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24>26 novembre 2016 LILLE GRAND PALAIS ONCOLOGIE - BIEN-ÊTRE ANIMAL PROGRAMME GÉNÉRAL Optimiser la prise en charge des tumeurs du foie chez le Chien et le Chat Suspecter une tumeur hépatique : quelques indices cliniques et biologiques à ne pas négliger Franck FLOCH DV, CEAV Médecine Interne - Ancien Résident ECVIM-CA (Oncology) - ONCOVET, Clinique Vétérinaire de Référés Avenue Paul Langevin - 59650 VILLENEUVE D’ASCQ Introduction Les tumeurs hépatiques primitives sont peu fréquentes en médecine vétérinaire. Elles représentent moins de 1,5 % de l’ensemble des tumeurs dans l’espèce canine, et de 1 % à 2,9 % de l’ensemble des tumeurs dans l’espèce féline. Les tumeurs hépatiques primitives malignes sont plus fréquentes chez le chien, tandis que les tumeurs hépatiques primitives bénignes sont plus fréquemment rencontrées chez le chat. Chez le chien, les métastases hépatiques sont 2,5 fois plus fréquentes que les tumeurs hépatiques primitives, et proviennent principalement de tumeurs spléniques, pancréatiques, ou gastro-intestinales primitives. A l’inverse, chez le chat, les tumeurs hépatiques primitives prédominent par rapport aux métastases hépatiques. Le parenchyme hépatique peut également être le siège d’une infiltration tumorale plus diffuse lors de tumeur maligne, telle qu’une mastocytose systémique, un sarcome histiocytaire disséminé, ou un lymphome. Les tumeurs hépatiques primitives sont en général classées en 4 grandes catégories, selon leur type histologique : les tumeurs hépatocellulaires ; les tumeurs des voies biliaires ; les tumeurs mésenchymateuses ; et les tumeurs neuroendocrines (« carcinoïdes »). Ces différents types tumoraux peuvent se présenter sous 3 formes morphologiques distinctes : une forme massive, avec présence d’une tumeur unique et localisée dans un seul lobe hépatique ; une forme nodulaire, avec présence de multiples nodules multifocaux impliquant plusieurs lobes hépatiques ; et une forme diffuse, avec des nodules multifocaux ou coalescents envahissant l’ensemble des lobes hépatiques, ou avec un envahissement diffus du parenchyme hépatique. Les tumeurs hépatiques primitives sont en général rencontrées chez des animaux âgés de 10 à 12 ans en moyenne. Chez le chat, les tumeurs malignes se rencontrent chez des animaux de plus jeune âge. Il en est de même chez le chien lors de tumeur neuroendocrine, avec un âge moyen de 8 ans. Classification des tumeurs hépatiques primitives Les tumeurs hépatocellulaires Les tumeurs hépatocellulaires incluent les adénomes hépatocellulaires (ou hépatomes), les carcinomes hépatocellulaires (ou hépatocarcinomes), et les hépatoblastomes. Les hépatoblastomes sont des tumeurs extrêmement rares en médecine vétérinaire, ayant pour point de départ les cellules souches hépatiques. Les adénomes hépatocellulaires sont rarement à l’origine de signes cliniques, et sont le plus souvent de découverte fortuite. Parmi ces tumeurs hépatocellulaires, les adénomes sont plus volontiers rencontrés chez le chat, tandis que les carcinomes sont plus fréquents chez le chien. Aucun facteur favorisant ou déclenchant n’a à ce jour été clairement identifié dans le développement de ces tumeurs hépatocellulaires chez le chien (par opposition à l’homme, chez qui les hépatites B et C, et la cirrhose sont des facteurs incriminés). Les carcinomes hépatocellulaires sont les tumeurs hépatiques primitives les plus fréquemment observées chez le chien, représentant à elles seules près de 50 % de l’ensemble des tumeurs hépatiques primitives dans cette espèce. Les chiens de race Schnauzer miniature et les chiens mâles pourraient y être prédisposés selon certaines études. D’un point de vue morphologique, 53 % à 83 % des carcinomes hépatocellulaires se présentent sous une forme massive, 16 % à 25 % sous une forme nodulaire, et jusqu’à 19 % sous une forme diffuse. Les lobes hépatiques gauches sont plus volontiers impliqués lors de forme massive. Le potentiel métastatique de ces tumeurs varie selon la forme morphologique, de 0 % à 37 % des cas pour les formes massives, et de 93 % à 100 % des cas pour les formes nodulaires et diffuses. Les principaux sites métastatiques concernés sont les nœuds lymphatiques locorégionaux, le péritoine, et le parenchyme 1 pulmonaire, mais d’autres sites peuvent être occasionnellement concernés (cœur, reins, surrénales, pancréas, intestins, rate et vessie). Chez le chat, les carcinomes hépatocellulaires arrivent en seconde position des tumeurs hépatiques malignes après les cholangiocarcinomes. Peu de données supplémentaires sont disponibles dans la littérature vétérinaire du fait de la rareté de ces cas. Les tumeurs des voies biliaires Les tumeurs des voies biliaires incluent les adénomes des voies biliaires et les carcinomes des voies biliaires (ou cholangiocarcinomes). L’implication des trématodes est suspectée dans le développement des cholangiocarcinomes chez le chien et le chat, de même que les cholangites chroniques chez le chat. En médecine humaine, sont impliqués les trématodes, les lithiases des voies biliaires, et les cholangites sclérosantes. Les adénomes des voies biliaires sont les tumeurs hépatiques primitives les plus fréquentes chez le chat, représentant plus de 50 % des tumeurs hépatiques dans cette espèce. Ils prennent fréquemment un aspect kystique et sont donc qualifiés de cystadénomes des voies biliaires. Les chats mâles pourraient y être prédisposés. Ces adénomes des voies biliaires entraînent en général l’apparition de signes cliniques dès lors que leur taille est suffisamment importante pour occasionner une compression des organes adjacents. Les formes massives et les formes nodulaires sont rencontrées dans des proportions égales. Les carcinomes des voies biliaires sont