Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement ement

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Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement ement
Quels INDICATEURS DE PERFORMANCE retenir ?
Contact : [email protected]
ISBN : 978-2-12-465528-1
www.afnor.org/editions
www.afnor.org/formation
-:HSMBME=[ZZW]V:
Une approche originale et impertinente
L’exercice de l’évaluation est un exercice sain et précieux, familier aux
décideurs de la fonction QSE, rompus aux évaluations externes et internes.
La « communauté » Parcours Croisés a donc naturellement choisi de s’y
prêter, convaincue par les « vertus de l’exercice ».
Le fameux adage bien connu « Évaluer/mesurer... c’est déjà progresser »
trouve ainsi une nouvelle application, qui concerne la contribution même
de la fonction QSE à la création de valeur de l’entreprise.
Confier à des enseignants-chercheurs d’une des meilleures universités
françaises, spécialistes de l’évaluation des fonctions de l’entreprise,
le soin d’interroger la fonction QSE et de confronter leurs approches à
celles des praticiens du réseau « Parcours Croisés »… la méthode est
originale, riche de promesses et le résultat séduisant.
Pas de vérité unique, mais de nombreuses pistes pour permettre à
chacun, dirigeant en réflexion sur la fonction QSE ou décideur en charge
de cette dimension du projet stratégique de l’entreprise, de construire
la nouvelle feuille de route de la fonction, de définir sa contribution à la
création de valeur et son dispositif d’évaluation associé.
Car poser la question de l’évaluation reste la meilleure façon de rendre
visible et partagée la création de valeur de la fonction QSE et constitue
donc une excellente « hygiène de questionnement », indispensable à tous
les tenants de la fonction.
P. Gilbert, C. Triomphe, Parcours Croisés
De « Gardien de conformité » à « Business Partner »...
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
Évaluez votre fonction
Qualité Sécurité Environnement
Patrick Gilbert
Christine Triomphe
Le réseau Parcours Croisés
Évaluez votre fonction
Qualité Sécurité
Environnement
De « Gardien de conformité » à « Business Partner »...
Quels INDICATEURS DE PERFORMANCE retenir ?
© AFNOR 2015
Couverture : création AFNOR Éditions – Crédit photo © 2014 Fotolia
Correction et mise en page : Émilie Guillemin
ISBN 978-2-12-465528-1
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Sommaire
Remerciements........................................................ VII
Édito........................................................................... XI
Introduction.............................................................. XV
1 Créer de la valeur : question universelle,
réponses contingentes............................................ 1
1.1 Valeur : un singulier pluriel................................. 2
1.2 QSE : une contribution indirecte à la valeur....... 7
1.3 La valeur ou les valeurs ?.................................. 9
2 L’évaluation : une réponse aux attentes
des parties prenantes.......................................... 11
2.1 La théorie des parties prenantes................... 12
2.2 Trois catégories de parties prenantes
aux attentes multiples...................................... 13
2.3 La qualité, caisse de résonance auprès
de la direction générale....................................22
VI
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
3 Penser les contributions de la fonction QSE
à la création de valeurs......................................... 31
3.1 La qualité : une valeur inestimable,
victime de son succès !.................................... 31
3.2 La fonction qualité dans tous ses états...........34
3.3 Des évaluations de la création
de valeur(s) différenciées................................46
4 De l’expert technique au partenaire
stratégique : action, évaluation et valorisation....59
4.1 Faire prendre de la hauteur à la qualité
en construisant la confiance........................... 59
4.2 Des compétences distinctives à renforcer.......64
4.3 La fonction QSE comme Business Partner...... 69
4.4 Investir les projets porteurs d’avenir................. 73
4.5 Évaluer pour évoluer : pour un management
global du portefeuille qualité............................77
Conclusion.................................................................89
Témoignages concrets de membres
et contributions collectives de clubs..................... 97
Présentation des auteurs et des contributeurs... 123
Bibliographie........................................................... 137
Annexe..................................................................... 141
Remerciements
Nous remercions :
La chaire Mutations-Anticipations-Innovations de l’IAE
de Paris :
–– Patrick Gilbert, docteur en sciences de gestion, professeur
des universités et directeur du master Management à
l’IAE de Paris ;
–– Christine Triomphe, maître de conférences à l’IAE de
Paris.
Les dirigeants qui ont contribué à ce travail collectif,
et notamment :
–– Philippe Barret, directeur général, groupe Apicil ;
–– Claude Bercq, président du directoire, Condat ;
–– David Charbonnier, directeur innovation et organisation,
Manpower France.
VIII
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
L’ensemble du réseau Parcours Croisés : les animateurs,
ambassadeurs et membres des clubs Ariane, Chambéry,
Confluence, Élysées, En Nord, K-PI-Tool, MadeleineInnovation Publique, Opéra, Pyramide, Strasbourg-Europe.
Et notamment, pour leurs témoignages :
–– Léopoldine Bachelard, directrice qualité, affaires
réglementaires et sécurité d’une entité opérationnelle
d’Air Liquide et membre du club Ariane ;
–– Daniel Blaie, animateur du club En Nord et anciennement
directeur qualité, sécurité, environnement et gestion de
crise chez Danone ;
–– Antoine Bouvy, responsable qualité, ANFH et membre
du club Madeleine-Innovation Publique ;
–– Richard Carpanini, responsable qualité, APA Compétences
et membre du club Strasbourg-Europe ;
–– Laurence Dujardin, responsable qualité, Messier-BugattiDowty et membre du club Strasbourg-Europe ;
–– Claire Jany, chef du service qualité de service et
amélioration continue, Manpower France et membre du
club Élysées ;
–– Sylvie Lhomme, directrice des quartiers à la mairie de
Lille et membre du club En Nord ;
–– Jean-Paul Vaurs, anciennement directeur qualité et
sécurité des SI chez Gfi Informatique et membre du club
Élysées ;
–– Nicolas Viard, directeur général adjoint des services de la
mairie d’Olivet et membre du club Madeleine-Innovation
Publique.
RemerciementsIX
Les initiateurs et coordinateurs de cet ouvrage :
–– Marie Berenger, responsable du réseau Parcours Croisés,
AFNOR Compétences ;
–– Pascal Prévost, directeur général, AFNOR Compétences.
Édito
Voici donc la deuxième production collective du réseau
Parcours Croisés, qui regroupe de nombreux directeurs QSE
d’entreprises et d’organisations significatives, à l’initiative
d’AFNOR Compétences, la filiale formation/conseil du groupe
AFNOR.
Fidèles à nos principes de prise de distance, de recul par
rapport à l’exercice opérationnel de la fonction et de « choc
culturel » entre chercheurs et praticiens, nous nous sommes
appuyés pour cette réflexion sur l’IAE de Paris (Université
Paris I Panthéon-Sorbonne) et sa chaire MAI (MutationsAnticipations-Innovations), en bénéficiant de l’éclairage de
Patrick Gilbert (docteur en sciences de gestion, professeur
des universités et directeur du master Management à l’IAE
de Paris), auteur de contributions remarquées sur l’évaluation
de la fonction RH et la sociologie des outils de gestion,
XII
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
assisté de Christine Triomphe (maître de conférences). Je
tiens à les remercier pour leur engagement à nos côtés.
Après l’exploration de nouveaux « territoires de légitimité »,
objet de l’ouvrage précédent Capital confiance et performance
durable – À qui confier les clés ?1, notre réseau communautaire
s’est donc intéressé à la création de valeur de la fonction
QSE dans les entreprises et aux conditions de son évaluation
(évolution ?) réussie.
Le premier enseignement est que l’avenir de la fonction
qui se dessine n’est pas unique. Marqués par la taille, le
secteur d’activité, le projet stratégique de l’organisation
et la vision de ses dirigeants, l’avenir de la fonction et la
création de valeur associée se construisent en fonction de
ces paramètres clés.
C’est une bonne nouvelle pour les décideurs QSE qui trouveront dans cet ouvrage matière à analyser leur environnement
et à déterminer leurs « champs des possibles ».
Le deuxième enseignement, relevé par nos partenaires
chercheurs, spécialistes de l’évaluation, est que l’évaluation
de la création de valeur de la fonction QSE est une
construction collective, qui pose la question des parties
prenantes, de leurs attentes et de la réponse apportée.
Ce qui est important (et d’ailleurs familier aux tenants de la
fonction), c’est que la démarche d’élaboration des « bons »
indicateurs d’appréciation de la performance QSE est plus
importante que la production finale du tableau de bord de
la fonction.
1
Sylvie Rolland, Anne-Laure Mauduit, Christophe Villalonga, Le réseau
Parcours Croisés, Capital confiance et performance durable – À qui
confier les clés ?, AFNOR Compétences, 2014.
ÉditoXIII
Le troisième enseignement que je retiens de ce travail collectif
réside dans la confirmation de la transformation de la fonction,
des orientations possibles du poste, des composantes de
la création de la valeur et, par voie de conséquence, la
nécessité de construire en fonction de ces orientations, les
bases de l’évaluation.
Partenaire stratégique de la direction, agent de changement,
champion des salariés ou expert technique… chacune des
orientations appelle le choix de critères d’évaluation adaptés
à construire avec les parties prenantes… au premier rang
desquelles figure bien sûr la direction.
Cette production collective ouvre ainsi, et c’est bien dans
l’esprit de « Parcours Croisés», de nombreuses réflexions
aidantes pour les directions d’entreprise et les tenants de la
fonction, afin de définir ensemble « leur » futur de la fonction
dans leur organisation.
Bonne lecture et bonne réflexion, en remerciant fortement
l’ensemble de la communauté « Parcours Croisés », qui s’est
mobilisé sur ce sujet passionnant, en apportant avec humour,
distance et élégance de très nombreuses contributions,
contradictions et visions sur la transformation en cours de
la fonction.
Pascal Prévost
Directeur général,
AFNOR Compétences
Introduction
L’environnement n’a cessé d’évoluer au fil des dernières
décennies. Les mutations technologiques et la part croissante
des activités de services ont amené progressivement les
entreprises industrielles à transformer leurs configurations
productives et à appréhender la qualité d’une autre manière.
Le secteur des services, puis les entreprises et organisations
publiques se sont engagés résolument dans la même voie. Par
ailleurs, la qualité a profondément muté, tout en capitalisant
sur ses acquis – sa capacité, notamment à répondre à des
exigences normatives en constante évolution. Depuis les
années 2000, elle est sortie de l’ère « assurance qualité »
pour passer au management de la qualité2.
2
Voir le précédent ouvrage du réseau Parcours Croisés avec Sylvie
Rolland, Anne-Laure Mauduit, Christophe Villalonga, Capital confiance
et performance durable – À qui confier les clés ?, AFNOR Compétences,
2014.
XVI
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
Sur la chaîne de valeur, elle tient à présent une place qui
peut devenir véritablement stratégique, et ce d’autant plus
que l’entreprise aura opté pour un schéma productif reposant
en grande partie sur une stratégie délibérée et volontariste
de qualité. Évidemment, tout ceci contribue à donner une
nouvelle dimension aux directions Qualité et à leurs politiques,
en leur offrant une marge de manœuvre élargie dans l’atteinte
des objectifs stratégiques des entreprises.
Par ailleurs, l’agressivité et l’instabilité de l’environnement
concurrentiel imposent, de manière accrue, l’impératif de
performance comme une question de survie. Face à des
changements rapides, imprévisibles, créant des discontinuités
et des ruptures de l’activité, la fonction QSE se trouve
confrontée à une mise sous pression, la contraignant
expressément à contribuer davantage — et à démontrer
cette contribution — à la création de valeur. Mais pourquoi
et comment évaluer cette contribution ?
La principale finalité de l’évaluation est de permettre l’action,
d’aider à progresser. La manière dont l’évaluation est
appréhendée va en effet offrir une « prise » à l’action et,
par conséquent, indiquer les pistes de progrès.
Ce principe étant posé, on constate de manière générale une
pression à l’évaluation. Au sein des organisations, celle-ci
s’impose de plus en plus dans un contexte caractérisé par une
mutation des formes organisationnelles et des « tendances
lourdes » en gestion.
Les formes organisationnelles sont en mutation, sous
l’influence combinée d’un large mouvement de fusions/
acquisitions, de fortes pressions sur les coûts et d’une
tendance à l’opérationnalisation de la prise de décision.
Par ailleurs, le développement et la transformation des
IntroductionXVII
systèmes d’information contribuent également à modifier
les configurations organisationnelles.
Les systèmes de gestion intégrés et les nouvelles
technologies de la communication favorisent le partage
des informations entre opérationnels et professionnels QSE.
Leur présence crée des appétits (plus de chiffres disponibles,
donc des possibilités d’analyses plus fouillées) et légitime le
renforcement des pressions.
Parallèlement, certaines tendances lourdes en management
convergent pour renforcer le besoin d’évaluation de la
performance de la fonction QSE :
–– Une orientation client : l’entreprise se pense de plus en
plus à partir d’éléments empruntés au marché : « marché
interne », « clients internes », « satisfaction des clients »
deviennent des impératifs.
–– Une orientation « standard de performance » : là, il
s’agit pour l’entreprise d’être plus performante que ses
compétiteurs externes, entraînant une course au « toujours
moins » en matière de coûts, mais aussi une course au
« encore mieux » par la recherche d’amélioration des
outputs des pratiques de management de la qualité.
–– Une orientation feedback : celle-ci recouvre l’idée que
les professionnels QSE ne sont pas les seuls juges de
ce qu’ils apportent à l’entreprise et que les dispositifs
d’évaluation de la qualité associent de plus en plus ses
parties prenantes internes et externes.
Qualité et valeur sont des notions largement débattues
dans la littérature. Mais celle-ci reste souvent à un niveau
théorique. Sans ignorer les apports de cette littérature, mais
en s’appuyant largement sur les témoignages et pratiques
XVIII Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
de responsables d’entreprise, directement impliqués dans la
problématique évoquée, l’objectif de l’ouvrage est d’apporter
quelques pistes de réflexion et d’action. On retrouvera
témoignages et points de vue d’acteurs mis en exergue au
fil de cet ouvrage.
Méthodologie de l’étude
L’étude a été menée par Patrick Gilbert et Christine Triomphe,
enseignants-chercheurs à la chaire Mutations-AnticipationsInnovations de l’IAE de Paris (université Panthéon-Sorbonne),
à la demande d’AFNOR Compétences, avec la participation
des membres du réseau Parcours Croisés, constitué de
décideurs intervenant sur les thématiques qualité, QSE,
évolution des systèmes de management, excellence
opérationnelle, performance durable, transformation
organisationnelle, intelligence collective, production de
confiance, innovation managériale…
L’étude a comporté trois volets :
–– Une analyse documentaire fouillée d’ouvrages et d’articles
à même de favoriser la réflexion des clubs Parcours
Croisés3.
–– Les travaux des clubs, accompagnés par les deux
chercheurs. A minima, une réunion de chacun des clubs
a été consacrée au thème de l’ouvrage. La convention
interclubs de lancement, le 20 novembre 2014, a permis un
premier cadrage de la réflexion. Un point d’étape au cours
d’un second événement interclubs, le 9 avril 2015, et les
3
Une sélection de références figure dans la bibliographie à la fin de
l’ouvrage.
IntroductionXIX
débats qui s’en sont suivis ont permis un enrichissement
de la réflexion. En fonction de leurs programmes, les clubs
ont pu approfondir certains axes de travail.
–– Une enquête par questionnaire auprès de l’ensemble des
membres des clubs Parcours Croisés. Une synthèse des
réponses aux questions se trouve en annexe.
Les auteurs de cette construction collective ont une ambition
partagée qui n’est certes pas de faire avancer la science, mais
plus modestement d’aider l’ensemble des acteurs du système
de management de la qualité à progresser ensemble sur le
chemin de la performance et à bien penser leur contribution.
1
Créer de la valeur :
question universelle,
réponses contingentes
Dans l’expression « création de valeur », valeur est utilisée
au singulier. En fait, cette notion s’accommode du singulier
comme du pluriel. Nous commencerons donc à clarifier
ce terme dans la variété de ses significations, sans nous
attarder sur ses usages généraux (valeur morale, valeurs
culturelles, etc.), car un ouvrage n’y suffirait pas.
Nous aborderons ensuite, plus frontalement, la question de
la création de valeur avant d’en venir à notre préoccupation
centrale : quelle est la place de la fonction QSE dans la
création de valeur ?
2
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
1.1 Valeur : un singulier pluriel
1.1.1Valeur, de quoi parle-t-on ?
 Première approche
Qu’est-ce que la valeur ? Comment définir la notion
de valeur étant donné l’extrême diversité des points de
vue, de l’économique au sociologique, en passant par le
philosophique ? C’est un concept qui alimente de nombreux
débats. Nous éviterons de perdre le lecteur dans la forêt des
définitions et retiendrons simplement pour notre propos que
la valeur s’apprécie selon :
–– un point de vue, ce qui introduit une relativité dans
l’évaluation et montre l’importance des représentations
des acteurs ;
–– un projet, donc des attentes à satisfaire (utilité, efficacité,
réduction des risques…) ;
–– un référentiel, car cette appréciation peut être normée
(exigences impératives liées à un standard, à une
réglementation, à une norme, aux conventions d’une
organisation, d’un dirigeant ou de la société) ;
–– une instrumentation : l’appréciation de la valeur se
traduit généralement par une mesure, ce qui suppose
de préciser la ou les variables et les échelles de mesure.
 En économie
Le concept de valeur a d’abord été présent dans la discussion
sur la formation des prix : ceux-ci sont fixés par la valeur
Créer de la valeur : question universelle, réponses contingentes 3
d’usage (c’est-à-dire le besoin solvable que rencontre un
produit) ou par la valeur d’échange (les différents frais
occasionnés pour produire et commercialiser ce produit).
La conception dominante, aujourd’hui, définit la valeur comme
l’expression de l’intérêt qu’un agent particulier porte à un bien
ou à un service, d’où la relativité de l’évaluation.
 Un point de vue gestionnaire
Dans le domaine du management, on ne peut se satisfaire
d’un angle macroéconomique. Les organisations sont des
milieux où interagissent des acteurs ayant différents besoins,
exprimant des attentes diverses, de sorte que valeur et
création de valeur sont des constructions sociales.
Ce point de vue est inspiré par la sociologie économique qui
rappelle, en outre, qu’il ne faut pas confondre évaluation et
création de valeur. Car, nous dit François Vatin4 , « l’évaluation
ne crée pas de la valeur, elle ne fait que mettre à jour une
valeur présente dans un bien. » Et, ajouterons-nous, cette
valeur n’est pas intrinsèque au bien produit (ou au service
rendu). Elle dépend de ce qu’en attendent les parties
intéressées, pour reprendre l’expression des référentiels
ISO 9000.
 Et pour la fonction QSE ?
Il n’y a pas de réponse unique, car le traitement du sujet
dépend de nombreux facteurs :
4
François Vatin, Le travail et ses valeurs, Albin Michel, 2008.
4
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
–– du positionnement du management de la qualité dans
l’entreprise (niveau de décentralisation, proximité de la
direction générale, rattachement structurel…) ;
–– de son histoire et de sa culture ;
–– du secteur d’activité (industrie/service, public/privé, B2B/
B2C…) ;
–– de l’horizon de l’activité de l’entreprise (pression plus ou
moins forte du temps) ;
–– du niveau de maturité de l’entreprise vis-à-vis de son
système qualité.
Cependant, avec les nuances que nous venons d’apporter,
la littérature managériale met essentiellement l’accent sur
trois notions.
1.1.2Valeur actionnariale, valeur partenariale,
valeur partagée
 Valeur actionnariale (Shareholder value)
Au début des années 2000, la création de valeur pour les
actionnaires est devenue le nouveau credo des dirigeants
des grandes entreprises. Des groupes très différents
déclarent urbi et orbi vouloir « créer de la valeur pour
l’actionnaire ».
Pour la théorie financière classique, le premier objectif
financier est de maximiser la richesse des actionnaires.
Une entreprise sera considérée comme créatrice de valeur
dès lors qu’elle est en mesure de dégager un rendement sur
ses investissements supérieur au coût du capital.
Créer de la valeur : question universelle, réponses contingentes 5
Faire de la valeur actionnariale le seul indicateur de la
performance d’une organisation correspond à l’approche
contractuelle du droit anglo-saxon des sociétés, selon lequel
l’entreprise appartient aux actionnaires qui choisissent les
dirigeants et leur délèguent le pouvoir de diriger l’entreprise
afin de maximiser la valeur des actions.
 Valeur partenariale
Selon la théorie des parties prenantes (en anglais, Stakeholder
theory5), qui s’est développée depuis l’ouvrage du philosophe
américain Edward Freeman 6 , la finalité d’une entreprise
ne se limite pas à la maximisation des richesses au profit
des actionnaires et la valeur est relative aux attentes de
l’ensemble des parties prenantes. Cette théorie montre les
emboîtements possibles entre sphère publique et sphère
privée, et concerne tous ceux (individus ou groupes) qui ne
sont pas des actionnaires et qui influencent pourtant l’activité
des organisations ou/et bénéficient de cette activité.
Le concept de valeur partenariale, à la base de la justification
de la responsabilité sociale des entreprises, a été proposé
comme alternative à celui de valeur actionnariale.
Cette conception de la valeur, élargie aux différents
stakeholders, a l’intérêt de mettre en évidence que la création
de valeur ne résulte pas seulement de l’apport de capitaux
par les actionnaires mais des efforts conjugués de tous
les partenaires ou stakeholders (créanciers, fournisseurs,
salariés, sous-traitants, pouvoirs publics).
5
6
Stakeholder est parfois traduit par « partie intéressée » voire « ayant
droit ».
R. Edward Freeman, Strategic management – A stakeholder approach,
Pitman, 1984.
6
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
 Valeur partagée (« shared value »)
Développée par les professeurs Michael Por ter et
Mark Kramer, dans un article de Harvard Business Review
(2011), cette notion consiste pour les entreprises « à créer
de la valeur économique d’une manière qui profite aussi à
la société, en répondant à ses besoins et ses défis ».
La valeur partagée fait le lien entre la responsabilité sociétale
des entreprises et les avantages compétitifs que peuvent
en retirer ces dernières.
