à réponse ouverte :
● Comment avez-vous perçu votre contrat d’assurance juridique lorsque vous l’avez lu
pour la première fois ?
● Que pensez-vous de votre contrat d’assurance juridique ?
Questions à réponse précise :
● Est-ce que vous êtes satisfait de votre contrat et pourquoi ?
● Est-ce que vous y voyez des lacunes ?
● Selon vous, quels protections et services vous procurent votre contrat d’assurance ?
● La description de la police d’assurance est-elle claire ?
● Existe-t-il des éléments ou des concepts qui vous semblent obscurs dans votre contrat ?
● Quel est le plafond financier offert par votre compagnie ?
● Considérez-vous que les primes de votre police d’assurance juridique sont abordables ?
● Seriez-vous prêt à débourser plus cher pour obtenir une plus grande protection et un
plafond financier plus élevé ?
● Quelle différence faites-vous entre les termes assurance juridique, assistance juridique
et aide juridique ?
3- IDENTIFICATION DES ACTEURS
Homme
Femme
Pour terminer, j’aimerais maintenant vous demander des renseignements qui nous aideront à
classer vos réponses afin de les comparer avec celles des autres participants.
● Quel est votre groupe d’âge ?
18-24 ans
25-29 ans
30-39 ans
40-49 ans
50-59 ans
60-69 ans
70 ans et plus
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
● Quel est votre niveau de scolarité et combien d’années d’étude avez-vous
complétées ?
Secondaire
DEP
DEC
Universitaire – mineur ou majeur
Universitaire – baccalauréat
Universitaire – maîtrise
Universitaire – doctorat
7 ans et moins
8 à 11 ans
12 à 15 ans
16 ans
● Quel est votre emploi présent ?
Professionnel
Semi-professionnel
Administrateur, gestionnaire et/ou propriétaire d’une grande entreprise
Administrateur, gestionnaire et/ou propriétaire d’une petite entreprise (gérant,
superviseur, etc.)
Employé de bureau, service, préposé, vendeur, etc.
Ouvrier de métier spécialisé
Ouvrier non spécialisé
Travailleur autonome, pigiste
Étudiant
Autre____________________________________
● Quel est votre domaine d’emploi ?
Communication
Construction
Domaine de la santé
Enseignement
Informatique
Marketing
Publicité
Vente
Autre___________________________________
● Pour la dernière année, dans quelle catégorie se situe votre revenu brut, avant
impôt et déductions ?
Moins de 20 000 $
De 20 000 à 29 999 $
De 30 000 à 39 999 $
De 40 000 à 49 999 $
De 50 000 à 59 999 $
De 60 000 à 69 999 $
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
De 70 000 à 79 999 $
80 000 et plus
Aucun
Refus
● Pour la dernière année, dans quelle catégorie se situe votre revenu familial avant
impôt et déductions ?
Moins de 20 000 $
De 30 000 à 39 999$
De 40 000 à 49 999 $
De 50 000 à 59 999 $
De 60 000 à 69 999 $
De 70 000 à 79 999 $
De 80 000 et plus
Aucun
Refus
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
QUESTIONNAIRE REMIS AUX PARTICIPANTS N’AYANT PAS SOUSCRIT UNE
POLICE D’ASSURANCE JURIDIQUE
1- ASSURANCE JURIDIQUE
● Possédez-vous une forme d’assurance protection ?
Oui
Non
● Si oui, laquelle ?
Habitation
Voiture
Vie
Santé / médicament / dentaire
● Et avec quelle compagnie ?
● Savez-vous ce qu’est l’assurance juridique ? Si oui, où et dans quel contexte avezvous entendu parlé de ce produit pour la première fois ?
Question à réponse précise :
● Selon vous, qu’est-ce que l’assurance juridique ?
● Pourquoi avez-vous décidé de ne pas vous souscrire cette police d’assurance ?
● Quelle est la différence entre les termes « assistance juridique », « assurance
juridique » et « assistance juridique » ?
Question à réponse ouverte :
● Quelles sont vos perceptions face à l’assurance juridique ?
● Selon vous, quels sont les avantages et les inconvénients de l’assurance juridique et
qu’en pensez-vous ?
2- CONTRAT D’ASSURANCE JURIDIQUE
Nous avons fait lire aux participants un contrat d’assurance juridique afin d’obtenir leurs
commentaires sur ce dernier et les familiariser à notre sujet d’étude.
Questions à réponse ouverte :
● Quelles sont vos impressions face à ce contrat ?
● Que pensez-vous de cette police d’assurance ?
● Que pensez-vous des protections offertes par cette police ?
Questions à réponse précise :
● La description de la police d’assurance est-elle claire ?
● Existe-t-il des éléments ou des concepts qui vous semblent obscurs dans ce contrat ?
Rapport d’Option consommateurs – mars 2007
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
● Selon vous, quels protections et services vous procurent ce contrat d’assurance ?
● Est-ce que vous y voyez des lacunes ?
● Quel est le plafond par événement offert par cette compagnie ?
● Considérez-vous cette police d’assurance juridique abordable ?
3- SYSTÈME JURIDIQUE
Questions à réponse ouverte :
● Quelles sont vos impressions du système juridique au Québec ?
● Avez-vous déjà vécu des expériences reliées au système juridique (ex. avez-vous eu
recours à un avocat) ? Si oui, que ressentez-vous face à ces dernières ?
4- IDENTIFICATION
Homme
Femme
● Quel est votre groupe d’âge ?
18-24 ans
25-29 ans
30-39 ans
40-49 ans
50-59 ans
60-69 ans
70 ans et plus
● Quel est votre niveau de scolarité et combien d’années d’études avez-vous
complétées ?
Secondaire
DEP
DEC
Universitaire – mineur ou majeur
Universitaire – baccalauréat
Universitaire – maîtrise
Universitaire – doctorat
● Quel est votre emploi présent ?
Professionnel
Semi-professionnel
Administrateur, gestionnaire et/ou propriétaire d’une grande entreprise
Administrateur, gestionnaire et/ou propriétaire d’une petite entreprise (gérant,
superviseur, etc.)
Employé de bureau, service, préposé, vendeur, etc.
Ouvrier de métier spécialisé
Ouvrier non spécialisé
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
Travailleur autonome, pigiste
Étudiant
Autre_____________________________________
● Quel est votre domaine d’emploi ?
Communication
Construction
Domaine de la santé
Enseignement
Informatique
Marketing
Publicité
Vente
Autre___________________________________
● Pour la dernière année, dans quelle catégorie se situe votre revenu brut, avant
impôt et déductions ?
Moins de 20 000 $
De 20 000 à 29 999 $
De 30 000 à 39 999 $
De 40 000 à 49 999 $
De 50 000 à 59 999 $
De 60 000 à 69 999 $
De 70 000 à 79 999 $
80 000 et plus
Aucun
Refus
● Pour la dernière année, dans quelle catégorie se situe votre revenu familial avant
impôt et déductions ?
Moins de 20 000 $
De 30 000 à 39 999$
De 40 000 à 49 999 $
De 50 000 à 59 999 $
De 60 000 à 69 999 $
De 70 000 à 79 999 $
De 80 000 et plus
Aucun
Refus
● Etes vous locataire ou propriétaire ?
Locataire
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Propriétaire
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
ANNEXE II
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
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L’assurance juridique : une solution pour une meilleure accessibilité à la justice ?
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ANNEXE III
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