les tumeurs hépatiques primitives malignes les plus fréquentes chez le chat, et arrivant en seconde position chez le chien (après les carcinomes hépatocellulaires comme vu précédemment). Chez le chien, les femelles et la race Labrador Retriever pourraient y être prédisposées, tandis qu’aucune prédisposition de race ou de sexe n’a été identifiée chez le chat. Ces carcinomes des voies biliaires peuvent être de localisation intra-hépatique, extra-hépatique, 24>26 novembre 2016 LILLE GRAND PALAIS ou concerner la vésicule biliaire, même si cette dernière situation est rare chez nos animaux de compagnie : la localisation intra-hépatique prédomine chez le chien, tandis que les localisations intra- et extra-hépatiques sont retrouvées en proportions égales chez le chat. Des formes solides et kystiques peuvent être rencontrées, sans influence sur la prise en charge thérapeutique ou sur le pronostic. Chez le chien, les cholangiocarcinomes se présentent sous forme massive dans 37 % à 46 % des cas, sous forme nodulaire dans 0 % à 46 % des cas, et sous forme diffuse dans 17 % à 54 % des cas. Les carcinomes des voies biliaires présentent la plupart du temps une évolution clinique agressive, avec un potentiel métastatique élevé. Chez le chien, près de 56 % à 88 % des cas présenteront des métastases ganglionnaires ou pulmonaires, d’autres organes pouvant également être concernés (cœur, rate, surrénales, pancréas, reins, et moelle épinière). Chez le chat, des métastases intrapéritonéales avec carcinomatose associée peuvent être observées dans 67 % à 78 % des cas. Les tumeurs neuroendocrines Les tumeurs neuroendocrines hépatiques primitives sont rares en médecine vétérinaire. Le recours à l’immunohistochimie est le plus souvent nécessaire pour les différencier des carcinomes. Elles sont en général de localisation intra-hépatique, même si des cas occasionnels sont décrits au sein de la vésicule biliaire. Ces tumeurs sont rencontrées chez des chiens et chats de plus jeune âge par rapport aux autres tumeurs hépatiques primitives. Les formes morphologiques massives sont peu décrites, tandis que les formes nodulaires (33 %) et diffues (67 %) prédominent. Ce sont des tumeurs extrêmement agressives sur le plan clinique, avec des métastases ganglionnaires, péritonéales et pulmonaires dans la grande majorité des cas (80-90 %) au moment du diagnostic. Les tumeurs mésenchymateuses Les tumeurs mésenchymateuses hépatiques primitives restent peu fréquentes dans l’ensemble chez le chien et le chat, et sont le plus souvent malignes. Elles sont principalement représentées par des hémangiosarcomes et des léiomyosarcomes, voire par des fibrosarcomes, des rhabdomyosarcomes, des liposarcomes, et des ostéosarcomes. Chez le chat, les hémangiosarcomes primitifs sont les plus fréquemment rencontrés. Chez le chien, il s’agit plutôt de léiomyosarcomes, dans la mesure où les hémangiosarcomes hépatiques sont le plus souvent des métastases dans cette espèce, et que les hémangiosarcomes hépa- tiques primitifs représentent seulement 4 % à 6 % de l’ensemble des hémangiosarcomes canins. Les tumeurs mésenchymateuses bénignes sont rares (quelques hémangiomes décrits). Enfin, des sarcomes histiocytaires peuvent être rencontrés chez le chien, mais il s’agit le plus souvent de formes disséminées ou multicentriques, avec atteinte concomitante des nœuds lymphatiques, de la rate, du parenchyme pulmonaire, et de la moelle osseuse. Aucune prédisposition de race ou de sexe n’a été décrite à ce jour. Les formes diffuses ne sont pas documentées, et les tumeurs mésenchymateuses se présentent majoritairement sous une forme massive (36 %) ou nodulaire (64 %) chez le chien. Les sarcomes hépatiques ont également un comportement clinique agressif, avec des métastases spléniques et pulmonaires rapportées dans 86 % à 100 % des cas chez le chien. Chez le chat, lors d’hémangiosarcome viscéral, des lésions multifocales sont observées dans 77 % des cas au moment du diagnostic (Tableau 1). Approche clinique des tumeurs hépatiques primitives Signes cliniques Les tumeurs hépatiques primitives sont associées à la présence de signes cliniques dans 50 % des cas chez le chat, et dans 75 % des cas chez le chien. La présence de symptômes est plus volontiers associée à l’évolution d’une tumeur maligne. Les signes cliniques sont le plus souvent généraux et non spécifiques : dysorexie ou anorexie, perte de poids, abattement ou léthargie, fièvre, vomissements ou diarrhée, et polyuro-polydipsie. Des troubles neurologiques (faiblesse, ataxie, crises convulsives, hypovigilance) peuvent être rapportés lors d’encéphalopathie hépatique, d’hypoglycémie paranéoplasique, ou de métastase cérébrale ou médullaire. Un ictère d’origine hépatique ou post-hépatique peut être rencontré, notamment lors de carcinome des voies biliaires extra-hépatiques ou de tumeur neuroendocrine de forme diffuse. Une distension abdominale peut être observée, secondairement à la pré ,1**22#6GXH $ ! QOFTP "&!'$ $ !%(!% OSFPR $% ''$ L '$! !