Les deux auteurs distinguent trois modes de création de
valeur partagée dans une entreprise :
–– le renouvellement de produits et de services afin de les
adapter aux besoins sociaux ;
–– l’augmentation de la productivité dans la chaîne de valeur
(par exemple, en économisant les matières premières) ;
–– la contribution à la création de « clusters » ou pôles
de compétitivité, à l’exemple de la Silicon Valley en
Californie.
1.1.3Création et chaîne de valeur
Pour Michael Porter, les organisations cherchent à obtenir
un avantage concurrentiel en proposant une valeur à leurs
clients : elles doivent donc comprendre comment cette valeur
est créée ou perdue.
La chaîne de valeur décrit les différentes étapes qui
permettent à l’organisation de générer de la valeur :
–– valeur globale : valeur perçue par le client – coûts ;
Créer de la valeur : question universelle, réponses contingentes 7
–– valeur captée par le client : valeur perçue par le client
– prix ;
–– valeur captée par l’entreprise : prix – coûts.
1.1.4Qualité : un élément essentiel
de la création de valeur
Au-delà des mots, les politiques et pratiques de la fonction
QSE créent-elles de la « valeur » ? Afin de répondre à cette
question, des liens doivent être mis en évidence. Il s’agira
de mesurer des contributions et pas seulement des coûts.
Cet exercice peut s’avérer difficile, ce d’autant plus que
les relations de causalité entre qualité et performance
économique et financière ne sont qu’exceptionnellement
décrites dans les organisations.
La qualité est un élément essentiel, mais la valeur générée
par cette fonction est également ambiguë, car le résultat de
ses activités contribuant efficacement à la création de valeur
est dissimulé au moment où se réalise la prestation. Nous
dirons que sa contribution est indirecte.
1.2 QSE : une contribution indirecte
à la valeur
Sur quels indicateurs se fonder pour évaluer cette contribution
à la création de valeur ? Quelle part peut-on directement
attribuer à la mise en place du système de management
qualité sur l’évolution d’un cours boursier ou d’un taux de
croissance du chiffre d’affaires ?
8
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
Il est nécessaire d’abandonner d’emblée l’idée présomptueuse
selon laquelle il serait possible de calculer le retour sur
investissement (le fameux ROI) d’un système de management
qualité. Il est impossible d’établir un lien direct entre la
politique qualité d’une entreprise et son cours boursier ou
sa rentabilité économique. Cela ne signifie pas pour autant
qu’il faille renoncer à toute idée d’évaluation des impacts
d’un système de management qualité.
Avancer pas à pas est une démarche plus raisonnable. On
peut commencer par se demander quels sont les principaux
effets des approches qualité, puis la manière dont ceux-ci
s’intègrent, à côté de nombreux autres éléments, dans la
performance organisationnelle, qui elle-même constituera
une composante de la création de valeur.
La valeur créée par une entreprise (même évaluée
localement) est le fruit, compte tenu de la complexité des
réseaux d’affaires, des décisions et actions de l’ensemble
de ses acteurs (voir figure 1.1).
Figure 1.1 Des résultats qualité à la création de valeur
Créer de la valeur : question universelle, réponses contingentes 9
Des résultats intermédiaires permettent d’atteindre la création
de valeur recherchée. Il convient donc de distinguer les
résultats qualité des autres niveaux de résultats.
Par résultats qualité, nous entendons les résultats directement
produits par la mise en œuvre des pratiques de management
qualité et qui sont en relation avec le business model de
l’entreprise ou les finalités de l’organisation concernée.
Par exemple, selon la Haute Autorité de Santé, « ils (les
indicateurs de résultat qualité) mesurent directement, à
l’issue de la mise en œuvre d’un processus de soins, les
bénéfices ou les risques générés pour le patient en termes
d’efficacité, de satisfaction et de sécurité. »
Pour les membres du réseau Parcours Croisés, les
contributions du dirigeant QSE à la création de valeur peuvent
prendre différentes formes. Celles-ci ne se laissent pas
directement saisir par des indicateurs de résultats.
1.3La valeur ou les valeurs ?
Comme le soulignent nombre de financiers eux-mêmes,
privilégier la valeur actionnariale ne doit pas signifier pour
autant ignorer les attentes des autres parties prenantes :
« Créer de la valeur pour les actionnaires nécessite d’avoir
toujours plus de clients satisfaits avec de bons produits,
développés par des employés motivés et de qualité, en liaison
avec les meilleurs fournisseurs et sous-traitants possibles,
tout en respectant les réglementations édictées par les
pouvoirs publics »7.
7
Michel Albouy, « Théorie, applications et limites de la mesure de la
création de valeur », Revue française de gestion, 2006.
10
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
En d’autres termes, c’est la société – au sens large –, dans
la multiplicité de ses composantes (en relation d’affaire
directe ou non), qui juge de la valeur créée par l’entreprise,
en raison de l’utilité perçue des produits et services offerts
et en référence à des besoins multiples.
L’entreprise doit donc s’orienter vers la recherche d’un équilibre
entre les intérêts, parfois contradictoires, de l’ensemble de
ses parties prenantes.
2
L’évaluation :
une réponse
aux attentes
des parties prenantes
Fondamentale en gestion, l’évaluation est un préalable à toute
amélioration de la qualité… y compris à celle de la fonction
QSE. En effet, sans évaluation, comment voir les évolutions
et établir des objectifs de progrès ? Mais l’évaluation n’a pas
de justification en elle-même. Si la mesure est essentielle
pour agir, elle doit aussi être conduite relativement aux
bénéficiaires de cette mesure.
12
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
La courte discussion du chapitre précédent sur la notion de
valeur souligne que non seulement il faut a priori considérer
la multiplicité des regards portés par les parties prenantes
du système de management qualité et que, pour chaque
partie prenante, il y aura a priori de multiples paramètres
pour apprécier la « valeur » créée.
2.1 La théorie
des parties prenantes
2.1.1Une vision du monde économique et social,
un cadre de réflexion
L’origine de l’expression « parties prenantes » (« stakeholders »
en anglais) repose sur l’idée que l’entreprise doit équilibrer
les intérêts concurrents des différents acteurs, internes
et externes, dans le but de maintenir leur coopération
nécessaire. La définition de référence est celle de Freeman8,
pour lequel on entend par partie prenante « tout groupe ou
individu [pouvant] affecter ou être affecté par la réalisation
des objectifs de l’entreprise ».
Cette conception de la justice sociale, fondée sur l’équité
des contrats est parfaitement en phase avec la révision de
la norme ISO 9001, cette révision se caractérisant par « la
compréhension du contexte externe et interne de l’organisme
et par la compréhension des besoins et attentes des parties
intéressées »9.
8
9
R. Edward Freeman, Strategic management – A stakeholder approach,
Pitman, 1984.
Commission de normalisation Qualité et Management X 542.
L’évaluation : une réponse aux attentes des parties prenantes 13
2.1.2Parties prenantes et évaluation
On vient de le voir, le caractère relatif (et parfois subjectif)
de la valeur accordée est très variable, tant en nature (types
de variables à considérer) qu’en niveau (échelle de mesure),
d’un secteur d’activité à l’autre.
Si la notion de valeur diffère selon les parties prenantes, alors
il est évident que l’évaluation de la création de valeur doit
s’adapter à ces différentes conceptions. Ainsi, une conception
plus centrée sur la création de valeur pour le client ne peut
se satisfaire du suivi des seuls indicateurs financiers. Pour
atteindre l’objectif de création de valeur, il convient de prendre
en compte les attentes de l’ensemble des parties prenantes
dans la variété de leurs situations.
2.2Trois catégories
de parties prenantes
aux attentes multiples
Différentes typologies de parties prenantes ont été établies.
En nous basant sur la littérature et en considérant les statuts
et rôles de la fonction QSE, nous proposons une liste établie
en considérant trois groupes d’acteurs.
2.2.1Les parties prenantes internes
Ce groupe inclut les parties prenantes organisationnelles,
telles que le directeur général (ou équivalent), les dirigeants
opérationnels et fonctionnels, le comité d’administration
et d’autres acteurs centraux comme le personnel et ses
représentants (comité d’entreprise).
14
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Tableau 2.1. Les attentes des parties prenantes internes
Ateliers de la convention interclubs Parcours Croisés de novembre 2014
Attentes
Exemples
d’actions
à évaluer
Direction
générale
Satisfaction clients, réduction des
coûts, mesure de la performance,
obtention ou maintien des
certifications, gestion des
risques QSE, développement
de la RSE, veille, contribution à
l’innovation organisationnelle et à
la transformation de l’organisation
(développer l’autonomie et la
responsabilisation des équipes,
etc.), satisfaction du personnel
et des instances représentatives
(CHSCT, CE).
Aide à la
gouvernance de
l’entreprise.
Aide à l’élaboration d’une
stratégie orientée clients.
Synthèse des
problèmes et
des dysfonctionnements.
Directions
opérationnelles
Conformité et certification,
sécurité, ergonomie, aide
méthodologique, excellence
opérationnelle, mesure des
performances.
Accompagnement de la montée
en compétences en résolution
de problème, augmentation de
la participation des employés à
l’amélioration continue.
Aide à l’accompagnement des
changements organisationnels.
Développement de la performance
fournisseurs (au travers d’audits
et d’une collaboration renforcée).
Niveau de
compréhension
des concepts
de management
de la qualité.
Assistance
dans la mise
en œuvre
d’actions.
Parties
prenantes
L’évaluation : une réponse aux attentes des parties prenantes 15
Tableau 2.1. Les attentes des parties prenantes internes
Ateliers de la convention interclubs Parcours Croisés de novembre 2014
(suite)
Parties
prenantes
Directions
fonctionnelles
Manager de
proximité
Personnel
Attentes
Exemples
d’actions
à évaluer
Amélioration et simplification des
processus.
Aide à l’accompagnement des
changements organisationnels.
Idem ci-dessus
Sens aux actions.
Aide à la résolution de problème.
Formation.
Outils qualité, mesures.
Directives et
assistance dans
la maîtrise des
activités.
Niveau d’assistance dans le
règlement des
dysfonctionnements.
Montée en compétence,
formation.
Amélioration et simplification
des processus et des conditions
de travail.
Aide à l’autocontrôle
Contribution à
la valorisation
et au
développement
du personnel.
Niveau
d’information
sur le
management de
la qualité.
Enquête sur la
qualité de vie
au travail.
16
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2.2.2Les parties prenantes économiques
Ce sont les acteurs externes, en relation contractuelle avec
l’entreprise, qui contribuent le plus directement à l’activité
économique de l’entreprise :
–– à commencer par les clients et les actionnaires qui sont
les acteurs de premier rang ;
–– suivis d’autres partenaires de l’entreprise, comme les
fournisseurs, les banques, les coopérants et autres
prestataires.
Tableau 2.2. Les attentes des parties prenantes externes
Ateliers de la convention interclubs Parcours Croisés de novembre 2014
Parties
prenantes
Attentes
Exemples
d’actions
à évaluer
Clients
Expérience, qualité, rapport
qualité-prix, délai, niveau
de service, conformité et
certifications, sécurité.
Évaluation de
la satisfaction
clients.
Délai de traitement
des réclamations
clients.
Actionnaires
Prévention des risques
d’externalités négatives, RSE,
de réputation, de non-qualité.
Risques de destruction de valeur.
Réputation de
l’entreprise et de
ses produits.
Niveau et type de
risques perçus.
Banques
Prévention des risques
d’externalités négatives.
RSE, de réputation, de non-qualité.
Risques de destruction de valeur.
Idem ci-dessus.
L’évaluation : une réponse aux attentes des parties prenantes 17
Tableau 2.2. Les attentes des parties prenantes externes
Ateliers de la convention interclubs Parcours Croisés de novembre 2014
(suite)
Parties
prenantes
Fournisseurs
Attentes
Relation stable et durable,
retour d’informations sur la
performance.
Aide à l’amélioration continue.
Exemples
d’actions
à évaluer
Niveau de
transparence
dans les relations.
2.2.3Les autres parties prenantes externes
Ce cercle rassemble les parties prenantes sociétales, dont
certaines sont communes à toutes les entreprises et d’autres
sont spécifiques à un secteur économique. Il comprend :
–– l’État et les autorités réglementaires… ainsi que les
pouvoirs publics locaux (municipalités, communautés
locales et territoriales…) ;
–– les instituts financiers au nombre desquels les banques,
les assurances, les créanciers… ;
–– les porteurs d’image représentant les médias, les analystes
financiers, les agences de notation ;
–– les organisations sociétales, comme les associations
et organisations non gouvernementales (défense des
consommateurs et de l’environnement…) et, selon les
cas, des groupes de pression comme les syndicats, les
riverains, etc. ;
–– le grand public au sens large, qu’il soit ou non client actuel
de l’entreprise.
18
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Tableau 2.3. Les attentes des parties prenantes externes
Ateliers de la convention interclubs Parcours Croisés de novembre 2014
Attentes
Exemples
d’actions
à évaluer
Diminution des externalités
négatives, RSE, maintien de
la réputation, solvabilité de
l’entreprise.
Management des
risques.
Syndicats,
associations
professionnelles
Respect des
réglementations, normes,
sécurité. Amélioration
des conditions de travail,
employabilité des salariés.
Fiabilité des
informations
fournies aux
partenaires
sociaux.
Prévention
des risques
psychosociaux.
ONG, société
civile
Respect des
réglementations, normes,
sécurité, données fiables.
Diminution des externalités
négatives, RSE.
Écoute des revendications.
Management des
risques.
Parties
prenantes
Pouvoirs
publics,
organismes
réglementaires
Cette liste n’a pas la prétention d’être exhaustive. Qui sont
les parties prenantes ne peut être déterminé dans l’abstrait,
mais en référence à telle ou telle organisation concrète
entretenant des relations tout aussi concrètes avec d’autres
entités.
L’évaluation : une réponse aux attentes des parties prenantes 19
Le point de vue de…
Nicolas Viard, directeur général adjoint des services à la
mairie d’Olivet (membre du club Parcours Croisés MadeleineInnovation Publique)
La qualité : un outil pour penser le service public de
demain
L’activité de Nicolas couvre notamment la qualité, mais
aussi la gestion de l’ensemble des ressources de la mairie.
Arrivé à ce poste après avoir longuement travaillé sur la
politique de la ville en relation avec les services de l’État,
il connaît bien le secteur. La position de DGA l’aide à lever
certaines difficultés. Il est plus facile pour lui d’actionner
des leviers opérationnels que pour des fonctions n’ayant
pas de moyens propres à gérer.
À ce titre, il a développé pour la ville d’Olivet l’Agenda 21,
un programme d’actions pour le xxie siècle, orienté vers le
développement durable et reconnaissant aux territoires
et aux collectivités locales un rôle clé dans cette mise en
œuvre. Ce projet s’appuie sur un ensemble d’outils qui
favorisent, au niveau local, une politique de développement
durable. C’est, en quelque sorte, le pendant public des
stratégies RSE mises en œuvre par les entreprises.
Un élément clé pour le déploiement de la démarche Qualité
à Olivet est son ancrage dans les orientations stratégiques
de la mairie : « c’est une volonté d’élu ». Pour preuve,
elle est inscrite dans le mandat du programme municipal
qui mentionne explicitement comme garantie d’une
gestion exemplaire : « Nous nous engageons à maintenir
20
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
la certification ISO 9001, référentiel international, dont
bénéficie la ville pour la qualité de ses services. » En aval,
le citoyen, « client » de la démarche qualité, est sollicité
dans des instances participatives.
Les moyens d’évaluation sont divers : le renouvellement de la
certification ISO 9001, le baromètre accueil développé par le
groupe AFNOR, le panorama de la ville durable – autre outil
qui a été utilisé – les sondages réalisés auprès des Olivetains.
Tous ces éléments permettent de situer la commune dans
sa strate par rapport au service rendu et attendu.
Labels et certifications divers (agenda 21, ISO 9001, label
4 fleurs, label de la ville ludique et sportive…) sont perçus
par l’équipe municipale comme des vecteurs de progrès au
service de la politique municipale. Mais le management QSE
associe des approches encore séparées, la préoccupation
actuelle est donc d’intégrer ce foisonnement dans un
système qualité compréhensible par tous.
Figure 2 .1. La constellation des parties prenantes
L’évaluation : une réponse aux attentes des parties prenantes 21
2.2.4Pour évaluer : l’écoute des parties
prenantes, un des fondamentaux
La stratégie de gestion des parties prenantes peut se
construire différemment selon la stratégie de l’entreprise et la
vision de ses dirigeants. Toutefois, on s’accorde aujourd’hui à
reconnaître qu’être à l’écoute des parties prenantes, dans une
double logique de réponse à leurs attentes et de prévention
des risques, pour coconstruire avec elles les solutions les
plus adaptées, est source de différenciation et de progrès.
Si les évaluations chiffrées sont indispensables, elles ne sont
qu’indicatives et ne peuvent pas se substituer à cette écoute.
Le management des risques est souvent un thème qui permet
d’ouvrir sur une large prise en compte des parties prenantes.
Bonne pratique
Une compagnie d’assurance-vie a fait de la prévention des
risques potentiels et avérés un axe stratégique majeur. Ce
projet a été confié à la DQSE qui a procédé de la manière
suivante :
1. Création de groupes de travail pour détection des
risques par domaine d’activité.
2. Plan d’actions pour le traitement des risques avérés
(avec analyse des causes) et prévention des risques
potentiels.
3. Introduction de la démarche dans les processus. Il s’en
est suivi la création d’une direction des risques et d’un
comité des risques auxquels est rattachée la DQSE.
22
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
4. Le comité des risques se réunit tous les deux mois
pour suivre les risques sélectionnés en fonction de leur
impact financier et sur l’image perçue par les clients.
5. Cinq risques majeurs sont suivis de très près au moyen
d’indicateurs de suivi des risques.
6. Un logiciel d’analyse des risques performant a été mis
en place et est exploité régulièrement par la direction
générale, ce qui motive les collaborateurs dans la
fourniture des données qui alimentent le logiciel.
7. Cette démarche fait progressivement partie de la culture
de l’entreprise et s’accompagne de réflexes d’alerte.
8. Les traditionnelles actions correctives et préventives
sont remplacées par les actions de prévention des
risques auxquelles la DG est plus sensible.
La DQSE a ainsi montré la valeur qu’elle avait créée en
permettant la mise en place de cette analyse de risques,
en donnant la méthode, en formant et en sensibilisant
les collaborateurs à leur détection et à leur résolution
(« résolution de problème »).
2.3La qualité, caisse
de résonance auprès
de la direction générale
2.3.1Comment mobiliser la direction générale ?
Passer de centre de coût à centre de création de valeur, faute
de pouvoir prétendre être un centre de profit, est l’ambition
légitime de toute fonction support. La valorisation des relations
L’évaluation : une réponse aux attentes des parties prenantes 23
avec les différentes parties prenantes constitue le chemin
obligé pour convaincre une direction générale qui, sauf cas
exceptionnel où la qualité rencontre d’emblée la stratégie
d’affaires, n’est pas spontanément portée à s’y intéresser.
Il y a là une pédagogie qui consiste, après les efforts d’écoute
des parties prenantes, à traduire leurs effets en lien avec
les attentes de la DG dont le soutien est le facteur n° 1 de
la reconnaissance de la fonction QSE (voir résultats de
l’enquête en annexe p. 141).
Autrement dit, mobiliser la direction générale, c’est
aussi argumenter sa contribution pour les autres parties
prenantes dont le cercle ne cesse de s’élargir avec la prise
en compte des facteurs économiques, environnementaux
et sociétaux.
2.3.2 Identifier les parties prenantes,
les hiérarchiser, préciser leurs attentes
et définir les critères d’évaluation
 Commencer par identifier les parties prenantes
L’identification des parties prenantes est un préalable
nécessaire à l’établissement des priorités de tout dirigeant.
La détection des individus ou groupes influents suppose un
effort d’anticipation et une certaine clairvoyance de la part
des membres de la direction générale.
Il convient, par exemple, que les dirigeants évaluent les
conséquences négatives de certaines situations de crise
et décèlent, sur cette base, les acteurs incontournables de
l’environnement.
24
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
 Hiérarchiser ces parties prenantes
La théorie des parties prenantes peut ouvrir sur deux
perspectives différentes. La première perspective consiste à
établir une hiérarchie de ces parties prenantes en fonction de
leur degré d’influence potentielle sur l’entreprise. La seconde
repousse l’idée de classification et suggère de ne faire aucune
distinction entre les parties prenantes.
Bien que la seconde façon de voir soit légitime, la première
nous semble plus utile dans une démarche d’identification
d’acteurs clés en raison de son orientation managériale et
de son caractère opérationnel.
En effet, quel que soit le jugement que l’on porte sur cette
situation, toutes les parties prenantes ne pèsent pas le même
poids, n’ont pas les mêmes attentes selon les contextes
interne et externe, notamment à l’égard de la fonction QSE.
On considère généralement qu’une partie prenante est
d’autant plus prioritaire qu’elle présente à un degré élevé
certaines caractéristiques et particulièrement le pouvoir
d’influencer les décisions organisationnelles, la légitimité
dans les relations avec l’entreprise et le caractère urgent
des droits qu’elle peut prétendre exercer sur l’entreprise.
Exemples
>>Une usine chimique, forcément exposée au risque de
pollution, ne pourra ignorer la nécessité d’un dialogue avec
les autorités locales, les populations environnantes et avec
les associations écologistes particulièrement vigilantes sur
les questions de sécurité et de prévention. Par conséquent,
ces groupes devront être considérés comme des parties
prenantes clés.
>>Une entreprise du secteur du luxe, dont la marque est
entourée d’une aura de prestige, devra être particulièrement
L’évaluation : une réponse aux attentes des parties prenantes 25
attentive au risque de réputation et soigner ses relations
avec les médias porteurs d’image et le grand public.
>>Une industrie du médicament, située dans un environnement
fortement réglementé, dans lequel les litiges peuvent être
très pénalisants, est confrontée au défi de l’optimisation du
retour pour l’actionnaire par la satisfaction des intéressés
légitimes (corps médical et autres prescripteurs, patients
parfois regroupés en associations, etc.). Elle sera donc
contrainte de gérer cette tension des parties prenantes
aux intérêts divergents en cherchant les convergences.
>>Une organisation publique, à la différence d’une entreprise
privée travaillant d’abord pour ses apporteurs de capitaux,
est confrontée aux pouvoirs publics qui sont ses principaux
financeurs.