$ $! OR ) " ) sence d’une tumeur hépatique volumineuse, d’une hépatomégalie diffuse, ou d’un épanchement abdominal. L’épanchement abdominal peut être d’origine multifactorielle lors de tumeur hépatique primitive : hémoabdomen lors de rupture de la masse hépatique (principalement un carcinome hépatocellulaire de forme massive ou un hémangiosarcome) ou de troubles de l’hémostase ; épanchement tumoral carcinomateux lors de carcinomatose péritonéale, principalement rencontrée lors de carcinome des voies biliaires chez le chat ; transsudat modifié lors d’hypertension portale associée ; et enfin, transsudat pur en cas d’hypoalbuminémie marquée. A noter que la seule présence d’un processus tumoral au sein de la cavité abdominale (incluant le parenchyme hépatique) peut induire la formation d’un transsudat modifié ou d’un exsudat non septique. Quoi qu’il en soit, ces signes cliniques sont rarement suffisants pour différencier l’évolution d’une affection hépatique tumorale (primitive ou métastatique) d’une hépatopathie d’une autre nature. Examen clinique L’examen clinique peut entre autres révéler un ictère, la palpation d’une hépatomégalie ou d’une masse au sein de l’abdomen crânial, ou encore une distension abdominale (cf. paragraphe précédent), avec éventuelle présence d’un signe du flot positif. Une masse hépatique peut être palpée dans près de 75 % des cas chez le chien et le chat lors de tumeur hépatique primitive. Néanmoins, la palpation abdominale peut se révéler tout à fait normale, notamment lorsqu’une hépatomégalie est absente en cas de tumeur de forme nodulaire ou diffuse, ou alors en raison de la localisation très crâniale du foie au sein de la cavité abdominale, sous le cercle de l’hypochondre. Syndromes paranéoplasiques Les syndromes paranéoplasiques associés aux tumeurs hépatiques primitives sont rares en médecine vétérinaire. Une hypoglycémie peut être observée chez le chien lors d’adénome ou de carcinome hépatocellulaire, d’hémangiosarcome, ou de tumeur musculaire lisse (léiomyome ou léio,1*+,4)#1GXH ,1*# 42GXH MRFNQ LFMU LFPR MSFQP OO RS RP " " L ) " Tableau 1 : Formes morphologiques des tumeurs hépatiques primitives chez le chien 2 24>26 novembre 2016 LILLE GRAND PALAIS myosarcome). Le développement de cette hypoglycémie n’est pas lié à une hyperinsulinémie, mais plutôt à une consommation accrue de glucose par la tumeur, à une diminution de la glycogénolyse ou de la néoglucogenèse hépatique, ou encore à la production d’IGF-1 ou d’IGF-2 par les cellules tumorales. En général, lors d’hypoglycémie paranéoplasique, la tumeur hépatique est volumineuse et peut donc être suspectée ou détectée facilement par examen clinique ou par imagerie médicale. Des cytopénies (anémie et/ou thrombopénie) sont fréquemment rapportées lors d’hémangiosarcome viscéral, de même que lors de lymphome ou de sarcome histiocytaire. Une alopécie paranéoplasique est décrite dans l’espèce féline en association avec des carcinomes des voies biliaires, voire avec des carcinomes hépatocellulaires. Il s’agit en général d’une alopécie d’apparition rapide, bilatérale et symétrique, non prurigineuse, avec atteinte préférentielle de la tête, du ventre, et de la face médiale des membres. Le poil est facilement retiré, pour laisser place à une peau lisse, brillante (probablement par perte de la couche cornée), et non fragilisée. Une atteinte concomitante des coussinets est fréquemment rapportée, occasionnant douleur et boiterie. Des signes cliniques généraux (abattement, perte de poids, anorexie, troubles digestifs) sont systématiquement associés à cette alopécie paranéoplasique féline du fait de l’agressivité de la tumeur hépatique primitive sous-jacente. La plupart des chats est alors euthanasiée dans un délai de 8 semaines à la suite du diagnostic. Enfin, un cas unique de carcinome des voies biliaires, avec suspicion de myasthenia gravis paranéoplasique associée, a été décrit chez le chien. Approche biologique des tumeurs hépatiques primitives Un bilan sanguin est fréquemment réalisé lors de l’investigation des tumeurs hépatiques primitives chez le chien et le chat, soit parce qu’une affection hépatique est suggérée par les signes cliniques présentés ou par l’examen clinique, soit dans le cadre de l’exploration de signes cliniques généraux et non spécifiques. Numération-formule sanguine Chez le chien, une leucocytose, une anémie, et une thrombocytose sont régulièrement observées. Une leucocytose est rapportée dans près de 54 % à 73 % des cas, probablement en lien avec l’inflammation et la nécrose associées aux volumineuses tumeurs hépatiques massives. Une anémie est rapportée dans près de 27 % à 51 % des cas. Il s’agit le plus souvent d’une anémie discrète à modérée, normocytaire, normochrome, et non régénérative. L’étiologie de cette anémie peut être multifactorielle, impliquant un processus inflammatoire chronique, une séquestration des hématies, une destruction mécanique par micro-angiopathie, et une carence en fer. Plus rarement, une anémie plus prononcée et régénérative peut être observée, notamment lors de rupture tumorale et/ou de troubles de l’hémostase avec hémoabdomen. Une thrombocytose est rapportée dans près de 50 % des cas de carcinome hépatocellulaire de forme massive chez le chien, dont l’origine reste incertaine (anémie, carence en fer, production de cytokines inflammatoires et de thrombopoïétine). Une anémie et une thrombopénie sont fréquemment observées et associées dans les cas d’hémangiosarcomes. Enfin, d’autres modifications peuvent être observées selon le type tumoral incriminé (éosinophilie et mastocytes circulants lors de mastocytose systémique ; anémie, thrombopénie, éosinophilie et cellules lymphoïdes blastiques circulantes lors de lymphome ; anémie, leucocytose et thrombopénie lors de sarcome histiocytaire). Hémostase secondaire Des troubles de l’hémostase secondaire peuvent être rencontrés lors de tumeur hépatique primitive chez le chien et le chat, même s’ils se traduisent rarement d’un point de vue clinique. On retiendra par exemple une augmentation des différents temps de coagulation (temps de Quick, temps de thrombine, temps de céphaline activée), ou encore des modifications des concentrations en fibrinogène ou en produits de dégradation du fibrinogène (PDF). Même si l’impact clinique est faible, la réalisation d’un bilan d’hémostase complet (primaire et secondaire) est vivement recommandée lors de l’exploration d’une tumeur hépatique et préalablement à toute prise en charge chirurgicale. Biochimie Une majoration des paramètres biochimiques