Figure 2.2. L’écoute des parties prenantes, un des fondamentaux
Légende : réponse à la question : « Quels sont les fondamentaux de
votre fonction ? » (Événement interclubs Parcours Croisés d’avril 2015,
115 répondants, interrogés par QuizzBox, un système de vote interactif).
26
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
Figure 2.3. Les parties prenantes prioritaires
des dirigeants QSE
Légende : réponse à la question : « Quelles sont les parties prenantes
que vous prenez en compte en priorité dans vos missions ? »
(Événement interclubs Parcours Croisés d’avril 2015, 115 répondants,
interrogés par QuizzBox, un système de vote interactif).
L’évaluation : une réponse aux attentes des parties prenantes 27
Figure 2.4. Les alliés prioritaires des dirigeants QSE
Légende : réponse à la question : « Quels sont les alliés sur lesquels
vous vous appuyez pour déployer la démarche qualité/QSE dans
votre organisation ? » (Événement interclubs Parcours Croisés d’avril
2015, 115 répondants, interrogés par QuizzBox, un système de vote
interactif).
28
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
 Préciser les attentes
Préciser les attentes des parties prenantes, c’est ce qu’on
appelle parfois la « cartographie des parties prenantes ».
Certaines entreprises tiennent à jour une telle cartographie10,
considérant qu’elle fait partie intégrante des politiques de
Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE). La fonction
QSE est d’ailleurs parfois à l’origine de ces relevés, mais ce
n’est pas toujours le cas.
Il s’agit, pour chacune des attentes identifiées, d’exprimer
la contribution spécifique que la fonction QSE est à même
de leur apporter. Les tableaux des pages précédentes
constituent une première base de travail.
 Déterminer les critères d’évaluation :
les éléments clés
Les figures 2.1 à 2.4 donnent quelques orientations. Le
volume des publications traitant des facteurs déterminant le
succès dans chacun des domaines visés est considérable.
En même temps les indicateurs fournis sont souvent triviaux.
Les spécialistes insistent moins sur le contenu des indicateurs
que sur le processus de choix.
En théorie, l’élaboration et l’amélioration continue du système
de management qualité relève beaucoup de la responsabilité
des différentes directions et des managers de proximité,
avec la fonction QSE en support.
10 Voir, par exemple : http://www.legrand.com/FR/cartographie-desparties-prenantes-du-groupe_13174.html.
L’évaluation : une réponse aux attentes des parties prenantes 29
En pratique, l’inverse se produit parfois avec la tentation des
managers de « déléguer » la responsabilité de la qualité aux
experts fonctionnels. À moyen terme, c’est l’échec assuré.
Pour être efficace, un cadre de référence doit être coconstruit
avec la partie prenante intéressée : l’indicateur est en quelque
sorte le « représentant » de la partie prenante dans le système
de management de la qualité. Il est nécessaire également
qu’il soit partagé.
Il doit en même temps présenter trois qualités principales :
–– être pratique (les données seront faciles à rassembler) ;
–– être facile à comprendre, notamment par les décideurs
internes (autrement dit, les managers doivent pouvoir
employer les mesures réalisées pour améliorer leurs
propres processus) ;
–– permettre d’agir (autrement dit, les évaluations réalisées
pourront se traduire aux différents échelons de l’entreprise).
Ce cadre de référence (tableau de bord ou balanced
scorecard) s’inscrit dans une logique partagée de régulation,
de pilotage. Classiquement, le pilotage consiste à définir une
cible, puis un chemin pour l’atteindre. On vérifiera en cours
d’action que la réalité est conforme à l’objectif. En cas de
dérive constatée, des actions correctives seront décidées
en collaboration avec les acteurs internes.
3
Penser
les contributions
de la fonction QSE
à la création de valeurs
3.1 La qualité :
une valeur inestimable,
victime de son succès !
La notion de qualité est reconnue comme avantage
concurrentiel depuis bien longtemps. Au xviie siècle, le grand
Colbert, cité par Jean-Michel Bezat, dans l’ouvrage Enquête
32
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
sur le Made in France (First, 2015), déclarait déjà : « Si nos
fabriques imposent, à force de soins, la qualité supérieure de
nos produits, les étrangers trouveront avantage à se fournir en
France et leur argent affluera dans les caisses du royaume. ».
La qualité, telle qu’on la connaît aujourd’hui, a vraiment
pris son envol à partir des années 1970, lorsque la
saturation des marchés, le développement du marketing
et l’augmentation des exigences des clients conduisent
les entreprises à chercher à accroître la qualité de leurs
produits. La concurrence ne se fait plus uniquement sur le
prix mais également sur la qualité et la variété des produits
offerts. Philip B. Crosby publie son best-seller Quality is
free11 en 1979 et prône le « zéro défaut ». Le concept de
qualité passe alors du contrôle a posteriori des produits au
contrôle a priori des processus ; les procédures d’assurance
qualité se généralisent, puis les démarches de certification
d’entreprise, avec l’arrivée en 1987 des normes ISO 9000.
Initié par un ingénieur américain d’origine roumaine, Joseph
M. Juran, dès les années 1950, le Management par la Qualité
Totale (TQM : Total Quality Management) commence à se
diffuser dans les entreprises à partir des années 1980. Juran
propose un système global de management de l’entreprise
reposant entièrement sur les principes de la qualité. Les
normes ISO 9000 sont revues en 2000 pour évoluer dans
ce sens et s’articulent autour de principes de management :
–– l’orientation client ;
–– le leadership ;
–– l’implication du personnel ;
11
Philip. B. Crosby, Quality is Free – The Art of Making Quality Certain,
McGraw-Hill Inc., 1979.
Penser les contributions de la fonction QSE à la création de valeurs 33
–– l’approche processus ;
–– le management par approche système ;
–– l’amélioration continue (ou Kaizen) ;
–– l’approche factuelle pour la prise de décision ;
–– une vision globale intégrant les acteurs de la chaîne
logistique ;
–– des relations mutuellement bénéfiques avec les fournisseurs.
La qualité commence à intégrer aujourd’hui les problématiques de responsabilité sociale, sociétale et environnementale. Son périmètre n’a donc cessé de s’élargir : des objets
produits aux rapports de l’entreprise avec la société.
Aujourd’hui, la qualité est victime de son succès ! Elle s’est
diluée dans toutes les instances de l’entreprise et tout le
monde est plus ou moins en charge de la qualité de ses
activités (« la qualité est l’affaire de tous ! »). D’autre part,
d’autres démarches (Lean Management, méthode 6 Sigma,
excellence opérationnelle, etc.) se sont développées et
occupent parfois le devant de la scène, reléguant la qualité
à un rôle purement technique. Enfin, la qualité a été érigée
en système global de management par le TQM, puis par les
référentiels d’évaluation, comme celui du Malcolm Baldrige
National Quality Award aux USA, qui a vu son nom évoluer
en « Integrated Management Models » et celui de l’EFQM
(European Foundation for Quality Management) en Europe,
appelé maintenant « Modèle d’excellence ». Cette extension
déborde du cadre traditionnel de la fonction qualité pour
englober toutes les composantes de l’entreprise. Il en résulte
que la qualité en tant que fonction doit rendre des comptes !
A-t-on encore besoin d’une direction qualité ? Combien
coûte-t-elle ? Et qu’apporte-t-elle en définitive ?
34
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
Pour tenter de répondre à ces questions, nous allons nous
attacher à cerner les contributions de la fonction QSE à la
création de valeur.
3.2 La fonction qualité
dans tous ses états
La fonction QSE est une fonction support contribuant à
l’amélioration des performances des autres fonctions et
contribuant indirectement à l’amélioration des performances
de l’entreprise. Pour comprendre la nature des contributions
de cette fonction à la création de valeur, il est nécessaire de
s’interroger sur ses activités clés et sur son positionnement
dans l’entreprise.
Une grille d’analyse, développée par Ulrich (1996) pour l’étude
d’une autre fonction support, la fonction RH, a été retenue,
après adaptation à la fonction qualité.
Le modèle d’Ulrich répartit les contributions selon deux
axes d’analyse : d’une part, sur l’axe vertical, l’orientation
opérationnelle ou stratégique des activités et, d’autre part,
sur l’axe horizontal, la focalisation sur les outils-méthodes
par opposition à celle sur les hommes.
Ce découpage permet de définir quatre profils-types de
missions pour l’acteur qualité (voir figure 3.1) :
–– l’expert technique ;
–– le champion des salariés ;
–– l’agent de changement ;
–– le partenaire stratégique.
Penser les contributions de la fonction QSE à la création de valeurs 35
Bien que n’existant jamais à l’état pur, ces types de
contributions constituent des repères pour l’analyse et pour
l’action. Après les avoir présentés dans la section suivante,
ils seront appliqués à l’analyse de la répartition des activités
des membres de Parcours Croisés. On s’interrogera ensuite
sur les modes d’évaluation qui sont les mieux adaptés.
Figure 3.1 Matrice des contributions de la qualité
vue par les clubs Parcours Croisés (adaptée d’Ulrich, 1996)
3.2.1Expert technique réduisant les risques
et apportant fiabilité de fonctionnement
et confiance
L’expert technique a des actions très opérationnelles, qui
contribuent directement à l’amélioration de la qualité des
produits et/ou services de l’entreprise. Il a également comme
objectif d’optimiser les processus et de contribuer ainsi
à l’amélioration opérationnelle de l’entreprise. À ce titre,
36
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
la fonction QSE est spécialiste des méthodes et outils de
contrôle, de mesure, d’optimisation et d’amélioration.
Garant du respect des réglementations et des normes,
l’expert technique s’assure de la sécurité, de la conformité,
de l’absence de défauts, de l’offre de l’entreprise. Il est
responsable de la mise en place des démarches d’assurance
qualité afin de garantir la conformité et la fiabilité des produits.
L’analyse des réclamations clients, et plus largement de la
satisfaction des clients, est souvent aussi une de ses missions
importantes en lien avec le marketing.
Ce rôle d’expert technique est un rôle clé ; il s’agit de la
mission première et centrale de la qualité : garantir de bons
processus et de bons produits, en adéquation avec les
besoins des clients. La fonction QSE est ainsi productrice
de confiance en interne et en externe.
3.2.2Champion des salariés encourageant
le développement des compétences
et la motivation
La qualité dépend de l’implication du personnel et de son
envie de « bien faire », surtout dans le secteur d’activité des
services, souvent en interaction directe avec le client/usager
(mairie, hôpital, agence bancaire, etc.). De plus, les offres
de produits et de services sont en évolution constante et
rapide, nécessitant l’adaptation de tous. Dans ce contexte,
le développement des compétences et de la motivation du
personnel est devenu un des éléments clés de la qualité.
Penser les contributions de la fonction QSE à la création de valeurs 37
La qualité est au cœur de la vision processus et des
démarches d’amélioration continue. En tant que « champion
des salariés », la fonction QSE doit passer du respect des
procédures à l’amélioration continue des processus, en
faisant partager sa vision transversale et en donnant du
sens aux opérationnels. Par sa maîtrise des démarches et
outils de résolution de problèmes, elle a un rôle de formation
pour faire monter en compétences les opérationnels et
un rôle d’animation des chantiers d’amélioration continue.
Elle peut aussi contribuer à valoriser le savoir-faire et les
compétences des collaborateurs. La qualité apparaît alors
comme un état d’esprit à généraliser pour en faire un levier
de changement, d’adhésion du personnel et d’amélioration
du dialogue social.
Les processus sont la base de l’apprentissage individuel et
collectif, car ils sont le lieu des interactions et des échanges
entre acteurs, échanges renforcés et multipliés par les démarches d’amélioration continue qui permettent la montée
en compétences des opérationnels. Les démarches d’amélioration continue favorisent une dynamique d’apprentissage
et de développement des compétences qui encourage tous
les employés à participer au maintien et à l’amélioration des
processus. Au-delà de ces démarches, la fonction QSE
peut animer des « réseaux apprenants », permettant aux
opérationnels de s’enrichir mutuellement par l’analyse de
leurs problèmes et le récit de leurs expériences en favorisant
la création de liens renforçant l’esprit qualité12.
12 Peter Senge, La cinquième discipline – Levier des organisations
apprenantes, First, 2010.
38
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
Le point de vue de…
Léopoldine Bachelard, directrice qualité, affaires
réglementaires et sécurité d’une entité opérationnelle d’Air
Liquide (membre du club Parcours Croisés Ariane)
Une fonction QSE très intégrée et opérationnelle sur le
terrain, championne des salariés
Léopoldine est arrivée à cette position il y a trois ans, après
une expérience d’ingénieur en recherche et développement
d’une douzaine d’années qui lui a permis d’acquérir une
solide expérience de gestion de projets et une forte crédibilité
technique.
Peu après sa prise de fonction, elle s’est retrouvée pilote d’un
projet d’excellence opérationnelle (Lean Management) qui
a eu des impacts sur les changements de comportements
et qui a sensibilisé l’ensemble de l’entreprise à la qualité,
à l’attention portée au client de façon générale : « Avant,
l’amélioration continue se faisait, mais à une vitesse
beaucoup plus faible. » Ce projet a démarré la première
année par une analyse des dysfonctionnements, puis par
des chantiers (une douzaine chaque année) qui couvrent
aussi bien la production que la supply chain au sens large
ou encore la R&D. Chaque chantier est ciblé sur une
activité précise, puis dupliqué sur les autres activités.
Parmi les missions génériques de la fonction QSE, la
dimension d’agent de changement a donc constitué
assez vite une dimension notable de sa fonction. Le
volet le moins développé est peut-être celui de la
stratégie qui toutefois inspire l’ensemble, car la qualité
est complètement intégrée au projet de l’entreprise. La
dimension du site (170 personnes) appelle aussi une
forte proximité avec le terrain qui facilite la synergie
Penser les contributions de la fonction QSE à la création de valeurs 39
entre les différentes missions : la dimension « expertise
technique », nécessaire compte tenu de l’activité de
l’entreprise, qui suppose une bonne connaissance des
produits et de l’environnement, se met en œuvre dans un
lien permanent avec les collaborateurs, pour les inciter
à faire les choses mieux, les aider à mettre en place de
nouveaux modes de fonctionnement et les soutenir au
quotidien. Tout cela est en lien. L’amélioration opérationnelle
est en partie la gestion du changement d’organisation,
mais en même temps, il faut bien accompagner les
équipes tous les jours. Il faut être sur les deux : « L’aspect
respect des normes est tellement imbriqué avec la façon
de travailler au quotidien que les opérateurs ne font pas
forcément la différence entre ce qui est de l’ordre de la
norme et ce qui est la bonne pratique au quotidien. »
L’insistance sur telle ou telle mission de la qualité évolue
dans le temps. Par exemple, l’introduction d’une nouvelle
norme crée une autre dynamique et implique d’autres
acteurs que les opérations qui sont essentiellement ceux
mobilisés dans l’amélioration continue. Le gros enjeu
est de comprendre le sens profond des sujets et de le
traduire dans les termes adaptés, en fonction du niveau
de maturité de l’entreprise, « de valoriser les contraintes ».
L’évaluation de la fonction QSE est toujours délicate à
conduire : « Mes objectifs sont des objectifs des autres
directions sur lesquels on prévoit, nous, qualité, d’apporter
un support particulier. » Au-delà des objectifs de résultats,
par exemple un taux de non-qualité, il y a la conduite
d’un processus qui produit des résultats à moyen terme.
Il s’agit de quelque chose de difficilement quantifiable.
Il faut valoriser le chemin accompli et pas seulement le
résultat.
40
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
3.2.3Agent de changement,
vecteur d’innovation organisationnelle
et managériale
Les problèmes de cloisonnement de l’organisation par fonction
et le besoin de réorganisation selon une vision processus de
création de valeur ou projets sont, depuis les années 1990, une
préoccupation constante des entreprises. Le reengineering et
aujourd’hui la transformation « digitale » sont des questions
vitales, devenues plus aigües avec le développement rapide
des technologies Internet et de la relation directe, personnalisée
avec chaque client. L’objectif est de ne conserver que les
activités créatrices de valeur et de rationaliser la chaîne de
valeur étendue, du client au client, avec une réorganisation,
une homogénéisation et une numérisation des activités et
des processus au niveau mondial.
Mais si la rationalisation des fonctionnements et le recours
aux nouvelles technologies sont nécessaires, elles ne
suffisent plus et l’innovation managériale est devenue un
domaine qui nourrit de très fortes attentes.
Selon Birkinshaw, Hamel et Mol13, « l’innovation managériale
est l’invention et la mise en œuvre d’une pratique, d’un processus, d’une structure ou d’une technique de management,
nouveaux par rapport à ce qui est connu dans l’objectif de
mieux atteindre les buts de l’organisation. » Elle est motivée par une volonté d’amélioration de la performance de
l’entreprise. Parmi les innovations managériales les plus
connues, on peut citer : la structure matricielle de la Nasa, la
13Julian Birkinshaw, Gary Hamel, Michael J. Mol, “Management innovation”,
Academy of Management Review, 2008, p. 825.
Penser les contributions de la fonction QSE à la création de valeurs 41
méthode 6 Sigma en 1987 chez Motorola et le management
par la qualité totale.
Cette définition indique que l’innovation managériale peut être
source de création de valeur et d’avantage concurrentiel. Par
exemple, le Lean Management, qui découle des principes
et démarches du système de production Toyota, est une
innovation majeure, qui a conféré à l’entreprise Toyota un
avantage concurrentiel exceptionnel et durable, innovation
que quasiment toutes les entreprises essaient d’imiter depuis
les années 1990.
Même quand l’entreprise adopte des modèles inventés par
d’autres, la transformation de l’organisation et la gestion
du changement sont des éléments clés de la réussite et la
fonction QSE peut apporter son expertise et sa connaissance
transversale de l’entreprise à ces démarches.
3.2.4Partenaire stratégique accompagnant
la mise en œuvre des politiques d’entreprise
En tant que Partenaire Stratégique, la fonction QSE doit
tendre ses efforts vers le déploiement de la stratégie de
l’entreprise. Au niveau central, elle propose une stratégie
qualité et des plans d’action en alignement avec la stratégie
et contribuant à l’atteinte des objectifs ; elle veille également
à ce que les éléments essentiels de la qualité et les attentes
des parties prenantes soient bien pris en considération dans
les politiques de l’entreprise. Sur le terrain, elle s’efforce
d’aligner démarches et pratiques qualité avec les grandes
orientations stratégiques.
42
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
Le point de vue de…
David Charbonnier, directeur de l’innovation et de la
transformation, Manpower France
Manpower : la qualité au cœur de la transformation
(Synthèse de la table ronde lors de l’événement interclubs
Parcours Croisés, 9 avril 2015 – Manpower France est
représenté dans le club Élysées par Claire Jany, chef du
service qualité de service et amélioration continue)
Manpower France, ce sont 700 agences de travail temporaire
et 50 cabinets de recrutement. L’équipe qualité appartient à
la direction de l’innovation et de la transformation.
En vingt ans, la qualité, considérée parfois comme trop
bureaucratique, a connu une véritable révolution et est
aujourd’hui au centre de la transformation. Elle s’approprie
désormais de nouveaux sujets : simplification et efficacité
des processus souvent trop complexes, amélioration de
la satisfaction client, amélioration continue, alignement
stratégique, etc.
Depuis deux ans, une nouvelle équipe de direction a lancé
le plan stratégique « Envergure 2016 » visant à redéfinir le
business model de l’entreprise et développer une véritable
culture de service, principal levier de différenciation pour les
clients (les entreprises utilisant les services de Manpower) ;
la qualité est un axe à part entière de ce plan au même titre
que le marketing, les ressources humaines, etc. Auparavant,
politique qualité et stratégie d’entreprise étaient dissociées,
maintenant, il y a fusion : la qualité est un des axes de la
stratégie.
Penser les contributions de la fonction QSE à la création de valeurs 43
Un des chantiers de la qualité a été : « Comment dynamiser
la qualité client ? » au niveau de l’entreprise. Un baromètre
annuel BVA de 100 pages était bien discuté quinze minutes
au CODIR, mais c’est insuffisant ! Un repositionnement au
plus près du terrain, centré sur la VOC (Voice Of Customer),
a été opéré avec :
–– Des mesures qualité ramenées au niveau opérationnel de
chaque agence : tous les mois, chaque agence discute
avec ses clients, les clients évaluent leur satisfaction
et le Net Promotor Score est suivi tout particulièrement.
« La VOC (Voice Of Customer) est un levier puissant pour
faire bouger les choses ».
–– Chaque agence formalise un plan d’action (Roadmap).
Ce plan d’action est discuté et suivi par le N+1. Il s’agit
d’un réel pilotage de la satisfaction client qui est suivie
dans toutes les instances de pilotage.
–– Une fois par an, un questionnaire téléphonique est
proposé à 10 000 clients (durée = 20 minutes avec
5/6 thèmes dont une évaluation par rapport à la
concurrence). Un plan d’action client par client est
ensuite conduit par chaque agence.
Un autre constat a été : « La stratégie ne descend pas
au niveau des agences ! » Pour y remédier, le nombre de
niveaux hiérarchiques a été réduit à trois et un projet a
été mené afin que la vision de la direction générale soit
diffusée et suivie dans toute l’organisation. Pour cela,
chaque entité doit suivre trois KPI (Key Performance
Indicator) à trois ans : profit, part de marché et croissance
44
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
des recrutements. Ces objectifs sont visualisés dans
chaque agence sur un panneau « Envergure 2016 »
(management visuel) et chaque agence fixe sa façon
d’atteindre progressivement ces objectifs.
Le travail de l’équipe qualité est d’accompagner cette
transformation en décloisonnant l’organisation, en
mettant en place des processus de bout en bout jusqu’au
client et en animant la qualité à tous les niveaux. La
fonction qualité est essentielle, car elle a une posture
neutre à même « de faire bouger les lignes dans
l’organisation, de faire travailler ensemble » afin de
développer une intelligence collective plus forte dans
l’entreprise.
3.2.5Positionnement des directeurs QSE
dans la matrice des contributions qualité
Chaque membre des clubs Parcours Croisés a positionné
dans la matrice ses contributions à la création de valeur
en donnant le pourcentage des activités de son service
dans chacun des quadrants ; des exemples de mission
illustrent ces activités. La figure 3.2 ci-après résume ces
positionnements individuels en donnant le minimum, le
maximum et la moyenne obtenus sur l’ensemble des
réponses. Il convient de noter qu’il s’agit d’une autoévaluation des directeurs QSE et que la répartition serait
sans doute différente si elle avait été faite par d’autres
fonctions ou par la direction générale.