hépatiques lésionnels est fréquemment observée lors de tumeur hépatique primitive, reflétant ainsi une cytolyse hépatique et/ ou une cholestase, mais elle reste très peu spécifique. Ces paramètres biochimiques lésionnels regroupent notamment : l’alanine aminotransférase (AlAT ou SGPT), l’aspartate aminotransférase (AsAT ou SGOT), la phosphatase alcaline (PAL), la gamma glutamyltransférase (GGT), et la bilirubine. Il n’existe pas de corrélation entre la sévérité de l’envahissement hépatique et la magni- 3 tude de l’élévation des paramètres lésionnels. Toutefois, certains critères peuvent permettre de suspecter plus volontiers un type tumoral plutôt qu’un autre, notamment chez le chien : une majoration des PAL et des AlAT est plus fréquente lors de tumeur hépatique primitive ; une majoration des AsAT et de la bilirubine est plus fréquente lors de tumeur hépatique métastatique ; un ratio AsAT/AlAT inférieur à 1 évoque en priorité un carcinome hépatocellulaire ou un cholangiocarcinome ; un ratio AsAT/AlAT supérieur à 1 évoque en priorité une tumeur neuroendocrine ou un sarcome. Chez le chat, une majoration des AlAT, des AsAT et de la bilirubine totale reste assez classique lors de tumeur hépatique primitive, et leur élévation semble être plus prononcée lors de tumeur maligne. Parfois, aucune modification des paramètres hépatiques n’est rapportée, et seule une azotémie est présente dans l’espèce féline. Concernant les paramètres biochimiques hépatiques lésionnels, il convient néanmoins de retenir que : - les AlAT et les AsAT témoignent d’une cytolyse hépatique. Les AsAT sont beaucoup moins spécifiques d’une affection hépatique que les AlAT, étant donné leur présence en grande quantité dans le tissu musculaire. - les PAL et les GGT témoignent d’une cholestase. Les PAL sont peu spécifiques d’une affection hépatique chez le chien, étant donné l’existence d’une iso-enzyme osseuse et d’une iso-enzyme cortico-induite. - chez le chat, l’iso-enzyme PAL cortico-induite est inexistante. Les PAL sont donc un marqueur spécifique d’une affection hépatique, tandis que les GGT semblent être plus sensibles. D’autres modifications biochimiques peuvent être observées lors de tumeur hépatique primitive, incluant notamment une hypoglycémie, une hypoalbuminémie, une hyperglobulinémie, et une majoration des acides biliaires à jeun et post-prandiaux. Ces modifications traduisent préférentiellement des signes de dysfonctionnement hépatique, mais elles ne sont pas non plus spécifiques d’une affection tumorale. A noter qu’une hypoglycémie paranéoplasique est décrite chez le chien en association avec des tumeurs hépatocellulaires (adénomes et carcinomes), mais aussi avec des hémangiosarcomes et des tumeurs musculaires lisses (léiomyomes et léiomyosarcomes). L’évaluation de la glycémie (et si besoin des fructosamines) doit donc systématiquement faire part du bilan initial dans l’exploration des tumeurs hépatiques primitives. 24>26 novembre 2016 LILLE GRAND PALAIS '!)&!% )"!' (&! % (&! % (&! %% (&! % (&! $' &!& (&! %%$% "32GXH F F F MLFRP MLFST MQFST ST OOFST RS "#+2GXH QPFSO NSFQM QNFTO RMFMLL PPFSQ QRFMLL OU MTFOO QLFSQ Tableau 2 : Modifications biologiques fréquentes lors de tumeur hépatique primitive Enfin, 2 autres marqueurs semblent prometteurs à l’avenir dans le diagnostic et le suivi des tumeurs hépatiques primitives, notamment chez le chien. D’une part, la ferritinémie est fréquemment élevée lors de sarcome histiocytaire. Elle peut cependant l’être également lors d’anémie hémolytique à médiation immune, et il convient donc d’écarter cette hypothèse au préalable, afin de pouvoir différencier un sarcome histiocytaire hépatique d’une autre hépatopathie. D’autre part, l’alpha-foetoprotéine (AFP) est régulièrement utilisée dans le diagnostic et le suivi des carcinomes hépatocellulaires en médecine hu- maine. Chez le chien, une majoration de l’AFP est rapportée dans 75 % des cas de carcinomes hépatocellulaires, et dans 55 % des cas de carcinomes des voies biliaires. Néanmoins, son utilisation à visée diagnostique reste à ce jour limitée en oncologie canine par sa faible spécificité, avec une élévation également retrouvée lors d’autres affections hépatiques tumorales (lymphome) ou non. L’AFP pourrait alors trouver un rôle plus intéressant dans le suivi des carcinomes hépatocellulaires traités chirurgicalement, avec un retour au sein des valeurs usuelles dans un délai de 1 à 2 mois après la chirurgie chez l’ensemble des chiens. 4 Conclusion Même si les tumeurs hépatiques primitives restent peu fréquentes chez le chien et le chat, que les signes cliniques sont le plus souvent non spécifiques voire absents, que l’examen clinique peut être normal, et que les modifications biologiques ne permettent pas de les différencier d’une autre affection hépatique, il convient de garder en tête les premières étapes de cette démarche diagnostique. La multitude de types tumoraux pouvant être rencontrés et les formes morphologiques distinctes peuvent significativement impacter le pronostic et la prise en charge thérapeutique. Ainsi, la démarche diagnostique doit absolument être complétée par des examens d’imagerie médicale, notamment l’échographie abdominale et l’examen tomodensitométrique, ainsi que par un examen morphologique des lésions hépatiques visualisées, en cytologie et/ou histologie. Déclaration publique d’intérêts sous la responsabilité du ou des auteurs : • Aucun conflit d’intérêt à déclarer 24>26 novembre 2016 LILLE GRAND PALAIS ONCOLOGIE - BIEN-ÊTRE ANIMAL PROGRAMME GÉNÉRAL Optimiser la prise en charge des tumeurs du foie chez le Chien et le Chat Comment optimiser le traitement des tumeurs hépatiques Sébastien ETCHEPAREBORDE DV. PhD. DESV chirurgie des petits animaux, Dipl. ECVS CHV des Cordeliers - 29 avenue du Maréchal Joffre - F-77100 MEAUX L’optimisation du traitement des tumeurs hépatiques s’articule sur trois points clefs : connaître les indications chirurgicales, la maitrise d’une anatomie complexe et la gestion des hémorragies sur un organe particulièrement bien vascularisé et centré sur les principales veines de l’organisme. Connaitre les indications chirurgicales Les tumeurs du foie se décrivent de deux manières différentes. La description histologique des tumeurs permet de dresser le tableau des différents types de tumeurs rencontrées et facilite ainsi la discussion avec le propriétaire en apportant une notion statistique face à une tumeur dont on ne connait pas encore l’origine. Cette discussion se veut rassurante compte tenu du grand nombre de tumeurs opérables chez le chien et le chat. On distingue 5 types de tumeurs : les tumeurs hépatocellulaires, les tumeurs cholangiocellulaires, les tumeurs neurendocriniennes, les tumeurs mésenchymateuses et les hyperplasies nodulaires. Cette description histologique n’est cependant pas le critère de choix le plus important pour décider d’intervenir ou non. C’est la description macroscopique qui va motiver cette décision. En effet, cette description concerne trois types de tumeurs et leur taux de métastases respectifs, confirmant le bien fondé d’une intervention ou son inutilité. Quel que soit le type histologique de la tumeur elle peut donc se présenter sous une forme dite « massive » : une tumeur unique, en général de taille imposante, n’impliquant qu’un seul lobe initialement. Une autre forme est dite « nodulaire » : plusieurs nodules sont répartis sur un ou plusieurs lobes du foie et finalement une forme diffuse se caractérisant par une modification plus ou moins homogène du parenchyme hépatique sans masse distincte. Chez le chien Les tumeurs hépatocellulaires Les tumeurs hépatocellulaires représentent 75 % des tumeurs hépatiques rencontrées. Si les études cliniques anciennes montraient que les carcinomes hépatocellulaires représentaient 50 % à 70 % (1,2) des tumeurs hépatiques, les avancées récentes dans l’identification des tumeurs permettent de constater que 78 % de ces tumeurs sont maintenant des adénomes hépatocelluaires (3). 61 % de ces tumeurs sont massives, 29 % nodulaires et 10 % diffuses. La forme massive est localisée dans les lobes gauches du foie dans 67 % des cas, dans la division centrale dans 13 % à 19 % des cas et dans la division droite dans 12 % à 20 % des cas. Ce qu’il est important de noter c’est que les études nécropsiques montrent que la forme massive n’est associée à des métastases que dans 36 % des cas alors que les formes nodulaires ou diffuses sont associées à 93 % de métastases. Ces métastases sont décrites principalement au niveau des nœuds lymphatiques (39 % des cas), des poumons (38 % des cas) et du péritoine (18 % des cas) et secondairement dans les reins, les surrénales, le pancréas, les os, le cœur, la rate, le tractus intestinal et la moelle osseuse. Le pronostic des tumeurs hépatocellulaires massives excisées chirurgicalement est excellent avec une survie moyenne au-delà de 1460 jours (contre 270 jours pour des chiens traités uniquement médicalement) (4,5). Compte tenu du pourcentage important de métastases pour les tumeurs nodulaires et diffuses, la chirurgie n’est pas conseillée. Les tumeurs cholangiocellulaires Ces tumeurs représentent 10 % à 22 % des tumeurs hépatiques et sont d’après les dernières études la plupart du temps des carcinomes (2). La moitié des cas sont des tumeurs massives, 28 % nodulaires et 22 % diffuses. Bien que résécables dans la moitié des cas, une étude nécropsique a mis en évidence la présence de métastases dans 88 % des cas. Les tumeurs mésenchymateuses Ces tumeurs sont rares. De très nombreux types ont été décrits et, bien que le traitement de choix soit la chirurgie, le pronostic reste réservé à cause de la fréquence élevée de métastases. Chez le chat Les tumeurs hépatocellulaires Ces tumeurs représentent 20 % à 34 % des tumeurs hépatiques (6,7). Les adénomes hépatocellulaires sont six fois plus fréquents que les adénocarcinomes qui sont rares. Donc, bien que les informations soient limitées sur ce type de tumeurs chez le chat, ces données orientent vers un traitement chirurgical. Les tumeurs cholangiocellulaires Ce sont les tumeurs les plus fréquentes chez le chat, représentant au moins 41 % des cas. Parmi ces tumeurs, les adénomes bénins du conduit biliaire aussi appelés cystadénomes biliaires sont deux fois plus fréquents que les carcinomes. Le pronostic associé au retrait chirurgical d’un cystadénome est excellent. En revanche, la mortalité périopératoire associée à l’excision d’un carcinome cholangiocellulaire est de 100 % d’après une étude. Les tumeurs neurendocriniennes Elles représentent 4 % à 6 % des tumeurs hépatiques. Tout comme chez le chien, ce sont des tumeurs extensives associées à un très sombre pronostic. Les tumeurs mésenchymateuses L’hémangiosarcome est le plus fréquent. Le pronostic est très sombre avec une étude reportant 71 % des cas euthanasiés durant la période postopératoire et le reste vivant avec une moyenne de 77 jours (23 à 296 jours). Les tumeurs neurendocriniennes L’anatomie du foie Elles représentent 3 % à 14 % des tumeurs hépatiques. 