Plusieurs enseignements ressortent de cette analyse et des
discussions des clubs.
Penser les contributions de la fonction QSE à la création de valeurs 45
Figure 3.2. Fonction QSE : les quatre positions clés
Aujourd’hui, le décideur qualité est plutôt positionné comme
expert technique que comme partenaire stratégique ou
agent de changement. Mais la répartition des activités est
différente, selon :
–– la définition de la fonction (direction de la qualité / direction
QSE / qualité et RSE / direction qualité et performance,
etc.) ;
–– le secteur : il y a une différence entre l’industrie et les
services, où l’introduction de la qualité est plus récente et
les attentes fortes, notamment dans les services publics ;
–– et, last but no least, le niveau de confiance du directeur
général !
Par ailleurs, le positionnement de la fonction QSE évolue
avec le temps, la maturité de la démarche qualité et les
46
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
enjeux de l’entreprise. S’occuper d’ISO est stratégique dans
certains secteurs et ne l’est plus dans d’autres.
D’autres domaines sont à investir et à développer : nouveaux
territoires à conquérir ; migrations possibles du bas (le
quotidien) vers le haut (le stratégique). Ces évolutions ne
remettent pas en cause les basiques de la fonction QSE
qui ont parfois migré vers les opérationnels14. Si l’expertise
est un domaine de légitimation qui permet d’aller de l’avant,
se situer en « champion des salariés » est un moyen pour
faire prendre de la hauteur à la qualité.
Il ressort de cet ensemble que la fonction QSE est aujourd’hui
à la croisée des chemins et en recomposition. Dans tous
les cas, elle est plus facilement valorisée quand elle permet
une optimisation chiffrée des coûts (par exemple, le projet
de simplification à l’ANFH, qu’Antoine Bouvy, responsable
qualité et membre du club Madeleine-Innovation Publique a
présenté aux membres de son groupe) ou encore lorsqu’elle
permet de mieux répondre à une contrainte réglementaire
impérative (par exemple : la maîtrise des risques majeurs
pour des installations classées).
3.3Des évaluations de la création
de valeur(s) différenciées
Selon Philippe Lorino15, « la performance de l’entreprise
est fondée sur le couple valeur-coût, mettant en relation la
14
15
89% des entreprises ayant répondu à notre enquête (voir annexe) sont
certifiées ISO 9001 depuis au moins trois ans.
Philippe Lorino, Méthodes et pratiques de la performance – Le pilotage
par les processus et les compétences, Éditions d’organisation, 2003.
Penser les contributions de la fonction QSE à la création de valeurs 47
valeur produite (valeur) et la valeur détruite (coût). Les deux
termes de ce couple sont indissociables (il ne s’agit, ni de
minimiser les coûts, ni de maximiser la valeur produite, mais
d’optimiser le rapport entre les deux). » La performance
est, par conséquent, ce qui contribue à améliorer le rapport
valeur/coût. Le mot valeur étant entendu comme réponse aux
attentes des clients ou parties prenantes ; ces attentes n’étant
pas directement explicites, elles doivent être anticipées,
traduites par la stratégie de l’entreprise en plans d’action
et objectifs. La performance consiste alors à atteindre les
objectifs stratégiques de l’entreprise.
Un dispositif d’évaluation des performances résulte d’une
démarche d’analyse qui pourrait s’articuler autour des
questions suivantes :
–– Évaluer quoi ? C’est-à-dire l’objet, ce sur quoi porte
l’évaluation.
–– Pourquoi ? À savoir la visée de l’évaluation qui correspond
aux objectifs, résultats normalement attendus des activités
ou du projet (le livrable).
–– Pour qui ? Pour quel client ou parties prenantes ?
–– Comment ? Quelles méthodes et modalités de mise en
œuvre ?
–– Qui ? Quels seront les évaluateurs ?
–– Quand ? Il s’agit de définir la périodicité de l’évaluation
(journalière, mensuelle, ponctuelle, etc.).
À partir des réponses à ces questions, une méthode et
des indicateurs de performance peuvent être établis selon
les situations. Par indicateur de performance, on entend
« une information devant aider un acteur, individuel ou plus
généralement collectif, à conduire le cours d’une action vers
48
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
l’atteinte d’un objectif ou devant lui permettre d’en évaluer le
résultat16 ». Il est d’usage de distinguer deux types d’indicateurs :
des indicateurs de résultats qui permettent de juger de l’atteinte
d’un objectif (exemple : taux de défauts) et des indicateurs
de processus ou de suivi qui s’attachent aux points clefs qui
seront suivis lors de la mise en œuvre de l’action (exemple :
suivi d’un processus par des cartes de contrôle).
La figure 3.3 résume notre analyse en croisant les
contributions de la fonction QSE à la création de valeur et
les modes d’évaluation. Elle peut aider à définir un dispositif
d’évaluation des performances et des indicateurs cohérents
et pertinents. Une explication détaillée des dispositifs
d’évaluation de la performance de chacun des quadrants
est donnée dans les paragraphes suivants.
Figure 3.3 Des évaluations adaptées à la nature des contributions
16 Ibid.
Penser les contributions de la fonction QSE à la création de valeurs 49
3.3.1L’amélioration produits-processus,
une traduction économique assez directe
pour l’expert technique
Ce domaine, relevant de l’expert technique, a fait l’objet d’une
attention soutenue. Les méthodes d’évaluation y sont nombreuses et généralement bien connues des professionnels.
On se centrera sur l’évaluation des coûts de non-qualité. Car
encore, peu d’entreprises font l’effort d’évaluer ces coûts
alors que cette démarche pédagogique de démonstration
peut engendrer une prise de conscience et se révéler un
puissant levier d’une dynamique durable d’amélioration des
performances. Le témoignage à ce sujet de Daniel Blaie
(paragraphe 4.3) en est tout à fait exemplaire. Il montre
bien qu’une démarche collaborative engagée suite à cette
évaluation et impliquant l’ensemble des acteurs de la chaîne
de valeur (de la conception du produit, en passant par les
achats, la production et la commercialisation) est source de
création de valeur.
Des méthodes sont disponibles. Par exemple, la norme
NF X 50-126 (AFNOR, 1986) propose un guide d’évaluation
des coûts résultant de la non-qualité, permettant de
calculer le Coût d’Obtention de la Qualité (COQ). Très
orientée industrie, elle peut cependant être adaptée pour
les services.
50
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
La norme NF X 50-126 – 1986 :
guide d’évaluation des coûts résultant de la non-qualité
Calcul du COQ (coût d’obtention de la qualité) = coûts de nonqualité + coûts des contrôles.
Coûts de non-qualité (pertes subies) :
-- Coûts des anomalies internes : anomalies au niveau des
prestations réalisées, erreur de définition, de spécification
du besoin client, coûts des pannes équipements, pertes dues
aux achats inemployables, coûts de rotation du personnel,
absences, accidents du travail, non-respect des délais, etc.
-- Coûts des anomalies externes : réclamations clients, coûts
de la garantie, remises ou ristournes, pénalités de retard, etc.
Coûts des contrôles (dépenses consenties) :
-- Coûts de détection : coûts des contrôles lors de la réalisation
des prestations, acquisition du matériel de contrôle, frais
d’étalonnage, durée des opérations de contrôle.
-- Coûts de prévention : contrôles de réception, contrôle
des processus, évaluation des fournisseurs, entretien préventif,
formation, etc.
D’autres coûts résultant de la non-qualité sont plus
difficilement quantifiables : perte de clients (évaluable par le
manque à gagner au niveau de la marge), impact en termes
d’image, détérioration du capital confiance de l’entreprise, etc.
Le calcul des coûts utilise une approche analytique et
des données existant dans l’entreprise. Il peut être fait en
collaboration avec le contrôle de gestion et d’autres services,
et alimenter un tableau de bord.
L’amélioration continue est le moteur de l’éradication des
dysfonctionnements par une action sur les causes racines,
Penser les contributions de la fonction QSE à la création de valeurs 51
permettant de faire rentrer la qualité et ses démarches dans
toutes les instances de l’entreprise (Design for Manufacturing,
Design for Six Sigma, etc.), source d’économies tangibles
(baisse sensible du COQ) et d’apprentissage.
3.3.2Le développement des compétences
et de la motivation, plus difficile
à valoriser par le champion des salariés
En tant que « champion des salariés », la fonction QSE
travaille au développement de l’amélioration continue par la
montée en compétences et l’implication du personnel dans
cette démarche. Elle travaille également au développement
de la motivation et de l’engagement du personnel, en
collaboration avec les ressources humaines.
Les dysfonctionnements génèrent des coûts cachés :
absentéisme, accidents du travail, risques psychosociaux,
turnover, non-qualité, écarts de productivité, gaspillages
de toutes sortes (les fameux « muda17 » du Lean), etc.
Certains de ces dysfonctionnements peuvent être évalués
économiquement, comme nous l’avons vu ; d’autres sont
plus difficiles à cerner : démobilisation, découragement
du personnel, etc. L’amélioration du climat social peut se
traduire par moins d’absentéisme, moins de turnover, une
meilleure productivité, plus de motivation, mais le lien de
causalité est difficile à établir et le chiffrage économique
est très difficile. Néanmoins, un diagnostic peut révéler ces
dysfonctionnements par une écoute des acteurs, les chiffrer
et en analyser les causes et les responsabilités.
17
Tâche sans valeur ajoutée, gaspillage.
52
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
Certains auteurs proposent d’analyser la performance
individuelle des employés au regard de trois dimensions que
sont leur motivation, leur satisfaction et leur implication, ceci
par des enquêtes de satisfaction dont les résultats peuvent
être l’occasion d’une réflexion collective et donner lieu à la
mise en place de groupes de travail et de plans d’action.
De leur côté, certaines entreprises ont innové. Ainsi, la société
d’assurance suédoise Skandia, considérant les ressources
humaines comme le déterminant premier de la performance,
a cherché à mesurer le capital intellectuel dans un tableau
de bord appelé « Navigateur Skandia »18, par trois critères
de performance :
–– les compétences, mesurées par les connaissances et
le savoir-faire ;
–– l’attitude des employés, estimée par leur motivation, leurs
comportements ;
–– l’agilité intellectuelle, mesurée par l’innovation, l’imitation
et l’adaptation.
Ces critères sont évalués par un taux de performance sur
une échelle allant de « à risques » à « excellent ».
3.3.3 La performance organisationnelle,
une évaluation qui dépend des projets
de l’agent de changement
Certaines transformations organisationnelles sont assez
faciles à évaluer lorsqu’elles entraînent des gains de
18Leif Edvinsson, Michael S. Malone, Intellectual Capital – Realizing your
Company’s True Value by Finding its Hidden Brainpower, Collins, 1997.
Penser les contributions de la fonction QSE à la création de valeurs 53
productivité directs et immédiats. Cela a été le cas de
certaines démarches de reengineering et d’installation d’ERP
dans les années 1990-2000, qui se sont traduites par des
automatisations de services administratifs et des réductions
importantes d’effectifs. Il est alors possible de justifier ces
investissements en calculant leur rentabilité (valeur actuelle
nette, taux de rentabilité interne, ROI). Aujourd’hui, des projets
de transformation numérique apportent également des gains
de productivité importants, qui justifient les investissements
dans les technologies nouvelles.
Selon Cappelletti et Khouatra19, la réduction des dysfonctionnements, l’amélioration du fonctionnement (notamment
par l’adoption de nouvelles technologies) et de la qualité du
management sont sources de création de valeur organisationnelle, qui sera transformée en valeur économique (rentabilité) et/ou sociale (satisfaction du personnel en interne ou
RSE en externe), selon la stratégie de l’entreprise et selon
l’efficacité de la mise en œuvre des choix. L’amélioration se
traduit en valeur économique si elle entraîne une réduction
d’effectifs ou une augmentation du chiffre d’affaires, ou de
nouveaux services, etc. L’amélioration peut aussi se traduire
en valeur sociale par l’amélioration de la qualité de vie au
travail, la réduction du stress, la formation, du temps libre
pour des projets RSE et pour des projets d’innovation ou
par la diminution du temps de travail, etc. ; de nombreuses
possibilités au choix de l’entreprise pour satisfaire des parties
prenantes différentes.
D’autres innovations organisationnelles et/ou managériales
permettent la création d’un ensemble de compétences
19 Laurent Cappelletti, Djamel Khouatra, Comptabilité – Contrôle - Audit,
Tome 10, vol. 1, p. 127-146, 2004.
54
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
uniques pour l’entreprise, fortement créatrices de valeurs, une
combinaison difficile à copier mais aussi difficile à évaluer à
court terme. Par exemple, lorsque la méthode Kanban a été
inventée et mise en place par Taïchi Ohno chez Toyota, il eut
été difficile à l’époque de valoriser sa création de valeurs,
surtout en termes financier. Néanmoins, le pilotage de la
production en flux tirés a généré des gains de performance
considérables, en permettant d’une part une réduction
drastique des stocks et son impact en termes de BFR (besoin
en fonds de roulement) et, d’autre part, une production à la
commande assurant une grande flexibilité de la production
permettant de s’ajuster à la demande. La méthode Kanban est
un des éléments du Lean ayant contribué à la spectaculaire
croissance de Toyota qui s’est traduite en gains financiers
pour les actionnaires. Mais si Taïchi Ohno avait dû démontrer
lors de ses premières expérimentations la rentabilité de sa
méthode, il n’est pas sûr qu’elle eut été adoptée !
La création de valeur organisationnelle est donc la création
d’un potentiel stratégique à exploiter, qui contribue à la survie
et au développement de l’entreprise.
3.3.4La performance globale
pour traduire la valeur durable,
objectif du partenaire stratégique
Dans le quadrant « partenaire stratégique », les contributions
sont plus difficiles à évaluer en termes purement économiques.
Il s’agit plutôt d’apprécier en quoi les actions de la fonction
QSE contribuent à la performance globale de l’entreprise.
Le concept de performance globale apparaît avec la notion
de développement durable (sustainable development),
Penser les contributions de la fonction QSE à la création de valeurs 55
notion apparue dans les années 1980 et popularisée par
le rapport Brundtland, publié par l’ONU en 1987. Il s’agit
« d’un développement qui répond aux besoins du présent
sans compromettre la capacité des générations futures à
répondre aux leurs ». Après une fin du xxe siècle soumise
aux exigences des marchés financiers, la nécessité d’un
management socialement et écologiquement responsable se
fait sentir, un management qui a « des comptes à rendre » et
est évalué sur la triple performance économique, écologique
et sociale.
Il s’agit de créer durablement de la valeur avec une analyse
sur des horizons élargis : dans le temps (à long terme), dans
l’espace (au niveau mondial) et pour une notion plus large
du client, qui s’étend à l’ensemble des parties prenantes
(traduction de stakeholders), c’est-à-dire l’ensemble des
acteurs affectés par l’action de l’entreprise. Mais les
parties prenantes ont des objectifs parfois contradictoires ;
l’organisation, publique ou privée, en fonction de sa stratégie,
doit alors chercher un compromis afin de satisfaire au mieux
l’ensemble des parties prenantes. La performance globale
a par nature un caractère multidimensionnel, difficile à
évaluer. Elle s’apprécie avec des indicateurs dont le choix
et l’interprétation diffèrent selon les acteurs, leurs objectifs, la
période d’analyse, la sensibilité au risque et la responsabilité.
La norme ISO 26000 Responsabilité Sociétale reprend
d’ailleurs ce concept de performance globale : « Les
entreprises et les organisations n’opèrent pas dans le vide.
La manière dont elles s’inscrivent au cœur de la société et
de leur environnement est un facteur décisif pour la poursuite
de leurs activités. C’est du reste un paramètre toujours plus
utilisé pour évaluer leur performance globale. »
56
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
Les indicateurs purement financiers conduisent à se focaliser
sur le court terme et à se désintéresser de la performance à
long terme en matière d’amélioration continue, d’innovation,
de développement, d’engagement du personnel, etc. La
mesure de la performance globale est une tentative de
capter la capacité d’une organisation à créer de la valeur
pour l’ensemble des parties prenantes, dont les attentes
sont, comme nous l’avons vu, diverses et multiples. Une
performance jugée inadéquate sur un des aspects importants
pour une des parties prenantes entraîne des risques et peut
avoir un impact sur l’avenir de l’entreprise20.
Dimensions et critères de performance globale
4 axes pour évaluer la performance de l’organisation :
1. Pérennité de l’organisation :
-- qualité du produit/service ;
-- compétitivité ;
-- satisfaction des partenaires d’affaires.
2. Efficience économique :
-- économie des ressources ;
-- productivité ;
-- rentabilité financière.
3. Valeur du personnel
-- engagement des employés ;
-- climat de travail ;
-- rendement des employés ;
-- compétences des employés ;
-- santé et sécurité des employés
20 Sylvie Saint-Onge et al., Gestion des performances au travail,
De Boeck, 2007.
Penser les contributions de la fonction QSE à la création de valeurs 57
4. Légitimité auprès des parties prenantes :
-- respect de la réglementation ;
-- responsabilité sociale ;
-- responsabilité environnementale.
La performance selon le modèle d’excellence de l’EFQM – 2003
La performance est décomposée en :
-- résultats pour le personnel : satisfaction et motivation ;
-- résultats pour les clients : satisfaction et fidélité ;
-- résultats pour la collectivité : perception.
Tous les trois sont soumis à des mesures de perception et des
indicateurs de performance, contribuant aux résultats d’activité
financiers (financiers ou non, indicateurs opérationnels).
4
De l’expert technique
au partenaire stratégique :
action, évaluation
et valorisation
4.1 Faire prendre
de la hauteur à la qualité
en construisant la confiance
La qualité a développé une image ambivalente. Reconnue
comme stratégique il y a quelques années, en se développant
comme expert technique, spécialiste des normes ISO et
60
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
autres certifications, la fonction QSE s’est parfois coupée du
terrain et véhicule une image négative, comme le rappellent
certains acteurs qualité : « Je ne dis pas que je suis de la
qualité ! », « La qualité fait peur ! ». La qualité est vue dans
certaines entreprises comme une démarche coûteuse et
chronophage.
Pourtant, au-delà des procédures, des normes et de la
qualité produit, la qualité peut contribuer à la satisfaction de
toutes les parties prenantes et à la construction du capital
confiance de l’entreprise. Être moins dans la technique et
le court terme, regarder vers le futur et le stratégique, la
fonction QSE doit prendre de la hauteur et s’orienter vers
des projets à moyen et long terme. L’évolution est en marche,
la qualité s’oriente sur les axes : champion des salariés et
agent de changement.
Le cheminement conduisant de l’expert technique au
partenaire stratégique est représenté sur la figure 4.1 ciaprès. Construire la confiance est un préalable en agissant à
deux niveaux. Au niveau opérationnel, il s’agit de démontrer
l’utilité des actions qualité par des actions concrètes sur le
terrain, en collaboration avec les opérationnels, en contribuant
à la résolution de leurs dysfonctionnements et en montrant
les progrès réalisés. Une évaluation économique des
gains est un élément puissant de démonstration : « Ne pas
s’épuiser à convaincre, mais démontrer ! », « La preuve
par les faits ! », « Les lettres de noblesse se gagnent sur
le terrain ! » déclarent des directeurs qualité. La fonction
QSE puise sa légitimité dans son rôle d’expert technique et
gagne la confiance sur le terrain avec les opérationnels. Au
niveau stratégique, la position du responsable QSE évolue en
fonction de la confiance de la direction générale en montrant
le caractère incontournable des savoir-faire des acteurs
De l’expert technique au partenaire stratégique…
61
qualité et en répondant à ses attentes et aux attentes des
autres directions.
Figure 4.1. La dynamique d’excellence de la fonction QSE
Ensuite, il faut organiser le partage de la qualité. Tout d’abord,
coordonner une fonction centrale, en responsabilité de la
politique qualité et de son déploiement et des relais locaux,
en charge de la mise en œuvre de cette politique. Ensuite,
la qualité est répartie entre la fonction QSE et les autres
fonctions de l’entreprise : les éléments basiques de la qualité,
répétitifs sont délégués aux acteurs-métiers et encapsulés
dans les processus opérationnels, la fonction QSE gardant
les fonctions régaliennes, stratégiques, méthodologiques,
de conseil et d’animation de la politique qualité. La quête de
l’excellence opérationnelle invite les managers de proximité,
de terrain à prendre en charge les aspects opérationnels
62
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
de la qualité (conformité, amélioration continue, méthodes
de travail, etc.).
Figure 4.2. La qualité, l’affaire de tous, chacun dans sa responsabilité
La fonction QSE a vocation à devenir un partenaire
dans la mise en œuvre de la stratégie sur les aspects
processus, amélioration continue, transversalité, innovation
organisationnelle, management des risques, RSE, etc., en
collaborant avec les directions opérationnelles (production,
Supply Chain, R&D, innovation, achats, marketing) et les
autres fonctions support (système d’information et TIC,
ressources humaines, contrôle de gestion, etc.). Dans
certaines entreprises, la fonction QSE est devenue la
direction de la transformation et de la performance.
Réactions du Collège
des Ambassadeurs Parcours Croisés
Le Collège des Ambassadeurs est constitué d’un représentant
de chaque club (l’ambassadeur), des animateurs Parcours
Croisés et d’AFNOR Compétences. Il se réunit deux fois
par an pour coconstruire les thématiques transversales au
réseau Parcours Croisés.
De l’expert technique au partenaire stratégique…
63
Pour créer de la valeur, le directeur qualité doit :
–– aller à l’essentiel et sortir du vocabulaire normatif
qualité ;
–– rester proche du terrain pour garder le lien avec
la réalité ;
–– sortir de la notion de coût de non-qualité et de
« manque à perdre » pour aller vers le « plus à
gagner ».
Au-delà de l’évaluation, il faut « rendre évidente » la
création de valeur :
–– sortir de son rôle de « porteur de certification » pour
aller vers un rôle de conseil stratégique ;
–– l’évolution de l’ISO 9001 est positive en ce sens
–– anticiper le marché et prendre le « lead » par sa
connaissance, en amont des futures normes phares
de son marché.
–– oser apporter le changement ;
–– participer aux projets de transformation de
l’entreprise : agilité, digitalisation, etc., en raison
de sa vision transversale.
Ajoutons que pour évoluer dans la matrice, la fonction
QSE doit faire en sorte que les actions qualité contribuent
à l’atteinte des objectifs de l’entreprise. Pour cela, elle doit
partir de la perspective du dirigeant (ses priorités) et non de
celle de la qualité ; c’est la confiance du DG qui permettra
l’évolution. Ce qui suppose de :
–– savoir écouter les priorités stratégiques et la zone d’intérêt
réelle des dirigeants ;
64
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
–– savoir proposer au dirigeant de son entreprise de s’emparer
de la qualité comme d’un ensemble cohérent de leviers
pour conduire une dynamique de performance durable ;
–– développer de nouvelles compétences et renforcer les
compétences acquises.
4.2 Des compétences distinctives
à renforcer
4.2.1Des compétences qui ne sont
pas toujours clairement perçues
Les regards portés sur la fonction ne sont pas toujours très
pertinents, parfois décalés, souvent multiples. Il en résulte
une « galerie de portraits » que les dirigeants QSE évoquent
avec humour.
Le point de vue de…
Galerie de portraits de la fonction
Les membres des clubs Parcours Croisés se sont efforcés
de caractériser les regards portés sur la fonction QSE
–– Un joker curieux ?
« Quand un nouveau truc compliqué arrive : on le donne
au directeur qualité car il a l’habitude de dépatouiller des
trucs compliqués, de prendre des éléments un peu partout
et de faire un mélange pour ouvrir des portes ! Il n’y a pas
De l’expert technique au partenaire stratégique…
65
beaucoup de postes dans une entreprise avec quelqu’un qui
touche à tout : les problèmes clients, la gestion de crise,
l’accueil des inspecteurs, etc. Le directeur qualité arrive à
retomber sur ses pieds et la plupart des patrons attendent
cela de lui ! Il est peut-être moins précis qu’un directeur
de production, mais c’est un joker. »
–– « Un porteur de gros mots/maux ? »
–– « Beaucoup plus et autre chose… »
–– « Capacité à faire le lien entre ce qu’il voit et entend. »
Plus sérieusement, force est de constater que les objectifs
QSE anticipent sur les rôles et les missions. Ainsi,
l’événement Parcours Croisés d’avril 2015 a montré (sur
une centaine de dirigeants QSE interrogés par le système
de vote interactif QuizzBox) que :
–– 72 % ont des objectifs de résultats associés à leur
évaluation personnelle ;
–– 72 % estiment que ces objectifs sont en phase avec la
valeur ajoutée créée par la fonction.
Ces objectifs exigeants imposent une transformation des
rôles et missions, car :
–– 74 % concernent la mesure des apports à la transformation
de l’entreprise ;
–– et 40 % sont directement en rapport avec la mesure des
apports à la définition et/ou au déploiement de la stratégie.
Ces fortes attentes conduisent à s’interroger sur les
compétences à réunir pour s’y confronter.
66
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
4.2.2Les 4 C
Dans le cadre du pilotage de la performance, « une
compétence est l’aptitude à mobiliser, combiner et coordonner
des ressources dans le cadre d’un processus d’action
déterminé, pour atteindre un résultat suffisamment prédéfini
pour être reconnu et évaluable. Cette aptitude peut être
individuelle ou collective »21.
Pour avoir de la valeur, une compétence doit être distinctive :
elle doit permettre de se démarquer avantageusement de ce
que tout un chacun sait faire. Or, la fonction QSE a développé
des compétences distinctives (ce qu’elle sait faire mieux que
les autres fonctions dans l’entreprise) qu’elle doit renforcer
et mettre en avant (voir figure 4.3).
Figure 4.3. Les compétences clés : les 4 C
21 Philippe Lorino, Méthodes et pratiques de la performance – Le pilotage
par les processus et les compétences, Éditions d’organisation, 2003.
De l’expert technique au partenaire stratégique…
67
L’acteur qualité est au départ un contrôleur, un expert de
la conformité et de la mesure, un expert technique. Pour
évoluer et répondre aux défis d’aujourd’hui, il doit renforcer
et/ou développer de nouvelles compétences de veille,
d’écoute et de capitalisation. La fonction QSE a un rôle à
jouer dans la recherche d’équilibre entre parties prenantes ;
en développant les capacités d’écoute de leurs attentes
(voir paragraphe 2.2.4), elle contribuera à la satisfaction des
parties prenantes et apportera de la valeur dans les relations
entre ces parties prenantes.
Spécialiste de la résolution de problème, une autre voie de
développement est de renforcer ses compétences de conseil ;
la fonction QSE est devenue dans certaines entreprises un
prestataire interne aidant toutes les autres fonctions à traiter
des problèmes ou opportunités d’évolution.
La fonction QSE peut également renforcer ses compétences
relationnelles, de mise en connexion des parties prenantes,
d’animation de réseaux apprenants, de management de
projets transversaux, de transformation de l’entreprise et
d’innovation organisationnelle.
Ces compétences sont demandées par les entreprises.
Si la fonction qualité ne développe pas les nouvelles
compétences clés exigées, elle court le risque d’être
cantonnée au rôle d’expert technique et d’être supplantée
par d’autres (une direction de la transformation, de la
performance, de l’excellence opérationnelle ou de l’innovation
organisationnelle), en charge de ces nouveaux territoires
stratégiques.
68
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
4.2.3Des compétences en lien
avec la création de valeurs
pour l’ensemble des parties prenantes
Le schéma ci-après (figure 4.4) résume les compétences
clés de la fonction qualité, les actions types qui sont dans
le champ de la qualité et leurs créations de valeur.
Figure 4.4. Rôles de la qualité et création de valeurs
Réactions du Collège des Ambassadeurs
Parcours Croisés
Qualité et création de valeur(s) : quelles sont les
attentes de la direction générale selon vous ?
–– Réduction des coûts de non-qualité.
De l’expert technique au partenaire stratégique…
69
–– Prévention des risques (pouvant affecter l’image,
détériorer le capital confiance, avec des répercussions
sur les indicateurs financiers…).
–– Écoute des parties prenantes (des clients et de toutes
les parties prenantes internes et externes) et traduction
de leurs attentes.
–– Gestion des connaissances/montée en compétences
des collaborateurs.
–– Promotion de la culture d’entreprise/identité commune,
donner du sens.
–– Faire le lien entre le mouvement et la pérennité.
–– Amélioration de la qualité de vie au travail – fluidification
des processus, réduction des crises et zones de stress.
–– Favoriser l’intelligence collective.
–– Innovation managériale, accompagnement de la
transformation.
–– Alignement stratégique : participation à la stratégie et/
ou à son déploiement.
Forte de ses compétences réaffirmées, la fonction QSE peut
prendre toute sa place en tant que prestataire de service
interne dans des relations client-fournisseur avec les autres
directions ou de Business Partner.
4.3La fonction QSE
comme Business Partner
Devenir partenaire stratégique ne se décrète pas. Encore
faut-il qu’il y ait une stratégie, qu’elle soit formulée et que le
70
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
directeur qualité soit impliqué, d’une manière ou d’une autre,
dans la prise de décision stratégique.
Pour gagner sa place, la fonction QSE doit mettre en visibilité
ses actions, ses expériences. Les savoirs et savoir-faire
nécessaires aux missions de base sont généralement
reconnus mais méritent d’être énoncés (raconter des
histoires, animer des débats, des partages d’expérience,
des expérimentations, etc.). L’accent est à mettre sur les
compétences, savoir-faire et savoir être qui engagent la
préparation du futur et répondent aux attentes des parties
prenantes clés.
Par exemple, la qualité peut proposer une méthode pour
déployer les projets transversaux, les intégrer dans le
système, proposer des indicateurs de suivi et être un appui
au changement. Mais elle est encore peu associée à la
stratégie au départ et encore plus rarement à l’initiative des
projets stratégiques.
À l’avenir, la fonction QSE doit notamment être capable de :
–– déléguer aux opérationnels les activités récurrentes –
telles que le contrôle qualité – et mettre en place des
relais locaux ;
–– développer un rôle d’animation et de support ;
–– développer des coopérations horizontales et transversales :
réseaux de coordination, d’entraide, communautés de
pratiques, etc. ;
–– déceler dans l’évolution de l’environnement les facteurs qui
auront un impact sur la qualité ; intégrer le management
des risques dans la démarche qualité ;
–– traduire une stratégie d’entreprise en priorité et pratiques
QSE ;
De l’expert technique au partenaire stratégique…
71
–– donner du sens à la politique qualité (en passant du
« comment » au « pourquoi ») ;
–– aider les managers à prendre le virage d’un nouveau
management en identifiant les opportunités potentielles.
L’évolution de la fonction QSE en tant que « Business
Partner » ne peut être réalisée qu’avec le soutien de la
direction générale. Ce changement, en association avec
le directeur en charge de la fonction, doit être impulsé par
la direction générale, c’est une condition essentielle à sa
réussite.
Le point de vue de…
Daniel Blaie, consultant en qualité-performance-stratégie
(animateur du club « En Nord » à Lille)
La Qualité comme Business Partner, « facilitateur
d’émergence » !
Daniel a passé de nombreuses années chez Danone comme
directeur de plusieurs usines, puis directeur qualité, sécurité,
environnement et gestion de crise.
Il raconte comment, avec ses équipes, il a fait « passer
la qualité de back-office à front office », c’est-à-dire de
l’expert technique spécialisé sur la sécurité alimentaire
et les normes, au partenaire stratégique, contributeur du
développement du business.
Pour lui, il est primordial de travailler sur l’ensemble de la
chaîne de valeur étendue (du fournisseur du fournisseur au
client du client), car des problèmes qualité constatés en usines
ou même dans les magasins trouvent très souvent leurs
sources en marketing (brief produit inadapté, par exemple),
ou en conception de produits (problème de production,
72
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
de logistique non pris en compte, etc.) ou encore aux
achats (spécifications des composants, emballages non
adéquats, problèmes de fiabilité des fournisseurs, etc.).
Pour cela, la qualité doit « sortir du discours technique
qualité pour parler performance » et démontrer pour
mieux convaincre en :
–– valorisant les coûts de la non-qualité en euros pour
une prise de conscience collective et en affectant ces
coûts aux services responsables selon les causes
des problèmes ;
–– valorisant les pertes de CA résultant des pertes
de clients mécontents à partir de l’analyse des
réclamations clients (le pourcentage de clients ne
rachetant pas le produit peut être estimé à partir
de cette analyse).
La fonction qualité peut alors jouer un rôle d’agent de
changement en travaillant à la suppression des silos,
en mobilisant les acteurs sur l’importance de la chaîne
de valeur et de la transversalité dans l’entreprise, en
développant et en animant des équipes projets multimétiers dans lesquels la qualité a toute sa place.
Au fil de la transformation, la qualité « opérationnelle »
(au jour le jour) va progressivement s’encapsuler dans les
processus opérationnels de conception, de production,
d’achats, de supply chain. Les problèmes sont alors
résolus sur le terrain par les opérationnels eux-mêmes
et chacun est responsable de la qualité à son niveau.
La fonction qualité se recentre sur un rôle de Business
Partner en pilotant de nouvelles actions, véritablement
contributives au développement de l’activité de
l’entreprise (conduite ou participation à des projets de
De l’expert technique au partenaire stratégique…
73
développement et de création de valeur dans l’entreprise
dans le cadre du business plan à moyen et long terme).
Cette transformation prend du temps, car il s’agit avant
tout de changer les mentalités et la culture qualité au
sein de l’entreprise.
L’évolution attendue de la fonction est en parfaite adéquation
avec les évolutions de la version 2015 de la norme ISO 9001
(notamment : contexte de l’organisation et prise en compte
des parties intéressées, leadership, lien entre stratégie et
démarche qualité, performance, risques et opportunités,
connaissances organisationnelles…).
Partenaire stratégique, la fonction QSE devra donc se
repositionner sur les projets stratégiques façonnant le futur
de l’entreprise.
4.4 Investir les projets
porteurs d’avenir
4.4.1Un nouveau positionnement de la fonction
Le repositionnement de la fonction QSE comme Business
Partner va la conduire à piloter ou à participer à des projets
plus stratégiques et à se saisir des défis d’aujourd’hui. On
peut citer, sans être exhaustif (voir figure 4.5) :
–– l’excellence opérationnelle ;
–– le développement de l’expérience client ;
–– la révolution technologique et la transformation
numérique : spécialiste de la vision transversale à travers
74
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
la démarche processus, la qualité doit être associée à la
transformation numérique de l’entreprise et à l’innovation
organisationnelle ; elle interviendra comme agent de
changement ;
–– la configuration et le management de la chaîne de valeur
étendue : développement des démarches qualité avec
les parties prenantes sur l’ensemble de la chaîne de
valeur, de projets performances fournisseurs, des achats
éthiques, etc. ;
–– le développement durable.
Figure 4.5. Exemples de projets répartis par type de rôles
4.4.2Vers une qualité durable :
les nouveaux défis de la fonction QSE
Les systèmes qualité et les normes internationales
intègrent déjà la dimension environnementale. La série des
De l’expert technique au partenaire stratégique…
75
normes ISO 14000 propose un système de management
environnemental avec des exigences sur la politique
environnementale de l’entreprise, la mise en place d’un
programme avec des objectifs cibles et une procédure d’audit.
Comme la certification ISO 9001 qui s’est progressivement
généralisée dans les années 1990, la famille des normes
ISO 14000 (Systèmes de Management Environnemental) s’est
imposée ces dernières années. Les deux normes ISO 9001
et ISO 14001 ont été révisées et leurs dernières versions
ont été publiées en septembre 2015.
« La norme ISO 26000 – Responsabilité Sociétale a été
publiée en 2010 au terme de cinq années de négociations
entre un très grand nombre de parties prenantes dans le
monde entier. Des représentants des gouvernements, des
ONG, de l’industrie, des groupes de consommateurs et du
monde du travail ont été impliqués dans son élaboration. Elle
représente donc un consensus international. Elle contient
des lignes directrices et non des exigences. Elle ne se prête
donc pas à la certification, contrairement à d’autres normes
très connues de l’ISO. Elle permet en revanche de clarifier la
notion de responsabilité sociétale, d’aider les entreprises et
les organisations à traduire les principes en actes concrets
et de faire connaître les meilleures pratiques en matière de
responsabilité sociétale dans le monde entier. Elle vise les
organisations de tous types, quelles que soient leur activité,
leur taille ou leur localisation. » (www.iso.org).
Le développement durable semble suivre la même évolution
que le management de la qualité et devrait avoir un impact
important sur l’évolution des entreprises. On devrait assister
au passage d’une réflexion consistant à tenter de supprimer
a posteriori les externalités négatives générées par une
activité, à une prise en compte de ses effets a priori, lors de
76
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
la conception des produits et services. La conception essaie
de se projeter sur un horizon portant sur l’ensemble du cycle
de vie, y compris le recyclage des produits et processus ;
une réflexion calquée sur le cycle naturel de la vie. On parle
ainsi d’écodesign ou d’écoconception pour la conception
des produits, d’écologie industrielle, pour la conception des
processus de production22 et d’architecture écologique pour
la conception des sites et bâtiments.
Après les 5 zéros (0 stock, 0 délai, 0 défaut, 0 panne,
0 papier), les 4 R pourraient devenir le nouveau mot d’ordre
des entreprises : « Réduire, Réparer, Réutiliser, Recycler »
dans une boucle de progrès permanent et durable.
La problématique du développement durable interroge
directement les chaînes de création de valeur et leur
configuration : quelles articulations des unités de production
et réseaux logistiques, quels processus industriels, quels
choix de localisation, quels moyens de transport, etc. ?
Un autre thème concerne les relations au sein des réseaux
interentreprises et les problèmes d’éthique. De plus en
plus d’entreprises établissent des chartes concernant leurs
relations avec leurs partenaires et la sélection de leurs
partenaires sur des critères sociaux, conformes au respect
des droits de l’homme et au travail des enfants. L’Institute
for Supply Management a développé des principes et des
standards pour un comportement éthique au sein des Supply
Chain.
22 Henri Jorda H., Franck-Dominique Vivien, « L’écologie industrielle : une
stratégie pour le développement durable ? », in Jean-Paul Maréchal et
Bernard Quenault, Le développement durable – Une perspective pour
le xxie siècle, PU Rennes, 2005.
De l’expert technique au partenaire stratégique…
77
La fonction QSE peut être partie prenante de l’analyse
des risques et des choix dans la Supply Chain, choix
logistiques, choix des partenaires, respect des engagements
environnementaux et des politiques RSE.
4.5Évaluer pour évoluer :
pour un management global
du portefeuille qualité
Comme les autres fonctions support, la fonction QSE est
confrontée à la nécessité de justifier ses activités dans un
contexte de recherche d’économie. Le chapitre 3 a montré,
qu’indéniablement, la fonction QSE a du potentiel pour
contribuer à la création de valeur et que ce potentiel dépend
de son positionnement. Mais, dans une entreprise donnée,
qu’en est-il ? Centre de coût, la fonction QSE doit justifier
son existence et son budget.
Pour cela, une fonction QSE donnée doit démontrer ses
apports et leur adéquation aux besoins (voir section 4.5.1),
choisir avec soin ses actions (processus récurrents ou projets)
et les prioriser (section 4.5.2), puis évaluer avec attention
chacune de ses actions et leur contribution à la satisfaction
des parties prenantes (section 4.5.3). Plus globalement, une
fonction QSE doit veiller à aligner ses actions avec la stratégie
de l’entreprise et à équilibrer ses interventions dans les quatre
domaines clés de la matrice « Contributions – Qualité »
par un management du portefeuille qualité (section 4.5.4).
Enfin, la mise en place d’un tableau de bord prospectif est
un élément essentiel qui facilite le pilotage des actions et
leur mise en visibilité (section 4.5.5).
78
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
4.5.1Démontrer la qualité de la fonction qualité !
Selon la norme ISO 9001:2015, la définition de la qualité est :
« l’aptitude d’un ensemble de caractéristiques intrinsèques à
satisfaire des exigences ». Ce qui est traduit communément
par : la qualité est la satisfaction des besoins du client. Il
convient de se demander alors si les activités et les projets
de la fonction QSE correspondent bien aux besoins de ses
clients ?
L’évaluation de la qualité et de la performance d’une fonction
support pose trois grandes questions. Quel est le coût de la
fonction ? Quels sont ses apports, sa valeur créée ? Le rapport
valeur/coût est-il optimal ? Ce qu’on peut formuler aussi par :
des prestations les meilleures possibles au meilleur coût !
Pour évaluer une fonction support, qui est un centre de
coûts mais aussi un prestataire de services, trois regards
sont possibles :
–– celui du responsable de la fonction, qui se pose la question
du pilotage des activités et des projets de son service ;
–– celui des « clients » de la fonction, qui vont juger de
l’aide apportée vis-à-vis de l’atteinte de leurs objectifs,
de la réussite des projets et donner leur satisfaction de
la fonction QSE ;
–– celui de la direction générale, qui fera un bilan global des
apports de la fonction au développement de l’entreprise
au regard de ses coûts.
La fonction QSE doit donc démontrer :
–– La pertinence de ses actions : ses processus, ses projets
d’amélioration ou d’innovation sont-ils en adéquation avec
les besoins et avec la stratégie de l’entreprise ?
De l’expert technique au partenaire stratégique…
79
–– Son efficacité, à savoir l’atteinte des résultats attendus
par une évaluation des processus et des projets qualité
(voir 4.5.3).
–– Son efficience, à savoir l’utilisation de ses ressources la
meilleure possible.
Le Modèle d’Évaluation Fonctionnelle23 (MEF) propose, pour
mesurer la performance des fonctions support, le calcul d’un
taux de performance global qui est la moyenne des quatre
taux suivants, évalués sur une échelle allant de 0 à 100 :
–– le taux d’activité, qui compare les activités réellement
réalisées à un référentiel d’activités théoriques ;
–– le taux de compétence, qui évalue la capacité des
professionnels de la fonction à disposer des compétences
attendues ;
–– le taux de support structurel, qui compare le coût de
la fonction et de son dimensionnement avec des
comparaisons extérieures ;
–– le taux de satisfaction des clients internes.
Ces baromètres de performance sont établis avec des grilles
et des questions standards à adapter par chaque entreprise.
Le repositionnement de la fonction QSE en tant que Business
Partner peut faciliter sa justification « existentielle » par des
interventions de type client-fournisseur sur des projets et
avec des objectifs clairement identifiés. Alors l’évaluation de
la réussite des projets qualité et de la satisfaction des clients
justifiera en grande partie l’existence même de la fonction
qualité. Néanmoins, le choix des activités et des projets de
la fonction QSE reste crucial.
23 David Autissier, Yvon Mougin, Jacques Ségot, Mesurer la performance
de la fonction qualité, Eyrolles, 2010.
80
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
4.5.2Prioriser les actions qualité en fonction
des attentes des parties prenantes
Après la VOC (Voice of Customer), la VPP, « Voix des
Parties Prenantes » ! La fonction QSE sera d’autant plus
légitime et reconnue qu’elle répondra aux attentes des
parties prenantes. Pour cela, elle peut se servir de la boîte
à outils qualité, comme de la matrice IP « ImportancePerformance »24 , un outil qualité bien connu, adapté ici
de priorisation des actions, d’une part par rapport aux
attentes des parties prenantes et, d’autre part, en fonction
de la performance de l’entreprise comparée à celle de ses
principaux concurrents (voir figure 4.6). La difficulté peut être
de hiérarchiser les demandes des parties prenantes après
celles la direction générale, prioritaires. C’est la stratégie
de l’entreprise qui doit guider les choix.
Figure 4.6. Prioriser l’action : partir des attentes des parties prenantes
24Nigel Slack, “The Importance Performance Matrix as a Determinant of
Improvement Priority”, International Journal of Operations & Production
Management, 1994.
De l’expert technique au partenaire stratégique…
81
4.5.3Évaluer les projets qualité pour montrer
la satisfaction des « clients » et progresser
L’évaluation des projets qualité, par la fonction QSE et par les
clients du projet, est fondamentale au regard de la réussite du
projet en termes d’atteinte des objectifs fixés et de fournitures
des livrables et de la satisfaction du client du projet (une
autre direction, un fournisseur, un client externe, etc.) quant
au processus de conduite du projet et des interactions avec
les acteurs qualité. Le témoignage ci-après est tout à fait
exemplaire des démarches à implémenter.