100 % de ces tumeurs sont diffuses et associées à un taux de métastases de 93 %. Le pronostic est sombre. Le foie est partagé en 3 divisions qui regroupent les 6 lobes. La division gauche comprend le lobe latéral gauche et le lobe médial gauche. La division centrale comprend le lobe 5 24>26 novembre 2016 LILLE GRAND PALAIS carré et le lobe médian droit. La divison droite comprend le lobe latéral droit et le lobe caudé qui se divise lui-même en processus caudé et processus papillaire. Le foie est maintenu en place par différents ligaments. Le ligament coronaire le lie au diaphragme : c’est une continuation du péritoine recouvrant le foie. De cette structure on distingue nettement plusieurs ligaments dits triangulaires : l’un reliant le diaphragme au lobe latéral droit (un plus discret part du lobe médial droit) et un autre reliant le lobe médial gauche. Un ligament hépato-rénal relie le lobe caudé au rein droit. du lobe latéral droit ou du processus caudé du lobe caudé par exemple. Ces mesures doivent être anticipées avant la chirurgie de manière à pouvoir prévoir la tonte de l’animal. Cette anatomie est importante dans la mesure où tous les lobes ne peuvent pas être retirés indépendamment. Le lobe latéral gauche est le lobe le plus volumineux et peut s’individualiser facilement permettant une résection hilaire. Il en va de même pour le lobe médial gauche qui peut se retirer entièrement en préservant les autres lobes. Les lobes formant la division centrale : lobe carré et lobe médial droit sont en revanche anatomiquement très difficile à distinguer l’un de l’autre. Lorsqu’une lobectomie complète est à réaliser sur l’un de ces deux lobes, il faudra envisager de faire une lobectomie de la division en entier, à savoir les deux lobes sus cités et la vésicule biliaire. Les lobes latéral droit et processus caudé du lobe caudé peuvent être séparés mais une dissection mousse d’une petite partie du parenchyme qui les relie doit être réalisée. On peut donc choisir de les enlever ensemble ou séparément. Le processus papillaire du lobe caudé peut s’exciser seul. Le foie est un organe indispensable pour la synthèse des facteurs procoagulants (fibrinogènes, vitamine K entre autres). En cas d’affection hépatique, plus de la moitié des chiens présentent des troubles de la coagulation. Dans certains cas, il peut être nécessaire de transfuser avant la chirurgie du sang frais, du plasma frais congelé ou de la vitamine K. Le foie est un organe fragile qui saigne facilement. De nombreux vaisseaux importants sont concernés : veine cave caudale, veine porte, artère hépatique. Une exposition correcte en fonction de la chirurgie à réaliser est nécessaire pour éviter des tractions trop importantes qui pourraient léser les organes concernés. Une incision abdominale depuis le processus xyphoïde du sternum permet une visualisation de tous les lobes du foie dans la mesure où un assistant exerce une rétraction crâniale des tissus mais ne permet pas une manipulation aisée de tous les lobes. Avec une telle incision, en fonction des races, souvent seul le lobe latéral gauche est facilement manipulable. Pour des procédures sur d’autres lobes, l’extension de l’incision crânialement à travers le processus xyphoïde est nécessaire. Cette incision, bien qu’améliorant nettement la visualisation du foie, entraine une effraction dans le thorax par incision du diaphragme au niveau du processus xyphoïde. Une ventilation est alors nécessaire pour assurer la respiration de l’animal. Lorsque ce geste ne suffit pas à une visualisation suffisante, une incision paracostale droite peut être réalisée. Cela peut être utile pour des tumeurs Gérer les hémorragies Avant la chirurgie Dans notre contexte, le foie est atteint par une tumeur et cela peut interférer avec sa fonction. Un bilan complet comprenant numération formule, biochimie, temps de coagulation et typage sanguin est donc indispensable. Bien que l’hypoglycémie soit rarement associée aux hépatopathies terminales, la glycémie est un facteur important à prendre en compte chez des animaux de petit format ou malades ainsi que lors de lobectomie importante. Pendant la chirurgie La grande majorité des saignements sont des saignements diffus provenant de la capsule. Ces saignements peuvent être traités par une simple compression et lorsque cela n’est pas suffisant l’utilisation d’agents hémostatiques locaux est à privilégier. Ces agents se rencontrent sous la forme de compresses de cellulose (Surgicel) ou d’éponges de collagène (Pangen, Gelfoam) à appliquer directement sur les tissus qui saignent. Ces matériaux sont totalement biocompatibles et n’interfèrent pas avec la cicatrisation, voire la promeuvent. Les compresses de cellulose sont complètement absorbées en 45 jours et les éponges de gélatine persistent après ce délai et se retrouvent encapsulées dans une fine couche de tissu fibreux. Lors d’hémorragie plus importante, des occlusions vasculaires peuvent être nécessaires pour arrêter temporairement le saignement. La manœuvre de Pringle permet d’occlure temporairement la veine porte et l’artère hépatique. Cette manœuvre consiste à passer un doigt dans le foramen épiploïque après rétraction du duodénum vers la gauche. Ce foramen est localisé à l’entrée du foie entre la veine cave dorsalement et la veine porte ventralement. Une fois qu’un doigt est passé dans le foramen, une compression est réalisée entre deux doigts pour comprimer les tissus et va alors occlure la veine porte et l’artère hépatique. L’occlusion peut 6 être continue ou intermittente. Dans ce dernier cas, bien que les pertes sanguines soient plus importantes, le risque de lésion de reperfusion est diminué. Une occlusion continue ne doit pas être maintenue plus de 20 minutes. Dans des cas extrêmes, la veine cave caudale suprahépatique peut aussi être occluse temporairement. Cette manœuvre nécessite un monitoring soutenu car le retour veineux vers le cœur est alors réduit à l’extrême. Enfin, la technique elle-même de lobectomie va être associée avec plus ou moins de saignements. La lobectomie hépatique peut être réalisée par squelettisation. Cette technique consiste à disséquer le parenchyme hépatique à l’aide d’un instrument mousse (l’embout d’une sonde d’aspiration de pool est en général utilisé) pour dégager tous les vaisseaux sanguins. Les vaisseaux sont alors ligaturés un à un pour terminer la lobectomie. portale, de la veine lobaire hépatique, de l’artère lobaire et du conduit biliaire hépatique, des ligatures sont utilisées sur chaque vaisseau avant de retirer l’entièreté du lobe. Les lobectomies partielles sont réalisées soit à l’aide d’une agrafeuse TA or GIA soit à l’aide d’une pince à ligafusion permettant une dissection du lobe hépatique tout en coagulant les vaisseaux rencontrés. Bibliographie Patnaik AK et coll. Canine hepatic neoplasms: a clinicopathological study. Vet Pathol. 