Le point de vue de…
Claire Jany, chez Manpower depuis vingt ans, est chef du
service qualité de service et amélioration continue (membre
du club Parcours Croisés Élysées)
Évaluer la contribution de la qualité par le ROI, c’est
possible !
Pour elle, la fonction qualité est « le support du support »,
à savoir un prestataire interne, intervenant au sein de
l’entreprise dans des prestations de type client-fournisseur.
Chacune des interventions de son service est conduite de
façon rigoureuse comme un projet et formalisée dans une
proposition définissant le besoin du « client interne », les
objectifs, les livrables, le planning, les charges de travail
et les ressources mobilisées.
En fin de prestation, un questionnaire type de satisfaction
est rempli par le « client interne ». Son évaluation porte sur
différents aspects :
82
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
–– l’atteinte des objectifs (Q, C, D) du projet et la
livraison des livrables attendus ;
–– la conduite du projet : respect du planning, des délais
et organisation du travail ;
–– l’interaction entre l’équipe qualité et le « client » :
compréhension du contexte client et de ses
problèmes, échanges d’information, animation des
réunions, gestion des conflits, etc. ;
–– la satisfaction globale et la recommandation à un
autre service dans l’entreprise.
L’objectif de la fonction qualité est d’apporter de la
valeur en interne, car ce n’est pas l’équipe qualité qui
est en contact avec le client mais les équipes terrain (les
agences). Néanmoins, il est possible d’évaluer la création
de valeur de la plupart des projets par le ROI (Return
on Investment), car ces projets (comme l’amélioration
du taux de service client) génèrent soit des gains de
productivité, soit des gains en business, tous deux
valorisables économiquement.
4.5.4Manager un portefeuille qualité équilibré
Afin de favoriser sa mise en visibilité et asseoir sa contribution
à la création de valeurs, la fonction QSE doit gérer le
portefeuille de ses activités, processus récurrents ou projets,
et l’allocation de ses ressources (quels projets pour quels
objectifs ?). Des outils simples permettent d’y pourvoir.
On peut représenter les activités de la fonction et leur répartition
de façon à avoir une vue synoptique de l’ensemble du
portefeuille d’activités et de sa structure (voir figure 4.7 ci-après).
De l’expert technique au partenaire stratégique…
83
Figure 4.7. Manager un portefeuille de projets
Plusieurs symboles sont utilisés pour représenter le type
d’activités et le degré d’implication de la fonction QSE :
–– rectangle = activité récurrente de la QSE ;
–– rond = projet conduit par la QSE ;
–– triangle = participation de la QSE à un projet conduit par
une autre direction ou par la direction générale.
La taille des symboles est proportionnelle au coût de l’activité/
projet, aux ressources engagées ou au budget.
La force du « management visuel » n’est plus à démontrer.
Par conséquent l’utilisation de la couleur est recommandée ;
ici, des contraintes d’impression nous imposent un dégradé
de gris, moins visuel. La couleur indique la durée (ou la date
de fin) de l’activité :
–– gris = activité récurrente de QSE, pas de durée ;
84
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
–– rouge = projet de durée longue, supérieure à 1 an ;
–– bleu = projet de durée moyenne, de 6 à 12 mois ;
–– vert = projet de durée courte, moins de 6 mois ;
–– jaune = projet spécial, atypique.
Cette matrice est un outil puissant de discussion et de
négociation avec la direction générale, permettant des
arbitrages sur le choix des projets, la négociation et la
répartition des ressources, en adéquation avec les objectifs
stratégiques de l’entreprise. L’exemple proposé ci-dessus
montre un portefeuille bien équilibré, avec des projets qualité
contribuant à la création de valeur dans tous les quadrants.
Construire un système de pilotage de la création de valeur
revient à « construire un système de pilotage de la performance
(plans d’action, indicateurs organisés en tableaux de bord) et
tenter de comprendre selon quelles modalités d’action on peut
influer sur les résultats finaux et par quels outils informationnels
on peut évaluer l’action »25. Dans cette optique, il est important
que la fonction QSE gère l’ensemble de ses activités et projets
dans un portefeuille qualité, puis en évalue les performances
dans un tableau de bord.
4.5.5Vers un « quality scorecard » ?
Robert S. Kaplan, David P. Norton 26 , avec le tableau de
bord prospectif, insistent sur le fait que la performance
globale de l’entreprise résulte de multiples dimensions et
25 Philippe Lorino, Méthodes et pratiques de la performance – Le pilotage
par les processus et les compétences, p. 145, Éditions d’organisation,
2003.
26 Robert S. Kaplan, David P. Norton, “The balanced scorecard – Measures
that drive performance”, Harvard Busisess Review, vol. 70, n° 1, 1992.
De l’expert technique au partenaire stratégique…
85
ne peut s’appréhender correctement par les seuls indicateurs
financiers. Ils proposent donc quatre axes d’analyse selon
quatre perspectives : celle de l’actionnaire (résultats
financiers), celle du client (qualité de l’offre, satisfaction et
fidélité du client), celle des processus internes (productivité,
délais, réactivité, fiabilité) et celle de l’apprentissage
organisationnel (compétences, motivation, responsabilisation,
innovation et développement).
Du tableau de bord prospectif de l’entreprise peut-être décliné
un tableau de bord qualité (ou Quality scorecard) précisant
les objectifs, les plans d’action ou projets et les indicateurs
de performance de la fonction QSE en ligne avec la stratégie
de l’entreprise. Partenaire stratégique à l’écoute et montrant
les attentes des parties prenantes (internes et externes), la
fonction QSE doit veiller à ce que la stratégie de l’entreprise
intègre bien leur satisfaction et les besoins de transformation
de l’organisation.
L’objectif de ce tableau de bord est tout d’abord d’aider
le responsable QSE et les dirigeants à mieux aligner les
performances « qualité » et les actions en découlant avec
les objectifs stratégiques de l’entreprise. Ensuite, ce tableau
de bord peut servir d’outil de pilotage, permettant de suivre
l’évolution des résultats, de modifier si besoin les plans
d’action et l’atteinte des performances attendues.
Point de vue de…
Quelques membres de Parcours Croisés…
Les indicateurs, c’est compliqué !
« L’important n’est pas dans l’identification d’indicateurs
qu’on n’aurait pas su inventer et qu’il faudrait découvrir, mais
86
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
plutôt de s’assurer que les indicateurs existants sont bien
en lien avec la stratégie de que les indicateurs existants
sont bien en lien avec la stratégie de la communication,
qui peut être nourrie à partir de ceux-ci. Il faut être vigilant
sur le sens qui peut être donné par la fonction QSE à des
indicateurs qui, parfois, rendent compte des préoccupations
de la direction générale et ne touchent pas toujours les
opérationnels. En effet, la qualité peut apporter beaucoup
dans cette interface entre les directions générales et les
opérationnels. »
« Les difficultés rencontrées : aller jusqu’à l’évaluation
et la définition d’indicateurs. En effet, la valeur créée par
la fonction QSE se mesure en partie par la progression
des indicateurs des directions opérationnelles. Créer des
indicateurs centrant la qualité sur elle-même serait contreproductif au regard de sa finalité. »
« Face à ces difficultés, les décideurs QSE sont souvent
évalués sur des objectifs basiques (renouvellement de
certification, par exemple) qui ne correspondent pas à la
réalité de la valeur qu’ils apportent à l’entreprise. »
Le Quality Scorecard est présenté ci-après de façon
schématique (voir figure 4.8). Il est bien évident qu’un
projet donné un peu complexe a plusieurs composantes,
recouvre plusieurs natures et n’apporte pas un seul type
de contributions. Néanmoins, il peut être utile, en vue d’une
communication efficace, de considérer son orientation
prédominante : projet stratégique, projet organisationnel,
projet d’amélioration continue ou projet d’exper tise
technique (le portefeuille qualité permettant, lui, un meilleur
positionnement).
De l’expert technique au partenaire stratégique…
87
Les indicateurs de performance sont à discuter et à construire
au niveau de chaque entreprise. Généralement on retrouve
quatre catégories d’indicateurs :
–– des indicateurs de coût ou de ressources consommées
(nombre de jours/homme, % du budget de la fonction QSE) ;
–– des indicateurs de résultats, appréciant l’atteinte des
objectifs (efficacité) ;
–– des indicateurs de suivi : relatifs à l’action en cours pour
l’obtention des résultats ;
–– des indicateurs de performance globale, mesurant la
satisfaction des parties prenantes (la direction générale,
une autre direction cliente du projet, des partenaires
externes, etc.) et l’alignement avec la stratégie.
Des exemples illustrent des indicateurs possibles pour chaque
type de projet.
Figure 4.8. Structure possible pour un Quality Scorecard
88
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
Cette mise en lumière des actions, des projets, des objectifs
et des résultats ne peut que rendre légitime la fonction QSE et
valoriser ses activités. Les décideurs QSE ne sont-ils pas, en
définitive, dans l’ambition de valoriser plutôt que simplement
évaluer ? Évaluer, c’est regarder dans le rétroviseur, rendre
compte d’une valeur « déjà là ». C’est sans doute nécessaire,
mais pas suffisant. Valoriser, c’est créer de la valeur dans une
dynamique tournée vers l’avenir et les défis des organisations.
Se comparer aux meilleurs par des benchmarks ou la
participation à des prix Qualité, comme le prix EFQM créé
en 1992 ou encore le prix français de la qualité et de la
performance créé en 1993, peut être un formidable challenge.
Les modèles qualité, comme le modèle EFQM, obligent
l’entreprise à se questionner, à réaliser une introspection,
à se mettre en ordre de bataille et à formuler une stratégie
cohérente, déclinée sur l’ensemble de sa chaîne de valeur
étendue, en tenant compte de l’ensemble des parties
prenantes. Sur le site industriel de Bosch à Rodez, le lauréat
du prix France Qualité Performance 2012 affirme : « Cette
dynamique nous permet de démontrer notre capacité à
évoluer et de mesurer notre progression dans nos résultats
et nos pratiques.27 » Cette introspection est une occasion
unique, pour l’entreprise et l’ensemble de ses employés, de
progresser, d’améliorer ses performances, l’engagement de
son personnel et la valorisation de sa fonction QSE.
27 Les Échos, 28 novembre 2013.
Conclusion
La réflexion sur les parties prenantes conduit à réexaminer
la notion de création de valeur(s) en posant la question de
la finalité ou des finalités de l’entreprise : créer des profits à
court terme pour l’actionnaire ? ou créer durablement de la
valeur pour l’ensemble des parties prenantes pour la société ?
Il s’agit de rapprocher deux logiques d’action : la logique
marchande et la logique sociétale et environnementale, et
de passer du calcul purement économique au raisonnement
stratégique. « Le stratégique retrouve son plein exercice :
maintenir et développer, dans la durée, le potentiel de création
de valeur à l’égard des différentes parties prenantes, en
cultivant les interdépendances avec l’environnement, sans
toutefois sacrifier l’autonomie de l’entreprise.28 » D’ores et déjà,
quelques banques, des fonds d’investissement « éthiques »
ou « responsables » intègrent et valorisent, dans leurs
choix d’investissement, les dimensions sociales, sociétales
28 Alain-Charles Martinet, Emmanuelle Reynaud, Stratégies d’Entreprise
et Écologie, Economica, 2004, p. 146.
90
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
et environnementales. Des indices boursiers spécifiques
(Domini 400 Social Index, Dow Jones Sustainability Global
Index aux USA, ASPI en France, etc.) ont été créés dès les
années 1990.
Les entreprises hésitent encore. Mais certaines ont depuis
longtemps sauté le pas. Toyota, en sortant la voiture Prius
en décembre 1997, suite à une décision stratégique très
controversée de la direction de lancer le projet en 1995,
a vraiment pris une longueur d’avance par rapport à ses
concurrents sur le marché des véhicules hybrides, avance
qu’elle conserve encore aujourd’hui.
Le client était au cœur du « triangle d’or » qualité-coûtdélai, les parties prenantes sont au centre du carré vert
qualité-coût-délai-environnement, pour un développement
durable29. Il y a là un enjeu de première importance pour
la fonction QSE. Selon Patrick Gabriel30, il s’agit de passer
de la chaîne de valeur au système de valeur, à savoir un
sens commun de l’action et de ses finalités, un système
de production de sens qui crée une légitimité durable pour
l’entreprise. Il en résulte que l’achat n’est plus seulement
lié à la qualité du produit mais aussi au sens donné à l’acte
d’achat, le client acceptant de payer plus cher un produit
respectant l’environnement (recyclable, issu du commerce
équitable, etc.)31. Un effort de construction consensuelle d’un
29 Christine Triomphe, « 50 ans de Management de la Production : de la
Gestion de Production au Management durable de la chaîne de création
de valeur », in collectif, 50 ans de Management, Pearson, p. 181 à 219,
2006.
30 Patrick Gabriel, « Contributions du développement durable à l’élargissement
du concept de chaîne de valeur », in Baranger (Pierre) et collectif, La
chaîne de valeur, un concept démodé ?, PU Rennes, 2004.
31 André Boyer, « Éthique et chaîne de valeur », in Baranger (Pierre) et
collectif, La chaîne de valeur, un concept démodé ?, PU Rennes, 2004.
Conclusion91
sens collectif de l’action est à mener par les entreprises et
la société civile. La fonction QSE a un rôle crucial à jouer
dans cette évolution.
La chaîne de valeur de Porter peut alors être réexaminée en
identifiant les sources d’économie et de différenciation grâce
à l’environnement au sens large, afin de créer durablement
de la valeur. La protection de l’environnement peut être
source davantage concurrentiel si elle est monnayable et se
traduit par une augmentation des ventes ou une diminution
des coûts.
Maîtrise de l’information, des risques et des opportunités,
gestion des connaissances et des compétences, anticipation
du marché et innovation, amélioration de la qualité de
vie au travail, intelligence collective et implication des
collaborateurs… la fonction QSE peut intervenir sur de
nombreux leviers permettant à l’entreprise de prendre de
l’avance sur ses concurrents et limiter ainsi la capacité des
suiveurs à rattraper le retard et les gains d’expérience.
Au terme de cette réflexion, il est rassurant de constater
que les dirigeants QSE semblent bien en phase avec la
perception et les attentes de leur direction générale.
Le point de vue de…
Regards Croisés, de dirigeants sur la place de la qualité
dans la stratégie de leur entreprise
Philippe Barret, directeur général du groupe Apicil et
Claude Bercq, président du directoire de Condat ont accepté
de partager leur vision de la qualité lors d’une réunion du
club Parcours Croisés Confluence, dont sont membres
92
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
Stéphane Chabrier, directeur de la qualité et de l’excellence
opérationnelle d’Apicil et Jean Jocteur, responsable qualité
et amélioration continue de Condat.
Nous retraçons ci-dessous les points forts de leurs
interventions.
Débutons par une petite présentation…
Petite biographie qualité d’Apicil
À son arrivée en 2011 comme directeur général du groupe
Apicil, Monsieur Philippe Barret a souhaité initier une
démarche qualité. Fort de ses expériences professionnelles
précédentes, il a souhaité « clarifier l’organisation » en
ayant une vision commune et partagée de l’organisation.
Une approche intégrée a ainsi été développée sous le nom
de SMIR : Système de Management Intégré des Risques.
L’objectif était d’avoir une clarification sur l’organisation de
l’entreprise en évitant un foisonnement d’outils spécifiques
à chaque service. La démarche processus basée sur les
risques de l’organisation a servi de fil conducteur. Des outils
ont été mis en place en fonction des besoins de l’organisation
tout en tenant compte des priorités : certification de services
(EN 15838), certification ISO 9001, certifications du système
d’information (ISO 20000 et ISO 27001), référentiel
EFQM, démarche d’excellence opérationnelle, démarche
d’innovation basée sur les bonnes pratiques du référentiel
d’innovation participative Innov’Acteurs.
Petite biographie qualité de Condat
La société Condat possède une forte maturité dans le
pilotage de son système de management de la qualité.
Elle est passée d’une qualité orientée produit (basée
sur des contrôles) à de l’assurance qualité, puis à du
Conclusion93
management de la qualité. De nombreuses méthodes en
place sont jugées comme matures. La société s’intéresse
aujourd’hui au management de la performance, pour
trouver de nouveaux gisements de progrès, notamment
avec une plus forte responsabilisation des acteurs.
Une convergence de points de vue
Une conviction, des croyances… et surtout de la
réalisation.
Les deux directeurs généraux ne sont pas des « experts »
de la qualité et encore moins des normes de certification.
Ils appréhendent d’une manière générale le fonctionnement
des outils et des méthodes déployées sans en maîtriser
toutes les composantes. En revanche, ils possèdent tous
les deux de fortes convictions et sont convaincus des
effets bénéfiques des démarches qualité. Ils allouent les
ressources nécessaires pour le pilotage. Par exemple,
chez Apicil, l’équipe qualité comprend 6 personnes
et 50 référents pour un groupe de 1 300 personnes.
Pour la société Condat, une autre forme de ressource
peut être évoquée avec de nombreuses instances de
pilotage, notamment au niveau des projets qui mobilisent
la direction générale et le comité de direction. Autre point
important : chaque outil déployé doit répondre à un besoin
voire à une problématique précise. Par exemple, pour
Monsieur Philippe Barret, la démarche SMIR a permis,
entre autres, de clarifier l’organisation ; la démarche de
certification EN 15838 a permis d’améliorer la relation
client ; la démarche EFQM a permis d’améliorer la
dimension managériale ; l’excellence opérationnelle a
permis d’accompagner un programme d’amélioration
du ratio financier…
94
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
La qualité en lien avec la stratégie…
Il est comme une évidence pour les deux représentants
de la direction générale que la qualité doit contribuer au
déploiement de la stratégie au sein de l’organisation. Ils
partagent la même vision de faire progresser la qualité
sur l’axe « orientation stratégique/futur » de la matrice
d’Ulrich en développant les composantes « partenaire
stratégique » et « agent du changement », qui sont
respectivement évalués à 12 % et 17 % au niveau des
membres des clubs de Parcours Croisés.
Pour Monsieur Philippe Barret, la mise en place d’un
tableau de bord stratégique (sous le nom Mapicil) est
un outil utilisé en interne qui permet de « matérialiser »
et de suivre le déploiement de la stratégie au sein de
l’organisation. Il est à noter que ce tableau de bord
est structuré selon les principes de la BSC (Balanced
Scorecard) et qu’il fait l’objet d’une animation sous forme
de revues trimestrielles.
Pour Monsieur Claude Bercq, il est de la responsabilité
de la direction générale de bien définir la stratégie, pour
que celle-ci soit relayable et communicable au sein de
l’organisation et qu’elle soit connue des collaborateurs. Elle
doit également faire l’objet de mesures pouvant prendre
la forme de tableaux de bord qui permettent à chaque
service de mesurer leur principale raison d’être en lien
avec la stratégie. La stratégie fait l’objet d’une surveillance
par différentes instances : un comité stratégique
(réunion trimestrielle), un comité de direction mensuel
pour passer en revue les indicateurs du tableau de bord
du groupe et un COPIL (comité de pilotage) mensuel
permettant de passer en revue les projets du plan à
Conclusion95
trois ans (durée par projet = 30 à 45 minutes). Chaque
projet fait l’objet d’une présentation en moyenne chaque
trimestre, ce qui permet une responsabilisation du pilote
et un éclairage commun sur le projet pour chacun des
membres du comité de direction. Une expérimentation
est en cours au sein de la société pour mesurer la
satisfaction de la qualité relationnelle au plus près
des collaborateurs ainsi que sur les relations clients/
fournisseurs internes.
La qualité en immersion totale…
Autre point de convergence, la qualité doit être intégrée
dans le mode de fonctionnement de l’organisation et devenir
à terme « invisible ». Cette approche n’est pas synonyme
de disparition de la fonction qualité mais au contraire
d’évolution vers d’autres missions. Monsieur Claude Bercq
évoque, lors de sa présentation, la notion de « consultant
interne » devant accompagner les collaborateurs pour
« grandir ». Cette nouvelle approche nécessite une formation
des directions qualité pour être en mesure de jouer ce
nouveau rôle. Une autre relation est certainement à imaginer
entre la direction générale et la qualité.
L’innovation
L’innovation fait partie des orientations des directions
générales pour arriver à se différencier. La qualité n’est
pas épargnée de cette composante avec une volonté
qu’elle fasse également preuve d’innovation dans son
domaine d’activités. Cette forme d’innovation doit être
relayée par l’ensemble des acteurs, avec l’exploitation des
idées concrètes d’amélioration. Pour Monsieur Claude
Bercq, la fonction qualité « doit être un challenger pour
favoriser l’innovation ».
96
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
Le travail collaboratif, l’adhésion des collaborateurs,
l’implication… sont les atouts majeurs d’une démarche
qualité, qui doit être un vecteur pour faciliter la participation.
Des recommandations
Par Monsieur Philippe Barret (Apicil)
« Nous avons lancé notre démarche d’excellence
opérationnelle de manière très ciblée sur certains
secteurs. Il aurait été peut être préférable de lancer la
démarche sur l’ensemble de l’entreprise. »
« Grâce à notre démarche d’excellence opérationnelle,
nous sommes aujourd’hui en mesure de pouvoir chiffrer
le coût de chaque processus. »
« Il est important de privilégier le terrain… je ne veux
pas que le pilotage tue l’amélioration. »
Par Monsieur Claude Bercq (Condat)
« La qualité comme les fonctions marketing, ressources
humaines et le contrôle de gestion est en pleine transformation. »
« La direction générale n’est pas une partie prenante comme
les autres, elle représente toutes les parties prenantes. »
« La simplification est une orientation forte à prendre
en compte pour donner de la lisibilité. »
« Il faut accepter le regard critique… Mieux vaut avancer
dans le désordre que de piétiner dans l’ordre. »
« L’absence de décision est pire que tout… Il est rare de
prendre des mauvaises décisions… Cette absence de
décision s’explique souvent par le manque d’informations
qui permettent de se prononcer en toute objectivité. »
« Chaque collaborateur doit traiter les problèmes à son
niveau avec si nécessaire l’aide d’un médiateur (service
RH, qualité…). »
Témoignages
concrets de membres
et contributions
collectives de clubs
Les éclairages et témoignages suivants sont des illustrations
concrètes de la création de valeur perçue par les décideurs
QSE, membres de Parcours Croisés, qui ont alimenté les
travaux des chercheurs.
98
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
Connaissance des outils, valorisation
de l’intelligence collective et maîtrise
des bonnes pratiques : la fonction qualité
au cœur de la réussite du déploiement
d’un logiciel
Témoignage de Richard Carpanini, responsable qualité,
réseau APA (membre du club Parcours Croisés StrasbourgEurope) sur la mise en place d’un logiciel spécifique à la
gestion du traitement des réclamations.
 Le contexte du projet et ses enjeux
pour l’entreprise
Dans un contexte où la qualité de nos prestations est une
attente non discutable, où l’exigence du consommateur de
nos services augmente, où la communication va très vite,
où le bouche-à-oreille positif ou négatif se propage très
rapidement, il nous paraît essentiel de pouvoir identifier,
quantifier, suivre et répondre à toutes les réclamations
de nos clients, en respectant les exigences de la norme
NF Service pour les services certifiés. Le traitement et la prise
en compte des réclamations étaient jusque-là incomplets.
La mise en place d’un outil performant est donc devenue
nécessaire.
La gestion des réclamations est l’affaire de tous les acteurs
de notre réseau APA. Elle vise à être globale et doit couvrir
l’ensemble des activités.
Témoignages concrets de membres et contributions collectives de clubs 99
 Une organisation et une gouvernance assurées
par le service qualité du réseau
La direction générale a confié au service qualité la réflexion
et la mise en œuvre de la gestion du traitement des
réclamations ainsi que du suivi et du contrôle des risques
opérationnels.
Afin de faciliter le pilotage centralisé de cette gestion des
réclamations, un processus a été élaboré définissant
méthodes et moyens pour effectuer cette gestion. Une
formation de l’ensemble des salariés concernés par la gestion
des réclamations a été réalisée par le service qualité.
Le principe de ce processus a pour vocation d’indiquer le
fonctionnement du logiciel, mais également de pouvoir :
–– identifier les cas de réclamations isolées qui présentent
soit un effet financier ou réglementaire, soit un impact
d’image important ;
–– identifier les réclamations récurrentes déjà identifiées qui
sont en augmentation ;
–– identifier l’apparition de nouvelles causes de réclamations
et qui deviennent répétitives ;
–– assurer la traçabilité d’une réclamation ;
–– s’assurer que les solutions apportées ont répondu aux
attentes des clients ;
–– réaliser des statistiques sur la nature des réclamations,
l’évolution de leur nombre…
100
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
 La valeur ajoutée de la fonction qualité
dans le projet ?
Le service qualité (SQ) a la maîtrise de l’organisation du
projet par ses connaissances en termes de réglementation,
de normes et de pratiques.
Il est un service transverse, reconnu par les services de
terrain et les directions et constitue le lien entre les différents
services.
Le service qualité à la capacité d’optimiser le traitement
des « problèmes » (non - c onfor mités, anomalies,
dysfonctionnements, réclamations clients) au sein du réseau
APA, à savoir :
–– méthode de résolution de problèmes ;
–– hiérarchisation des problèmes ;
–– analyse des causes ;
–– recherche des solutions ;
–– mise en œuvre du suivi ;
–– outils d’animation du travail de groupe ;
–– mesure de la satisfaction auprès de nos clients par rapport
aux solutions apportées et leurs mises en œuvre.
Lors du déploiement opérationnel de l’outil de gestion du
traitement des réclamations, la contribution de la fonction
qualité a été déterminante dans la mesure où :
–– le service qualité a établi le cahier des charges en tenant
compte des besoins exprimés par la direction générale et
le président, de la norme et des exigences d’organisation
des services ;
Témoignages concrets de membres et contributions collectives de clubs 101
–– le service qualité a la compétence et la méthodologie
pour réaliser ce type de mission ;
–– le service qualité a fait le lien avec l’architecte informatique
et les services du réseau ;
–– le service qualité a été le seul référent évitant une
dispersion des remarques et des informations, ce qui
a permis un gain de temps dans leur collecte et leur
traitement.
 Contrôles internes et qualité
Un contrôle et une analyse mensuels sont réalisés par le
service qualité à partir de tableaux indicateurs centralisés
sur un serveur commun.
La mise en place d’un comité d’amélioration continue permet
aux différents acteurs d’apporter les commentaires sur les
résultats obtenus à travers le rendu de l’analyse réalisée par
le service qualité. Le but est de partager les solutions ayant
donné satisfaction aux réclamants.
Une enquête de satisfaction est menée en parallèle auprès du
réclamant après quinze jours, pour s’assurer que la solution
apportée réponde pleinement à ses attentes.
Dès lors, il a paru cohérent de renforcer les synergies entre
le service qualité et les autres services du réseau APA autour
d’une organisation et d’objectifs communs pour conjuguer
les efforts et optimiser les moyens.
102
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
 Les gains pour l’entreprise, notamment
sur le plan de l’intelligence collective
Le service qualité, de par son action transversale, à la
capacité de composer une équipe pluridisciplinaire dans
le but de valoriser toute la diversité des connaissances,
des compétences et des idées qui se trouvent au sein des
différentes équipes du réseau APA et d’organiser cette
diversité en un dialogue créatif et productif. Cette capacité
passe par un repérage des intelligences individuelles
nécessaires pour mener à bien un travail collectif avec une
répartition des savoirs.
Le service qualité a fait en sorte de fédérer les équipes
du réseau autour de ce concept centralisé de gestion des
réclamations. Le but étant que chaque acteur ait des activités
orientées vers les autres pour contribuer à un résultat collectif.
Le résultat collectif étant la résultante d’une meilleure
appropriation d’un processus par l’ensemble des salariés
concernés.
L’ensemble du projet a été testé et validé de manière
collective avant le déploiement par le terrain et la direction
générale.
Ce procédé permet de mutualiser les bonnes pratiques
professionnelles et d’identifier sur l’ensemble des antennes les
dysfonctionnements récurrents, permettant des propositions
d’actions correctives globales.
La centralisation permet à chacun et notamment aux
responsables de services et au service qualité, à tout instant,
de faire des statistiques, de faire un point…
Témoignages concrets de membres et contributions collectives de clubs 103
Apprendre, supporter, former, féliciter :
la fonction qualité contributrice
de la performance globale par son action
sur la culture de l’entreprise
Témoignage de Laurence Dujardin, responsable qualité,
Messier-Bugatti-Dowty (membre du club Parcours Croisés
Strasbourg-Europe) sur la mise en place du QRQC (Quick
Response Quality Control)
 Le contexte du projet
et ses enjeux pour l’entreprise
Afin d’améliorer significativement les performances de
l’entreprise et de mieux répondre aux attentes des clients,
notamment au niveau de la conformité des produits et des
délais, nous avons choisi de nous concentrer sur un point
où nous pouvons progresser : le traitement des problèmes.
Nous avions une méthodologie non aboutie sur la recherche
de cause racine et étions confrontés à un problème de
ressources, puisque la résolution des occurrences de nonqualité reposait essentiellement sur les personnels qualité.
La transversalité était insuffisante.
Notre ambition : aller vers une organisation dans laquelle
tout le monde détecte rapidement et traite durablement les
dysfonctionnements au quotidien, en faisant monter les
équipes en compétences et maturité.
Nos enjeux : améliorer la performance globale et la
satisfaction des clients par le pilotage de la résolution de
problèmes.
104
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
 Contribution et valeur ajoutée de la fonction QSE :
un changement de culture
La fonction QSE est le relais local, formé aux méthodes de
résolution de problème et à l’OJT (On Job Training). Elle est
moteur dans ce changement de culture qualité.
L’OJT est un des principes fondamentaux du QRQC. Cette
méthode démontre l’exemplarité du manager et met en avant
le travail de coaching de son équipe autour de deux axes :
–– sur un process précis : pour comprendre, détecter
les problèmes, vérifier l’efficacité en lien avec les
problématiques prioritaires de performance ;
–– de façon indépendante : pour détecter et susciter la
remontée de problème et améliorer la pertinence de la
détection.
Cela se traduit par une présence quotidienne auprès des
équipes sur le terrain du manager, et au travers d’un cercle
vertueux : apprendre – supporter – former – féliciter.
 Quels indicateurs pour mesurer
la création de valeur pour l’entreprise ?
Les indic ateurs de per for manc e sont choisis par
les opérationnels de chaque secteur et mesurés
quotidiennement. Ils correspondent à la performance à
améliorer dans le secteur concerné et s’articulent autour
de cinq axes : S (SSE) – Q (Qualité) – C (Coût) – D (Délai)
– P (Personnel).
Ils contribuent à l’amélioration de la performance globale.
Témoignages concrets de membres et contributions collectives de clubs 105
Faire évoluer la culture qualité au sein
d’une collectivité territoriale dans un service de
200 personnes, réparties sur plusieurs sites
Témoignage de Sylvie Lhomme, directrice des quartiers,
mairie de Lille (membre du club Parcours Croisés En Nord)
Faire évoluer la culture qualité sur une dizaine de sites de
manière simultanée, afin d’améliorer considérablement le
service rendu au public, est un défi relevé par la mairie de
Lille. Cette démarche, à l’initiative des cadres des mairies
de quartiers et soutenue par les élus, nécessitait d’intervenir
sur la motivation des équipes, la fierté du service rendu et le
sens donné à leurs missions. La fonction qualité, porteuse
de la démarche, s’est alors totalement positionnée comme
championne des salariés et agent du changement.
Sa maîtrise des outils de management a facilité le partage
transversal des bonnes pratiques, tout en sécurisant les
procédures et les actes, tandis que sa légitimité a été
indispensable pour permettre, en douceur, la remise en
cause individuelle et collective.
La réussite de la démarche est appuyée sur plusieurs
ingrédients indissociables :
–– l’écoute, l’empathie, la prise en compte des difficultés et
l’association des agents à la réflexion en vue de trouver
des solutions ;
–– la pédagogie et l’explication de la démarche ;
–– la création d’une vraie dynamique de groupe, la capacité
à révéler des talents et à progresser par l’exemple ;
–– la position humble et facilitatrice de la fonction qualité,
en aucun cas perçue comme « donneuse de leçons ».
106
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
Au final, outre une plus grande satisfaction du public, la
démarche a permis une réelle montée en compétences des
équipes en interne et l’amélioration de leur qualité de travail.
Les indicateurs de mesure de la satisfaction usagers, mis en
place à partir du référentiel Qualiville et d’enquêtes, montrent
une évolution positive.
Parallèlement, la fonction qualité a apporté son éclairage
vis-à-vis des autres directions. Elle a permis de développer
des réflexes communs, d’améliorer et d’harmoniser l’accueil
des usagers et de placer le citoyen au cœur des réflexions
organisationnelles de la mairie. Ces résultats laissent
entrevoir positivement l’augmentation du rôle de la fonction
qualité dans la définition puis le déploiement de la stratégie
de l’organisation.
Fusion-acquisition : un positionnement
incontestable de la fonction QSE
comme créatrice de valeur
Témoignage de Jean-Paul Vaurs, anciennement directeur
qualité et sécurité des systèmes d’information de Gfi
Informatique (anciennement ambassadeur du club Parcours
Croisés Élysées)
 Le contexte du projet et ses enjeux
pour l’entreprise
Le contexte économique du marché des ESN (entreprises de
services du numérique, ex SSII) est en perpétuelle mutation,
ce qui se traduit par de nombreuses fusions-acquisitions.
Témoignages concrets de membres et contributions collectives de clubs 107
Gfi Informatique a été et reste très active en termes de
croissance externe depuis de nombreuses années.
Chaque fois que tout ou partie d’une société est acquise,
la direction qualité se doit d’en incorporer les activités en
les ralliant au SMQ, par extension du certificat ISO 9001
du groupe Gfi.
L’enjeu est primordial pour l’entreprise, car de la bonne
intégration des nouveaux arrivants dépend une partie des
résultats de fin d’année pour le groupe.
De plus, le résultat de ces fusions-acquisitions est
généralement suivi de près par les investisseurs du marché,
les compétiteurs et bien sûr les clients, les collaborateurs
de Gfi et de la société acquise.
Au fil des années, s’est développé un véritable savoir-faire
dans un contexte RH parfois sensible.
Dans ce contexte, la réussite de l’intégration d’une acquisition
est une question de confiance mutuelle.
 L’alignement de la revue de direction
avec la stratégie de l’entreprise
Chez Gfi Informatique, la revue de direction a, dès 2008,
été alignée avec la stratégie de l’entreprise.
La revue de direction commence par un rappel de la stratégie
de l’entreprise de l’année écoulée, puis fait établir un bilan
par le président-directeur général des actions QSE qui en
découlaient, à l’aune de leur contribution à la stratégie.
De même, pour la planification de l’année à venir, la revue
de direction synthétise la nouvelle stratégie de l’entreprise
108
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
décidée par le P.-D.G. (vision future du marché, vision future
de l’entreprise), afin d’aligner toutes les futures actions QSE
avec cette dernière.
Exemple :
–– Planifier les enquêtes satisfaction client, en distinguant,
selon la stratégie : le TOP 10 des clients traditionnels
porteurs de la majorité du chiffre d’affaires mais aussi
les nouveaux clients ciblés.
–– Planifier les audits internes sur les nouveaux produits/
services porteurs de nouveaux marchés.
La stratégie de Gfi étant résolument tournée vers une
croissance externe maîtrisée, c’est dans ce contexte que
fin 2013, il a été décidé, en revue de direction, de formaliser
le processus d’intégration des sociétés acquises sur la base
du savoir-faire ISO 9001 de la direction qualité.
 Commencer par définir une politique
Nous avons commencé par définir, avec le président, une
« politique de fusion acquisition », en mettant les aspects
humains en priorité, au-delà des aspects « contractuels ».
Réussir l’intégration d’une nouvelle compagnie chez Gfi
signifie ajouter de la valeur au groupe dans une atmosphère
de confiance, selon une approche de partenariat.
Par ajouter de la valeur au groupe Gfi, nous entendons faire
prospérer :
–– les compétences des collaborateurs et des managers ;
–– le savoir-faire collectif ;
–– les produits, les projets et les services ;
–– les clients et les contrats.
Témoignages concrets de membres et contributions collectives de clubs 109
 Sortir du mode travail en « silo »
pour passer dans un mode « processus »
Une très grande expertise concernant l’intégration de
sociétés acquises existait au sein des fonctions de l’entreprise
(RH, achat, sécurité, qualité, juridique, finance, DSI…), en
commençant par celle du directeur des opérations, chargé
du pilotage d’ensemble.
Cependant, chacun avait pour habitude de travailler en
« silo », ce qui permettait d’envisager une piste de progrès
importante au niveau de la coordination d’ensemble.
L’interactivité entre les parties prenantes n’était pas
formellement coordonnée, il n’y avait pas de dynamisme
de coconstruction, ce qui pouvait paraître comme un frein
à la réussite commune.
Nous avons décidé de fonctionner en mode processus, afin
d’évaluer, en amont, l’énergie, les risques, les besoins, les
priorités.
De plus, le mode silo ne permettait pas de donner une
visibilité fiable et partagée de l’avancement vers la cible.
Enfin, le mode silo ne permettait pas de formaliser la boucle
d’amélioration à la fin de chaque intégration.
Nous nous sommes appuyés sur notre expérience ISO 9001
comme base de départ pour présenter, aux parties
prenantes, un processus simplifié d’intégration d’entreprise
acquise, puis nous l’avons enrichi de la connaissance de
chacun, en même temps que nous le mettions en œuvre
(coconstruction).
110
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
 Contribution et valeur ajoutée de la fonction QSE
Par sa fonction, la direction qualité rayonne sur toute
l’entreprise, ce qui la met en position naturelle pour fédérer
toutes les parties prenantes dans un projet commun
d’acquisition.
L’expérience acquise lors des extensions de certification a
permis d’amorcer le processus et de le « coconstruire en
marchant » avec les autres fonctions de l’entreprise.
 Une démarche en mode processus
Nous avons donc réuni l’ensemble des fonctions de support,
afin d’examiner, avec elles, les éléments clés de l’intégration
des sociétés acquises :
–– préparation (traitement des préconditions) ;
–– ralliements aux outils ;
–– ralliement aux processus.
 Sortir du mode travail en « silo »
Travailler sur les préconditions aide à sortir du mode « silo »,
par exemple :
–– L’informatique interne ne peut créer une adresse e-mail
tant que la paie n’a pas immatriculé les nouveaux arrivants.
–– La note d’organisation ne peut être modifiée tant que les
fonctions des nouveaux arrivants n’ont pas été alignées
par la RH avec les filières métiers.
Une fois que les préconditions sont établies, le ralliement
proprement dit peut commencer.
Témoignages concrets de membres et contributions collectives de clubs 111
 Une reconnaissance de la valeur ajoutée
de la fonction QSE
Enfin, la contribution de la fonction qualité à la création de
valeur s’est concrétisée par une demande du président :
préparer deux « slides » qui résument l’approche.
Ces deix slides sont présentées, entre autres, aux DRH
des entreprises en cours d’acquisition, lors de ce que l’on
nomme une « due diligence ».
Bien entendu, cette contribution n’est qu’un petit élément
des conditions de réussite de la contractualisation d’une
acquisition. Cependant, le sérieux de la démarche donne
confiance et permet d’engager des échanges sur un projet
organisé.
 Quels indicateurs pour mesurer la création
de valeur pour l’entreprise ?
Le président reçoit chaque mois un tableau de bord de
synthèse de l’avancement de l’intégration des sociétés en
cours de ralliement.
Voici deux exemples d’évaluation de l’avancement concernant
le processus de vente.
1. Ralliement aux outils :
–– entrer une nouvelle vente dans l’outil CRM de suivi des
ventes selon les règles groupe ;
–– être en régime établi pour entrer toutes les ventes dans
le CRM selon les règles groupe.
2. Ralliement aux processus :
112
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
–– avoir passé une proposition commerciale avec succès
lors de toutes les étapes du processus de vente qui se
trouve chez Gfi, sous contrôle du Business Committee
(comité de gestion des avant-ventes, qui examine aussi
les risques en avant-vente) ;
–– être en régime établi pour passer toutes les propositions
devant le Business Committee.
Bien que le P.-D.G. puisse comparer « instinctivement »
l’efficacité du processus, cela ne formalise pas concrètement
la création de valeur.
Ce qui suit n’est que l’état de nos réflexions à date sur la
formalisation d’indicateurs de création de valeur.
Un premier indicateur, en lien avec la politique de fusionacquisition, concerne la conservation des savoir-faire
de l’entreprise acquise via le maintien en place, voire le
rayonnement des « compétences clés ».
Ce rayonnement est évalué au travers des résultats des
actions des compétences acquises (par exemple : en termes
de création de valeur de type « innovation » et/ou « propriété
intellectuelle »).
Un autre indicateur, jugé pertinent, concerne le délai entre
l’officialisation de l’acquisition et la capacité du manager de
l’entreprise ralliée à passer en « Business Review » devant
le président, sur la base d’indicateurs extraits des outils Gfi,
calculés selon les règles Gfi.
Exemple :
–– chiffre d’affaires et marge calculés selon les règles Gfi ;
Témoignages concrets de membres et contributions collectives de clubs 113
–– chiffre d’affaires du portefeuille des ventes en cours,
pondéré selon leurs chances de succès et selon les
règles Gfi ;
–– taux d’activité.
 En guise de conclusion
Gagner quelques semaines dans l’intégration d’une acquisition
a des conséquences sensibles en matière de maîtrise du
chiffre d’affaires et de la marge du groupe qui acquiert.
Même si chaque acquisition se fait dans un contexte différent
(avec ou sans changement de convention collective, avec
ou sans changement de manager), le président a considéré
qu’il s’agissait d’un succès, de son point de vue mais aussi
avec indicateurs à l’appui.
Voici les éléments qui nous ont semblé déterminants lors
de ce projet :
–– le directeur qualité doit apprendre à communiquer avec
sa direction générale pour « parler le même langage »
(ne pas craindre de parler « business et finance ») ;
–– aligner les actions de la fonction QSE à la stratégie, ce
qui oriente la contribution de la fonction QSE à la création
de valeur ;
–– prendre le lead, en se servant de la revue de direction
comme outil pour propager la stratégie ;
–– intégrer le regard de la finance sur les finalités du projet ;
–– ne formaliser qu’au minimum le processus à déployer,
sur des bases solides, afin de le coconstruire avec les
parties prenantes lors de ses premières mises en œuvre
114
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
(le « Do – Check – Act ensemble » est plus important
que le « Plan – Plan –Plan ») ;
–– lever les freins au projet par une approche RH qui rassure
(rappel de la politique : au-delà des contrats et des clients,
il importe de faire prospérer les compétences acquises) ;
–– ne pas hésiter à intégrer, dans le SMQ, les meilleures
pratiques des entreprises acquises et le faire savoir ;
–– décloisonner les fonctions de support impliquées en les
fédérant (par son rayonnement sur tous les processus
de l’entreprise, la fonction QSE est la mieux placée pour
les fédérer) ;
–– travailler sur les préconditions, avec toutes les parties
prenantes, aide à sortir du mode « silo » ;
–– au-delà du savoir-faire, il faut développer le savoir-être et
le savoir-agir (approche « savoir-vouloir-pouvoir »).
La version 2015 de la norme ISO 9001,
une opportunité de renforcer la contribution de la
qualité à la création de valeur
Contribution collective du club Opéra (Paris)
Les membres d’Opéra ont retenu trois axes sur lesquels
travailler pour se repositionner.
 1. Repositionner la qualité au cœur des priorités
stratégiques de performance de l’entreprise
La qualité n’est plus cantonnée à une problématique de
conformité (assurance) mais de durabilité (aptitude à durer) :
le responsable in fine de la qualité, le dirigeant et la qualité
Témoignages concrets de membres et contributions collectives de clubs 115
(comme aptitude à satisfaire les attentes), devient d’abord
une affaire de stratégie.
–– Le champ du système de management s’élargit à
l’ensemble du domaine d’application de la stratégie.
–– Le système de management de la qualité et le système
de management de l’organisation se rejoignent.
–– La notion de risque est élargie aux risques stratégiques.
–– La performance est prise en compte.
La qualité, par son nouvel enjeu (la performance durable),
devient une priorité stratégique de l’entreprise… et du
dirigeant.
 2. Prendre une dimension opérationnelle
au travers du pilotage d’une performance durable
L’enjeu de durabilité de la performance donne à la qualité
l’exigence opérationnelle de challenger les actions entreprises
et leur résultat.