1980 ; 17:553–564. Trigo FJ et coll. The pathology of liver tumors in the dog. J Comp Pathol. 1982 ; 92:21–39. Van Sprundel R et coll. Classification of primary hepatic tumours in the dog. Vet J. 2013 ;197 :596-606. Blakman C. Hepatobiliary neoplasia in dogs and cats. Vet Clin Small Anim. 2009 ; 39 :617-625. Mayhew PD, Weisse C. Liver and Biliary system. In : Tobias KM, Johnston SA, ed, Veterinary surgery small animal. First ed. Saint Louis : Elsevier saunders ; 2012 : 1601-1623. Lawrence HJ et coll. Nonlymphomatous hepatobiliary masses in cats: 41 cases (1972–1991). Vet Surg. 1994 ; 23:365–368. Van Sprundel R et coll. Classification of primary hepatic tumours in the cat. Vet J. 2014 ; 202 :255-266. Déclaration publique d’intérêts sous la responsabilité du ou des auteurs : • néant 24>26 novembre 2016 LILLE GRAND PALAIS ONCOLOGIE PROGRAMME GÉNÉRAL Optimiser la prise en charge des tumeurs du foie chez le Chien et le Chat Cytoponctions ou biopsies du foie : indications respectives et réalisations Hugues GAILLOT DV. M.Sc. Dip. ECVDI, Spécialiste en Imagerie Médicale Clinique ADVETIA – PARIS 12 L’échographie fondamentale (mode B avec échelle de gris) est couramment utilisée dans l’exploration des maladies parenchymateuses du foie. Les machines actuelles offrent une excellente sensibilité dans la détection des lésions localisées du foie (nodules et masses). Cependant les images échographiques fondamentales ont une très faible spécificité et ne permettent pas de distinguer les lésions bénignes des lésions malignes. L’échographie de contraste permet d’étudier la perfusion des organes et des lésions. Comparée à l’échographie fondamentale, l’échographie de contraste s’accompagne d’une meilleure détection des lésions localisées du foie et d’une meilleure précision dans la recherche de malignité. Elle fait appel à un équipement spécifique, nécessite un produit de contraste relativement onéreux et requiert une expertise dans l’interprétation des images. Si elle permet d’orienter le diagnostic entre bénin et malin avec un faible taux d’erreur, elle ne peut en aucun cas remplacer l’analyse cytologique et/ou histologique pour l’établissement d’un diagnostic définitif. Sous certaines conditions d’accessibilité et de sécurité, les prélèvements cytologiques et biopsiques hépatiques peuvent être réalisés sous guidage échographique. Le guidage échographique offre un contrôle visuel constant de l’aiguille au cours de ses déplacements, de la lésion d’intérêt et des structures adjacentes à éviter. Il permet d’obtenir des prélèvements de grande précision tout en limitant les risques de complication par lacération des tissus et perforation d’organe creux. Indications des cytoponctions et biopsies échoguidées du foie La fiabilité des analyses cytologiques et histologiques du foie dépend de plusieurs paramètres dont les plus importants à prendre en compte par le prescripteur sont : - la qualité de la méthode de prélèvement cytologique ou biopsique - la nature même de l’affection hépatique explorée (cf tableaux I et II) - l’expertise du lecteur (cytologiste versus anatomopathologiste) Pour une affection hépatique donnée, l’examen histologique et l’examen cytologique du foie ne vont pas obligatoirement présenter la même précision diagnostique. Par conséquent l’affection hépatique suspectée ou les affections hépatiques les plus probables indiquées dans la liste du diagnostic différentiel influencent le choix entre cytoponction et biopsie du foie. Le tableau I présente les affections hépatiques qui sont couramment diagnostiquées sur des prélèvements cytologiques (sous réserve de prélèvements cytologiques de bonne qualité et de l’intervention d’un cytologiste expérimenté). Ces affections représentent donc les indications de cytoponctions du foie. Lipidose (chat) Hépatopathie vacuolaire (chien) Histiocytose maligne (chien) Lymphome Mastocytome (chat) Hémopathies malignes Metastases Tableau I : hépatopathies couramment diagnostiquées sur prélèvement cytologique du foie Le tableau II présente les affections hépatiques dont le diagnostic cytologique est délicat voire impossible. Ces affections constituent des indications de biopsies hépatiques. Amyloïdose Hépatocarcinome / Hépatome Cystadénome / cystadénocarcinome Maladies inflammatoires Cirrhose Tableau II : hépatopathies dont le diagnostic définitif fait appel à l’examen histologique 7 Réalisation des cytoponctions hépatiques échoguidées Les cytoponctions échoguidées des lésions tissulaires du foie s’effectuent à « main levée ». Cette méthode offre une grande liberté de positionnement de l’aiguille. Il est ainsi possible d’orienter l’aiguille le plus perpendiculairement possible à l’axe des ultrasons (meilleure visualisation de l’aiguille à l’écran) tout en évitant certaines structures dans le champ proche (vaisseaux sanguins, vésicule biliaire, autre organe que le foie) et en limitant la lacération des tissus. Matériel La cytoponction ou « ponction à l’aiguille fine » utilise une aiguille hypodermique de 23 gauge. Pour des régions relativement superficielles du foie, une aiguille de 20 ou 25 mm de longueur est suffisante. Pour des régions hépatiques plus profondes une aiguille spinale à ponction