La durabilité de la performance, dans le modèle 2015,
résulte d’une dynamique créée entre l’action et le résultat
qui nécessite la mise en œuvre d’une triple démarche :
–– questionner l’origine de tout résultat atteint ;
–– questionner la pertinence d’une action menée par rapport
à la stratégie ;
–– piloter les tendances et les inflexions.
Ce questionnement donne au pilotage par la qualité la
dimension de priorité opérationnelle.
116
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
 3. Apporter de nouveaux leviers au pilotage
de l’entreprise
La recherche d’une performance durable passe par la maîtrise
de nouveaux leviers, dont la qualité a déjà l’expérience :
–– une vision du fonctionnement de l’entreprise au travers
de l’utilisation de ses capacités et de ses ressources ;
–– la mobilisation d’acteurs au service de l’amélioration ;
–– l’usage généralisé de méthodes déjà testées dans
des projets (exemple : l’implication des acteurs dans
la construction des dispositifs et des modes de
fonctionnement).
En apportant ces pratiques, la qualité devient, pour la
performance globale de l’entreprise, un atout essentiel.
En quoi le management des risques
contribue à la création de valeurs ?
Contribution collective du club Confluence (Lyon)
Selon la théorie des parties prenantes, la notion de valeur
est relative aux attentes des parties prenantes. En ce sens,
il n’existe pas une notion unique de création de valeur. Dans
ce contexte, le management des risques peut représenter
une véritable réponse opérationnelle pour le top management
comprenant la direction générale (au sens large du terme,
pouvant comprendre le CODIR et/ou le COMEX) et le
conseil d’administration. En effet, une telle démarche permet
d’identifier, de classer, de hiérarchiser les risques majeurs
dans différents domaines (stratégique, financier, clients,
activités opérationnelles…) et d’apporter des mesures pour
agir sur les effets et/ou sur la fréquence d’apparition.
Témoignages concrets de membres et contributions collectives de clubs 117
La réunion de parcours Croisés Confluence du 18 mai 2015
a permis d’identifier des facteurs clés de succès. Il a été
souligné l’importance de la « posture » dans la conduite de la
démarche des risques. En effet, toutes les organisations ne
possèdent pas le même niveau de maturité dans la prévention
des risques. Certaines organisations sont davantage
orientées sur la gestion des risques a posteriori (on traite
les problèmes quand ils arrivent) et d’autres sont plus dans
une logique de prévention (anticipation des problèmes). Il
a été souligné l’importance d’animer cette démarche en
évitant de faire une opération « coup de poing ». Il convient
de donner des rendez-vous périodiques pour s’assurer du
pilotage des risques. Il peut s’agir, par exemple, de réaliser
des « revues de risques » et/ou d’intégrer cette analyse
lors des revues de processus. D’après les échanges au
sein du club, il ressort un consensus sur le fait d’avoir une
approche globale des risques et ne pas se limiter à un ou
des domaines(s) en lien avec la qualité. L’idée est d’avoir un
guide permettant d’avoir une typologie des risques. Un autre
point également souligné lors de cette séance de travail
est la nécessité de faire perdurer la démarche, en évitant
d’avoir une opération de type « coup de poing ». La notion
de gouvernance devient un élément clé dans le dispositif,
en privilégiant deux activités : le monitoring et le reporting.
Pour intégrer l’approche risques dans le système de
management de la qualité, il a également été évoqué deux
approches possibles pouvant être complémentaires. La
première approche consiste à faire une analyse globale
des risques au niveau de l’entreprise et de dispatcher
les risques majeurs dans les processus. Cette méthode
peut être déployée dans des organisations de type TPE/
PME. L’autre méthode consiste à effectuer une analyse
118
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
des risques au niveau de chaque processus. Une telle
approche va permettre que la nature des risques soit fonction
de la typologie du processus. Par exemple, le processus
de pilotage de la stratégie va s’intéresser à des risques
stratégiques, financiers… le processus de management
des ressources humaines va s’intéresser à des risques liés
aux compétences, à la GPEC… le processus des achats
à des risques relatifs aux fournisseurs, aux délégations de
pouvoirs dans les achats…
Une démarche de management des risques est ainsi une
réponse opérationnelle à une préoccupation importante de
toute direction générale et/ou conseil d’administration. Elle
contribue en ce sens à la création de valeur et s’inscrit, avec
la version 2015 de la norme ISO 9001, dans le cadre d’un
système de management. La fonction qualité peut porter
ce « projet » seule ou avec d’autres fonctions comme : risk
manager, juridique, contrôle interne….
Analyse des causes et de leur élimination : quels
indicateurs pour mesurer l’efficacité
de la démarche ?
Contribution collective du club Pyramide (Paris)
Les principaux indicateurs utilisés par les membres du club
pour suivre les démarches de résolution de problème sont
les suivants :
–– non-récurrence du problème ;
–– diminution du nombre de problèmes ;
–– taux de réclamations clients ;
–– taux d’accidents du travail ;
Témoignages concrets de membres et contributions collectives de clubs 119
–– temps de résolution des problèmes ;
–– taux de clôture des fiches progrès.
Création de valeur et amélioration
de la satisfaction client : mode d’évaluation,
facteurs de réussite, pièges et compétences à
mobiliser
Première contribution collective du club de Chambéry
Mode d’évaluation de l’efficacité de la démarche (comment
sait-on que cela a réussi) :
Dans le témoignage présenté dans le club de Chambéry,
l’amélioration de la satisfaction client est montrée par une
enquête NPS régulière, qui tient compte des différences de
culture des personnes interrogées en fonction des pays.
Facteurs de réussite :
–– volonté et vision de la direction : il n’y a pas de lien direct
mesuré avec l’évolution du business, cela repose sur
la conviction de la direction que le NPS va alimenter le
business ;
–– stabilité du pilote du processus de mesure et d’amélioration
de la satisfaction, avec notamment le même organisme
depuis six ans, régularité de la mesure ;
–– le plan d’action en soutien et la réussite du processus
lui-même qui crédibilise le processus.
Pièges à éviter :
–– trop se centrer sur le produit et une approche technique
produit (le client étant plutôt orienté service) ;
120
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
–– faire des enquêtes trop fréquentes sur les mêmes clients ;
–– ne pas être réactif dans le rendu des résultats.
Compétences particulières mobilisées pour réussir :
–– organisme d’enquête = compétences spécifiques
externes ;
–– équipes en interne, avec des correspondants dans chaque
zone, qui sont des qualiticiens pour aider à définir et
soutenir les plans d’actions = des compétences sur les
méthodes et l’animation.
Création de valeur, tableaux de bord
et méthode KJ : mode d’évaluation,
facteurs de réussite, pièges et compétences à
mobiliser
Deuxième contribution collective du club de Chambéry
Mode d’évaluation de l’efficacité de la démarche (comment
sait-on que cela a réussi) :
–– le nombre de parties prenantes qui se sont approprié
l’outil ;
–– l’obtention de l’accréditation ;
–– les cadres de proximité sont devenus promoteurs de la
démarche ;
–– réussite d’une application qui a permis de réduire les
coûts d’assurance.
Facteurs de réussite :
–– contrainte par un aspect réglementaire ;
Témoignages concrets de membres et contributions collectives de clubs 121
–– penser à laisser parler les gens d’eux, partir du terrain et
de leurs problèmes ;
–– implication de la direction avec des objectifs fixés par
elle sur le sujet.
Pièges à éviter :
–– le changement de directeur général a secoué le système,
s’assurer que le système est indépendant des personnes
et personnalités ;
–– ne pas oublier d’embarquer les décideurs (officiels et
officieux) : les médecins ;
–– pérennisation = ne pas se reposer sur ses lauriers.
Compétences particulières mobilisées pour réussir :
–– pédagogie et communication (ancienne enseignante) ;
–– méthodologie ;
–– leadership et écoute.
Présentation
des auteurs
et des contributeurs
Le réseau des clubs
Parcours Croisés : membres,
ambassadeurs et animateurs
Les clubs Parcours Croisés sont des
lieux conviviaux d’échanges et de
montée en compétences, proposés
à des décideurs intervenant sur les thématiques qualité,
QSE, évolution des systèmes de management, excellence
opérationnelle, performance durable, transformation
organisationnelle, intelligence collective, production de
confiance, innovation managériale…
Ce concept de formation interactive permet à chacun de
progresser dans son expertise professionnelle sur des sujets
qui correspondent à ses attentes. Chaque club, accompagné
par un animateur dédié, construit son propre programme et
choisit les experts qu’il souhaite auditionner.
Chaque semestre, les représentants (ambassadeurs) et
animateurs de chaque club se réunissent pour évoquer
ensemble les orientations du réseau, les sujets transversaux
à développer et favoriser ainsi la construction collective de
réponses concrètes aux questions quotidiennes de leur
fonction.
126
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
Fin 2015, lors de la réalisation de cet ouvrage, le réseau
comptait une dizaine de clubs sur toute la France et environ
120 membres.
Contact :
Marie Berenger
Tél. : 01 41 62 84 92
[email protected]
Patrick Gilbert
Doc teur en sc ienc es de gestion,
habilité à diriger des recherches en
gestion et en psychologie, Patrick
Gilbert est professeur des universités
à l’IAE de Paris où il dirige le master
Management. Il a préc édemment
exercé des responsabilités de direction
dans de grands groupes industriels et
dans un organisme d’étude et de conseil. Ses recherches
actuelles portent sur le management de l’expertise ainsi
que sur l’instrumentation de gestion dans ses relations avec
la performance organisationnelle et les comportements
collectifs.
Il est l’auteur de nombreux articles académiques et d’une
vingtaine d’ouvrages, dont :
–– Sociologie des outils de gestion, avec Ève Chiapello, La
Découverte, 2013.
–– La gestion prévisionnelle des ressources humaines, La
Découverte, 2011.
Christine Triomphe
Docteure en sciences de gestion et
maître de conférences à l’IAE de Paris,
Christine Triomphe est responsable des
enseignements de management des
opérations (Supply Chain Management,
amélioration des processus, Lean 6
Sigma) et de management de projets
et innovation dans les cursus MBA à
Paris et dans les programmes internationaux. Elle dirige le
master MAE en apprentissage, Parcours Management de
Projets et Innovation et le MBA International Paris à Alger.
Elle est membre du laboratoire de recherche GREGOR ;
ses recherches, menées en collaboration avec de grandes
entreprises (Orange, La Poste, Renault, etc.) portent sur
les démarches et les instrumentations d’amélioration de
la performance opérationnelle et leur ancrage dans les
organisations et sur le management de la chaîne logistique
globale (Supply Chain Management).
130
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
Ses dernières publications :
–– « Lean Management et agilité dans la chaîne logistique
globale », chapitre 9, p 157 in Management des entreprises,
ouvrage collectif, Eyrolles, 2013.
–– « Management de projet : rationalisation ou agilité ? »,
chapitre 10, p 175 in Management des entreprises, ouvrage
collectif, Eyrolles, 2013.
L’IAE de Paris
Établissement public d’enseignement
supérieur, également connu sous le nom
de Sorbonne Graduate Business School,
l’IAE de Paris a été créé en 1956. Il a pour
cœur de métier le maillage de ses activités
de formation et de recherche, en relation
étroite avec le monde des entreprises. Ce maillage s’exerce
d’une part, au moyen d’actions de formation (masters,
MBA, doctorat) dédiées aux Executive Managers ou à des
étudiants en formation alternée de type apprentissage, d’autre
part, par le biais de la signature régulière de contrats de
recherche orientés vers l’étude de terrain et la prescription
managériale. L’IAE de Paris accueille chaque année près de
2 000 étudiants, en France et dans une douzaine d’autres
pays, et a formé plus de 23 000 cadres.
La chaire MutationsAnticipations-Innovations
Le s mut at i o ns que v ivent le s
organisations sont de plus en plus
systémiques, permanentes, multidimensionnelles. La question
de leur anticipation est au cœur des débats actuels, au plan
national comme au plan européen. Pour autant, l’anticipation
demeure difficile à mettre en œuvre. Quelles pratiques
innovantes peut-on observer et diffuser pour mieux prévoir,
préparer et donc mieux gérer les mutations ? En retour, le
contexte des mutations économiques peut-il favoriser les
innovations (technologiques, organisationnelles, sociales) ?
Sur ces sujets, le rapprochement des milieux professionnels
et de la recherche s’avère fécond. La chaire MutationsAnticipation-Innovations de l’IAE de Paris s’inscrit dans
cette dynamique.
AFNOR Compétences
Leader français des formations
sur les systèmes de management,
les méthodes associées et l’audit
Depuis plus de trente-cinq ans, la filiale formation-conseil du
Groupe AFNOR s’affirme comme le partenaire incontournable
des entreprises qui font le choix de la performance, de
la maîtrise des différents référentiels et d’une pratique
intelligente de la certification et de l’évaluation.
Les consultants-formateurs d’AFNOR Compétences sont des
professionnels reconnus. Ils pratiquent ce qu’ils enseignent.
Ils ont la capacité à développer chez les participants des
réflexes et des méthodes immédiatement opérationnels à
l’issue de la formation. Ils sont les garants de la montée en
compétences des membres de la grande communauté QSE.
AFNOR Compétences a lancé, en 2010, « Parcours Croisés »,
le premier réseau dédié à la communauté des décideurs QSE.
Fondé sur des « clubs », un esprit convivial, des animateurs
dédiés, des valeurs partagées, Parcours Croisés permet à
des professionnels de la fonction QSE de mieux exercer
136
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
leurs talents dans leurs organisations et de penser la fonction
QSE de demain.
Contact AFNOR Compétences
01 41 62 76 22
[email protected]
Contact Parcours Croisés
01 41 62 84 92
[email protected]
www.afnor.org/formation
Bibliographie
Albouy (Michel), « Théorie, applications et limites de la
mesure de la création de valeur », Revue française de gestion,
160 (1), p. 139-157, 2006.
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Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
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Vatin (François), Le travail et ses valeurs, Albin Michel, 2008.
Annexe
Résultats de l’enquête
Évaluation de la contribution
de la fonction QSE
à la création de valeurs
Pour contribuer à enrichir l’étude sur l’évaluation de la
contribution de la fonction QSE à la création de valeurs, un
questionnaire (9 questions) a été envoyé à l’ensemble des
membres du réseau de dirigeants QSE Parcours Croisés (une
centaine de personnes). Le taux de réponse est de 50 %.
Un résumé des réponses aux questions est présenté ci-après.
142
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
Comment, dans votre entreprise (ou votre organisation),
la fonction QSE peut-elle être la mieux définie ?
Réponses classées par ordre de choix (parmi 10 choix).
Un service d’assistance et de conseil
Un partenaire contribuant au développement du
business de l’entreprise
Un service ayant essentiellement un rôle de
coordination
Un service ayant un rôle essentiellement
centralisateur et régalien (édictant les règles) vis-àvis des autres services
Un service ayant des relations client-fournisseur
avec les autres services de l’entreprise
Un service livrant des prestations intermédiaires aux
services opérationnels
Un service dont le premier client est la direction
générale
Un centre de coût dont l’output ne peut être
valorisé en unités monétaires
Un service dont l’output ne peut être défini
Un service dont la contribution doit être évaluée en
euros
Classement
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
Annexe143
Dans votre entreprise (ou votre organisation), les
missions et tâches de la fonction QSE consistent-elles
surtout à :
Réponses les plus choisies, classées par importance de
choix (parmi 15 choix).
Inciter à développer la qualité
Produire des règles, des procédures applicables à
l’ensemble du groupe
Contribuer à accroître la compétitivité de
l’entreprise
Assurer la cohérence, la coordination de plusieurs
services
Alimenter l’état-major en données sur la marche de
l’entreprise
Améliorer la circulation de l’information au sein de
l’entreprise
Classement
1
2
3
4
5
6
Pour évaluer les missions et tâches de la fonction QSE,
les méthodes d’évaluation des performances appliquées
dans votre entreprise (ou votre organisation) consistentelles surtout à :
Réponses les plus choisies, classées par importance de
choix (parmi 17 choix).
L’évaluation par le supérieur hiérarchique
L’auto-évaluation
Préférer le développement d’une culture adaptée
à l’évaluation
Classement
1
2
3
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Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
Évaluer les coûts de la non-qualité
L’évaluation par les clients internes
Préférer le contrôle des processus à l’évaluation
L’évaluation par des experts
4
5
6
7
Quelles sont les principales compétences que doivent
réunir les acteurs de la fonction QSE :
Réponses les plus choisies, classées par importance de
choix (parmi 12 choix).
Promouvoir et faire vivre des démarches de progrès
Connaître le métier de l’entreprise, ses enjeux et
ses contraintes
Maîtriser les connaissances des principales
normes, des processus de certification ainsi que la
réglementation en matière de QSE
Mettre en œuvre des méthodologies d’étude et de
résolution de problème
Anticiper pour éviter les risques liés à la qualité
encourus par l’entreprise
Manifester une capacité d’écoute des individus et
des problèmes opérationnels
Analyser les environnements internes et externes
de l’entreprise pour en dégager les axes d’une
stratégie qualité
Contribuer aux transformations organisationnelles
de l’entreprise
Classement
1
2
3
4
5
6
7
8
Annexe145
Quels sont les facteurs qui permettent à la fonction
QSE d’être reconnue dans l’entreprise ? (5 choix
possibles, numérotez de 1, le plus important, à 5, le
moins important) :
Réponses les plus choisies, classées par importance de
choix (parmi 22 choix).
Le soutien de la direction générale
Une interaction permanente avec
les opérationnels
Une fonction QSE représentée au CODIR
Des projets en conformité avec la stratégie
de l’entreprise
Une adaptation aux demandes des utilisateurs
Des résultats simples
Classement
1
2
3
4
5
6
Quelles sont les actions principales de la fonction
QSE ? :
Réponses les plus choisies, classées par importance de
choix (parmi 14 choix).
Gérer des projets d’amélioration continue
Écouter les clients
Aider les autres directions opérationnelles ou
fonctionnelles
Faire de la veille sur les aspects QSE
Contrôler les performances
Classement
1
2
3
4
5
146
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
Quelles sont les actions de la fonction QSE qui
contribuent le plus à la création de valeur de l’entreprise
(réponses libres) :
Réponses données en premier par les répondants.
–– Écoute du personnel
–– Identification des points faibles de l’entreprise
–– Résolution des problèmes qualité clients
–– Animer l’amélioration continue auprès de la direction
générale et des managers opérationnels
–– Définition et communication de la Stratégie QSE
–– Alimenter la direction en indicateurs
–– Décrire et aider à documenter les processus
–– Mettre en place et maintenir un système de management
pertinent
–– Gérer des projets d’amélioration continue
–– L’engagement de la direction
–– Proposer à la direction générale une stratégie au service
du business
–– Aider à l’optimisation des processus de l’entreprise
–– Force de proposition
–– Réduction des non-conformités produits et/ou de gestion
de projets
–– L’amélioration de l’organisation interne
–– Promouvoir l’amélioration continue
–– Porter des projets d’entreprises
–– Conduire de projets d’innovation organisationnelle
Annexe147
–– Représenter le client dans l’entreprise
–– Évaluation de la performance des processus
–– Maîtrise des risques
–– Management de l’innovation
–– Des résultats visibles directs et indirects
–– Donner de la visibilité sur la performance de l’entreprise
(qualitative et quantitative)
–– Écoute client
–– Respect des règles et lois
Est-ce que votre entreprise est certifiée :
ISO 9001
Oui
= 89 %
Non
= 10 %
ISO 14001
Oui
= 55 %
Non
= 44 %
Oui
= 60.5 %
Autre
certification Non
= 39.5 %
Si oui, depuis combien
d’années :
-- Moins de 3 ans = 0
-- Entre 3 et 9 ans = 29,4 %
-- Entre 10 et 20 ans = 41,2 %
-- Plus de 20 ans = 29,4 %
Si oui, depuis combien
d’années
-- Moins de 3 ans = 4.8 %
-- Entre 3 et 9 ans = 66,7 %
-- Entre 10 et 20 ans = 28,6 %
-- Plus de 20 ans = 0 %
Si oui, depuis combien
d’années
-- Moins de 3 ans = 26 %
-- Entre 3 et 9 ans = 47,8 %
-- Entre 10 et 20 ans = 17,4 %
-- Plus de 20 ans = 8,7 %
Quels INDICATEURS DE PERFORMANCE retenir ?
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ISBN : 978-2-12-465528-1
www.afnor.org/editions
www.afnor.org/formation
-:HSMBME=[ZZW]V:
Une approche originale et impertinente
L’exercice de l’évaluation est un exercice sain et précieux, familier aux
décideurs de la fonction QSE, rompus aux évaluations externes et internes.
La « communauté » Parcours Croisés a donc naturellement choisi de s’y
prêter, convaincue par les « vertus de l’exercice ».
Le fameux adage bien connu « Évaluer/mesurer... c’est déjà progresser »
trouve ainsi une nouvelle application, qui concerne la contribution même
de la fonction QSE à la création de valeur de l’entreprise.
Confier à des enseignants-chercheurs d’une des meilleures universités
françaises, spécialistes de l’évaluation des fonctions de l’entreprise,
le soin d’interroger la fonction QSE et de confronter leurs approches à
celles des praticiens du réseau « Parcours Croisés »… la méthode est
originale, riche de promesses et le résultat séduisant.
Pas de vérité unique, mais de nombreuses pistes pour permettre à
chacun, dirigeant en réflexion sur la fonction QSE ou décideur en charge
de cette dimension du projet stratégique de l’entreprise, de construire
la nouvelle feuille de route de la fonction, de définir sa contribution à la
création de valeur et son dispositif d’évaluation associé.
Car poser la question de l’évaluation reste la meilleure façon de rendre
visible et partagée la création de valeur de la fonction QSE et constitue
donc une excellente « hygiène de questionnement », indispensable à tous
les tenants de la fonction.
P. Gilbert, C. Triomphe, Parcours Croisés
De « Gardien de conformité » à « Business Partner »...
Évaluez votre fonction Qualité Sécurité Environnement
Évaluez votre fonction
Qualité Sécurité Environnement
Patrick Gilbert
Christine Triomphe
Le réseau Parcours Croisés
Évaluez votre fonction
Qualité Sécurité
Environnement
De « Gardien de conformité » à « Business Partner »...
Quels INDICATEURS DE PERFORMANCE retenir ?