lombaire de diamètre similaire et de 3 à 9 cm de longueur est choisie. A l’aide d’une lame de scalpel l’opérateur peut gratter l’extrémité de l’aiguille pour créer des fines aspérités qui rendront l’extrémité de l’aiguille plus échogène. Le matériel complémentaire inclut une seringue de 5 ml et des lames d’étalement pour microscope. Préparation du patient Le prélèvement étant rapide et peu traumatique, il est souvent réalisé sur patient vigile, lorsque ce dernier est coopératif. Chez un patient agité une sédation ou une anesthésie générale peuvent être nécessaires. L’aire cutanée de prélèvement est tondue, nettoyée et désinfectée. Méthodes de cytoponction Le prélèvement cytologique requiert l’intervention d’un seul opérateur. L’échographiste tient la sonde d’une main et visualise à l’écran la région à prélever. Son autre main tient la 24>26 novembre 2016 LILLE GRAND PALAIS seringue montée de l’aiguille. En observant un angle compris entre 60 et 80° entre l’axe de la sonde et celui de l’aiguille, l’opérateur insère l’aiguille à travers la peau, dans l’abdomen puis dans le foie. Il fait cheminer l’aiguille dans le plan du faisceau ultrasonore en contrôlant la visualisation de l’aiguille à l’écran jusqu’à placer l’extrémité de l’aiguille dans la région d’intérêt du foie. tériel spécifique et plus onéreux, et imposent une anesthésie générale du patient. Leur coût supérieur et leur mise en œuvre plus complexe expliquent pourquoi les biopsies échoguidées du foie sont moins souvent pratiquées que les cytoponctions hépatiques et sont réservées à des situations ciblées. La méthode par capillarité consiste à effectuer des petits mouvements de va-et-vient de l’extrémité de l’aiguille dans la lésion hépatique à prélever. Lors de lésion à faible cohésion cellulaire des cellules remontent dans l’aiguille par capillarité. L’aiguille est ensuite retirée du patient, puis enlevée de la seringue ; la seringue est remplie d’air ambiant ; l’aiguille est replacée sur la seringue ; en chassant l’air de la seringue à travers l’aiguille le contenu de l’aiguille est expulsé sur une lame microscopique ; le matériel ainsi expulsé est étalé à l’aide d’une seconde lame. La méthode par capillarité permet de limiter l’aspiration de sang et l’hémodilution du prélèvement. Les biopsies échoguidées peuvent être réalisées soit à « main levée » soit « assistées d’un guide ». La méthode par aspiration est réservée aux lésions à forte cohésion cellulaire, pour lesquelles la méthode par capillarité ne rapporte pas de matériel significatif. Lorsque l’aiguille est en position intra-lésionnelle, l’opérateur tire le piston de la seringue plusieurs fois créant une pression négative dans la seringue et l’aiguille après avoir effectué des petits déplacements intra-lésionnels de l’aiguille. Le matériel récupéré dans l’aiguille est expulsé et traité de la même manière qu’avec la méthode par capillarité. Réalisation des biopsies échoguidées du foie Comparées aux cytoponctions échoguidées, les biopsies échoguidées du foie exigent un bilan hémostatique préalable, utilisent un ma- Matériel Le guide échographique est propre à chaque fabricant d’échographe et spécifique de la sonde utilisée. L’équipement comprend (1) un adaptateur, sorte d’anneau fixé à la base de la tête de la sonde et qui va recevoir le guide, (2) le guide, fixé sur l’adaptateur et qui possède un canal dans lequel l’aiguille à biopsie sera insérée, (3) un logiciel qui permet de faire apparaître à l’écran de la machine une ligne représentant le trajet attendu de l’aiguille lorsque celle-ci est insérée dans le guide puis dans le patient. Quelle que soit la méthode, à main levée ou assistée d’un guide, le prélèvement biopsique est réalisé à l’aide d’une aiguille à biopsie (type Tru-Cut) de diamètre moyen de 16 gauge (14G à 18G) et de longueur adaptée à la profondeur de la région d’intérêt, montée sur un « pistolet à biopsie ». Les pistolets automatiques (Biopty gun) sont plus faciles d’utilisation, plus efficaces et d’utilisation plus sûre que les pistolets manuels. Ils offrent deux longueurs de course de l’aiguille (11 et 22 mm) selon les dimensions de la zone à prélever et la présence de structure à éviter en profondeur. Méthodes de biopsie Avec la méthode assistée d’un guide, l’échographiste tient la sonde équipée du guide d’une main et le pistolet équipé de l’aguille de l’autre main. La ligne de prévisualisation du trajet de l’aguille est apparente à l’écran et l’échographiste place la sonde sur l’abdomen de manière que, sur l’écran, la ligne traverse la zone du foie à prélever. Il insère alors l’aiguille dans le canal du guide. Après avoir traversé la paroi abdominale, il introduit l’aiguille dans l’abdomen en s’assurant que l’aiguille apparaisse à l’écran le long de la ligne de prévisualisation du trajet. Une fois l’extrémité de l’aiguille placée en marge de la région à prélever, l’opérateur retire la sécurité du pistolet et déclenche le mouvement automatique de l’aiguille. Avec la méthode à main levée, l’échographiste n’utilise pas de guide. Après ponction de la paroi abdominale, il insère l’aguille dans le foie en adaptant les positions relatives de l’aiguille et du faisceau ultrasonsore de manière à conserver une visualisation de l’aiguille à l’écran. Cette méthode est plus délicate et demande un entraînement de la part de l’opérateur. Cependant, elle offre plus de liberté quant au positionnement de l’aiguille et permet plus facilement d’éviter les organes et structures superficiels qui ne doivent pas être pénétrés. Préparation du patient L’anesthésie générale est indispensable. L’aire cutanée de prélèvement est tondue, nettoyée et désinfectée chirurgicalement. 8 Déclaration publique d’intérêts sous la responsabilité du ou des auteurs : • Aucun conflit d'intérêt